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1002. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Crétineau-Joly » pp. 367-380

César, à dix ans de distance, faisait crucifier des pirates qui l’avaient empêché de dormir sur le vaisseau où il était prisonnier.

1003. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le docteur Revelière » pp. 381-394

La même communion au sang d’un Bourbon n’empêcha pas la Révolution de jeter l’immense Empereur à la porte de cette France qu’il avait gouvernée sans pouvoir la ressusciter en monarchie héréditaire, et, pour comble de honte, ce fut par la vieille main de ce Lafayette, retrouvé au bout de son règne et qu’il avait toujours méprisé, qu’elle l’y jeta, V Ainsi, Napoléon lui-même n’a rien pu contre la Révolution, et s’il n’a rien pu à son heure, qui pourra contre elle, à l’heure présente ?

1004. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « L’abbé Galiani »

À Naples, empêché par ses devoirs publics, il ne put l’écrire.

1005. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIV. M. Auguste Martin »

Oui, ce qui l’empêchait d’entrer, cette morale, dans les mœurs, c’est d’abord le vilain bambou, incompatible avec le droit humain !

1006. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Francis Lacombe »

Quelle raison empêcherait ici de se servir de l’expérience des siècles, puisqu’un seul entre tous, le xixe cherche sans la trouver une organisation du travail ?

1007. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Barthélemy Saint-Hilaire »

Sait-il bien exactement quel genre d’obstacles ont empêché les Arabes, avant et depuis l’Islam, d’être régénérés par une loi qui, humainement même, en laissant là le côté surnaturel de cette loi, était infiniment supérieure à celle qu’apportait Mahomet ?

1008. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Armand Hayem »

À cela l’histoire, qui ne rêve pas et qui même empêche de rêver, l’histoire répond par les sociétés qui meurent et les civilisations qui se déplacent, comme la mer qui avance là et recule ici sur ses rivages, et c’est, parce que tout finit, toujours tout à recommencer !

1009. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Maurice Bouchor »

Mais ces défauts, que j’explique, et que le devoir de la Critique était de signaler, n’empêcheront pas l’œuvre actuelle de Bouchor d’être ce qu’elle est, c’est à dire quelque chose d’un accent formidable, qui retentira dans le cœur de tous les nobles êtres qui ont encore le cœur poétique.

1010. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Corneille »

IV Mais voici l’accident qui empêche cette grandeur d’accabler nos âmes : c’est cet amour infortuné du grand Corneille.

1011. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre V. Des Grecs, et de leurs éloges funèbres en l’honneur des guerriers morts dans les combats. »

La beauté du climat, en développant leur imagination, leur donnait un caractère enthousiaste et sensible ; la liberté élevait leurs âmes ; l’égalité des citoyens leur faisait mettre un grand prix à l’opinion de tous les citoyens ; la loi, en permettant à chacun d’aspirer aux charges, et de décider des affaires de l’État, leur défendait de se mépriser eux-mêmes ; les arts vils, abandonnés à des mains esclaves, les empêchaient de se flétrir sous les travaux ; les exercices et les jeux les donnaient continuellement en spectacle les uns aux autres ; la multitude des petits États établissait des rivalités d’honneur entre les peuples ; enfin, les grands intérêts et les victoires leur donnaient ce sentiment d’élévation qui aspire à la renommée.

1012. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXV. Des éloges des gens de lettres et des savants. De quelques auteurs du seizième siècle qui en ont écrit parmi nous. »

Enfin des hommes qui honoraient de grandes places par de grandes lumières, tels que le cardinal d’Ossat et le président Brisson ; et ce Harlay, intrépide soutien des lois parmi les crimes79 ; et ce L’Hôpital, poète, jurisconsulte, législateur et grand homme, qui empêcha en France le fléau de l’inquisition, qui parlait d’humanité à Catherine de Médicis, et d’amour des peuples à Charles IX ; qui fut exclu du conseil, parce qu’il combattait l’injustice ; qui sacrifia sa dignité, parce qu’il ne pouvait plus être utile ; qui, à la Saint-Barthélemi, vit presque les poignards des assassins levés sur lui, et à qui d’autres satellites étant venus annoncer que la cour lui pardonnait : « Je ne croyais pas, dit-il d’un air calme, avoir rien fait dans ma vie qui méritât un pardon. » Voilà les noms les plus célèbres que l’on trouve dans les éloges de Sainte-Marthe.

1013. (1878) Leçons sur les phénomènes de la vie communs aux animaux et aux végétaux. Tome I (2e éd.)

On voit au contraire les actes vitaux avoir constamment pour condition des circonstances physico-chimiques externes, parfaitement déterminées et capables ou d’empêcher ou de permettre leur apparition. […] Il faut en outre que l’humidité n’empêche pas l’accès de l’air. […] Ces phénomènes caractérisant la destruction vitale étant empêchés, la création organique s’interrompt à son tour ; l’organisme perd les caractères de la vie. […] Il faut, d’après Hermann, à qui nous empruntons cette théorie, il faut détruire l’obstacle qui empêche l’oxygène de se combiner, enlever la clavette qui retient le poids de l’horloge, détruire, en un mot, l’obstacle qui empêche la force de tension de devenir force vive, travail ; il doit exister des forces de dégagement. […] Il montrait que la fibre nerveuse était composée d’articles placés bout à bout, véritables cellules, que leur longueur considérable (1 millimètre chez les mammifères adultes) avait empêché de reconnaître jusque-là au microscope.

1014. (1930) Le roman français pp. 1-197

Et l’on a retrouvé, dans ses papiers, le titre de cinquante et un autres, que la mort seule, non pas l’affaiblissement de son imagination ni de son génie, l’empêcha d’écrire. […] On peut observer que c’est peut-être ce soin du style qui a empêché ces romans de Gautier d’atteindre à la popularité des Trois Mousquetaires de Dumas père, par exemple. […] La grâce, la légèreté — ni le scepticisme — empêcheront-elles d’en voir la profondeur — et la tendance ? […] Elle ne se souciait que d’empêcher qu’un auteur révélât des choses qui pouvaient nuire à la sécurité ou au succès des armées. […] Du reste, cela ne les a pas empêchés de tenir tout seuls à Verdun et de gagner la guerre avec leurs alliés.

1015. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Littré. »

Un incident, une épaule qu’il se démit en piquant une tête dans une partie de natation, l’empêcha de se présenter à l’examen. […] À le voir passer si souvent tout près de l’éclat en l’évitant, et si en garde contre toute magie, même celle du langage, on ne peut s’empêcher de faire la comparaison de lui à tant d’autres, qui ont du talent, mais aussi la montre et l’emphase du talent. […] Le plus convaincu et le moins empressé des hommes, loin de prétendre imposer son opinion, il ne l’expose même pas et n’en dit mot, à moins qu’on ne la lui demande ; mais alors rien au monde ne l’empêchera de vous la dire entière et sincère.

1016. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (1re partie) » pp. 397-476

La métaphysique est le plus creux des romans quand on veut lui faire bâtir des systèmes surnaturels ; mais, quand on se borne à lui demander l’explication naturelle et rationnelle des faits dont nous sommes entourés et que notre légèreté nous empêche d’approfondir, la métaphysique n’est plus le roman du cœur ou de l’esprit, elle est la sibylle infaillible de la raison ; elle vous dit le mot de tout ; elle a la clef de tout ; elle ne vous mène pas bien loin, parce que, au-delà d’un certain nombre de pas dans l’inconnu, tout est mystère ; mais, ce petit nombre de pas dans l’inconnu, elle vous les fait faire avec sûreté, et, quand elle n’y voit plus clair, elle s’arrête et elle vous dit : Je ne sais pas. […] Quant au reste, c’étaient les mêmes toits en pente roide, couverts de lattes de bois mince comme des écailles d’ardoise, noircis par la pluie et bordés sur la corniche de grosses pierres lourdes pour empêcher la toiture de s’envoler aux vents. […] Enfin, derrière le rocher où s’assied le chanteur, une jeune mère, assise à distance, presse son nourrisson amoureusement entre sa joue et sa mamelle, comme pour l’empêcher de troubler le silence de l’auditoire en l’endormant.

1017. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

Il me serait difficile d’expliquer les motifs qui m’en ont empêché… Mes premiers essais dramatiques, ajoute-t-il, l’expliquent peut-être. […] Un jour que ce Vulpius avait à porter à Goethe les épreuves à corriger d’une de ses pièces, un surcroît d’affaires l’empêcha inopinément de remplir ce devoir lui-même ; il chargea une de ses filles de porter à sa place le manuscrit et l’épreuve d’imprimerie à l’auteur de Faust et de lui rapporter les corrections. […] Cependant cette décentralisation, fatale jusqu’ici à l’Italie, nuisible à l’Allemagne, n’empêche pas le génie germanique d’influer puissamment depuis quelques années sur la littérature nouvelle de l’Europe dans ce que l’on appelle romantisme, c’est-à-dire dans cette tendance heureusement novatrice du génie français, italien, britannique, à sortir de la servile imitation des anciens ; à émanciper nos langues en tutelle, et à les rendre enfin originales et libres comme la pensée spontanée du monde moderne ; dans le romantisme il y a une propension évidente à germaniser la littérature moderne.

1018. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (1re partie) » pp. 413-491

J’avais fait connaissance avec quelques jeunes seigneurs de Naples, mais sans me lier avec eux ; mon caractère assez sauvage ne me permettait pas de rechercher les autres, et cette sauvagerie, vivement empreinte sur mon visage, empêchait les autres de me rechercher à leur tour. […] Il craint un procès d’adultère et se croit ruiné s’il l’affronte ; il ne tarde pas à se glacer et revient encore à Turin, où il reste deux ans ; il devient le chevalier servant d’une dame qu’il n’estime pas et qu’il n’aime guère, puis il la quitte et se fait lier par son valet de chambre sur sa chaise pour s’empêcher d’aller la revoir ! […] On craignait en un mot que le partisan de 1745 ne retrouvât sa vigueur juvénile pour cette expédition d’un nouveau genre ; il fallait donc être en mesure d’empêcher un coup de main.

1019. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre V. Jean-Jacques Rousseau »

Il y a de l’inégalité dans la nature, mais elle n’empêche personne de satisfaire son appétit, elle ne dispense personne de travailler à le satisfaire : elle laisse tout le monde bon, libre, heureux. […] Voltaire réimprimait dans un de ses catéchismes la profession de foi du Vicaire savoyard : il y reconnaissait l’idée de sa religion ; et cela n’empêche pas qu’en fait, entre la religion de Voltaire et celle de Rousseau, il y a un monde. […] Je ne puis m’empêcher aussi d’estimer neuve et féconde la façon dont Rousseau a posé la question sociale : luxe et privation, richesse et misère, jouissance égoïste et travail pour autrui, tout cela dépendant d’un fait général, la propriété, voilà les deux termes du problème où Rousseau nous ramène constamment.

1020. (1922) Enquête : Le XIXe siècle est-il un grand siècle ? (Les Marges)

La vérité, c’est que pour courir les plus belles aventures, l’esprit a besoin d’un guide qui l’arrête au bord des précipices et l’empêche de s’égarer. […] N’empêche qu’après le xviie  siècle, c’est le xixe qui nous a donné les maîtres auxquels nous revenons toujours : Stendhal, Balzac, Vigny, Sainte-Beuve, Maurice de Guérin, Lacordaire, Baudelaire, Rimbaud. […] Supportable en poésie, ce manque extrême de mesure me fait juger sévèrement, et m’empêche d’aimer certains, et des plus réputés prosateurs de ce siècle.

1021. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre septième »

C’est faute de voir ce que le frein de la morale religieuse a empêché de mal, et pour n’avoir vu que ce qu’il n’en empêche pas, que l’homme en vient à lui préférer, comme règle des mœurs, les trompeuses lumières de la raison individuelle. […] Tout l’orgueil du dix-huitième siècle s’est ligué pour empêcher Vauvenargues de s’humilier.

1022. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IX »

Heureusement que cela n’a pu durer qu’une représentation, et que, somme toute, sous l’excitation des opposants, une justice fatale empêcha les faux Wagnériens d’achever leur énormité. […] Mais tâchons d’oublier qu’il est question d’un théâtre wagnérien à Paris ou autre part ; il sera temps d’en parler plus tard, si on ne parvient pas à l’empêcher. […] Il y en a deux seulement qui ont l’habitude de causer, de rire, et de se pousser d’amicales bourrades pendant les morceaux du concert : ils ont une fois empêché d’entendre la symphonie en la de Beethoven, où il y avait cependant des choses très agréables ; il est vrai que j’ai pu entendre, en revanche, quelques-unes de leurs réparties.

1023. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre cinquième. Genèse et action des principes d’identité et de raison suffisante. — Origines de notre structure intellectuelle »

Supposez qu’un animal ou une plante varient en couleur par l’effet de causes fortuites ; si la couleur nouvelle se trouve propre à cacher l’animal et à empêcher ses ennemis, de le dévorer, cet « heureux accident » opérera un triage, une sélection : il fera survivre les animaux ou les plantes qui auront eu la couleur la plus propice. […] Si on va plus au fond encore, toute action apparaît en nous comme un vouloir unique, tantôt favorisé, tantôt contrarié, celui du plus grand bien ; et c’est pourquoi nous ne pouvons-nous empêcher de projeter en toutes choses l’analogue du vouloir. […] Il ne dépend pas de nous de suspendre le cours de notre conscience, d’empêcher un état présent de suivre l’état antécédent et d’entraîner l’état subséquent.

1024. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1864 » pp. 173-235

Ce à quoi je n’ai pu m’empêcher de dire : « C’est vrai !  […] Elle cherchait, de sa main libre, à fermer une petite veste qu’elle portait par-dessus, à empêcher de trop voir dessous, sans toutefois la fermer tout à fait. […] * * * — Ni la vertu, ni l’honneur, ni la pureté, ne peuvent empêcher une femme d’être femme, d’avoir, renfermées en elle, les fantaisies et les tentations de son sexe.

1025. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1887 » pp. 165-228

Mardi 18 janvier Ce matin, Bourde du Temps, vient causer avec moi, pour faire un article sur ma pièce future de Germinie Lacerteux, sur sa construction par tableaux shakespeariens, sur mes idées relatives à l’acte, — l’acte qui claquemure, pour moi, le théâtre dans les vieilles formes, et l’empêche de se rapprocher du livre. […] Dîner chez Daudet, et départ avec le ménage pour la première de Numa Roumestan. « J’emporte, dit Daudet, en train de farfouiller dans ses poches de droite et de gauche, j’emporte de très forts cigares et de la morphine… Si je souffre trop… Léon me fera une piqûre… Oui je resterai, toute la soirée, dans le cabinet de Porel, où il y aura de la bière, et je ferai ma salle pour demain. » En voiture, comme Daudet me dit qu’il a fait mettre à Mounet un col droit, qui lui enlève son aspect de commis voyageur de la répétition, je ne puis m’empêcher de lui dire, que je m’étonne du manque absolu d’observation de ces gens, qui en ont autant besoin que nous, et que je ne peux comprendre, comment un acteur, appelé à jouer Numa Roumestan, n’a pas eu l’idée d’assister à une ou deux séances de la Chambre, ou du moins d’aller flâner à la porte, et de regarder un peu l’humanité représentative. […] Or, un jour qu’ils faisaient une grande course aux environs de Meudon, Bataille se laissait aller à lui dire, que son père était un alcoolique, qui s’était noyé dans une mare de purin, et lui demandait qu’il l’empêchât de boire, parce qu’il sentait qu’il mourrait dans de la m… Et pendant qu’il lui faisait ses confidences sur ses commencements de déraison, avec sur la tête un des trois chapeaux verts, l’oiseau du chapeau était si comiquement placé, et le faisait si macabrement drolatique, que Daudet partait d’un éclat de rire nerveux, qu’il ne pouvait arrêter.

1026. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — III. Le Poëme épique, ou l’Épopée. » pp. 275-353

Ne faudroit-il pas arrêter le cours de ces productions, les empêcher de se répandre dans l’état, avec plus de soin encore qu’on n’empêche l’entrée des marchandises de contrebande ? […] Il invite les magistrats, chargés du soin de la police, d’empêcher que les romans ne se répandent parmi nous, qu’ils ne nous soient apportés de tous le pays, d’Espagne, d’Angleterre, de Hollande, de Grèce, de Perse, du Malabar & du Japon.

1027. (1926) L’esprit contre la raison

Qu’il y ait des degrés dans la tricherie et des degrés dans la conscience qu’ils y apportent, voilà qui ne saurait nous leurrer, ni nous empêcher de dénoncer leur mensonge glorieux ou sournois comme un véritable crime contre l’esprit. […] Adjudant de l’intelligence, ses attributions l’empêchent de voir large, d’aller à l’essentiel, mais parce qu’il est trop facile de s’absorber dans des détails, la lutte injuste entre elle et l’esprit ne cesse de se poursuivre. […] Et même ceux qui, trop faibles pour accepter la redoutable liberté offerte, préfèrent continuer à vivre dans le petit fromage de la tradition ne peuvent s’empêcher, parmi toutes les œuvres d’aujourd’hui, de préférer celles qui expriment le plus parfaitement la nécessité de libération.

1028. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IX : Insuffisance des documents géologiques »

Conséquemment, des formations riches en fossiles, d’une étendue et d’une épaisseur suffisantes pour résister aux dégradations qui ont dû accompagner leur période subséquente d’émersion, peuvent s’être déposées sur de vastes régions maritimes pendant leurs périodes d’affaissement ; mais seulement dans les lieux où la vitesse d’accumulation du sédiment était suffisante pour contre-balancer la vitesse d’affaissement du fond, et empêcher que la profondeur des eaux ne s’accrût, en même temps que pour enfouir et conserver les débris organiques avant qu’ils aient eu le temps de se désagréger. […] Mais il me semble que d’insurmontables difficultés nous empêchent d’arriver à aucune conclusion certaine sur ce point. […] Mais nous ne pouvons nous empêcher de nous exagérer continuellement à nous-mêmes la richesse de nos archives géologiques, et nous concluons faussement de ce qu’on n’a encore trouvé aucun représentant de certains genres ou familles au-dessous de certaines formations, que ces familles ou ces genres n’existaient pas encore.

1029. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

Mais son goût épuré pour les livres rares, lequel avait l’ardeur d’une passion, ne l’empêcha pas d’être le commerçant le plus rassis et le plus positif. […] Lorsqu’on arrivera aux détails personnels de l’histoire, Charles IX, Catherine de Médicis et le cardinal de Lorraine prendront chacun leur part dans ce conseil suprême qui précéda une exécution impossible à empêcher, et dont la Haine a fait plus tard un guet-apens ; mais les hommes qui ont le sentiment des nécessités politiques ne s’abaisseront jamais à reprocher à ces trois têtes, jusqu’à présent maudites, d’avoir voulu transformer un coup de peuple en coup d’État. […] … Les matérialistes des vieilles civilisations les magnifient parce qu’elles filent des suaires brodés d’or et de pourpre aux nations sur le bord de leur tombe ; — mais la moindre vertu morale les empêcherait de s’y coucher !

1030. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Être un bon académicien, cela n’empêche point le monde d’être mauvais et la mort bienfaisante, mais cela aide à passer le temps. […] Je ne dis point que cela nous empêche d’être malades. […] Mais vos nobles artifices ne vous empêchent pas d’être profondément sincère. […] Je ne puis m’empêcher d’en copier pour vous les dernières lignes. […] Là est son salut, et ce qui l’empêche de perdre pied.

1031. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Rien n’empêche, au reste, de rectifier ces notes. […] L’auteur avait beau être marguillier et saint homme : il ne put s’empêcher d’y aller voir. […] Je n’ai pu m’empêcher de parcourir de nouveau cette baroque comédie des Visionnaire, que j’ai toujours aimée. […] Mais, si ça ne suffît pas, ça n’empêche pas non plus. […] Puis, comme cela ne les empêche pas de maintenir, — oh !

1032. (1883) Le roman naturaliste

Un scrupule de la même nature m’a également empêché d’atténuer, dans cette nouvelle édition, quelques vivacités de plume, inévitables, on le sait, dans l’entraînement de la polémique. […] Quelques épisodes parasites, — il y en a plusieurs, — n’empêchent pas qu il y ait dans les Rois en exil ce qu’on regrettait de ne trouver ni dans le Nabab, ni surtout dans Jack, à savoir un vrai drame. […] Et quand la prose de ses feuilletons ou de ses études serait encore plus froide et plus embarrassée qu’elle n’est, cela n’empêcherait pas qu’il pût avoir, malgré tout, le coup d’œil aussi juste qu’il a la main hésitante, et la pensée même aussi haute ou profonde qu’il a le style plat. […] son spiritualisme l’aurait-il empêchée de « tenir admirablement sa caisse ?  […] Et ceci : « Au milieu des confidences les plus intimes… on découvre chez l’autre ou dans soi-même des précipices ou des fanges qui empêchent de poursuivre.

1033. (1922) Gustave Flaubert

Cela ne l’empêche pas de se voir à ses jours sous la figure de Binet. […] Cela n’empêche pas que Flaubert ne pense aux auteurs de romans historiques que pour s’éloigner d’eux et faire autre chose. […] Ce qui n’empêche pas Flaubert d’écrire, et comme nous le comprenons ! […] Son éternel souci du gain l’empêchait d’avoir cette prudence que donnent des ambitions plus hautes. […] « Il était empêché d’ailleurs par une sorte de crainte religieuse.

1034. (1929) La société des grands esprits

Cela ne l’empêche pas de représenter la solide notion d’une vérité et d’une beauté rationnelles et objectives. […] Spinoza refusa une chaire de philosophie à Heidelberg, parce que cela l’eût empêché de travailler. […] L’admiration et les flatteries réciproques n’empêchaient pas une incompatibilité d’humeur, qui se révéla dès la seconde entrevue, en novembre 1740. […] Cela ne l’a pas empêché de dégager objectivement la poésie du mysticisme chrétien, dans le finale du second Faust. […] Mais, comme il l’a indiqué lui-même, il y a les faits et il y a l’interprétation des faits : les théories sont sujettes à controverse, mais n’empêchent pas l’exactitude.

1035. (1893) Impressions de théâtre. Septième série

Il reprendra donc sa femme ; cela ne l’empêchera point, bien entendu, de garder son amie ; et tout le monde sera content. […] Elle peut empêcher une petite princesse du pays bleu d’offenser l’amour. […] Et pourquoi encore un homme fait-il et ne peut-il s’empêcher de faire des choses qu’il ne veut pas et dont il a même horreur ? […] J’admettrais fort bien qu’elle ne pût aimer Darlot, pas même d’une affection paisiblement conjugale, si ce qui l’empêche de l’aimer nous eût été rendu sensible. […] Joignez que la présence, dans l’hôtel, du père de Régine eût dû empêcher Nohan de conclure aussi hâtivement.

1036. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

» Mais cela n’empêche point M.  […] Pour l’empêcher de courir, elle a fermé la porte à clef et mis la clef dans sa poche. […] qui l’en empêche ? […] Il y en a partout ; ils se déroulent sans interruption, en monologues et en tirades ; il y en a tant qu’ils empêchent de voir le drame comme les arbres empêchent de voir la forêt. […] Oui, je sais, c’est pour l’empêcher d’être parricide qu’elle lui raconte son histoire.

1037. (1863) Causeries parisiennes. Première série pp. -419

Ambitieuse pour sa fille qu’elle vantait partout bruyamment, sans être retenue par cette pudeur du cœur qui empêche les délicats de louer ce qui leur tient de trop près, elle passait sa vie à lui préparer des triomphes de salon et des ovations théâtrales. […] Il y avait, du reste, en elle un sentiment toujours vigilant de raillerie qui devait l’empêcher, dans toutes les situations, de s’élever à une grande hauteur poétique. […] Il semble que l’éclat qui les environne empêche de les bien voir, et que, lorsqu’ils comparaissent au tribunal de la critique, escortés de leurs œuvres passées, ils se trouvent toujours en présence de juges prévenus. […] Cette corroboration administrative, venant en aide aux principes les plus élémentaires du droit, étonnerait bien dans certains pays voisins, ce qui n’empêche pas qu’elle n’ait été d’un excellent effet chez nous. […] Et quand cela serait, qu’est-ce qui empêche M. 

1038. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Ce qui n’empêche pas qu’ils n’admirent nullement la prose de Chateaubriand. […] On ne peut s’empêcher de sourire en voyant les contemporains de Sainte-Beuve s’effaroucher de son audace. […] Etre un artiste n’empêche pas d’être un critique, pourvu qu’on soit artiste de talent. […] Elle ne peut s’empêcher de déplorer « l’étrange vie qu’elle mène ». […] Comment s’empêcher de la plaindre ?

1039. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

Les tambours, eux aussi, ont la même spécialité, ce qui ne les empêche pas, à l’occasion, d’enthousiasmer singulièrement les hommes. […] Un ordre du conseil empêcha leur départ !!! […] Jusqu’ici j’avais cru de bonne foi, je vous jure, qu’il n’y avait au monde qu’un seul homme (mon estime pour lui m’empêche de le nommer) qui regardât M.  […] Cela ne m’empêche pas d’espérer que j’aurai raison de M.  […] les Franc-Comtois qui s’en occupent ne sont, à son avis, que des charlatans, ce qui ne l’empêche pas de se complaire, dit-il, à les encourager, parce qu’il aime la jeunesse ; bien qu’au fond il se soucie de tout cela comme du temps qu’il faisait hier.

1040. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite et fin). »

Il nous a dépeint de la manière la plus énergique et la plus gaie tous les embarras que cela lui causait, et les inquiétudes qu’il ne pouvait s’empêcher d’avoir. […] Il paraissait moins indigné et moins affecté de la cabale indécente qui avait failli empêcher de représenter sa pièce jusqu’à la fin, qu’il n’était touché des témoignages d’intérêt et d’attachement que lui avaient donnés les autres auteurs tragiques, Chénier, Legouvé, Lemercier, Arnault.

1041. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. (Suite et fin.) »

je ne puis m’empêcher de comparer leur destinée à la nôtre, à celle des hommes ! […] On ne peut s’empêcher, en lisant La Mothe-Le-Vayer, de lui donner raison en général, quand il s’élève avec une franchise gauloise contre la contrainte servile qu’on voudrait imposer à tout écrivain ; il s’indigne de ces subtilités et de ces enfantillages, et comme il est trop poli pour dire en français ce qu’il pense, il se couvre à ce propos du latin de Cicéron.

1042. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Mme Valmore ne peut s’empêcher d’y applaudir ; elle ne se raisonne pas, elle suit son élan, elle sent à la manière du peuple ; elle a, je l’ai dit, l’âme populaire. […] Les préoccupations politiques et sociales ne vous empêchent pas de vous intéresser à une âme vibrante que la pauvreté et les misères de la vie ne purent abattre. — Il fallait également pouvoir faire entrer dans un journal une étude d’un relief si fin.

1043. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [III] »

À ce mouvement, à ces formes, à ces rimes inusitées jusqu’alors en poésie française, on est transporté par-delà, et l’on se prend à redire involontairement avec Lamartine dans ces stances de la première pièce de ses premières Méditations : Là je m’enivrerais à la source où j’aspire ; Là je retrouverais et l’espoir et l’amour, Et ce bien idéal que toute âme désire, Et qui n’a pas de nom au terrestre séjour… Du Bellay, gêné et comme empêché dès le début, n’a donné que la note : Que songes-tu, mon Âme emprisonnée ? […] qui en avoit lu la plus grand’part m’avoit commandé de sa propre bouche d’en faire un recueil et les faire bien et correctement imprimer113, je les baillai à un imprimeur sans autrement les revoir, ne pensant qu’il y eût chose qui dût offenser personne, et aussi que les affaires où de ce temps-là j’étois ordinairement empêché pour votre service ne me donnoient beaucoup de loisir de songer en telles rêveries, lesquelles toutefois je n’ai encore entendu avoir été ici prises en mauvaise part, ains y avoir été bien reçues des plus notables et signalés personnages de ce royaume, dont me suffira pour cette heure alléguer le témoignage de M. le chancelier Olivier, personnage tel que vous-même connoissez : car ayant reçu par les mains de M. de Morel un semblable livre que celui qu’on vous a envoyé, ne se contenta de le louer de bouche, mais encore me fit cette faveur de l’honorer par écrit en une Épître latine qu’il en écrivit audit de Morel.

1044. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

En les rapprochant des événements récents (et on ne peut s’empêcher de le faire en voyant les mêmes intérêts aux mains, les mêmes guerres recrudescentes, et jusqu’aux mêmes devises sur les drapeaux), on apprend combien la vieille plaie a duré et s’est aigrie, combien, à plus de quarante ans de distance, on a peu gagné de remèdes par cette science sociale tant vantée : on rentre dans l’humilité alors, de se voir si médiocrement avancé, bien que sous l’invocation perpétuelle de ce dieu Progrès que de toutes parts on inaugure77. […] j’irais à l’échafaud, que je ne pourrais m’empêcher de juger encore les amis qui m’accompagneraient. » C’est ce qu’a fait Mme Roland.

1045. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « François Ier, poëte. Poésies et correspondance recueillies et publiées par M. Aimé Champollion-Figeac, 1 vol. in-4°, Paris, 1847. »

Le dizain du prince à certainement de quoi lutter en grâce avec celui de Marot ; on ne peut toutefois s’empêcher de remarquer que, dans le Recueil, l’un est bien voisin de l’autre ; et, en général, quand on trouve réunis un certain nombre de morceaux qu’il faut rapporter à Saint-Gelais ou à Marot, c’est presque toujours aux environs de ces endroits-là que se rencontrent aussi les petites pièces du roi qui peuvent passer pour les meilleures. […] L’épitaphe d’Agnès Sorel est connue ; rien n’empêche de croire à cette improvisation de cinq vers, et de nouveaux témoignages recueillis par M. 

1046. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXIXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (2e partie) » pp. 5-63

Le bruit de cette bataille empêcha la France de ressentir la perte de son grand écrivain. […] On ne peut s’empêcher, malgré tout le talent déployé, de plaindre l’un, et de chérir l’autre.

1047. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Jouissant de la confiance la plus entière du pontife de Rome, Innocent VIII, il rendit son nom illustre, et lui donna la plus grande influence dans les affaires de l’Italie ; mais, convaincu d’ailleurs que l’agrandissement de l’un quelconque des États qui avoisinaient la république ne pouvait que devenir funeste à lui-même et à sa patrie, il employa tous ses efforts à maintenir entre les puissances de l’Italie un équilibre si parfait, que la balance ne pût pencher en faveur d’aucune d’elles en particulier : ce qui ne pouvait se faire qu’en s’appliquant à conserver la paix entre elles, et en portant la plus scrupuleuse attention sur tous les événements, les moins importants en apparence. » On ne peut s’empêcher de regretter que ces jours de prospérité aient été de si courte durée. […] Trois assassins conjurés pénétrèrent dans la salle où il soupait : le premier le blessa au visage ; il se jeta sous la table ; le second l’y perça de son épée ; il se releva encore pour s’enfuir par la porte ; le troisième l’en empêcha par un dernier coup mortel.

1048. (1824) Observations sur la tragédie romantique pp. 5-40

C’est évidemment l’intérêt public qui exige ces réticences ; et nous comprenons bien, qu’on a dû, par égard pour quiconque n’est pas français, empêcher Inès de dire à son époux : Contre les étrangers ton père nous défend1, Mais si les saines doctrines politiques doivent ajouter tant d’entraves à celles qu’impose Aristote, comment désormais faire une tragédie ? […] Ces productions, aussi ternes qu’informes, ont retardé parmi nous l’époque du bon goût : elles ne l’ont point empêché d’éclore enfin, et de se former.

1049. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Mais, si la faiblesse philosophique du livre n’en empêcha point l’efficacité pratique, elle le condamnait à n’avoir qu’une efficacité momentanée. […] On a imprimé en 1842 un recueil de ses Pensées et Correspondance : c’est d’un esprit fin, chercheur, de cet esprit qui empêche un homme de rien créer et qui souvent fatigue le lecteur, parfois aussi l’illumine.

1050. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

Le tour d’esprit de Malherbe le portait vers la critique il ne pouvait ni se contenter des apparences, ni supporter les équivoques ; vif, passionné, d’une netteté de langage qui ne souffrait aucune obscurité chez les autres, ayant, dit Racan, une conversation, brusque, où tout mot portait ; intraitable sur tout ce qui touchait à l’art ; risquant ses amitiés, non pour un trait d’esprit, mais pour une vérité utile : témoin sa brouille avec Regnier, neveu de Desportes, qu’il estimait par-dessus tous les autres, mais devant lequel il n’avait pu s’empêcher de préférer un bon potage aux vers de son oncle. […] Que prétend Malherbe en défendant les rimes du simple et du composé, temps, printemps jour, séjour, ou des mots qui ont quelque convenance, montagne, campagne, ou des dérivés, mettre, permettre, sinon empêcher la poésie de devenir un exercice de mémoire et un vain jeu de mots ?

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