Les définitions et les démonstrations de géométrie, quand elles sont bien faites, sont une preuve que la brièveté est plus amie qu’ennemie de la clarté. […] L’intérêt vif que les Athéniens prenaient à l’objet de ces harangues, la déclamation sublime de Démosthène sur laquelle il nous est resté le témoignage d’Eschine même son ennemi, enfin l’usage sans doute inimitable qu’il faisait de sa langue pour la propriété des termes et pour le nombre oratoire, tout ce mérite est ou entièrement ou presque entièrement perdu pour nous.
En 1846, considérant les républicains comme des utilitaires, ennemis de tout art, « bourreaux de Vénus et d’Apollon » il les avait désignés aux colères de la force armée, et il avouait que rien n’était plus doux à son cœur que de leur voir « crosser religieusement les omoplates102 ». […] À tout moment cette vision revient devant leurs yeux de la cruauté ou de la hideur des lois ou des choses éternelles ; ils en parlent avec insistance comme d’une obsession qui les hante : La Nature pour moi est ennemie… Ce qu’on appelle la nature m’apparaît comme un bourreau et un tortureur… Rien n’est moins poétique que la Nature206. […] MM. de Goncourt, à plusieurs reprises, et sans qu’ils s’en doutent peut-être, côtoient la singulière doctrine métaphysique qu’a développée Proudhon sur l’antithèse absolue de l’homme et de la nature ; s’ils n’assimilent pas ce dernier terme à la divinité, comme l’a fait l’auteur des Contradictions économiques, ils arrivent à peu près à une conclusion semblable, quand ils se déclarent gênés « devant la végétation des forêts, comme devant l’ennemi, devant l’œuvre de Dieu 208 ». […] Avant que les deux éléments ennemis eussent trouvé le terrain neutre où ils pouvaient se rencontrer et marcher de concert, chacun selon toute vraisemblance combattit pour son compte et refusa de se laisser absorber ; jusque dans les ouvrages les plus récents, en face du funèbre mystique qu’attire le nirvana, se dresse un impatient de l’existence immortelle, qui se révolte contre l’anéantissement, qui rêve parfois d’éternité, qui s’attriste quand il songe que ce qui fut son cœur et son cerveau est voué à s’engloutir inévitablement au sombre abîme final : … Tout cela, jeunesse, amour, joie et pensée, Chants de la mer et des forêts, souffles du ciel Emportant à plein vol l’Espérance insensée, Qu’est-ce que tout cela, qui n’est pas éternel 257 ? […] Leconte de Lisle ses ennemis littéraires.
Quant aux suffrages des Athéniens, un peuple ennemi de toute domination devoit craindre sur-tout la supériorité du mérite. […] Devant une place assiégée un officier françois fit proposer aux grenadiers une somme considérable pour celui qui le premier planteroit une fascine dans un fossé exposé à tout le feu des ennemis. […] Qu’avoit-il besoin de conquêtes, ce héros, l’ennemi des méchans, le vengeur des bons, le pacificateur de la terre & des mers ? Mais Alexandre, enclin dès l’enfance à la rapine, fut le desolateur des nations, le fléau de ses amis & de ses ennemis. […] Persuadez à ceux qui le servent qu’ils se perdent en le servant ; que ses ennemis sont leurs freres, & qu’il est leur bourreau commun.
… J’ai besoin, durant des mois et des mois, peut-être, d’endormir mes ennemis… Mes ennemis, dormez ! […] Qu’on ne croie pas, par ce qui va suivre, que je sois l’ennemi des femmes. […] C’est que tous les journaux, si divisés pour servir, je ne dis pas des causes, mais des intérêts privés différents et des ambitions ennemies, ne font plus qu’un seul journal, lorsqu’il s’agit les partis : la routine, la médiocrité, l’injustice et le mensonge.
Pour devenir tragiques, il faut qu’à nos yeux, les événements se rattachent à l’idée de la Mort, incessante destructrice de la Vie, à celle du Malheur, ennemi de l’existence souriante et bonne : il faut que nous ayons le sentiment de la destinée de souffrance à laquelle est vouée l’humanité tout entière, sentiment qui se traduit d’une façon si saisissante dans la tragédie antique sous l’image de la Fatalité, de l’Anankê, de la Nécessité, à laquelle nul de nous ne se peut soustraire. […] Ainsi donc nous voulons croire à notre amitié stellaire, quand bien même il nous faudrait être ennemis sur la terre15 ! […] — tous grands explorateurs dans le domaine du sublime, comme aussi du laid et de l’affreux, plus grands explorateurs dans les effets et dans l’exposition, dans les arts de l’étalage, ayant tous plus de talent que de génie, virtuoses jusqu’à la moelle, avec de mystérieux conduits vers tout ce qui séduit, attire, force et renverse, ennemis nés de la logique et de la ligne droite, épris de tout ce qui est étrange, exotique, contrefait, énorme, contradictoire ; antinomistes et révolutionnaires dans les mœurs, ambitieux et insatiables, sans équilibre et sans jouissance, tous enfin brisés et agenouillés devant la croix chrétienne ; en somme, une espèce d’hommes supérieurs, intrépides et téméraires, superbes et tyranniques, altiers et entraînants, qui devaient enseigner à leur siècle l’idée du surhomme ». […] Quoi qu’il advienne de leurs efforts, gardons-nous des jugements hâtifs et surtout des impressions pessimistes habituelles aux esprits chagrins, aux tempéraments rassis, ennemis de l’aventure.
* * * Nous ne sommes point l’ennemi des partis pris, et ne voulons point reprocher à M. […] S’acharnant contre eux en ennemi, il étale en pleine lumière leur hideur morale. […] Il n’a qu’un ennemi : le jargon ; qu’une passion : l’expression pure, la phrase exquise ; qu’un seul maître : l’usage… Il conserve pieusement, surveille, répare, dirige le langage noble ou familier ; il rapproche des exemples, écoute des sons, choisit entre les exceptions, s’arrête tendrement sur quelques gallicismes, puis, ayant bien travaillé, s’endort chaque soir, las, mais fort content de sa journée : il a formulé de belles règles 37.
— J’ai combattu dans vos camps ennemis. […] Nous ne nous en vantons pas parce que nous avons à Paris une foule d’ennemis qui se réjouiraient en disant : “Ils ont été en Italie pour s’amuser et ils ont le choléra ! […] Je ne sais pourquoi tu me demandes si nous sommes amis ou ennemis.
Talent très réel et très puissant et ironie pas mal féroce mais à part, l’auteur mérite tous les applaudissements des ennemis absolus (dont suis — comme on dirait en Moréas) des psychologues ennuyeux dont nous jouissons trop. […] Arthur Rimbaud Arthur Rimbaud naquit à Charleville (département des Ardennes) en 1854, d’un père officier d’infanterie, promu colonel devant l’ennemi, pendant la guerre franco-allemande de 1870, originaire de Lyon, et d’une mère ardennaise. […] A en croire d’autres qui sont des ennemis, n’en a pas qui veut et c’est un luxe de plus !
Une certaine lenteur de ton qui se confond ici dans la grâce décente, l’honnêteté du cœur intacte avec la malice enjouée de l’esprit, la nature prise à point, respirent dans ces pages aimables : le sens moral qui en ressort tendrait à tuer surtout le grand ennemi en nous, c’est-à-dire la vanité.
Le spectacle de tant de désertions politiques à l’ennemi par tant de serviteurs des Bourbons déchus me soulevait le cœur ; je ne voulus pas les imiter : je voyageai en Asie pour voir de plus loin ou pour détourner mes yeux de tant de bassesses.
Les cygnes, voyant l’ennemi, se hâtèrent et en se hâtant firent un effet de poitrail utile au petit pêcheur ; l’eau devant les cygnes reflua, et l’une de ces molles ondulations concentriques poussa doucement la brioche vers la baguette de l’enfant.
Il était alors ambassadeur de Sardaigne en Russie, espèce d’oracle versatile caché dans les neiges du Nord, tantôt ennemi de Bonaparte, tantôt le déclarant l’homme providentiel, et nouant une intrigue avec son ami le duc de Rovigo (Savary) pour se faire inviter à une entrevue confidentielle avec le chef de la France.
Si ce poète et ce polisseur de syllabes a pu composer un livre qui fait date dans l’histoire du roman par plus de vérité qu’on n’en trouvait chez Balzac, surtout par une vérité plus constante, ce n’était sûrement pas en vertu d’une théorie expresse (pessimisme foncier et religion du style, voilà Flaubert : en critique, il avait fort peu d’idées claires) — mais c’était un peu « pour brider sa fantaisie4 » après la débauche de la Tentation de saint Antoine ; c’était aussi parce qu’il voyait dans la description exacte et ciselée des platitudes une manière d’ironie féroce où se délectait cet ennemi des philistins ; c’est enfin qu’amoureux avant tout d’une langue précise et concrète, il sentait que les détails de la vie extérieure appelaient d’eux-mêmes et lui suggéraient la forme arrêtée et tout en relief où triomphait sa virtuosité laborieuse.
Goethe cependant l’avait précédé de bien des années ; mais Goethe, dans une vie plus calme, se fit une religion de l’art, et l’auteur de Werther et de Faust, devenu un demi-dieu pour l’Allemagne, honoré des faveurs des princes, visité par les philosophes, encensé par les poètes, par les musiciens, par les peintres, par tout le monde, disparut pour laisser voir un grand artiste qui paraissait heureux, et qui, dans toute la plénitude de sa vie, au lieu de reproduire la pensée de son siècle, s’amusait à chercher curieusement l’inspiration des âges écoulés ; tandis que Byron, aux prises avec les ardentes passions de son cœur et les doutes effrayants de son esprit, en butte à la morale pédante de l’aristocratie et du protestantisme de son pays, blessé dans ses affections les plus intimes, exilé de son île, parce que son île antilibérale, antiphilosophique, antipoétique, ne pouvait ni l’estimer comme homme, ni le comprendre comme poète, menant sa vie errante de pays en pays, cherchant le souvenir des ruines, voulant vivre de lumière, de lumière éclatante, et se rejetant dans la nature comme autrefois Rousseau, fut franchement philosophe toute sa vie, ennemi des prêtres, censeur des aristocrates, admirateur de Voltaire et de Napoléon ; toujours actif, toujours en tête de son siècle, mais toujours malheureux, agité comme d’une tempête perpétuelle, en sorte qu’en lui l’homme et le poète se confondent, que sa vie intime répond à ses ouvrages ; ce qui fait de lui le type de la poésie de notre âge.
Je suis parmi vous comme un prisonnier chez un ennemi puissant et victorieux.
Elle n’a manqué ni de partisans ni d’ennemis.
Oui, huit mois pendant lesquels il faut soulever tout un monde… puis au bout de cela, ne pas savoir, si ça y est ou si ça n’y est pas… Ne pas le savoir pendant bien longtemps… car il faut cinq ou six ans, pour avoir la certitude que le volume sorti de vous, prend décidément sa place dans votre œuvre. » Mercredi 19 avril Ce soir, au fumoir de la princesse, Augier raconte ceci : Il se trouvait à l’Académie, à côté de Villemain, son ennemi personnel.
L’homme pourrait faire un pacte avec son sort ; il pourrait finir peut-être par s’accommoder avec son néant ; il connaîtrait son ennemi, il le verrait en face ; la mort serait toujours un abîme, mais elle ne serait pas un piège ; en s’en rapprochant pas à pas, on pourrait s’y accoutumer ; en lui enlevant son imprévu, la nature lui enlèverait la moitié de ses terreurs.
Du reste, que les espèces ainsi supplantées par d’autres, mieux adaptées aux conditions locales, appartiennent à la même classe ou à des classes distinctes, néanmoins il se peut toujours que quelques-uns des vaincus survivent et se perpétuent longtemps, grâce à des habitudes particulières, ou grâce à ce qu’ils habitent quelque contrée distante et isolée où ils ont échappé à la concurrence de leurs ennemis.
Une plante, par exemple, aura trouvé le sol le plus convenable pour elle, plus complétement occupé par des plantes distinctes, dans une île que dans une autre, et elle se sera trouvée exposée aux attaques d’ennemis un peu différents ; il aura dû s’ensuivre que, cette plante venant à varier, la sélection naturelle aura favorisé dans chaque île des variétés différentes.
Il a lu dans ses romans que le chevalier rencontre des géants ennemis sur son chemin.
Alors on jette pêlemêle sous la hache du bourreau les ennemis malgré leur faiblesse, les amis malgré leur dévouement, Vergniaud, Condorcet, Camille Desmoulins, Danton, Mme Roland, après Louis XVI et Marie-Antoinette.
Il porte à son tour la guerre en pays ennemi, et fait aux théories adverses les plus sérieuses blessures. […] Déjà l’on voit deux philosophies de caractère très-différent se dessiner l’une en face de l’autre et renouveler, comme on l’a vu à toutes les époques, l’éternelle opposition de l’empirisme et de l’idéalisme : d’une part, une philosophie circonspecte à l’excès, ennemie de toute spéculation métaphysique, n’admettant que les faits constatés, avec leurs rapports, c’est-à-dire leurs lois ; de l’autre, une philosophie idéaliste, ne pouvant consentir à trouver dans les phénomènes les derniers éléments de l’être et de la vie, pénétrant au-delà pour y découvrir la cause, la substance, l’infini, — l’une tout imprégnée de l’esprit des sciences positives, n’admettant que ce qui est démontré et vérifié, l’autre inspirée des hardiesses de l’esprit allemand, mais tempérée par les lumières et la mesure de l’esprit français, — l’une enfin à la recherche du positif, l’autre à la poursuite de l’idéal.
Nos devoirs sociaux visent la cohésion sociale ; bon gré mal gré, ils nous composent une attitude qui est celle de la discipline devant l’ennemi. […] Celle qu’ils prêchaient concernait avant tout Israël ; leur indignation contre l’injustice était la colère même de Jahveh contre son peuple désobéissant ou contre les ennemis de ce peuple élu.
Ainsi de la poésie et de la raison : elles se distinguent toujours, elles s’ignorent quelquefois, elles ne sont pas ennemies. […] Un correspondant m’écrit : « la raison a un ennemi irréconciliable, c’est le raisonnement ».
Il fut renvoyé à son père à Besançon ; mais d’actives liaisons avec les émigrés rentrants et avec les ennemis du Gouvernement en général le compromirent de nouveau.
Bref, onze régiments de cavalerie ennemie, cantonnés dans les onze capitaineries voisines de la capitale, et allant tous les matins au fourrage, ne feraient pas plus de dégâts Il ne faut pas s’étonner si, aux approches de ces repaires, on se dégoûte de la culture98.
Ajoutez à cela la plus grande sécurité : je ne me connais point d’ennemis, si ce n’est ceux que m’a faits l’envie.
Benjamin Constant, tous les tribuns, tous les publicistes, tous les pamphlétaires du temps, je m’y sentais presque en pays ennemi ; j’avais du goût pour les maîtres, aucun goût pour leur société.
Il agita sa queue, s’assit l’œil fixé sur mes ennemis, et prêt à s’élancer sur eux.
Il s’était voué de bonne heure à ce rôle de l’espérance et de l’activité dans les causes en apparence perdues ; il avait conspiré avec les flatteurs de la haute émigration en Suisse, en Russie, en Angleterre ; il s’était lié avec M. de Blacas, homme plus sérieux, mais moins aimable que lui ; Louis XVIII l’aimait pour sa légèreté, il tenait tête à ce monarque en matière classique et épigrammatique ; il avait écrit en 1814 des brochures royalistes qui lui avaient fait un nom d’homme d’État de demi-jour, à l’époque où une brochure paraissait un événement ; il n’était point ennemi des transactions avec la révolution pacifiée ; il savait se proportionner aux choses et aux hommes ; il n’avait aucun préjugé, grande avance pour faire sa place et sa fortune ; mais il la mangeait à mesure qu’il la faisait.
Il doute des autres avec fureur ; repousse tous leurs projets comme des projets ennemis ; il doute de lui-même avec complaisance, comme des idées d’un ami imbécile. — On chercherait vainement chez Stirner autre chose qu’un tempérament de négateur.
Vous n’avez pas, Messieurs, de plus dangereux ennemis que ces cauteleux adversaires à demi-mot.
Avant d’avoir écrit un paragraphe de ses œuvres épiques ou lyriques, il connaissait d’un Carthaginois, l’habillement, l’armure, la demeure, le luxe, la nourriture ; ses fêtes, ses rites, sa politique, les institutions de sa ville, les alliances, les peuplades ennemies, les hasards de son histoire et la légende de son origine.
Combats ton ennemi, qui prend en toi la forme du désir !
Mes meilleurs ennemis me conseillent d’en faire.
La stérilité est, dit-on, le plus grand ennemi des horticulteurs.
Je sais frapper l’ennemi, susciter des secours, souffrir le froid et le chaud, coucher sur la dure, supporter à la fois la fatigue et la faim et faire ce qu’ont fait nos ancêtres pour illustrer le nom romain. » Un jeune militaire russe parlerait ainsi.
L’endroit où l’on décidait du sort des nations et des rois, où des courtisans venaient en tremblant étudier le visage de leur maître, où trois brigands peut-être échangèrent entre eux les têtes de leurs amis, de leurs pères, de leurs mères contre les têtes de leurs ennemis, qu’est-ce à présent ?
Tout ce qui est nouveau lui est suspect et ennemi. […] Vous verrez le reste dans son livre, notamment avec quelle excellence d’arguments il redresse, touchant Aristophane, les théories de l’allemand Schlegel, qui fut bien le plus sot des hommes à idées générales ; et comment les comédies d’Aristophane ne sont bien, au fond, que des pamphlets, d’une composition secrètement assez serrée, et qui courent à un but déterminé malgré les écarts apparents ; mais, au reste, pamphlets de poète, tout débordants d’imagination, féconds en hyperboles et en métaphores réalisées et développées, c’est-à-dire en symboles… Oui, l’aristocrate à tête étroite, l’ennemi de Périclès, de Phidias, de Socrate et d’Euripide, est un poète considérable et, très souvent, un délicieux écrivain. […] Il lui dit : « Je suis un vaincu, un proscrit, un damné, mais ayez pitié de moi, je vous aime. » Elle répond, offensée : « Monsieur, j’ai un mari. » Il répond : « Je suis un malheureux, il faut m’aimer. » Alors elle lui dit : « Venez à la cour : cela ennuiera le duc de Guise et fera plaisir à la reine-mère qui, je le sais, n’est point votre ennemie. » Et c’est la seconde scène. […] Car la pièce, comme vous savez, avait des ennemis, même avant d’être connue. […] Sa droiture est célèbre : ses ennemis politiques eux-mêmes la reconnaissent.
En face de l’œuvre qu’il a accomplie, Degas se dresse en ennemi : jamais elle ne rencontrera de plus redoutable contradicteur. […] La pensée dans l’absolu — une pensée qui se dévide sans égard ni au lieu ni au temps, ni à la qualité de l’auditoire — est l’ennemie née du Dialogue où la règle consiste, non pas à partir d’une pensée, mais bien au contraire à y arriver, et comme à y arriver malgré soi. […] Toujours par ceux-là en effet le présent est visualisé comme l’ennemi ; non point de propos délibéré (ils ne souhaitent rien tant au contraire que d’être subjugués, vaincus par lui) mais en vertu du monotone, du cyclique retour de la déception79 : jamais le présent ne s’offre à eux que comme la plus mince pellicule aussitôt traversée par l’esprit : dépourvu de cette autorité que pourrait seule lui conférer l’épaisseur, il se défait dès qu’ils le touchent. […] Que semblable application puisse devenir pour la critique un instrument des plus efficaces, c’est ce que prouvent ces quelques passages sur lesquels je veux clore. « Dans Hamlet, plus visible qu’en n’importe quelle autre de ses pièces, ce souci de montrer que tout drame d’intelligence n’a pas d’aboutissement, a conduit Shakespeare à choisir une catastrophe sans objetdt ». « Par la bouche même de Hamlet, il cherche jusqu’au bout à justifier un caractère tellement humain qu’il ne le paraît plusdu ». « Le seul instant où cet ennemi du spontané sorte de son caractère est celui où il tue Polonius, piteux roi du discours et maître ès lieux communs. […] si de cette question nous tenions la réponse, nous serions bien près de lui apporter le seul hommage qu’admettait sa nature — à tel point ennemie de toute complaisance — : une compréhension sans défaut. « Simplement savoir le vrai sur mon compte, savoir bien au juste qui est-ce que moiig ».
Chacun se cantonne dans ses droits, se retranche derrière les griefs qu’il a ou croit avoir contre l’autre ; et nul ne fera le premier pas sur le terrain adverse, ni n’essaiera de quitter son point de vue habituel afin d’adopter pour un instant celui de l’ennemi et de s’entendre, chacun regardant tour à tour par les deux bouts de la lorgnette, sur les dimensions réelles de l’objet du litige. […] Pour les ennemis de l’ancien régime, qui seraient tentés d’approuver le jeu de massacre auquel se livre M. […] Et il arrive ceci de curieux que l’ouvrage du disciple de Taine, de l’ennemi de Bergson, fournit la plus éclatante confirmation du diagnostic bergsonien.
Après le 9 thermidor, dans ce second moment de réaction, Johannot est incarcéré de nouveau, et peu après, sous prétexte de le transférer, on le livre en proie aux fureurs ennemies : il tombe dans la rue assassiné de dix-sept coups de poignard et de pistolet par les compagnies dites de Jésus et du Soleil.
Et pour tout dire, quand même l’Empire, au lieu de succomber sous l’effort de ses ennemis et d’être en proie à une longue invasion, eût continué à exister ou se fût dissous par la seule réaction des éléments contenus en son propre sein, le latin ne s’en serait pas moins transformé en langues romanes avec tous les caractères qu’elles possèdent.
À ce titre, la femme a son cortège personnel de solliciteurs et de protégés, et, comme son mari, ses amis, ses ennemis, ses ambitions, ses mécomptes et ses rancunes propres ; rien de plus efficace pour disjoindre un ménage que cette ressemblance des occupations et cette distinction des intérêts. — Ainsi relâché, le lien finit par se rompre sous l’ascendant de l’opinion. « Il est de bon air de ne pas vivre ensemble », de s’accorder mutuellement toute tolérance, d’être tout entier au monde.
« Wolfgang Mozart, dit d’Aponte, que j’eus l’occasion de rencontrer enfin à Vienne chez le baron de Vetzlar, son grand partisan et son ami ; Wolfgang Mozart, quoique doué par la nature d’un génie musical supérieur peut-être à tous les compositeurs du monde passé, présent et futur, n’avait jamais pu encore faire éclater son divin génie à Vienne, par suite des cabales envieuses de ses ennemis ; il y demeurait obscur et méconnu, semblable à une pierre précieuse qui, enfouie dans les entrailles de la terre, y dérobe le secret de sa splendeur.
« S’il est ami ou ennemi, elle ne le sait pas ; la terreur et l’espérance agitent son cœur serré par le doute ; elle attend, immobile, la fin de cette aventure, sans ébranler de sa respiration l’air qui l’environne ; le chevalier se couche à demi sur le bord incliné du ruisseau, passe un de ses bras sous sa tête où s’appuie sa joue, et s’abîme tellement dans une profonde rêverie qu’il paraît transformé en une insensible pierre.
Ses foudres n’étaient que de l’électricité ; ses imprécations contre les ennemis de son mari n’étaient que de la colère ; cela passait avec l’orage.
Un ennemi venait de s’élever contre le christianisme : c’était la philosophie.