Il était assez difficile, en pareille affaire, d’éviter les tableaux lascifs. […] Revenu à Paris, il était devenu un familier du Luxembourg, du Louvre et des marchands de tableaux. […] Il excellait, restant toujours courtois et élégant, à envelopper une épigramme dans un compliment : « On envie ceux qui virent le premier tableau de M. […] Son tableau est un ouvrage de patience ; ce n’est pas une œuvre d’art. […] « Ce Salon de 1876, comme les précédents, se montre à nous comme une collection de tableaux de genre.
Un noble tableau du premier empire, une brillante image de la société sous la Restauration, un généreux et chaleureux hommage à l’empire actuel et à l’empereur, à la croisade italienne, grosse d’avenir, ont rehaussé le sujet et mis en jeu des sympathies diverses qui se sont confondues à la fin dans un seul et même applaudissement.
Le tableau qu’il trace de l’émigration se recommande aussi par des vues sages et modérées.
. — Le Capitaine Fracasse, comédie héroïque, tirée du roman de Théophile Gautier, cinq actes et sept tableaux (1896). — Le Cruel Vatenguerre (1898). — Plus que reine (1899). — Théâtre (1900).
[Tableau historique de l’état et des progrès de la littérature française depuis 1789 (édit. de 1834).]
Il trouve, dans sa profondeur, de la variété… Ces poésies qui expriment des états d’âme effroyablement exceptionnels, ne sont pas le collier vulgairement enfilé de la plupart des recueils de poésies, et elles forment dans l’enchaînement de leurs tableaux comme une construction réfléchie et presque grandiose.
On lui reproche d’avoir souvent mis dans les siennes des allusions déplacées, d’avoir fait plus de portraits que de tableaux.
Quoi qu’il en soit, le tableau que Farcy a tracé de souvenir est un chef-d’œuvre de délicatesse, d’attendrissement gracieux, de naturel choisi, d’art simple et vraiment attique : Platon ou Bernardin de Saint-Pierre n’auraient pas conté autrement. […] Et sans le vouloir, et en se laissant aller à son cœur et à sa pensée, qui achevaient le tableau commencé devant ses yeux, sur le visage de Ghérard, au lieu de sa main, elle posa ses lèvres. […] Sa poésie par là est étroite, chétive, étouffée : on n’y voit pas un miroir large et pur de la nature dans sa grandeur, la force et la plénitude de sa vie : ses tableaux manquent d’air et de lointains fuyants.
V Je suis sûr que vous avez rencontré souvent, soit à Paris sur vos boulevards ou dans vos théâtres, soit parmi la foule dans vos expositions de tableaux et de sculptures, soit en Italie aux pieds du Colisée ou de Saint-Pierre de Rome, soit à Londres dans les salles du musée Britannique, soit en Grèce sur les marches du temple de Thésée, ou sur les sentiers pierreux de l’Acropole, un jeune homme dont vous n’avez jamais su le nom, mais dont la physionomie, semblable à une pensée ambulante, vous a frappé à votre insu d’une sorte d’empreinte indélébile, et vous le reconnaîtriez entre mille si vous veniez à le rencontrer une seconde fois. […] Du dernier livre de poésie, ou de philosophie, ou d’histoire qui vient de paraître ; du dernier tableau qui vient de déceler un pinceau puissant, une touche neuve à l’exposition ; du dernier marbre qui palpite encore du coup de ciseau, ou qui sent encore la caresse de la main de son sculpteur, dans la galerie ou dans le jardin statuaire des Champs-Élysées. […] XXXVIII Mais est-il possible, cependant, qu’un jeune poète à l’âme ardente et expansive, tel que celui dont nous parlons, ait passé toute sa jeunesse dans un manoir du Jura sans autre passion que ses dessins, ses manuscrits, ses poussières de marbres antiques, ses voyages d’antiquaire, le compas à la main, avec ses contemplations de tableaux ou de statues ?
La vapeur contrainte pour la première fois à mouvoir des bateaux et des voitures ; la conquête de l’air entreprise par d’audacieux aérostats ; la foudre obligée de dire son secret et de suivre la route qu’on lui trace ; le magnétisme dévoilant quelques-uns de ses mystères, qui font l’étonnement de la foule et la fortune des charlatans : voilà, non le tableau complet, mais une esquisse rapide des fruits que fait naître une observation plus attentive du monde extérieur. […] L’âge d’or, tel que l’imaginaient les anciens, avec ses ruisseaux de lait, son printemps perpétuel, ses arbres d’où coulait le miel, ses hommes innocents parmi lesquels erraient des lions, des ours, des tigres aussi innocents qu’eux, cette idylle aimable et douceâtre a pu prêter à de jolis tableaux. Mais, sans compter que les vivants ne sauraient être condamnés à copier et recopier sans cesse les tableaux de leurs devanciers, est-il bien sûr que ce roman de l’humanité commençante vaille la réalité, telle que la préhistoire la démêle peu à peu dans l’obscurité d’un passé aux trois quarts effacé ?
D’un acte à l’autre, un an s’est passé ; la toile se relève sur la maison de maître Guérin, un tableau digne des Scènes de la Vie de province, de Balzac. […] Il la défie, en persiflant, de venir visiter, seule, sa galerie de tableaux, qui est célèbre dans le monde des arts ; madame Galeotti relève la gageure ; et, d’avance, nous parions aussi qu’elle en sortira saine et sauve. […] Une veuve de vingt-cinq ans ne fait pas même une fausse démarche, en visitant, au grand jour, une galerie de tableaux à demi publique.
De pareils redoublements de phrases renflent les chapitres sur le palais muet, obscur et splendide que traverse à pas hésitants Gwynplaine promu Lord Clancharlie ; il en est ainsi dans les Misérables, à ce tableau de l’éclosion printanière dans le jardin inculte, où se déroulent les amours de Cosette et de Marius ; et les vers du poète sont aussi riches que sa prose en ces tentatives redondantes, ces perpétuels retours du burin à graver et regraver le même trait en de diverses et fantasques lignes. […] De là, la tendance marquée aux digressions, les dix phrases formant tableau éparses en dix pages, comme en ce merveilleux portrait de la duchesse Josiane nue sur son lit d’argent, dont les membres se profilent écartelés sur tout un énorme chapitre. […] Que l’on rapproche de ces grands nocturnes, la descente de Gilliatt dans la caverne sous-marine dont la mer a fait un écrin et un antre, cette voûte, aux lobes presque cérébraux, éclairée d’une lumière d’émeraude, tapissée d’herbes déliées, mouvantes et molles, où roulent des coquillages roses, que frôle le gonflement des vagues, venant polir un noir piédestal où s’évoque « quelque nudité céleste, éternellement pensive, un ruissellement de lumière chaste sur des épaules à peine entrevues, un front baigné d’aube, un ovale de visage olympien, des rondeurs de seins mystérieux, des bras pudiques, une chevelure dénouée dans de l’aurore, des hanches ineffables modelées en pâleur » ; la description des halliers sombres, ces « lieux scélérats » d’où les chouans fusillaient les bleus », et dans l’Homme qui rit, ce merveilleux tableau de la baie de Portland par un crépuscule d’hiver, où les côtes blafardes se profilent en contours linéaires, puis encore l’enterrement de Hardquannone, emporté silencieusement à la brune, le glas toquant à coups espacés et discords, et cette molle nuit grise où Gwynplaine, dans l’amertume de son cœur, suit les quais gluants de la Tamise, portant le sourd désir de se suicider ; M.
Les Voltaire ou les Diderot tenaient essentiellement à ce que leur « tableau de la nature », avant même d’être exact, fût la contradiction réputée « scientifique » des enseignemens de la religion. […] La conception de la vie n’est plus pour nos physiologistes ce qu’elle pouvait être pour Cabanis ou pour Bichat ; le tableau de la nature n’est plus pour nous ce qu’il était pour les contemporains de l’auteur du Cosmos. […] Dans un tableau d’Hogarth, qui fait partie de la série de son Mariage à la mode, et qui représente un laboratoire ou un capharnaüm d’apothicaire, on voit un appareil d’une complication singulière et presque menaçante ; on s’approche pour l’étudier ; et on s’aperçoit, ou du moins on croit s’apercevoir, car il ne faut répondre ici de rien, que cet appareil si savant, dont on ne peut s’empêcher d’admirer l’inventeur, n’a d’autre usage que de servir à déboucher les bouteilles.
Miomandre demeura donc à Paris, et entra comme vendeur de tableaux chez Bernheim. […] Le tableau ne m’était pas destiné, mais comme je commets toutes les fautes de circulation, m’écrivait Max Jacob, je préfère vous envoyer mes vers par un brave abbé. […] Un style, de la poésie, et ce décor, et cette atroce ironie du dernier tableau où Judith implore Holopherne dont elle a tranché la tête qui pourrit sur le gibet, il n’en faut pas plus pour être incompris. […] Et il est arrivé naturellement à donner un tableau de la solitude au théâtre du Gymnase, où l’on ne s’attendait guère à le voir apparaître. […] Comédie dramatique en 3 actes et 5 tableaux, présentée au Théâtre du Gymnase le 12 octobre 1922.
Chaucer, père de sa poésie, était un réaliste, et ses Contes de Cantorbéry des tableaux d’après nature. […] Tandis que les romanciers de son époque peignaient des tableaux de sujets historiques à la Walter Scott, Fernan prenait note des mœurs des gens qui respiraient autour d’elle. […] Parfois, dans ses bosquets andalous, brillent ces soleils du Midi, que Fortuny mit dans ses tableaux. […] Le talent d’Alarcon gagne à se limiter à de petits tableaux ; son ciseau travaille mieux des camées exquis, des agates précieuses que des marbres de grandes dimensions. […] D’abord, les idéalistes, ici, ne se promènent pas autant dans les nuages qu’en France, ni les réalistes ne chargent autant le tableau.
Trente vers lui suffisent pour composer un tableau complet. […] Multipliez les strophes, et loin d’ajouter à la vivacité, à l’énergie du tableau, vous l’appauvrirez. […] Enfin, pour compléter le tableau, le mari se gausse des railleries qu’on ne lui épargne pas. […] Cette affreuse résolution, trop fidèlement exécutée, est un trait indispensable dans le tableau de la défense de Saint-Domingue. […] Jamais l’imagination la plus riche, l’esprit le plus exercé n’ont réussi à composer un tel tableau.
. — Ses tableaux d’intérieur. — Sa moquerie aimable. — Ses intentions morales. — Sa place dans la civilisation moderne. — Développement du roman en Angleterre. — Réalisme et honnêteté. — En quoi ce genre est bourgeois et anglais. […] Tout au plus, çà et là, une déchirure nous laisse soupçonner les beautés cachées derrière les monotones enveloppes ; mais ces enveloppes, le poëte les lève toutes et voit un tableau là où nous ne découvrions qu’un surtout. […] Voilà le monde tout moderne et réel, illuminé par le lointain soleil couchant de la chevalerie, que Walter Scott a découvert, comme un peintre qui, au sortir des grands tableaux d’apparat, aperçoit un intérêt et une beauté dans les maisons bourgeoises de quelque bicoque provinciale, ou dans une ferme encadrée par ses carrés de betteraves et de navets. Une malice continue égaye ces tableaux d’intérieur et de genre, si locaux et minutieux, et qui, comme ceux des Flamands, indiquent l’avénement d’une bourgeoisie. […] Singulière œuvre, qui dans toute l’histoire n’a point sa pareille, parce que dans toute l’histoire il n’y a pas eu de société pareille, et qui, médiocre pour les amateurs du beau, admirable pour les amateurs de l’utile, offre, dans l’innombrable variété de ses peintures et dans la fixité invariable de son esprit, le tableau de la seule démocratie qui sache se contenir, se gouverner et se réformer.
Bordeaux a même mis assez d’art à ne pas ralentir le mouvement de la course, à ne jamais l’immobiliser en tableaux plastiques à la façon du Châtelet. […] Ses livres naquirent en enfants frais et riches de pulpe comme le peuple des tableaux de Rubens. […] C’est ensuite que Claës est vu du dehors et non du dedans, que l’intérêt du drame consiste en ce dehors : cette obscurité du centre, dans le tableau, fait un effet aussi puissant que la lumière du centre dans un tableau de Rembrandt ou dans La Nuit du Corrège. […] Dans le charmant pays de joie et de sourire qu’est la Touraine, de jeunes époux réalisent une figure de bonheur aussi agréable à regarder qu’un beau tableau ou un joli paysage. […] Léon Daudet, qui dîna chez lui, nous fait de ses repas un tableau affreux (et je sais bien que la baronne Staffe n’approuverait pas M.
Sous prétexte de ne faire aucun cas de ses nobles aïeux et de les subordonner tous dans leur ordre de noblesse à ce qui est de l’ordre de l’esprit, il les a montrés et déroulés en une longue lignée, mais pour les replonger aussitôt dans la nuit, et il s’est représenté, lui, le dernier, comme le seul glorieux, le seul vraiment ancêtre et dont on se souviendra ; car seul il a gravé son nom sur le pur tableau des livres de l’esprit. […] Mais aussi que de beaux tableaux ! […] Il promet à Éva de lui lire ses propres poèmes, assis tous deux au seuil de la maison roulante : Tous les tableaux humains qu’un Esprit pur m’apporte S’animeront pour toi quand, devant notre porte, Les grands pays muets longuement s’étendront. […] C’est une composition, un tableau admirable.
Laissez-moi recomposer la scène et le tableau. […] La villa, immense et paisible, composée de vastes salles tapissées de vieux tableaux, et de quelques chambres hautes sous les toits, ouvrant sur les cours de marbre de l’édifice, ou sur les longues avenues de myrtes et de lauriers taillés en murailles, était généralement silencieuse comme un cloître. […] Boccace aurait fait une description de cette lecture au bout d’un jardin ; Boucher en aurait fait un tableau : mais ni Boccace ni Boucher n’auraient pu en égaler le charme, à moins que la comtesse Léna et sa jeune image, répercutée en ébauche dans le visage de sa fille Thérésina, n’eussent posé devant eux, comme elles posaient en ce moment devant nous. […] « Ne faites pas plus d’attention qu’il ne faut à tous ces héros et à toutes ces héroïnes secondaires du poème, nous dit le professeur au déjeuner ; tout cela n’est que le cadre plus ou moins bien ciselé des tableaux de la galerie infinie de mon poète : mais attachons-nous seulement à cinq ou six médaillons qui priment tout le reste.
* * * — Été à la foire aux pains d’épices, barrière du Trône, où j’ai vu dans un tableau vivant, représentant la superbe Descente de croix d’après la toile de Rubens, j’ai vu à la fin le Christ se levant de son linceul pour venir saluer le public. […] Partout l’intrigue d’un tableau au lieu et place de sa composition. […] D’autre part, l’idéal anecdotier et de l’histoire en vaudeville, dont la trouvaille sublime est de composer un tableau, à l’instar de Molière lisant Le Misanthrope chez Ninon de Lenclos. […] Rien que des gens adroits, des malins volant le succès par le chemin de traverse de Paul Delaroche, par le drame, la comédie, l’apologue, par tout ce qui n’est pas de la peinture, — en sorte que sur cette pente, je ne serais pas étonné que le tableau à succès d’un de nos futurs Salons représentât, sur une bande de ciel, un mur mal peint, où une affiche contiendrait quelque chose d’écrit, excessivement spirituel.
Mardi 18 janvier Ce matin, Bourde du Temps, vient causer avec moi, pour faire un article sur ma pièce future de Germinie Lacerteux, sur sa construction par tableaux shakespeariens, sur mes idées relatives à l’acte, — l’acte qui claquemure, pour moi, le théâtre dans les vieilles formes, et l’empêche de se rapprocher du livre. […] Mercredi 19 janvier Avoir en portefeuille La Patrie en danger, cette pièce, la première pièce vraiment documentée historiquement sur la Révolution, cette pièce dont le premier acte est une mise en scène si révélatrice du dix-huitième siècle, cette pièce dont le cinquième acte, par le tragique de la vie des prisons d’alors, est plus dramatique que les tableaux les plus dramatiques de Shakespeare, — et l’avoir en portefeuille cette pièce, au su de tous les directeurs, en quête d’une pièce pour l’anniversaire de 1789, sans qu’aucun songe à vous la demander, c’est vraiment pas de chance ! […] Geffroy m’amène Raffaëlli, qui a demandé à voir mes dessins, et l’on cause critique d’art, quand soudain Raffaëlli s’écrie : « Par exemple, en fait de jugement d’une peinture, ce que vous avez dit à Geffroy à propos de mon exposition de la rue de Sèze, de l’année dernière, ça m’a renversé, bouleversé, fait croire que vous étiez un vrai voyant en tableaux. » Voici l’histoire : L’année dernière à un dîner chez les Daudet, qui fut un peu une chamaillade avec Zola, depuis le commencement jusqu’à la fin, la bataille avait commencé à propos d’une discussion sur Raffaëlli, que je louais, et j’ajoutais devant Geffroy qui se trouvait là : « Il y a chez Raffaëlli, dans ces dernières années, une blondeur, un attendrissement tout particulier, il a dû se passer quelque chose dans sa vie. […] Porel qui a dîné, ce soir, chez Daudet, me prend dans un coin, et me sollicite de faire le scénario de Germinie Lacerteux, mais ce n’est plus le directeur révolutionnaire de l’automne dernier, voulant utiliser pour Germinie, la rapide machination anglaise, en faire une pièce de huit ou dix tableaux, sans entractes, coupée seulement au milieu par une demie-heure de repos, ainsi que dans les concerts ou dans les représentations du Cirque.
« En sorte », dit-il, « que je fus le sixième parmi ces grands esprits. » Puis la confusion de l’imagination du poète jette la confusion dans ses tableaux. […] Le tableau est étroit, la peinture est sobre de couleurs, et l’impression est éternelle. […] Mais déjà l’amour, qui donne le mouvement au soleil et aux étoiles, tournait mon désir et mon velle (ma volonté) comme une roue qui circule sous une impulsion universelle. » XXVI Et ainsi finit par ce dernier vers le triple poème, comme le rêve d’un théologien qui s’est endormi dans un cloître aux fumées de l’encens et aux chants du chœur, et à qui son imagination représente en songe les images incohérentes des tableaux de sacristie qu’il regardait sur les murailles en s’endormant. […] Un mot est un bloc taillé en statue, d’un seul geste, par ce sculpteur de paroles ; un coup de pinceau est un tableau vivant, où rien ne manque, parce que l’image frappe, vit et remue sur la toile de ce coloriste d’idées ; chaque pensée tombe proverbe de chaque vers en sortant de cet esprit ou de ce cœur dont le contrecoup, aussi puissant que le coup du balancier sur le métal, frappe en monnaie ou en médaille tout ce qui passe par sa pensée d’airain.
Le charmant poète Gray qui, dans sa solitude mélancolique de Cambridge, étudiait tant de choses avec originalité et avec goût, écrivait à un ami en 1760 : Froissart (quoique je n’y aie plongé que çà et là par endroits) est un de mes livres favoris : il me semble étrange que des gens qui achèteraient au poids de l’or une douzaine de portraits originaux de cette époque pour orner une galerie, ne jettent jamais les yeux sur tant de tableaux mouvants de la vie, des actions, des mœurs et des pensées de leurs ancêtres, peints sur place avec de simples mais fortes couleurs. […] Il est bien vrai qu’il réserve toutes ses sympathies et ses couleurs pour les hautes prouesses et les nobles entreprises d’armes, et ceux qui les font ; il est bien vrai que dans la répression de la Jacquerie, par exemple, et après le tableau des horreurs auxquelles elle s’est livrée, il se réjouit des représailles et de la vengeance qu’en tirent partout les seigneurs, et qu’il nous montre à plaisir les chevaliers qui, en fin de compte, ont raison par le glaive de tous « ces vilains, noirs et petits, et très mal armés ».
La reine n’avait pu lire sans être émue ce rapport, où l’on voyait le tableau circonstancié des misères humaines au sein de la capitale, ces hideux inconvénients des lits à deux, à quatre et à six malades. […] La mort de l’homme de bien sortirait de notre cadre et nous jetterait dans des tableaux lugubres qui demanderaient de l’étendue et d’énergiques pinceaux.
À celle nouvelle, il éprouva une impression soudaine et qu’il a rendue bien énergiquement ; tout son sang se glaça, en écoutant le gentilhomme qui lui faisait ce récit : « S’il m’eût donné, dit-il, deux coups de dague, je crois que je n’eusse point saigné ; car le cœur me serra et fit mal d’ouïr ces nouvelles ; et demeurai plus de trois nuits en cette peur, m’éveillant sur le songe de la perte. » Il se représentait la scène du conseil, sa promesse solennelle de la victoire, la conséquence incalculable dont une défaite eût été pour la France, et dans ce prompt tableau que son imagination frappée lui développa tout d’un coup, cet homme intrépide retrouva la peur à laquelle il était fermé par tout autre côté. […] C’est le tableau de ce mémorable fait d’armes et siège toscan, des plus beaux sous le point de vue militaire, héroïque et patriotique, qui se peint admirablement dans le récit de Montluc.
Épigramme veut dire inscription ; il y en avait de toutes sortes ; c’était le plus souvent un tableau en raccourci, quelquefois une courte idylle, une courte élégie. […] Dans une lettre à Mme de Bellocq, veuve de son ami, il a tracé un tableau assez riant de la vie tranquille, à la fois philosophique et chrétienne, qu’il menait durant les dernières années (1726-1737) : Ayant fait réflexion, disait-il, que j’étais dans un âge trop avancé pour me donner le soin d’économer (de régir) des biens de campagne, j’ai pris le parti de mettre ma terre en ferme et de me retirer entièrement à la ville.
. — Mme de Sévigné nous a montré également la marquise de Villars dans sa vieillesse, et jouissant discrètement de la renommée victorieuse de son fils : « Sa mère est charmante par ses mines, et par les petits discours qu’elle commence et qui ne sont entendus que des personnes qui la connaissent. » On possède donc maintenant les doubles Relations du marquis et de la marquise de Villars, de l’ambassadeur et de l’ambassadrice de France à Madrid en 1679 ; toutes deux se complètent et nous offrent de cette monarchie en décadence et en ruine le plus curieux, le plus instructif tableau. […] Le tableau intérieur de cette monarchie, qui depuis des années manquait d’une tête et d’un bras capables, et qui devait continuer ainsi de dépérir pendant vingt années encore, est effrayant.
Voici pourtant (car nous autres, du commun des hommes, et qui ne sommes point à cette sublime hauteur de stoïcien et de panthéiste, nous avons besoin de tableaux plus doux), voici une pièce qui a son charme : elle a pour titre le Bernica. […] Cette pièce irait bien comme pendant avec la barque de Gleyre, le tableau des Illusions perdues.
Une des pages les plus sanglantes, un des plus hideux tableaux de conversions par violence. […] Il n’a gardé que quelques tableaux des beautés illustres comme de Marion Delorme, Ninon de l’Enclos, etc.
Il aurait pu raconter bien des épisodes piquants, restés longtemps mystérieux, et s’en autoriser dans ce tableau tracé par lui des inimitiés de la vieille Europe, tremblante et soumise en 1812, mais rongeant son frein et ne désespérant pas de la fortune. […] La conclusion, ou du moins l’impression qui ressort du tableau tracé par M.
Les connaisseurs en matière de xviiie siècle font cas d’un petit écrit posthume de l’académicien Chabanon, qui a titre : Tableau de quelques circonstances de ma vie ; précis de ma liaison avec mon frère Maugris (1795). […] Les Indiens de ces contrées, les Galibis, se rencontrent naturellement au premier plan du tableau : ils sont présentés sous un jour vrai, sans engouement ni dénigrement, avec leurs qualités comme avec leurs défauts.
Ami de la retraite, de la solitude, et peintre des champs, La Fontaine a encore sur ses devanciers du xvie siècle l’avantage d’avoir donné à ses tableaux des couleurs fidèles qui sentent, pour ainsi dire, le pays et le terroir. […] J’en ai aussi parlé en ce sens dans le Tableau de la Poésie française au xvie siècle.
. — Lorsque, après avoir vu sur le tableau des triangles, des quadrilatères, des pentagones, des hexagones, etc., et tout à côté, en contraste, des cercles et des ellipses, je prononce à propos des premiers le nom de polygone, je n’ai pas en moi-même la représentation sensible du polygone pur, c’est-à-dire abstrait ; car le polygone pur est une figure à plusieurs côtés, sans que ces côtés fassent un nombre : ce qui exclut toute expérience et représentation sensible ; dès que les côtés sont plusieurs ils font un nombre, trois, quatre, cinq, six, etc. ; qui dit plusieurs dit nombre déterminé, fixé. […] Le lecteur a sans doute visité des galeries de tableaux rangés par écoles ; après deux heures de promenade parmi des peintures de Titien, de Tintoret, de Bonifazio et de Véronèse, si l’on sort et si l’on s’assied sur un banc, les yeux fermés, on a d’abord des souvenirs ; on revoit intérieurement telle rose et blonde figure demi-penchée, tel grand vieillard majestueusement drapé dans sa simarre de soie, des colliers de perles sur des bras nus, des cheveux roux crêpelés sur une nuque de neige, des colonnades de marbre veiné qui montent dans un ciel ouvert, çà et là une mine gaie de petite fille, un beau sourire de déesse, une ample rondeur d’épaule satinée, la pourpre d’une étoffe rouge sur un fond vert, bref cent résurrections partielles et désordonnées de l’expérience récente.
Ce sont ces règles de la végétation humaine que l’histoire à présent doit chercher ; c’est cette psychologie spéciale de chaque formation qu’il faut faire ; c’est le tableau complet de ces conditions propres qu’il faut aujourd’hui travailler à composer. » Je voudrais pouvoir, Messieurs, vous montrer comment l’illustre critique a poursuivi son programme, comment il a développé et élargi sa méthode dans sa Philosophie de l’art, comment il a osé aborder les problèmes les plus compliqués de l’esthétique, ceux de la production de l’œuvre d’art et de l’idéal dans l’art, en « naturaliste », selon sa propre expression, et « méthodiquement », en vue « d’arriver non à une mode, mais à une loi ». […] Si vous considérez dans son ensemble le développement des littératures modernes qui font l’objet de ce cours, vous verrez bientôt qu’à travers bien des variations, des tâtonnements et des revirements de goût, il présente le tableau d’une sorte de conflit entre deux éléments qui parfois se fondent ensemble, puis se séparent de nouveau, se combattent tour à tour et se réunissent.
« Je me suis tenu constamment, dit-il, dans la situation d’esprit où se place un juré pour écouter les dépositions des témoins ; et maintenant j’oserais, comme lui, prononcer· la formule solennelle dont le verdict est accompagné. » L’Introduction qui résume l’histoire de France depuis Louis XIV et pendant tout le xviiie siècle jusqu’au moment où Louis XVI monta sur le trône, offre un beau et grave tableau plein de vérité et de précision. […] En lisant ce sévère tableau du début, on sent d’abord combien l’étude de l’histoire a été profitable au talent de M.
C’est là un tranquille et doux tableau, et qui laissait jour à l’espérance. […] Le tableau que Portalis y trace de la France est de main de maître et accuse une touche plus ferme que celle qu’on rencontre dans ses discours publics ; il ose plus dans la familiarité et en causant.
(Quel prompt, facile et affectueux tableau ! […] Selon cette théorie d’un faux bon sens ennemi du grand goût, il suffirait de transporter purement et simplement toute action émouvante et attendrissante de la vie bourgeoise sur le théâtre pour avoir atteint le plus haut point de l’art : Si quelqu’un est assez barbare, assez classique (il est piquant de voir ces deux mots accolés par Beaumarchais et pris comme synonymes), pour oser soutenir la négative, il faut lui demander si ce qu’il entend par le mot drame ou pièce de théâtre n’est pas le tableau fidèle des actions des hommes.
Nous ne nous livrerons point, sur ce sujet, à un examen étendu et approfondi ; nous tâcherons seulement de faire sentir ce que produirait cette partie de la discussion, si nous pouvions l’embrasser tout entière ; mais le peu que j’en dirai servira du moins à compléter le tableau de cette lutte des idées anciennes contre les idées nouvelles, et à me faire ainsi mieux comprendre. […] Ancillon a remarqué fort bien que l’histoire est le tableau de la lutte perpétuelle qui existe entre la nécessité et la liberté.
De toutes ces scènes, de tous ces tableaux, — qui passent un peu trop comme les paysages vus d’un wagon, — il y en a pourtant quelques-uns qui frappent. […] Rolande n’est pas un tableau, mais c’est une palette.
Quelques-uns des principes de Ruskin sont d’une incontestable fausseté ; par exemple, celui-ci : « Le meilleur tableau, écrit-il33, est celui qui renferme le plus d’idées et les idées les plus hautes » A quoi il ajoute comme commentaire, que « les plus hautes idées sont celles qui tiennent le moins à la forme qui les revêt, et que la dignité d’une peinture, comme l’honneur dont elle est digne, s’élèvent exactement dans la même mesure où les conceptions qu’elle traduit en images sont indépendantes de la langue des images. […] J’ai devant moi en écrivant ces lignes deux portraits de Carlyle, l’un d’après le tableau de Watts, l’autre qui est une photographie quelconque ; de leur comparaison naît pour moi un exemple-type.
Il achevait son cours d’esthétique par l’aveu du même sentiment : « À la vue d’un arbre sur la montagne battu par les vents, nous ne pouvons pas rester insensibles : ce spectacle nous rappelle l’homme, les douleurs de sa condition, une foule d’idées tristes56. » À vous, peut-être ; mais combien d’hommes n’y verront rien de semblable, et combien d’artistes n’y verront qu’un sujet de tableau ! […] Est-il étonnant que l’écrivain ne reconnût pas le monde intérieur dans le tableau qu’il en faisait, lorsqu’il relisait cette phrase : « Nos facultés sont tout à fait sous l’impulsion des mobiles ou tendances de notre nature, qui réclament certains objets, aspirent à certaines fins, poussent nos facultés dans la direction qu’elles veulent, sans que nous intervenions, nous, pour empêcher cette direction ou la rectifier65. » Qu’entend-on par des facultés qui veulent ?
Par instants, il sursautait, apercevait une idée, écartait l’élève, effaçait d’un revers de main les écritures du tableau, et griffonnait violemment sa formule nouvelle. […] En vain vous auriez les meilleurs yeux et la plus grande science du monde, vous n’apercevriez dans un tableau que des lignes et dans une charte qu’une écriture, si votre imagination n’est pas devenue sensible et si vous n’avez pas au dedans de vous un réactif indicateur.
Je ne vous conterai pas la fable de Jocelyn ; je ne vous rappellerai pas son charme puissant, ni la profondeur de quelques-uns de ses sanglots, ni l’Idylle chaste, et pourtant enivrée, des deux enfants dans l’Alpe vierge, ni la sérénité et l’ineffable beauté morale des derniers tableaux. […] Remarquez que cette vision monstrueuse de la ville de Balbeck, c’est tout simplement le tableau grossi de la suprême cité industrielle ; que les tyrans-dieux y sont comme des « patrons » qui auraient traversé avec succès la crise révolutionnaire et socialiste et qui, par la science, seraient venus à bout, une fois pour toutes, des prolétaires. […] (Suétone : Néron, XII) « Icare, à son premier essor, tomba près du lit sur lequel était assis Néron, et le couvrit de sang. » À vrai dire, c’est une assez belle invention de souffrances, de souffrances brutales et extrêmes, que la tragédie en tableaux vivants, en tableaux réels, dont les tyrans-dieux s’offrent le régal. […] Et c’est le premier tableau. […] ces jeux d’arène, ce drame brutal, ces tableaux vivants et ces exhibitions toutes crues, je crains bien que notre théâtre ne s’y achemine tous les jours… Mais, je le répète, les cruautés lamartiniennes ne nous hérissent pas plus que les luxures lamartiniennes ne nous avaient troublés.
Passons à un autre tableau, c’est à dire à un nouvel ébahissement ; la scène représente un madras : « La chose est carrée d’abord. […] Je contemplais ce petit manège, et j’avais envie de dire à cette copie d’un vieux tableau de Ribeira : — « Mais, Madame à défaut de talent, il faut avoir du bon goût. […] C’est justement à ce deuxième tableau, formant clé de voûte, que s’en prend la mauvaise humeur de M. de Prémaray. […] Taxile Delord, lui, niant la réalité et même l’étrangeté de ses peintures, cherche et prétend ne pas reconnaître, dans les tableaux de la comédie nouvelle, les originaux du monde marron que le dramaturge a promis de révéler au public. […] De même que la peinture, la critique a sa perspective, et l’on ne saurait transporter violemment au premier plan ce qui, par la loi de la distance, de la lumière et de l’harmonie, doit seulement se fondre ou s’éparpiller dans l’ensemble et les détails du tableau.
Leur unique désir a été d’être vrais et de donner plutôt au public des études sincèrement faites d’après nature, que des tableaux composés suivant les règles qui se sont établies. […] Henri Lavedan, sans prétendre à continuer les Colloques d’Érasme, nous donne aussi en une série de dialogues, un tableau de certains ridicules de notre temps ; M. […] J’ai voulu seulement montrer un de ces petits coins de tableau que M. […] Ce n’est là qu’un des coins du tableau dans lequel M. […] L’auteur fait un superbe tableau de la grande sortie d’Osman-Pacha, reconnaissant sa haute valeur et son courage.
L’homme a brisé cet antique tableau… Etc. […] Le chevalier note une ressemblance entre les deux tableaux qu’il vient de tracer. […] Auguste Germain ; — Odéon : Fantasio, comédie en deux actes et huit tableaux, d’Alfred de Musset. […] Il a des terres partout, un château historique, une galerie de tableaux, les maîtresses qu’il veut. […] Il aide de ses conseils les parvenus inexpérimentés, s’entremet dans les ventes de tableaux, ménage des entrevues… pour le bon motif ou pour l’autre.
Désormais, dans son œuvre, poème ou tableau, l’artiste a la prétention de mettre quelque chose de lui-même ; son monogramme ou sa marque, sa signature, son empreinte ; et, très différent en ce point de ces pieux « tailleurs d’images » dont le ciseau subtil a ouvré les pierres de nos cathédrales, ou de ces « primitifs » qui se faisaient de leurs tableaux, comme nous le disions l’autre jour, un moyen de salut, l’intérêt ou la curiosité que soulève son œuvre, c’est vers lui que l’artiste moderne en prétend dériver le profit. […] Il nous suffira pour cela de le prendre dans son œuvre maîtresse, le Tableau de la littérature française au xviiie siècle. […] De telle sorte que, si l’Allemagne n’était pas trop négligemment touchée dans ces quatre volumes, autant que le Tableau de la littérature française, ils formeraient un Tableau de la littérature européenne au xviiie siècle. […] Les œuvres n’y étaient plus classées ou cataloguées seulement, comme des fleurs dans un herbier, comme des tableaux dans un musée, comme des cercueils dans un hypogée. […] Vous conviendriez avec moi que nous sommes en présence de l’un des tableaux les plus complets, les plus vivants qu’il y ait dans aucune littérature, et d’une création ou d’une invention d’art au-dessus de laquelle on ne pourrait mettre aucune histoire de Michelet, aucun roman de Balzac, et aucun drame de Hugo.
Dans une suite de petits tableaux et poèmes intitulés Blanche, Jobbie, Maria, Henriette, Lucy, etc., son imagination s’est créé comme des sœurs qu’elle transporte dans des situations diverses, qu’elle place même à plaisir dans des cadres assez brillants ; mais toujours et chez toutes la note fondamentale est le délaissement intime, la plaie secrète, la douleur.