C’était de part et d’autre à qui aurait le plus tôt fait son trou pour tirer le premier sur l’ennemi.
Cependant il fut averti que ses ennemis avaient fait quelque profit de son séjour, et qu’ils avaient excité l’impatience du roi qui le désirait à La Haye et l’avait toujours fort pressé.
Bossuet meurt en combattant en écrasant Richard Simon, c’est-à-dire en repoussant la critique exacte, consciencieuse, qui se présentait sous la forme théologique, et il se flatte d’avoir fermé la porte à l’ennemi : la critique élude la difficulté, elle tourne la position ; elle s’élance à la légère, à la française, à la zouave, sous forme persane et voltairienne, et elle couronne du premier jour les hauteurs du xviiie siècle.
Jésus-Christ a changé le monde par l’Évangile ; quiconque n’écrit pas dans le sens de l’Évangile est l’ennemi de Dieu et des hommes, bien plus que la créature faible qui succombe à ses passions.
Il se compare tour à tour à Job sur son fumier, au lépreux dans sa tour, à Philoctète dans son île de Lemnos, — à Philoctète qui a gardé l’arc d’Hercule et qui pourrait s’en servir pour se venger : lui aussi, armé qu’il est du carquois sonore, il s’abstient pourtant de lancer à ses ennemis aucune flèche.
Ce rôle, la Revue des Deux Mondes, nous l’espérons bien, ne s’en départira pas désormais, et l’effet même de ces violences extérieures devra être de l’y faire viser de plus en plus : dire assez la vérité même à ses amis, ne pas dire trop crûment la vérité même à ses ennemis (avec de tels agresseurs cela mènerait trop loin), en un mot, ne pas trop oublier l’agrément, même dans la justice.
Si j’ai des ennemis parmi vous, je ne crains pas de les prendre eux-mêmes à témoin.
Du moment que Dieu n’est plus conçu comme un être à part et hors du monde, du moment qu’il est inséparable de la nature et de l’humanité, et qu’il se manifeste uniquement en elles et par elles, du moment enfin que le mal cesse d’être un principe positif ennemi du bien, dès lors l’homme n’a plus peur de Satan, de même qu’il n’a plus besoin de médiateur pour entrer en rapport avec Dieu ; la communication est directe, immédiate ; il sent l’influence divine dans chacune de ses relations avec les hommes et avec les choses ; il ne s’imagine aucunement devoir recourir à des envoyés mystérieux, à des anges ; et les anges, les envoyés mystérieux, les démons ne lui viennent pas.
Ce serait le seul moyen de confondre et de noyer adversaires et ennemis, les irréconciliables et les méfiants, dans le flot de l’approbation universelle.
Une voix de Stentor criant à la tribune : Caton est un contre-révolutionnaire, un stipendié de nos ennemis ; et je demande que la mort de ce grand coupable satisfasse enfin la justice nationale, ferait oublier l’éloquence de Cicéron.
En ce temps de guerre permanente, un seul régime est bon, celui d’une compagnie devant l’ennemi, et tel est le régime féodal ; par ce seul trait, jugez des périls auxquels il pare et du service auquel il astreint. « En ce temps-là, dit la chronique générale d’Espagne, les rois, comtes, nobles et tous les chevaliers, afin d’être prêts à toute heure, tenaient leurs chevaux dans la salle où ils couchaient avec leurs femmes. » Le vicomte dans la tour qui défend l’entrée de la vallée ou le passage du gué, le marquis jeté en enfant perdu sur la frontière brûlée, sommeille la main sur son arme, comme le lieutenant américain dans un blockhaus du Far-West, au milieu des Sioux.
Voilà ce que peut suggérer Rousseau, l’ennemi de Molière : en apprendrait-on autant chez les enthousiastes, qui débordent d’idolâtrie et de tendresse ?
Du Bellay et Ronsard ont à conquérir le terrain sur deux sortes d’ennemis : les ignorants et les humanistes.
Tout cela n’est qu’une phraséologie propre à ce siècle où les ennemis des religions ont eu presque tous la manie de fourrer partout le sentiment religieux.
L’État et le peuple romain se trompaient en attribuant aux chrétiens des crimes et des pratiques infâmes ; ils ne se trompaient point en les considérant comme des ennemis irréductibles.
Et c’est pourquoi d’en bas nous saluons ta gloire Et ton rêve vainqueur de l’ennemi meurtrier, Triomphal invité du Temple de Victoire !
Gustave Planche Malheureusement, l’incorrection et la prolixité ne sont pas les seuls ennemis de M. de Lamartine.
Que l’ignorance confonde l’homme de Lettres avec ces hommes livrés à la paresse sous le nom de repos, qui se dérobent à l’agitation générale pour vivre dans le desœuvrement, qui dorment mollement sur des fleurs, en s’abandonnant au cours enchanteur d’une riante imagination ennemie du travail, & amie de la paix, dont la longue carrière peut être considerée comme un doux rêve, & qui tombent dans les bras de la mort, sans avoir daigné graver sur la terre le souvenir de leur existence ; cette injustice ne m’étonnera point, elle sera digne d’elle : mais l’œil qui aura suivi les travaux de l’homme de Lettres jugera différemment, il le verra souvent insensiblement miné par de longues études, périr victime de son amour pour les Arts, tomber en poursuivant avec trop d’ardeur la vérité, comme l’oiseau harmonieux des bois tombe de la branche au milieu de ses chants, ou plutôt comme ces illustres Artistes dont la main intrépide interrogeant dans la région enflammée de l’air le phénomene électrique, couronnent tout à coup leur vie par une mort fatale & glorieuse.
Un des traits les plus plaisants de ce rôle qui nous reviennent à la mémoire est celui de ce capitan à qui l’on reprochait d’avoir laissé enlever sa maîtresse par les corsaires barbaresques, et qui répondait : « Debout sur la proue de mon vaisseau, j’étais dans une telle fureur que le souffle impétueux qui sortait de ma bouche frappant les voiles du navire ennemi lui imprima une impulsion si rapide qu’il fut impossible de l’atteindre7. » C’était là le ton ordinaire de ce personnage qui fut si longtemps applaudi sur tous les théâtres de l’Europe, et dont nous ne comprendrions bien le succès que si le règne des traîneurs de sabre recommençait parmi nous.
Le ministre qui a conquis la Tunisie et le Tonkin a été mille fois plus maltraité que le général qui a livré Metz et la France à l’ennemi ; on les a mis en parallèle comme La Bruyère a fait pour Corneille et Racine, et leurs crimes bien pesés et compensés, ce n’est pas le ministre qui a été trouvé le moins coupable… Il ne s’agit pas d’introduire ces gracieusetés dans les mœurs des lettres, de revenir au seizième siècle où, pour Scaliger, quiconque entendait autrement que lui Tite-Live était au moins un scélérat.
Aussi bien le fait que les moralistes convient les artistes à mettre l’art au service de la sociabilité indique assez que l’accord n’est pas fait dans l’ordre esthétique, entre les deux parties ennemies de notre nature : personnalité, sociabilité.
Bertrand est toujours en action ; tantôt il semble aux prises avec quelque ennemi extérieur, tantôt il dessine d’un geste de la main les figures qu’il étudie.
L’ennemi était toujours à dix lieues ; tous les ans on le voyait paraître, tous les ans il fallait aller guerroyer contre lui.
Les prêtres et les scribes, opposés à cette renaissance du prophétisme, et toujours ennemis des enthousiastes, le méprisaient.
Mais depuis la fin des Asmonéens, le rêve d’un descendant inconnu des anciens rois, qui vengerait la nation de ses ennemis, travaillait toutes les têtes.
Il ne suffisait pas encore d’y être aimable, il fallait l’être pour la société entière, et ne l’être pour personne en particulier ; il fallait aimer tout le monde, pour être aimée de tout le monde ; ne pas avoir d’amant, pour n’avoir pas d’ennemis ; ne pas faire un heureux, pour ne pas faire vingt jaloux et mille détracteurs.
La société de la révolution ne sera point vaincue, on peut l’affirmer sans hésiter ; il n’y a que les ennemis du christianisme qui puissent souhaiter de le voir se livrer à une aussi chimérique entreprise.
La crainte ne pénètre-t-elle pas jusque dans la moelle des os, quand on voit une ville livrée à l’ennemi, des visages pâles, des femmes tremblantes, des soldats furieux, et tout l’appareil d’une prochaine désolation ?
Ainsi, il s’occupa du soulagement des peuples ; mais d’autres empereurs qui eurent les mêmes vues, n’étant pas contredits sur le trône, purent être humains impunément : Julien, longtemps César, assujetti dans son pouvoir même à un tyran jaloux, qui l’avait créé par besoin et le haïssait par faiblesse, qui lui eût permis de faire le mal pour se déshonorer, et craignait qu’il ne fît le bien, qui, tout à la fois barbare et lâche, désirait que les peuples fussent malheureux, pour que le nouveau César fût moins redoutable ; Julien, environné dans les Gaules, des ministres de cette cour, qui étaient moins ses officiers que ses ennemis, et déployaient contre lui cette audace qui donne à des tyrans subalternes le secret de la cour, et l’orgueil d’être instruments et complices de la volonté du maître ; Julien enfin, traversé en tout par ces hommes qui s’enrichissent de la pauvreté publique, eut bien plus de mérite à arrêter les abus et à soulager les provinces.
L’espérance de cette gloire, l’orgueil, non plus de la beauté, mais du génie, éclate dans quelques vers d’une pièce perdue71 : « Morte, tu seras gisante », dit la Muse lesbienne à quelque femme ennemie ou rivale ; « il ne restera de toi nulle mémoire dans l’avenir ; car tu ne touches pas aux roses de la montagne des Piérides ; mais tu iras, obscure, visiter les demeures d’Adès, t’envolant sur le sol des aveugles morts. » Une autre fois, devant des femmes qui, riches et belles, semblaient enivrées de leur destinée, elle parut plus fière encore, en disant « que les Muses lui donnaient, à elle, le vrai bonheur et le seul digne d’envie ; car, même dans la mort, elle ne serait jamais oubliée ».
Loin de moi comme près de moi, elle trouve en elle-même un ennemi à combattre, un danger à repousser. […] Il agit contre son ennemi aveuglément, sans mesurer les coups qu’il lui porte, sans ménager sa retraite. […] Il essaie de le consoler et de lui rendre courage ; mais Castruccio ne veut rien entendre, et dès ce moment il devient l’ennemi d’Ernest. […] Bulwer explique ses prétentions littéraires et se plaint de ses ennemis politiques. […] Il ne devait pas mettre, sur le même plan, tous les personnages engagés dans la politique de Louis XI comme ennemis ou comme auxiliaires.
La Princesse de Clèves est aussi ennemie du romanesque que Manon Lescaut, et Gil Blas que Candide. […] Le Canard sauvage, Un ennemi du peuple, Rosmersholm paraissent de même impliquer des conclusions contradictoires. […] Il occupe dans son œuvre cette place en porte-à-faux que tient L’Ennemi des lois dans l’œuvre de M. […] Et alors le rosier se flétrit et les fleurs tombent… Les Taupes sont donc moins le roman du plaisir que le roman des ennemis du plaisir. […] Bonne raison pour le défendre contre ses ennemis de droite, qui sont les taupes, et ses ennemis de gauche, qui sont les gloutons.
Ainsi Goethe, esclave du vraisemblable, c’est-à-dire de la vérité vulgaire, ennemi juré d’un héroïsme romanesque, comme d’une perversité absolue, n’a pu se décider à faire l’homme tout a fait bon, ni le diable tout à fait méchant. […] … Il me faudra errer parmi la foule étrangère, ennemie, moi, chanteur ! […] » » Puis nous irons, nous nous abreuverons du sang de l’ennemi ; nous hacherons son cadavre ! […] Aucun d’eux n’a l’honneur, en ce moment-là, d’être mon ennemi. » Cette restriction faite, j’ai lu le travail de M. […] Il avait besoin de se torturer lui-même en accusant ses meilleurs amis d’ingratitude, et ses prétendus ennemis d’insolence et de cruauté.
Ce siècle, qu’on oppose à notre égoïsme comme l’ennemi, par excellence, du Moi, avait trop de franchise et trop de naturel pour sacrifier les légitimes instincts de la personne aux conceptions humanitaires et panthéistiques des philosophes modernes. […] si je pouvais arracher de Racine Alexandre et les Frères ennemis ! […] Voilà l’effet que la sincérité, si rare et si charmante, devrait toujours produire sur nous, même quand elle nous heurte, si nous étions assez ennemis du mensonge pour préférer une contradiction raisonnée et courageuse à un feint assentiment dicté par la timidité du cœur et par la paresse de l’esprit. […] C’est possible, c’est probable ; cinquante ans au plus suffiront à l’ennemi invisible pour occuper toutes les positions. […] Et pourquoi cet instinct, vainqueur des choses ennemies, affranchi de la limitation d’une forme unique, ne serait-il pas le signe qui distingue par excellence le génie du simple talent ?
Notez aussi que Joad et Séide ne violent ou ne croient violer aucun sentiment naturel : Joad frappe une usurpatrice, une ennemie publique ; et Séide ne sait pas que Zopire est son père. […] Le vénérable secrétaire perpétuel de l’Académie a trouvé moyen de n’avoir pas un ennemi dans un emploi où l’on a tant d’occasions de froisser les gens. Il n’a pas plus d’ennemis que n’en ont aujourd’hui Suard ou Andrieux, et il ne donne pas plus d’ombrage. […] » Instantanément les braves figurants se réveillent, poussent un cri vague, brandissent leurs armes et retournent à l’ennemi en buttant un peu sur les marches du praticable. […] Quand l’ennemi traverse un village, les paysans les plus desséchés par l’amour du gain s’avisent tout à coup que leurs champs sont des morceaux du sol de France.
Stricts et même rigoristes sur la probité, ils sont assez coulants sur les mœurs, sauf quand il s’agit de la courtisane, l’ennemie née du foyer domestique. […] Fièrement, l’âme haute, ils couraient à l’ennemi. […] Sa Frédégonde n’aime pas son amant et ne se sert de lui que comme d’un instrument pour se débarrasser d’un ennemi. […] Il a ce mot substantiel, que « le romanesque est le plus grand ennemi du dramatique. » Il ne parle, — comme nous, — que de nature et de naturel, de simplicité et de vérité. […] Mais ne trouvez-vous pas que les tournois oratoires de cette espèce, ces luttes entre deux âmes également sublimes — et ennemies — ont quelque chose de troublant, au fond, et de déconcertant ?
On sait assez ou l’on croit savoir que je suis l’ennemi de l’à-propos. […] L’un est trop bon avec la reine, et l’autre est trop bon avec l’ennemi. […] La preuve encore, c’est que les reproches que lui font ses ennemis mêmes ne vont guère à le représenter comme une décadence et un abaissement du goût public. […] Il y a eu un livre à faire sur « les ennemis de Racine » ; il y en aurait un très joli aussi, et très intéressant, sur les « ennemis de Victor Hugo ». […] — C’est qu’elle est ennemie du gouvernement ; c’est qu’elle a l’audace de le braver.
Dur et même injuste, il fouaille ses propres haines ; pour lui, comme pour tous les satiristes, l’ennemi particulier devient l’ennemi public, mais quelle belle langue à la fois traditionnelle et neuve, et quelle belle insolence : Ce que j’écris n’est pas pour ces charognes ! […] couvert d’une gloire qui n’appartient qu’à Dieu, tu m’as en partie consolé, mais ma raison chancelante s’abîme devant tant de grandeur… Replie tes blanches ailes et ne regarde pas en haut avec des paupières inquiètes… » Le crapaud s’assit sur les cuisses de derrière (qui ressemblent tant à celles de l’homme) et, pendant que les limaces, les cloportes et les limaçons s’enfuyaient à la vue de leur ennemi mortel, prit la parole en ces termes : « Maldoror, écoute-moi. […] En Rade développa encore ce système dont la fécondité est illimitée — tandis que la méthode naturaliste s’est montrée plus stérile encore que ses ennemis n’auraient osé l’espérer — système de la plus stricte logique et d’une si merveilleuse souplesse qu’il permet, sans forfaire à la vraisemblance, d’intercaler, en des scènes exactes de vie campagnarde, des pages comme « Esther », comme le « Voyage sélénien ».
Semblables aux Sioux et aux Apaches, ils se payaient, si j’ose m’exprimer ainsi, la tête de leurs ennemis. […] Alors, Jack prit un couteau, coupa les oreilles de son ennemi, les fit saler et les garda comme souvenir. […] Les deux ennemis furent amenés devant le tribunal, dans une salle d’audience tellement traversée de balles, que les courants d’air enrhumaient les juges. […] Pour de tels esprits, la réconciliation de Darwin et de Moïse est l’affaire d’un tour de main : on les pousse l’un vers l’autre comme deux trappeurs ennemis. […] Le voilà, comme s’il ressuscitait, comme s’il parlait, l’implacable et infatigable secrétaire d’État qui, jusqu’à son dernier souffle, s’efforça de travailler à la prospérité du royaume et qui mourut en jurant qu’il n’avait jamais tenu pour ennemis personnels que les ennemis du bien public.
Sa prodigieuse habileté, tant vantée, ç’a été sa pire ennemie. […] Elles étaient pour lui parlantes et frappantes comme les personnes… Un mobilier lui était ami ou ennemi. […] La tradition, pour eux, c’est l’ennemie. […] Cet écrivain sans ennemis était l’ennemi de quarante écrivains. […] Des ennemis, qu’il ne désigne pas autrement, l’ont empêché, depuis quinze ans, de remonter sur un théâtre.
Elle a traîné partout, cette histoire du misérable « qui aime la fille de son ennemi mortel ». […] Puis, par un revirement subit, le voilà qui crie à l’aide contre les suggestions du « malin », de « l’ennemi », du « prince des ténèbres », et il appelle à son secours, non pas l’amour, mais la terreur de Dieu, dont il semble ainsi faire un Satan supérieur. […] Ne serait-ce pas déshonorer sa fierté que de la faire assister au triomphe de ses ennemis ? […] Combien de gens voient dans chaque écrivain un ennemi ! […] N’est-il pas déplorable de les entendre se déclarer, à vingt-cinq ans, les ennemis de la passion ?
Êtes-vous donc notre ennemi à tous, monsieur ? […] L’étude qu’il fit sur l’aventurier Challes lui permit d’écrire ses opinions littéraires, opinions qui pour quelques amis lui ont valu beaucoup d’ennemis. […] » La vérité de la fin de cette œuvre a soulevé tous les bigots ; ils ont fait chorus avec les ennemis et les jaloux. […] Des journalistes, des poètes, des gens du monde, toutes les natures ennemies du simple qui ont inventé un artificiel quelconque et qui ne comprennent que le beau seriné dans les enseignements des pédants. […] L’idéaliste, au contraire, est l’ennemi juré de tout ce qui est petit et plat, et il se réconciliera même avec l’extravagant et le monstrueux, pourvu que cela fasse supposer une grande richesse de fonds.
Toujours depuis lors j’ai courageusement lutté contre l’ennemi : je suis maintenant parfaitement tranquille et heureux. […] Aussi bien la situation devenait grave ; contre l’église établie elle-même se dressait un ennemi terrible, le puritanisme, et c’était l’église établie et la royauté qu’il s’agissait de sauver. […] « Je le comparerais, dit-il, à l’aveugle Samson se sacrifiant soi-même pour pouvoir en même temps ensevelir ses ennemis sous les ruines du temple. » Car M. […] Aksakof était un ardent slavophile, ennemi de toute introduction en Russie de mœurs et d’idées de notre Occident. […] Il nous fait voir tous les écrivains de Milan partagés en deux groupes ennemis, dont l’un tient ses assises au jardin Cova et l’autre au café Savini.
« Un homme qui sait la cour est maître de son geste, de ses yeux, de son visage, il est profond, impénétrable ; il dissimule les mauvais offices, sourit à ses ennemis, contraint son humeur, déguise ses passions, dément son coeur, parle et agit contre ses sentiments. »48 Sans ce talent, comment se soutiendrait-il ? […] Par exemple, il s’est dispensé d’une visite officielle : Aussitôt « le loup en fait sa cour, daube au coucher du roi son camarade absent. » Un camarade, en ce monde-là, est un rival, partant un ennemi ; et d’ailleurs quel plaisir que de faire du zèle aux dépens d’autrui ! […] Il donne au loup un titre honorable, l’appelle « beau sire. » Le principal mérite de Louis XIV et de son siècle fut l’établissement de cette politesse qui répand de l’agrément sur toutes les petites actions de la vie, et lie de prime abord des étrangers, même des ennemis.
De farouches acclamations accueillirent les âpres tirades d’Un Ennemi du Peuple. […] Il est toujours prêt à se ranger du côté de l’envie, et le grand écrivain doit voir en lui l’allié de ses ennemis ! […] Non, vous n’êtes pas les ennemis de l’état de choses actuel ; au contraire, et je le répète, vous êtes l’éclatant symbole de la société bourgeoise, pavoisant de grandes phrases ses intérêts, ses pusillanimités, ses orgueils, c’est à elle que s’adressent nos imprécations, en même temps qu’à vous.
Il tombe malade parfois de ses propres excès, mais sa fortune est d’avoir des ennemis. Quand ses ennemis le voient ainsi chanceler, ils le foudroient et cela le ressuscite. Dans ce dernier quart de siècle, il faut le dire, les ennemis du roman ont trop souvent lancé leurs foudres : aussi a-t-il grandi outre mesure et conquis une importance qui étonne. […] Beaucoup criaient au danger en voyant les grands coups d’estoc et de taille que l’amazone détachait au mariage, son ennemi mortel. […] Nous sommes loin des espérances que l’apparition de Lucrèce avait données aux ennemis du drame.
Je comprends qu’on dise nettement comme Nietzsche : Le christianisme, voilà l’ennemi. […] » Une nuit, il y eut entre les deux ennemis une terrible lutte, et au matin on trouva le saint victorieux, mais évanoui, cruellement brûlé et mordu, à moitié enfoncé sous sa paillasse retournée. […] — Le naturel, la simplicité… — Sarcey avait raison d’être l’ennemi… … Marchandise bonne tout au plus pour l’exportation. […] Ouverte et libre, elle semble inviter l’ennemi. […] Le grand Condé résista longtemps ; un jour, comme Bourdaloue montait en chaire, à Saint-Sulpice, il cria : « Silence, voici l’ennemi !
Et comme une ruine épouvantable avait été la conséquence de la position injuste et déraisonnable où s’était mis un gouvernement que rien ne pouvait plus éclairer ni corroborer, la littérature avait été prise à partie comme le seul ennemi visible qui eût travaillé à sa perte. […] Qu’il ait eu le projet de plaire à son siècle, d’exercer sur lui de l’influence, de se venger de ses ennemis, de former un parti qui pût le louer et le défendre, nous le croyons sans peine. […] Comme il était l’ennemi de l’ordre actuel des choses, il parla avec aigreur et avec verve contre les fruits de l’association humaine. […] Nous tombons avec lui dans des erreurs par une pente irrésistible, nous prenons son fol orgueil, nous ne voyons qu’outrage et injustice, nous devenons les ennemis de tous les hommes, et nous le préférons à eux. […] Tandis que la religion était attaquée, ou délaissée, ses défenseurs, comme s’ils avaient pris plaisir à travailler pour ses ennemis, fomentaient des discordes et des persécutions dans son propre sein.
I La veillée d’armes Qu’est exactement l’ennemi que je vais combattre ? […] Il me faut, avant d’engager les hostilités, un moyen grossier, mais certain et bien visible, de reconnaître l’ennemi. […] La femme est l’ennemie du doute provisoire, et sa rapide intuition qui devine et qui se trompe au petit bonheur, mais qui affirme, toujours décisive, nous pousse, nous bouscule, rend impossible la sage suspension du jugement. […] A son petit dernier tombé entre les mains de l’ennemi, on offre, avec le trône de Judée, la princesse dont il est amoureux et aimé. […] Car jamais Français n’a tué un ennemi ou fait un prisonnier : nous sommes trop généreux pour des forfaits si noirs.
L’Indien cannibale, en savourant la cervelle de son ennemi vaincu, éprouvait un bien-être analogue. […] Il est déjà difficile de gouverner un pays où il y a deux classes antagonistes ; que faire en un pays où les seuls paysans se divisent en quarante castes ennemies les unes des autres, ennemies jusqu’au mépris, jusqu’au vomissement, ennemies au point de mourir de faim plutôt que d’accepter une poignée de riz préparé par des membres d’une autre caste ! […] Que de malheurs arrivés par les combinaisons maladroites de couleurs ennemies ! […] Mais le mâle est l’ennemi, parce qu’il est l’empreinte. […] Le vêtement combat également deux ennemis le froid et le chaud.
De même que la vie de cour a produit au dix-septième siècle une poésie psychologique, de même il était naturel que la vie d’une capitale produisit au dix-neuvième siècle une poésie qui épousât les mêmes fibres, qui se construisît contre des ancêtres et des ennemis analogues, qui rencontrât des résistances de même ordre. […] De même il était naturel que Quinault eût moins d’ennemis que Racine. […] Accordons, si l’on veut, ses ennemis, ses amis et lui-même en disant : C’est un malheureux ! […] Les deux volumes publiés autrefois par Schérer et la légataire d’Amiel, Mlle Mercier, ont fait le tour du monde, sont devenus un des grands livres de la vie intérieure, ont été traduits en des nombreuses langues, ont provoqué les polémiques, se sont fait des amis de cœur chaud et des ennemis acharnés. […] Il repère l’ennemi qui l’empêchera d’être en l’empêchant de choisir, qui l’empêchera de choisir en lui montrant de la montagne tous les royaumes étendus sous son regard.
Nous arrivons presque seuls en face d’un grand nombre : les uns ennemis parce que nous ne fraternisons pas avec leur paresse, leur inintelligence et leur mauvaise foi ; les autres adversaires quand même, parce qu’ils ont accepté sans réfléchir des idées toutes faites et ne veulent plus avoir le courage d’une conversion ; la masse enfin désintéressée, mais préparée, travaillée par les systèmes littéraires de 1830 et 1848, et plus curieuse et inquiète que sympathique. […] M. de Pontmartin vient de faire un article ennemi sur Balzac, et je trouve qu’il a raison, parce que Balzac n’est pas un réaliste, quoiqu’il soit souvent réaliste. […] M. de Pontmartin dit encore ceci : « Balzac a chanté le mariage, mais pour mieux le profaner ; il a défendu l’Église, mais mieux valait un ennemi. […] Il ment donc utilement et en guise de parade contre les doctrines ennemies ; il a bien raison, quand on n’est plus jeune il faut prendre ses précautions et opposer la ruse à la force. […] Les gens qui sont étrangers à ce jeu sont continuellement en danger de mort et comme tous les moyens sont bons pour les réalistes, il serait imprudent à quelque ennemi de se glisser parmi eux.
Ainsi, dans cette fin de discours, il se mit à faire un magnifique éloge de la piété tendre et sensible, puis, en regard, un non moins magnifique portrait de la vraie philosophie ; puis, au sortir de ce parallèle, il s’échappa dans une vigoureuse sortie contre le fanatisme qui, seul, trouble la paix si facile à établir, disait-il, entre les deux parties intéressées ; s’animant de plus en plus devant cet ennemi, pour le moment du moins, imaginaire, l’orateur compara tout d’un coup le fanatique ou l’hypocrite à l’incendiaire Catilina lorsqu’il vint pour s’asseoir dans le sénat de Rome et que tous les sénateurs, d’un mouvement de répulsion unanime, le délaissèrent sur son banc, seul, épouvanté et furieux de sa solitude… On se retournait, on regardait de toutes parts pour chercher cet incendiaire, car il était bien évident que, dans la pensée de Garat, ce n’était point M. de Parny. […] Les amis, du reste, ne cherchaient point à dissimuler les défauts de cette œuvre de circonstance, et les ennemis commençaient à dire que M. de Parny, qui avait si bien chanté les amours, avait un talent moins décidé pour chanter les guerres 189.
reforge sur une nouvelle enclume le tranchant des armes de Rome contre ses ennemis ! […] » Ce dernier vers, inattendu dans une ode pleine de riantes images et de douce sagesse, sonne comme un ressentiment caché au fond du cœur contre la méchanceté de ses ennemis ; c’est une flèche sous les fleurs qui retentit au fond du carquois.
Ainsi qu’il arrive toujours, à côté des ennemis de Wagner, il se forme un noyau de jeunes gens, révoltés de cette haine excessive contre un mort et qui paraissent décidés à vous protéger vous et votre théâtre. […] D’ailleurs, je suis assez artiste pour n’être l’ennemi d’aucune œuvre d’art.
Ils étaient tous les trois, dans des mesures diverses et pour des causes différentes, ennemis du despotisme militaire qui avait succédé à l’anarchie de la Révolution, et qui pesait alors sur les esprits plus encore que sur les institutions : mon père, par attachement chevaleresque aux rois de sa jeunesse, pour lesquels il avait versé son sang et joué sa tête ; M. de Vaudran, par amertume d’une situation élevée conquise par ses talents, perdue dans l’écroulement général des choses ; l’abbé Dumont, par ardeur pour la liberté dont il avait déploré les excès dans sa première jeunesse, mais dont il s’indignait maintenant de voir la respiration même étouffée en lui et autour de lui. […] Suivant ses ennemis, il s’était lassé de cet ordre ; il en était sorti pour aller en Hollande et de là en Prusse, où son scepticisme avait convenu au roi Frédéric II.
» IV Son ministre, pour le distraire de sa mélancolie, lui annonce qu’une race ennemie et perverse a envahi ses États et égorge son peuple. […] On remarque en effet qu’à l’exception des mauvais génies ennemis ou jaloux des hommes, tous les personnages y sont innocents.
Dans ses Epitres on voit trop souvent l’homme atrabilaire, qui n’ayant pas assez de philosophie pour maîtriser son ressentiment, saisit les injures les plus fortes qui se présentent à sa plume pour en accabler ses ennemis. […] La censurer, ce seroit flatter les ennemis de cet Ecrivain qui en a beaucoup.
Le président déjoua ses menées, rendit cœur aux notables habitants, leur expliqua nettement l’intention du duc de Mayenne, qui était que le pays s’aidât du duc de Savoie contre les ennemis communs, et non qu’on se donnât à lui.
Elle n’est pas, — elle n’est plus du tout ennemie du progrès ni des tentatives nouvelles en littérature.
Il n’est pas ennemi, il n’est pas hostile, il balance les avantages, mais au fond il n’hésite pas et se prononce pour une philosophie naturelle.
c’est ce dont il fait le plus de cas : « Ce monde, pense-t-il, appartient à l’énergie. » Lui si moral, si tempéré, il semble même par moments tout près de vouloir cette énergie à tout prix, tant il est l’ennemi de la mollesse et de l’indifférence : « À mesure que je m’éloigne de la jeunesse, écrivait-il à M.
Veuillot, qui a eu le courage plébéien d’être un Saint-Simon en plein vent et à pleinepoitrine, à la barbe de l’ennemi, a droit de dire son fait au duc et pair.
Rappelons-nous ce qu’étaient en leur temps Perrault et Boileau ; ces deux rivaux, ces deux représentants de deux races d’esprits si différentes, et, l’on peut dire, ces deux ennemis ; car leur réconciliation ne se fit jamais qu’à la surface et par le dehors.
Ennemi de la publicité habituelle et fréquente pour les travaux de l’Académie des Sciences, M.
Au moment d’enter dans les scènes de la Passion, on voit la Vierge Marie, soumise jusqu’alors aux volontés de son fils, essayer de détourner d’elle et de lui le calice, et, dans la dernière visite qu’il lui fait à Béthanie, le supplier de ne pas retourner dans la cité maudite de Jérusalem, où il a tant d’ennemis.
. — Le bon Sosie ne manque pas de glisser de nouveau son proverbe et de pousser, selon son habitude, l’idée de son maître jusqu’à en faire une maxime : « C’était bien sage à lui, dit-il, d’en agir ainsi ; car, par le temps qui court, la complaisance engendre l’amitié, la vérité fait des ennemis. » — « Cependant, poursuit le père, voilà bien trois ans de cela, arriva ici dans le voisinage une femme d’Andros, sans parents, pauvre, belle, à la fleur de l’âge. » — « Aïe !
Elle était de son nom Mlle de Werthern, nièce du fameux baron de Stein, le ministre des vengeances prussiennes et l’ennemi de la France.
La pédagogie intellectualiste incarne ce Règne de l’Esprit que Stirner dénonçait comme l’ennemi le plus redoutable de l’individualité.
S’il s’emporte avec tant d’indignation contre « l’homme médiocre », c’est parce que l’homme médiocre est un féroce ennemi du génie.
On est dûment averti, en ouvrant les Châtiments de Victor Hugo, qu’il va se faire justicier et fouailler ses ennemis.
C’est après le duel entre ces extrêmes qu’une conciliation provisoire s’opère entré les principes ennemis ; il faut d’abord, si nous les comparons à des courants électriques, qu’il y ait eu décharge de fluide par la rencontre du pôle positif et du pôle négatif.
. — Je fus étonné, ajoute-t-il en passant, non pas que la reine eût désiré tant de facilités, mais qu’elle eût osé se les procurer. » Cette simple phrase, jetée en courant, est pleine d’insinuations, et les ennemis n’ont pas manqué de la relever.
Au xviiie siècle, Voltaire et Condorcet s’emparèrent de quelques-unes de ces Pensées de Pascal comme, à la guerre, on tâche de profiter de quelques mouvements trop avancés d’un général ennemi audacieux et téméraire.
Il ne voyait pas dans les affaires les ennemis naturels des recherches littéraires et scientifiques telles qu’il les concevait, et il semblait qu’en changeant ainsi de sujet, il ne faisait que varier les applications d’un même esprit de méthode et de détail.
Discutez les prestiges de la vierge qui sauva la France, qui fut brûlée comme sorcière par nos ennemis, et dont la cour de Rome a protégé la mémoire !
C’est que le cœur de l’humanité vibrait de sentiments nouveaux et qu’une faculté dangereuse, ennemie de l’obéissance et du respect, la raison, s’était peu à peu réveillée du sommeil où la descente d’un Dieu sur la terre l’avait plongée.
Il est aujourd’hui le plus grand ennemi de la philosophie allemande ; non-seulement il la réfute, mais encore il l’injurie ; et l’on dit que contre les péchés métaphysiques de sa jeunesse il ira bientôt chercher refuge dans le bénitier.
Mais par la manière dont vous présentez les faits, dont vous les développez, dont vous les rapprochez les uns des autres, par les grandes actions comparées aux grands obstacles, par l’influence d’un homme sur sa nation, par les traits énergiques et mâles avec lesquels vous peignez ses vertus, par les traits touchants sous lesquels vous montrez la reconnaissance ou des particuliers ou des peuples, par le mépris et l’horreur que vous répandez sur ses ennemis, enfin, par les retours que vous faites sur votre siècle, sur ses besoins, sur ses faiblesses, sur les services qu’un grand homme pourrait rendre, et qu’on attend sans espérer, vous excitez les âmes, vous les réveillez de leur léthargie, vous contribuez du moins à entretenir encore dans un petit nombre l’enthousiasme des choses honnêtes et grandes.
Mme de Staël, qui sortait de la Révolution, qui s’inspirait de la philosophie, qui maltraitait le règne de Louis XIV et rêvait un idéal d’établissement républicain, devait être considérée alors par tous les hommes de ce camp comme ennemie, comme adversaire. […] Ne se figure-t-on pas déjà ces deux beaux noms, comme deux cimes à des rivages opposés, deux hauteurs un moment menaçantes, sous lesquelles s’attaquaient et se combattaient des groupes ennemis, mais qui de loin, à notre point de vue de postérité, se rapprochent, se joignent presque, et deviennent la double colonne triomphale à l’entrée du siècle ? […] Elle songea donc sérieusement à faire un plein usage de ses facultés, de ses talents, à ne pas s’abattre ; et, puisqu’il était temps et que le soleil s’inclinait à peine, son génie se résolut à marcher fièrement dans les années du milieu : « Relevons-nous enfin, s’écriait-elle en sa préface du livre tant cité, relevons-nous sous le poids de l’existence ; ne donnons pas à nos injustes ennemis et à nos amis ingrats le triomphe d’avoir abattu nos facultés intellectuelles. […] Mme de Staël avait horreur de l’âge et de l’idée d’y arriver ; un jour qu’elle ne dissimulait pas ce sentiment devant Mme Suard, celle-ci lui disait : « Allons donc, vous prendrez votre parti, vous serez une très-aimable vieille. » Mais elle frémissait à cette pensée ; le mot de jeunesse avait un charme musical à son oreille ; elle se plaisait à en clore ses phrases, et ces simples mots, Nous étions jeunes alors, remplissaient ses yeux de larmes : « Ne voit-on pas souvent, s’écriait-elle (Essai sur le Suicide), le spectacle du supplice de Mézence renouvelé par l’union d’une âme encore vivante et d’un corps détruit, ennemis inséparables ?
Mais tant de puissance contre un si mince ennemi ; tant de génie contre un vain talent, qui n’a pas même la force de se régler ; un tel appareil de raisons contre des emportements de plume ; le génie même de la tradition en lutte avec le sens propre d’un homme médiocre, chargé par son parti de faire les affaires de la colère et de la prévention communes, aux dépens de sa considération personnelle ; cette disproportion étonne et fatigue, comme toute lutte inégale. […] Ceux-ci profitaient réciproquement de leurs qualités, à peu près comme des armées ennemies se forment, en se combattant, aux usages de guerre et à la discipline qui donnent la victoire. […] Certes, le commerce de Fénelon avec Mme Guyon a été irréprochable : c’est le triomphe de sa vertu, qu’aucun de ses ennemis n’en ait douté ; mais cette amitié même, que Bossuet eut tort de comparer à celle qu’inspirait Priscille139 à l’hérésiarque Montan, ne condamnait-elle pas tout d’abord la doctrine du pur amour, puisqu’il fallait à Fénelon, pour y raffiner tout à l’aise, l’imagination ardente et l’esprit curieux et mal assuré d’une femme140 ? […] Il avait pour lui le savant abbé Nicaise, de Dijon, le correspondant de Leibniz, qui, chose remarquable, attaquait les nouveaux quiétistes comme « ennemis des belles-lettres143. » C’est à l’abbé Nicaise que Mlle de Scudéry, dont l’esprit valait beaucoup mieux que les livres, écrivait ces paroles si sages : « Je ne veux point me mêler dans une dispute d’une matière si élevée, et je me tiens en repos, en me bornant aux commandements de Dieu, au Nouveau Testament et au Pater ; car je crois, ajoute-t-elle, qu’une prière que Jésus-Christ a enseignée ne contient pas un intérêt criminel, quoique Mme Guyon la regarde comme une prière intéressée ; ce qui renverserait les fondements du christianisme. » Un autre correspondant de l’abbé Nicaise, l’abbé Bourdelot, lui écrit : « Depuis la Relation sur le quiétisme, M. de Cambrai est tombé dans le dernier mépris, et l’on en veut mal à M. l’archevêque de Paris et à M. de Meaux de l’avoir laissé faire archevêque, sachant tout ce qu’ils en savaient… Tant qu’il n’a été question que du dogme, il partageait les esprits ; mais l’histoire et les faits l’ont accablé. » Il n’y a rien là que de vrai.
Cette fois l’homme est seul ; il n’a le droit de s’exprimer devant son ami ou son ennemi que par des mots comptés qui seront chargés de tout dire. […] Attribuant aux règles seules le dessèchement de la tragédie, respectant par ailleurs la coupe traditionnelle, l’emploi continu de l’alexandrin, la mécanique de l’intrigue inventée par ses ennemis — le pire de ses ennemis, c’est Racine — Hugo va s’attaquer surtout au parti pris classique d’épurer l’action de tout ce qui n’est pas véhément et tragique. […] Une esthétique comme celle de Bataille est proprement l’ennemie du dessin, par conséquent de l’art des maîtres.
Ce fut un poète très jeune et très ardent, qui commença À peine au sortir de l’enfance à voyager à travers sa pittoresque contrée natale d’abord, puis parmi les paysages belges si compliqués, [et enfin gravita, au milieu des horreurs de la guerre, jusqu’à Paris, laissant derrière ses pieds infatigables la forêt de Villers-Coterets et les campagnes fortifiées, par l’ennemi, de l’Ile-de-France. […] Si vous aimez la poésie, ennemi lecteur, j’en ignore et, au surplus, c’est votre affaire. […] Les beautés mêmes que rien ne peut empêcher d’y être semées à profusion jurent dans la prose et dans les vers du « républicain ennemi des roses »7 que sont en général les adeptes de l’actuelle démocratie et qui veut inconsciemment passer pour être l’auteur de la Légende des Siècles, de la Chanson des rues et des bois, des Misérables et de tant de chefs-d’œuvre incomplets — quoi qu’il en ait et quels que soient les sujets qu’il traite, Moyen Âge, bibliques, mythologiques, ou mahométans. […] Quant à ses ennemis de lettres, il ne saurait en avoir que de sots ou d’ignorants.
C’est par là que maint ennemi de la foi chrétienne l’a servie d’une main en l’attaquant de l’autre. […] Son esprit, ennemi de la pompe, est tourné vers la force, mais la force aisée. […] La mort est donc l’ennemi de Montaigne ; il n’a rien fait, s’il ne peut s’en débarrasser ; il va donc essayer de tuer la mort, en lui arrachant son aiguillon, mais à sa manière, qui n’est pas celle de saint Paul. […] Tant nostre estât est ennemi de consistance ! […] « Si ne vous sentez assez forts et justes pour commander vos passions et aimer vos ennemis selon que Dieu commande, abstenez-vous de l’office de juges.
L’honneur ne m’a pas permis de me corriger, et j’ai dû tout conserver pour n’avoir pas l’air de rien dérober à une critique ennemie. […] Aussitôt que l’homme a la conscience de lui-même, il se trouve dans un monde étranger, ennemi, dont les lois et les phénomènes semblent menacer sa propre existence. […] Nous ne renouvellerons point ces tristes querelles ; nous espérons que de cette chaire ne descendront jamais des paroles ennemies de quoi que ce soit de beau et de bon. […] Ce qui pour la philosophie n’est que distinct et différent, entre les mains du temps est opposé et ennemi, et les diversités et les différences deviennent dans l’histoire des contradictions et des luttes. […] À l’aspect d’une légion on sent que l’on est devant une puissance, non seulement capable de balayer l’ennemi devant elle, mais d’occuper le sol, de s’y établir, d’y prendre racine.
Gervinus, est un homme de très grand bon sens, qui, n’admettant pas que l’étendue des devoirs dépasse les intentions de la nature, tient un juste milieu entre ce sentiment païen : la haine à l’égard de l’ennemi, et ce sentiment chrétien : l’amour à l’égard de l’ennemi. […] Le même fait exactement s’est produit cette année pour les Ames ennemies de M. […] Souvent on se dédit de tant de complaisance ; Non que vous ne puissiez en fixer l’inconstance : Si nous avons trop vu ces flux et ces reflux Pour Galba, pour Othon et pour Vitellius, Rome, dont aujourd’hui vous êtes les délices, N’aura jamais pour vous ces insolents caprices ; Mais aussi cet amour qu’a, pour vous l’univers Ne vous peut garantir des ennemis couverts. […] D’abord, pour elle-même et quelque sûre qu’elle soit des droites intentions d’un homme, une femme ne va pas habiter chez un Monsieur comme elle ferait chez sa sœur ou une amie ; ensuite, Germaine et Gourd voudraient, de propos délibéré, mettre les apparences contre eux, donner des armes à la calomnie, donner des armes à la famille de Jacques, mettre aux mains de l’ennemi le couteau qui doit les férir ; et encore irriter Jacques, et le torturer, et l’aliéner à jamais ; et encore le tuer par le soupçon et le souci et la colère, ils n’agiraient pas autrement. […] L’idée générale en est celle-ci : Démosthène vient de triompher de son ennemi Eschine dans l’affaire de la Couronne.
Les ennemis de Molière ont raison quand ils lui reprochent Don Juan et Tartuffe, à la condition que de la critique froidement faite de ses pièces ils concluent, non que Molière était contre Dieu, mais qu’il n’y songeait jamais, que Dieu était complètement étranger à son esprit. […] La famille Corneille a flairé l’ennemi et sans tarder veut le décréditer dans l’opinion. […] C’est pour cela qu’il a été l’ennemi des fameuses régies, ou plutôt qu’il les a prises, et cela est une vue extrêmement juste, à mon avis, pour des avertissements d’un caractère tout négatif. […] La littérature, voilà l’ennemi. […] Tout pesé et considéré, la littérature, voilà l’ennemi.
Thérèse survient au milieu même des ennemis qui l’attendent. […] Moïse exterminait les peuples ennemis ! […] Tout y était : le roi déchu qui paraît roi sous la redingote autant que s’il était en grand uniforme, tant la race persiste en lui ; le terrible proscripteur, qui, dans le monde, sourit en patriarche doux et attendri, mais que l’on sent capable de rudes et violents sursauts dès qu’il flairera l’ennemi ou l’obstacle… C’était composé à miracle. — Les ennemis de la Maison « en ont inventé une bonne », comme disait M. de Bonald ; ils disaient, avec un sérieux admirable, que, jusqu’au dernier moment, on avait craint que M. […] j’en reviens à être tout simplement son ennemi, voilà tout. Mon cher ennemi, vous avez fait une comédie qui, malgré ses défauts, est singulièrement intéressante et qui a des parties qui sont d’un grand maître ; une préface qui a ses points faibles, mais qui est en son ensemble une chose très fine et une très belle chose.
Le pis que puisse faire notre plus fort ennemi, c’est de nous ôter la vie, et vraiment c’est ce que peut faire aussi l’ennemi le plus faible. […] Le plan tout entier du récit, le retour du héros sous un déguisement, la scène où il se fait reconnaître par son fils, la vengeance terrible qu’il tire de ses ennemis, et la scène où il est enfin reconnu par sa femme, nous rappellent l’intrigue de mainte pièce grecque, et nous expliquent ce qu’entendait le grand poète athénien, en disant que ses drames n’étaient que des miettes de la table d’Homère. […] Le mercantilisme, avec son méprisable dieu, le Bon Marché, son indifférence calleuse envers l’ouvrier, sa vulgarité innée de nature, voilà notre ennemi. […] Ces deux hommes sont ennemis par la race, par la religion, par le sentiment. […] Un certain Vénitien, haïssant un des Dix qui commit une injustice envers lui, et identifiant son ennemi avec Venise même, abandonne sa ville natale et fait vœu de vouer son âme à l’Enfer plutôt que de faire un geste pour Venise.
Mais que des journaux, qui se piquent d’accepter et de vouloir le régime nouveau, combattent ouvertement, par des raisonnements empruntés à l’ordre légal, cette expression publique de pieux souvenirs ; qu’ils viennent nous montrer dans Bories et ses compagnons des hommes pleins de courage sans doute, mais contraires aux lois ; qu’ils nous rappellent avec patelinage que ce fut un jury et non un tribunal révolutionnaire, non une cour prévôtale, qui fit tomber ces têtes ; — comme si ce jury n’avait pas été désigné par le préfet, contrôlé par le président du tribunal et présidé par un agent du pouvoir ; — que, par une induction odieuse, jésuitique et impie, ils ne voient dans Bories et ses compagnons que des ennemis de cette Restauration dont MM. de Polignac, de Peyronnet et autres étaient aussi les ennemis à leur manière, et qu’ils assimilent sans pudeur les victimes de 1822 aux traîtres de 1830, il y a là une révélation profonde sur la manière dont un certain parti juge ce qui s’est passé en juillet, et un précieux éclaircissement sut les arrière-pensées qu’il nourrit.
Le général Gouvion Saint-Cyr, qui avait succédé à Berthier, refuse de ratifier une proscription plus odieuse du gouverneur romain, qui condamnait Consalvi à sortir de Rome, ignominieusement monté sur un âne, et en butte à la risée de ses ennemis ; il fut conduit à Terracine, dans la compagnie de vingt-quatre galériens napolitains. […] « Par le premier, on me restituait mes biens comme n’ayant pas émigré ; par le second, ces mêmes biens étaient confisqués de nouveau comme appartenant à un ennemi de la République romaine.
L’aïeule est devenue l’ennemie des petits-enfants ; le père se fait le tyran de sa fille. […] Comme Tartufe, il trouble toute la maison ; mais s’il y fait des dupes, il n’y manque pas non plus d’ennemis.
Est-ce pour cela que les orateurs de la chaire, venant de la Compagnie de Jésus, ont été accusés, non sans raison, par leurs ennemis les jansénistes d’énerver la parole de Dieu en l’enguirlandant de fleurs inutiles ? […] Le style académique travaille trop souvent à dire des riens en termes solennels ou alambiqués ; il se prête à mille petites perfidies habilement déguisées ; il est ennemi de la vigueur, de la simplicité, et il gâterait vite ceux qui le cultiveraient avec persistance.
Qu’ils sachent donc qu’après dix ans de travail, la publication de 13 volumes, tant de veilles, une si persévérante conscience, des succès même, une œuvre historique qui a déjà une place en Europe, après ce roman même, dans lequel nos ennemis mêmes reconnaissent « une force magistrale », il n’y a pas une gazette, une revue petite ou grande qui soit venue à nous, et nous nous demandons si le prochain roman que nous publierons, nous ne serons pas encore obligés de le publier à nos frais ; — et cela quand les plus petits fureteurs d’érudition et les plus minces écrivailleurs de nouvelles, sont édités, rémunérés, réimprimés. […] Et devant cette jeune femme, tendrement penchée sur cette horrible et breneuse mégère qui l’injurie, je pense, comme on penserait à un goujat en goguette, à ce Béranger, à cet auteur qui a trouvé drolichon de faire entrer au paradis une sœur de charité et une fille d’Opéra, avec des états de service se valant à ses yeux… Oui, il a toujours manqué aux ennemis du catholicisme, un certain sens respectueux de la femme propre, manque qui est la marque et le caractère des gens de mauvaise compagnie, et le grand patron de la confrérie, M. de Voltaire, voulant faire un poème ordurier, a été nécessairement choisir comme héroïne Jeanne d’Arc : la Sainte de la patrie.
toi qui as brisé la force des ennemis furieux, alors que Moïse, étendant les bras, offrit la figure de la croix, cette arme puissante ! […] s’écrie-t-il, divin Fils de la vierge de Solyme215, je te célèbre, toi qui as chassé des jardins du Père le serpent terrestre, insidieux ennemi descendu sur la terre !
Il s’emporte contre Renart, il le menace, et, en brise-raison qu’il est, il se vante (s’il était dans le cas du Loup) qu’il saurait bien saisir de force son ennemi dans son château de Malpertuis.
Il s’agit d’entrer dans la place de côté, sans faire trop de violence et sans épouvanter l’ennemi.
Ce vieillard, avec sa colère, avec sa rude menace aux siens de faire justice de leurs corps s’ils ne le mettent en plein péril, est beau et sublime de ton comme le Cid vieilli ; il est beau comme le jeune Condé à Rocroi jetant son bâton dans les rangs ennemis : lui, il fait mettre en avant le gonfanon de Saint-Marc et le compromet hardiment pour forcer les siens à la victoire.
On le considéra comme un espion qui, du haut de sa station nocturne, faisait des signaux à l’ennemi ; il fut, un jour, si bien poursuivi et traqué, que, pour sa propre sûreté, il courut à toutes jambes se mettre en prison.
C’est être inaccessible à l’ennemi ; c’est devenir invulnérable.
Necker comme à un ennemi personnel, à un rival qui lui avait volé sa place et la confiance de son malade. — Gabriel Sénac de Meilhan était fils de Sénac, premier médecin de Louis XV.
Henri IV, si l’on excepte quelques velléités qu’il en eut dès le commencement, ne demandait pas la continuation de la guerre ; mais, en montrant qu’il n’en était pourtant pas ennemi, il prétendait obtenir pour les Hollandais une paix plus forte, plus solide, et contracter renouvellement d’alliance avec eux.
Sans le connaître, ils sentent en lui comme un grand ennemi personnel, et ils le voudraient supprimer.
Chacun a sa délicatesse d’amour-propre : la mienne va jusqu’à croire que de certaines gens ne peuvent pas même m’offenser. » Il pratiqua toujours cette méthode de se taire et de laisser dire les ennemis.
Son culte, son idéal, c’est le gouvernement parlementaire ; son ennemi, c’est le pouvoir absolu.
Cet esprit supérieur, que la France n’apprécia pas assez de son vivant, que la jeunesse vers la fin insultait à plaisir, qui ne s’appliquait point en effet à plaire, et qui ne craignait point du tout de choquer ou même de braver son public et son temps ; espèce de Royer-Collard dans sa sphère, ennemi aussi de la démocratie dans l’art, mais non point respecté comme l’autre, et qui semblait même jouir de son impopularité, M.
a exercé et exerce encore cette sorte de magistrature au Journal des Débats ; qui y a défendu les traditions de l’École de David contre toutes les tentatives d’innovation et tous les assauts du romantisme ; qui est un ennemi déclaré du gothique qui est très-consciencieux, assez bienveillant pour les personnes, sans quartier sur les principes ; qui a beaucoup causé de toutes choses autres encore que beaux-arts ; qui a eu de bonne heure l’habitude d’écrire les conversations des gens d’esprit qui venaient chez lui ou qu’il rencontrait dans le monde ; qui a des masses de ces procès-verbaux et de ces minutes d’entretiens qui seront, un jour plus intéressants pour nos neveux que les plus élégants rapports académiques, et où les pauvres d’idées en quête d’érudition facile iront puiser comme dans les papiers de Conrart. — M.
Il aimait à raconter ses aventures, j’aimais à les entendre, ce qui avait un grand charme pour lui ; car je soupçonne que ce que j’entendais pour la première fois, les gens de sa Cour l’entendaient pour la centième… « Je me souviens de l’impression que me firent les récits du prince ; j’étais étonné de l’entendre parler sans fiel de ses ennemis, et sans reconnaissance pour ses amis : c’était un vrai Stuart.
Viollet-Le-Duc comme un adversaire et un ennemi, ont eu un art à part et, selon lui, incomparable, un talent unique, délié, fin, composé d’instinct et de réflexion, qui les a conduits dans tout ce qu’ils ont fait à choisir, à corriger, à rectifier, à épurer ; à s’approprier les emprunts mêmes, à les convertir, à les transformer ; à trouver l’expression la plus noble, la plus élégante ; à deviner, par la perfection des sens, des combinaisons de lignes que l’expérience a converties plus tard en lois de stabilité.
Delatouche, l’homme de ces malices-là, était né comme exprès pour être l’ennemi et l’envieux de Loyson, si Loyson avait vécu.
Si Racine, dans les vingt-six années environ qui forment sa pleine carrière depuis les Frères ennemis jusqu’à Athalie, avait eu le temps de voir une couple de révolutions politiques et littéraires, s’il avait été traversé deux fois par un soudain changement dans les mœurs publiques et dans le goût, il aurait eu fort à faire assurément, tout Racine qu’il était, pour soutenir cette harmonie d’ensemble qui nous paraît sa principale beauté : il n’aurait pas évité çà et là dans la pureté de sa ligne quelque brisure.
Enfin, en 1710, quelques derniers couplets, si infâmes qu’on doit les croire fabriqués à dessein par les ennemis de Rousseau, mirent le comble à l’indignation.
Millevoye, sans ambition, sans un ennemi, très-répandu, très-vif au plaisir, très-amoureux des vers, vivait ainsi.
Il s’enferme dans un silence entêté, sa figure se couvre d’un nuage méchant et apparaît en lui, comme un être nouveau, inconnu, sournois, ennemi… sa physionomie s’est faite humble, honteuse ; elle fuit les regards, comme des espions de son abaissement, de son humiliation. » Vers le 30 avril : « Ce qui me fait désespérer de lui, c’est quelque chose d’indéfinissable, que je ne puis mieux comparer qu’à l’apparition d’un autre être se glissant en lui.
Quand les difficultés des premiers pas sont vaincues, il se forme à l’instant deux partis sur une même réputation ; non, parce qu’il y a deux manières de la juger, mais parce que l’ambition parle pour ou contre : celui qui veut être l’adversaire des grands succès reste passif, tant que dure leur éclat, et c’est pendant ce temps, au contraire, que les amis ne cessent d’agir en votre faveur ; ils arrivent déjà fatigués à l’époque du malheur, lorsqu’il suffit au public du mobile seul de la curiosité, pour se lasser des mêmes éloges ; les ennemis paraissent avec des armes toutes nouvelles, tandis que les amis ont émoussé les leurs, en les faisant inutilement briller autour du char de triomphe.
Puis il fut pris entre les deux ennemis qu’il avait combattus.
Nous souffrons de cet étalage impudique des misères de l’artiste devant son ennemi éternel.
Son art, c’est de battre l’ennemi avec ses propres troupes.
Aussitôt, tout changea de face : les Blancs, déclarés ennemis de la patrie, furent chassés ; et Dante, qui était soupçonné de leur être favorable, apprit à la fois son exil et la perte de tous ses biens.
Dans les premiers temps de ce séjour à Cirey, il écrivait à d’Argental, en revenant de faire un voyage de Hollande, et en nous découvrant toute sa pensée, ses affections, les parties les plus sérieuses de son âme : Je vous avoue que si l’amitié, plus forte que tous les autres sentiments, ne m’avait pas rappelé, j’aurais bien volontiers passé le reste de mes jours dans un pays où du moins mes ennemis ne peuvent me nuire, et où le caprice, la superstition et l’autorité d’un ministre ne sont point à craindre.
et déjà blanchie avant l’âge ; quand on l’entend, dans la plus longue et la plus remarquable de ses lettres à Élisabeth (8 novembre 1582), lui redire pour la vingtième fois : « Votre prison, sans aucun droit et juste fondement, a jà détruit mon corps, duquel vous aurez bientôt la fin s’il y continue guère davantage, et n’auront mes ennemis beaucoup de temps pour assouvir leur cruauté sur moi : il ne me reste que l’âme, laquelle il n’est en votre puissance de captiver » ; quand on a entendu ce mélange de fierté et de plainte, la pitié pour elle l’emporte, le cœur a parlé ; ce doux charme dont elle était douée, et qui agissait sur tous ceux qui l’approchaient, reprend le dessus et opère sur nous à distance.
Incapable d’une mauvaise pensée, mais aussi d’une feinte, si elle ne vous aimait pas, il lui était impossible de vous dire ou de vous laisser croire le contraire. « C’était le plus loyal gentilhomme, me dit-on, et qui n’a jamais menti. » Elle aimait ses amis, elle pardonnait à ses ennemis ; mais, dans la religion de sa race et de son malheur, elle croyait aux fidèles et aux infidèles, aux bons et aux méchants : peut-on s’en étonner ?
Le Hollandais, devant le puissant océan, son éternel ennemi, sait qu’il ne peut lutter avec avantage contre lui que par la patience ; qu’un travail momentané est insuffisant pour donner un résultat favorable, tandis qu’un combat de tous les moments finira par le faire triompher, et il souscrit à cette obligation sans en discuter les inconvénients.
L’influence du chevalier de Lorraine, à la fin de la campagne de 1667, ruina ses efforts, et cet indigne favori, qui vit en lui un ennemi naturel, ne négligea rien pour le perdre et pour l’éloigner.
Ducis transportait cette situation au vieux Montaigu, père de Roméo ; il faisait raconter à ce vieux père lui-même, échappé de sa tour, cet atroce supplice infligé par son ennemi, et quand, le récit terminé, Roméo (qui se trouve être un dernier fils de ce Montaigu-Ugolin) dit un peu simplement au vieillard : ……………………… Ah !
Il colle son oreille au ras du sol et il entend retentir les cris de la tribu ennemie.
D’ailleurs, elle ne le verra qu’environné de ses ennemis, qui ne le connaissent point.
Le heros durant sa jeunesse s’étoit trouvé lié d’interêt avec les ennemis de l’état, et il avoit fait une partie de ses belles actions quand il ne portoit pas les armes pour sa patrie.
Naturellement l’hostilité redoubla, L’Art d’écrire eut des ennemis de tout genre.
Il a dit au chien : « Tu garderas les troupeaux de l’homme, tu veilleras autour de sa demeure, tu le suivras dans ses voyages, tu trahiras ton propre instinct pour te faire l’ennemi des autres animaux lorsque ton maître voudra prendre les plaisirs de la chasse ; et, s’il devient pauvre, misérable, privé de la vue, tu dirigeras ses pas sur les bords du précipice pour le lui faire éviter, ou parmi les flots d’une multitude insouciante pour qu’il reçoive le pain de l’aumône que tu partageras avec lui. » Croyez-vous que cet instinct des animaux marqués pour la domesticité ne prouve pas l’intention du Créateur qui leur donna cet instinct, et qui, ainsi, l’ajouta en quelque sorte aux organes mêmes de l’homme ?
Ceux qui profitent de l’inégalité sont ses ennemis naturels, et, pour défendre de toute atteinte l’inégalité et l’injustice, ils font la guerre à la justice et au droit.
Lorsque plus tard il écrivit, il se figurait toujours qu’il avait pour auditeurs ces esprits si délicats, si ennemis de toute affectation, si amateurs du style clair et des termes simples, et cette pensée le préserva des expressions abstraites ou vagues sur lesquelles les métaphysiciens chevauchent dans leurs promenades fantastiques, dont l’obscurité prétentieuse pouvait plaire à des écoliers, à des bourgeois, à des poètes, mais qui auraient exclu l’auteur du salon de Mme de la Fayette, et l’auraient relégué dans la société des sulpiciens.
Bonnivet, désespéré, se précipite au milieu des bataillons ennemis. […] Malheureusement l’incorrection et la prolixité ne sont pas les seuls ennemis de M. de Lamartine. […] Ils n’ont guère trouvé d’ennemi qu’en eux-mêmes : leur plus grande douleur a été l’humiliation de leur vanité. […] Le premier qui pose la main sur l’autel où se consume son encens est son ennemi déclaré. […] Il creuse le marbre avec ses genoux, il appelle Dieu à son aide pour terrasser l’ennemi, pour triompher de Satan.
a ses lecteurs au jour le jour : « … La presse a beaucoup d’ennemis. […] Le pessimisme moderne, sous prétexte de nous ouvrir les yeux sur la vanité de ce qu’il appelle des songes, a d’abord combattu le beau partout où il se trouvait, assurant que le beau n’existait pas ; il ajoutait, invoquant comme exemple, la réalité de nos désastres nationaux, que notre imagination, nos rêves héroïques, nous avaient perdus, et que la précision de nos ennemis, qui, eux, n’étaient pas des rêveurs, leur avait rendu le triomphe facile. […] Tout au contraire, mon ennemi d’à présent, plus scélérat que l’autre cependant, trouvait le moyen de garder une espèce de supériorité morale, même à cette heure terrible où il sentait bien que son forfait allait se dresser devant lui. […] » « Mais comment, repris-je quand, réfrénant enfin le tumulte de mes douloureuses pensées, oui, comment tous les ennemis mortels de ce martyr, qui durant sa vie ont à peine cité son nom, ont-ils répandu tant d’encre pour le porter aux nues, et le jour même de ses funérailles ? […] le sang, les pleurs, les cris, Les deuils et les trop grands coups d’aile des victoires D’être une cime où luit l’éclair dans les nuits noires, De vivre et d’attester que vos pères ont mis Leur âme dans l’airain des canons ennemis ?
Ses ennemis le représentent comme un dilettante maussade, un dandy grincheux, inépuisable narrateur d’anecdotes méchantes. […] J’ai commandé en chef devant l’ennemi. […] Ce préjugé haineux sépare, au grand profit des adversaires de notre patrie et des ennemis de notre liberté, ce qui doit être uni d’une jointure indissoluble. […] Qui ne sait, d’ailleurs, que les démocraties, lorsqu’elles ont peur d’être brutalisées par l’ennemi du dehors, se jettent aveuglément au-devant de César ? […] Il est sûr de vaincre parce qu’il ne voit pas l’ennemi.
Racine fit son entrée dans le monde des lettres par la tragédie de la Thébaïde ou les Frères Ennemis, en 1664. […] En outre, il craignait de réveiller la haine de ses ennemis et de compromettre sa réputation. […] Il est vrai, ajoutait-il, que les juifs n’avaient pour ennemis, ni jésuites, ni bigots. […] On a pensé que les ennemis de Racine étaient pour quelque chose dans cette défense ; la chose n’est point impossible. […] Enfin, la mort ne le débarrassa pas de ses ennemis.
Ils sont bien certains de leur amour, comme à côté d’eux tous les ennemis sont bien certains de leur haine, tous les vicieux de leur vice, tous les vertueux de leur vertu. […] Vous demandiez une tendresse et vous rencontrez une haine, une amante et vous rencontrez une ennemie, un abandon et vous rencontrez une bataille. […] Car d’homme à homme, il est des garanties, quand ce ne serait que l’honneur qui empêche que nos ennemis ne nous portent certains coups. […] Leconte de Lisle du reproche de rhétorique impassible que lui ont adressé les ennemis de son œuvre. […] La femme lui paraît une entrave dangereuse pour une existence d’artiste et il redoute l’amour comme le pire ennemi de sa chère peinture.
Ce qui s’est passé pour Moréas prouve une mauvaise foi encore plus criante chez les ennemis qu’on se fait en racontant la simple vérité. […] Paul Souday ne m’a pas pardonné ces irrévérences et m’a classé pour ce fait parmi les « ennemis de Moréas. » « M. […] Il n’admettait pas les dissidents et se fût plutôt employé à convertir ses ennemis. […] Il ne fut jamais l’ennemi des Bas-Bleus, « La haine des Bas-Bleus, a-t-il dit dans son livre sur le Féminisme, m’a toujours paru un sentiment stupide. […] Il eut cependant bien des ennemis littéraires, surtout parmi les jeunes.
Pour ceux qui seraient tentés de s’étonner de la forme du conseil, moins héroïque que le résultat, nous ferons remarquer que Tyrtée en personne n’usait guère d’une autre méthode que La Tour-d’Auvergne, lorsqu’il disait aux jeunes guerriers : « Tour à tour poursuivants ou poursuivis, ô jeunes gens, vous savez de reste ce qui en est : ceux qui tiennent ferme, s’appuyant les uns les autres, et qui marchent droit à l’ennemi, ceux-là meurent en moins grand nombre et ils sauvent les autres qui sont derrière ; mais ceux qui fuient en tremblant ont toutes les chances contre eux. » A l’un de ses retours de l’armée, Fauriel eut occasion, pour je ne sais quelle affaire, de visiter Robespierre, rue Saint-Honoré, en sa petite maison proche de l’Assomption ; un jour qu’il passait par là, il en fit la remarque à un ami. […] « Au surplus, dit-il à leur adresse, que gagneraient les ennemis de la philosophie à comprendre exclusivement sous cette dénomination les idées qui répugnent à leurs préjugés ou à leurs intérêts ? […] Nous pensons seulement que la vérité consacrée par le pouvoir doit avoir moins d’ennemis que la vérité de pure spéculation ; car, pour un assez grand nombre d’hommes, l’autorité des faits représente suffisamment celle de la raison. […] Fauriel le rendait bien d’ailleurs à son ami, moins encore par la manière dont il le louait que par celle dont il le sentait : lui, si ennemi des formes apprises et convenues, de tout ce qui avait une teinte de rhétorique ou d’académie, il n’en était que plus sensible à la poésie, à une certaine poësie pathétique et simple ; or, il y avait deux lectures en ce genre qui ne lui donnaient pas seulement l’émotion morale, mais qui avaient le pouvoir d’accélérer son pouls, de le faire battre plus vite : c’étaient certains chœurs d’Euripide et les chœurs de Manzoni. […] » — Et quelques mois après, un jour qu’il était plus souffrant des nerfs que de coutume, il laissait échapper ces mots irrités, dont l’allusion est assez sensible : « Lorsque les maux physiques surviennent, on a peine à concevoir avec quel acharnement les hommes se créent des maux d’une autre espèce ; et l’on éprouve surtout une indignation vive de ce que la nature, si féconde en douleurs, ne les dirige pas contre les ennemis de l’humanité.
A leur tour, les Romantiques provoquaient la lutte, défiaient l’ennemi et se montraient insociables et séditieux autant qu’il était possible. […] Un écrivain réaliste se décide à tirer parti du moindre détail observé chez un ami, même chez un indifférent ou un ennemi juré. […] Ennemi des romantiques, Zola se proposa de vivre d’une façon toute différente et de mener une existence rangée, prosaïque pour ainsi dire. […] Comme Flaubert, il se vante de préférer l’amitié à l’amour ; il se déclare un peu misogyne ou ennemi du beau sexe, et méprise Sainte-Beuve, trop esclave des jupes. […] Mais nous, les écrivains du camp ennemi, nous demandons à Dieu qu’il ne renonce pas à écrire comme il en a annoncé l’intention.
Tel est ce placet ; Molière s’y met convenablement à sa place ; il faut que le roi choisisse entre lui ou ses ennemis ; sinon plus de comédies pour le château de Versailles, ce qui était une grande menace à faire à Louis XIV. […] Il est beau, sans doute, d’être entouré d’ennemis ; de jeter à pleines mains, le sarcasme et le ridicule autour de soi ; de flétrir les vices, d’arracher d’insolents masques, de forcer à la retraite la sottise qui se pavane, de châtier Cottin et Tartuffe jusqu’au sang ; mais peu à peu grandit l’envie, et grandit la haine, en même temps que se montrent les hommes et les vices à châtier. […] À quoi le seigneur Géronimo, changeant de système et renonçant à donner une leçon désormais inutile, et d’ailleurs peu jaloux de se faire un ennemi du seigneur Sganarelle, se met à répliquer : — Vous avez raison ! […] Nous sommes sous le règne, non plus des ministres, mais des avocats ; il n’est plus là le prince ennemi de la fraude, assez puissant, pour briser de sa volonté souveraine, le contrat inique qui donne les biens de M. […] Alceste, le nouveau débarqué de Versailles, ce beau gentilhomme qui est élégant malgré lui, cet homme honnête et sérieux, qui a pour ennemis tous les mauvais poètes, pour rivaux tous les fats de la cour ; Alceste représenté par un jeune fourrier de la garde nationale de Marseille !
Et cependant Samson, à ce moment où il montre tant de douceur et de complaisance, sait tout : il sait la ruse de la femme, ses perfides confidences à son sujet, ses intelligences avec l’ennemi, et que la femme est et sera toujours Dalila. […] Mais si sa carrière de défenseur et d’athlète d’Israël est perdue, si ses yeux sont à jamais éteints, les cheveux ont repoussé à Samson et avec eux ses forces : il renverse un jour le temple de Dagon, écrase d’un seul coup ses trois mille ennemis, et il est vengé, Ce Samson va rejoindre, dans l’œuvre de M. de Vigny, son Moïse, et si j’avais aujourd’hui à nommer ses trois plus beaux et plus parfaits poèmes, je dirais : Êloa, Moïse et la Colère de Samson.
Les aigles plongent du haut du firmament sur la tête de leurs ennemis et ne les mordent pas au talon. […] De leurs dents de panthères elles déchirent le cœur palpitant d’un ennemi.
Les parents ne me regardaient plus comme un ennemi, et venaient souvent se poser tout près de moi, comme si j’eusse été l’un des rochers de la caverne. […] Mais alors son ennemi craint encore qu’il n’aille tomber dans l’eau du fleuve.
Certaines diatribes seront et sont déjà utilisées par nos ennemis. […] Les ennemis du xixe siècle réprouvent son romantisme et sa sensibilité.
Le fond de ces romans, ce sont les aventures de quelque amant en quête de sa dame, que lui disputent mille difficultés et mille ennemis, et qu’il finit par retrouver après beaucoup d’incidents romanesques. […] Là on le voit dans ce naturel qui se perfectionnera sans changer ; ennemi des préjugés, et vivant bien avec eux ; pénétrant les réalités derrière les apparences, et l’homme sous l’habit ; obéissant aux puissances ; à condition de n’en être pas dupe ; narguant toute classe qui profite de la simplicité populaire ; ami des innovations praticables, du progrès, et point de ce qui n’en a que l’air plus malin que méchant ; « cette certaine gaieté d’esprit, dont parle Rabelais, conficte en mespris des choses fortuites. » Le bon sens français a chassé le merveilleux romanesque ; la dissertation qui a pour objet d’établir quelques vérités pratiques, a remplacé les récits qui ne font qu’amuser.
La chose et le nom sont du même temps que la raison, qui donne seule tout leur lustre aux écrits ; ou plutôt ils ne sont que cette raison elle-même, qui invite les esprits à passer de la spéculation à la pratique, Le propre du bon esprit philosophique est de ne vouloir que des réformes modérées, où ce qui est à changer n’est pas haï comme un ennemi, mais jugé comme hors d’usage ; où l’on corrige les abus en laissant subsister le train général des choses humaines. […] Au lieu de se figurer l’éducation et l’instruction comme deux modes de culture incompatibles, et comme deux influences ennemies, que n’apprend-on dans Rollin comment elles sont inséparables ?
Supposez qu’un animal ou une plante varient en couleur par l’effet de causes fortuites ; si la couleur nouvelle se trouve propre à cacher l’animal et à empêcher ses ennemis, de le dévorer, cet « heureux accident » opérera un triage, une sélection : il fera survivre les animaux ou les plantes qui auront eu la couleur la plus propice. […] Supposons donc, dans cette nature soumise à un ordre intelligible, un être qui n’aurait pas cherché de raisons et d’antécédents à ses souffrances, à ses plaisirs, ou qui aurait réagi d’une manière différente sous des impressions semblables, d’une manière semblable sous des impressions différentes, tantôt fuyant son ennemi, tantôt se jetant dans sa gueule ; un être, en un mot, qui aurait voulu ou pensé comme si la nature n’avait point de règle intelligible : un tel être, n’étant pas viable, aurait disparu avec sa race de l’univers.
Mais l’homme de pensée ne s’y trouve-t-il pas mal à l’aise comme devant l’ennemi, comme devant l’œuvre de Dieu qui le mangera et fera de l’engrais et de la verdure de sa cervelle de philosophe ? […] Un parfait honnête homme, mais avec toutes les illusions de l’honnête homme, et absolument garé des leçons sceptiques du jeu de la vie, et croyant presque les lois d’une Salente bonnes pour la France, et ne guérissant pas de cette crédulité ingénue par quatre années de législature… C’était un ancien capitaine d’artillerie, un peu sourd, brusquement cordial, appelant tout le monde mon camarade, puis encore un homme de la campagne, doué de tout le bon que la nature donne aux bons êtres, incapable de vouloir du mal à ses ennemis, et qui portait cette bonté ainsi que son courage, sans effort, presque sans mérite, comme faisant partie de son tempérament.
Sainte-Beuve reproche à Taine d’avoir soumis son Histoire de la littérature anglaise à l’examen d’ennemis, d’inférieurs, enchantés de le faire passer sous leur férule et de l’admonester… Et la parole des uns et des autres de monter… et Taine de déclarer que les quatre grands grands hommes, sont : Shakespeare, Dante, Michel-Ange, Beethoven, qu’il dénomme « les quatre cariatides de l’humanité ». — Mais tout cela c’est de la force, et la grâce ? […] Ces moyens ne font pas des soldats bien attachés au drapeau ; loin de là, ils sont toujours prêts à passer pour le plus petit avantage de l’autre côté, si bien que là-bas l’expression déserter n’existe pas ou ne s’emploie jamais… et la peur du passage à l’ennemi est telle, qu’un moment Juarez était forcé de faire surveiller son infanterie par sa cavalerie.
Sur la foule de nos frères et de nos ennemis, Tolstoï a attaché le regard limpide et tranquille le plus aigûment pénétrant qu’ils aient souffert, et y portant ses larges et calmes mains, il a jeté dans son œuvre le groupe d’êtres d’âmes et de chairs dont elles étaient pleines, un morceau de création soustrait en sa forme mentale à la ruine du transitoire, tel quel, moite encore de la vie surprise, mou, ductile, coloré et bruissant ; tendrement saisie, conservée toute comme le commandait son prix, et laissée emmêlée comme le commandait sa mollesse, cette pêche miraculeuse d’êtres vivants a déterminé la beauté même et la forme de l’œuvre dans laquelle expire leur souple animation. […] Mêlée de vues bornées chez Lévine et sa femme, de morgue chez Wronsky, d’exaltée amertume chez Anna, de sèche étroitesse chez Karénine, cette bonté élémentaire et comme animale éclate pure cependant et puissante chez ce groupe d’êtres de haut rang, et dans le grave tableau de la mort de Nicolas Lévine, où son frère et la femme de celui-ci viennent simplement et cordialement s’asseoir au chevet de ce pauvre agonisant à côté de la prostituée dont il a fait sa compagne et, plus haute encore et plus belle, quand Anna adultère au su de son mari, et croyant mourir des couches de la fille de son amant joint la main de l’homme pour qui elle s’est perdue à celle de l’homme qu’elle a trahi et induit Karénine à pardonner avec tant de noblesse à son ennemi que le comte Wronski reste troublé de devoir s’incliner devant celui qu’il méprisait.
Encore que j’aime plus au théâtre le déroulement du rêve en banderolles mauves ou fils de Vierge que la marche échiquière de thèses dont nulle n’est ni ne peut être neuve, chacune est trop asymptote à sa Réalisation pour que Gerhart Hauptmann ne nous ait pas donné, au lieu de la tabletterie redoutée, une pièce de très haut Idéalisme, touchant plus même que l’Ennemi du Peuple, parce que plus près de nous. […] Je frappe l’ennemi, Je frappe, et me lance, et me lance en avant !
Puis, en quelques strophes rapides comme l’écroulement d’une maison ou d’une tente qui s’abîme coup sur coup sur Job, ses bergers et ses troupeaux sont enlevés par les ennemis de sa race ; la foudre tombe et brûle ses récoltes ; les Chaldéens tuent ses chamelles ; le Simoun, le vent du désert, renverse sa tente sur ses fils et ses filles et les étouffe sous ses débris pendant un festin. […] » s’écrient ses amis épouvantés de son blasphème ; mais leurs discours ne suffiraient pas à lui fermer les lèvres, quand le souverain interlocuteur, Dieu lui-même, sous la forme d’une inspiration sacrée et irrésistible, intervient dans le dialogue et écrase tout, amis, ennemis, orgueil, murmure, doute, plainte, blasphème, et le poète lui-même, sous la majesté foudroyante de la parole intérieure qui gronde dans le sein de Job.
Son audace, sa franchise et peut-être aussi son orgueil, lui valurent de nombreux ennemis, mais il faut reconnaître que le chef des naturistes répondit chaque fois aux attaques par de nouvelles œuvres, et il faut louer cet écrivain tenace et laborieux. […] John-Antoine Nau, romancier bizarre, original, dont la Revue Blanche avait donné quelques nouvelles exotiques, pour sa Force Ennemie, étude de psycho-physiologie morbide.
En la voyant faire à cet enfant, il devait se rappeler qu’il y avait plus de vingt ans qu’il ne l’avait commandée au sérieux et devant l’ennemi.
C’est une merveille, confesse le satirique d’Aubigné lui-même, comment cette femme, « de laquelle l’extrême beauté ne sentait rien de lascif », a pu vivre plutôt en reine qu’en maîtresse tant d’années et avec si peu d’ennemis.
Heureux le prince qui, durant le cours d’un règne long et florissant, jouit à loisir des fruits de sa gloire, de l’amour de ses peuples, de l’estime de ses ennemis, de l’admiration de l’univers… !
Le Régent n’a jamais été mieux peint que par sa mère ; elle nous le montre avec toutes ses facilités, ses curiosités en tous sens, ses talents, son génie propre, ses grâces, son indulgence pour tous, même pour ses ennemis ; elle dénonce ce seul défaut capital qui l’a perdu, cette débauche ardente et à heure fixe, où il s’abîmait et disparaissait tous les soirs jusqu’au matin : Tout conseil, toute remontrance à cet égard sont inutiles, disait-elle ; quand on lui parle, il répond : « Depuis six heures du matin jusqu’à la nuit, je suis assujetti à un travail prolongé et fatigant ; si je ne m’amusais pas un peu ensuite, je ne pourrais y tenir, je mourrais de mélancolie. » — Je prie Dieu bien sincèrement pour sa conversion, ajoute-t-elle ; il n’a pas d’autres défauts que ceux-là, mais ils sont grands.
Avec quel sentiment chevaleresque ce noble chanoine réserve ses belles expressions de douleur pour la mort du brave et noble chevalier dont la perte est à déplorer, tant sa loyauté était grande, sa foi pure, sa valeur terrible à l’ennemi, et son amour fidèle !
Lorsque le duc de Lorraine s’est porté du siège de Neuhaeusel qu’il est sur le point de prendre, au secours de Gran que les Turcs étaient près de forcer, on assiste à toute cette marche et à tous les accidents qui précédèrent la bataille ; la rapidité des Turcs, leur hardiesse à passer et repasser un ruisseau assez large et profond dont les bords sont escarpés, sous les yeux d’une armée ennemie de trente mille hommes, est bien rendue : « Il faut avouer que cette nation-là fait de belles diligences. » Pendant la bataille, les trois charges des Turcs, dont la première s’annonçait comme vive et dont la dernière est tout à fait molle, se dessinent aux yeux.
Ces jeunes princes, objets de tant de vœux et d’espérances et qui n’ont pas vécu, tous ceux à qui la voix du peuple comme celle du poète a pu dire : « … S’il t’est donné de vaincre les destins ennemis, tu seras Marcellus » ; ces figures inachevées que souvent l’imagination couronne, posent en passant un problème que les esprits les plus sérieux et les moins chimériques peuvent méditer au moins un instant.
Cependant Linné, qui payait de retour ses amis en nommant les plus jolies plantes de leurs noms, se vengeait assez innocemment de ses ennemis et adversaires en donnant leurs noms à des végétaux hérissés ou épineux.
Charron fait consciencieusement son devoir comme controversiste, comme prédicateur ; il amasse ses preuves, il fait servir sa philosophie comme une espèce de machine ou de tour pour battre en brèche la place ennemie : puis, quand il estime que la brèche est suffisante, il ordonne et fait avancer ses preuves directes ; mais tout cela sans feu, sans flamme ; on sent toujours l’homme qui a dit : « Au reste, il faut bien savoir distinguer et séparer nous-mêmes d’avec nos charges publiques : un chacun de nous joue deux rôles et deux personnages, l’un étranger et apparent, l’autre propre et essentiel.
Mais il y avait d’autres choses encore dans l’épitaphe ; il y disait d’Arnauld qu’il revenait de l’exil, ayant triomphé de ses ennemis, « exul, hoste triumphato » ; il l’appelait le défenseur de la vérité, l’oracle du juste, Arnaldus veri defensor, et arbiter aequi.
Et ce qu’il a eu encore de plus admirable et comme particulier en lui, c’est d’avoir approché les rois sans médiateur, d’avoir amassé des richesses sans avarice, d’être parvenu aux grandes charges sans ambition, d’avoir bâti une bonne maison avec peu de matière, d’avoir eu beaucoup de prospérité sans orgueil, d’avoir, aimant la douceur et la tranquillité, vécu trente-cinq ans de suite dans la Cour, fait sa retraite vingt ans avant de mourir, sans aucune disgrâce précédente, d’avoir vécu soixante et seize ans d’une santé très parfaite, rarement troublée de maladies, d’avoir joui en repos des biens qu’il avait amassés, d’avoir reçu de l’honneur aux charges qu’il a exercées, d’avoir fait grande quantité d’amis et point d’ennemis, d’avoir habité les maisons qu’il avait bâties, s’être promené à l’ombre des bois qu’il avait plantés, d’avoir reçu de ses enfants le contentement qu’il en pouvait espérer.
Je lui exprimai mes regrets qu’il ne fût pas resté en Angleterre lorsqu’il y était ; il me répondit qu’il l’aurait désiré, mais qu’on n’aurait pas voulu le lui permettre… Il m’assura qu’il avait toujours envié la vie d’un gentilhomme campagnard anglais, et que, pendant que ses ennemis l’accusaient d’avoir voulu se faire roi, il aurait volontiers échangé sa position et toute sa fortune contre une petite propriété en Angleterre, avec les privilèges de ce délicieux pays, qu’il espérait revoir encore… Je lui conseillai alors de s’arracher aux mains des misérables qui l’entouraient, et de ne pas les laisser abuser de son nom pour commettre de si horribles attentats.
J’aurais tout cela moins que Geoffroy, bien d’autres qualités moins encore, et je n’aurais de plus que lui qu’un amour de justice qui ferait des ennemis au rédacteur et pas un abonné au journal. » Parmi tous ces motifs de refus, il y en avait encore un autre, et le principal, que le malin ne mettait pas en ligne de compte, mais que le démon lui soufflait tout bas : c’est qu’il allait saisir la Renommée par un autre bout de l’aile.
La curiosité sur ce pays, à la fois si allié et si ennemi, était donc très-excitée et non satisfaite.
S’il n’en trouve pas sujet chez ses ennemis, il se dédommage sur ses amis mêmes.
Vallot, comme tous les gens en place, avait des ennemis et des jaloux.
Avant 89, il y a un but, il se mêle presque toujours à l’observation un élément dogmatique, polémique, une intention et une arme de combat ; c’est qu’on a en effet des ennemis à vaincre, à mettre en déroute : on est à la guerre, on marche à une conquête.
Le parti catholique et légitimiste, ennemi de la Révolution et du mouvement social, semblait avoir en ce temps-là, aux yeux de plusieurs, le privilège des hauts esprits et des hautes doctrines.
J’ai pourtant chéri la vertu : je ne crois pas avoir fait de mal à personne, pas même à mes ennemis ; j’ai toujours cherché les gens de bien et fui les méchants.
On sait mon nom ; ma vie est heureuse et facile ; J’ai plusieurs ennemis et quelques envieux ; Mais l’amitié, chez moi, toujours trouve un asile, Et le bonheur d’autrui n’offense pas mes yeux.
On sait comment les Étoliens, qui s’étaient abandonnés à leur foi, furent trompés ; les Romains prétendirent que la signification de ces mots, s’abandonner à la foi d’un ennemi, emportait la perte de toutes sortes de choses, des personnes, des terres, des villes, des temples et des sépultures même.
Il en est du champ de l’humanité comme de celui de Sempach : « L’œuvre qu’un seul commence, un grand peuple l’achève. » Chacun des successeurs de Colomb a pu dire : « J’ai fait le même voyage. » C’est ce qui arriva à Rotrou après Corneille. » Pour apprécier ici la vérité et la beauté de l’image, il faut savoir son histoire suisse de l’époque héroïque et se rappeler ce qu’était et ce que fit ce Winkelried, lequel, à la journée de Sempach, s’avançant le premier contre le bataillon hérissé de fer des Autrichiens qu’on ne pouvait entamer, étendit les bras pour ramasser le plus de piques ennemies qu’il put contre sa poitrine, et qui, tombant transpercé, ménagea ainsi dans la redoutable phalange une trouée par où les Suisses vainqueurs pénétrèrent.
Ce mot de La Fontaine : Notre ennemi, c’est notre maître, mot terrible et décisif s’il était réversible sur tout l’ancien régime de la France, lui a paru un cri particulier à la Champagne, et qui s’expliquait, selon lui, par les circonstances propres à cette province.
M. de Sartine, M. de Maurepas lui-même, se montrèrent justes et généreux envers le subordonné qui avait eu quelques torts à leur égard, mais non pas ceux dont ses ennemis l’avaient chargé.
Répondant dans cet écrit à ses ennemis et ses détracteurs, il disait : « Ils osent affirmer que c’est moi qui ai aliéné de nous les États-Unis, lorsqu’ils savent bien qu’au moment précis où ils impriment cet étrange reproche, des négociateurs américains arrivent en France, et qu’ils ne peuvent ignorer la part qu’il m’est permis de prendre dans cet événement, à raison du langage plein de déférence, de modération et j’ose dire aussi de dignité, que je leur ai adressé au nom du Gouvernement français… » Il sut les attirer en effet par d’adroites paroles ; mais comment les actes et les procédés y répondirent-ils, et que devint cette dignité de ton en présence des faits ?
Parmi les écoles conservatrices et non pourtant ennemies du progrès, celle qui a le plus de confiance en elle-même143, et qui n’est pas encore guérie de croire à l’efficacité absolue de certaines formes et de certaines distinctions plus théoriques que vraies, a dû, ce me semble, se guérir au moins de tout dédain envers ceux qui n’ont à apporter au concours des choses publiques qu’un empirisme équitable, modéré, et qui a sa philosophie aussi dans l’histoire.
Toute femme m’agrée… Ennemi déclaré de ce qu’il appelle l’honneur, c’est-à-dire de la délicatesse, préférant comme d’Aubigné l’estre au parestre, il se contente d’un amour facile et de peu de défense : Aymer en trop haut lieu une dame hautaine, C’est aymer en souci le travail et la peine, C’est nourrir son amour de respect et de soin.
Étienne devait à son bonheur même d’avoir des envieux et des ennemis : le bruit se répandit que la pièce des Deux Gendres n’était pas de lui, ou du moins qu’il avait eu pour la composer des secours tout particuliers, une ancienne comédie en vers.
L’urbanité des mœurs peut seule adoucir les aspérités de l’esprit de parti ; elle permet de se voir longtemps avant de s’aimer, de se parler longtemps avant qu’on soit d’accord ; et par degrés, cette aversion profonde qu’on ressentait pour l’homme que l’on n’avait jamais abordé, cette aversion s’affaiblit par les rapports de conversation, d’égards, de prévenance, qui raniment la sympathie, et font trouver enfin son semblable dans celui qu’on regardait comme son ennemi.
La recherche de la vraisemblance supprime celle de la vérité, et tandis que le vraisemblable pour Boileau était l’introducteur du vrai, et consistait à saisir le rapport de l’objet à l’esprit, il devient au xviiie siècle le pire ennemi de la nature, qu’il déforme quand il ne l’exclut pas.
Les moines, selon le vœu et l’esprit de leur ordre, chantent au chœur, au lieu de courir à l’ennemi : sottise.
Baudelaire nous confie qu’il ne s’asseyait jamais à sa table de travail sans angoisse et Mallarmé voit, comme lui, dans la page blanche « un ennemi redoutable à terrasser ».
Un patient collectionneur des œuvres de Cicéron, l’abbé Wibald de Corvey, se croit obligé de se défendre d’être plus cicéronien que chrétien, de poursuivre ses études antiques autrement qu’un éclaireur dans un camp ennemi.
Apprends-moi, si je dois ou me taire, ou parler… Aujourd’hui vieux lion, je suis doux et traitable126… Mes défauts désormais sont mes seuls ennemis.
Plus loin, si Duhamel découvre qu’une certaine maladie des grains provient d’un tout petit insecte qui s’y cache, Vicq d’Azyr nous montrera l’homme de bien ainsi en proie à des ennemis obscurs comme à un insecte caché.
Au chapitre sur les météores et les principaux souffles des vents, il faut l’entendre parler des anciens observateurs grecs et de leur supériorité relative : Mon étonnement est extrême, dit-il, quand je vois que dans le monde, autrefois si plein de discordes et divisé en royaumes comme en autant de membres, un aussi grand nombre d’hommes s’est livré à la recherche de choses si difficiles à trouver, et cela sans en être empêchés par les guerres, par les hospitalités infidèles, par les pirates ennemis de tous, et interceptant presque les passages ; et cela avec un tel succès, que, pour des lieux où ils ne sont jamais allés, on en apprend plus sur certains points, à faire de leurs livres, que par toutes les connaissances des habitants.
Il y a même quelque chose de plus grave, et que je ne vois aucune raison de dissimuler : selon Duclos, cette enfant si séduisante, et si chère au roi, n’en trahissait pas moins l’État en instruisant son père, le duc de Savoie, redevenu alors notre ennemi, de tous les projets militaires qu’elle trouvait moyen de lire : et avec sa familiarité folâtre, avec ses entrées à toute heure et partout, elle était à la source pour cela.
Les railleurs, les ennemis du critique (et il n’en manquait pas), les envieux du bel-esprit gouverneur, s’égayaient là-dessus, comme bien l’on pense ; les couplets ne tarissaient pas, et ce nom de La Harpe, qui faisait un singulier à-propos au talent célèbre de Mme de Genlis sur la harpe, prêtait à toutes sortes de calembours.
Quand le soir approchait, nos soldats, après avoir fait leur provision de bois pour la nuit, faisaient celle des postes ennemis, et traînaient des fagots entre les vedettes des deux armées.
Les bureaux furent partagés et départagés plusieurs fois… C’est un ennemi de l’Académie qui parle, ne l’oublions pas ; mais il est certain en effet que Patru avait conçu le plan et l’exécution du Dictionnaire tout autrement qu’on ne l’adopta alors ; il aurait voulu appuyer les jugements et définitions sur des citations de bons auteurs.
L’extrême rigueur dont on usa envers Fouquet désormais abattu et sans ressource, la justice exceptionnelle à laquelle on le livra, la partialité de quelques-uns des commissaires et de ceux qui étaient chargés de l’examen des papiers et du rapport, les pensées cruelles dont ses ennemis ne se cachaient point à son sujet, l’âpreté des vengeances politiques qui n’allaient pas à moins qu’à demander sa tête, les lenteurs et les péripéties du procès qui dura plus de trois ans à instruire, tout concourut à retourner l’opinion et à gagner à l’accusé la pitié universelle.
Dès les premiers jours, la plupart des Conventionnels restés dans les Conseils regardaient ouvertement les nouveaux nommés comme des intrus et des ennemis ; ils semaient autour d’eux les soupçons et les calomnies pour les décréditer du moins, ne pouvant les éliminer : « Ceci débute mal, dit tout haut Portalis présent à ces scènes : si les Jacobins ont le pouvoir de nous chasser d’ici, nous n’y resterons pas longtemps. » Il y resta assez, durant deux années, pour y fonder sa réputation d’orateur social, fidèle à tous les principes de modération et d’humanité.
Vous avez fait de moi une espèce de partisan politique et littéraire, faisant la guerre en conscience pour le compte de ses opinions qui se trouvent celles du grand nombre, sans prendre ni recevoir de mot d’ordre d’aucune autorité organisée ; ennemi du pouvoir, sans engagement avec l’opposition légale, ni même avec les affiliations populaires.
Leroy, un grand brun avec une grosse voix ; il est l’ennemi des prêtres, des empereurs, des rois et des romantiques, et cache, sous des apparences de truculence et de férocité physique, une parfaite bonne enfance et des idées pas mal prudhommesques.
J’ai donc entrepris de faire ressortir clairement, et avec toute la fermeté dont je suis capable, les uns et les autres, afin qu’on voie ses ennemis en face et qu’on sache contre quoi on a à lutter.
C’est un Voyage, non plus à travers ses ennemis, mais à travers sa vie et ses livres.
Le rire est son ennemi capital.
Le romancier qui soutient trop une thèse (voilà le défaut, malgré la grâce et les ressources de son talent), pose en fait que tous les gouvernements sont, (l’essence, les ennemis de la pensée, de l’art, de la poésie, ce qui n’est pas nécessairement, et il le prouve (on prouve tout ce qu’on veut quand on a de l’esprit et de l’invention dans l’esprit) par trois romans historiques qu’il a comme incrustés dans un premier roman, qui est la base même de sa thèse, discutée entre Stello, le poète spleenétique, et le docteur Noir, son médecin.
La satire est partout chez Molière et jusque dans Hamlet et dans L’Ennemi du Peuple.
Becque y passe au fil de sa langue tous ses ennemis. […] vous verrez qu’un beau matin, sans vous en douter, sans savoir pourquoi, vous trouverez en lui un ennemi mortel. […] Amour monstrueux qui me condamne à aimer un ennemi abhorré ! […] Louis Ménard, l’ennemi des philosophes, l’affirme. […] En vain, depuis douze années, l’ennemi l’assiège ; le Château se rit et des sabres recourbés des janissaires et des longs fusils des Albanais.
« Voici, dit-il, deux volumes de poésies serbes qu’on m’envoie ; apprenez le serbe. » C’est ainsi que ce vrai savant, ennemi des à peu près et des faux semblants, adressait chacun aux sources mêmes. […] Il ne tenait pas à se faire des ennemis. […] Nous ne pouvons nous plaindre maintenant d’avoir eu des ennemis acharnés, puisqu’ils sont battus ; la résistance atteste le péril de la victoire… Ils croyaient avoir porté un coup mortel à vous et à cette Muse nouvelle dont vous êtes le chevalier ; mais la Muse vous a dit, comme Estrelle à don Sanche : Relève-toi, mon Cid !
On a reporté sur la première l’amour et la vénération qu’on avait pour les droits qu’elle défendait ; on a versé sur la seconde le mépris et la haine qu’on ressentait pour la servitude qu’elle voulait introduire ; les passions politiques ont enflammé les croyances religieuses ; le protestantisme s’est confondu avec la patrie victorieuse, le catholicisme avec l’ennemi vaincu ; le préjugé a subsisté quand la lutte cessait, et aujourd’hui encore les protestants d’Angleterre n’ont point pour les doctrines des catholiques la bienveillance ou même l’impartialité que les catholiques de France ont pour les doctrines des protestants. […] Tous ces biens sont perpétuellement présents à ses yeux ; et quiconque attaque la liberté qui les fonde devient à l’instant son ennemi. […] Nous avons tous fait des théories, au coin du feu, dans une discussion, pour le besoin de la cause, lorsque, faute d’une raison, il nous fallait un argument postiche, semblables à ces généraux chinois qui, pour effrayer les ennemis, rangent parmi leurs troupes des monstres formidables de carton peint.
Car c’est un avantage capital de Taine, et que nul de ses ennemis ne songerait à lui contester, qu’il est net ; il ne masque point ses ambitions ; il ne dissimule point ses prétentions ; brutal et dur, souvent grossier, et mesurant les grandeurs les plus subtiles par des unités qui ne sont point du même ordre, il a au moins les vertus de ses vices, les avantages de ses défauts, les bonnes qualités de ses mauvaises ; et quand il se trompe, il se trompe nettement, comme un honnête homme, sans fourberie, sans fausseté, sans fluidité ; lui-même il permet de mesurer ce que nous nommons ses erreurs, et par ses erreurs les erreurs du monde moderne ; et dans les erreurs qui, étant les erreurs de tout le monde moderne, lui sont communes avec Renan, il nous permet des mesures nettes que Renan ne nous permettait pas ; nous lui devons la formule et le plus éclatant exemple du circuit antérieur ; je ne puis m’empêcher de considérer le circuit antérieur, le voyage du La Fontaine, comme un magnifique exemple, comme un magnifique symbole de toute la méthode historique moderne, un symbole au seul sens que nous puissions donner à ce mot, c’est-à-dire une partie de la réalité, homogène et homothétique à un ensemble de réalité, et représentant soudain, par un agrandissement d’art et de réalité, tout cet immense ensemble de réalité ; je ne puis m’empêcher de considérer ce magnifique circuit du La Fontaine comme un grand exemple, comme un éminent cas particulier, comme un grand symbole honnête, si magnifiquement et si honnêtement composé que si quelqu’un d’autre que Taine avait voulu le faire exprès, pour la commodité de la critique et pour l’émerveillement des historiens, il n’y eût certes pas à beaucoup près aussi bien réussi ; je tiens ce tour de France pour un symbole unique ; oui c’est bien là le voyage antérieur que nous faisons tous, avant toute étude, avant tout travail, nous tous les héritiers, les tenants, la monnaie de la pensée moderne ; tous nous le faisons toujours, ce tour de France-là ; et combien de vies perdues à faire le tour des bibliothèques ; et pareillement nous devons à Taine, en ce même La Fontaine, un exemple éminent de multipartition effectuée à l’intérieur du sujet même ; et nous allons lui devoir un exemple éminent d’accomplissement final ; car ces théories qui empoignent si brutalement les ailes froissées du pauvre génie reviennent, elles aussi, elles enfin, à supposer un épuisement du détail indéfini, infini ; elles reviennent exactement à saisir, ou à la prétention de saisir, dans toute l’indéfinité, dans toute l’infinité de leur détail, toutes les opérations du génie même ; chacune de ces théories, d’apparence doctes, modestes et scolaires, en réalité recouvre une anticipation métaphysique, une usurpation théologique ; la plus humble de ces théories suppose, humble d’apparence, que l’auteur a pénétré le secret du génie, qu’il sait comment ça se fabrique, lui-même qu’il en fabriquerait, qu’il a pénétré le secret de la nature et de l’homme, c’est-à-dire, en définitive, qu’avant épuisé toute l’indéfinité, toute l’infinité du détail antérieur, toute l’indéfinité, toute l’infinité du détail intérieur, en outre il a épuisé toute l’indéfinité, toute l’infinité du détail de la création même ; la plus humble de ces théories n’est rien si elle n’est pas, en prétention, la saisie, par l’historien, par l’auteur, en pleine vie, en pleine élaboration, du génie vivant ; et pour saisir le génie, la saisie de tout un peuple, de toute une race, de tout un pays, de tout un monde. […] La foule des simples gens devinera son ennemi avec un instinct profond. […] Ce dernier mot de la pensée moderne en tout ce qui tient à l’histoire, je sais qu’il n’est aujourd’hui aucun de nos historiens professionnels qui ne le désavouera ; et comment ne le renieraient-ils point ; nous sommes aujourd’hui situés à distance du commencement ; nous avons reçu des avertissements que nos anciens ne recevaient pas ; ou sur qui leur attention n’avait pas été attirée autant que la nôtre ; nous avons reçu du travail même et de la réalité de rudes avertissements ; du travail même nous avons reçu cet avertissement que le détail, au contraire, est au fond le grand ennemi, que ni l’indéfinité, l’infinité du détail antérieur, ni l’indéfinité, l’infinité du détail intérieur, ni l’indéfinité, l’infinité du détail de création ne se peut épuiser ; et de la réalité nous avons reçu ce rude avertissement que l’historien ne tient pas encore l’humanité ; qui soutiendrait aujourd’hui que le monde moderne est le dernier monde, le meilleur, qui au contraire soutiendrait qu’il est le plus mauvais ; s’il est le meilleur ou le pire, nous n’en savons rien ; les optimistes n’en savent rien ; les pessimistes n’en savent rien ; et les autres non plus ; qui avancerait aujourd’hui que l’humanité moderne est la dernière humanité, la meilleure, ou la plus mauvaise ; les pessimismes aujourd’hui nous paraissent aussi vains que les optimismes, parce que les pessimismes sont des arrêts comme les optimismes, et que c’est l’arrêt même qui nous paraît vain ; qui aujourd’hui se flatterait d’arrêter l’humanité, ou dans le bon, ou dans le mauvais sens, pour une halte de béatitude, ou pour une halte de damnation ; l’idée que nous recevons au contraire de toutes parts, du progrès et de l’éclaircissement des sciences concrètes, physiques, chimiques, et surtout naturelles, de la vérification et de la mise à l’épreuve des sciences historiques mêmes, de l’action, de la vie et de la réalité, c’est cette idée au contraire que la nature, et que l’humanité, qui est de la nature, ont des ressources infinies, et pour le bien, et pour le mal, et pour des infinités d’au-delà qui ne sont peut-être ni du bien ni du mal, étant autres, et nouvelles, et encore inconnues ; c’est cette idée que nos forces de connaissance ne sont rien auprès de nos forces de vie et de nos ressources ignorées, nos forces de connaissance étant d’ailleurs nous, et nos forces de vie au contraire étant plus que nous, que nos connaissances ne sont rien auprès de la réalité connaissable, et d’autant plus, peut-être, auprès de la réalité inconnaissable ; qu’il reste immensément à faire ; et que nous n’en verrons pas beaucoup de fait ; et qu’après nous jamais peut-être on n’en verra la fin ; que le vieil adage antique, suivant lequel nous ne nous connaissons pas nous-mêmes, non seulement est demeuré vrai dans les temps modernes, et sera sans doute vrai pendant un grand nombre de temps encore, si, même, il ne demeure pas vrai toujours, mais qu’il reçoit tous les jours de nouvelles et de plus profondes vérifications, imprévues des anciens, inattendues, nouvelles perpétuellement ; que sans doute il en recevra éternellement ; que l’avancement que nous croyons voir se dessiner revient peut-être à n’avancer que dans l’approfondissement de cette formule antique, à lui trouver tous les jours des sens nouveaux, des sens plus profonds ; qu’il reste immensément à faire, et encore plus immensément à connaître ; que tout est immense, le savoir excepté ; surtout qu’il faut s’attendre à tout ; que tout arrive ; qu’il suffit d’avoir un bon estomac ; que nous sommes devant un spectacle immense et dont nous ne connaissons que d’éphémères incidents ; que ce spectacle peut nous réserver toutes les surprises ; que nous sommes engagés dans une action immense et dont nous ne voyons pas le bout ; que peut-être elle n’a pas de bout ; que cette action nous réservera toutes les surprises ; que tout est grand, inépuisable ; que le monde est vaste ; et encore plus le monde du temps ; que la mère nature est indéfiniment féconde ; que le monde a de la ressource ; plus que nous ; qu’il ne faut pas faire les malins ; que l’infime partie n’est rien auprès du tout ; que nous ne savons rien, ou autant que rien ; que nous n’avons qu’à travailler modestement ; qu’il faut bien regarder ; qu’il faut bien agir ; et ne pas croire qu’on surprendra, ni qu’on arrêtera le grand événement.
Nous sommes environnés d’envieux, d’imbéciles, de traîtres, de lâches, et, si nous sommes forts, nous devons nous débarrasser de tous ces ennemis. […] Les bavardages, les commentaires, les critiques de journaux, les amis et les ennemis, viennent ensuite troubler le cerveau à tel point, qu’il est difficile de retrouver la pensée dans sa pureté première : mais au-dessus de l’impression, je mets les travaux mystérieux du temps, qui démolit une œuvre ou la restaure. […] Depuis qu’amis et ennemis ont fait à M. […] L’ennemi a trop beau jeu, et, se sentant à bout d’arguments, ils tâchent de s’en tirer par des faux-fuyants.
Je vous le souhaite pour ami plutôt que pour ennemi. […] Les ennemis de Bossuet sont les siens. […] Sa devise pourrait être celle de Guillaume d’Orange : « Je maintiendrai. » Ce qu’il s’est fait ainsi d’ennemis littéraires, le calculera qui pourra. Mais il ne s’en soucie guère ; disons mieux : il en est fier et content ; un bon contingent d’ennemis lui paraît nécessaire pour achever et consacrer la valeur d’un homme de lettres. […] Il est ennemi de la démocratie et il estime qu’on ne peut pas plus l’arrêter que la marée montante.
Minerve apparaît, — d’ailleurs ironique, elle aussi : « N’ayez pas peur : je ne suis pas votre ennemie, et je ne vous veux que du bien. […] Mais les quatre mousquetaires suivent l’homme masqué, le voient entrer dans une maison des faubourgs de Londres, regardent par la fenêtre, reconnaissent Mordaunt, pénètrent dans la maison mystérieuse, disent à leur ennemi : « Nous te tenons ! […] Quand ils seront endormis, il allumera la mèche qui doit mettre le feu aux poudres, s’éloignera dans le canot et aura la joie de voir ses ennemis éparpillés en petits morceaux dans un bouquet de feu d’artifice. […] Mais, tandis qu’ils barbotent enlacés, Athos parvient à dénouer l’étreinte de son ennemi, et l’achève d’un coup de sa bonne dague. […] Vers la fin, il offre ses services à l’ennemi, parce que les vivres manquent et qu’on lui fait attendre le payement de sa solde.
L’altier junker, leur ennemi, s’écria : « C’est le radicalisme qui apporte au roi ce cadeau. […] Ce n’est pas sans raison ; car rien n’est plus affreux que de se sentir aux prises avec un ennemi invisible. […] Ses ennemis politiques, bien qu’il leur fût redoutable, s’inclinaient devant la noblesse de son âme. […] À Leipzig, la cavalerie wurtembergeoise passa à l’ennemi sur le champ de bataille. Le roi Frédéric, jusque-là vassal de la France, était devenu son ennemi.
… Voyons, général consul, j’en appelle à votre cœur ; permettez que j’y dépose mes plaintes et que je remette entre vos mains ma défense contre les ennemis que je sais avoir. […] Il a vu que les hommes sont les ennemis des femmes, que partout l’innocence est souillée et que la dégénérescence de l’espèce est le résultat de nos corruptions. […] Albert Sorel, ménage à l’Europe de grandes surprises, mais il y en a une que la Russie ne fera jamais à ses amis comme à ses ennemis, c’est d’abandonner sa politique. […] Dîme du butin conquis sur les ennemis. […] Au milieu, Apollon, dieu de Delphes et protecteur d’Olympie, père de Kentauros et de Lapithès, les ancêtres des deux races ennemies.
Il est vrai aussi que la vivacité du sentiment littéraire s’émousse dans le pénible labeur de la recherche érudite, et que, d’autre part, l’exactitude minutieuse de la recherche érudite est l’ennemie naturelle des généralisations de la philosophie. […] Nourrisson est de cette école, quand il s’évertue laborieusement à nous prouver que Pascal n’est pas « un ennemi de la philosophie » ; et M. […] Tout laquais, valet de chambre ou secrétaire qu’il soit, il n’est pas ennemi né de son maître, ni de ses semblables. […] La marquise de Lambert, au palais Mazarin, locataire, voisine et amie du duc de Nevers, le protecteur déclaré de Pradon contre Racine, amie plus intime encore du marquis de Saint-Aulaire, l’ennemi particulier de Boileau, goûtant elle-même très médiocrement Molière, et, — qui sait ? […] Que si d’ailleurs on s’étonnait, comme nous-même quand nous avons examiné le point, qu’aucun journaliste à Paris n’eût parlé du roman au moment de son apparition, que les pires ennemis de Prévost n’en semblent avoir eu connaissance que deux ans plus tard, et qu’enfin la police elle-même n’ait fait saisir le livre qu’en 1733, la réponse est facile.
Pour ces sièges « entrepris, comme on disait, à la racine des Alpes », il fait transporter, au temps voulu, pièces et munitions ; il étudie et saisit le côté faible des places, le point unique où le canon y peut mordre ; il pronostique le jour et l’heure de la prise ; il ne s’en fie qu’à ses yeux et se risque de sa personne, seul, dans des reconnaissances jusqu’au pied des bastions ennemis ; sur quoi il mérite que Henri IV lui écrive, à la fin de ce siège de Montmélian : Mon ami, autant que je loue votre zèle à mon service, autant je blâme votre inconsidération à vous jeter aux périls sans besoin.
Cette scène d’arrivée et de débarquement en vue de l’ennemi est vive chez Joinville, et pleine de couleur : Le jeudi après Pentecôte arriva le roi devant Damiette, et trouvâmes là toute l’armée du Soudan sur la rive de la mer, de très belles gens à regarder ; car le Soudan porte les armes (armoiries) d’or, sur lesquelles le soleil frappait, qui faisait les armes resplendir.
— Dieu vous a formé dans un dessein plus sage, non pour porter des chaînes, mais pour subjuguer ; il vous appelle à lutter contre vos ennemis, et tout d’abord vous impose un combat contre vous-même, le plus rude de tous.
Je l’ignore, lui écrit Cowper, mais, du moins, s’il est un ennemi de la personne et de l’enveloppe, il est un ami de l’âme, et vous l’avez trouvé tel.
Quelque jugement que l’orateur de la compagnie porte en secret sur celui qu’il est chargé de recevoir, lui eût-il refusé son suffrage, eût-il traversé son élection, fût-il même son ennemi, il doit oublier tout, dès qu’il se trouve à la tête de la société respectable qui vient d’adopter le nouvel académicien.
Cette lettre, publiée par Voltaire, est devenue historique, et elle fait le plus grand honneur auprès de la postérité à l’esprit et à l’humanité de M. d’Argenson : « Vous m’avez écrit, monseigneur, lui répondait Voltaire, une lettre telle que Mme de Sévigné l’eût faite, si elle s’était trouvée au milieu d’une bataille. » Et cet éloge est mérité ; on a la description gaie, vive, émue, du combat, du danger, du succès plus qu’incertain à un moment, de la soudaine et complète victoire ; le principal honneur y est rapporté au roi : puis, après tout ce qu’un courtisan en veine de cœur et d’esprit eût pu dire, on lit les paroles d’un citoyen philosophe ou tout simplement d’un homme : Après cela, pour vous dire le mal comme le bien, j’ai remarqué une habitude trop tôt acquise de voir tranquillement sur le champ de bataille des morts nus, des ennemis agonisants, des plaies fumantes… J’observai bien nos jeunes héros ; je les trouvai trop indifférents sur cet article… Le triomphe est la plus belle chose du monde : les Vive le roi !
Mais l’homme dur et rigide, l’homme tout d’une pièce, plein de maximes sévères, enivré de sa vertu, esclave des vieilles idées qu’il n’a point approfondies, ennemi de la liberté, je le fuis et je le déteste… Un homme haut et ardent, inflexible dans le malheur, facile dans le commerce, extrême dans ses passions, humain par-dessus toutes choses, avec une liberté sans bornes dans l’esprit et dans le cœur, me plaît par-dessus tout ; j’y joins, par réflexion, un esprit souple et flexible, et la force de se vaincre quand cela est nécessaire : car il ne dépend pas de nous d’être paisible et modéré, de n’être pas violent, de n’être pas extrême, mais il faut tâcher d’être bon, d’adoucir son caractère, de calmer ses passions, de posséder son âme, d’écarter les haines injustes, d’attendrir son humeur autant que cela est en nous, et, quand on ne le peut pas, de sauver du moins son esprit du désordre de son cœur, d’affranchir ses jugements de la tyrannie des passions, d’être libre dans ses idées, lors même qu’on est esclave dans sa conduite.
Liautard, cet homme d’activité et d’intrigue, dont l’action tendait à s’étendre fort au-delà de son collège, se vantait d’être un antagoniste déclaré, un ennemi.
Il se fait quelquefois son propre ennemi en apparence et son persécuteur acharné : pourvu qu’il subsiste, tout lui est bon.
Dessinant toujours son programme, et voulant donner idée de ce qu’un homme éloquent aurait pu faire et dire en sa place dans cette Rhétorique supérieure qu’il décrit : « Il eut encore fait voir, dit-il, qu’il n’y a jamais eu de langue où l’on ait écrit plus purement et plus” nettement qu’en la nôtre ; qui soit plus ennemie des équivoques et de toute sorte d’obscurité ; plus grave et plus douce tout ensemble, plus propre pour toutes sortes de styles ; plus chaste en ses locutions, plus judicieuse en ses figures ; qui aime plus l’élégance et l’ornement, mais qui craigne plus l’affectation.
Ce n’est pas de ce côté que me paraît être le plus grand danger pour le roué et le libertin marié, pour peu qu’il soit sincèrement marié et qu’il tienne à bien vivre ; le pire danger est en lui-même ; son plus grand ennemi est dans son vice ; car comment ne pas rester ou redevenir libertin quand on l’a été ?
… de nouveaux ennemis s’élèvent, menaçant de lier nos âmes avec des chaînes séculaires ; aide-nous à sauver notre libre conscience des ongles des loups mercenaires qui pour tout Évangile ont leur panse. » C’est le même sentiment que chez Marwell, plus héroïque et plus martial chez celui-ci, plus purement chrétien chez Milton.
Le poète critique attribue même un peu trop à Homère quand, se souvenant à son sujet d’un mot d’Horace pour le réfuter, il dit que là où nous voyons une faute et une négligence, il n’y a peut-être qu’une ruse et un stratagème de l’art : « Ce n’est point Homère qui s’endort, comme on le croit, c’est nous qui rêvons. » Le beau rôle du vrai critique, Pope l’a défini et retracé en divers endroits pleins de noblesse et de feu, et que je rougis de n’offrir ici que dépolis et dévernis en quelque sorte, dépouillés de leur nette et juste élégance : « Un juge parfait lira chaque œuvre de talent avec le même esprit dans lequel l’auteur l’a composée : il embrassera le tout et ne cherchera pas à trouver de légères fautes là où la nature s’émeut, où le cœur est ravi et transporté : il ne perdra point, pour la sotte jouissance de dénigrer, le généreux plaisir d’être charmé par l’esprit. » Et ce beau portrait, l’idéal du genre, et que chaque critique de profession devrait avoir encadré dans son cabinet : « Mais où est-il Celui qui peut donner un conseil, toujours heureux d’instruire et jamais enorgueilli de son savoir ; que n’influencent ni la faveur ni la rancune ; qui ne se laisse point sottement prévenir, et ne va point tout droit en aveugle ; savant à la fois et bien élevé, et quoique bien, élevé, sincère ; modeste jusque dans sa hardiesse, et humainement sévère ; qui est capable de montrer librement à un ami ses fautes, et de louer avec plaisir le mérite d’un ennemi ; doué d’un goût exact et large à la fois, de la double connaissance des livres et des hommes ; d’un généreux commerce ; une âme exempte d’orgueil, et qui se plaît à louer, avec la raison de son côté ?
Il nous la montre « aimable dans ses reparties, ingénieuse dans le détail de ses réponses et de ses propos ; ayant le cœur droit, excellent », très aimée, populaire même ; digne fille d’un vertueux père « qui avait répandu en elle toute la bonté et la candeur d’un monarque honnête homme ; ennemie de la dépense, souffrant des tourments réels et des supplices quand elle apprenait quelque calamité publique » ; une vraie mère des Français ; adoptant et admirant tout des grandeurs de la nation ; ne se considérant d’ailleurs que comme la première sujette de son époux : « Véridique avec le cardinal Fleury, hardie même auprès de lui plutôt que fausse, elle sortait, mais rarement, de cet état d’indifférence où elle s’était mise, et lui reprochait avec esprit et doucement les petites tracasseries qu’il lui faisait auprès du roi ; elle souriait un peu malignement, le déconcertait quelquefois et prenait alors le ton de reine de France ; elle lui disait que c’était à lui qu’elle était redevable d’une telle parole du roi.
Catinat, le probe, l’homme de la régie et du devoir, l’ennemi des passe-droits et des exactions, était son contraire ; on le savait de reste, mais on aurait pu l’oublier : le propos cité nous le rappelle.
Malgré tout, l’Iliade, non pas lue comme la lisait Ronsard, en trois jours, avec ce degré de chaleur et d’intérêt qui s’attache à une lecture plus ou moins courante, mais examinée et relue avec des yeux ennemis, avec des yeux de critique, armés du microscope, l’Iliade laisse voir bien des contradictions, en effet, des disparates, des hors d’œuvre, des superfétations, des sutures plus ou moins habiles.
Né dans une classe obscure de la bourgeoisie, imbu de tous les principes de la philosophie moderne, et cependant tenant plus qu’aucun ecclésiastique à la hiérarchie du Clergé, vain, bavard, fin et brusque à la fois, fort laid et affectant l’homme singulier, traitant les gens les plus élevés comme ses égaux, quelquefois même comme ses inférieurs, l’abbé de Vermond recevait des ministres et des évêques dans son bain, mais disait en même temps que le cardinal Dubois avait été un sot ; qu’il fallait qu’un homme de sa sorte, parvenu au crédit, fît des cardinaux et refusât de l’être. » Si l’abbé de Vermond disait de ces choses à tous venants et sans discerner son monde, il avait grand tort ; mais il faut convenir que ce qu’on a présentement sous les yeux ne répond pas tout à fait à ce signalement, tracé par une griffe ennemie.
La religion de l’histoire, le numen historiæ de Pline le Jeune et de Tacite, ils n’en ont pas une bien haute idée, ils ne l’admettent pas : « L’histoire, disent-ils, est un roman qui a été ; le roman est de l’histoire qui aurait pu être. » — La tragédie, ils n’en pensent pas mieux que de l’histoire, mais ils la redoutent davantage, et ils lui en veulent comme au fantôme ennemi qu’on évoque de temps en temps et qu’on fait semblant de ressusciter contre les genres vivants et modernes ; ils disent : « Il est permis en France de scandaliser en histoire : on peut écrire que Néron était un philanthrope, ou que Dubois était un saint homme ; mais en art et en littérature les opinions consacrées sont sacrées : et peut-être, au xixe siècle, est-il moins dangereux, pour un homme de marcher sur un crucifix que sur les beautés de la tragédie. » Artistes jusqu’à la moelle, ils voient le monde par ce côté unique de l’art ; c’est par là qu’ils sont offensés, c’est par là qu’ils jouissent ; c’est à être un artiste indépendant, sincère, absolu et sans concession, qu’ils mettent le courage civil : « Il faut plus que du goût, il faut un caractère pour apprécier une chose d’art.
Ses livres peuvent attirer et forcer l’admiration pendant quelques pages, mais bientôt leur monotonie fatigue ; car ils sont le contraire de ces écrits chers à Montaigne, pleins de suc et de moelle intérieure, pétris d’expérience et d’indulgence, qui gagnent à être exprimés et pressés, et qui de tout temps ont fait les délices des hommes de sens, des hommes de goût, des hommes vraiment humains… Au résumé, c’est un militant ; il l’est en tout et partout ; comme tel, il laissera dans l’histoire des guerres politiques et religieuses de ce temps une trace lumineuse : Lacordaire et lui, deux lieutenants de La Mennais, et qui ont continué de tenir brillamment la campagne après que leur général avait passé à l’ennemi.
Sa femme, née dans la même condition que lui, mais d’esprit naturel, d’imagination, et d’un parler pittoresque, sa femme, qui d’abord était ennemie jurée des vers et lui cachait plumes et papier, maintenant qu’elle sait le prix de la rime, lui offre toujours, d’un air gracieux, la plume la plus fine et le papier le plus doux : « Courage !
D’ailleurs, Mme de Sévigné était parfaitement sincère, ouverte, et ennemie des faux-semblants ; c’est même à elle, une des premières, qu’on doit d’avoir dit une personne vraie ; elle aurait inventé cette expression pour sa fille, si M. de La Rochefoucauld ne l’avait déjà trouvée pour Mme de La Fayette : elle se plaît du moins à l’appliquer à ce qu’elle aime.
Toujours préoccupées, répondant d’un air distrait, votre oreille attentive reçoit quelques mots échappés à votre fils dans la chambre voisine… Sa voix s’élève… La conversation s’échauffe… Peut-être s’est-il fait un ennemi implacable, un ami dangereux, une querelle mortelle.
Il a la sensibilité des orgueilleux, cette irritabilité du moi hypertrophié que tous ses ennemis ont sentie.
Ils revivront dans leur chair, et pour un monde dont ils seront les rois et les juges ; ils assisteront au triomphe de leurs idées et à l’humiliation de leurs ennemis.
Il méprise Jeanne d’Arc dès que les patriotes vomissent sur elle leurs louanges et, puisque les clergés actuels se réclament du nom de Jésus, il oublie que Jésus vivant fut l’ennemi des clergés et de toutes les organisations oppressives.
Quand elle entre dans le bal où elle va chercher son ennemi, les hommes chuchotent, les femmes se voilent de leurs éventails : l’entrée de la grande Courtisane de l’Apocalypse, montée sur son dragon à sept têtes, ne produirait pas un effet pareil.
Sous la figure de l’abbé de Janson, il a peint lui-même, à son insu, quelques traits de sa propre nature, de sa propre ambition spirituelle d’apôtre : « L’apostolat, dit-il, qui était sa vraie, son unique vocation, le tourmentait et l’emportait dès les premiers jours de son sacerdoce. » On était à la fin de l’Empire : M. de Janson cherchait une carrière à son zèle, un champ pour y semer la parole, et n’osant songer à la France, alors muette, il errait en esprit de l’Amérique à la Chine, de la Chine aux bords du Gange : Tout à coup, au sein même de la patrie, poursuit l’orateur, un cri prodigieux s’élève : le descendant de Cyrus et de César, le maître du monde, avait fui devant ses ennemis ; les aigles de l’Empire, ramenées à plein vol des bords sanglants du Dniepr et de la Vistule, se repliaient sur leur terre natale pour la défendre, et s’étonnaient de ne plus ramasser dans leurs serres puissantes que des victoires blessées à mort.
Tous les ennemis du dernier régime y ont découvert à l’envi des trésors de fiel et de colère, un arsenal d’invectives étincelantes.
Je n’ai pas daigné lire tous ces ouvrages de la haine et de l’envie de mes ennemis, et je me suis rappelé cette belle Ode d’Horace : Le sage demeure inébranlable… Et il continue de lui paraphraser le « Justum et tenacem… » On reconnaît dans cette admirable leçon le disciple de Bayle sur le trône.
Pourquoi aller donner la main à Hobbes ou aux Pyrrhoniens, à ces ennemis des premières vérités naturelles ?
Je voudrais pourtant donner quelque idée au lecteur ami des lettres, et que les préventions d’école n’aveuglent point, des richesses et des ressources que la poésie moderne recèle ; car on la calomnie souvent, et il y a des critiques instruits qui s’empressent de déclarer, à chaque rencontre, l’école moderne morte, et qui, de plus, ont l’air d’en triompher, comme si c’était le cas du proverbe : Tant plus de morts, tant moins d’ennemis.
Si la conversation roulait sur ses ennemis, d’ordinaire il coupait court : Nous avons, disait-il à son ami Gudin, un meilleur emploi à faire de nos conversations : elles deviendraient tristes, au lieu d’être amusantes ou instructives. — Ils font leur métier, faisons le nôtre, disait-il encore.
Et quand il fait, à la fin de cette Épître, un retour sur lui-même et sur ses ennemis : Et qu’importe à nos vers que Perrin les admire ?
L’on voit volontiers accouplées ces sonorités identiques, hier ennemies, cuir — buires, roi — voix — joie au mépris de la vaine habitude des yeux ; des assonances fort délicates, telles que : ciel — hirondelle, quête — verte, guimpe — limbe ; d’agréables rimes intérieures qui rappellent, avec beaucoup plus d’art, les jeux des poètes latins du XIIIe siècle : Ô Méditerranée, salut ; voici Protée qui lève de tes vagues son front couronné d’algues.
Je ne veux pas ajouter à la nuée de mes ennemis, une nuée de surnuméraires.
Que les particuliers se gouvernent comme s’ils devoient avoir leur ennemis pour héritiers, et que la géneration présente se conduise comme si elle devoit être le dernier rejetton du genre humain ; cela n’empêche pas que nous ne raisonnions mieux dans les sciences que n’ont fait tous les hommes qui nous ont précedé.
La question, entre les amis et les ennemis de l’autobiographie, peut se réduire à ceci : les uns veulent que le musicien qui nous enivre de ses mélodies joue derrière un paravent de carton ; il doit rester invisible, sous peine de n’être plus qu’un histrion.
Quoique Raynaud ait abandonné l’École décadente, il n’est point pour cela devenu mon ennemi ; c’est donc en toute impartialité que je peux parler de lui.
Tous ceux-là qui s’imaginaient être le plus en dehors du débat et qui se moquaient de nous et de nos querelles, tous les philosophes de ce temps qui croient encore aux lois morales (et tous veulent avoir l’air d’y croire, ces ennemis de Tartuffe !)
Aussi, précisément pour cette raison, cette Correspondance dut ravir et ravit les ennemis de l’Église.
Ils jugent enfin que la science de l’amusement a été de tout temps le plus redoutable ennemi de la gaieté, et ils assurent que ces habitants de la province, qui devraient s’ennuyer d’après tant de romans, sont habituellement d’une plus solide gaieté que beaucoup de Parisiens qui s’amusent.
Héros qui pour votre pacifique contrée avez péri, et vous qui, fuyant, avez taché de vos blessures les neiges de vos montagnes, pardonnez-moi d’avoir jamais nourri en moi une pensée de bénédiction pour vos ennemis !
Pendant ses campagnes en Vendée, il avait appris des chansons républicaines, et particulièrement celle qui commence ainsi : Le fanatisme insensé, l’ennemi juré de notre liberté, est expiré. […] Quatorze chars à quatre roues, traînés par six chevaux, étaient ornés des drapeaux pris aux différentes nations ennemies par chacun des corps d’armée, et ces trophées étaient entourés de soldats blessés et invalides de ces quatorze armées. […] Cette fois, chacun des chars répondait à une armée, et l’on y voyait des drapeaux réellement pris sur l’ennemi, et quelques-uns des braves qui s’étaient exposés pour les enlever. […] Plus jeune encore que le tambour Barra, dont il a déjà été parlé, un enfant, Agricole Viala, dans un combat près d’Avignon, avait passé la Durance à la nage, disait-on encore, et était tombé sous le feu de l’ennemi, en criant aussi : Vive la république ! […] Le contact de nos armées avec les populations de l’Allemagne et de l’Italie, avait familiarisé les Français avec les idiomes de leurs ennemis.
Au milieu de ses tourments et de ses affronts, il répondit à ses ennemis : Ego palam locutus sum mundo, et in oculto locutus sum nihil. […] L’orage passa cependant ; la croix se releva : l’esprit chrétien pénétra comme un souffle bienfaisant dans l’art de ses adorateurs, et même dans celui de ses ennemis. […] Pour y parvenir, elle feint une grossesse, l’annonce aux ennemis et aux indifférents, assiste aux couches en Suisse et ramène triomphalement sa proie. […] Skelton, le dernier des satiriques du moyen-âge, lié avec Érasme et ennemi acharné du cardinal Wolsey, lance, sans être inquiété, ses flèches les plus hardies contre le pouvoir. […] Un homme de tant de flair qui a si bien jugé leur ennemi !
Il a été l’ennemi résolu du christianisme, il faut en prendre notre parti. […] « Le petit fanatique repousse avec horreur les offres de l’ennemie. […] Ceux qui, déjà, lui ont rendu le service de le débarrasser d’un ennemi. […] Mais par malheur son échauffement de satiriste ennemi des Philistins a fait croire à Barrière qu’il peignait des monstres, alors qu’il peignait des bourgeois d’immoralité moyenne. […] à un ennemi ?
Au bivouac, où l’on entend hennir les chevaux des avant-postes ennemis, je me serais laissé entraîner. […] Le grand ennemi de sa patrie, qu’il admire, lui a rendu un hommage flatteur. […] Leur histoire, c’est alors celle de leurs démêlés avec des ennemis ou des rivaux, ou de leurs luttes contre les circonstances extérieures, toujours plus fortes : escarmouches sans éclat, batailles sans gloire. […] J’honorais, par ouï-dire, l’harmonie de l’ensemble, la pureté des formes, j’étais un ennemi juré de la spontanéité confuse de l’ornementation gothique. […] Le drame est tombé : entre les personnages dont la passion a fait un instant des ennemis, il n’y a plus que calme et bienveillance : « Tous les sentiments tristes et pénibles des temps intermédiaires étaient oubliés : plus de rancune ; toute espèce d’aigreur avait disparu.
Les singes, qui sont capables d’héroïsme devant l’ennemi et de se faire tuer les uns pour les autres, sont les animaux les plus imitateurs du monde. […] Il a crié : « Le cléricalisme, voilà l’ennemi », tout aussi bien que Jules Ferry ; et s’il n’a pas inventé l’article vu, il en a été partisan tout comme un autre. […] Le Bon, est le contraire même du socialisme et elle est son redoutable ennemi. […] C’est de voir qu’au xviiie siècle, les gens de votre robe sont aussi ennemis de la lumière au physique qu’au moral. » Oyez encore ceci dans le genre noble. […] Est-ce que vous ne seriez pas un ennemi de toute religion et qui a intérêt à ne voir dans les apologistes d’une religion que des hypocrites ?
Ou encore, et comme contre-épreuve, regardez et remarquez ce qu’il attaque en la plupart de ses ennemis littéraires. […] Et voilà pourquoi les ennemis de Boileau ne pouvaient pas lui faire un grief de la timidité de son naturalisme. […] C’est que nous voyons comment et pourquoi se sont coalisés contre Boileau les ennemis les plus différents : des cartésiens comme Fontenelle, de beaux esprits, comme Perrault, et des sots aussi, comme le fameux Desmarets de Saint-Sorlin, l’auteur de Clovis, des Visionnaires et d’Ariane. […] Neveu des Corneille, il était en cette qualité l’ennemi-né de Racine, dont il ne devait pas perdre une occasion de médire ; l’ennemi par conséquent de tous les amis de Racine, qui n’en avait pas de plus familier ni de plus cher que l’auteur des Satires ; et enfin, et par suite encore, l’ami de tous leurs ennemis. […] Oui, sans doute, il maltraite outrageusement ses ennemis personnels ; il parle des Latins et des Grecs sans assez les connaître ; et sa critique, en général — qui ne manque pas au moins de vivacité ni d’émotion. — manque d’esprit, manque de largeur, manque de portée.
Surtout ils combattent ce grand ennemi du dedans : le désir. […] Juste de Constant était un bien cruel ennemi de lui-même. […] A une formation morale contradictoire, à une éducation qui a pris l’âme entre deux influences violemment ennemies, et fait d’un même homme deux hommes irréconciliables. […] Mais il n’est pas de désir qui résiste moins à l’examen de l’intelligence, ni soit plus ruineux à l’énergie de la volonté, les passions étant à la fois le moyen nécessaire du bonheur et ses pires ennemies, et toute activité étant lutte. […] Sa psychologie du prêtre existait dès 1830, époque où il n’était pas un ennemi de l’autel, mais où le romantisme imposait déjà à ses conceptions, sans le commander encore à ses sentiments, le plus pur dévergondage révolutionnaire.
priez Dieu pour vous, que nous rencontrions l’ennemi loin d’ici, parce que le soldat qui s’est battu, devient une bête féroce pendant trois jours… et moi-même je n’en suis pas le maître ! […] Une seconde tournée à midi, suivie d’un repos, où le garde qui était un vieux soldat de la garde impériale, un grand homme sec, toujours grognonnant, mais le plus brave homme de la terre, me racontait interminablement toujours, je ne sais quelle bataille, où l’action terminée, n’ayant rien pour s’asseoir, ils avaient mangé assis sur des cadavres d’ennemis. […] L’ennemi nous débusquera, ce matin, du plateau de Chardogne qui commande Bar-le-Duc, et nous devons reprendre le plateau dans l’après-midi.
Sans nous attarder aux brillantes tentatives du xviie et du xviiie siècle, et tout en donnant cette opinion de Voltaire qui veut que « les vers soient tellement faits que le lecteur ne s’aperçoive pas qu’on a été occupé de la rime », rappelons que Fabre d’Olivet, au commencement de ce siècle, s’éleva contre les ennemis de la rime, déclarant que « tout le mal que l’on dit d’elle n’est vrai qu’entre les mains d’un homme sans génie ou qui plaint sa peine », ce qui n’empêchera pas Mistral de nous donner une merveilleuse épopée et quelques poètes contemporains de mener bataille contre la rime. […] Je ne suis pas, en principe, l’ennemi déclaré de ce que vous appelez le « vers libre », le « vers décadent » ; si l’on est doué d’une extrême finesse d’oreille, d’une très grande délicatesse de touche, on en peut, à l’occasion, tirer d’excellents effets ; mais force m’est bien de reconnaître que, les trois quarts du temps, ce vers, ou soi-disant vers, n’est que de la prose rimée ou assonancée. […] Henri de Régnier, qui se juge poète plus intéressant et populaire que Mistral et… les autres, a bien emboîté le pas à M Moréas, créant ainsi, en poésie, une sorte de mode hellénique ; aussi, nous plaît-il de saluer en ces deux poètes (qui, sans doute, se croient ennemis), MM.
quatre heures par jour en face de quarante paires d’yeux ennemis, qui saisissent le moindre oubli au vol, pour vous le faire payer par quelque mauvais tour ! […] Ses ennemis étaient au grand complet : tous ceux qu’il avait lésés, tous ceux qu’il avait frappés ou molestés, ceux dont il avait déshonoré les filles ou les sœurs, ceux dont il avait envoyé les fils ou les frères en Sibérie, tous étaient là, chacun une hache ou un couteau à la main, et plus près de lui, tout contre le lit, le père de Fédotia et le fiancé, qui le regardaient avec des yeux ardents. […] Elle m’observait certainement de tous ses huit yeux, et se posait ce problème : « Est-ce, n’est-ce pas un ennemi ? […] Cela est si vrai qu’un historien allemand a dit, dans un livre sur la guerre, que l’ennemi avait trouvé plus de patriotisme dans le clergé catholique que dans les classes diverses de la société. […] Je passe des scènes sanglantes où le prêtre trouve toujours la première place ; il en est de terribles où l’ennemi, fusillant des enfants de quatorze ans, des vieillards de soixante ans, ne recule pas non plus devant le meurtre d’un pauvre curé de campagne.
Lui, sans haine et sans ressentiment, chevaleresque au besoin quand il s’agissait d’oublier une injure personnelle, il servit les haines aveugles, les vengeances odieuses, je ne dirai pas d’une classe de citoyens, ce ne serait pas vrai, mais de la légion de ces gens de proie qui, dans toute localité et en toute circonstance, sont sur la brèche dans les mauvais jours pour dénoncer, maudire et calomnier leurs ennemis personnels ou seulement les adversaires dont ils redoutent l’influence et la moralité. […] Il vaut mieux que ce soit loi qui parles que des indifférents ou des ennemis. […] Oui, maintenant, je peux laisser dire que Molière n’a d’autres ennemis que les fourbes qu’il a démasqués ; je peux passer au pied de sa statue érigée sur nos places publiques ; je peux entendre l’Académie française regretter qu’il manque à sa gloire ; je peux souffrir que de vains et ridicules rhéteurs, esclaves de la popularité du mal, entassent leurs phrases farcies d’adjectifs pour faire un piédestal de courage à ce flatteur, une couronne de franchise à ce menteur, une renommée de vertu à ce corrupteur. […] Le pain est nécessaire à la vie de l’homme, et ce n’est pas parce que nos ennemis en mangent que nous n’en mangerions point ; de même pour tout ce qui est de la vérité ; bien que respectant la sincérité des convictions de M.
Savez-vous quel est le plus grand ennemi de l’artiste ? […] nous n’avons jamais rien appris sur ces hordes que par leurs ennemis ou par des étrangers, qui avaient voyagé dans les contrées soumises à leur puissance. […] Et Hassan n’aurait pas été un vrai janissaire s’il n’avait parfois exhalé son mépris pour son ennemi en le traitant de “cocu”. […] Il est l’ennemi déclaré de tout ce qui n’est pas réel. […] Les ennemis de l’ordre régulier cherchent à se connaître, et de leur côté leurs adversaires essayent de se rendre compte du caractère des classes dangereuses.
Les erreurs, les insuffisances, les partis pris, les injustices, les contradictions, les légèretés, j’allais dire les immoralités, que ses ennemis et même ses amis ont pu dénoncer chez Beyle, eurent toujours cette moralité-là. […] Certes, il a des partis pris à vaincre parfois, — il est homme, et homme de lettres, — mais lisez l’article qu’il a écrit sur la mort de son pire ennemi, Balzac. […] Dans une autre de ces Pensées, et après avoir dit avec Royer-Collard qu’on ne fait pas au scepticisme sa part, il ajoute : « Soit, abandonnons notre intelligence à l’ennemi. […] Sinon la Belgique sera traitée en ennemie. […] Aujourd’hui, elle leur devient, comme aux animaux, un outil dont l’emploi leur représente, en face de l’ennemi, une question de vie ou de mort.
Les jeunes combattants ne pouvaient se tromper sur la valeur des forces ennemies… Car il est temps de rendre à la poussée lyrique dont la clameur emplit ces vingt-cinq dernières années, son sens réel et sa juste physionomie. […] Monde des idées et monde des corps, il saura célébrer toute chose créée… mais par le moyen artistique d’une nouvelle création. » Et les ennemis du Parnasse, aux pontifes de l’Empirisme jetaient ces derniers mots, soudain, comme un défi. […] de Gygès, époux, ennemi et maître. […] Mais moi, La haine, chaque jour, me tuyaute et m’apprête La fraise dont l’empois force à lever la tête ; Chaque ennemi de plus est un nouveau godron Qui m’ajoute un gêne et m’ajoute un rayon, Car pareille en tous points à la fraise espagnole La haine est un carcan, mais c’est une auréole. […] Le Jardin de Bérénice est le dernier volet du Culte du Moi, de Barrès (1891) ; L’Ennemi des lois a été publié en 1893.
Le roi fut, en conséquence, regardé par eux comme ennemi des nobles et indigne de les gouverner, étant, disaient-ils, uniquement dévoué aux intérêts du peuple et du clergé, qui faisaient, en ce temps, cause commune contre l’oppression des grands seigneurs. […] Ambrogio parvint à se sauver de la captivité, et ayant soustrait, en les cachant dans la terre, une grande partie de ses richesses à la cupidité des ennemis, il se mit à la recherche de ses enfants, racheta sa fille, mais ne put retrouver son fils, et le crut mort. […] On s’étonna beaucoup de la hardiesse avec laquelle il venait ainsi au milieu de ses ennemis. […] --Bien, dit le prince, si vous mourez roi, j’aurai la couronne, et je me fie de la garder avec mon épée contre tous mes ennemis, comme vous avez fait. […] Macbeth, entraîné de la vertu dans le crime, offre à notre imagination l’image effrayante de la puissance de l’ennemi de l’homme, puissance soumise cependant au maître éternel et suprême qui, du même coup dont il décide la chute, prépare la punition.
Mais ce que n’a pas vu Fontanes, d’autres le voient bien, qui se liguent tous ensemble contre Mme de Staël et contre Chateaubriand, entre lesquels ils ne s’attardent point à faire de pointilleuses distinctions ; qu’ils confondent au besoin avec Bernardin de Saint-Pierre ; et ces « autres » ce sont tout justement les anciens ennemis de Rousseau ; ce sont les héritiers de Voltaire et de l’Encyclopédie ; ce sont enfin les « idéologues ». […] Peyrat, Béranger et Lamennais, 1861 ; — Arthur Arnould, Béranger, ses amis et ses ennemis, Paris, 1864 ; — Jules Janin, Béranger et son temps, Paris, 1866 ; — Brivois, Bibliographie de l’œuvre de Béranger, Paris, 1876 ; — Legouvé, « Notice », en tête du Béranger des écoles, 1894. […] — Lamennais, attaqué par une partie du clergé français, — est défendu par J. de Maistre et par Bonald [Cf. de Maistre, Correspondance, septembre 1820, et Bonald, dans ses Mélanges]. — Il répond lui-même aux attaques dans sa Défense de l’Essai sur l’indifférence, 1821 ; — dont le premier effet est de lui susciter de nombreux ennemis à Rome. — Le voyage de 1824. — Retour en France. — Fondation du Mémorial catholique et de l’Association pour la défense de la religion. — Publication du livre sur Les Progrès de la Révolution et de la guerre contre l’Église, 1828-1829. — Luttes de Lamennais contre M. de Frayssinous et M. de Vatimesnil. — La révolution de 1830 et la fondation du journal L’Avenir. — Difficultés nouvelles. — Second voyage à Rome, 1832. — Soumission de Lamennais, dissolution de l’Association catholique, et suspension définitive de L’Avenir, 1832 [Cf. […] — c’est surtout en littérature qu’on voit des frères ennemis ; — et rien ne nous divise plus profondément que de tendre au même objet par des moyens opposés. — Mais, en dépit des différences, le roman de Balzac et la critique de Sainte-Beuve n’en comportaient pas moins la même sorte d’« indiscrétion » ; — la même « anatomie » des modèles ou la même « dissection » ; — la même tranquille audace ; — et finalement ils rendaient le même effet de vie. — Comparaison à cet égard de la critique de Villemain avec la critique de Sainte-Beuve ; — et combien la première est plus abstraite, plus décharnée, moins pénétrante et moins aiguë que la seconde. […] Le Fils de Giboyer]. — Enfin, et en troisième lieu, ce qui n’est plus du Balzac, — mais ce qui n’a pas été le moindre clément de son succès, — il s’est posé en « bourgeois de 1789 » ; — ennemi des vaines distinctions ; — ne respectant en tout que « le mérite personnel » ; — et anticlérical à la manière de Béranger [Cf.
De même que le chrétien veut faire du bien même à ceux qui lui veulent du mal, le vrai honnête homme ne saurait négliger de plaire, même à ses ennemis, quand il les rencontre : « car celui qui croit se venger en déplaisant se fait plus de mal qu’il n’en fait aux autres. » — « Il y en a d’autres qui veulent bien plaire et se faire aimer ; mais ni l’honneur, ni la vérité, ni le bien de ceux qui les écoutent, ne leur font jamais rien dire, s’ils n’y trouvent leur compte. » Ah ! […] Je ne m’étonne pas que ce grand homme53 ait eu tant d’ennemis ; la véritable vertu se confie en elle-même, elle se montre sans artifice et d’un air simple et naturel, comme celle de Socrate.
De temps en temps il le relit et le corrige ; il prend conseil de ses amis, puis de ses ennemis ; point d’édition qu’il n’améliore ; il rature infatigablement. […] Pope veut se venger de ses ennemis littéraires, et chante la Sottise, auguste déesse de la littérature, « fille du Chaos et de la Nuit éternelle, lourde comme son père, grave comme sa mère », reine des auteurs affamés, et qui choisit Théobald pour son fils et pour son favori.
Les indignités que je subis l’augmentent encore ; la squalidité de ma barbe, mes cheveux hérissés, mon costume délabré, la saleté de mon linge, les immondices de mon cachot, me pénètrent de répugnance ; mais, par-dessus tout, je suis obsédé par la solitude, qui fut toujours ma plus cruelle ennemie, tellement qu’à l’époque où j’étais le mieux portant, après quelques heures de solitude, j’étais obligé de sortir pour aller chercher la compagnie des hommes. […] Né d’une race à la fois chevaleresque et poétique, élevé par une mère d’élite et par un père déjà glorieux, recueilli dans la fleur de son adolescence par un prince qui lui ouvrit pour ainsi dire sa propre famille, protégé, aimé peut-être par la sœur charmante de ce prince, qui fut pour lui, sinon une amante, du moins une autre sœur, et qui lui pardonna tout, même ses négligences et ses distractions de sentiment que tant d’autres femmes ne pardonnent jamais, illustre avant l’âge de la gloire par des poèmes que la religion et la nation popularisaient à mesure qu’ils tombaient de sa plume ; disputé comme un joyau de gloire entre la maison d’Este, la maison de Médicis, la maison de Gonzague, la maison de la Rovère, ces grands patrons des lettres en Italie ; misérable et errant par sa propre insanité, mais non par la persécution de ses ennemis ; comblé d’enthousiasme et de soins par la jeune princesse Léonora de Médicis ; chéri à Turin, désiré à Florence, appelé à Rome ; retrouvant à Naples, toutes les fois qu’il voulait s’y réfugier, la patrie, l’amitié, la paix d’esprit, l’admiration d’une foule de disciples fiers d’être ses compatriotes ; enfin rappelé pour le triomphe à Rome par un neveu du souverain de la chrétienté, fanatique de son génie et providence de sa fortune ; mourant dans ses bras avec la couronne du poète en perspective et le triomphe pour tombeau : on ne voit rien dans une telle vie qui soit de nature à accuser l’ingratitude humaine, excepté quelques années de cruelle séquestration dans un hospice de fous, qui n’accusent pas, mais qui dégradent un peu son protecteur devenu son geôlier ; mais cette infortune n’est-elle pas souvent, dans l’économie d’une grande destinée, l’ombre qui fait mieux ressortir la note pathétique, qui attendrit le cœur de la postérité, et qui donne à la gloire quelque chose d’une compassion enthousiaste du monde ?
Je pourrais ajouter ici ce qui a échappé à M. de Vigny, c’est que l’armée forte et dictatoriale de la France lui est aussi énergiquement commandée, depuis quelques années, pour les garanties intérieures de la société industrielle au dedans, que par ses ennemis au dehors. […] vous voilà arrivé, quoique plus jeune que moi, devant Celui qui nous crée et qui nous juge, dans ce monde où toutes nos petites passions meurent avant nous, où nous ne serons appréciés ni par nos amis ni par nos ennemis, mais sur le type éternel du bien ou du mal que nous avons fait !
Il ne tarde pas à pénétrer dans l’âme même du poète et d’abord l’envahit en ennemi, lui imposant mille paralysants scrupules et un lourd sentiment de ses responsabilités. […] Depuis qu’il ne peut plus compter sur l’espèce de certitude que respire et inspire l’âme des foules, avec laquelle jadis il collaborait, il lui faut trouver en soi des motifs de croire, une raison de penser qu’il ne se trompe point : nul meilleur moyen que d’utiliser l’ennemi naguère intrus dans la maison, de lui assigner son rôle, d’en faire un allié.
Pour que le gibier puisse échapper au faucon, il faut qu’il y ait en lui certaines modifications qui correspondent à des modifications hors de lui ; il faut qu’il y ait correspondance entre sa fuite et la poursuite de son ennemi. […] Les ennemis de ce philosophe, tout autant que ses amis, ont contribué à entretenir la confusion de ces deux termes « savants », « positivistes. » Que Comte ait donné une exposition générale de la doctrine et de la méthode des sciences, cela est vrai.
L’ouïe s’est développée en raison de son utilité pour avertir l’animal de la proximité d’un ennemi. De là à distinguer le premier tableau extérieur sans le son, puis le second tableau avec le son, puis le troisième tableau avec l’ennemi apparaissant, il n’y a pas loin.
Mardi 14 octobre Voici la dédicace que j’ai mise à l’exemplaire de Renan : À RENAN Un ami de l’homme — et quelquefois, un ennemi de sa pensée. […] C’est le type dans la disgrâce physique de la grâce morale ; il y a chez cet apôtre du doute, la haute et intelligente amabilité d’un prêtre de la science. » Oui, je suis, ou du moins j’étais l’ami de l’homme, mais parfois l’ennemi de sa pensée, ainsi que je l’écrivais dans la dédicace de l’exemplaire à lui adressé.
L’Autruche habite pourtant les continents, et s’y trouve exposée à des dangers auxquels elle ne peut échapper par le vol ; mais elle peut se défendre contre ses ennemis à l’aide de ses vigoureux coups de pied, aussi bien que le pourrait faire tout autre quadrupède, mieux armé, mais plus petit. […] On conçoit aisément, en effet, que de rares individus de la Bathyscia aveugle des cavernes aient pu accidentellement en sortir par quelque fissure, et qu’ils se soient multipliés au dehors, dans des endroits sombres qui leur rappellent un peu les conditions de vie de leurs ancêtres, et où ils sont exposés à une concurrence moins vive de la part de rivaux ou d’ennemis clairvoyants.
La crainte de certains ennemis est certainement instinctive, comme on peut le voir chez les oiseaux nicheurs. […] Naturellement les succès d’une espèce d’Abeille peuvent dépendre aussi du nombre de ses parasites et de ses autres ennemis ou de toute autre cause, et par conséquent ne dépendre en aucune façon de la quantité de miel qu’elle peut recueillir.
Bernis, ministre des Affaires étrangères depuis juin 1757, conserva toutes ses espérances jusqu’au moment où le duc de Richelieu conclut avec le duc de Cumberland la convention de Klosterzeven (8 septembre 1757), qui laissait subsister l’armée ennemie et qui ne devait pas être ratifiée.
Quand Tallemant des Réaux, par exemple, s’appuyant du manuscrit d’un ancien secrétaire de Du Plessis-Mornay, c’est-à-dire d’un témoignage ennemi, s’amuse à nous conter que tous les soirs, à l’Arsenal, jusqu’à la mort de Henri IV, Sully, déjà arrivé à la cinquantaine, continuait d’aimer si fort la danse « qu’il dansait tout seul avec je ne sais quel bonnet extravagant en tête, qu’il avait d’ordinaire quand il était dans son cabinet », une telle anecdote, qui n’a aucun rapport prochain ni éloigné avec les actes publics de Sully et qui ne saurait être contrôlée, est indigne d’être recueillie par un historien et n’est propre (fût-elle exacte à quelque degré) qu’à déjouer et à dérouter le jugement général, bien loin d’y rien apporter de nouveau.
Considérée par cet aspect, son Histoire ressemble à une belle et longue retraite devant des nuées d’ennemis : il n’a pas l’impétuosité ni le feu, mais il a la tactique et l’ordre ; il campe, s’arrête et se déploie partout où il peut.
Il l’a vue telle qu’elle était, tout occupée du salut du roi, de sa réforme, de son amusement décent, de l’intérieur de la famille royale, du soulagement des peuples, et faisant tout cela, il est vrai, avec plus de rectitude que d’effusion, avec plus de justesse que de grandeur ; enfin, il a résumé son jugement sur elle en des termes précis, au moment de l’accompagner dans son œuvre de tendresse et de prédilection : Mme de Maintenon, dit-il, n’a donc pas eu sur Louis XIV l’influence malfaisante que ses ennemis lui ont attribuée : elle n’eut pas de grandes vues, elle ne lui inspira pas de grandes choses : elle borna trop sa pensée et sa mission au salut de l’homme et aux affaires de religion ; l’on peut même dire qu’en beaucoup de circonstances elle rapetissa le grand roi ; mais elle ne lui donna que des conseils salutaires, désintéressés, utiles à l’État et au soulagement du peuple, et en définitive elle a fait à la France un bien réel en réformant la vie d’un homme dont les passions avaient été divinisées, en arrachant à une vieillesse licencieuse un monarque qui, selon Leibniz, « faisait seul le destin de son siècle » ; enfin en le rendant capable de soutenir, « avec un visage toujours égal et véritablement chrétien », les désastres de la fin de son règne.
Je serai toujours ravie de les apprendre par vous, madame, pour qui je me sens à cette heure, une véritable amitié fondée sur une grande estime. » Fière comme l’était Madame, il n’y avait pour elle, après une telle démarche et un rapprochement aussi pénible dans son principe, qu’à devenir l’amie intime et cordiale de Mme de Maintenon, ou son ennemie irréconciliable.
Il se joue cependant avec Catulle ; il s’applique déjà à Horace ; puis une bien autre ambition le tente, l’épopée elle-même, l’épopée moderne avec toutes ses difficultés et ses réalités positives, ennemies du merveilleux ; âgé de vingt ans, il ne voit là rien d’impossible : il compose donc son Washington ou la Liberté de l’Amérique septentrionale, et, choisissant le siège de Boston comme fait principal et comme centre de l’action, il achève un poème en douze chants dont on pourrait citer des vers honorables, et qu’il accompagne d’une préface modeste et judicieuse.
Il y a un malheur public dans votre joie ; elle est un fléau pour votre pays ; une folie telle que la vôtre, parée d’une épée quand elle mériterait mieux un éventail, a fait, ce que jamais les ennemis n’eussent pu faire, que cette voûte de notre empire, inébranlée jusqu’à vous, n’est plus qu’un édifice mutilé qui menace ruine.
Il est curieux de voir, à cette fin de campagne, l’impatience du vieux guerrier qui, arrivé toutefois à son but pour la politique, frémit de colère de n’avoir pu frapper un dernier coup, et de se voir obligé à remettre l’épée dans le fourreau sans s’être vengé une bonne fois de ses ennemis dans une bataille : « En fait de campagne, disait-il en se jugeant avec une sorte d’amertume, nous n’avons fait (cette fois) que des misères55. » Dans les années qui suivent, on retrouve Frédéric et le prince Henri en conversation par lettres, en discussion philosophique sur les objets qui peuvent le plus intéresser les hommes, la religion, la nature humaine et le rang qu’elle tient dans l’univers, les ressorts et mobiles qui sont en elle, et les freins qu’on y peut mettre.
Ce n’est pas là, dira-t-on, le discours d’un moraliste trop rigide : c’est que le véritable Vauvenargues n’est pas du tout rigide en effet ; il aspire à concilier, à humaniser, à tempérer, à se servir des passions elles-mêmes avec ensemble et à-propos ; il est le contraire du philosophe scythe qui coupe de l’arbre les branches les plus belles ; il est un ennemi presque personnel de Caton le censeur ; s’il a été stoïcien dans un temps, il en est bien revenu.
Dieu nous garde de plus mauvais garçons et d’ennemis plus redoutables !
» Non, Mme Swetchine, tout austère et tout ennemie de la gloriole qu’elle était, n’a pas eu une si mauvaise idée en sacrifiant un peu tard aux grâces en la personne de M. de Falloux, et je suis prêt à répéter avec M. de Pont-Martin : « Elle commença par le comte de Maistre, et elle a fini par M. de Falloux ; on ne pouvait mieux commencer ni mieux finir. » Si l’on prenait M. de Falloux plus au sérieux comme auteur et si on le serrait de près, il y aurait bien des remarques à lui faire et des critiques à lui adresser.
Il s’est étonné plus tard que, lorsqu’il fut possible et convenable de reparler en public de la littérature proprement dite, c’est-à-dire à la fin de 1849, quelques critiques et moi-même tout le premier, nous ayons paru oublier cette Révolution de Février si voisine, et que nous ne nous soyons pas mis à cheval sur les grands principes pour combattre à tout bout de champ, dès le lendemain, cette affreuse ennemie déjà en retraite, et presque en déroute.
Ayant vu pour la première fois Paris en 1813, y arrivant avec tout un monde de préventions dans la tête, il les secoue ; il goûte la société et s’y plaît ; comme Mme d’Albany nous en voulait un peu et pour cause, il lui écrit ces paroles qui pourraient si bien s’adresser de tout temps à la plupart de nos ennemis en Europe : « Je sais que jugeant les Parisiens à distance, vous conservez contre eux de la rancune pour les maux qu’ils ont faits et ceux qu’ils ont soufferts.
Envoyé par le roi pour châtier une rébellion et venger le meurtre du gouverneur de Bordeaux, Monneins son propre parent, qui y avait péri odieusement massacré, il arriva devant cette ville, enflammé de colère, n’y voulut entrer que par la brèche et en ennemi, après avoir fait abattre trente toises de murailles, désarma les bourgeois, en envoya cent cinquante au dernier supplice ; et en outre il fit dresser un épouvantable arrêt par le maître des requêtes, Étienne de Nully, le plus violent des hommes, arrêt par lequel il interdit le Parlement, fit enlever toutes les cloches de la ville, supprima les privilèges des bourgeois, les contraignit d’en brûler eux-mêmes les titres et chartes, et de plus, ils durent déterrer le corps du gouverneur Monneins « avec leurs ongles », aller en habits de deuil devant le logis du connétable lui crier miséricorde, et lui payer en fin de compte 200 mille livres pour les dépenses de son armée46.
Cuvier, dit-il, un des plus grands génies de notre époque, qui a participé à l’instruction publique toute sa vie, soit comme professeur, soit comme haut administrateur, soit par ses ouvrages, soit par ses voyages d’inspection, était un ennemi prononcé de la rhétorique.
… » On sourit à la seule idée d’une telle comparaison entre Mesdames, filles de Louis XV, et celle dont Frédéric, le glorieux rival et ennemi, a parlé comme « d’une grande femme, faisant honneur à son sexe et au trône. » Nous reviendrons sur ces jugements de Marie-Thérèse, portés par l’adversaire qui passa sa vie à se mesurer contre elle, et qui lui a rendu le plus digne, le plus historique des hommages.
Ce qu’il était surtout, ce qu’il allait être d’abord et toujours, c’était un prophète de tristesse et de malheur, un tribun sacré en face d’une société profane, un accusateur public devant une société ennemie, un déclamateur éloquent et passionné, un orateur-écrivain.
Entre Beugnot et Chateaubriand, ces deux témoins de son désappointement, l’un si spirituel, l’autre si amer et si ennemi, Talleyrand observé, démasqué, percé au vif à ce moment, passe devant la postérité un mauvais quart d’heure, et, ce qui lui eût été le plus pénible, il y paraît même un peu ridicule.
Voici pourtant quelques-uns de ces billets pris au hasard et qui me font trop d’honneur ainsi qu’à elle pour que je ne saisisse pas l’occasion qui s’offre de les montrer aux amis comme aux ennemis, si elle pouvait en avoir encore.
Que si vous me replacez le spirituel tribun dans les chambres passionnées de la Restauration, en face de cette meute d’ennemis acharnés et inintelligents qu’il déconcerte et qu’il irrite par ses ironies, je sais bien lequel j’applaudissais.
Mais l’amour-propre, le grand et détestable ennemi, n’est pas abattu pour cela : « Je l’appelle détestable, écrit-elle, et je le déteste aussi avec beaucoup de raison, car il me joue souvent de vilains tours ; c’est un voleur rusé qui m’attrape toujours quelque chose.
Ainsi, de nos jours, l’aiglon romantique (les ennemis disaient l’orfraie) parut voler assez rapidement de clocher en clocher, et, finalement, à voir le résultat en gros après une quinzaine d’années de possession de moins en moins disputée, il semble qu’il y ait conquête.
Si une flotte dont on attend le retour montre au coucher du soleil les étages successifs de ses voiles surgissant une à une, comme un troupeau de moutons qui monte une colline au-dessus de la courbe de l’horizon, on songe aux canons qui ont grondé dans ses bordées, aux vaisseaux qui ont sombré sous les boulets des ennemis, aux morts et aux blessés qui ont jonché ses ponts sous la mitraille, toutes les images de la guerre, de la mort pour la patrie, de la gloire et du deuil assiégent la pensée. — Émotion !
Il développe avec toute sa science et sa pénétration les rapides indications de Bossuet, quand il nous expose le fond de l’âme romaine, cet amour de la liberté, du travail et de la patrie, la force des institutions militaires, et de la discipline ; l’ardeur des luttes intestines, qui tiennent les esprits toujours actifs, toujours en haleine, et qui s’effacent toujours dans les occasions de danger extérieur ; la constance de la nation dans les revers, et cette maxime de ne faire jamais la paix que vainqueurs ; enfin l’habileté du sénat, dont la substance se réduit à trois principes : soutenir les peuples contre les rois, laisser aux vaincus leurs mœurs, et ne prendre qu’un ennemi à la fois.
Lutte obscure et sourde que chaque génération recommence contre l’invisible ennemie sans cesse anéantie, sans cesse renaissante.
En général, Chesterfield conseille la circonspection à son fils et une sorte de neutralité prudente, même à l’égard des fourbes ou des sots dont le monde fourmille : « Après leur amitié, il n’y a rien de plus dangereux que de les avoir pour ennemis. » Ce n’est pas la morale de Caton ni de Zénon, c’est celle d’Alcibiade, d’Aristippe ou d’Atticus.
Brochures, pamphlets, articles de journaux, chansons, graves histoires, scènes historiques (car la comédie, à ce moment, avait passé du théâtre dans les livres), allusions de toutes sortes, c’était à qui atteindrait et piquerait l’ennemi de dessous le réseau habile dont il cherchait à nous envelopper.
Les ennemis nombreux qu’il avait en cour, la petite coterie Polignac particulièrement, cette société intime de la reine, résolut une bonne fois de le perdre ; et pour cela on n’eut qu’à mettre en jeu avec un certain art, avec un certain concert, la foule de ses créanciers, car cette vie de chevaux, de courses, de paris à l’anglaise, de voyages et de train magnifique en tous pays, n’avait pu se mener sans de ruineuses profusions.
Parlant de ce qu’aurait pu faire le poète Le Brun, son prédécesseur, s’il avait assez vécu pour tenter en vers l’apothéose de Napoléon, Raynouard ajoutait : Le chantre de Napoléon l’aurait représenté d’après l’histoire, grand au-dessus des rois, tel qu’Homère, d’après la fable, a représenté Jupiter grand au-dessus des dieux ; gouvernant l’univers par l’autorité de sa pensée, toujours prêt à saisir de sa main toute-puissante l’une des extrémités de la chaîne des destins, si tous ses ennemis ensemble osaient s’attacher à l’autre, et toujours certain de les entraîner tous.
C’est à ce moment aussi qu’en artiste qu’il est la plume à la main, se considérant comme sorti du préambule et du vestibule de son sujet, il se donne carrière, et, tandis qu’il n’avait dessiné jusque-là les personnages que de profil, il les montre en face et en pied, comme dans une galerie ; il ne fait pas moins de dix-sept portraits de suite, tous admirables de vie, d’éclat, de finesse, de ressemblance, car l’impartialité s’y trouve même quand il peint des ennemis.
… Les ennemis de M.
Dans cette formation du parti libéral où il entrait alors tant d’éléments divers, Courier reste ce qu’il était de tout temps, le plus antibonapartiste possible, ennemi des grands gouvernants, se faisant l’avocat du paysan, l’homme de la commune, prêchant l’économie, parlant contre la manie des places, voulant de gouvernement le moins possible, faisant des sorties contre la Cour et les gens de cour toutes les fois qu’il y a lieu, méconnaissant ce qu’il y a eu de grand, d’utile, de nécessaire dans l’établissement des Louis XIV, des Richelieu, des grands directeurs de nations, disant en propres termes, pour son dernier mot et son idéal : « La nation enfin ferait marcher le gouvernement comme un cocher qu’on paie, et qui doit nous mener, non où il veut, ni comme il veut, mais où nous prétendons aller, et par le chemin qui nous convient » ; disant encore, et cette fois plus sensément : Il y a chez nous une classe moins élevée (que les courtisans), quoique mieux élevée, qui ne meurt pour personne, et qui, sans dévouement, fait tout ce qui se fait ; bâtit, cultive, fabrique autant qu’il est permis ; lit, médite, calcule, invente, perfectionne les arts, sait tout ce qu’on sait à présent, et sait aussi se battre, si se battre est une science.
S’il voit le mal, Montesquieu apprécie très bien les avantages qui le compensent ; ce qu’il exprime ainsi : L’Angleterre est à présent le pays le plus libre qui soit au monde, je n’en excepte aucune république… Quand un homme, en Angleterre, aurait autant d’ennemis qu’il a de cheveux sur la tête, il ne lui en arriverait rien : c’est beaucoup, car la santé de l’âme est aussi nécessaire que celle du corps.
Montrant les Romains habiles à isoler les rois qu’ils veulent abattre, à détacher leurs alliés, et à se faire de longue main des amis de toutes parts autour de l’ennemi puissant : « Il semblait, dit-il, qu’ils ne conquissent que pour donner ; mais ils restaient si bien les maîtres que, lorsqu’ils faisaient la guerre à quelque prince, ils l’accablaient, pour ainsi dire, du poids de tout l’univers. » Nul n’est mieux entré que Montesquieu dans l’idéal du génie romain ; il est, par inclination, favorable au Sénat, et un peu patricien de l’antique République.
Le premier mouvement de son âme humaine fut pour réclamer la cessation des violences, le pardon et l’amnistie de ceux qu’on poursuivait et qu’on assassinait déjà comme ennemis de la nation.
Le zéle, dit-il, n’a point de plus fidéle instrument qu’une imagination bien gouvernée, ni de plus grand ennemi, qu’une mémoire impérieuse, à qui l’imagination & l’esprit sont forcés d’obéir.
Que sont les Actes des Apôtres, cette causerie à bâtons rompus sur le dos de ses ennemis politiques ou littéraires ?
Ce personnage un change de temps en temps de personnalité, et, sous le nom de Giglio Fava, il se déclare l’ennemi du prince assyrien Cornelio Chiapperi ; et quand il est prince assyrien, il déverse le plus profond et le plus royal mépris sur son rival auprès de la princesse, sur un misérable histrion qui s’appelle, à ce qu’on dit, Giglio Fava.
Il se produira aussi bien chez un alpiniste qui glisse au fond d’un précipice, chez un soldat sur qui l’ennemi va tirer et qui se sent perdu.
La patriotisme n’est pas l’ennemi des dialectes et l’unité de la France n’est point menacée par les chansons des félibres. […] À la naissance du christianisme, est-ce que ceux qui croyaient à un Dieu crucifié n’étaient pas tenus par cela même pour les ennemis de l’empire ? […] On se bat pour le roi, contre les ennemis du roi ; mais, ces ennemis, on les ignore et on ne leur veut aucun mal. […] À la veille de la Révolution, la France populaire ne se sent pas un seul ennemi en Europe. […] Sous le feu de l’ennemi, il prenait des croquis avec la même tranquillité que s’il eût été paisiblement assis à sa table, dans son cabinet.
Sur les rives d’un fleuve tranquille, entre des collines charmantes où l’abeille faisait son plus doux miel, sous un ciel d’une incomparable sérénité, Florence, retranchée derrière ses murs épais, toute hérissée de tours, de châteaux crénelés qui se défiaient l’un l’autre et provoquaient l’ennemi du dehors, apparaissait au loin dans la campagne, fière et dominatrice. […] Aux fêtes de mai, dans une querelle survenue entre deux femmes de ces deux maisons ennemies, le sang avait coulé. […] Les ennemis de la louve, les chiens, c’étaient au temps de Dante les gibelins, les Mastini, les Cane della Scala, etc. […] Et si ma mort n’avait été si hâtive, te voyant le ciel si favorable, à l’œuvre je t’aurais encouragé. » Mais, ajoute Brunetto, cet ingrat et méchant peuple qui descendit de Fiesole aux temps anciens, et qui tient de la montagne et de la pierre, se fera, à cause de ta vertu, ton ennemi. […] Dante met dans la bouche de son aïeul ce que que lui dicte sa propre conscience : la résolution de piquer de l’aiguillon d’une vérité acérée « la génération ingrate, insensée et impie » de ses ennemis, qui sont aussi à ses yeux et dans le juste sentiment qu’il nourrit de son sacerdoce, les ennemis du droit et de la liberté, les ennemis de Dieu.
. — Émancipé de l’Église, il était l’interprète de la libre pensée sous sa forme la plus élevée et la plus savante dans un pays qui voyait dans le cléricalisme l’ennemi le plus redoutable de ses institutions nouvelles ; émancipé de l’Allemagne, il avait trouvé dans les malheurs mêmes de la patrie un aliment et un aiguillon à son patriotisme, et il s’efforçait de faire de ses écrits l’expression la plus parfaite du génie français ; émancipé de toute attache aux régimes politiques disparus, il pouvait donner à la France nouvelle les conseils et les avertissements d’un ami clairvoyant et d’un serviteur dévoué. […] Il était trop modeste, trop ennemi de toute ombre de pose et de pharisaïsme pour se proposer en exemple et en règle, pour vanter, comme une supériorité, les vertus et les principes de morale qui faisaient la base même de sa vie. […] « Dans ce malheur accompli, privations du présent, craintes de l’avenir, l’ennemi étant à deux pas (1814) et mes ennemis, à moi, se moquant de moi tous les jours, un jour, un jeudi matin, je me ramassai sur moi-même, sans feu (la neige couvrait tout), ne sachant pas si le pain viendrait le soir, tout semblant finir pour moi, j’eus en moi un pur sentiment stoïcien ; je frappai de ma main, crevée par le froid, sur ma table de chêne (que j’ai toujours conservée) et je sentis une joie virile de jeunesse et d’avenir ». […] » Mais à mesure qu’il avançait dans l’histoire, il voyait l’Église se dégrader, se corrompre, et, après avoir été la gardienne et l’apôtre de la civilisation, se faire l’ennemie de tout progrès et de toute liberté. […] Il a le clergé et l’armée ; ajoute le nom de son oncle, la crainte du socialisme, les opinions opposées entre elles des partis ennemis.
oui, maître, il faut que vous soyez vraiment bon, vraiment grand, vraiment généreux, pour être exposé, après un si long règne, à ces violences misérables… On fait des livres aujourd’hui pour réhabiliter les ennemis de Voltaire, on fait des livres aujourd’hui tout exprès pour déshonorer Voltaire, ceux qui l’ont aimé, qui l’ont servi… » Au nombre de ceux qui ont voulu déshonorer Voltaire et réhabiliter ses ennemis, à coup sûr, le plus violent de tous est celui qui a écrit les lignes suivantes : « Dans cette liste formidable et très incomplète des grands écrivains et des grands ouvrages auxquels Fréron eut affaire toute sa vie, ne vous ai-je pas nommé le plus redoutable, le plus intrépide, le plus atroce de tous, Voltaire ? […] C’est un esprit de contradiction, un mauvais courtisan et un méchant camarade, et ses amis, mieux encore que ses ennemis, en font chaque jour la triste expérience. […] — « Non, s’écrie le caporal Prémaray, la Ristori n’est pas tout le drame, quand il y a Rosé-Chéri, Guyon, Lucie Mabire et Thuillier… » Il est certains rapprochements qui sont pénibles, non pour les grands noms qu’ils s’efforcent de ravaler, mais seulement pour les petits qu’ils exhaussent d’une façon ridicule, et j’ai tout lieu de craindre qu’en s’imaginant louer avec effusion de cœur des artistes méritantes, le feuilletoniste ne s’en soit fait de mortelles ennemies… Soyons de bonne foi !
Cette sensibilité fut malheureuse, elle ne fut pas cette complaisance arbitraire et volontaire dans la corruption que ses ennemis ont prétendu y voir. […] On peut se demander, pour nous borner à la France, si l’avenir appartient chez nous aux coreligionnaires de l’auteur de la Vie de Jésus, je veux dire à ceux qui reconnaissent sous tous les symboles l’aperception, inégale mais légitime, d’un Idéal indéfinissable, ou bien si la maxime odieuse : « Le cléricalisme, voilà l’ennemi », continuera de dominer les libres penseurs, j’entends ceux qui se disent tels. […] Ainsi que nous l’indiquions tout à l’heure, elle a commencé par apparaître comme une ennemie terrible de la religion, par cela seul qu’elle a prétendu considérer les dogmes et la foi comme des phénomènes d’ordre naturel, dont l’apparition s’expliquerait aussi complètement que la structure d’un certain os dans le squelette d’un animal. […] Cette aristocratie, brave devant l’ennemi, brave dans un duel, brave devant l’échafaud, n’est plus capable de cette résistance personnelle et improvisée, dont le journal de l’Estoile nous fournit de si nombreux modèles.
» Puis, à mesure qu’ils passeront, apostropher leurs orateurs : « Vous, citoyen avocat, qui n’avez de toute votre vie plaidé qu’une seule cause, la vôtre, dans un procès pour délit d’outrages à un agent de la force publique ; vous, citoyen médecin, qui ne vivez que de médecine illicite ; vous, citoyen, homme de lettres, qui voulez brûler nos bibliothèques pour nous punir de ne pas lire vos livres ; et vous, auditeurs imbéciles de ces parleurs malfaisants, montons ici pour les écouter et les croire, loups dans la rue pour vous jeter sur les honnêtes gens qu’ils vous dénoncent ; vous tous qui êtes ici pour n’être pas avec vos femmes et vos enfants, dans ces galetas d’où vous pourriez les tirer par le travail ; envieux de quiconque parmi vous s’élève en vous donnant le bon exemple, ennemis de ceux qui vous aident, et mordant la main qu’on vous tend, hors d’ici ! […] C’est plutôt de ses qualités éminentes que de ses fautes, plutôt de ses talents que de sa fortune, que lui est venu le titre de vice-empereur ; sobriquet sous les plumes ennemies ; sous les plumes impartiales, juste qualification avec une légère pointe de critique. […] Inventeur et serviteur incorruptible de sa méthode, loin de se dérober à ses exigences implacables, il allait au-devant ; il devinait, il épiait les illusions, il s’en défendait comme un honnête homme se défend des tentations, s’armant à la fois contre les objections probables et contre les contradicteurs possibles ; se faisant son propre ennemi pour mieux se garder d’être son complaisant, et, pour tout dire, poussant la défiance de lui-même au-delà de ce qu’ont imaginé La Rochefoucauld et La Bruyère dans leurs plus violentes suspicions contre l’amour-propre humain. […] Est-il vrai que cette jeunesse et cette beauté, tu vas les exposer au feu d’un ennemi, qui a tant de canons que ses patrouilles même ne se hasardent pas sans artillerie ? […] Donner sa vie n’est que le second devoir du soldat ; la ménager, la faire durer, pour la vendre plus cher à l’ennemi, voilà le premier.
Jugez maintenant des matériaux qu’ils fournissent au théâtre et des personnages qu’ils demandent au théâtre ; pour être d’accord avec le public, la scène n’aura pas trop des plus franches concupiscences et des plus puissantes passions ; il faudra qu’elle montre l’homme lancé jusqu’au bout de son désir, effréné, presque fou, tantôt frissonnant et fixe devant la blanche chair palpitante que ses yeux dévorent, tantôt hagard et grinçant devant l’ennemi qu’il veut déchirer, tantôt soulevé hors de lui-même et bouleversé à l’aspect des honneurs et des biens qu’il convoite, toujours en tumulte et enveloppé dans une tempête d’idées tourbillonnantes, parfois secoué de gaietés impétueuses, le plus souvent voisin de la fureur et de la folie, plus fort, plus ardent, plus abandonné, plus audacieusement lâché à travers le réseau de la raison et de la loi qu’il ne fut jamais. […] Tout inconnu est saisi, interrogé ; s’il ne peut rendre bon compte de lui-même, les stocks 23 de la paroisse sont là pour meurtrir ses jambes ; comme dans un régiment, il passe pour un espion et pour un ennemi. […] Hippolyte, qui a perdu sa maîtresse60, l’aperçoit rayonnante dans le ciel comme une vision bienheureuse. « Elle est là-haut, sur ces tours d’étoiles, debout, les yeux fixés sur moi pour savoir si je lui reste fidèle. » Arétus, pour se venger de Valentinien, l’empoisonne après s’être empoisonné lui-même, et, râlant, se fait porter devant le lit de son ennemi pour lui donner un avant-goût de l’agonie.
La Fatuité moderne aura beau rugir, éructer tous les borborygmes de sa ronde personnalité, vomir tous les sophismes indigestes dont une philosophie récente l’a bourrée à gueule-que-veux-tu, cela tombe sous le sens que l’industrie, faisant irruption dans l’art, en devient la plus mortelle ennemie, et que la confusion des fonctions empêche qu’aucune soit bien remplie. […] Il n’y a pas de plus grande jouissance ni de plus beau triomphe qu’une copie excellente de la nature. » Et cette doctrine, ennemie de l’art, prétendait être appliquée non seulement à la peinture, mais à tous les arts, même au roman, même à la poésie. […] la Providence lui garde des ennemis en réserve.
De là dut résulter un brusque arrêt du monde animal tout entier dans le progrès qui le portait à une mobilité de plus en plus haute ; car la peau dure et calcaire de l’Échinoderme, la coquille du Mollusque, la carapace du Crustacé et la cuirasse ganoïde des anciens Poissons ont probablement eu pour origine commune un effort des espèces animales pour se protéger contre les espèces ennemies. […] A l’insuffisance de leur enveloppe protectrice ils suppléèrent, les uns et les autres, par une agilité qui leur permettait d’échapper à leurs ennemis et aussi de prendre l’offensive, de choisir le lieu et le moment de la rencontre. […] Elle ne prend tout à fait possession d’elle-même que chez l’homme, et ce triomphe s’affirme par l’insuffisance même des moyens naturels dont l’homme dispose pour se défendre contre ses ennemis, contre le froid et la faim.
Selon lui, elle n’était nullement nécessaire avant d’éclater, elle était évitable ; elle a été purement accidentelle, en ce sens que « le caractère de ceux qui ont eu part à l’ancien gouvernement (à commencer par le caractère du roi, ennemi de toute résistance) a été le seul principe de la totale subversion de ce gouvernement » ; mais ce caractère de quelques personnes étant donné, et la faiblesse de l’opposition qu’elle rencontrera étant admise au point de départ, M. de Meilhan est bien d’avis que la Révolution en devenait un effet presque nécessaire : « Sa marche, dit-il, a été déterminée et hâtée par cette faiblesse ; le défaut de résistance a rendu tout possible, et, semblable à un torrent qui ne trouve aucune digue, elle a tout dévasté. » Il ne croit donc pas que la Révolution soit directement sortie des écrits de Rousseau ni de ceux des encyclopédistes, comme on le répète souvent, ni qu’elle découle de causes aussi générales : Si l’on suit attentivement la marche de la Révolution, il sera facile de voir que les écrivains appelés philosophes ont pu la fortifier, mais ne l’ont pas déterminée ; parce qu’une maison a été bâtie avec les pierres d’une carrière voisine, serait-on fondé à dire qu’elle n’a été construite qu’en raison de ce voisinage ?
Je n’y trouve qu’un fait assez curieux : c’est que Boileau, que La Motte visitait quelquefois, avait été un jour averti par Gacon que le traître à mine si douce était un ennemi irréconciliable des anciens et leur préparait une rude attaque.
Le choc entama ou brisa ceux des bataillons ennemis qui ne purent l’éviter.
je ne vois que des maisons de bois et des espèces de grosses tourtes entourées plus ou moins de chandelles qu’on appelle mosquées et minarets, mais rien de ce pittoresque, rien de cette originalité de cette belle Syrie, rien de cette brutalité de l’homme qui donne du charme et fait ressortir les œuvres de la civilisation ; tout est rond, tout est mou, c’est le sérail de la pensée ; enfin je me sens énervé, et il ne faudrait pas longtemps pour que mes idées prissent du ventre comme tous les vilains Turcs que je rencontre dans les rues. » Et dans un mouvement lyrique relevé de jurons militaires, il se met tout d’un coup à les apostropher, à les traiter comme à une descente de barrière on traiterait des Turcs de mardi gras ; c’est tout un feu d’artifice d’injures qui se couronne par un bouquet en faveur des Arabes : « Chers Arabes, votre pou, votre puce (quoique souvent incommode), valent mieux que les parfums de vos indignes ennemis !
Dans la pièce espagnole, scène correspondante, Diègue raconte que, voyant son ennemi étendu sans vie, il a porté la main à sa blessure et a lavé (à la lettre) avec le sang la place du soufflet sur sa joue ; et il arrive la joue encore teinte de ce sang.
La philosophie, se séparant d’elle, s’irrita et devint un instrument ennemi, une hache de révolte contre l’arbre révéré.
Sa renommée littéraire a souffert, dans le temps, de ses qualités politiques ; sa modération lui avait fait bien de vifs ennemis.
On tiraillait sur l’ennemi, sur l’absolutiste littéraire, jusque du haut du balcon de Juliette, et on espérait bien avec Roméo escalader, en dépit des unités, cet asile, ce sanctuaire trop interdit d’émotions et d’enchantements.
La moralité de ses héros est sans tache : comme pères, comme amants, comme amis ou ennemis, on les admire et on les honore ; aux endroits pathétiques, ils ont des accents sublimes qui enlèvent et font pleurer ; mais ses rivaux et ses maris ont quelquefois une teinte de ridicule : ainsi don Sanche dans le Cid, ainsi Prusias et Pertharite.
Et cela, à propos d’un ministre ennemi des flatteries, et pour venir à rendre la mollesse responsable de la fausse vanité et des fausses louanges.
Enfin il nous fait voir le grand caractere d’Annibal, la situation de l’univers, & toute la grandeur du peuple romain, lorsqu’il dit : « Annibal fugitif cherchoit au peuple romain un ennemi par tout l’univers » ; qui profugus ex Africâ, hostem populo romano toto orbe quaerebat.
La Renaissance et la Réforme ne furent d’abord qu’une seule et même cause, ayant pour ennemis tous ceux qu’offusquait cette double lumière.
Il est fait d’un mélange d’esprit charnel et de chair triste et de toutes les splendeurs violentes du bas-empire ; il respire le fard des courtisanes, les jeux du cirque, le souffle des belluaires, le bondissement des fauves, l’écroulement dans les flammes des races épuisées par la force de sentir, au bruit envahisseur des trompettes ennemies.
Les commentateurs sont les plus mortels ennemis de la Poésie.
Bien que ce premier degré de conscience soit un immense progrès, l’état qui en est résulté a pu sembler par quelques faces inférieur à celui qui avait précédé, et les ennemis de l’humanité ont pu en tirer avantage pour combattre avec quelque apparence plausible le dogme du progrès 24.
L’ennemi, frappé de son courage, lui avait donné un sauf-conduit.
Tel humaniste couronné qui, le matin, commandait une fresque, ou se faisait expliquer Homère par un philologue byzantin, assassinait ses ennemis le soir, ou leur servait un souper assaisonné de cantarella.
Au moment où il perdit sa mère, Bettina lui écrivait, en faisant allusion à cette disposition froide et ennemie de la douleur, qu’on lui attribue : « On prétend que tu te détournes de ce qui est triste et irréparable : ne te détourne pas de l’image de ta mère mourante ; sache combien elle fut aimante et sage à son dernier moment, et combien l’élément poétique prédominait en elle. » Par ce dernier trait, elle montre bien qu’elle sait l’endroit par où il faut le pénétrer.
Ainsi Asmodée, parlant d’un autre démon de ses confrères avec qui il avait eu querelle : « On nous réconcilia, dit-il, nous nous embrassâmes, et depuis ce temps-là nous sommes ennemis mortels. » Rien de plus gai et de plus plaisant que la petite comédie de Crispin rival de son maître.
Turgot, dont les principes étaient fort intéressés dans la question, s’est expliqué sur le livre de Galiani, et, sans en méconnaître l’agrément, il a écrit quelques mots qui marquent bien l’opposition des vues, des inspirations et des doctrines : Je n’aime pas non plus, dit-il après quelques critiques sur sa méthode sautillante et faite pour dérouter, je n’aime pas à le voir toujours si prudent, si ennemi de l’enthousiasme, si fort d’accord avec tous les Ne quid nimis et avec tous ces gens qui jouissent du présent, et qui sont fort aises qu’on laisse aller le monde comme il va, parce qu’il va fort bien pour eux, gens qui, ayant leur lit bien fait, ne veulent pas qu’on le remue.
Choisy se trouva même lésé par ce père et privé de certain beau présent qui aurait dû lui revenir : « Je ne sus tout cela bien au juste, dit-il, qu’après être arrivé en France ; mais, quand je me vis dans mon bon pays, je fus si aise que je ne me sentis aucune rancune contre personne. » Choisy revient plus d’une fois sur cette idée qu’il est sans rancune et qu’il n’a point d’ennemis : « Si je savais quelqu’un qui me voulût du mal, j’irais tout à l’heure lui faire tant d’honnêtetés, tant d’amitiés, qu’il deviendrait mon ami en dépit de lui. » On retrouve là encore cette nature officieuse, gentille et complaisante, et qui chercherait vainement en elle la force de haïr.
Il devenait de la plus haute importance que cette ville d’Orléans tînt bon pour la Fronde, sans quoi toute la ligne de la Loire était coupée, et le prince de Condé, qui arrivait de Guyenne, trouvait l’ennemi maître des positions.
Elle discute avec soin cette question, s’il serait bien que les femmes, en général, sussent plus qu’elles ne savent : Encore que je sois ennemie déclarée de toutes les femmes qui font les savantes, je ne laisse pas de trouver l’autre extrémité fort condamnable et d’être souvent épouvantée de voir tant de femmes de qualité avec une ignorance si grossière, que, selon moi, elles déshonorent notre sexe.
Je retrouve quelques-uns des mêmes reproches, non pas chez un ennemi, mais sous la plume d’un ami, M. de La Rivière, le même qui fut le gendre de Bussy-Rabutin, et qui s’était retiré, dans sa vieillesse, à la maison de l’Institution de l’Oratoire.
Le roi trompé m’a puni d’une faute que je n’ai pas commise ; mais, si mes ennemis sont parvenus à exciter son courroux, ils n’ont pu altérer sa justice… Oui, monsieur, il est très vrai que Sa Majesté a daigné signer pour moi, depuis ma disgrâce, une ordonnance de comptant de 2 150 000 livres sur de longues avances dont je sollicitais le remboursement auprès du roi, tandis qu’on m’accusait du crime odieux de lui manquer de respect.
Je n’ai pu toutefois parvenir à fixer le moment précis de la grande crise nerveuse de Bernardin, quand il se montre à nous (préambule de L’Arcadie) frappé d’un mal étrange, sujet à des éclairs qui lui sillonnent la vue, voyant les objets doubles et mouvants, et, dès qu’il rencontrait du monde dans les jardins publics et dans les rues, se croyant entouré d’ennemis et de malveillants.
Enfin elle l’a destiné visiblement à l’esclavage, en lui refusant toutes défenses contre ses ennemis.
Mais cependant allons au fond des rapports de Mercy-Argenteau et des lettres de Marie-Thérèse, lettres devenues des armes aux mains des ennemis de la mémoire de la Reine, etc.
En reprenant les mots abeille, volupté et yeux, on trouve dans le catalogue du prieur des Célestins : Abeille : badine — bourdonnante — diligente — importune — imprudente (Voltaire) — industrieuse — laborieuse — ménagère — mouchetée — ouvrière — piquante — prévoyante — vagabonde ; Volupté : douce — efféminée, — enfantine — étudiée — fine (Voltaire) — folâtre — grossière — lâche — obscène — prodigue — profane — pure — riante — sévère — subtile — sucrée ; Yeux : abusés — assassins — attendris — bandés — bouchés — chassieux — cruels — délicats — ébaubis — éblouissants — éloquents — ennemis — éplorés — fistuleux — fondus — gémissants — homicides — hypocrites — impudiques — langoureux — noyés — pochés, etc.
Un homme qui peut assister, l’âme paisible, à la torture de ses ennemis, ne ressent pas au moindre degré la douleur qu’il fait souffrir.
Avellaneda, l’« ennemi » de Cervantes, est peut-être Avellanedo.
Les ennemis de la théorie en toutes choses diront peut-être que tout cela est bien inutile : « Faites-nous de bonnes expériences, nous vous tiendrons quitte du reste. » Je ne veux pas dire que la pratique ne soit pas ici plus importante que la théorie ; cependant il faut aussi savoir un peu ce que l’on fait et se rendre compte des opérations de son esprit.
» Je ne réprouve pas moins ce livre comme citoyen : l’auteur paraît trop ennemi des puissances.
Après les besoins du corps qui ont rassemblé les hommes pour lutter contre la nature, leur mère commune et leur infatigable ennemie, rien ne les rapproche davantage et ne les serre plus étroitement que les besoins de l’âme.
Voilà, mon ami, l’ennemi, le soldat et le citoyen.
l’amitié abandonnée, la fierté opulente, l’ennemi idolâtre. nous sentons si bien que la collision du son de ces voyelles qui s’entrechoquent est desagréable dans la prononciation, que les regles de notre poësie défendent aujourd’hui la combinaison de pareils mots.
« J’aime mieux, me disait-il, être le premier à *** que — D’Audigier à Paris. » Jacques Monleau n’a qu’un ennemi.
Fernand Vandérem, dans Le Miroir des lettres, résume en 1919 la polémique dont le livre a été l’objet : « On l’accusa de faire le jeu de l’ennemi.
Au reste, l’affectation et la contrainte, ennemies des beautés en tout genre, ne le sont pas moins dans celui-ci.
Je n’ai pas besoin de le dire : la seule manière d’user des anciennes divinités païennes, c’était de les transformer, comme l’a fait Milton, en des anges ennemis, en des esprits de séduction et de perte.
Mais, outre que les Romains sous Aétius, Bélisaire et Narsès, ne se sont pas si aisément dissous sous la poussée barbare et ont prouvé une fois de plus que les nations, toujours faites pour servir, n’existent jamais que par leurs chefs, on oublie trop que les Barbares sont en réalité aussi corrompus que leurs ennemis.
Ce lyrisme, auquel le poète s’est assoupli par la volonté, l’exercice et surtout le compagnonnage littéraire, est le plus grand ennemi de sa nature sincère, de cette poésie qui est la sienne, toute d’observation triste ou cruelle, qui se déchire le cœur dans un coin, et de ce petit coin sombre avec son noir chagrin, comme Alceste, allonge sur le monde extérieur un regard qui, comme celui de certains peintres malades de la bile ou du foie, teint, d’une nuance particulière et soucieuse, les objets sur lesquels il va lentement et longuement se fixer.
Sans ses ennemis politiques, sans ces papes qu’il osait damner, ne croyant pas que ce fût assez de les insulter et de les maudire, Dante, ce Juvénal du Moyen Age, ce pamphlétaire plus grand que Tacite, auquel des critiques qui ressemblent un peu aux petits garçons de Florence ont voulu donner l’air inspiré d’un prophète revenant de l’autre monde, tandis qu’il est un homme du temps, se possédant fort bien, au contraire, et tenant d’une main très-froide son stylet de feu, Dante n’aurait jamais songé à enfoncer son profond regard, fait pour juger les hommes et leur commander, dans cette conception de l’enfer, dont la vision pour lui se mêle à d’autres rêves et qu’il a faussée au profit de ses haines et sous le coup de ses douleurs.
*** Grâce à cette opinion qu’on a de lui, opinion contre laquelle il n’a pas su ou voulu se défendre, grâce aussi au « bande à part » de café, de théâtre et de tripot dans lequel il se renferme et d’où il s’est habitué à considérer le monde comme un ennemi, oubliant que le monde accueille et respecte les talents et les honnêtetés, le journalisme a pris dans la société une place d’irrégulier. […] Insulter Dieu quand on le chasse des hôpitaux, des écoles, des armées, quand on le traque en tous lieux comme un ennemi, et qu’on n’ose plus lui donner nulle part un asile, comme à un maudit : mais c’est vous rabaisser, vous, un indépendant, au niveau des courtisans, de ces briseurs d’autels et de ces détrousseurs de temples ; c’est tomber, vous, un poète, dans la tourbe agenouillée des Belmontet qui, sous l’Empire, chantaient le 2 décembre et attendaient la croix au 15 août, pour prix de leur cantate. […] La vérité est qu’en plusieurs circonstances, le brigadier, par son courage et par sa folie de l’en avant qui le faisait ruer sur l’ennemi, comme un boulet, sauva des corps expéditionnaires qui, sans lui, fussent restés dans le désert ou au fond des gorges des montagnes. […] En fréquentant davantage cet ennemi héréditaire de ma race, j’acquis la triste conviction qu’il eût été fort embarrassé si la fantaisie lui était venue — elle ne lui vint pas — d’être chroniqueur sympathique ou critique éminent dans l’un de nos journaux sérieux et répandus, car il était très instruit des choses de la France, et notre littérature le passionnait. […] Si je n’étais l’ennemi des catégories et des groupements littéraires, je le placerais entre deux écrivains dont le talent m’est particulièrement cher, et qui, eux aussi, ne ressemblent à personne, quoi qu’on en ait dit : M.
Tandis que le règne animal tout entier accepte, ou plutôt subit, en face de la concentration progressive des mers et du refroidissement du globe, les conditions nouvelles qui lui sont faites, et auxquelles il ne peut se plier qu’en pâtissant, les vertébrés témoignent d’un pouvoir spécial ; ils se refusent à un tel « accept » et maintiennent, en face des circonstances ennemies, les seules conditions favorables à leur vie... […] Quand l’homme s’attaque aux forces naturelles qui l’entourent, pour les dominer dans ce qu’elles ont d’ennemi, il participe d’abord du génie du vertébré. » C’est moi qui ai souligné, et à dessein, les mots : le seul insurgé. […] Les bêtes et les gens vivant autour d’un même foyer forment un clan, qui est immédiatement respecté par le chien ; le chat, quoique avec moins de bonne volonté, accepte lui aussi, quand il a été bien dressé, les lois du clan, et on le voit jouer avec le chien, son mortel ennemi, on le voit respecter les oiseaux de la maison et sa bonté, trop souvent, s’étend jusqu’aux souris familières. […] Autre trait : Tybert, qui, dans la maison, aime à être caressé, ne se laisse pas prendre quand il joue dans le jardin ; là, il est redevenu l’animal sauvage, pour qui tout autre animal est un ennemi. […] Je prends Gautier comme type de cette opposition toute littéraire, mais il ne fut pas le seul, de son temps, à poser pour l’ennemi du rail.
Je ne souhaiterais pas à mon ennemi, si j’en avais un, une seule de ces semaines-là ! […] Il vient précisément de renouer avec Louise, dont Maxime est l’ennemi, et lui écrit : « Le jeune Du Camp est officier de la Légion d’honneur ! […] Mais le pharmacien de campagne, toujours plus ou moins médecin marron, est, pour un médecin, l’ennemi, et les coups que Flaubert lui assène vengent toute la corporation du docteur Larivière. […] Cette dette se confondait dans l’esprit du peuple avec les trois mille deux cents talents euboïques exigés par Lutatius ; et ils étaient, comme Rome, un ennemi pour Carthage. […] Il avait eu jusqu’alors de bien menues faveurs des différents régimes politiques ; la République de 1848 lui avait donné une mission en Orient, Napoléon III l’avait reçu à Compiègne, l’avait décoré (en même temps que Ponson du Terrail), la troisième République lui attribua une pension de trois mille francs, après des incidents pénibles, qui, exploités par ses ennemis de la presse, l’humilièrent cruellement.
Et celle des grands romantiques ne l’est pas tant que cela, puisque les ennemis du plus grand de tous l’accusent de ne pas sortir des lieux communs. […] Mais la croyance à un moi naturel dont la culture serait l’ennemie, c’est une convention, puisque la nature est variable, l’amour même est appris, etc. […] je vais passer pour un homme méchant, toujours par suite du même vice : le sot amour pour la vérité, qui fait tant d’ennemis. » Stendhal avait fait de la critique… Sans penser précisément du mal de la Vie de Stendhal de M. […] Taine s’apitoie sur sa faiblesse, mais affecte d’ignorer qu’on a eu la preuve de ses intelligences avec l’ennemi. […] Un homme intelligent, un homme de pensée, peut et doit être patriote, mais garder quelque sang-froid dans ses jugements et ne pas dénigrer comme un braillard chauvin les gloires de l’ennemi.
Le lendemain de l’enterrement d’un homme célèbre, ses amis et ses ennemis se mettent à l’œuvre ; ses camarades de collége racontent dans les journaux ses espiègleries d’enfance ; un autre se rappelle exactement et mot pour mot les conversations qu’il eut avec lui il y a vingt-cinq ans. […] Jonas, sorti en cachette de sa chambre, a tué en trahison son ennemi, et croit dorénavant respirer en paix ; mais le souvenir du meurtre, comme un poison, désorganise insensiblement son esprit.
« Il faut, dit-il, rendre le roi très facile à acheter très chèrement la paix. » Il est une guerre pourtant, la seule que Fénelon permette et conseille même à Louis XIV : c’est la guerre aux ennemis personnels de l’archevêque de Cambrai, aux jansénistes, dont il demande la destruction, seul moyen, avec une prompte paix, « de mettre le roi en repos pour longtemps. » Je sais bien que ces énormités sont cachées sous les attrayantes nouveautés d’une défense de la France par un appel aux masses, d’une convocation régulière des états généraux, d’élections libres et périodiques, enfin d’une intervention légale du pays dans les affaires du pays. […] Cet homme, tombé de la toute-puissance qu’il avait exercée avec modération, exilé dans un coin de l’île de Samos, où il vit du travail de ses mains ; puis, par un retour de fortune, ramené en triomphe à Salente, où il retrouve la faveur du prince et la puissance, et ne s’en sert pas contre ses ennemis enfin se retirant dans une solitude, non pour s’y dérober à ses devoirs envers sa patrie qu’il continue à servir par ses conseils à Idoménée, mais pour échapper par l’obscurité à l’injustice et à l’envie ; cette création, que rendent vraisemblable certains exemples de la sagesse antique, reçoit de l’esprit chrétien, habilement caché sous une mise en scène grecque, une grandeur inconnue des héros comme des sages du paganisme.
3° Il le sera néanmoins si, dans ses paroles mêmes, il se montre notre ennemi, s’il se révèle comme un esprit méchant et mauvais. […] L’imaginatif ne se croit jamais seul ; il promène avec lui ses enfants, ses amis, ses ennemis, ses supérieurs, tous ceux dont l’existence est liée à la sienne et peut l’émouvoir en joie ou en tristesse.
Puis c’est la rentrée verte de tout ce que les champs maraîchers ne doivent pas garder pour l’ennemi : des charrettes de choux, des charrettes de potirons, des charrettes de poireaux, marchant lentement sous un ciel gris, traversé d’un grand zigzag orange ; et sur les trottoirs, et entre les roues des voitures, toute une population de déménageurs et de déménageuses, portant suspendus à leurs personnes les dépouilles du champ ou les baroques débris du logis hors barrière. […] Mercredi 12 octobre Par ces jours tragiques, en l’élévation du pouls et la griserie de tête, qu’amène le bruit grondant de la bataille continue, qui vous entoure de tous côtés, on a besoin de sortir de son être réel, de dépouiller l’individu inutile qu’on se sent, de mettre sa vie éveillée dans un rêve, de s’inventer chef de partisans, surprenant des convois, décimant l’ennemi, débloquant Paris, — vivant ainsi de longs moments, transporté dans une existence imaginative par une sorte d’hallucination du cerveau. C’est la trouvaille de quelque moyen de voler qui vous fait voir et découvrir les positions de l’ennemi, c’est la trouvaille de quelque engin meurtrier qui tue des bataillons, met à mort tout entiers des morceaux d’armée. […] Ces jours-ci, nous avions traversé les lignes ennemies, l’armée de Paris donnait la main à l’armée de la Loire.
c’est trop fort, respectable serait assez. » Et il me raconta alors des particularités singulières, telles qu’on ne les savait bien que dans la famille des Débats, sur cet homme original, timide, fier, ennemi de tout joug, même conjugal, amoureux avant tout de sa liberté, jaloux de la reprendre au moment de la perdre, et qu’une circonstance fatale de jeunesse avait dû rendre plus réservé encore et plus retiré.
Sur quoi Mathieu Marais ne peut s’empêcher de s’écrier : « Que dirait Bayle, cet homme si simple et si ennemi de l’intérêt, s’il voyait son Dictionnaire entre les mains des usuriers ?
Ce spectacle même, à s’en donner un moment la vue, est consolant et beau : sur le trône la bonté dans sa magnanimité ou dans sa grâce ; sur les marches du trône et dans les plus hauts rangs de la société, intelligence, générosité, discernement et activité pour le bien, pour l’allégeance des misères ; à tous les degrés de l’échelle, des associations utiles et secourables : et malgré tout il y a des problèmes insolubles ou non résolus encore, des intérêts rivaux qui semblent ennemis, qui sont certainement contraires et qu’il n’est pas donné aux meilleures intentions, aux résolutions les plus louables, d’accommoder ni de trancher.
La petite culture a bien ses petits ennemis ; mais elle s’arrange avec eux et leur cède quelque chose pour recevoir quelque chose en échange.
En supposant même que rien de tout cela n’arrive, que les ennemis se retirent, que la tranquillité intérieure se rétablisse et que le pouvoir se raffermisse, entre les faibles mains où on l’a replacé, que pouvons-nous raisonnablement attendre d’une administration effarée, incertaine, enivrée de tous les principes qui tourmentent la société depuis vingt-cinq ans ; d’un chef bon, mais aveuglé au point de méconnaître également, et les hommes et les choses, et de placer sa personne sous la protection du poignard des assassins, et l’État sous la sauvegarde des institutions auxquelles la France a été redevable, pour tout bienfait, du règne de la terreur et de celui de Napoléon ?
En janvier 1814, je le surprends qui fredonne encore à sa jeune maîtresse : Autant de pris sur l’ennemi ; l’année suivante, en juillet 1815, la voix tout émue, et d’un ton qu’il s’efforce en vain d’égayer, il soupire : Rassurez-vous, ma mie.
Interpellé et poussé à bout par ses ennemis sur le mystère de sa naissance, La Harpe lui-même réclame cette descendance honorable, dans sa lettre au Mercure (février 1790).
Qui dit catholique, dit monarchique ; qui dit protestant, dit républicain, et tout républicain est ennemi de la monarchie.
Les ennemis de M.
Il est vrai que ce gracieux épisode de la Bible s’encadre entre deux événements étranges, dont Racine se garde de dire un seul mot, à savoir le somptueux festin d’Assuérus, qui dura cent quatre-vingts jours, et le massacre que firent les Juifs de leurs ennemis, et qui dura deux jours entiers, sur la prière formelle de la Juive Esther.
Le repentir alors et une sorte d’irritation croissante contre un ennemi toujours victorieux le rejetaient au premier choc dans des partis extrêmes dont l’austérité ne tardait pas à mollir ; et, après une lutte nouvelle, en un sens contraire au précédent, il retombait encore de la cellule dans les aventures.
« Il n’y a pas de langue qui soit plus ennemie des équivoques et de toutes sortes d’obscurités. » 364.
Car l’imagination est chose essentiellement subjective et variable : elle ne reçoit loi ni mesure ; c’est l’ennemie de la raison, dont l’objet est l’universel.
3° L’ennemi de la vie, ce n’est pas la mort, c’est la douleur, et c’est elle qu’il faut fuir de toutes les forces que nous prête la nature.
Ténébreux, fatal, amer, il sort on ne sait d’où, il passe enveloppé d’un triple prestige de mystère, de crime et d’amour : le Giaour, Lara, le Corsaire, ces incarnations de la sensibilité misanthropique de Byron, sont les modèles d’après lesquels nos robustes et bien portants poètes, le joyeux Dumas, le solide Hugo, ont dressé le type de leur héros, bâtard ou enfant trouvé, victime ou ennemi de la société, désespéré, magnanime et tout débordant de tendresses séduisantes : Antony est plus brutal, Didier plus pleurard.
ne vous gênez pas, je comprends tout A un enfant : Aime bien ta mère et soutiens-la J’ai beaucoup souffert, j’ai été proscrit et fugitif, mais j’avais la conscience tranquille « A deux ennemis amis » : Réconciliez-vous.
Il n’a point d’amis, point d’ennemis, point d’opinions politiques ou autres, et, s’il en a, il les oublie.
Enfin, Berne, qui jusqu’alors avait ouvert ses murs à tous ses ennemis, se réconcilie avec lui, chasse Boisée, un de ses plus ardents contradicteurs, et scelle du sang d’un autre, Gentilis, un traité de confédération avec Genève.
Frédéric le louait publiquement, et disait de son Homme machine, « qu’il ne devait déplaire qu’aux gens ennemis par état de la raison. » L’orgueil même de ses grandes qualités de ce qu’on pouvait appeler, malgré lui, ses vertus, lui faisait prendre plaisir à cet avilissement systématique de la nature humaine, par la douceur de penser que de toutes ces machines il était la plus parfaite.
Cette idée de la femme ennemie est si ancrée chez eux que, même les héroïnes qu’ils veulent sympathiques (Renée Mauperin, Sœur Philomène) nuisent à leur insu à ceux qui les approchent et déchaînent inconsciemment les catastrophes.
Si tu pars le premier, ton voyage est le meilleur ; tu t’en vas avec ton argent et sans avoir d’ennemis.
» — Et Lionnette, d’un geste forcené, arrachant ses voiles, défaisant son fichu, secouant sa crinière qui tombe, en flots dorés, sur ses épaules nues, se présente à l’ennemi en habit de combat, comme on disait au siècle dernier.
Il s’élève derrière nous une génération impatiente de tous les jougs, ennemie de tous les rois ; elle rêve la République, et est incapable, par ses mœurs, des vertus républicaines.
Être inconnu de ses ennemis, méconnu de ses amis par le renfermé de son œuvre et le peu de bruit qu’on fait autour de soi-même, — il y a, surtout en ce temps, quelque force à cela.
* * * — En voyant le chœur de la cathédrale de Mayence, d’un rococo si tourmenté, si joliment furibond, avec ses stalles qui semblent une houle de bois, en voyant ces églises de Saint-Ignace et de Saint-Augustin, aux balustres des orgues, égayés d’Amours comme un théâtre Pompadour, la pensée se perd sur ce catholicisme, si rude en ses commencements, si ennemi des sens, et tombé dans cette pâmoison, dans cet éréthisme, qui est l’art jésuite.
Flaubert, l’ennemi des illustrations, songe aujourd’hui à l’illustration de sa féerie, avec des dessins de peintres — et non de dessinateurs, dit-il avec mépris.
qui voudra le faire taire doit lui remplir la bouche 7 » ; lorsque Richelieu, ennemi des grands, mais né parmi eux, écrivait de son côté : « Si les peuples étaient trop à leur aise, il serait impossible de les contenir dans les règles de leur devoir… il faut les comparer aux mulets, qui, étant accoutumés à la charge, se gâtent par un long repos plus que par le travail », lorsque ces écrivains laissaient échapper ces outrageantes paroles, ne trahissaient-ils pas par là les sentiments secrets de leur caste ?
Celui-ci est un sot qui a bien failli mourir, car il a cru trouver un ami dans le chat et un ennemi dans le coq, alors que c’était tout le contraire.
Elle dit : L’amour, je le confesse, a traversé ma vie : C’est ce qui malgré moi, me rend son ennemie.
Et plus loin, lorsque sur le champ de bataille, à huit heures du soir, la Garde de l’Empereur s’ébranle, n’a-t-on pas, toutes les imaginations humaines n’ont-elles pas la vision du drame, dans ces lignes de Victor Hugo : « Quand les hauts bonnets des grenadiers de la Garde, avec la plaque à l’aigle, apparurent, symétriques, alignés, tranquilles, superbes, dans la brume de cette mêlée, l’ennemi sentit le respect de la France ; on crut voir vingt victoires entrer sur le champ de bataille, ailes éployées, et ceux qui étaient vainqueurs, s’estimant vaincus, reculèrent, mais Wellington cria : “Debout, gardes, et visez juste !”
La blancheur du papier figurait pour ces nerfs hallucinés un ennemi aussi présent, une matière à peine et à triomphe aussi dure, réellement, que le soleil sur les sables, ou la tempête et l’infini sur la mer. […] Si le développement oratoire devient consciemment et en principe le contraire et l’ennemi de l’art mallarméen, nous en avons aperçu les causes dans la maigreur de l’imagination où il puise. […] Vertigineuses sautes en un effroi que reconnue ; anxieux accord. » Sans cesse sont présentes l’idée et la défiance de l’ennemie, de la Nature dont les grandes lignes droites et nues fusent et se répètent indéfiniment. […] Parlant du théâtre d’aujourd’hui, il écrit : « Je crois qu’en évitant de traiter l’ennemi de face vu sa feinte candeur et même de lui apprendre par quoi ce devient plausible de le remplacer (car la vision neuve de l’idée, il la vêtirait pour la nier, comme le tour perce déjà dans le Ballet), véritablement on peut harceler la sottise de tout cela ! […] Un bourgeois donnerait cent louis, non un chèque ou nos papiers de banque, mais cent beaux et vrais louis de 1664, avec à fleur de coin le profil orgueilleux, royal, du prince ennemi de la fraude, cent louis d’or qui font au vers même, dans la voix, comme à une bourse pleine dans la main, sa substance et son poids, il donnerait ses cent derniers louis pour aplatir la figure de ce M.
Ses ennemis l’ont appelé « un rêveur ivre d’encre ». […] Aucun de ses ouvrages satiriques ne lui valut autant d’ennemis et d’injures que ce traité de morale religieuse. […] Il me fallait à tout prix m’éloigner de mon ennemi, afin de lui porter de loin des coups plus assurés. À mes yeux, cet ennemi avait une figure déterminée, il portait un nom connu : mon ennemi, c’était le droit de servage. […] Mais la littérature du proscrit ne trouva pas grâce en Russie ; on en voulut à Tourguénef de sa lettre indulgente, on l’accusa de complicité avec les ennemis de l’État.
Ce sont là les deux ennemis intimes de Boileau. […] vos ennemis vous trompent, comme il est naturel ; vos amis, en leur qualité d’amis, vont plus loin : ils vous trahissent. […] Sans doute il nous parle des ennemis de l’Encyclopédie, et cela était nécessaire, encore qu’ils aient été pour la plupart d’assez piètres personnages ; mais il ne s’est pas inquiété de nous parler de ses amis, comme l’avait fait succinctement, mais avec précision, M. […] Elles étaient devenues tyranniques, infiniment étroites d’esprit, rebelles à tout progrès, ennemies de toute indépendance et conservatrices de toute routine. […] Dieu démontré n’est pas leur ennemi et n’est pas pour leur déplaire.
Il est vrai seulement que, de même encore qu’en philosophie la conciliation s’opère entre deux principes ennemis par l’indifférence qu’on professe au fond pour l’un comme peur l’autre, de même en critique aussi, la même indifférence esthétique produit les mêmes effets. […] Streckeisen-Moultou, dans son Jean-Jacques Rousseau, ses amis et ses ennemis, avait été le premier éditeur. […] On n’est pas plus éloigné de la nature et de la vérité, plus ennemi, si je puis ainsi dire, de l’usage commun de la langue, plus dédaigneux enfin de l’universel bon sens que Ronsard lui-même trop souvent, que Baïf, que Belleau, que Desportes. […] Pellissier, n’avait pas compté seulement pour ennemis les défenseurs de la tradition classique. […] Par quelle fatalité, ennemie de son propre dessein, M.
Port-Royal avait à vivre et à combattre de puissants ennemis. […] Ce plan de vaincre ses ennemis en passant chez eux, et de sortir du doute en se jetant au centre même du doute, Pascal l’a exécuté avec une absolue franchise. […] Au contraire, et en cela même l’intensité de sa croyance apparaît, il triomphait de voir ses ennemis vigoureux. […] Accompagnons-le dans sa campagne d’épigrammes contre ses ennemis et contre ses amis. […] Ses lecteurs deviennent presque aussitôt ou ses complices ou ses ennemis.
Elle sera autre : ou l’arbre plus vigoureux ou des rejetons beaux d’être les ennemis du tronc paternel D’une conception nouvelle de la vie surgiront de nouveaux motifs d’activité. […] Puis ils s’étonnent, ils hurlent d’épouvante lorsque appliquant leurs propres leçons, ceux qui les tiennent pour ennemis les frappent comme ils ont frappé leurs frères… Il ne faut pas tuer. […] D’ailleurs, l’art de traiter la grammaire comme une ennemie personnelle et d’ennuager de métaphysique médiocre les plus prétentieuses des banalités compte peu d’adeptes. […] Un beau jour vous trouvez un ennemi. » Presque toute cette correspondance nous renseigne, dans ce sens, sur les divergences de plus en plus graves entre Bakounine et ses amis. — « Bakounine voit trop grand ! […] J’avais beau leur crier : « Mais Messieurs, je ne suis pas plus infaillible que… vous-mêmes », ils n’entendaient à rien et ils redoublaient leur bombardement… Et voilà comment on se fait des ennemis !
Nous y retrouvons le prêtre à la barre de fer, Rotishin, le tueur de tigre, Boushô, et Itijôsei la femme forte, à côté de Kiumonirô Shishin, l’homme au corps entièrement tatoué de dragons, et de Rosénsho, ce mortel qui avait le pouvoir de produire des orages pour terrifier l’ennemi ; — tous deux faisant partie des cent huit héros de l’épopée chinoise. […] Un roman dans lequel le prince Yuriwaka, un prince du xiie siècle, met à mort Beppou, l’ennemi de sa famille, un roman où se trouve un puissant dessin du faucon qui a donné son nom au roman, et un caractéristique dessin de Beppou qui, tombé à terre, se tient la tête, se bouche les oreilles sous le sifflement d’une flèche qui passe au-dessus de lui. […] Et d’autres compositions nous montrent le prince Minamoto Yoshitaka, dans un pèlerinage, faisant la rencontre de Raïgô, et le prêtre lui communiquant son pouvoir surnaturel, si bien qu’un jour le prince, poursuivi par un ennemi, fait un appel aux rats dont le flot montant entre eux deux empêche de l’atteindre. […] Puis se succèdent les gravures d’Isanaghi, le premier homme de la terre du Japon tuant Kagoutsouti, le mauvais génie de la contrée ; de Foumeitchôja, mettant en fuite le renard à neuf queues ; du soldat Sadayo, tout percé de flèches et mourant en enfonçant des deux mains son sabre dans le corps d’un ennemi étendu sous lui ; du Dieu du tonnerre s’humiliant devant la hache monstrueuse de Kintoki ; de Yorimitsou, qui vient de trancher la tête du géant de la montagne de Ohyéyama : tête qui est en train de retomber et d’aller se ficher sur les cornes du casque du jeune guerrier ; de l’intrépide explorateur qui entra le premier dans la grotte du Fouzi-yama et que l’on voit la parcourir la torche à la main ; du cavalier Ogouri Hangwan, faisant assembler les quatre pieds de son cheval sur la tablette d’un étroit jeu de go ; du général Yoshisada demandant au génie de l’Océan, dans la logette faite par la courbe d’une vague, demandant de retirer la marée pour laisser passer son armée. […] C’est l’impératrice Jingô, une tête coupée à ses pieds, en train de tendre son formidable arc ; c’est le prince Yamatodaké qui vient de tuer le chef ennemi sous un déguisement de femme ; c’est un général japonais blessé par une flèche qui est à ses pieds, et qui envoie dans le camp ennemi, à celui qui l’a blessé, un colossal taï et une cruche monumentale de saké : un acte de courtoisie militaire très commune en ces temps ; et ce sont des combats où, sous le harnachement de fer des cavaliers, se cabrent des chevaux hirsutes et échevelés, aux yeux de feu, à la robe toute noire, pareils à des coursiers de l’Érèbe.
En faisant, pour le bien de la foi, la critique de cet ennemi, Origène a donc ainsi conservé à la postérité le plus dangereux arsenal et le mieux fourni d’armes de toutes sortes contre la vérité qu’il voulait sauver. […] Mais j’admire plus encore le critique dont les mains créatrices donnent une vie et une force terrible à tout ennemi qu’elles touchent. […] Le besoin de liberté, qui est le plus fort en théorie, est presque toujours vaincu dans la pratique, parce qu’il voit, au dernier moment, se dresser contre lui un ennemi invincible : la faim. […] Tout autre que Flaubert eût succombé dans une lutte où l’ennemi était la langueur. […] Ce sont leurs ennemis qui ont créé la gloire de Ronsard et celle de Victor Hugo.
L’art en apparence le plus ennemi de l’esprit scientifique, c’est la poésie : des objections particulières lui sont adressées. […] Il n’est pas d’émotion esthétique qui n’éveille en nous une multitude de désirs et de besoins plus ou moins inconscients ; quand nous sommes émus par une marche guerrière, nous éprouvons quelque impatience à être assis, nous avons besoin de marcher, de courir même, de chercher un ennemi à combattre. […] Il faut le reconnaître, les génies et même les talents ont eu le plus souvent trop d’ennemis pour ne pas avoir, par compensation, un petit cercle d’admirateurs enthousiastes. […] Aussi l’américanisme finirait-il par faire oublier non seulement l’art, mais la science : c’est donc l’ennemi commun. […] Une science prise à part ne peut sembler, au premier abord, ennemie de la poésie que parce qu’elle est spéciale, trop cantonnée dans un coin de la réalité.
Auprès de cette fraternité celle des Goncourt était, comme on voit, une fraternité de frères ennemis. […] Personnalités, portraits pris sur le vif, mésaventures burlesques, anecdotes scabreuses, faits divers, dépositions de Cour d’assises, potins de salle de garde et blagues de carabins, il n’est rien que l’auteur n’y ait mis en œuvre contre ses ennemis les médecins. […] De là lui vient son âpreté, et ce caractère hautain, ennemi des accommodements, des compromis et des demi-mesures. […] L’aimée est maintenant l’Ennemie. — Une fois déjà, au bain, il a tenté de la faire périr. […] Tous ces frères ennemis, disait-on, ne passaient le temps qu’à s’entre-dévorer.
Manquant de souffle et d’élan, parlant une langue sénile, terne et prosaïque, se servant avec une incertitude pénible d’un instrument imparfait, emprisonné dans un pauvre et grossier déisme sans lumière et sans issue, aucun homme ne devait charmer, et n’a charmé en effet, à un égal degré, la multitude des intelligences paresseuses, ennemies de la réflexion et des recherches spéculatives ; aucun homme, enfin, n’a été moins original dans le vrai sens du terme. […] Nous sommes une nation routinière et prude, ennemie née de l’art et de la poésie, déiste, grivoise et moraliste, fort ignare et vaniteuse au suprême degré.
Le puritain avait proscrit le plaisir comme un ennemi, chez autrui aussi bien que chez lui-même. […] Ils furent blessés tous deux, et sir Henri Bellasses si fort, qu’il mourut dix jours après. » Ce n’étaient pas ces bouledogues qui pouvaient avoir pitié de leurs ennemis. […] Une telle diversité de passions dans une telle variété d’actions et de circonstances de la vie et du gouvernement, une telle liberté de pensée, une telle hardiesse d’expression, une telle libéralité envers ses amis, un tel dédain de ses ennemis, une telle considération pour les hommes savants, une telle estime pour les gens de bien, une telle connaissance de la vie, un tel mépris de la mort, en même temps qu’une telle âpreté de naturel et une telle cruauté dans la vengeance, n’ont pu être jamais manifestés que par celui qui les a possédés ; et j’estime Lucien auquel on les attribue aussi incapable de les écrire que de faire ce que Phalaris a osé612. » Très-belle rhétorique ; il est fâcheux qu’une phrase si bien faite couvre de telles sottises. […] Si j’ai un ennemi, au lieu de l’attaquer dans une brochure, je puis le transporter sur les planches.
Ne fallait-il pas que l’orgueil fût légitime, et la colère dirigée contre un ennemi réel ? […] Hugo ne connaît d’autre ennemi que la critique ; c’est à cet ennemi seul qu’elle adresse toutes ses invectives, c’est contre lui qu’elle lance ces apostrophes véhémentes qui voudraient exprimer le mépris et qui ne peignent que l’orgueil saignant. […] L’adresse ingénieuse avec laquelle Noëmi défend sa sœur contre un ennemi que Marianna ne lui a pas nommé, lui a fourni le sujet de plusieurs pages très fines.
Demain nous aurons l’ennemi chez nous. […] Comment s’est-il fait que les bataillons de Belleville, si mous devant l’ennemi, si mous devant les bataillons de l’ordre du 30 octobre, ont-ils pu s’emparer de Paris ? […] On ne peut pourtant pas s’en aller dans ce moment, où nos amis les ennemis, semblent se rapprocher tellement, qu’on se demande s’ils ne sont pas entrés, et qu’on s’attend à voir, dans la débandade des gardes nationaux, apparaître sous l’Arc de l’Étoile, au milieu des coups de fusil, les têtes des colonnes versaillaises. […] Une circulaire de la guerre fait assavoir aux gardes nationaux : que, comme l’envoi d’un parlementaire peut être une ruse de guerre, il faut continuer à tirer, quand même l’ennemi a cessé le feu… Et en même temps une affiche du citoyen Rossel, en réponse à la sommation de rendre le fort d’Issy, menace, sous le prétexte d’insolence — il est bien difficile à une sommation de ne l’être point un peu — menace de faire fusiller le premier parlementaire qui en apportera une seconde.
Au reste, ces légistes de Toulouse sont plus turbulents, plus indisciplinés, plus ennemis de la paix et de l’ordre que les étudiants en médecine de Montpellier ; il n’est mauvaise farce, tapage, rixe, friponnerie même dont ils ne soient coutumiers. […] Bretteur, aventurier, « bandolier », et même faux monnayeur, voilà les traits dont ses ennemis l’ont dépeint, et que la naïveté des biographes, bonnes gens, hommes de cabinet, point du tout turbulents ni batailleurs, a presque toujours retracés. […] Le cardinal Alberoni Parmi tous ceux qu’a maltraités le génie rageur de Saint-Simon, — et, comme on sait, ils sont légion, — on n’en nommerait pas beaucoup qu’il ait plus cruellement, plus magistralement exécutés que l’ennemi de son ennemi Dubois, cet Italien qui gouverna l’Espagne avec une reine italienne, le cardinal Jules Alberoni. […] Pour un diplomate, il est trop étonné, trop étourdi, quand les amis sur qui il avait compté tournent en ennemis ; un habile homme n’a pas de ces violentes surprises, rien ne lui est tout à fait imprévu. […] Ainsi tombera le reproche trop souvent, et sans doute injustement, adressé aux héritiers d’un grand homme, d’avoir été les ennemis de sa réputation littéraire, par un faux orgueil de race, et comme si la littérature n’avait pas fait toute l’illustration de leur nom.
Dirai-je quelques mots de ses mœurs, si pures et si affables, de sa serviabilité, de sa franchise quand il peut prendre ses franchises, quand il n’est pas en face du philistin ennemi, de sa ponctualité d’horloge dans l’accomplissement de tous ses devoirs ? […] Car alors il garde pour lui sa pensée vraie, témoignant simplement par une légère concession (appréciable de ceux qui savent y voir clair dans le crépuscule) qu’il veut vivre en paix avec tout le monde, même avec l’Industrie et le Progrès, ces despotiques ennemis de toute poésie. […] J’interrogeai les amis et les ennemis. […] Cela est fort imprudent : c’est se faire un ennemi — sans bénéfice et sans profit. […] Entre les mains d’un autre poëte que Victor Hugo, de pareils thèmes et de pareils sujets auraient pu trop facilement adopter la forme didactique, qui est la plus grande ennemie de la véritable poésie.
Désir d’étonner, où il trouvait une sorte de rajeunissement de la forme littéraire épuisée par l’âge, une ligne de démarcation entre les Anciens et les Modernes… nous l’avons vu chez lui proche de la mystification, et trop souvent ses ennemis le confondirent avec elle. […] Corrigeons ce qu’il y a d’excessif dans la formule : La femme est l’ennemie née de l’abstrait. […] celui-là connaissait bien un sexe pour qui l’idée de justice toute nue correspond précisément à l’abstraction ennemie de sa nature, et tellement hostile à son tempérament qu’elle aime mieux la négliger de parti pris que d’y plier les prédilections de son cœur.
Ils se débattent contre une force dont ils ne se rendent pas compte ; ils se refusent à un plaisir qui leur devient volontiers une fatigue ; ils sont honteux, au fond de l’âme, de se savoir si peu dignes de tant de soins et d’être servis, mieux qu’ils ne méritent, par ces plumes vaillantes, animées à bien faire, ennemies des barbarismes, jalouses de la forme, en pleine abondance, en pleine énergie, actives à ce point que du jour au lendemain elles ont abordé les questions les plus ardues ; correctes à ce point qu’il serait difficile de rencontrer, dans ce va-et-vient universel de la langue pratique, officielle, intelligente, une faute aux règles les plus difficiles de la grammaire la plus sévère ! […] C’est l’argent, c’est l’ambition, c’est la lutte ardente de la politique des tribunes ennemies, c’est le commerce et ses armées opulentes, c’est le flot de l’Océan, c’est le mouvement des colonies, ce sont, à chaque instant, les variations et les révolutions de la fortune insolente qui donnent le mouvement, la vie et la force au journal anglais. — Chez nous, tout simplement, c’est la forme et c’est l’esprit, mêlé de courage et de probité, qui font vivre un journal ! […] » À ce propos qu’il nous soit permis d’entourer, de nos hommages sans réserve, ce grand poète Aristophane, ce libre penseur, ce merveilleux conseiller, cet ennemi de la déclamation ; austère et vigilant comme Démosthène19, et comme lui populaire à force d’austérité et de vertu20 ; car à peine a-t-il évoqué la pauvreté, comme Molière évoque la statue du Commandeur, Aristophane tire de l’âme de son fantôme décharné, non pas des lamentations sociales et des blasphèmes, mais le conseil et l’espérance.
Baudelaire de l’éprouver le premier, qui, tout mépris pour celle avec qui il n’est pas impuissant, toute impuissance pour celle avec qui il n’est pas mépris, fige en moitiés ennemies, destructrices l’une de l’autre, son amour. […] Mais que le monsieur bien élevé du XXe, digne héritier de l’honnête homme du XVIIe, se lèche, pourlèche les babines, il n’en garde pas moins sa mesure, même aux instants de délectation suprême, car il y a l’harmonie française et sa sœur siamoise, l’éloquence française, et leur cousin, l’humour anglais et encore le charme slave, leur ancien béguin et le mensonge allemand, leur ennemi héréditaire. […] Ils sont deux entités inconciliables, deux raisons ennemies, dont la plus dure, cette grande pétrifiée de Raison d’Etat aura le dernier mot.
Hendreich (Carthago, seu Carth. respublica, 4 664), a réuni des textes pour prouver que les Carthaginois avaient coutume de mutiler les cadavres de leurs ennemis, et vous vous étonnez que des barbares qui sont vaincus, désespérés, enragés, ne leur rendent pas la pareille, n’en fassent pas autant une fois et cette fois-là seulement.
Il y avait quelque chose de fort imposant dans ce cortège qui marchait avec une grande rapidité et comme s’il craignait d’être rattrapé par un ennemi. » Je passe sur le reste du voyage où les contrariétés mêmes, les retards et les coups de vent tournent à intérêt et sont au profit de la curiosité ; jamais six semaines d’une vie ne furent employées plus vivement (mars-mai 1845).
Au combat de Cassano, en effet, sous M. de Vendôme, il avait été blessé à la défense d’un pont ; et l’armée ennemie lui avait passé sur le corps ; sa tête n’échappa que grâce à une marmite de fer que son vieux sergent Laprairie, en fuyant, lui avait jetée à tout hasard pour le protéger.
Fontenelle (Cyclias) ouvrit le xviiie siècle, en étant discret à bon droit sur La Bruyère qui l’avait blessé ; Fontenelle, en demeurant dans le salon cinquante ans de plus que les autres, eut ainsi un long dernier mot sur bien des ennemis de sa jeunesse.
Elle le loue de sa clémence envers les révoltés de La Rochelle ; elle l’admire avec exaltation surtout pour sa loyale conduite et ses chevaleresques représailles envers Charles-Quint, son grand ennemi, lorsqu’il le fêta si royalement durant ce hasardeux passage à travers la France : L’Ytalien à grand peine l’a creu, Car la bonté, qui de Dieu est venue, De l’infidelle est tousjours incongnue.
Ledru-Rollin, chef des journalistes radicaux, et ayant, malgré ses amis, reconnu en lui des facultés de parole et des puissances de conception très-grandes avec des intentions non déguisées contre le socialisme subversif, notre ennemi commun, j’avais conçu pour lui une secrète estime, et je n’étais pas loin d’espérer que le concours d’un homme aussi bien doué ne pût être, sous une forme ou sous une autre, très-utile à la république ; depuis, il suivit légèrement une émeute sans portée qu’il devait répudier courageusement ou conduire ; il se réfugia en Angleterre par une fausse porte, mais il parut de ce jour-là se retirer de la politique, et il vécut en mort de ses souvenirs, de ses regrets et peut-être de son mépris pour les vivants.
Il est à la vérité tombé sous un fer ennemi ; mais que sais-je ?
Tandis que je contemplais les feux réguliers des lignes romaines et les feux épars des hordes des Francs, tandis que, l’arc à demi tendu, je prêtais l’oreille au murmure de l’armée ennemie, au bruit de la mer et au cri des oiseaux sauvages qui volaient dans l’obscurité, je réfléchissais sur ma bizarre destinée… Que de fois, durant les marches pénibles, sous les pluies ou dans les fanges de la Batavie : que de fois à l’abri des huttes des bergers où nous passions la nuit ; que de fois autour du feu que nous allumions pour nos veilles à la tête du camp ; que de fois, dis-je, avec des jeunes gens exilés comme moi, je me suis entretenu de notre cher pays. » Et voilà à quoi sert d’avoir servi dans l’armée de Condé, septième compagnie bretonne, couleur bleu de roi avec retroussis à l’hermine659 !
Certes, ces gens-là sont les irréconciliables ennemis des études classiques, et d’ailleurs de toute espèce d’études.
Cette simplicité du discours, cette suite et cette logique que nous voulons dans nos écrivains contre notre propre naturel en quelque sorte, lequel n’est ni si austère, ni si conséquent, ni si ennemi de toute parure et coquetterie que notre langue, ne témoignent-elles pas que nous ne la possédons pas pour nous seuls, et que c’est une langue à l’usage de tous, dont nous n’avons que le dépôt ?
Mais la grandeur de la cause que défend Bossuet se communique à tout ce qu’il écrit pour elle, au lien que la cause de Saint-Simon est si mesquine et si personnelle qu’en lui donnant le dépit éloquent, l’art de faire ressortir les fautes, les couleurs vives pour peindre ses ennemis, le feu, l’emportement, l’éloquence des regrets, elle ne lui donne pas ce qu’elle n’a pas, la grandeur.
J’ai eu d’ardents adversaires, je n’ai pas eu un ennemi personnel.
On y rencontre une fort belle scène dans laquelle la princesse veut empêcher Lohengrin de partir pour combattre ses ennemis.
L’épuisement de Carthage, l’agitation des mercenaires réclamant en vain leur solde, les terreurs de la ville, l’insolence croissante des séditieux, cette effroyable mêlée d’Espagnols, de Gaulois, de Liguriens, de Grecs, d’Africains surtout, qui s’excitent sans se comprendre, et, jaloux les uns des autres, rivalisent de fureur contre l’ennemi commun, le rôle des généraux, la mission de Gescon, la violation du droit des gens, l’attentat des barbares contre les envoyés de la république, la guerre devenue inévitable, les premières défaites d’Hannon, administrateur actif, mais le plus inexpérimenté des capitaines, Hamilcar prenant le commandement des troupes, sa tactique, ses victoires, les péripéties de la lutte, les alternatives d’espoir et d’abattement chez les Carthaginois, le siège de la grande cité punique, l’anéantissement des révoltés, et au milieu de tant d’événements divers la hideuse férocité de deux partis, tout cela, dans le large tableau de Polybe, atteste le pinceau énergique et sobre d’un grand maître.
Il s’enferme dans un silence entêté, sa figure se couvre d’un nuage méchant, et apparaît en lui, comme un être nouveau, inconnu, sournois, ennemi.
Le chenet est le petit chien du foyer, chiennet ; le portugais dit caes da chamine, les chiens de la cheminée ; le provençal, cafuec, et l’anglais, fire-dog, le chien du feu ; l’allemand, feuerbock, et le danois, ildbuk, le bouc du feu ; l’espagnol, morillo, le petit Maure du feu, et l’idée est bien espagnole, de faire rôtir éternellement l’ennemi national ; mais il est probable que la métaphore n’est plus comprise, pas plus que celle, plus douce, qui a fait chez nous du chien le fidèle gardien du foyer.
On sait cependant à quel point ces deux églises ont été ennemies.
Il n’y a rien qui gâte l’homme comme ces deux choses, la première parce qu’on en a toujours un souvenir un peu irrité ; la seconde, parce que quand on ne retrouve plus la même vogue, le même succès, le même enivrement de la gloire naissante, on s’imagine — ou on peut s’imaginer — pour cela, que l’on a des ennemis, que l’on a des envieux, et la manie de la persécution finit par s’installer en vous Mais il est bien certain que, ces différences étant établies, il y a dans La Fontaine un Rousseau qui ne pouvait pas aller jusqu’au bout des conséquences désastreuses que le caractère de Rousseau comportait.
En d’autres termes, si l’on conçoit sans peine que les ennemis de la vieille monarchie puissent rétrospectivement s’intéresser à ce roi, suicide de sa race, qui l’a frappée en sa personne, à cette fête de Sardanapale incendiaire qui a dévoré ses convives, à ce souper de soixante ans qu’on appelle le règne de Louis XV et qui semblait rendre après lui tout règne de ses descendants impossible, conçoit-on aussi facilement que les hommes, vassaux fidèles du passé, qui ont reconnu que ce n’était pas le passé seul, mais l’avenir pour eux, qui périssait dans un tel désastre ; puissent en parler autrement que pour le déplorer et le maudire ?
… Car Dieu, c’est l’ennemi.
Puis, — cet homme une fois instruit, forgé, fourbi, astiqué comme une arme, un revolver à dix mille coups, à autant de coups qu’il y a occasions de tirer sur l’ennemi dans la vie, et mis face à face avec toutes les difficultés, tous les obstacles, tous les problèmes, tous les sentiments, toutes les passions, toutes les résistances d’une société comme la nôtre, qui n’est pas plus athée résolument qu’elle n’est chrétienne, qui trempe par un bout dans l’athéisme, par l’autre bout dans un christianisme ramolli, — engager la lutte, une lutte hardie, à pleins bras, à plein corps, entre cet homme, trempé dans le feu et la glace de l’enfer, et cette société, écrasante de son poids seul, qui lui oppose la masse de ses préjugés, de son hypocrisie, de son ignavie, et même de sa moralité, s’il lui en reste encore.
En effet, quelque intéressantes ou curieuses que soient tant de questions, si diverses et si nombreuses, que soulève le Cid : — la question de savoir ce qu’il y a de commun entre le Rodrigue de la légende et celui de l’histoire, le chef de bandes et le brigand fieffé, le condottiere sanguinaire que nous ont fait connaître les chroniques arabes3 ; — la question de savoir comment Corneille a traité son original espagnol, ce qu’il en a littéralement traduit, ce qu’il y a corrigé, ce qu’il en a retranché, ce qu’il y a ajouté4 ; — la question encore de la Querelle du Cid, je veux dire celle de savoir les vraies raisons de la vivacité, de l’acrimonie même avec laquelle les rivaux ou les ennemis de Corneille, y compris le grand cardinal, ont attaqué son chef-d’œuvre5 ; — toutes ces questions, et bien d’autres encore, disparaissent pour nous, ou, si vous l’aimez mieux, se réduisent à une seule qui les résume, qui les enveloppe, qui les domine toutes, et cette question la voici : en 1636 ou en 1637, sous le règne de Louis XIII et de Richelieu, au lendemain des Sosies de Rotrou, par exemple, ou de la Didon de Scudéri, qu’est-ce que les contemporains ont vu dans le Cid 6, ou cru voir de neuf, d’original, et qu’ils n’eussent encore vu nulle part ? […] Qu’importent les rivaux, les ennemis, les envieux ? […] Ce farouche ennemi qu’on ne pouvait dompter, ………………………………………………… Soumis, apprivoisé, reconnaît un vainqueur, Aricie a trouvé le chemin de son cœur. […] Va, ce n’est pas à nous que les Dieux ont remis Le pouvoir de punir de si chers ennemis.
Dans l’ordre intellectuel et moral, êtes-vous ému de la même manière lorsqu’un homme riche et bon ouvre sa bourse à l’indigent, ou lorsqu’un homme magnanime donne l’hospitalité à son ennemi et le sauve au péril de sa propre vie ? […] L’affection même ne détermine pas l’admiration ; tandis qu’un trait héroïque, partant d’un ennemi même, nous l’arrache malgré nous. […] Il admire le dévouement de Régulus, parce qu’il ne voit pas quel intérêt a pu pousser ce grand homme à aller chercher loin de sa patrie, chez des ennemis cruels, une mort affreuse, quand il aurait pu vivre tranquille et même honoré au milieu de sa famille et de ses concitoyens. […] Désirant tous les mêmes choses, ils sont tous nécessairement ennemis ; et dans cette guerre, malheur aux faibles, aux faibles de corps et aux faibles d’esprit ! […] Rêvez donc la liberté pour des êtres qui ne sont pas libres, l’égalité entre des êtres essentiellement différents, le respect des droits où il n’y a pas de droit, et l’établissement de la justice sur un fond indestructible de passions ennemies !
Il a toujours ride cette impétuosité d’assurance « d’un siècle où l’on ne doute de rien, hors de l’existence de Dieu. » Même dans ses œuvres d’imagination il poursuit son ennemi. […] Il n’aime pas la démocratie parce qu’elle est naturellement ennemie de l’expansion au dehors et de la politique conquérante. […] En pareille affaire, ce n’est pas faire capituler l’ennemi que de le désarmer. […] Quand il rencontre face à face et armé en guerre l’esprit même du xviiie siècle, il court sur lui, comme à l’ennemi. […] Ses ennemis en profitent aisément.
Daudet ne s’est pas enquis de lire, écrivait ceci : « J’ai remarqué que la politique est ici la plus forte ennemie qu’ait la religion. […] Lui, à chaque effort de son ennemi, prend une furieuse et terrible revanche, et il y a alors chez Clarisse une satisfaction qu’elle ne peut nier, et un ennui profond qu’elle peut nier moins encore. […] Mais voici le plus terrible ennemi de l’Individualisme qui se dresse et lève sa tête altière. […] C’est mon ennemi ! Vous avez bien un ennemi, quelqu’un avec qui vous vous battez en duel depuis que vous vous sentez vivre ?
Maurice Barrès, alors rédacteur au Voltaire, préparait ses livrets et ses préoccupations n’étaient pas identiques aux nôtres ; le côté art pur de notre revue l’effarait un peu et nous nous étonnions de ses désirs multiples ; nous eûmes aussi des ennemis, je ne m’arrête pas à énumérer des chroniqueurs, c’est à peu près les mêmes que maintenant ; mais parmi les poètes, de ceux qu’on rencontrait chez Mallarmé, nous soulevâmes un adversaire, M. […] prudent, sage, calme ennemi, N’exagérant jamais la victoire à demi, Tuant tous les blessés, pillant tout le butin. […] Les nerfs de la femme s’exaltent ; elle accepte les emblèmes, enlève ses gens de son élan et culbute l’ennemi ; et dès lors elle entre dans la joie d’orgueil et de puissance ; elle s’assimile, par la domination de son esprit plus complet, le chapelain du château ; ses prêches, c’est elle qui, de sa place, par son regard, les lui dicte ; elle domine les gens de guerre par l’or qu’elle leur abandonne et les objets et les détails qu’elle leur fait aimer ; pour sa joie profonde elle entreprendra la science de l’avenir. […] Voyez Baudelaire ; ses premières admirations positives vont à Gautier ; son art est l’ennemi de la conception Hugolâtre ; autant son devancier s’épand, verbalise, entasse le vocable sur le terme, et le nom propre sur le mot rare, autant Baudelaire est froid, retenu ; autant son devancier joue de tous les tams-tams politiques et anecdotiques, autant il se les refuse sérieusement. […] Rainouart marche contre lui, tue ses frères, son père Desramé, qu’on va chercher à table, pour lui dire qu’un ennemi terrible couche son armée par terre.
Ce petit livre achève ce cycle, à l’égal d’une œuvre antique, dans l’harmonie et dans la sérénité ; car il ne remet en scène que les héros indiscutables de cette grande épopée, ceux dont aucune fatalité tragique n’a fait des proscripteurs et des frères ennemis. […] D’où vient pourtant cette rencontre, ce voisinage avec la terrible ennemie des corps et des âmes, la faim farouche, l’impérieuse faim, comme disaient les Anciens ? […] Mais ce qui demeurera toujours, au grand honneur du poète et du patriote, c’est cette revendication de la justice et de la liberté qui n’a pas été seulement courageuse et opportune, mais qui est de tous les lieux et de tous les temps, qui éveillera toujours un écho dans les âmes généreuses et ennemies de l’oppression, qu’elle soit exercée par un despotisme ou par une démagogie plus tyrannique peut-être. […] Vaine satisfaction accordée par un gouvernement plus libéral d’ordinaire à ses implacables ennemis ! […] Marnix de Sainte-Aldegonde, histoire de la République des Provinces unies, apprenait aux républicains trop facilement abusés le secret d’échapper aux pièges de leurs ennemis.
Plus tard, on continua à attaquer Chateaubriand, mais ses ennemis littéraires furent presque toujours des adversaires politiques. […] L’érudition aura toujours pour ennemis les faiseurs d’hypothèses, les pontifes et les philosophes, ceux qui méprisent les faits et voudraient surtout enseigner l’histoire par les idées générales. […] Ugo Arlotta voulut un jour connaître les raisons de cette opinion. « Je vais, lui dit l’écrivain russe, me faire des ennemis de tous les Italiens ; mais je dois vous dire exactement ce que je sens et ce que je pense. […] Nous comprenons que les « faux dévots » et peut-être aussi quelques dévots sincères se soient scandalisés, et que les ennemis de Molière aient exploité et traduit cette indignation96. » C’est ce moule-cliché, ce sont ces procédés artificiels du sermon, avec ses divisions et subdivisions arbitraires, qui continuent à maintenir l’éloquence de la chaire dans un état d’incroyable décadence. […] Pendant que l’un des esprits disait cela, l’autre pleurait tellement, que, de pitié, je perdis connaissance, comme si je mourais, et je tombai comme tombe un corps mort. » Le principe de la littéralité a des ennemis.
» Enfin la lecture s’acheva, et Porel me demanda un petit changement au tableau de la Boule-Noire, voyant un bal de ce genre, non pris de face, mais de côté et par un coin de la salle, me demanda encore, — c’était plus grave, — la suppression du septième tableau, disant : « Je vous jouerai, et je vous jouerai avec ce tableau, si vous l’exigez », mais, pour moi, il compromet la pièce… car, il faut vous attendre, que pour cette pièce, dans les conditions où vous l’avez faite, vous allez avoir tous vos ennemis prêts à vous agripper… eh bien, il faut leur donner le moins possible de prise sur vous. » L’observation de Porel sur le bal de la Boule-Noire est parfaitement juste, et rend le tableau plus distingué. […] Rosny, après avoir aujourd’hui vanté la solidité de sa santé et déploré le manque d’une maladie, en général attestatrice du talent, chez un écrivain, confesse cependant qu’il est un angoisseux, que son esprit se forge des ennemis qu’il n’a pas, et qu’en tisonnant au coin du feu, dans la flambée de sa cheminée, parfois il voit, comme des êtres chimériques, lui voulant du mal.
» Mardi 24 février Ce matin, à propos du patriotisme de Renan, je reçois une carte postale signée : « Un patriote français vainqueur à Coulmiers (9 novembre 1870) » me disant : « L’article du 15 septembre 1870 de la Revue des Deux Mondes, signé Renan, connu plus tôt, eût, peut-être empêché son élection à l’Académie française, car cet article antifrançais, n’était pas fait pour encourager les soldats de l’armée de la Loire, qui, comme moi l’ont lu à Orléans, avant de marcher à l’ennemi. » Mercredi 25 février À midi, enfin arrive une dépêche de la comtesse Greffulhe, qui m’annonce d’une manière positive, que l’Impératrice de Prusse ne viendra pas décidément chez moi, ce qui me comble de joie, vu que dans l’état des esprits et le mouvement d’éreintement de ma personne, cette visite aurait fait demander ma tête. […] Et voici ses paroles textuelles : « Je sors, avec deux collègues, d’examiner les comptes de l’isthme de Panama… écoutez… quatorze cents millions ont été dépensés… eh bien, quatre cents millions ont été dépensés dans l’isthme… il y a un milliard qu’on ne retrouve pas… il est impossible qu’on ne poursuive pas Lesseps. » Puis causant des clubs d’une manière générale, Marin me disait, que pour y entrer tout de go, il fallait s’y présenter très jeune, parce qu’un homme, qui jouit à Paris d’une certaine notoriété, s’est fait nombre d’ennemis à quarante ans, et est presque assuré de plus de boules noires qu’il n’en faut pour être refusé.
Dom Martin, homme très-savant, bon écrivain, mais caustique, s’étoit fait des ennemis par ses sorties violentes contre les Jansénistes & par la liberté qu’il prenoit de critiquer les meilleurs auteurs. […] On trouve pourtant dans quelques endroits de ce livre, de la vivacité, de l’agrément, & cette liberté hardie qui lui a procuré tant de lecteurs & fait tant d’ennemis.
Mais le sommeil réparateur se fait attendre ; tourmentés par l’insomnie, nous ne pouvons faire taire notre pensée ; nous l’entendons alors, car elle a une voix, elle est accompagnée d’une parole intérieure, vive comme elle, et qui la suit dans ses évolutions ; non seulement nous l’entendons, mais nous l’écoutons, car elle est contraire à nos vœux, à notre décision, elle nous étonne, elle nous inquiète ; elle est imprévue et ennemie ; nous cherchons à la combattre, à la calmer, à la détourner, pour l’éteindre, sur des objets indifférents. […] Déjà en effet l’homme qui parle six heures chaque jour est, de l’aveu de tous, amis ou ennemis, un bavard ; accordons-lui huit heures de sommeil ; il reste dix heures par jour pendant lesquelles il médite en silence, réduit, non sans regret peut-être, à la parole intérieure.
C’est Ève qui attire la malédiction de Dieu sur la terre et qui part pour le voyage aride, au milieu de la nature ennemie. […] Dans cette attente universelle, il n’y avait plus d’amis ni d’ennemis, il n’y avait que des impatients. […] Croit-on qu’il y eût eu personne assez ennemi de sa jouissance pour ne pas se livrer entièrement, et sans arrière-pensée, au charme des beaux vers, si la source des beaux vers avait jailli ? […] N’est-ce pas là une bien touchante aumône de la part de ce chansonnier, que tant de plumes emportées nous représentent comme l’ennemi juré des prêtres et de l’Église ? […] Ces épigrammes qui semblaient si hardies, ces allusions si mordantes, ces railleries si cruelles, toute cette artillerie de vers belliqueux chargés à balle et tirés à bout portant sur l’ennemi d’alors, tout cela nous fait l’effet d’une petite guerre antédiluvienne.
Mais il faut envisager le mouvement flamingant comme le plus redoutable ennemi de la culture française, et, à ce titre, il préoccupe. […] D’une main il empoignait son ennemi à la gorge pour étouffer ses cris et de l’autre, il lui labourait les flancs, en se servant de son couteau comme d’une houe dans la terre du Polder et en criant : Harré ! […] Son propre frère, Castor, l’aime âprement ; Électre, son ennemie, convoite sa chair et l’implore. […] Même dans les moments les plus étranges, dans les malheurs les plus mystérieux et les plus imprévus, nous n’avons presque jamais à lutter contre un ennemi invisible ou totalement inconnu.
Je ne veux qu’une scene de Venceslas pour exemple de ces défauts de stile que réprouve la nature et dont Racine a corrigé le théatre, après avoir lui-même payé tribut au mauvais goût dans ses freres ennemis. […] Quoi l’ardeur de regner en sa place rend déja Xipharés ennemi de Pharnace ! […] Ce n’est là, si l’on veut, qu’un défaut de justesse grammaticale ; mais toûjours en est-ce un ; et d’ailleurs il me semble qu’Arbate ne devroit pas faire tomber sur Xipharés le reproche d’être déja ennemi de son frere, par l’impatience de regner à la place de Mithridate. […] Au cinquiéme acte de Phoedre, Hyppolite exilé par son pere, veut engager Aricie à fuir avec lui ; et sur ce que sa vertu s’en allarme, il lui dit : fuyez vos ennemis ; et suivez un époux.
Rationalisme et sensibilité ont régné parallèlement vers la fin de cet âge, se reconnaissant bien pour frères, en ce qu’ils dérivaient de la même source qui n’est autre qu’orgueil personnel et grande estime de soi, mais frères ennemis, qui se défiaient fort l’un de l’autre en s’apercevant qu’ils menaient aux conclusions, aux règles de conduite, aux morales les plus différentes ; et aussi, dans les esprits communs et peu capables de discernement, dans la foule, frères ennemis vivant côte à côte, prenant tour à tour la parole, mêlant leurs voix en des phrases obscures autant que solennelles ; dieux invoqués en même temps d’une même foi indiscrète et d’un même enthousiasme confus. […] Un instinct nous dit que la vérité est l’ennemie redoutable de nos passions, et que si nous lui laissions un instant prendre l’empire, d’un seul coup nous serions des êtres si absolument raisonnables et sages que nous péririons d’ennui. […] La raison est donc comme une sorte d’ennemie intime que l’homme porte en soi, et qu’il a le besoin incessant de réprimer. […] Les chrétiens, flattés d’être annoncés par la bouche même de leurs ennemis, ont supposé que les oracles étaient inspirés par les démons, c’est-à-dire par les anges déchus, à qui Dieu a permis de dire quelquefois la vérité. […] On le montre ennemi du préjugé nobiliaire, très touché de l’inégalité des conditions sociales, etc.
Abel Rémusat, homme d’ailleurs d’infiniment d’esprit, de plus d’esprit peut-être encore que de savoir, était un adversaire politique des plus prononcés, un partisan du pouvoir absolu tel qu’il existe en Asie et dans l’Empire du Milieu, un ennemi ironique et amer de la liberté.
Ce passage sur Voltaire a piqué au vif les ennemis ordinaires du grand homme, et a provoqué M.
La belle Cordière eut des ennemis et des brocardeurs jusqu’au sein de son triomphe ; qui en peut douter ?
Désaugiers, si plein de traits, n’a pas fait une épigramme en sa vie ; il n’a pas blessé un ennemi, il n’en a pas eu.
L’une a dit à sa sœur : — Ma sœur… (Ma sœur, en un tel lieu croissent l’orge et le millet…) L’autour et l’oiseleur, ennemis de nos jours, De ce réduit peut-être ignorent les détours ; Viens… (Je te choisirai moi-même les graines que tu aimes, et mon bec s’entrelacera dans le tien.)
Du reste, pourvu que les formes en soient nobles et pures, il importe peu que ce soit Apollon ou Hercule, la Diane chasseresse ou la Vénus de Praxitèle. » « Voyageur, annonce à Sparte que nous sommes morts ici pour obéir à ses saints commandements. » « Ils moururent irréprochables dans la guerre comme dans l’amitié79. » « Ici reposent les cendres de don Juan Diaz Porlier, général des armées espagnoles, qui a été heureux dans ce qu’il a entrepris contre les ennemis de son pays, mais qui est mort victime des dissensions civiles. » Peut-être, après tout, ces nobles épitaphes de héros ne lui revinrent-elles à l’esprit que le mardi, dans l’intervalle des Ordonnances à l’insurrection, et comme un écho naturel des héroïques battements de son cœur.
Tandis qu’on se flattait de la sorte tout en cheminant, le dernier sommet, qu’on n’attendait pourtant pas de sitôt, a surgi au détour d’un sentier ; l’ennemi l’occupait en armes, il fallut l’escalader, ce qu’on fit au pas de course et avant toute réflexion.
Le père de Chateaubriand est aussi un de ces mécontents, « frondeur politique et grand ennemi de la cour ».
Nous vous le demandons, sire, avec tous vos autres sujets, qui sont aussi las que nous… Nous vous demanderions encore bien d’autres choses, mais vous ne pouvez pas tout faire à la fois. » — Les impôts et les privilèges, voilà, dans les cahiers vraiment populaires, les deux ennemis contre lesquels les plaintes ne tarissent pas728. « Nous sommes écrasés par les demandes de subsides…, nos impositions sont au-delà de nos forces… Nous ne nous sentons pas la force d’en supporter davantage…, nous périssons terrassés par les sacrifices qu’on exige de nous… Le travail est assujetti à un taux et la vie oisive en est exempte… Le plus désastreux des abus est la féodalité, et les maux qu’elle cause surpassent de beaucoup la foudre et la grêle… Impossible de subsister, si l’on continue à enlever les trois quarts des moissons par champart, terrage, etc.
On y entendait le pas cadencé de milliers d’hommes marchant ensemble à la défense des frontières sur le sol retentissant de la patrie, la voix plaintive des femmes, les vagissements des enfants, les hennissements des chevaux, le sifflement des flammes de l’incendie dévorant les palais et les chaumières ; puis les coups sourds de la vengeance frappant et refrappant avec la hache, et immolant les ennemis du peuple et les profanateurs du sol.
des ennemis implacables dont on n’a rien à espérer !
XIII Hugo, qu’il faut toujours nommer le premier dans ces nomenclatures des belles imaginations, nous dit qu’il est par la moitié de son sang Franc-Comtois ; Rouget de Lisle, qui eut le rare bonheur d’être un jour le chant héroïque de la patrie menacée, le tocsin des cœurs, le sursum corda des baïonnettes, était Franc-Comtois ; Charles Nodier, le plus aimable des hommes, le plus fantaisiste des poètes, le plus Romain et le plus Français à la fois des ennemis de la terreur démagogique et de la tyrannie soldatesque, était Franc-Comtois ; Fourier, Considérant, Proudhon, tous ces esprits spéculatifs qui écrivent leur poésie en chiffres et qui jettent leur imagination par-dessus l’ordre social, aimant mieux inventer l’impossible que de ne rien inventer du tout, sont Francs-Comtois.
Qu’on rabaisse son talent poétique tant qu’on voudra, il n’y attache pas lui-même plus de prix qu’il n’en mérite ; mais si on veut bien lui accorder au moins le bon sens le plus vulgaire et le plus usuel, comment supposera-t-on que si la haine qu’on lui impute était dans son cœur, que s’il avait prétendu exhaler ses propres sentiments en écrivant les imprécations d’Harold, il eût au même moment demandé à être renvoyé dans ce pays qu’il abhorrait, et qu’enfin il fût venu se jeter seul au milieu des ennemis de tout genre que la manifestation de ces sentiments aurait dû lui faire ?
ma tante, de quoi me servait-il d’avoir découvert où il était et de lui avoir envoyé, du haut d’une tour, une voix de famille de notre montagne, si je n’avais aucun moyen de l’approcher, de le consoler, de le justifier, de le sauver des sbires ses ennemis, sans doute acharnés à sa mort ?
Alors le déluge éclate, et… Quand le plus haut des pics eut bavé son écume, Thogorma, fils d’Élam, d’épouvante blêmi, Vit Kaïn le vengeur, l’immortel ennemi D’Iavèh, qui marchait, sinistre, dans la brume, Vers l’arche monstrueuse apparue à demi.
Goethe cependant l’avait précédé de bien des années ; mais Goethe, dans une vie plus calme, se fit une religion de l’art, et l’auteur de Werther et de Faust, devenu un demi-dieu pour l’Allemagne, honoré des faveurs des princes, visité par les philosophes, encensé par les poètes, par les musiciens, par les peintres, par tout le monde, disparut pour laisser voir un grand artiste qui paraissait heureux, et qui, dans toute la plénitude de sa vie, au lieu de reproduire la pensée de son siècle, s’amusait à chercher curieusement l’inspiration des âges écoulés ; tandis que Byron, aux prises avec les ardentes passions de son cœur et les doutes effrayants de son esprit, en butte à la morale pédante de l’aristocratie et du protestantisme de son pays, blessé dans ses affections les plus intimes, exilé de son île, parce que son île antilibérale, antiphilosophique, antipoétique, ne pouvait ni l’estimer comme homme, ni le comprendre comme poète, menant sa vie errante de grève en grève, cherchant le souvenir des ruines, voulant vivre de lumière, et se rejetant dans la nature, comme autrefois Rousseau, fut franchement philosophe toute sa vie, ennemi des prêtres, censeur des aristocrates, admirateur de Voltaire et de Napoléon, toujours actif, toujours en tête de son siècle, mais toujours malheureux, agité comme d’une tempête perpétuelle ; en sorte qu’en lui l’homme et le poète se confondent, que sa vie intime répond à ses ouvrages ; ce qui fait de lui le type de la poésie de notre âge. » Ainsi ce que madame de Staël, qui n’avait devant les yeux que Goethe, déplorait comme étant une maladie et n’étant qu’une maladie, nous, en contemplant Byron, chez qui cette maladie est au comble, nous ne le déplorions pas moins, mais nous le regardions comme un mal nécessaire, produit d’une époque de crise et de renouvellement.
La passion même excite la sagacité et, pendant que les admirateurs s’exagèrent les beaux côtés, les ennemis voient les défauts d’un œil d’autant plus sûr qu’il est plus intéressé.
Ennemie dangereuse de la poésie dont elle attaque l’heureuse ignorance, d’où naissent les fables merveilleuses, la science est pour elle une alliée plus dangereuse encore, quand elle s’offre traîtreusement à elle comme matière à mettre en vers.
Dowdeswell, un grand nombre de faits pour Montrer que le titre de « Prophète de Richard Wagner », employé depuis des années par les ennemis et les amis, pour désigner Ferdinand Praeger, était bien mérité par lui.
Ennemi de Berlioz, Verdi et Wagner, il aimait s’attaquer à la musique de l’avenir.
Le tacticien, à la bataille, sait aussi la résultante que suivra l’armée ennemie s’il la bat sur tels et tels points : c’est un problème de mécanique, mais c’est aussi, en même temps, un problème de psychologie et un calcul de volontés.
L’apparition de Roland parmi les oncles ennemis du roi de Galice, Philippe II songeant en son palais au-dessus du jardin où l’infante effeuille une rose, l’aigle héraldique d’Autriche contredit par l’aigle helvétique, dans le Romancero du Cid, le vieux héros fidèle au roi qu’il censure, entrechoquent deux spectacles ou deux humeurs.
Il fallait que ce qui était acquis fût acquis, le fût à toujours ; et ils eussent dit volontiers, en parodiant un mot de Bossuet, que toute vérité, du moment et par cela seul qu’elle était sortie du cabinet ou du laboratoire du savant, « avait d’abord toute sa perfection. » Si cette conception de la science, — infiniment plus étroite et plus ennemie du progrès que celle qu’aucune Église s’est jamais formée de son dogme, — n’est pas encore tout à fait abolie, mais le sera bientôt sans doute, quand nous aurons cessé de subir l’influence des Renan et des Littré, personne assurément n’y aura plus contribué qu’Auguste Comte ; et ce n’est pas le moindre titre du positivisme, — il faut le dire et le redire, — que d’avoir opéré cette révolution.
Toute opinion qui les gêne est traitée en ennemie.
On ne peut guère davantage lui contester une certaine manière, sinon de raisonner, du moins d’associer ses impressions, quand on voit les animaux chasseurs subordonner les impulsions de l’instinct aux nécessités de la chasse, et exécuter des combinaisons de mouvements, des artifices de stratégie qui ne sont pas sans analogie avec les ruses du sauvage et même du civilisé dans la poursuite du gibier ou de l’ennemi, quand on observe les animaux même d’un ordre inférieur, tels que la fourmi et l’araignée, modifier à chaque instant leur itinéraire ou leur plan de conduite, selon les convenances du moment ou les obstacles qui se dressent tout à coup devant eux.