Mme Gay, au contraire, se contente de cette notion plus ou moins comique : « Le ridicule est la meilleure chance qu’ont les hommes d’être heureux », et voilà le thème qu’elle brode ! […] IV Les Œuvres complètes de Mme Sophie Gay ne se composent pas moins, en effet, que de quatorze à quinze volumes, quelques-uns très compacts, comme un Mariage sous l’Empire et les Malheurs d’un amant heureux.
L’auteur était un abbé Richard… Mais, pour le second, Hefele a suivi son inspiration personnelle, et cette inspiration a été heureuse. […] … Sisson et Crampon avaient, en publiant le Ximénès d’Hefele, des intentions excellentes, nous n’en doutons pas, mais quoi qu’ils aient eu la grosse exactitude des faits qui suffit au contentement d’un auteur heureux de se voir reproduit, tant bien que mal, dans un idiome étranger, cela n’est point assez, pourtant, pour donner une idée des mérites littéraires de cet homme, s’il en a dans sa propre langue.
On a trouvé le néant au fond de tant de choses, que les ivresses sont difficiles… À cet âge tristement viril, quand on parle de courtisanes, quand on se tache les doigts à cette poussière légère que toute la sainteté de la mort ne peut sauver des profanations de la vie, il faut le faire en moraliste et en observateur, non pour glorifier des mémoires trop heureuses, selon nous, de couler à fond dans l’oubli, mais pour prendre le niveau moral d’un pays ou d’une époque et mesurer le vice de tout le monde à la taille de celles qui l’ont inspiré. […] Seulement, moins heureux dans tout ce qui tient à l’appréciation de l’intelligence qu’à l’appréciation de la moralité du caractère, Chateaubriand a trop consacré une réputation d’esprit dont il n’était pas juge ; car, dans ses Mémoires, on se rappelle comment il a traité Rivarol.
il n’y a pas moyen, sans injustice, de reprocher à un sot d’avoir la main heureuse et de la mettre quelquefois sur un titre qui sera, tout à l’heure, la plus cruelle ou la plus plaisante ironie quand il l’aura placé sur son livre. […] Il n’a guère qu’une dizaine de billets d’elle, fragmentés, écrits à la hâte, qu’il publie comme si c’étaient des merveilles, en nous disant somptueusement : Soyez heureux !
Ce sont là des vers pris aussi avec la main, comme les fleurs auxquelles ils ressemblent, tant ils sont faciles, d’une couleur exquise, d’un tour heureux et naturel. […] et bien honorable du reste pour le talent, qu’il ait eu cette fois-là le sort heureux de l’Insignifiance, si chère aux Quarante Immortels.
Mais le citron, d’abord délicieux aux jours de la jeunesse heureuse, devint, sous les trahisons de la vie, d’une acidité presque cruelle à travers la suavité des plus purs sorbets. […] C’est un Goethe, sans l’ennui de Goethe, le Jupiter Olympien de l’ennui solennel et suprême, qui l’a fait tomber cinquante ans comme une pluie d’or sur l’Allemagne ; sur l’Allemagne, cette Danaé de l’ennui heureuse, qui se jetait par terre pour le ramasser !
Intellectuellement, l’auteur des Amours d’Italie ne s’est pas italianisé… Sa nature forte, mais épaisse, a résisté et ne s’est pas fondue à l’air transparent que ne respirèrent jamais impunément, même les Barbares… Il a été moins heureux que Beyle, Beyle l’esprit sec et cruellement positif, le Voltairien, l’Américain, l’anti-poétique, et dont cette magicienne d’Italie avait fini par faire… l’auteur de La Chartreuse de Parme, avec le droit d’écrire sur son tombeau : Ci-gît Henri Beyle, le Milanais. […] Charles Didier est un conteur à événements qui a l’habitude de la plume, mais il n’a jamais eu, ce prosateur, d’étoffe ferme et étoffée, dans l’imagination ou dans le style, ni les enchantements passionnés ou rêveurs, ni les belles indolences d’attitudes ou les vivacités éprises, ni les grâces armées et désarmées de la causerie ou du récit, ni les gaietés d’alouette dans un ciel heureux, ni les mélancoliques lenteurs des cygnes sur les bassins tranquilles, que doivent avoir, pour réussir dans la pensée et le langage, les peintres ou les poètes des Décamérons !
Sainte-Beuve Les Fables de Lachambeaudie, publiées dans un magnifique volume (1851), nous avertissent que l’auteur est poète, homme de talent, doué de facilité naturelle et sachant trouver des moralités heureuses quand il ne les assujettit point à des systèmes.
Ses Plaidoyers sont d’un style véhément, rapide, pleins de pensées nobles, de tours énergiques, & d’expressions heureuses.
Après l’avoir maintefois célébrée dans ses Satires, il lui fit cette Epitaphe, assez heureuse dans sa simplicité : Ci-gît ma femme ; oh !
Les trouvailles et les fantaisies y pullulent, et l’on n’y compte pas moins de trente-sept pièces, presque toutes heureuses, réussies, débordantes de la gaîté et de l’originalité les plus pures.
En une suite de strophes ciselées et de sonnets heureux, M.
De l’onction, du sentiment, l’heureux talent de la persuasion, l’ont fait placer parmi les Prédicateurs, au même rang que Racine occupe parmi les Poëtes tragiques.
Elle se composait enfin de l’abbé de Maistre, autre frère qui devait bientôt devenir évêque d’Aoste ; et enfin de Xavier de Maistre, dont on regrettait l’absence, et qu’on attendait aussi de Pétersbourg, où un heureux et riche mariage avait fixé son sort errant. […] Son fils présente comme un sacrifice douloureux à la monarchie l’acceptation du comte de Maistre de ce poste ; on peut croire cependant que l’ambition très haute du comte de Maistre fut heureuse de cette mission à une telle cour. […] « Tout le monde sait qu’il y a des révolutions heureuses et des usurpations auxquelles il plaît à la Providence d’apposer le sceau de la légitimité par une longue possession. […] Je serais bien heureux si l’empereur me déchiffrait comme lui. […] Ce qui peut vous arriver de plus heureux pour vous, m’écrivez-vous, c’est que, etc., etc.
Supposez qu’un animal ou une plante varient en couleur par l’effet de causes fortuites ; si la couleur nouvelle se trouve propre à cacher l’animal et à empêcher ses ennemis, de le dévorer, cet « heureux accident » opérera un triage, une sélection : il fera survivre les animaux ou les plantes qui auront eu la couleur la plus propice. De même, dans le germe des animaux ou de l’homme, certaines petites particularités peuvent se produire, grâce à quelque « jeu de la nature », et parmi ces légères déviations du type congénital, il y en aura de malheureuses, il y en aura d’heureuses. […] Il pourra survenir, dans le développement du système nerveux et cérébral, de nouveaux accidents heureux, et la sélection les fixera enfin dans l’espèce. […] Il en résulte que « la philosophie de l’expérience » n’a vu qu’un des côtés de la question : elle a représenté nos formes cérébrales comme de simples empreintes laissées par les relations externes, fixées par une répétition séculaire ; or nous venons de voir que ces formes peuvent être aussi les résultats de variations heureuses, dues non à l’expérience, mais à un jeu de circonstances antérieur à toute expérience et ayant pour théâtre le germe ou l’embryon. […] La sélection naturelle, en effet, présuppose elle-même les lois physiologiques ; les « accidents heureux » de la vie impliquent la vie même avec ses tendances fondamentales.
Le Zézère, la Sarabande ou les Sortilèges, font évoluer dans un décor de lumière des êtres heureux de vivre, même au fort des plus réelles souffrances sociales ou amoureuses. […] Marcel Boulenger est un heureux. […] Tu es semblable à la brebis qu’un boucher mène à l’abattoir et qui, ne sachant pas où elle va, est heureuse de marcher. […] Un jury de femmes réuni par la maison Hachette, au Journal La Vie Heureuse, attribua cinq mille francs à La Conquête de Jérusalem de Mme Myriam-Harry (1904) et pareille somme en 1905 au Jean-Christophe de M. […] La Société des Gens de Lettres a été moins heureuse dans ses attributions du Prix Sully-Prudhomme.
Heureux celui qui, par le prix qu’il met et le goût qu’il prend aux plus petites choses, prolonge son enfance ! Les jours les plus heureux sont ceux qui ont une grande matinée et une petite soirée. […] Dans tout ce qui précède, je n’ai point voulu faire une biographie ni même un portrait du prince de Ligne, mais seulement présenter de lui et, pour ainsi dire, sauver de l’ancien naufrage de ses Œuvres quelques beaux ou jolis endroits, et le rappeler à l’attention comme un des plus sensés parmi les arbitres des élégances, un des plus réellement aimables entre les heureux de la terre38.
Il est heureux pour les critiques de n’être point comme Montesquieu qui ne tirait jamais, disait-il, du moule de son esprit qu’un seul portrait sur chaque sujet. […] Après l’avoir dit presque seul il y a seize ans, je suis heureux de le redire aujourd’hui avec tant d’autres : Buffon est aussi grand comme naturaliste et comme penseur que comme écrivain. […] Geoffroy Saint-Hilaire, sortant de la question de science et entrant dans celle de la littérature, croit voir dans Buffon une preuve écrite, une conception première à l’appui de sa théorie, et si, heureux de se retrouver dans Buffon, il le tire aussitôt à lui, et, en l’embrassant, le façonne ensuite à son image, j’interviens humblement et je commence à avoir un avis, non pas sur le fond même et sur le vrai ou le faux de la théorie, mais sur la question plus claire et ouverte à tous de savoir si cette théorie est ou si elle n’est pas dans Buffon.
Lenoncourt, le premier fiancé, ayant été tué au siège de Thionville (1643), un second se présenta et fut plus heureux. […] Maucroix jeune, et encore avocat, a fait ce qu’on appelait des airs, des chansons ou stances qui devaient charmer sous la régence d’Anne d’Autriche, et qui se chantaient sur le luth ; par exemple : Amants, connaissez les belles, Si vous voulez être heureux : Elles ne font les cruelles Que pour allumer vos feux. […] On conçoit qu’il ait dit de Virgile : « Virgile est ma folie, et je soutiendrai jusqu’à la mort que ses Géorgiques sont le plus bel ouvrage qui soit jamais sorti de la main des Muses. » On le conçoit surtout en lisant la pièce suivante, où respire avec l’amour des champs une sagesse tranquille, et dont j’interromprai à peine la citation complète par une ou deux remarques : Heureux qui sans souci d’augmenter son domaine Erre, sans y penser, où son désir le mène, Loin des lieux fréquentés !
Le nom d’écrivains proprement dits continue d’appartenir à ceux qui de propos délibéré choisissent un sujet, s’y appliquent avec art, savent exprimer même ce qu’ils n’ont pas vu, ce qu’ils conçoivent seulement ou ce qu’ils étudient, se mettent à la place des autres et en revêtent le rôle, font de leur plume et de leur talent ce qu’ils veulent : heureux s’ils n’en veulent faire que ce qui est le mieux et s’ils ne perdent pas de vue ce beau mot digne des temps de Pope ou d’Horace : « Le chef-d’œuvre de la nature est de bien écrire. » Les autres, les hommes d’action, qui traitent de leurs affaires, ne sont écrivains que d’occasion et par nécessité ; ils écrivent comme ils peuvent et comme cela leur vient ; ils ont leurs bonnes fortunes. […] Si cela vous apporte du contentement, vivez heureuse. […] et cette page heureuse, imprévue, transparente, échappée à un roi soldat dans une après-midi de rêverie et de loisir, n’est-elle pas une découverte pittoresque à laquelle il n’a manqué jusqu’ici qu’un cadre pour faire un tableau ?
Santeul, le poète latin si fier de ses vers, si heureux de les réciter en tous lieux ou de les entendre de la bouche des autres, et qui aimait encore mieux qu’on dît du mal de lui que si l’on n’en avait rien dit du tout ; Santeul, qui dans une de ses plus grosses querelles écrivait à l’abbé Faydit, qui l’avait attaqué sur son épitaphe d’Arnauld : Je fais le fâché par politique, mais je vous suis redevable de ma gloire ; vous êtes cause qu’on parle de moi partout, et presque autant que du prince d’Orange ; vous avez rendu mes vers de l’épitaphe de mon ami plus fameux que l’omousion du concile de Nicée ; ceux des autres poètes sur le même sujet sont demeurés ensevelis avec le mort, faute d’avoir eu comme moi un Homère pour les prôner et les faire valoir ; — Santeul, qui était si fort de cette nature de poète et d’enfant qui tire vanité de tout, serait presque satisfait en ce moment. […] on sent qu’il est heureux de ce qu’il va dire. […] Trop heureux s’il nous pardonne et nos sermons et nos vers !
Mais le style de la poésie lyrique était fort déchu ; il était entravé et gêné de toutes parts, jeté à froid dans des moules usés ; les heureuses tentatives de quelques jeunes poètes tendaient à le restaurer, à l’étendre, et à ceux qui s’en étonnaient et s’en irritaient comme d’une innovation inouïe, je rappelais qu’on l’avait déjà essayé et sans tant de maladresse et de malheur qu’on l’avait bien voulu dire. […] Le poète dans ces sonnets imite habituellement Pétrarque, et par endroits avec fraîcheur et sentiment ; il y a des expressions heureuses, de ces images qui enrichissent la langue poétique : Sur le métier d’un si vague penser Amour ourdit les trames de ma vie. […] Cela est si vrai, que lorsqu’il veut se corriger lui-même, Ronsard n’a pas la main sûre ni le tact heureux ; il lui arrive de retrancher, on ne sait pourquoi, de ses dernières éditions des vers qui sont charmants, et du petit nombre de ceux qui paraîtront tels à tous les yeux.
Vous mourez plein d’éclat et de gloire ; vous vous croyez vainqueur, vous vous endormez heureux dans le triomphe ; comme Mithridate, vos derniers regards ont vu fuir les Romains. […] Je suppose qu’une ou deux de ces grandes séries aient paru, non pas arrangées, non pas triées et écourtées, mais telles quelles, par une de ces indiscrétions et de ces imprudences heureuses dont tout le monde profite ; que cette âme vive, émue, expansive, passionnée et généreuse, magnanime, pour tout dire, cette intelligence avide, empressée, ouverte de toutes parts, divinatrice et sympathique, touchant au génie, se soit montrée et comme versée devant tous dans une multitude de lettres familières, affectueuses, éloquentes, inachevées chacune, mais s’achevant l’une l’autre : les nouvelles générations auraient fait connaissance avec elle plus directement encore que par les livres ; elle ne serait pas restée une gloire aristocratique, la plus haute renommée de salon, mais s’y renfermant ; elle balancerait Chateaubriand non seulement de mérite et de nom, mais de fait ; elle serait lue et encore présente au milieu de nous ; on la discuterait. […] Vous voyez par ces quelques mots que la lucidité, la décision et la vivacité spirituelle de sa nature ne peuvent exercer qu’une influence heureuse.
Moland, à qui nous sommes heureux de rendre en ce moment toute justice pour les lumières qu’il a répandues à son tour sur ces questions littéraires du moyen âge, a donné une fort bonne analyse de ce drame et de toute la légende d’Adam, dont il a suivi les progrès ou altérations en ces siècles de crédulité active et d’invention sourde et continue67. […] Je veux te parler… » C’est assez vif, c’est sobre et assez fin : cela ne manque ni de grâce ni d’une naïveté assez heureuse. […] Mais cette rencontre heureuse a manqué, n’en déplaise à ceux qui voudraient à toute force découvrir aujourd’hui ce génie absent.
Les grands, les riches, les heureux du siècle seraient charmés qu’il n’y eût point de Dieu ; mais l’attente d’une autre vie console de celle-ci le peuple et le misérable. […] Deleyre était de ceux qui aiment mieux pâtir que jouir et prospérer ; il craignait toujours de faire tort aux autres, et de peur d’être heureux aux dépens du grand nombre, il se rangeait volontiers de lui-même du côté des misérables : il avait retourné le proverbe comme trop dur et trop égoïste : « Je trouve le proverbe bien cruel, disait-il, et j’aime encore mieux faire pitié qu’envie, moi. » Nature vraiment pitoyable et tendre, il a la piété sans la religion ! […] … » Et cette visite encore à un curé, camarade de collège, cette tournée près de La Ferté-Milon, et qui doit le ramener sous le toit champêtre de son ami Deleyre : « Je vous écrirai de mon presbytère pour vous annoncer le jour de mon départ, et je croirai en arrivant à Dame-Marie me trouver chez un autre curé ; car tout père de famille est pasteur. » J’ai lu quelquefois, dans les lettres et mémoires des poètes anglais venus depuis soixante ou quatre-vingts ans, de ces promenades de campagne, de ces visites heureuses et saines à des cottages qui ont abrité, ne fût-ce qu’un jour, la joie innocente et le bonheur.
Quand je dis que cette langue romane des xie et xiie siècles est sortie du latin vulgaire et populaire graduellement altéré, j’ai peur de me faire des querelles ; car, d’après les modernes historiens philologues, les transformations du latin vulgaire ne seraient point, à proprement parler, des altérations : ce seraient plutôt des développements, des métamorphoses, des états successifs soumis à des lois naturelles, et qui devinrent décidément progressifs à partir d’un certain moment : il en naquit comme par voie de végétation, vers le xe siècle, une langue heureuse, assez riche déjà, bien formée, toute une flore vivante que ceux qui l’ont vue poindre, éclore et s’épanouir, sont presque tentés de préférer à la langue plus savante et plus forte, mais plus compliquée et moins naïve, des âges suivants. […] Je ne crois pas qu’il puisse y avoir d’objection contre cette heureuse idée toute pratique et qui parle aux yeux. […] Quoiqu’il semble appartenir tout entier à la langue économique et financière (ce qui est déjà quelque chose), il peut trouver son emploi heureux dans la langue littéraire.
Le morose abbé de Mably, qui voyait tout en noir et ne pouvait surtout rien approuver dans un ministre, ne voulut jamais croire à l’heureuse solution de cette affaire qui avait eu, à l’origine, le caractère d’une machination, et il disait de son ton bourru à Malouet : « Monsieur, je me connais un peu mieux que vous en hommes et en ministres, attendu que je vous ai précédé dans le monde d’une quarantaine d’années ; je vous annonce donc nettement qu’avant deux ans vous êtes un homme perdu. » Malouet, loin de se perdre, sortit de là apprécié et prisé à sa vraie valeur. […] Heureux le monde si ces puissants et ce forts frappent juste en même temps ! […] Après une mission à Marseille pour la vente de l’arsenal, Malouet fut nommé intendant à Toulon et y passa les huit années qui précédèrent la Révolution (1781-1789), et qui furent, dit-il, les plus heureuses de sa vie.
Plusieurs sons simultanés se font entendre ; vous recevez une impression qui sera heureuse ou douloureuse : affaire de rapports chiffrés, qui sont les rapports sympathiques d’un phénomène extérieur avec vous-même, être sensitif. […] Vous êtes une nature très avide des jouissances artistiques et intellectuelles et vous ne pouvez être heureux qu’au milieu de tout ce qui peut satisfaire vos besoins sympathiques, qui sont immenses. […] Et ce qui augmente encore son trouble, c’est le mystère de cette race maorie qui vient on ne sait d’où, qui passe sa vie à rêver et à faire l’amour, qui n’a pour toute religion qu’une vague croyance aux esprits des morts ; de cette race voluptueuse et songeuse qui vit dans une nature trop belle, mais muette, où il n’y a pas d’oiseaux, où l’on n’entend que le bruit des flots et du vent ; de cette race sans histoire qui va décroissant et s’éteignant d’année en année et qui mourra d’avoir été trop heureuse… Et cependant la reine Pomaré donne un bal dans ses salons aux officiers de marine.
Un historien qui a bien connu Marguerite et qui ne lui est point hostile, Dupleix, a dit d’elle : « Elle avait aimé Henri duc de Guise, qui fut tué à Blois, et avait logé si avant dès sa jeunesse toutes les affections de son cœur en ce prince qui avait des conditions attrayantes, qu’elle n’aima jamais le roi de Navarre, depuis roi de France, de très heureuse mémoire, qu’on lui fit haïr du commencement, et enfin épouser malgré elle et contre les lois canoniques. » Nous n’en sommes pas encore au roi de Navarre. […] La langue de ses Mémoires n’est pas une exception à opposer à la manière et au goût de son temps, ce n’en est qu’un plus heureux emploi. […] Henri IV fut touché des sentiments qu’elle témoigna durant cette longue négociation : « Aussi suis-je très satisfait de l’ingénuité et candeur de votre procédure, et espère que Dieu bénira le reste de nos jours d’une amitié fraternelle accompagnée d’une félicité publique, qui les rendra très heureux. » Il l’appelait désormais sa sœur, et elle-même lui disait : « Vous m’êtes et père et frère, et roi. » Un biographe qui a judicieusement parlé de la reine Marguerite (M.
Le moi proprement dit en est comme le support et est heureux de le supporter et de s’en sentir agrandi. Ou il est comme le vase qui le reçoit et qui est heureux de le recevoir, et comme un vase qui, en recevant, s’agrandirait, s’élargirait, se dépasserait. […] C’est un homme très heureux si c’est un bonheur, comme je le crois, de ne pas vieillir.
Seulement, plus heureux que François de Sales, qui n’eut que le ciel, — cette billevesée, selon les philosophes, — Michelet eut sa récompense humanitaire. […] Nous doutons fort qu’elles soient heureuses de cela… Seulement, Michelet pourrait bien racheter la brutalité de sa définition à force de madrigaux immenses et de poésies dans la tonalité de celle-ci : « Au nom de la femme et par la femme, souveraine de la terre, ordre à l’homme de changer la terre et de mettre le ciel ici-bas. » Ce n’est pas facile, mais c’est assez flatteur, et les femmes, dit-on, aiment la flatterie. […] Un écho heureux !
Ce sont les miettes d’une vie exquise et malheureuse, dont l’exquisité a couvert le malheur jusqu’au point de faire croire aux plus pénétrants, tout le temps qu’elle dura, que cette vie était heureuse. […] A présent qu’on lit son journal, on se demande ce qu’a gagné à être du xixe siècle ce noble esprit, qui, au Moyen Age, aurait été aussi heureux qu’il était sublime ! […] On n’avait pourtant, du temps de Carrel, qu’une partie de l’âme de Vigny, qu’on croyait heureuse et qui ne l’était pas… C’est nous qui l’avons tout entière, complétée et embellie par la douleur… qui embellit toujours les âmes !
« Heureux, lit-on au début, heureux les peuples dont on ne parle pas ! […] » L’auteur adresse et approprie à son héros cette apostrophe célèbre de Tacite à Agricola, reproduite elle-même de celle de Cicéron à l’orateur Crassus : « Heureux Eugène ! […] Heureux mille fois les hommes qui ne sont appelés à contempler que dans l’histoire les grandes révolutions, les guerres générales, les fièvres de l’opinion, les fureurs des partis, les chocs des empires et les funérailles des nations ! Heureux les hommes qui passent sur la terre dans un de ces moments de repos qui servent d’intervalle aux convulsions d’une nature condamnée et souffrante ! […] Il se sentait heureux quand il pouvait dire nous ; il est vrai que ce bonheur-là lui fut accordé bien rarement.
Il s’en faut bien qu’Homere soit toujours heureux dans ce choix ; content de ne point sortir du vrai, il ne paroît pas assez soigneux du grand ni de l’agréable. […] Personne ne posséde assez les langues mortes, pour en sentir, comme il faudroit, les délicatesses, les graces ou les négligences ; ni ce qu’il peut y avoir d’heureux ou de forcé dans les licences que les auteurs ont prises. […] Je suis persuadé que nos commentateurs ne sont pas quelquefois plus heureux dans leurs exclamations ; et qu’ils louent bien des choses que les contemporains censuroient. […] Si quelquefois elle est obligée d’employer plusieurs mots, pour rendre ce qu’un seul exprime en grec, quelquefois en revanche, elle sera assez heureuse pour renfermer dans un seul mot le sens de plusieurs expressions grecques. […] Je ne sçai si je me trompe, mais il me paroît heureux d’avoir fait ainsi du bouclier d’Achille, un titre de sa grandeur, et pour ainsi dire, son manifeste.
Si vous récupérez la quantité de jouissances nécessaire pour rétablir l’équilibre de toutes les parties de votre être, vous êtes heureux, repus et bienveillants, comme la société sera repue, heureuse et bienveillante quand elle aura trouvé son équilibre général et absolu. […] La qualité d’un pur dessinateur consiste surtout dans la finesse, et cette finesse exclut la touche : or il y a des touches heureuses, et le coloriste chargé d’exprimer la nature par la couleur perdrait souvent plus à supprimer des touches heureuses qu’à rechercher une plus grande austérité de dessin. […] Cet artiste, doué d’une merveilleuse faculté d’analyse, arrivait souvent, par une heureuse concurrence de petits moyens, à des résultats d’un effet puissant […] C’est un homme d’une humeur heureuse et folâtre, qui habite un pays artificiel dont les acteurs et les coulisses sont faits du même carton ; mais il règne en maître dans son royaume de parade et de divertissements. […] Tous ces Flamands si célèbres savaient disposer le gibier et le tourmenter longtemps comme on tourmente un modèle ; il fallait trouver des lignes heureuses et des harmonies de tons riches et claires.
tu seras heureuse ! […] Par la nature heureux comme avec une femme... […] Barbey d’Aurevilly, préférences heureuses, comme on va voir, et faites à souhait pour le plaisir des yeux. […] — les douze vers rapportés plus haut : « Chose étonnante, et bien honorable, du reste, pour le talent, qu’il ait eu cette fois le sort heureux de l’insignifiance, si chère aux quarante immortels ? […] Barbey d’Aurevilly pour cet heureux M.
Cheron l’a traduite en vers François d’une maniere assez heureuse.
Il n’a pas été plus heureux dans l’édition qu’il a donnée de trois petits volumes de Lettres entre Brossette & Despréaux.
S’il étoit question d’apprécier son style, on pourroit se dispenser de chercher des comparaisons aussi glorieuses ; mais M. l’Abbé Lebeuf aura au moins la gloire d’avoir servi utilement les Lettres, par ses recherches laborieuses & ses heureuses découvertes.
C'est servir essentiellement les Lettres, que de contribuer à leur accroissement par les bonnes Productions étrangeres ; on n'est pas toujours aussi heureux, quand on n'y contribue que de son propre fond.
Plus heureux saint Louis n’avait eu affaire qu’à des infidèles. […] La plus heureuse opération de guerre civile est une opération malheureuse et de peine. […] Plus heureux Polyeucte n’eut affaire qu’à Sévère et plus heureux Corneille n’eut affaire qu’à la jeunesse du monde. […] Les uns, Polyeucte et saint Louis, ont été tellement comblés de grâces qu’ils n’ont jamais souffert autrement et ailleurs, que dans la catégorie d’être heureux, qu’ils n’ont jamais cessé de souffrir dans la catégorie d’être heureux. […] Heureux ceux qui un jour en auront quelque idée.
Ainsi se trouve supprimée du coup la facilité insouciante et heureuse des rapports. […] Même le courage, en ces temps heureux, se faisait léger et coquet, pimpant et enrubanné. […] Il est presque heureux dans sa mélancolie d’avoir été aimé si follement. […] L’air était léger, la lumière heureuse. […] Heureux personnage qui croit tout savoir, pendant qu’il parle !
L’exposition est heureuse en ce qu’elle fait de suite pénétrer au cœur même du drame. […] Il demeure là longtemps, heureux d’être enfin seul, s’absorbant dans ces pensées qui lui mettent tant de dureté au front. […] Mais qu’on se garde d’attribuer à l’improvisation ces heureux mélanges. […] Heureux temps que celui où une simple réticence avait le pouvoir de faire palpiter le cœur des lectrices sensibles ! Cet heureux temps n’est plus, et il a fallu chercher autre chose.
Parmi les poètes qui, comme on sait, ont le privilège de la folie, Racine est l’homme éminemment sage : Voltaire est un étourdi brillant qui a des saillies très heureuses. […] Heureuse la faute qui produit tant de beautés ! […] Heureuse si mes pleurs vous peuvent attendrir ! […] Heureux l’auteur qui sait mêler l’agréable à l’utile ! […] Son dialogue surtout est naturel, facile et sage, semé de vers heureux et comiques ; on y rencontre même quelquefois des tirades brillantes.
Quand même il existeroit quelques défauts dans ce Livre vraiment original, ils seront toujours de la nature de ceux qu’on oublie en faveur de la justesse & de la solidité des réflexions, de la noblesse & de l’énergie du style, de la vérité des maximes qui s’y présentent à chaque page : trop heureux si la Littérature n’offroit jamais que de pareils sujets d’indulgence !
Il y a des détails heureux & des Scènes assez bien dialoguées dans la Jeune Indienne & dans le Marchand de Smyrne, deux Comédies en un Acte, la premiere en vers, & l’autre en prose.
XIV Le gouvernement des Bourbons avait M. de Marcellus le père à récompenser ; il fut heureux, à peu près à l’époque où il me recruta moi-même pour sa diplomatie future, d’enrichir ses cadres d’un nom, d’une jeunesse et d’un talent qui promettaient un ministre à sa cause. […] Le duc de Rivière était, comme M. de Polignac, un de ces monuments de fidélité chevaleresque, que Louis XVIII et le comte d’Artois étaient heureux de montrer à la jeunesse royaliste de 1825 dans les grandes places, comme des preuves vivantes de la mémoire des princes restaurés. […] M. de Chateaubriand, qui promenait son ennui à Londres pour délivrer les ministres de l’embarras de sa présence inquiète à Paris, le reçut comme un fils dans son ambassade ; heureux de reparler avec ce jeune et spirituel disciple de cet Orient qu’il avait visité quelques années plus tôt. […] XXXI « Quelques Français, nés sous cet heureux climat, m’accueillirent avec tout ce qu’ils pouvaient se rappeler de notre langue, qui fut celle de leurs pères, mais qu’eux-mêmes ne parlent plus aujourd’hui : quelques mots usuels leur sont venus par tradition. […] Le monde serait plus heureux s’il n’y en avait eu que de semblables.
« Il nous reste à examiner si le sort du juste est meilleur et plus heureux que celui de l’homme injuste. » Il poursuit et termine en remontant à l’essence de l’âme, qui, selon lui, est composée de vertu. […] « — Mais celui qui vit bien est heureux, celui qui vit mal est malheureux ? […] « — Donc le juste est heureux, et l’injuste est malheureux. […] « — Ils ne seront pas heureux, lui objecte Adimante. « — C’est possible, lui répond le législateur chimérique, mais nous ne fondons pas un État pour qu’une classe de citoyens soit heureuse ; nous avons en vue le bonheur de tous et non celui des individus. » En sorte que, par une absurdité d’utopiste, le bonheur de tous se composerait du malheur de chacun !
Pour qui n’a pas les deux, mieux vaut le second que le premier ; car l’admiration échauffe et féconde, et le cœur y a toujours sa part ; la critique dessèche : heureux si elle ne dégénère pas en une secrète envie contre ceux qu’elle juge ! […] Presque plus heureux que les grands poètes du dix-septième siècle, à qui certains délicats ne permettent pas d’être de grands prosateurs, les vers de Lamotte n’ont pas nui à sa prose. […] Sans compter que le bon, dans Lamotte, ou procède de Boileau, ou n’est que l’application heureuse des principes littéraires du dix-septième siècle. […] La pluralité des mondes Le cadre de la Pluralité des mondes est des plus heureux. […] Destinée unique, vie qui recommence après un demi-siècle, et pour un demi-siècle encore ; je ne m’étonne pas que, de tant de conditions heureuses, il soit sorti un livre à beaucoup d’égards parfait, par la convenance de l’entreprise au but et de l’œuvre à l’ouvrier.