Et pourtant il n’y a rien au fond de tout cela que ce bruit même.
Il ne jugeait pas néanmoins impossible de ressaisir le sens naturel, physique, astronomique de ces traditions que les Grecs n’avaient pas comprises, et l’on sent qu’il y avait dans cette idée un fond de vérité suffisant pour la construction d’un roman ingénieux et agréable.
Alors, lui : — Oui, j’ai vu les hommes à nu ; j’ai touché le fond de l’ingratitude humaine.
Eugène de Bornier, souhaitant, du fond de sa province, bon vent, bonne mer, aux écrits de son fils.
Il le considère comme un voyant du ciel supérieur qui se penche frémissant au puits des grands vertiges ou s’accoude au bord croulant du problème sans fond.
Il arrive parfois, dans l’exécution d’une cantate par une société musicale, que les chanteurs, basses, barytons, ténors, se groupent au fond du théâtre et forment en sourdine un chœur puissant, tandis que, sur le devant de la scène, en pleine lumière, se détache une prima donna ; elle chante et sa voix domine toutes les autres, sans cesser cependant d’être en harmonie avec elles.
Molière vint : le talent du poète comique suppose une vive sympathie avec le sentiment général des ridicules, sans exclure, sans doute, l’appréciation du fond des choses, mais aussi sans y disposer.
Il n’a pas su montrer dans cette « volonté de vivre » qui, selon lui, fait le fond commun de tous les êtres, la vraie origine de nos idées universelles et nécessaires, des formes à la fois cérébrales et mentales à travers lesquelles nous apercevons toutes choses.
Elle joue le rôle de la couche légère de gélatine qui, au fond de la chambre noire, se montre sensible à l’action de la lumière et s’empare, pour le fixer, du reflet des objets.
L’impuissance de sa volonté, qui est la cause et le fond de son infortune, est par lui subtilement analysée ; il distingue le penchant à suppléer aux actes par de vagues rêves, sa dépravation morose qui le porte à se regarder faire dans le peu qu’il fait et à se rendre ainsi déplus en plus incapable de toute action spontanée ; enfin apparaît ce dernier symptôme de la décadence volitionnelle, la lassitude anticipée, le dégoût préventif qui détournent même de tout désir, de tout rêve-d’entreprise et bornent définitivement en son incapacité le malade et le moribond que M.
» Hector ne répond point ; mais du fond de son âme, Tirant un long soupir : « Fuis les Grecs et la flamme, Fils de Vénus, dit-il, le destin t’a vaincu ; Fuis, hâte-toi, Priam et Pergame ont vécu.
Mais Charles Barbara, qui, je vous l’assure, est un homme, n’a pas craint de mettre son pied dans ce soulier éculé, rempli de sang, et, au lieu de barboter là-dedans comme un réaliste de 1855 ou un romantique de 1832, il nous a donné une étude superbe de vérité inattendue sur le remords dans les âmes fortes, — et, comme un chirurgien retire du fond d’une plaie des os brisés, des fragments de l’homme corporel il nous a retiré une conscience, les fragments d’une âme déchirée et mutilée par le crime… Jusqu’ici, la plupart des livres qui avaient peint le remords lui avaient fait pousser quelque cri sublime ou l’avaient peint accessoirement, de côté, le mêlant au torrent des autres sentiments de la vie.
L’écrivain futur est au fond de ce style solide, rapide et ferme, lequel n’a pas, il est vrai, le coup de lime définitif qui donne au fer l’éclat de l’acier, mais qui brille de force à plus d’un endroit et semble mépriser toutes les petites gentillesses littéraires de ce temps d’énervation et de prétention intellectuelle pour aller au fait, l’appréhender et le rendre avec un relief vigoureux.
Attachés à la réalité la plus vulgaire, parce que pour des hommes comme eux, aveuglés de matière, elle est la plus indéniable des réalités, s’ils exilent l’imagination des systèmes d’expression qu’ils préconisent, ce n’est point qu’ils se défient d’elle, mais c’est qu’au fond ils n’en ont pas !
Le public moderne, d’accord en cela avec l’ancien, veut que les opéras dont les sujets sont tragiques, soient historiques pour le fond ; et s’il supporte les sujets d’invention dans la comédie, c’est que ce sont des aventures particulières qu’il est tout simple qu’on ignore, et que pour cette raison l’on croit véritables. — 8.
Il faut bien connaître aussi cette race de critiques d’autrefois dont l’abbé Des Fontaines était le père ou l’oncle, et que nous avons vue finir : lui, Des Fontaines ; — Fréron, qu’on a voulu réhabiliter de nos jours et regalonner sur toutes les coutures (une courageuse entreprise), — Geoffroy, — Duviquet ; voilà la filiation, le gros de l’arbre ; il y en avait, à droite et à gauche, quelques rameaux perdus ; tous plus ou moins gens de collège, ayant du cuistre et de l’abbé, du gâcheux et du corsaire, du censeur et du parasite ; instruits d’ailleurs, bons humanistes, sachant leurs auteurs, aimant les Lettres, certaines Lettres, aimant à égal degré la table, le vin, les cadeaux, les femmes ou même autre chose ; — Etienne Béquet, le dernier, n’aimait que le vin ; — tout cela se passant gaîment, rondement, sans vergogne, et se pratiquant à la mode classique, au nom d’Horace et des Anciens, et en crachant force latin ; — critiques qu’on amadouait avec un déjeuner et qu’on ne tenait pas même avec des tabatières ; — professeurs et de la vieille boutique universitaire avant tout ; — et j’en ai connu de cette sorte qui étaient réellement restés professeurs, faisant la classe : ceux-là, les jours de composition, ils donnaient régulièrement les bonnes places aux élèves dont les parents ou les maîtres de pension les invitaient le plus souvent à dîner : Planche, l’auteur du Dictionnaire grec, en était et bien d’autres ; race ignoble au fond, des moins estimables, utile peut-être ; car enûn, au milieu de toute cette goinfrerie, de cette ivrognerie, de cette crasse, de cette routine, ça desservait, tant bien que mal, ce qu’on appelait le Temple du Goût ; ça vous avait du goût ou du moins du bon sens. […] Au fond, Voltaire dédaignait et méprisait Piron, et le lui faisait sentir ; Piron, de son côté, sentait à merveille certains faibles de Voltaire, et il lui lançait sa pointe à ces endroits, à ce défaut du talon ; mais il ne le comprenait pas dans la supériorité de ses talents et de son esprit. […] Du fond de son cabinet, il ne comptait pas avec lui. […] Piron, en vrai bel esprit qui ne veut perdre aucune occasion de briller, ne dut pas être au fond très-fâché d’une exclusion ainsi compensée, et qui lui rouvrait toute une veine inépuisable de bons mots. […] », il répondait admirablement : « Jamais. » Ce jamais était de conviction et du fond des entrailles.
Au fond, cet art du xviiie siècle est un peu le classicisme du joli, il lui manque l’originalité et la grandeur. […] voulez-vous que je vous parle là, du fond de mon cœur, s’exclame Zola, vous me regarderez comme un enfant, mais tant pis… Je ne serai jamais décoré, je ne serai jamais de l’Académie, je n’aurai jamais une de ces distinctions qui affirment mon talent. […] Au milieu de cela, il s’échappe à nous avouer, qu’au fond, sa grande satisfaction, sa grande jouissance est de sentir l’action, la domination qu’il exerce, de son humble trou sur Paris, et il le dit avec l’accent d’un homme de talent, qui a longtemps mariné dans la misère. […] Au fond, je ne sais pas pourquoi je suis revenu. […] On peut trouver ça très joli, mais n’est-ce point, au fond, de la très petite couleur, bonne à laisser à la peinture à la gouache ?
À ceux-là l’alchimie et la cabale furent de vraies mines d’or ; mais combien d’autres, au lieu de trouver la fortune au fond de leurs cornues et de leurs combinaisons, n’y trouvèrent que la misère. […] Lectures de voyage J’emporte toujours au fond de ma malle quantité de livres sérieux, qui ne sont pas sans l’alourdir, et régulièrement je les rapporte sans les avoir ouverts. […] Il est impossible de faire de sérieuses histoires littéraires, si l’on ne connaît pas directement les vieux livres, même sans grande valeur, qui sont comme le fond sur lequel se détachent de belles œuvres de la littérature. […] Au fond, je crois que c’est l’indulgence qui dominait. […] Mais on a bien le droit de ne pas reprocher à Le Nôtre son mauvais goût, qui, au fond, ne fut peut-être que de la bonhomie.
Seul, au fond d’une cour, il passait là de longues heures à modeler des pourritures et à copier des sanies. […] Foutange plonge, avec une adresse diabolique, jusqu’au fond de ces consciences frustes. […] Plus exigeant que Jean-Jacques et moins logique que lui, l’abbé Pierre n’est au fond qu’un athée, qui n’a pas le courage de son opinion. […] « Il répondit au hasard et sourit avec effort pour cacher le fond brutal et précis de son désir. […] Le fond de sa foi serait un panthéisme idéaliste à la Malebranche.
C’est au fond ce que craignait l’Etat ploutocratique (car la foi est l’antidote de l’argent) ; d’où les persécutions que l’on sait. […] Cette assimilation de la famille animale et de la famille humaine était au fond du Contrat Social de l’aliéné Jean-Jacques Rousseau. […] Comme lui, il flatta la démocratie, qu’il détestait au fond, avec une impudeur égale à celle de ses badigeons. […] Jamais au grand jamais, ne fut ouï tel concert champêtre, au fond bleu et doré des toiles de Watteau ! […] Vallès est quinteux, Bloy vaticinateur ; Vallès est mauvais, rancunier ; Bloy criard et bonhomme au fond.
Lorsqu’il répond à la question : quelle sera la vie du sage sur une plage déserte, dans le fond d’un cachot ? […] On ne pense, on ne parle avec force que du fond de son tombeau ; c’est là qu’il faut se placer, c’est de là qu’il faut s’adresser aux hommes. […] Dans les sociétés corrompues, les avantages du vice sont évidents ; son châtiment est au fond du cœur, on ne l’aperçoit point. […] Il montre au chrétien le ciel du doigt, et excuse au fond de son cœur le philosophe que ce spectacle ne convainc pas. […] On est charmé de la franchise avec laquelle il dévoile le fond de son cœur.
c’est au fond toujours la même. […] Un jour, au sortir du sommeil, Dante se trouve égaré, sans qu’il sache comment, au fond d’une vallée déserte, dans une forêt obscure. […] Dans la Bible, qu’il ne faut pas ici perdre de vue, car elle forme avec les Pères de l’Église et Aristote le fond même du savoir à cette époque, la panthère est légère et dissolue. […] Parvenus au fond du cône infernal qui est le centre de la terre, Virgile et Dante changent de pôle. […] L’idéal platonique, un peu germanisé, est au fond de tous les attachements de Gœthe.
Paul Adam plus que contre le fond de sa thèse, que je ne trouve pas si ridicule. […] » Et Molière, au fond et après tout, a-t-il pu créer ce personnage de Jourdain sans avoir pour lui un peu de cette mâle tendresse qu’il garde, sous ses railleries, à Alceste ? […] C’est Madame Bovary, ce n’est pas Bouvard, qui fournit dans son fond et dans sa forme le Don Quichotte de Flaubert. […] Marseille ne m’a jamais paru une ville vraiment gaie, et ceux qui connaissent bien les Marseillais m’affirment que leur fond c’est la tristesse. […] Le paysage d’idées ne servait, pour Sainte-Beuve, que de fond au portrait.
D’ailleurs, une grande sûreté dans le commerce, une grande fidélité à ses amitiés, à ses opinions, le constant désir, le ferme propos d’être et de rester aimable jusque dans la ruine de la santé et au sein de la souffrance59, ces qualités sociales indiquaient en lui un fond de caractère plus solide que son esprit.
Parmi tant d’objets amoureux, Je vis une ombre désolée ; Elle s’arrachoit les cheveux Dans le fond d’une sombre allée.
Au fond rien de bien sérieux sous tout ce bruit.
Les jeunes gens du jour ont ce travers commun D’affubler leur candeur d’un vêtement d’emprunt, De faire les lurons à qui rien n’en impose, Et dont l’œil voit d’abord le fond de toute chose ; De ne pas sembler neufs sottement occupés, Ils mettent de l’orgueil à se croire trompés, Perdant ainsi, pour feindre un peu d’expérience, La douceur d’être jeune et d’avoir confiance !
Nulle éloquence, nulle poésie ne peut se passer de simplicité, puisqu’en somme la simplicité n’est que l’équivalence rigoureuse du mot et de l’idée, la parfaite convenance de la forme et du fond.
C’est que j’étais indigné et que, comme Montaigne, « je hais cruellement la cruauté. » J’ignore si à l’heure qu’il est nos enfants de l’École polytechnique — qui, dans le fond et quoi que j’aie dit, doivent être presque tous de « gentils garçons » — ont eu l’esprit et le courage de désarmer.
« À toi, Lacoste, qui resteras peut-être dans l’ombre, simple et beau comme ce rosier que tu as peint au fond du vieux jardin triste. » M.
Mais le fond de l’œuvre, la-méthode, le système d’écriture, cette probité supérieure dans l’exécution sont l’honneur certain de l’artiste perdu hier.
Presque tous ceux qui ont entouré mon enfance ont disparu : ma mère, à qui je dois le fond de ma nature, qui est la gaieté ; ma sœur, si pure, si dévouée, ne sont plus aux lieux où je les ai vues autrefois vivre et m’aimer.
Le merveilleux y produit sur-tout un effet qui étonne & flatte l’imagination, sans la contraindre & la fatiguer, parce que le Poëte a su le tirer du fond du sujet, & en faire usage avec discernement & sobriété.
L’auteur considéra que les deux seuls de ces chapitres qui eussent quelque importance par leur étendue, étaient des chapitres d’art et d’histoire qui n’entamaient en rien le fond du drame et du roman, que le public ne s’apercevrait pas de leur disparition, et qu’il serait seul, lui auteur, dans le secret de cette lacune.
Le voyageur s’assied sur le tronc d’un chêne, pour attendre le jour ; il regarde tour à tour l’astre des nuits, les ténèbres, le fleuve ; il se sent inquiet, agité, et, dans l’attente de quelque chose d’inconnu ; un plaisir inouï, une crainte extraordinaire font palpiter son sein, comme s’il allait être admis à quelque secret de la Divinité : il est seul au fond des forêts ; mais l’esprit de l’homme remplit aisément les espaces de la nature ; et toutes les solitudes de la terre sont moins vastes qu’une seule pensée de son cœur.
Toute oreille sera frappée de la cadence monotone de ces rimes redoublées, où semble retentir et expirer cet éternel cri de douleur qui remonte du fond de l’abîme.
Dans ce mauvais tableau il y a pourtant de la perspective, et les figures fuient bien du côté de la porte du fond.
Les hommes avec qui nous vivons, nous laissent presque toûjours à deviner le véritable motif de leurs actions, et quel est le fond de leur coeur.
Deux autres acteurs, coeffez comme les premiers du masque que portoient les comediens des romains, entrent sur la scene, au fond de laquelle on voit un homme debout qui accompagne de sa flute.
Ainsi un livre dans lequel la forme de l’Écrivain (quelle qu’elle soit ; ce n’est pas la question) est maîtresse chez elle, quand elle ne l’est pas dans les journaux, où, comme partout, la forme emporte le fond (ou l’empâte), tel est ce premier volume des Œuvres et des Hommes.
Toutefois, les remarques si justes de David, en cette occasion, répandirent de la lumière dans son esprit, et il s’aperçut que le maître avait au fond témoigné plus d’indulgence pour son élève que pour l’ouvrage. […] Bien qu’il fût le premier à rire des formes extravagantes sous lesquelles Maurice exposait sa doctrine, au fond, il lui était impossible de ne pas reconnaître la puissance des idées et quelquefois des raisonnements du jeune fou. […] Il gagnait à être connu, et les amitiés qu’il a fait naître, qu’il a entretenues si longtemps, prouvent que chez lui le fond était solide, si la forme manquait d’attrait. […] C’était, comme on en a pu juger par les lettres citées plus haut, un homme doux et fort raisonnable au fond, mais que ses premiers succès, très-mérités sans doute, rendirent trop fier de son mérite et trop sûr de lui-même. […] À plusieurs reprises, il renouvela cet éloge en évitant de parler du fond de la composition.
C’est comme une sainte du moyen-âge qui nous apparaît, une sainte du Nord, du treizième siècle, une sainte Élisabeth de Hongrie, ou encore quelque sœur du Grand-Maître des Chevaliers porteglaive, qui, du fond de sa Livonie, attirée sur le Rhin, et longtemps mêlée aux délices des cours, ayant aimé et inspiré les illustres minnesinger du temps, ayant fait elle-même quelque roman en vers comme un poëte de la Wartbourg, ou plutôt ayant voulu imiter notre Chrestien de Troyes ou quelque autre fameux trouvère en rime française, en cette langue la plus délitable d’alors, serait enfin revenue à Dieu, à la pénitence, aurait désavoué toutes les illusions et les flatteries qui l’entouraient, aurait prêché Thibaut, aurait consolé des calomnies et sanctifié Blanche, serait entrée dans un Ordre qu’elle aurait subi, qu’elle aurait réformé, et, autre sainte Claire, à la suite d’un saint François d’Assises, aurait remué comme lui des foules, et parlé dans le désert aux petits oiseaux. […] Elle fut élevée d’abord au sein d’une campagne pittoresque et sauvage : ce charmant petit lac où le vent jetait quelquefois les pommes de pins de la forêt, et où elle conduisait, en se jouant, une barque légère, ces sorbiers, amis des oiseaux, ces pyramides de sapins tout peuplés d’écureuils qui se miraient dans les ondes, ces plaintes des joncs, ces rayons de lune sur les bouleaux pâlissants, tel fut le fond de tableau à jamais cher, où se déclara son innocente et déjà passionnée rêverie. […] Mais c’est à la France, pour ne pas être ingrate, qu’il convient surtout le garder le souvenir d’une personne qui, de bonne heure, a tourné vers elle ses regards, qui a embelli sa société, adopté sa langue, orné sa littérature, qui l’a aimée en tout temps comme Marie Stuart l’aima, et qui, trahissant encore le fond de son âme à son heure de mystique ivresse, ne rêva d’autre rôle, en la revoyant, que celui d’une Jeanne d’Arc de la paix, de l’union et de la miséricorde215.
Dans la Haute-Guyenne662, « tous les fond de terre sont taxés, pour la taille, les accessoires et les vingtièmes, à plus du quart du revenu, déduction faite seulement des frais de culture, et les maisons au tiers du revenu, déduction faite seulement des frais de réparation et d’entretien ; à quoi il faut ajouter la capitation, qui prend environ un dixième du revenu, la dîme qui en prend un septième, les rentes seigneuriales, qui en prennent un autre septième, l’impôt en remplacement de la corvée, les frais de recouvrement forcé, saisies, séquestres et contraintes, les charges locales ordinaires et extraordinaires. […] Le terme expiré, à l’heure et à la minute, la contrainte marche, et les collecteurs, quoique aisés, se gardent bien de la renvoyer en la payant, quoique, au fond, cette garnison soit fort chère. […] Lorsque dans les correspondances administratives on examine de près le grand filet fiscal, on découvre à chaque instant quelques mailles par lesquelles, avec un peu d’industrie ou d’effort, passent tous les poissons moyens ou gros ; le fretin seul reste au fond de la nasse.
Dans la soirée il dit, en secouant la tête, comme un homme qui se ravise, qu’au fond le petit Didier, quoique un peu trop bon garçon, avait toute son estime comme excellent ouvrier ; qu’il faisait au besoin l’ouvrage de tout le monde ; qu’il était trop grand pour rester à jamais toucheur ; que la Jumelle ne pouvait épouser un enfant qui piquait encore les bœufs au labour comme une fille, mais que, si sa condition se relevait un peu au château avec ses gages, et que, si par exemple on le faisait garçon de charrue en titre avec cent vingt francs par an, deux paires de sabots, une paire de souliers et six chemises de toile de chanvre, on pourrait penser à sa proposition, l’autoriser à courtiser la Jumelle, et que, toute belle et toute recherchée qu’elle était, sa fille pourrait rencontrer pis que le fils de la veuve. […] XIX Aux premiers échos de la voix de Didier qui remplissait le fond de la vallée d’un tonnerre roulant de joie, tout le monde se leva pour l’apercevoir de plus loin dans le sentier au clair de la lune. […] Il suspendait alors son chant pendant quelques respirations, puis il le reprenait avec une force nouvelle, à mesure qu’il approchait du fond de la vallée et de la clairière de gazon et de rocaille où la gorge du château commence à monter vers la roche.
La réflexion me plonge vite au fond de toute chose, et je vois le néant dans tout, si Dieu ne s’y trouve pas. » VI Le 20 mars. […] Je parle quand je veux à ce petit cahier ; je lui dis tout, pensées, peines, plaisirs, émotions, tout enfin, hormis ce qui ne peut se dire qu’à Dieu, et encore j’ai regret de ce que je laisse au fond du cœur. […] La mort est au fond de tout, et on creuse toujours comme qui cherche l’immortalité !
Le plaisir de lui voir l’air content, d’être à sa fête, et au fond de cette joie des serrements de cœur, et cette horrible vision des cercueils autour du salon, — posés sur ces tabourets longs et drapés à franges d’argent. […] Je m’enfonce en toutes ces choses, et quand je songe à tout ce que j’avais mis de bonheur dans un être qui n’est plus maintenant qu’en souvenir, j’en éprouve une inénarrable tristesse, et j’en apprends à ne faire fond sur aucune vie ni sur rien. […] Quant à moi, j’en pense ce que les pieux cénobites du quatorzième siècle pensèrent de l’Imitation, c’est qu’il y a des secrets dont Dieu est le confident ; j’en pense ce que les femmes du dix-septième siècle pensèrent de la correspondance de Mme de Sévigné, ce livre des cours, je veux dire que ce volume du Journal de Mlle de Guérin m’a paru une des plus touchantes révélations de l’âme humaine dans nos deux siècles : le dix-huitième, avec ses existences calmes, puissantes, recueillies dans la solitude de leurs châteaux, moitié rurales, moitié aristocratiques, au fond de leurs provinces ; le dix-neuvième, avec ses orages, ses renversements, ses dépouillements, ses honorables et glorieuses misères, demandant aux lettres ce que la féodalité ne lui donnait plus : le gentilhomme sans épée et sans éperons enseignant les petits enfants pour un morceau de pain dans les mansardes d’un collège de la capitale, et mourant jeune de misère après avoir coûté au dévouement d’une sœur accomplie sa dot, son mariage, son bonheur ; et cette sœur, à la fois souffrante et heureuse de ce sacrifice, vivant isolée dans les ruines du château paternel, développant son génie natal et confidentiel dans des soliloques avec elle-même ou avec son Dieu, et mourant de tristesse quand son frère et son père lui manquent : Walter Scott seul aurait pu peindre une existence aussi romanesque dans quelque masure d’Écosse, quand les fidèles adorateurs des Stuarts sont vaincus, mais non ralliés à la révolution triomphante.
Sur ce fond d’expression analytique, grise et sèche, s’appliquent des paysages tournés en états d’âme et des couplets lyriques où l’émotion intime déborde : Senancour à son heure, entre Rousseau et Lamartine, a fait un « lac ». […] Cinq-Murs (1826) a bien vieilli, et poussé au mélodrame : les caractères historiques, dont les originaux sont trop voisins et trop connus, sont d’une fausseté choquante ; les intentions sentimentales et philosophiques jurent avec la date et le costume du sujet ; les inventions pathétiques sont outrées et grimaçantes ; le style est trop appliqué et ronflant, de qualité médiocre au fond sous l’éclat travaillé des images. […] Stendhal va plus au fond des choses.
Vérité inutile et comme non avenue, celle qui demeure au fond d’un puits, fût-ce un puits de science ! […] Sully Prudhomme, dans son noble poème de la Justice, a condensé en un dialogue tragique l’antagonisme de ces deux voix que l’homme moderne entend retentir au fond de sa conscience ; l’une est celle de la science, implacable et sereine, qui renverse sans pitié les vieilles idoles, les croyances chères à l’enfance des peuples, les préjugés enracinés par une longue accoutumance ; l’autre est celle du cœur qui proteste, qui tantôt a peur de ce bouleversement, s’attendrit sur les choses détruites, proclame l’inutilité du savoir humain et conseille au chercheur de s’endormir dans le plaisir et l’insouciance, tantôt se révolte, taxe la science d’impie, l’accable d’invectives passionnées, l’accuse de désenchanter la vie, d’anéantir le bonheur et la vertu. […] Il me paraît que l’imagination, prisonnière sous ce dôme étouffant, doit rendre grâce aux savants qui ont, en le brisant, ouvert à son vol ébloui l’abîme de l’azur, cet Océan sans fond et sans rivages.
Chacun des traits simples de notre plan représente une différence de niveau, plusieurs marches ; on sait que l’orchestre s’abaisse par degrés depuis les violons jusqu’aux trombones et timbales : la tête d’un homme debout au fond de l’orchestre, près des timbales, arrive au niveau du pied des altos, qui est lui-même de quelques marches plus bas que les violons. […] Deux symphonies de Robert Schumann, celles en ut majeur (1866, et en ré mineur (1841-1851) contiennent également un thème principal, qui, posé dès l’introduction lente, réapparaît dans la plupart des morceaux suivants, mais d’une manière peu intéressante, et au fond sans modifications véritables, si bien que l’éloge excessif de l’érudit docteur Richard Pohl : « ici Schumann entre véritablement dans une voie nouvelle »61 nous surprend parce qu’il a été l’un des premiers à approfondir et célébrer le génie de Berlioz. — à moins qu’il n’ait voulu dire : en ce qui concerne la musique allemande. […] Sous les mots, le fond émotionnel de l’âme, celui seul que comportent ces mots.