Beugnot est un esprit des plus fins, des plus prompts à saisir les ridicules ; et il ne sort jamais, en les exprimant, de la ligne de la parfaite urbanité.
On n’avait que le temps d’évacuer sur toute la ligne et de se replier en abandonnant les malades, les farines.
Partout chez lui le contour est arrêté, la ligne définie.
Chateaubriand donc régnant au fond et apparaissant dans un demi-lointain majestueux comme notre moderne buste d’Homère, on a : 1° Hors ligne (et je ne prétends constater ici qu’une situation), Lamartine, Hugo, Béranger, — par le talent, la puissance, le renom et le bonheur ; 2° Un groupe assez nombreux, artiste et sensible, dont il serait aisé de dire bien des noms, même plusieurs de femmes ; de vrais artistes passionnés, plus ou moins originaux, mais qui n’ont pas complétement réussi, qui n’ont pas été au bout de leurs promesses, et qu’aussi la gloire publique n’a pas consacrés.
L’ambition sait se plier à chacune des circonstances pour profiter de toutes, la vengeance même peut retarder, ou détourner sa marche ; mais l’esprit de parti est comme les forces aveugles de la nature, qui vont toujours dans la même direction : cette impulsion une fois donnée à la pensée, elle prend un caractère de roideur qui lui ôte, pour ainsi dire, ses attributs intellectuels ; on croit se heurter contre quelque chose de physique, lorsqu’on parle à des hommes qui se précipitent dans la ligne de leur opinion.
Aussi, à l’ordinaire, nos amants resteront bien loin des ardeurs qui échauffent chaque ligne de l’Imitation : leur dame ne sera que l’idée de la dame, leur passion ne sera que l’idée de la passion ; tout se passera dans leur tête, en constructions abstraites, non dans leurs cœurs en vivantes émotions.
Il n’a pas versifié les sujets d’Ésope et de Phèdre : il a traduit des visions personnelles de la vie, que sa réflexion faisait transparaître à travers les lignes maigres et sans caractère des thèmes traditionnels.
Essayez de ne considérer que l’écrivain : la définition de son tour d’esprit tiendra en quelques lignes, et qui ne vaudront presque pas la peine d’être écrites.
Je joue déjà assez bien le rôle de l’Ermite ; et d’ailleurs ce serait un vrai moyen de me délivrer de l’importunité de mes créanciers, qui ne cessent de me persécuter. » Les quelques lignes de la fameuse préface que nous venons de rappeler suffisent à nous avertir que les chefs-d’œuvre de la comédie française, L’École des femmes, Le Misanthrope, Le Tartuffe, L’Avare, se succédaient sur le même théâtre où Scaramouche et Dominique faisaient à qui mieux mieux leurs culbutes « et autres singeries agréables, comme dit Gherardi, qui sont du jeu italien ».
Comment l’écrivain que nous étudions reproduit-il la ligne, le contour ?
Le burlesque de Banville dérive en droite ligne du grotesque de Victor Hugo.
J’ai composé un long chapitre pour dire ce que je viens de résumer en dix lignes ; mais ce chapitre est un assemblage de fragments tirés des écrits de mesdames de Sévigné et de Maintenon, et je n’ai pu résister au plaisir de les transcrire.
L’éternité pour lui n’est pas une ligne droite.
Je ne discuterai pas, on le pense bien, la ligne de politique à laquelle Marie-Antoinette croyait bon de revenir quand elle était livrée à elle-même.
C’est ici que les vices de l’homme doivent entrer en ligne, car ils y trouvaient leur compte.
La langue française n’a pas de plus belles pages que les lignes simples et sévères de cet incomparable tableau.
Il y a dans ces lignes une critique, une allusion directe au roman d’Atala qui venait de paraître.
Tous ont divisé leurs sermons ; tous les ont compassé sur une citation d’une ligne ou deux, & tous divisent encore : tous citent un texte primordial, pour en faire éclore leur dessein & leurs plus belles idées : tant l’habitude a d’empire, & prévaut quelquefois contre la raison.
Dans son Histoire générale de la Philosophie, il a donné les grandes lignes, les grands cadres, les grandes directions.
Les autres nations peuvent mettre en ligne à tel ou tel moment des prosateurs de premier ordre comme des tirailleurs isolés : chez nous seulement, depuis le narrateur de la conquête de Constantinople jusqu’au romancier de Mauprat, la Prose s’appelle légion et se présente comme une armée toujours accrue de renforts et continuellement en marche.
S’il ne forme pas bien le trait qui doit exprimer la passion, si, par exemple, lorsqu’il peint un mouvement de la bouche, son contour n’est point précisement la ligne qu’il falloit tirer, l’idée du peintre avorte ; et le personnage, au lieu d’exprimer une passion, ne fait plus qu’une grimace.
Dix lignes d’explications seulement, vers la fin du dernier acte, venaient avertir du sens de la parabole.
Il n’est pas besoin de commentaire à ces quelques lignes, pour démontrer qu’il y a loin de l’un à l’autre point de vue.
Si l’on reste dans la ligne de l’évolution normale, c’est une chute à pic dans la misère des imitations.
Ajoutez le panégyrique du roi, commencé par Bussy-Rabutin, dans le temps même où il était, par ordre du roi, à la Bastille ; ouvrage où, avec toute la sincérité d’un homme disgracié qui veut plaire, Bussy parle à chaque ligne et de sa tendresse passionnée, et de sa profonde admiration pour le plus grand des princes, qui n’en voulut jamais rien croire.
Voici deux toiles étincelantes, l’une de cette pluie de lumière qui baigne les lignes arrêtées et fines d’un paysage attique, l’autre du bariolage capricieux d’une scène orientale : « Le soleil se levait entre deux cimes du mont Hymette ; les corneilles qui nichent autour de la citadelle planaient au-dessous de nous ; leurs ailes noires et lustrées étaient glacées de rose par les premiers reflets du jour ; des colonnes de fumée bleue et légère montaient dans l’ombre le long des flancs de l’Hymette ; Athènes, l’Acropolis et les débris du Parthénon se coloraient de la plus belle teinte de la fleur du pêcher ; les sculptures de Phidias, frappées horizontalement d’un rayon d’or, s’animaient et semblaient se mouvoir sur le marbre par la mobilité des ombres du relief ; au loin, la mer et le Pirée étaient tout blancs de lumière, et la citadelle de Corinthe, renvoyant l’éclat du jour nouveau, brillait sur l’horizon du couchant comme un rocher de pourpre et de feu. » (Itinéraire.) […] Dans son Journal, qui est la clef de-toute sa pensée, il esquisse quelquefois en six lignes un système philosophique qui ferait honneur à un grand « penseur. » Il dit sans s’y arrêter davantage « Chaque homme n’est que l’image d’une idée de l’esprit général. ― L’humanité fait un interminable discours dont chaque homme illustre est une idée. » — Il a telle réflexion qui est un portrait, le portrait où de très grands hommes, un Montaigne, un Renan se reconnaîtraient tout entiers : « Parler de ses opinions, de ses admirations, avec un demi sourire, comme de peu de chose, qu’on est tout près d’abandonner pour dire le contraire : vice français. » — Autre vice français et de tous les pays dans un certain état social : « L’élégante simplicité, la réserve des manières polies du grand monde, causent non seulement une aversion profonde aux hommes grossiers, de toutes les opinions, mais une haine qui va jusqu’à la soif du sang. » Il y a des partis considérables, des mouvements d’opinion, des révolutions qui n’ont pas besoin d’autre explication. […] Il a, non pas peut-être tout le sentiment de la beauté antique, mais l’instinct de cette beauté particulière au style antique qui est la précision élégante, la ligne nette, mais fine et souple du bas-relief.
Dans ce mouvement, la première ligne se détacha comme un flot qui déborde, et ceux qui restaient en arrière se mirent à courir. […] Le roi, qui était au centre de son armée, dépassait pourtant encore l’aile gauche de Cyrus, et ne trouvant personne qui lui fit face, ni qui résistât à ses premières lignes, tournait pour l’envelopper. […] Aujourd’hui, pour transformer des soldats de ligne en tirailleurs, il suffirait d’un mot du général, et ils rougiraient de demander double solde. […] En vain vous me nommerez le vert et le bleu, la ligne brisée et la ligne sinueuse. […] L’œil glisse doucement sur les lignes molles de cette chair jeune et vivante.
Notre salle d’étude, un ancien réfectoire de moines, aux murs épais et au plafond voûté, donnait sur la cour, dont les petits arbres semblaient des tiges de cadrans solaires : leur ombre était une ligne droite et mince, qui tournait autour d’eux, chétive et lente, comme une maigre chèvre autour de son piquet. […] Mais enfin, lisons les premières lignes de Cressida. […] Alors, qu’on le lise en négligeant le système et en goûtant l’art seulement, un art délicieux d’invention, d’adresse et de nouveauté, un art sans cesse ingénieux et qui prodigue ses trouvailles, un art où les repentirs même ont la pureté des lignes décisives, un art spontané à la fois et savant, un art qui abuse de ses prestiges et qui est donc prestigieux. […] Quelques lignes, au début de sa préface, attestent bien drôlement ses appréhensions. […] Si vous regardez l’une, l’autre disparaît, vos yeux suivent les lignes à demi effacées et en réveillent la netteté ; ou bien vos yeux distinguent seulement les lignes nouvelles, au gré de votre attention qui se porte sur les unes ou les autres.
Tant qu’on n’a pas tracé les grandes lignes, il est oiseux de noter des nuances et de s’attarder aux subtilités. […] On pourrait représenter graphiquement la totalité de ses manifestations normales et morbides, par une ligne droite se bifurquant à ses deux extrémités. […] En suivant notre ligne imaginaire, à droite, dans le sens de l’intensité croissante, nous avons l’attention spontanée forte, puis la préoccupation, puis l’idée fixe faible ; la ligne se bifurque pour représenter les deux degrés extrêmes, l’idée fixe confirmée et l’extase.
Il trace des lignes, tire des plans, remarque le croisement des chemins, qui forment une sorte de grand A. […] C’est au bord du Sybaris ou de l’Anapos que vivent les bergers de Théocrite, et les lignes de l’Etna et de la mer de Sicile bornent nettement leur horizon. […] Foin des poètes de sens rassis, regratteurs de mots et ajusteurs de rimes ou de syllabes, foin des peintres qui visent d’abord à la pureté des lignes et à la correction du dessin ! […] La couleur prime la ligne. […] Les choristes, figurants immobiles, rangés en lignes régulières par ordre d’ancienneté, n’avaient aucune initiative, et se bornaient à accompagner servilement le chant souvent capricieux à l’excès des deux ou trois principaux personnages.
Aucune des impulsions que nous recevons de la nature et du monde n’est de force à nous porter jusqu’au bout de la ligne du devoir ; à plus ou moins de distance du point de départ, la ligne se brise, et on ne la prolonge qu’en lui joignant, bout à bout, le produit de quelque autre principe, comme une couturière qui attacherait à une étoffe précieuse un lambeau de toile de coton. […] Mais son calcul l’abuse : entre dix lignes du prêtre et un gros volume du philosophe, il n’y a pas moyen d’hésiter. […] C’est là le feu dont la chaleur fait revivre sur le papier des syllabes, des mots, des lignes effacées. […] Mais si les deux écrivains furent contemporains, une profonde ligne de démarcation les sépare. […] Ce monosyllabe retentit incessamment dans ses discours, revient à chaque ligne des lettres qu’il écrit.
Il était du meilleur sang d’Angleterre, ce nom d’Herbert étant le nom de famille de ces comtes de Pembroke qui figuraient parmi les plus puissants seigneurs du royaume, et son trisaïeul en ligne directe, sir Richard Herbert de Colebrook, étant le propre frère du comte de Pembroke, alors vivant. […] Quelques lignes tracées avec précision en figurent les contours au complet, quelques ondes sonores en expriment toute la musique, et quant à la vie humaine, avec ses joies, ses passions, ses naufrages et ses miracles, une action dramatique qui n’aura pas une plus longue durée que celle d’un de nos rêves, et d’où nous sortirons comme on sort de cette terre, incertains si nous avons rêvé ou veillé, la résumera tout entière. […] Il est impossible d’imaginer deux caractères plus simples et qui aient moins de détours et de profondeur mystérieuse ; ce sont deux enfants du pays où tout est lumière, netteté, précision de lignes et de contours, où la vie n’a pas plus de secrets que la nature, où la nuit elle-même n’a pas d’ombre et où l’obscurité appartient à la seule mort. […] L’auteur de Tristram Shandy marque vraiment la ligne imperceptible, la frontière idéale qui sépare deux ordres d’intelligences et de vie morale : après lui, le génie n’est plus ; avant lui, il n’est pas encore. […] Ce fameux bonnet espagnol, ce montero cap que Trim conserve avec tant de soin comme une de ses plus précieuses richesses, vient en droite ligne de l’expédition du Vigo.
Nous ne saurions, pour notre part, affecter la prétention, en quelques lignes ou quelques pages, de l’éclaircir autant qu’il le faudrait pour l’avoir démontré. […] La vérité, sur quelque sujet que ce soit, tiendrait en quelques pages, souvent même en quelques lignes : on ne calculera jamais avec exactitude ce qu’il faut de place et de papier pour la réfutation de l’erreur. […] » On a cité souvent ces lignes éloquentes ; on n’en a pas assez fait remarquer l’accent profond de mélancolie. […] C’est que Sainte-Beuve, qui, deux fois au moins, a reproduit ces trois lignes, en a deux fois aussi supprimé l’adjectif, pour faire dire à Rousseau tout le contraire de ce qu’il a dit, et ainsi fixer la physionomie de Prévost sous un aspect qui diffère sensiblement du vrai. […] Mais, quand il est question d’un homme qui s’est peint si vivement lui-même, comme Voltaire, sans le vouloir ni le savoir, dans dix lignes de sa main, ou d’un homme encore qui, comme Rousseau, n’a passé la moitié de sa vie qu’à nous raconter l’autre, j’avoue que je ne comprends plus du tout.
Lui, ne l’a jamais quittée ; et quand il posait la plume pour prendre le pinceau, quand il abandonnait l’outil libre et subtil de la poésie pour le royaume des lignes et des couleurs, le caractère de son inspiration ne changeait pourtant pas. […] Toute formation géologique a ses traits essentiels qui n’appartiennent qu’à elle, ses lignes déterminées de fracture qui donnent naissance à des formes constantes dans les terrains et les rochers, ses végétaux particuliers parmi lesquels se distinguent encore des différences plus particulières par suite des variétés d’élévation et de température. […] Peut-être même ce contraste l’a-t-il servi : le fait est que son tableau de la Hollande est d’une exactitude de proportions et d’une sûreté de lignes qu’on ne retrouve qu’en partie dans ses autres voyages. […] Son arrivée à Constantinople, par exemple, malgré la profusion des lignes et des couleurs, ou plus exactement peut-être à cause de cette profusion, reste un morceau confus. […] Au moment où j’écris ces lignes, je suis dans l’inébranlable résolution de ne te revoir jamais.
On espère que cet article sera travaillé avec un soin particulier ; car, par un hasard qui n’a rien d’étonnant, ce morceau de douze lignes sera le premier ouvrage de ces trois hommes de lettres. […] Auger dont je ne connaissais pas une ligne il y a quatre jours avant de chercher à le réfuter, c’est qu’il a quarante voix éloquentes et considérables dans le monde pour vanter son ouvrage. […] Ce serait en vain que vous y chercheriez une tirade brillante ; ce n’est qu’une fois ou deux dans les cinq actes qu’il arrive à un personnage de dire de suite plus de douze ou quinze lignes.
C’est vraiment de la malechance, que moi, dont toute la fortune est en bibelots, je sois tombé sur une maison, où un architecte, pour avoir la ligne décorative d’un toit couronné par une seule cheminée, ait adopté un système de chauffage qui vous tient toujours sous la menace du feu. […] On dit c’est : un mort d’un écho, pour le distinguer du mort des simples informations, dont l’enregistrement dans les colonnes du Figaro, est payé de quelques sous moins cher la ligne, que le premier. […] Et avec Daudet, nous disons, qu’il faudrait renouveler la pantomime, jeter à l’eau tous les gestes rondouillards, tous les gestes qui racontent, et ne garder que les gestes de sentiment, les gestes de passion, auxquels Margueritte mettrait les grandes lignes de sa pantomime, — et nous parlions d’une pantomime sur la peur, dont ses traits savent si éloquemment rendre l’expression.
Seuls, les génies hors de ligne de M. de Chateaubriand et de madame de Staël ne ressentirent nulle atteinte et ne subirent pas de déviation. […] Ses projets de travaux s’élargirent, se fixèrent et prirent, par leur structure imposante, quelque chose de ces grandes lignes romaines des monuments et des horizons.
Je ne sais quelle fatalité de destinée ou quel tourbillon romanesque, du Peintre de Saltzbourg à Jean Sbogar, le jeta toujours par les précipices ou sur les lisières, à droite ou à gauche de ces grandes lignes où convergent en définitive les seules et vraies figures du poëme humain comme de l’histoire. […] Ne lui demandez pas une discussion suivie et rigoureuse, armée de précautions, appuyée aux lignes établies de l’histoire, aux grands résultats acquis et aux jugements généraux de la littérature.
Mais la conscience connaît si mal nos événements intérieurs, qu’elle range sur la même ligne, à titre de couleurs, nos sensations et nos manques de sensation ; ce qui la frappe, ce sont des différences entre nos états, et, à cause de cela, elle met ensemble, comme des faits semblables, le passage du repos à l’action et le passage de l’action au repos, en les notant comme contraires, sans démêler que l’un est négatif et l’autre positif. […] Simplifions le fait ; ajournons tout ce qui dans cette sensation appartient au tact, âcreté, astringence, irritation, chaleur, fraîcheur, sensation musculaire spontanée et irradiée vers le canal alimentaire ; considérons seulement les sensations des nerfs gustatifs eux-mêmes, et mettons-les sur la même ligne, soit qu’elles naissent à l’avant, soit qu’elles naissent à l’arrière de la bouche ; leurs principaux types sont les sensations de l’amer et du sucré avec leurs variétés innombrables ; quand nous les avons nommées, nous sommes au bout de notre science, comme tout à l’heure quand nous avons nommé les sensations d’odeur fétide ou parfumée. — Voyons cependant ce que nous pouvons apprendre sur les unes et sur les autres en nous aidant des réductions précédentes, et en étudiant les circonstances où elles naissent.
Un volume de Virgile copié tout entier de sa propre main était ouvert devant lui ; il y écrivit en marge quelques lignes inaperçues alors, découvertes depuis à Milan : c’était un souvenir anniversaire de son amour, devenu piété, pour Laure, une note pour son cœur ; puis il pencha son front sur la note et sur le livre, et il s’y endormit du dernier sommeil. […] XXXI Il me tombe sous la main, pendant que j’écris ces lignes, un petit livre italien d’Ugo Foscolo, les Lettres d’Ortiz.
« Voltaire a dit, à ce que tu me dis (car pour moi je n’en sais rien ; jamais je ne l’ai tout lu, et il y a trente ans que je n’en ai pas lu une ligne), que les femmes sont capables de faire tout ce que font les hommes, etc. […] Il m’élève seulement assez considérablement dans la hiérarchie générale, et donne de plus à ma femme une fort belle attitude à la cour, hors de la ligne générale. » Il revient souvent sur ces dignités dans ses lettres et ses différentes correspondances.
Aucun peintre n’a pu trouver des lignes et des couleurs pour le reproduire ; la nature en elle a défié le pinceau de David, de Girodet, de Proudhon, de Gérard, de Camuccini ; le ciseau de Canova y a échoué. Dans ces visages, où la physionomie est tout, la beauté est justement ineffable, elle est un mystère comme tout ce qui est infini ; elle ne résulte pas de tels ou tels délinéaments des traits, mais de lignes imperceptibles, de combinaisons insaisissables, d’harmonies latentes, quoique parlantes, qu’il est impossible de copier.
Platon fut à Socrate ce que saint Paul fut au Christ ; tous deux écrivent, commentent et développent la doctrine de son maître qui n’a rien écrit, et, ici, il serait curieux peut-être d’examiner pourquoi ni le révélateur d’une philosophie raisonnée, ni le révélateur d’une religion révélée, n’ont pas voulu, ou n’ont pas daigné écrire eux-mêmes une seule ligne, si ce n’est ce doigt sur le sable qui traça des caractères de miséricorde. […] Ce dialogue n’a pas l’accent de la langue d’ici-bas ; la race humaine, dont une main d’homme a pu écrire ces lignes, est immortelle : Phédon le sent.
Si ce prince, maintenant méconnu et exilé, lit par hasard ces lignes, il y retrouvera, après tant d’années et de vicissitudes, les mêmes sentiments de respect et d’estime. […] Puissent ces lignes lui apprendre que l’amitié survit au-delà du bonheur et de la popularité pour les hommes dignes d’être aimés à tous les âges !
Son caractère d’idéale mysticité, est surtout rendu sensible par le pianissimo toujours conservé dans l’orchestre, et qu’interrompt à peine le court moment où les cuivres font resplendir les merveilleuses lignes du seul motif de cette introduction. […] Enfin, à la dernière ligne de ce premier article, page 142, on doit évidemment lire 1883, au lieu de 1885.
XII Si maintenant on nous interroge sur cette forme de la poésie qu’on appelle le vers, nous répondrons franchement que cette forme du vers, du rythme, de la mesure, de la cadence, de la rime ou de la consonance de certains sons pareils à la fin de la ligne cadencée, nous semble très-indifférente à la poésie, à l’époque avancée et véritablement intellectuelle des peuples modernes. […] Édouard Foucaux, de la Société asiatique de Paris, publie ce fragment traduit au moment où nous publions ces lignes.
Cousin, qui excelle à réparer sa ligne quand elle est rompue, voyant Jouffroy mort, a repris solennellement possession de son disciple sur sa tombe.
À la chute du jour cette illumination officielle eut lieu ; et en même temps toutes les fenêtres des maisons de la rue se couvrirent d’une ligne de feux que les habitants s’empressaient d’allumer.
Villehardouin, qui nous donne cette impression à travers son récit, ne la démêlait sans doute qu’imparfaitement lui-même : il n’y avait point de contradiction déclarée alors entre ces intérêts du monde et ceux de la religion ; les mêmes hommes qui pourvoyaient aux uns étaient sincèrement préoccupés des autres : toute la différence n’était que dans la proportion et dans la mesure ; mais la part faite au ciel, même quand elle ne venait qu’en seconde ligne, restait encore grande.
Et Arago de son côté repassant sur ses souvenirs : Au moment où j’écris ces lignes, dit-il, vieux et infirme, avec des jambes qui peuvent à peine me soutenir, ma pensée se reporte involontairement sur cette époque de ma vie où, jeune et vigoureux, je résistais aux plus grandes fatigues et marchais jour et nuit dans les contrées montagneuses qui séparent les royaumes de Valence et de Catalogne du royaume d’Aragon, pour aller rétablir nos signaux géodésiques que les ouragans avaient renversés.
» Ce sont les mots de mon texte ; et y a-t-il une seule parole qui ne semble y avoir été mise pour dépeindre cette circonvallation, non de lignes, mais de murailles ?
C’est d’une nature si forte, d’une énergie si étonnante, qu’il me semble qu’on ne peut rien mettre en ligne.
La Harpe, après Rivarol, rétrogradait et se repliait sur le jugement de Voltaire, lorsqu’en quelques lignes rapides de son Cours de littérature il parlait de l’ouvrage de Dante comme « d’un poème monstrueux et rempli d’extravagances, que la manie paradoxale de notre siècle, disait-il, a pu seule justifier et préconiser ».
Les histoires amoureuses de Bussy et les historiettes de Tallemant, bien qu’appartenant les unes et les autres à la chronique plus ou moins scandaleuse, ne doivent pas être rangées pourtant sur la même ligne ni se rapporter au même esprit.
Si l’on ôte quelques passages où la simplicité est affectée et la sagacité raffinée, on croit entendre un des anciens jurisconsultes ; Montesquieu a leur calme solennel et leur brièveté grandiose ; et du même ton dont ils donnaient des lois aux peuples, il donne des lois aux événements… Suivant moi, pour que le livre sur Tite-Live fût entièrement vrai (car il l’est sur presque tous les points, et pleine justice est rendue d’ailleurs à l’historien), il eût suffi de laisser au sens du génie oratoire, du génie de l’éloquence déclaré dominant chez lui, la valeur d’un aperçu littéraire, sans lui attribuer la valeur d’une formule scientifique ; il eût suffi enfin de ne pas inscrire à la première ligne de cette étude, de n’y pas faire peser le nom et la méthode de Spinosa, de ne pas rapprocher des termes aussi étonnés d’être ensemble que Spinosa et Tite-Live.
Prevost-Paradol, avec un talent littéraire si hors de ligne, semble donc avoir le tempérament exclusivement politique.
Biot était en première ligne, mais dans le second rang des savants ; il venait immédiatement après les héros de la science.
Mais on pourrait ajouter de ces sortes d’éloges à l’infini sans que la portée d’un esprit et d’un caractère s’en trouvât poussée et exhaussée d’une ligne.
Il n’y aurait pour cela qu’à partir de quelques principes généraux et convenus, à se montrer rigide et inexorable pour tout ce qui s’écarte de nos mœurs, de notre état de société et de civilisation, à faire la leçon d’un bout à l’autre, à condamner au nom d’un symbole whig ou d’un catéchisme libéral tout ce qui s’écarte de la droite ligne, une fois tirée : on arriverait ainsi à un effet certain et à une unité de conclusion qui séduit et satisfait toujours à première vue les lecteurs superficiels et les esprits tout d’une pièce.
Ce serait moins que jamais aujourd’hui le moyen de se débarrasser des difficultés, puisqu’elles ont surgi et qu’elles ont éclaté ; de toutes parts puisque des attaques, des négations philosophiques radicales ont eu lieu, telles que celle de Strauss en première ligne ; la meilleure manière pour se retracer l’image de la personne réelle et vivante de celui dont la venue a changé le monde est d’en revenir avec bonne foi et réflexion aux récits originaux qui nous ont conservé la suite de ses actes et de ses paroles.
» Tout traducteur est admis, je le sais, à faire valoir les bons côtés de son auteur ; mais il y a lieu de s’étonner que l’écrivain français n’ait pas mieux ressenti l’insulte que ce continuateur pseudonyme faisait, dès les premières lignes, à celui dont il allait suivre si pesamment et dont il eût dû baiser les traces, insulte malheureuse qui est la seule chose de lui qui restera pour qualifier son procédé et dénoncer son âme à défaut de son nom.
Loyson s’y dessine à la fois dans sa modération et dans la fermeté de sa ligne ; royaliste attaché à la Charte, mais faisant feu à droite et à gauche, — à droite contre Benjamin Constant et M.
Parmi les hommes d’État qui ont paru en première ligne dans nos affaires depuis dix ans, il en est plusieurs qui se sont fait bien des titres de gravité, de vertu, d’éloquence : il en est deux que j’ai toujours involontairement rapprochés par le contraste et aussi par de certaines ressemblances dans l’effet produit.
Si Racine, dans les vingt-six années environ qui forment sa pleine carrière depuis les Frères ennemis jusqu’à Athalie, avait eu le temps de voir une couple de révolutions politiques et littéraires, s’il avait été traversé deux fois par un soudain changement dans les mœurs publiques et dans le goût, il aurait eu fort à faire assurément, tout Racine qu’il était, pour soutenir cette harmonie d’ensemble qui nous paraît sa principale beauté : il n’aurait pas évité çà et là dans la pureté de sa ligne quelque brisure.
La terre de Blet, possédée pendant plusieurs siècles par la maison de Sully, passa par mariage de l’héritière, en 1363, à la maison de Saint-Quentin, où elle fut transmise en ligne directe jusqu’en 1748, date de la mort d’Alexandre II de Saint-Quentin, comte de Blet, gouverneur de Berg-op-Zoom, père de trois filles d’où sont nés les héritiers actuels Ces héritiers sont le comte de Simiane, le chevalier de Simiane, et les mineurs de Bercy, chacun pour un tiers, qui est de 97 667 livres sur la terre de Blet, et de 20 408 livres sur la terre des Brosses.
Il fut question de mon discours, dans lequel chacun cherchait une profession de foi politique qui devait décider de la ligne de ma vie.
Au reste, il a de grandes qualités, une plénitude vigoureuse, une justesse exacte, et certaines fusées d’imagination qui font d’autant plus d’effet, éclatant parmi les lignes sévères des raisonnements abstraits.
Elle écrit, au début de sa Littérature ces lignes funestes: « L’égalité politique, principe inhérent à toute constitution philosophique, ne peut subsister que si vous classez les différences d’éducation avec encore plus de soin que la féodalité n’en mettait dans ses distinctions arbitraires ».
Il y faut, à chaque ligne, de la profondeur, de la finesse, de la délicatesse ou de l’esprit.
Bonnicar, le jour de l’entrée des Versaillais, emmené prisonnier par la ligne et retrouvant à Versailles son marmiton et ses petits pâtés du dimanche87.
., sur la rive, trempe sa ligne dans ce torrent sans même s’y mouiller les pieds.
Le dandysme apparaît, quand sous la menace de la confusion générale, quelques modalités de l’ancien ordre jaillissent plus riches de sens et qu’une ligne de démarcation subsiste encore entre l’aristocratie déclinante et le flot démagogique envahisseur.
Dargaud leur a rendu justice avec effusion et cordialité ; il a fait passer dans les moindres lignes de son Histoire le sentiment de poésie et de pitié exaltée qui l’anime pour les souvenirs de la royale et catholique victime ; il a mérité une très belle lettre que Mme Sand lui a adressée de Nohant (10 avril 1851), et où elle le félicite en le critiquant à peine, et en parlant surtout de Marie Stuart avec charme et avec éloquence.
dans tous ses vers, il n’y a rien qui soit mieux que ces deux lignes de prose qu’on vient de lire.
Tout homme qui écrit avant trente ans et qui ne consacre pas l’âge d’or de la vie, de la vingtième année à la trentième, à lire, à observer et à réfléchir, sans écrire une ligne, risque de n’avoir pas de cerveau et de n’être qu’un ouvrier littéraire.
Le maître impeccable de la ligne que fut Ingres appréciait, on le sait, sa virtuosité de musicien au-dessus de ses dons naturels de peintre ; surtout il en jouissait davantage, et avec plus de passion.
Huysmans acquiert l’acéré discernement et l’intense jouissance des choses supérieurement belles et rares, le raffinement, qui, comme la pointe d’un cône, concentre, termine et raccorde toutes les lignes de son organisation intellectuelle.
Sans pousser cette sollicitude jusqu’à une sorte de manie, il ne faut jamais oublier, en effet, que le théâtre antique est sculptural, que les personnages y forment des groupes harmonieux faits pour satisfaire les yeux amoureux de la beauté des lignes autant que l’esprit amoureux de la beauté des pensées ; que les Grecs ne cessent jamais d’être artistes et qu’il faut nous faire artistes nous-mêmes pour goûter leur théâtre, sinon autant qu’ils le goûtaient, du moins de la manière, d’une des manières, et importante, dont ils le goûtaient.
L’ère nouvelle n’est donc point, comme on l’a cru, celle de la liberté civile, ni même celle de l’égalité devant la loi, et de l’admissibilité de tous à tous les emplois : c’est l’ère de l’indépendance et de l’énergie de la pensée ; celle des lois écrites substituées aux lois traditionnelles ; celle des institutions sociales et des institutions religieuses marchant sur deux lignes séparées ; celle du bien-être social appliqué à toutes les classes ; celle de la raison humaine devenue adulte, et s’ingérant de décider par sa propre autorité ; celle de la démonstration rigoureuse, qui repousse les axiomes en géométrie et les préjugés en politique ; celle du discrédit des faits antérieurs pris comme base convenue et incontestable ; celle de l’opinion consultée à chaque instant, et à part même de toute conjoncture nouvelle.
C’est qu’il ne s’agit pas là, comme on s’est plu à le répéter trop souvent, d’une simple question de phrases à écrire en lignes plus ou moins égales, mais bien de l’inspiration même.
Tous les procédés oratoires vont entrer en ligne.
Mais la première somme, comprenant tout l’espace qui est au-dessous d’une ligne droite, égale deux angles droits.
Mais j’ai réservé la part de justesse et de vérité que l’heureux naturel de chaque écrivain a pu défendre contre la contagion de la chimère et répandre en pages ou en lignes solides, belles ou charmantes, dans des ouvrages troubles et gâtés. […] Que je ne force point le tableau de cette espèce de délire où la littérature romantique puisa ses grands moyens d’illusionnisme, je n’en veux pour preuve que ces quelques lignes de la préface d’Ahaseverus dans lesquelles Quinet caractérise la pensée dominante de la génération de 1830 au sujet d’elle-même et il tout sujet : Une étrange maladie nous tourmente aujourd’hui sans relâche, Comment l’appellerai-je ?
Mais l’art grec vaut surtout par la pureté des lignes ; la Renaissance a mieux connu la magie des couleurs. […] Comment fais-tu les grands amours, Petite ligne de la bouche ? […] En Italie il a surtout vu les statues et, dans les paysages, les lignes (Croquis italiens). […] Un peintre a d’autres motifs d’aimer la nature : il y cherche des combinaisons de couleurs et de lignes que l’art n’inventerait pas tout seul. […] Je sais bien que le compliment tient une ligne, et la condamnation cinquante pages ; mais remarquez que la banalité romanesque ne lui est pas moins odieuse que le naturalisme facile.
Il prévoit la dernière ligne en écrivant la première. […] Pour eux, toutes ces choses ont une âme ; je veux dire par là qu’ils sentent en eux-mêmes, par contre-coup, l’élan et les brisures des lignes, la force et les contrastes des teintes, et le sentiment douloureux ou délicieux qui s’exhale de ce pêle-mêle et de cet ensemble comme une harmonie ou comme un cri. […] Ce style est beaucoup plus agréable que le jargon de lignes non finies que vous appelez des vers. […] Il y a ici des tableaux tout faits, des tableaux vrais et complets, composés avec des sensations de peintre, avec un choix de couleurs et de lignes : les yeux ont du plaisir. […] Ce torrent d’érudition vient se distribuer en canaux géométriquement tracés qui divergent à angles droits sans dévier d’une seule ligne.
Que de fois, dans nos livres de classe français, on nous a enseigné qu’entre la France et la Belgique il n’y avait que des lignes de limites artificielles ! […] Voyez le Languedoc : ce qui le caractérise aujourd’hui, c’est cette ligne ininterrompue de villes qui s’y succèdent sur la même route, y apparaissant à chaque fin d’étapes, Perpignan, Narbonne, Béziers, Montpellier, Nîmes ; et tel était l’aspect que présentaient déjà ces terres il y a deux mille ans sous les Romains, il y a vingt-cinq siècles sous les Celtes, les Ibères et les Ligures ; dès lors le Languedoc était une série de bourgs, échelons d’une même route. […] Tout Lemonnier tient dans ces lignes. […] Les nobles tendances idéalistes du roman, trop touffu peut-être, mais singulièrement ardent et musclé, peuvent se résumer en ces quelques lignes : … Ce n’est pas impunément que deux âmes se mêlent à l’heure où un grand rêve vient en elles de s’allumer. […] J’emprunte ces lignes à la lettre de van Lerberghe publiée dans La Roulotte.
Montre-lui ces lignes et dis-lui qu’elles sont écrites par quelqu’un qui ne flatte personne et n’invente rien. […] On dira que, sauf deux ou trois exceptions, il n’y a pas eu d’exemple de femmes ayant fourni à l’art des personnalités considérables d’artistes comparables aux artistes hommes, oui, mais les hommes reçoivent dans une des plus magnifiques écoles du monde une éducation intelligente et grandiose ; pendant tout le jour ils sont entourés des beautés de l’Art, leur yeux ne reposent que sur lignes pures et couleurs éclatantes, ils respirent une atmosphère propre à ouvrir leur âme à l’inspiration et à développer les ailes de leur imagination qui doivent les porter vers le génie. […] C’est aux gens éclairés, aux artistes, aux disciples de l’art, qui ne voient que lignes pures et couleurs éclatantes, qui respirent une atmosphère propre à ouvrir l’âme à l’inspiration, à ce qui est puissant et beau, et à développer les ailes de l’imagination qui doivent porter vers le génie, c’est aux amis du progrès et de la justice qu’il faut faire appel. […] Z., c’est très beau, c’est de belles lignes, de la chair, de grands talents ! […] Il est vrai que je m’amuse, mais il n’est pas vrai que je vous connaisse tant que cela ; je vous jure que j’ignore votre couleur et vos dimensions, et que comme homme privé je ne vous entrevois que dans les lignes dont vous me gratifiez et encore à travers pas mal de malice et de pose.
Lorsqu’un métaphysicien a défini avec intrépidité ce que nul ne connaît, il devient beaucoup plus prudent en prenant pied sur le sol de la réalité, ou, s’il continue à tracer dans les nuages ses lignes idéales, l’architecte jette à la dérobée maint coup d’œil sur la terre, et veille à ce que le plan qu’il lève là-haut ne soit pas trop fantastique. […] Schlegel déclare que l’intrigue est plus essentielle que les caractères ; Jean-Paul, que le comique est… bien des choses, et entre autres la multiplicité des lignes courbes297 ; Hegel, que c’est la personnalité mettant en contradiction ses propres actes, qu’elle détruit par eux-mêmes298, et les plus vraies définitions de la comédie sont après tout celles des philosophes allemands, non parce qu’on ne les entend pas, mais, comme l’un d’entre eux l’a dit299, parce qu’au moins le comique s’y trouve — à leur insu et en dépit d’eux-mêmes.
Louis XIV avait eu toutes les qualités d’un maître de maison, le goût de la représentation et de l’hospitalité, la condescendance et la dignité, l’art de ménager l’amour-propre des autres et l’art de garder sa place, la galanterie noble, le tact et jusqu’à l’agrément de l’esprit et du langage. « Il parlait parfaitement bien222 ; s’il fallait badiner, s’il faisait des plaisanteries, s’il daignait faire un conte, c’était avec des grâces infinies, un tour noble et fin que je n’ai vu qu’à lui. » — « Jamais homme si naturellement poli223, ni d’une politesse si mesurée, si fort par degrés, ni qui distinguât mieux l’âge, le mérite, le rang, et dans ses réponses et dans ses manières… Ses révérences, plus ou moins marquées, mais toujours légères, avaient une grâce et une majesté incomparables… Il était admirable à recevoir différemment les saluts à la tête des lignes de l’armée et aux revues. […] En effet ici tout est friandise, caresse délicate pour des sens délicats, jusque dans le décor extérieur de la vie, jusque dans les lignes sinueuses, dans la parure galante, dans la commodité raffinée des architectures et des ameublements.
Au reste, Chou-Leang-Ho compte parmi ses ancêtres des empereurs et des rois, et descend en droite ligne du sage Tcheng-Tang, fondateur de la dynastie des Chang.” […] Dès sa naissance, la tendre superstition de ses parents remarqua des lignes de génie, de sagesse future et de faveur du ciel sur toute sa personne.
On voit se dessiner sur la ligne de la mer les profils de quelques vieilles glaneuses qui portent une gerbe sur leurs têtes, ou de quelques belles jeunes filles balançant à la cadence de leur pas, sur leurs épaules, une urne étrusque contenant l’eau pour les lieurs de blé mûr ; leur ombre lapidaire les suit sur la route comme un pli de leur lourde robe. […] Quelques lignes indécises des Abruzzes s’articulent à peine dans l’horizon, derrière le groupe animé.
« C’est que l’ennui s’est posé sur moi, qu’il y demeure, et que tout ce qui prend de la durée met de l’éternité dans le temps. » L’ennui du printemps dans une âme de jeune fille éclate aussi dans les lignes suivantes : Le 28 avril. […] « Je me mis d’abord à genoux sur un prie-Dieu où elle priait, puis je parcourus sa chambre, je regardai ses chaises, son fauteuil, ses meubles dérangés comme quand on déloge ; je vis son lit vide ; je passai partout où elle avait passé, et je me souvins de ces lignes de Bossuet : “Dans un moment on passera où j’étais, et l’on ne m’y trouvera plus.
Dans sa prévention contre les contrastes, Diderot s’emporte jusqu’à dire qu’il faut les abandonner au farceur ; et il le dit à quelques lignes d’une remarque où il oppose à Térence, qui use peu des contrastes, à Plaute, qui en use moins encore, Molière, qui se les permet plus souvent : en sorte que le plus près du tréteau du farceur, ce serait Molière. […] Je suis surpris que la Harpe n’ait guère trouvé qu’à louer dans ses vers, et que, pour faire acte de critique, il se soit attaqué à quelques lignes de prose oubliées, où le bon Collin est assez osé pour risquer le mot singer.
Les noms généraux par lesquels on désigne les phases diverses de l’esprit ne s’appliquent jamais d’une manière parfaitement univoque, comme disait l’école, à deux états divers. « La ligne de l’humanité, dit Herder, n’est ni droite, ni uniforme ; elle s’égare dans toutes les directions, présente toute les courbures et tous les angles. […] Un voyageur a traversé la France du nord au sud ; un autre de l’est à l’ouest ; un autre suivant une autre ligne ; chacun d’eux donne sa relation comme la description complète de la France ; voilà l’image exacte de ce qu’ont fait jusqu’ici ceux qui ont tenté de présenter un système de philosophie de l’histoire 131.
Les statues de l’antique école de Dédale aux pieds joints, aux jambes parallèles, aux yeux indiqués par de simples lignes, auraient barré le passage aux Panathénées de Phidias. […] L’architecture de l’Acropole, d’une perfection si simple et si pure, dont chaque ligne a la souplesse d’un beau rythme, aurait-elle pu naître à l’ombre des Babels massives de l’Asie ?
Impossible d’y trouver un chapitre intéressant, une ligne qui nous apprenne quoi que ce soit… ………………………………………………………………………………………… « Voulez-vous devenir auteur ? […] Tourguéneff — c’est incontestable — un causeur hors ligne, mais un écrivain au-dessous de sa réputation.
§ XIII L’autre, Cervantes, est, lui aussi, une forme de la moquerie épique ; car, ainsi que le disait en 18272 celui qui écrit ces lignes, il y a, entre le moyen âge et l’époque moderne, après la barbarie féodale, et comme placés là pour conclure, « deux Homères bouffons, Rabelais et Cervantes. » Résumer l’horreur par le rire, ce n’est pas la manière la moins terrible. […] Leurs proéminences ont la ligne divine et hideuse du chaos.
Mais la croissance de cette plante libre et responsable, l’humanité, n’est pas ainsi emportée d’un mouvement uniforme et nécessaire, suivant une ligne inflexible, vers un but qui ne peut manquer d’être atteint. […] Puis d’autres comparaisons, faites à des points de vue différens, le conduisent à d’autres rapprochemens, et tous ces groupes d’importance inégale sont par lui placés sur la même ligne, sans qu’il lui vienne à l’esprit de les subordonner les uns aux autres selon une rigoureuse hiérarchie.
Au moment de la première charge, voyant qu’on ne s’ébranlait pas, ils s’arrêtèrent à vingt ou trente pas des escadrons et bataillons allemands, sauf un petit nombre qui poussèrent à fond : Dans ce moment, dit Lassay, nos petites pièces de canon ayant commencé à tirer, et les bataillons à faire un feu prodigieux, on leur vit faire un mouvement quasi pareil à celui que fait le blé qui est agité par le vent ; et ensuite ils tournèrent, mais assez lentement ; toute notre ligne s’ébranla pour les suivre, mais fort lentement aussi, craignant de se rompre… En un mot, toutes les particularités et les circonstances de cette victoire de Gran se comprennent à merveille par le récit de Lassay.
La Motte, dans le siège qu’il met devant la renommée d’Homère, a beau s’appliquer à restreindre et à circonscrire ses lignes d’attaque, il y a en lui une inintelligence totale du génie de l’antique poète ; et c’est ce qui irrite Mme Dacier et la transporte hors d’elle-même.
quelques lignes écrites par Goethe peu de mois avant que s’éteignît cette lumière de l’Allemagne, et, dans la patrie même de Buffon, quelques pages de mon père, tels étaient encore, il y a quelques années, les seuls hommages dignes de lui que la science eût rendus au naturaliste et au philosophe.
Le maréchal de Biez qui y commandait et qui, ne pouvant reprendre Boulogne, était chargé de le bloquer par ce côté, se trouvait dans l’embarras par la fuite des pionniers : il lui restait un pan de courtine ou de mur à élever pour sa ligne de fortification, et pour empêcher les secours d’entrer dans la ville.
Toutefois, la ligne qui sépare les uns des autres se confond souvent, et si l’on prend, par exemple, les noms des grands capitaines, des grands rois et ministres qui ont écrit, et dont la pensée se présente d’abord, César, Henri IV, Richelieu, Louis XIV, Frédéric, Napoléon, on trouvera que César et Frédéric avaient beaucoup du littérateur en eux, qu’il y avait en Richelieu de l’auteur, et de tous ces illustres personnages que je viens de citer, ceux qui sont le moins du métier, les seuls même qui n’en soient pas du tout, c’est encore Louis XIV et Henri IV.
Voiture s’y fait un peu trop le commentateur enthousiaste de ce qu’ils s’écrivent mutuellement : Ma lettre, lui dit-il, et les deux que j’ai reçues de vous, me font souvenir de ces trois lignes que Protogène et Appelle firent à l’envi l’un de l’autre.
Sénecé ne s’aperçut pas qu’il s’opérait quelque changement pareil dans le climat des esprits vers cette date mémorable de 1664, et quand lui-même avait vingt et un ans ; il ne vit point qu’en descendant le fleuve on avait passé l’une de ces lignes par-delà lesquelles le soleil et le ciel sont plus beaux.
Il se trouvait ainsi le parent le plus proche de Henri IV dans la ligne d’Albret, et même son héritier présomptif en Navarre avant la naissance de ses enfants.
Pendant que je la lisais, je me rappelais bien souvent cette autre correspondance récemment publiée, si étonnante, si curieuse, si pleine de lumière historique et de vérité, entre deux autres frères, couronnés tous deux, le roi Joseph et l’empereur Napoléon ; et, sans prétendre instituer de comparaison entre des situations et des caractères trop dissemblables, je me bornais à constater et à ressentir les différences : — différence jusque dans la précision et la netteté même, poussées ici, dans la correspondance impériale, jusqu’à la ligne la plus brève et la plus parfaite simplicité ; différence de ton, de sonoréité et d’éclat, comme si les choses se passaient dans un air plus sec et plus limpide ; un théâtre plus large, une sphère plus ample, des horizons mieux éclairés ; une politique plus à fond, plus à nu, plus austère, et sans le moindre mélange de passe-temps et de digression philosophique ; l’art de combattre, l’art de gouverner, se montrant tout en action et dans le mécanisme de leurs ressorts ; l’irréfragable leçon, la leçon de maître donnée là même où l’on échoue ; une nature humaine aussi, percée à jour de plus haut, plus profondément sondée et secouée ; les plaintes de celui qui se croit injustement accusé et sacrifié, pénétrantes d’accent, et d’une expression noble et persuasive ; les vues du génie, promptes, rapides, coupantes comme l’acier, ailées comme la foudre, et laissant après elles un sillon inextinguible54.
Le soleil se couchait ; le ciel était rouge entre les branches, et les troncs pareils des arbres plantés en ligne droite semblaient une colonnade brune se détachant sur un fond d’or : une peur la prenait, elle appelait Djali, s’en retournait vite à Tostes par la grande route, s’affaissait dans un fauteuil, et de toute la soirée ne parlait pas.
. — Toute une vie d’équité, et à la fin, dans la ligne de ses devoirs, et sans l’avoir cherchée, une occasion d’éclat, une journée d’honneur immortel7.
J’usai de la faculté qui m’avait été laissée ; je pris sur moi de rayer deux lignes et de mettre des points.
car il est allé choisir exprès ces deux grands noms (tome I, page 40). imaginez, au contraire, que, tout à côté, les lettres de Béranger remettent les choses à leur juste point : cet homme de sens, tout coquet qu’il est par moments, ne se surfait pas d’une ligne en politique ni en littérature.
J’ai dans l’idée, en parlant ainsi, un passage où le témoignage d’Horace est invoqué : elle avait lu saint Augustin plus qu’Horace, etces quelques lignes, en effet, ne lui appartiennent pas30.
Quand un grain de passion politique ou universitaire s’y mêle, quand l’adversaire prête flanc par une surface prolongée, quand le journaliste professeur est à l’aise pour se déployer derrière ses lignes classiques et pour ajuster sûrement son monde, il s’en donne en homme d’esprit plein de malice ; et à ce jeu il se serait rompu à la longue ; le naturel aurait pris le dessus sur le concerté et le compassé ; ce qu’un adversaire des plus fins, mais irrévérent36, a appelé l’amidon de son style, ce que nous nommons tout uniment l’apprêt, aurait disparu.
Mme de Staël, qui a eu sa ligne droite et continue, ou du moins sa courbe d’un développement suivi et manifeste, s’en écartait parfois : elle avait des premiers mouvements irréguliers, irrésistibles, et elle ne perd pas à ce qu’on l’y surprenne.
N’oublions pas que les hommes, y compris les femmes, ne sont pas tout d’une pièce, qu’il y a des temps d’émotion générale où une démarche, un mouvement qui ne sera pas entièrement d’accord avec l’ensemble de la ligne suivie, peut paraître la chose la plus naturelle ; et, dans ce cas-ci, le mouvement qui aurait porté Mme de Staël à écrire la lettre en question, serait infiniment honorable, et, par conséquent, digne d’elle.
Je ne lui donne ni tort ni raison ; je poursuis chez lui une intime et délicate nuance, je la saisis dans sa ligne originelle et dans son pli, et je me demande si elle gagne ou si elle diminue avec les années.
Quand j’avais dix-huit ans, l’Allemagne aussi avait ses dix-huit ans, et on pouvait faire quelque chose ; mais maintenant ce que l’on demande est incroyable, et tous les chemins sont barrés. » Il est donné à ceux qui sont venus en troisième ou en quatrième ligne, à des époques encombrées et à des fins d’école, de sentir toute la justesse de cette observation.
Dans la revue que passe de ses esclaves le terrible Hamilcar rentré chez lui après une longue absence, tous se rangent sur une ligne, tous retiennent leur haleine : « Un silence énorme emplissait Mégara. » Pourquoi ce silence énorme, et comment y est-on venu ?
… » Il y a bien longtemps que je n’ai visité l’Ermitage, et je ne sais s’il existe encore ; mais il revit tout entier en ces six lignes, comme un petit temple rustique et classique.
De nouveaux noms de poètes se lèvent et scintillent sur bien des points, un peu confusément et au hasard, sans prééminence d’aucun ; il serait prématuré et téméraire d’entreprendre de les classer ; mais, en première ligne désormais, le dernier et le plus jeune d’entre les anciens, se détache et brille un rare talent, une muse charmante, capricieuse, colorée de tous les tons, philosophique aussi à sa manière, et qui n’a pas encore reçu les couronnes qui lui sont dues : tous ceux qui aiment l’art et qui apprécient le style ont nommé Théophile Gautier.
Des lignes nettes, de purs horizons, des contours simples dans leur infinie variété, des formes à la fois sévères et gracieuses, qu’on admire sans effroi : nulle part de ces immensités qui humilient la pensée.
. — Mais il n’y réussit pas suffisamment, dira-t-on ; il a beau décrire à merveille la race dans ses traits généraux et ses lignes fondamentales, il a beau caractériser et mettre en relief dans ses peintures puissantes les révolutions des temps et l’atmosphère morale qui règne à de certaines saisons historiques, il a beau démêler avec adresse la complication d’événements et d’aventures particulières dans lesquelles la vie d’un individu est engagée et comme engrenée, il lui échappe encore quelque chose, il lui échappe le plus vif de l’homme, ce qui fait que de vingt hommes ou de cent, ou de mille, soumis en apparence presque aux mêmes conditions intrinsèques ou extérieures, pas un ne se ressemble14, et qu’il en est un seul entre tous qui excelle avec originalité.
Cet esprit ferme, qui n’a jamais connu la défaillance et que l’âge a respecté dans l’intégrité de sa nature, ne peut supporter l’idée que sa ligne morale, politique, historique, religieuse, reste entamée et rompue sans qu’il y ait de sa part réponse et riposte, réparation à la brèche ou même une dernière sortie vigoureuse.
Pitt lui survit ; elle règne et plane sur le continent, elle triomphe sur toute la ligne.
Ne nous le dissimulons pas : il s’est fait depuis quelques années, et pour bien des causes, une sorte d’intimidation générale de l’esprit humain sur toute la ligne.
Il ne faudrait pourtant pas mettre sur la même ligne, pour l’ensemble des travaux, La Curne de Sainte-Palaye, qui en a fait d’immenses, et Tressan qui n’en a fait que de fort légers.
Non pas ce méticuleux réalisme, cette petite doctrine d’art qui prend les mesures de toutes choses, et croirait tout perdu si elle avait allongé ou raccourci d’une ligne les dimensions des choses.
Il croit aux fictions constitutionnelles, aux contrepoids qui assurent le délicat équilibre des pouvoirs : il sait exactement le point jusqu’où l’exécutif doit aller, la ligne que le législatif ne doit jamais franchir.
Dès les premières lignes, je fus épouvanté et Villiers, tantôt me consultait d’un regard furtif, tantôt écarquillait vers le lecteur ses petits yeux gonflés d’effarement.
Vous connaissez maintenant, Messieurs, la méthode de critique que nous comptons employer, et, du moins dans ses grandes lignes, le programme que nous allons poursuivre ensemble.
Même sous les plis flottants d’une draperie, il faut qu’on sente toujours les lignes du nu.
Votre interruption nous a fait perdre dix lignes. » Il regardait comme perdu tout le temps qui n’était pas donné à l’étude.
J’y écrivais tous les jours quelques lignes, et quelquefois des pages entières.
Il ne trace la ligne de démarcation et l’abîme qu’il y a entre eux et lui, qu’à la dernière extrémité.
Guizot raconte dans sa préface comment, en 1820, sortant des affaires où il était entré en seconde ligne avec ses amis les doctrinaires d’alors, il crut devoir entreprendre d’expliquer dans son cours l’origine et les principes du gouvernement que lui et ses amis avaient essayé de pratiquer : même quand il fait de l’histoire, M.
Il nous le raconte lui-même à chaque ligne de ses chapitres sur le Sacrement ; le quatrième livre explique les trois autres.
Hector, le valet du Joueur, dira dans son rêve de fortune : J’aurais un bon carrosse à ressorts bien liants ; De ma rotondité j’emplirais le dedans… Et le fat marquis, s’étalant aussi tout à l’aise, lâchera ce couplet que chacun achève de mémoire, mais que nous ne pouvons nous empêcher de rappeler : Moi, j’aime à pourchasser des beautés mitoyennes ; L’hiver, dans un fauteuil, avec des citoyennes, Les pieds sur les chenets étendus sans façons, Je pousse la fleurette et conte mes raisons… J’ai rendu toute justice et tout hommage à Boileau ; mais ici, dans cette large et copieuse façon de dire, Regnard remontait par-delà Boileau, et dérivait en droite ligne de Régnier.
Le plus bel éloge qu’on puisse faire de ce poète, dont nous n’avons pas le pareil en notre littérature, c’est Franklin qui l’a fait en quelques lignes.
Dans le premier sujet, plein d’actions coupées et de guerres, il a trouvé des caractères comme il les aime, il a exhumé et peint quelques-uns des défenseurs énergiques des nationalités italiennes : dans le second sujet, où il fallait entrer dans le Sénat et descendre dans le Forum, il a rencontré, en première ligne, le personnage de Cicéron, et c’est ici que, repoussé par le dégoût des lieux communs, il n’a pas rendu assez de justice à cet homme dont on a dit magnifiquement qu’il était le « seul génie que le peuple romain ait eu d’égal à son empire ».
Lui aussi, il a naturellement le goût noble, celui de l’harmonie régulière et des grandes lignes en tout genre.
… » (Nous supprimons quelques lignes.)… Vous faites un livre, défense d’en parler.
Il est certain qu’aucune ligne de démarcation n’a encore été tracée entre les espèces et les sous-espèces, c’est-à-dire les formes qui, dans l’opinion de quelques naturalistes, s’approchent beaucoup, mais n’arrivent pas tout à fait au rang d’espèces, de même qu’entre celles-ci et les variétés bien marquées, ou encore entre les variétés moins distinctes et les différences individuelles.
La Bruyère a écrit une ligne qui est la plus fausse du monde comprise comme nous la comprenons infailliblement de nos jours, très juste dans le sens où, très probablement, il l’a entendue lui-même : « Le plaisir de la critique nous ôte celui d’être vivement touchés de très belles choses ».
Dans la notice que Philarète Chasles a consacrée à Macaulay, c’est bien plus de l’auteur du Guillaume III qu’il s’est occupé que du reviewer, qui, pour les connaisseurs, valait cent fois mieux que l’historien, et il n’est pas étonnant qu’il l’ait jugé avec la bienveillance d’un whig qu’il était lui-même et qui, par conséquent, ne pouvait rien comprendre à la beauté morale de Jacques II, — méconnu par toute l’Angleterre et par la France, très humble servante de l’Angleterre, — de ce Jacques II qui aura un jour son historien si Dieu prête vie à celui qui écrit ces lignes, de ce Roi qui n’a eu que le tort grandiose de rester fièrement catholique, quand la masse imbécile — comme toute masse — ne l’était plus, et qui oppose à la grivoiserie sceptique d’Henri IV écrivant à sa maîtresse Corisandre : « Paris vaut bien une messe », le mot plus grand : « un royaume ne vaut pas une messe », et, pour une messe, perdant héroïquement le sien !
Il en a la passion et il nous les peint dans des tableautins de quelques lignes, avec un fusain aussi léger, aussi rapidement emporté que les choses mêmes qu’il nous retrace.
Ce n’est pas avec calme que l’on parle des choses hors ligne, et celui dont la vie littéraire et philosophique a été un combat contre les autres et contre lui-même a dû semer le vent et récolter la tempête. […] Goethe seul a pu le faire, Goethe, seul a pu demeurer bon, et ne jamais écrire une ligne qui dût devenir funeste à un esprit droit, à un cœur honnête. […] Quant à ses opinions relatives aux temps qu’il a traversés, celles qu’il affectait sont radicalement détruites et balayées, à chaque ligne, par la puissance de son propre souffle. […] Jamais il ne m’a été possible de faire ce qu’on appelle un article en quelques heures, et, quand on me demande, pour un almanach, le concours modeste de quelques lignes, on ne se douta pas qu’on me demande quelque chose de plus pénible que de faire dix volumes. […] J’ai passé la nuit à vous lire. » Suivent deux lignes d’éloges que l’amitié seule peut dicter, mais qu’il y aurait mauvais goût de ma part à transcrire ici.
Une raie de peupliers solitaires au bout d’un champ grisâtre, un bouleau frêle qui tremble dans une clairière de genêts, l’éclair passager d’un ruisseau à travers les lentilles d’eau qui l’obstruent, la teinte délicate dont l’éloignement revêt quelque bois écarté, voilà les beautés de notre paysage ; il paraît plat aux yeux qui se sont reposés sur la noble architecture des montagnes méridionales, ou qui se sont nourris de la verdure surabondante et de la végétation héroïque du nord ; les grandes lignes, les fortes couleurs y manquent ; mais les contours sinueux, les nuances légères, toutes les grâces fuyantes y viennent amuser l’agile esprit qui les contemple, le toucher parfois, sans l’exalter ni l’accabler. — Si vous entrez plus avant dans la vraie Champagne, ces sources de poésie s’appauvrissent et s’affinent encore. […] Çà et là une ligne d’arbres marque sur la campagne la traînée d’un ruisseau blanchâtre. […] Le développement particulier dont nous sommes les témoins n’est que l’histoire d’un atome ; nous voulons que ce soit l’histoire de l’absolu, et nous y appliquons les lignes d’un arrière-plan situé à l’infini.
Il ne put repasser les ponts, arrêté par le peuple criant : « Vive la ligne ! […] Devant moi, sur la rive en face, des lignes d’arbres à la verdure jaune et chaude encore de soleil, s’estompent dans le poudroiement des journées finissantes, en ces tons d’or qui enveloppent la terre avant le crépuscule. […] Quand vous décrivez du nu, ça lui paraît en quelque sorte de l’onanisme littéraire sous le prétexte de la ligne… Vous venez de le proclamer tout à l’heure, vous ne cherchez pas à mettre de la sensualité là-dedans.
16 janvier Peu de gens connaissent ce grand bonheur de regarder des dessins anciens, en fumant des cigares opiacés : c’est mêler le nuage de la ligne au rêve de la fumée. […] » Nous remontons avec Hébert qui nous parle de Rome, de l’Académie, des lignes de la campagne de là-bas avec une voix amoureuse et émue d’un homme qui y aurait là, la patrie de son talent, de ses goûts, de ses bonheurs. […] La petite Dinah me demande assez maussadement d’ajouter dix jolies lignes à son rôle, et Lafontaine me témoigne un peu de mauvaise humeur d’avoir été ouvrier dans le passé de M.
Puis, en remontant plus haut, mais toujours dans la même ligne, il fait une offrande au quatrième, au cinquième, au sixième ascendant. […] La descendance en ligne masculine établissait seule entre deux hommes le rapport religieux qui permettait à l’un de continuer le culte de l’autre. […] Il n’était même pas facile au pontife, à mesure qu’il en écrivait les lignes, d’y insérer sciemment des faits contraires à la vérité. […] La ligne de démarcation était si profonde qu’on imaginait à peine que le mariage fût permis entre habitants de deux villes différentes. […] Chaque cité avait autour de son territoire une ligne de bornes sacrées.
On se trouvait très vite, en quelques lignes, dans la zone supérieure de la fantaisie ». […] Par les titres qui nous en ont été conservés, il semble que l’influence d’Edgar Poe eût été extrêmement présente dans les inventions romanesques de Baudelaire, mais ce n’est qu’une supposition, Quelques scénarios incomplets, quelques lignes de pians ne suffisent pas à nous apprendre ce qu’eût été Baudelaire dramaturge et Baudelaire romancier et conteur. […] Le brigantin rencontra aux îles de la Chandeleur une violente bourrasque qui le rejeta vers la baie des Apalaches, et le fit s’échouer sur une ligne de brisants, à une portée de fusil de l’île aux Chiens, sans qu’il fût, pendant trois jours, possible de prendre terre. […] Il est certain que ces figures d’autrefois, fixées sur la toile ou le papier, en leurs lignes ou leurs couleurs, ont un charme singulier. […] Il faut espérer qu’il sera plus sage à l’avenir. » Suivent diverses mentions : « Le 15 novembre 1784 envoyé à mon fils aîné une inscription sur le Trésorier des guerres de 140 livres. » « Le 11 mai 1785 envoyé pour compléter sa « pantion » une lettre de change signée Monge de 579 livres. » Aussitôt après se lisent quelques lignes d’une écriture différente : « J’ai reçu de ma mère, la somme de 720 livres.
J’y trouve une sorte de réalisme spontané dans le joli : c’est un art qui suppose une grande justesse de coup d’œil, une merveilleuse adresse de main, une imagination fertile, mais limitée à l’arrangement des lignes et des couleurs en vue de l’agréable ; d’ailleurs une insouciance complète de la composition, une irréflexion de petits hommes rudimentaires. […] Il ne saurait écrire vingt lignes sans dialoguer. […] Par exemple, je dictais à mes doux collégiens les lignes suivantes : « Vous supposerez que, après la dernière scène des Précieuses ridicules, Cathos et Madelon, restées seules, tout abîmées de confusion, reconnaissent leur sottise et jurent de se corriger ; et que, M.
Il sera comme étourdi de son audace et, dans son émotion, il la forcera ; chaque trait sera d’une amertume atroce ; l’œuvre sera d’un bout à l’autre « brutale » et « cruelle » et « navrante » ; il n’y aura pas une ligne qui ne nous crie : « quels êtres puissamment abjects, et quelle puissante audace il y a à les peindre ! […] Une figure pleine et grasse, des yeux qui luisent sous des paupières discrètes, les lignes arrondies d’une chatte gourmande, voilà ce que je me rappelle, et c’est quelque chose, mais c’est tout. […] Le théâtre n’admet le réalisme qu’à légères doses, parce que le réalisme est tout fait de menus détails, et que le théâtre procède par grandes lignes. […] ; point de traitants, d’agioteurs, de femmes d’intrigue, de chevaliers d’industrie, de « chevaliers à la mode », de valets flibustiers, de parvenus, de femmes galantes, de dévotes, de directeurs ; — et point non plus de comédies de caractère : point de pièce qui s’intitule le distrait, l’inconstant, le maniaque, le disputeur, le décisionnaire, le grondeur, le grave, le triste, le gai, le sombre, le morne, l’acariâtre, le tranquille, l’amateur de prunes, et qui nous offre le divertissement de dix lignes de La Bruyère en cinq actes ! […] Il est comme une vie, il n’a pas de plan, mais seulement une direction générale ; il est comme un esprit, il n’a pas de système, mais seulement une tendance constante ; et tendance constante et direction générale suffisent comme ligne centrale d’un esprit bien fait et d’une vie bien faite.
Henri, dès qu’il l’aperçut, lui ordonna de mettre ses arquebusiers à pied afin qu’ils servissent d’éclaireurs et d’enfants perdus ; il le plaça, lui, avec sa compagnie de gens d’armes à son aile droite, et, l’emmenant un moment sur la ligne : « Tenez avec moi, dit-il, car je vous veux montrer toute la disposition des deux armées, afin de vous instruire à votre métier. » Rosny, même à la guerre, n’est qu’un élève de Henri IV.
Un des morceaux enfin dont on se souvient, et qu’on a souvent cité, est celui où Gibbon, venant de terminer à Lausanne dans son jardin les dernières lignes de sa grande Histoire, pose la plume, fait quelques tours dans son berceau d’acacias, se prend à regarder le ciel, la lune alors resplendissante, le beau lac où elle se réfléchit, et à dire un adieu mélancolique à l’ouvrage qui lui a été, durant tant d’années, un si bon et si agréable compagnon.
Duclos a cinquante-neuf ans : le profil est net, tranché, spirituel, le front beau, l’œil vif, ouvert et assez riant ; la ligne du nez et du menton est prononcée et bien formée sans rien d’excessif ; la lèvre entrouverte et parlante vient de lancer le trait, elle n’a rien de trop mince ; et l’ensemble de la physionomie non plus n’a rien de dur.
Il y avait encore sous la Restauration une ligne de démarcation dans le grand monde ; n’allait pas dans le faubourg Saint-Germain qui voulait ; ceux que leur naissance n’y installait point tout d’abord n’y étaient pas introduits, comme depuis, sur la seule étiquette de leur esprit.
Dans Homère, même du temps de cette Grèce à demi sauvage, quelle beauté simple de lignes !
De là, avec quel plaisir nous avons discerné à peine la charrue au loin se mouvant lentement, et à côté du laborieux attelage, qui ne déviait point de sa ligne, le paysan robuste raccourci jusqu’à ne paraître qu’un enfant !
III, p. 199, à la deuxième ligne de la note) qu’il faut absolument refaire et restituer dans le sens, sinon dans les termes, que voici : « Il (ce titre) s’était perpétué après avoir été introduit par M. de Guise pour se rendre populaire. » — Enfin il n’est pas possible que dans une première partie de phrase (t.
Parmi les hommes de lettres qui moururent à Berlin, il en est un assez peu estimé et dont les ouvrages sont dès longtemps au rebut : ne croyez pas que Frédéric les trouvât bons, mais il nous fait du personnage un portrait vivant et parlant, qui dit tout en quelques lignes : Nous avons perdu le pauvre La Mettrie (21 novembre 1751).
… je lui donnerai à souper, je le mettrai dans mon lit, je lui dirai : Voilà un bon souper ; ce lit est le meilleur de la maison ; faites-moi le plaisir d’accepter l’un et l’autre, et d’être heureux chez moi. » Ce trait, ajoute Grimm, m’a fait un sensible plaisir : il peint M. de Voltaire mieux qu’il ne l’a jamais été ; il fait en deux lignes l’histoire de toute sa vie.
[NdA] Me figurant Vauvenargues venu cinquante ans plus tard et dans les années de la Révolution, j’ai toujours aimé à le voir en idée à côté d’André Chénier et à peu près dans la même ligne politique.
Son bonheur serait d’étudier sans dérangement jusqu’à l’heure du dîner : les jours où il peut le faire sont des jours heureux, silencieux, et, par là même, ceux qui tiennent le moins de place en son journal ; il les exprime en deux lignes : « Le matin, (saint) Basile ; après le dîner, préparation de ma leçon, puis la leçon (Casaubon est professeur) ; ensuite un repas léger, Basile ; le reste à l’ordinaire. » Voilà le cercle où il aimerait à tourner sans cesse.
Notre conversation alla, pour ainsi dire, tout d’un trait de La Chênaie à Saint-Malo, et, nos six lieues faites, j’aurais voulu voir encore devant nous une longue ligne de chemin ; car vraiment la causerie est une de ces douces choses qu’on voudrait allonger toujours. » Il nous donne une idée de ces entretiens qui embrassaient le monde du cœur et celui de la nature, et qui couraient à travers la poésie, les tendres souvenirs, les espérances et toutes les aimables curiosités de la jeunesse.
De plus il a sous lui toute une élite d’hommes secondaires que cette histoire nous découvre et qui prennent figure et vie à nos yeux : — en première ligne, Martinet, lieutenant-colonel du régiment du Roi, mort maréchal de camp, officier modèle, dont le nom devient proverbial dans l’armée, et qui est l’instrument de la réforme, le parfait instructeur, le praticien de la discipline nouvelle dans l’infanterie ; — après lui, le chevalier de Fourilles, qui rend des services pareils, et qui est un autre Martinet pour la cavalerie ; — des intendants comme Chaniel, agent zélé, ferme, intelligent, dont les plus grands généraux redoutent les écritures, qui ne paraît pas en avoir abusé toutefois, et que Louvois, fidèle au principe de la séparation des pouvoirs, soutient sans broncher dans ses contestations avec les maréchaux victorieux, après la conquête.
le style d’Apulée est un de ceux qui nous acheminent le plus en droite ligne vers la langue de saint Augustin.
Artiste militaire, ne le dédoublons pas, et sachons-lui gré, dans sa ligne, d’avoir été naïf et peuple.
Les espérances ambitieuses du prélat durent se renouveler pourtant et s’irriter à chaque vacance des Sceaux ; il les convoitait encore de plus belle à la mort de Le Tellier, en 1685, et Saint-Simon, dans la revue qu’il fait à cette occasion des prétendants divers, a dit admirablement de lui45 : « Harlay, archevêque de Paris, né avec tous les talents du corps et de l’esprit, et, s’il n’avait eu que les derniers, le plus grand prélat de l’Église, devait s’être fait tout ce qu’il était ; mais de tels talents poussent toujours leur homme, et, quand les mœurs n’y répondent pas, ils ne font qu’aigrir l’ambition ; sa faveur et sa capacité le faisaient aspirer au ministère ; les affaires du Clergé, d’une part, et du roi, de l’autre, avec Rome, lui avaient donné des espérances ; il comptait que les Sceaux l’y porteraient et combleraient son autorité en attendant ; c’eût été un grand chancelier ; il ne pouvait être médiocre en rien, et cela même était redouté par le roi pour son cabinet, et encore plus par ses ministres. » Tout le portrait de l’homme est dans ces quelques lignes de Saint-Simon ; il y est en germe et ramassé comme tout l’arbre est dans le bourgeon trop plein qui crève de suc et de sève.
Tandis que Corneille redouble et produit sur la scène cette série de chefs-d’œuvre grandioses et trop inégaux, l’éducation des esprits se poursuit concurremment et se continue de moins haut par les romans des Gomberville, des Scudéry, par les traductions de d’Ablancourt, par les lettres des successeurs et des émules de Balzac et de Voiture, par les écrits théologiques d’Arnauld et de Messieurs de Port-Royal : — autant d’instituteurs du goût public, chacun dans sa ligne et à son moment.
Madame Royale (ainsi nommait-on la duchesse mère qui prit en main la Régence) tint toute la première, à l’égard de son fils, une ligne de conduite très peu maternelle : elle aimait le pouvoir, elle ne haïssait pas le plaisir, elle ne songea point à élever son fils en vue d’un prochain partage et exercice de l’autorité ; elle le traita avec froideur, avec roideur, non en mère française, mais en mettant sans cesse l’étiquette entre elle et lui.
Les amateurs recherchent les portraits avant la lettre ; je fais comme eux, et, quoi qu’il arrive ensuite, je suis sûr que, pour les lignes essentielles ou délicates, ces premières épreuves à l’usage des amis, et qui ne sont point dans le commerce, ne trompent pas.
Tout immensément riche, qu’il est, qu’il se crée des devoirs, des obligations, des gênes ; qu’il devienne député, diplomate, ambassadeur, administrateur d’une grande ligne de chemins de fer, que sais-je ?
Parlant d’Homère et de son rapport avec Virgile, Pope établit la vraie ligne et la vraie voie pour les talents classiques et qui restent dans l’ordre de la tradition : « Lisez, dit-il, et relisez Homère dans le texte, en le comparant sans cesse à lui-même, et pour votre commentaire prenez la muse de Mantoue.
M. de La Fayette, en ces années, était le véritable maître de Paris, et sa probité roide, son étroitesse de vue et de ligne ne permettaient de rien concerter avec lui.
La transmission du pouvoir n’a lieu ni d’après la loi musulmane, ni d’après la coutume générale des autres peuples, en ligne directe, du père au fils, mais par voie indirecte, du défunt au fils aîné de sa sœur aînée.
Il est dans le vrai encore et dans la ligne de la science lorsque, rappelant combien les conditions de la vie ont varié sur cette terre depuis la première apparition des êtres organisés et des espèces vivantes, il ajoute qu’il n’y a pas lieu de les circonscrire, de les limiter à une seule sphère, et que cette différence de conditions et de formes qui a éclaté successivement (comme la géologie l’atteste) sur notre globe terrestre, peut varier et se diversifier à plus forte raison de globe à globe, de planète à planète.
MM. de Goncourt sont des spécialistes trop distingués pour qu’on essaye (ce qui serait d’ailleurs bien superflu) de les détourner un seul instant de leur ligne et de leur voie ; elle est la leur, ils se la sont faite, et ils ont certes droit de la tenir et de la garder : je ne voudrais, si j’avais à leur donner conseil, que les conseiller dans leur sens même et avec l’intelligence de leur direction.
C’était un homme doux, gai, salé, sans vouloir l’être, et qui répandait naturellement les grâces dans la conversation ; très-sûr et extrêmement aimable… » Quand on a le bonheur d’avoir quelques lignes tout à fait particulières de la main d’un tel homme, et qui nous rendent le fond de son jugement, comment se plaire à le déprimer ?
C’est une anecdote qui m’arrive par tradition, en droite ligne, et que Berryer aimait à raconter.
J’eus soin d’ailleurs de m’y maintenir dans cette ligne de neutralité littéraire que j’aime à observer, surtout en face de doctrines tranchées et absolues.
Sa persévérance si remarquable et cette force réelle dont j’ai parlé consistaient plutôt à suivre sa ligne en tenant compte habilement des obstacles, et même à s’en faire au besoin des points d’appui, des occasions de diversité.
Arnould Fremy n’a pas voulu entrer dans l’examen de l’auteur par ce côté qui, selon nous, était le plus indiqué, et qui laissait d’ailleurs tout son jeu à la critique et à l’érudition ; il semble, en vérité, qu’il se soit dit, avant tout, qu’il y avait quelque chose à faire contre André Chénier, sauf à fixer ensuite les points ; l’historique assez inexact qu’il trace des vicissitudes et du succès des œuvres est empreint à chaque ligne d’un accent de dépréciation qui a peine à se déguiser.
Tant qu’elle se borne à rire des Etats, des gentilshommes campagnards et de leurs galas étourdissants, et de leur enthousiasme à tout voter entre midi et une heure, et de toutes les autres folies du prochain de Bretagne après dîner, cela est bien, cela est d’une solide et légitime plaisanterie, cela rappelle en certains endroits la touche de Molière : mais, du moment qu’il y a eu de petites tranchées en Bretagne, et à Rennes une colique pierreuse, c’est-à-dire que le gouverneur, M. de Chaulnes, voulant dissiper le peuple par sa présence, a été repoussé chez lui a coups de pierres ; du moment que M. de Forbin arrive avec six mille hommes de troupes contre les mutins, et que ces pauvres diables, du plus loin qu’ils aperçoivent les troupes royales, se débandent par les champs, se jettent à genoux, en criant Meà culpà (car c’est le seul mot de français qu’ils sachent) ; quand, pour châtier Rennes, on transfère son parlement à Vannes, qu’on prend à l’aventure vingt-cinq ou trente hommes pour les pendre, qu’on chasse et qu’on bannit toute une grande rue, femmes accouchées, vieillards, enfants, avec défense de les recueillir, sous peine de mort ; quand on roue, qu’on écartèle, et qu’à force d’avoir écartelé et roué l’on se relâche, et qu’on pend : au milieu de ces horreurs exercées contre des innocents ou pauvres égarés, on souffre de voir Mme de Sévigné se jouer presque comme à l’ordinaire ; on lui voudrait une indignation brûlante, amère, généreuse ; surtout on voudrait effacer de ses lettres des lignes comme celles-ci : « Les mutins de Rennes se sont sauvés il y a longtemps : ainsi les bons pâtiront pour les méchants : mais je trouve tout fort bon, pourvu que les quatre mille hommes de guerre qui sont à Rennes, sous MM. de Forbin et de Vins, ne m’empêchent point de me promener dans mes bois, qui sont d’une hauteur et d’une beauté merveilleuses ; » et ailleurs : « On a pris soixante bourgeois ; on commence demain à pendre.
Marie-Joseph Chénier a écrit sur Mme de Souza, avec la précision élégante qui le caractérise, quelques lignes d’éloges applicables particulièrement à Eugène : « Ces jolis romans, dit-il, n’offrent pas, il est vrai, le développement des grandes passions ; on n’y doit pas chercher non plus l’étude approfondie des travers de l’espèce humaine ; on est sûr au moins d’y trouver partout des aperçus très-fins sur la société, des tableaux vrais et bien terminés, un style orné avec mesure, la correction d’un bon livre et l’aisance d’une conversation fleurie…, l’esprit qui ne dit rien de vulgaire, et le goût qui ne dit rien de trop. » Mais indépendamment de ces louanges générales, qui appartiennent à toute une classe de maîtres, il faut dire d’Eugène de Rothelin qu’il peint le côté d’un siècle, un côté brillant, chaste, poétique, qu’on n’était guère habitué à y reconnaître.
Elle voudrait la lettre heureuse pour lui, et elle la craint heureuse ; elle est déchirée si elle l’a vu sourire aux premières lignes (car en ces cas d’attente il décachetait brusquement), et s’il lui semble plus triste après avoir parcouru, elle demeure triste et déchirée encore.
XIV Le portrait de Mucien, tracé en quelques lignes, présage du premier coup d’œil à l’empire des agitations, à Galba des compétiteurs : « Homme, dit Tacite en parlant de Mucien, déjà aussi célèbre par ses succès que par ses disgrâces ; jeune, il avait ambitieusement caressé des amitiés illustres ; bientôt, ayant dissipé ses richesses, il glissa dans le besoin.
Les dernières pages sont lugubres : l’enterrement de Claude, un jour de pluie, dans le misérable cimetière neuf, pelé, lépreux, avec des terrains vagues et, au-dessus, la ligne du chemin de fer.
Hoffman était celui des trois auquel, évidemment, il accordait le plus, et c’est sur la même ligne qu’il aurait aimé sans doute à être rangé, au-dessus de Dussault, à qui, sans le dire expressément, il reconnaissait plus de forme que de fond, et plus d’acquis que d’esprit.
Je souffre cruellement, et je voudrais arriver vite au bout de ma carrière. » À chaque ligne de cette correspondance naïve, je vois l’ennui, le mépris du présent, la haine des générations vivantes, de « ces myrmidons d’aujourd’hui qui se fagotent en grands hommes », le culte surtout, l’idolâtrie de la jeunesse, de celle qu’il n’a plus : « Je suis toujours triste, parce que je suis vieux… Restez jeune, il n’y a que cela de bon. » L’Élégiaque grec ne dit pas autrement, mais il est Grec et païen.
Le mot impitoyable, à chaque ligne, est trouvé.
Dans sa fable d’Hercule au ciel, Florian commence par ces lignes prosaïques : Lorsque le fils d’Alcmène, après ses longs travaux, Fut reçu dans le ciel, tous les dieux s’empressèrent De venir au-devant de ce fameux héros… Certes, La Fontaine, ayant à peindre Hercule enlevé de son bûcher dans l’Olympe, et s’asseyant tout en feu entre les dieux, s’y serait pris autrement.
En ceci comme en tout, il suit sa ligne et fait preuve d’un sens pratique étendu.
Son livre est un trésor d’observations morales et d’expérience ; à quelque page qu’on l’ouvre et dans quelque disposition d’esprit, on est assuré d’y trouver quelque pensée sage exprimée d’une manière vive et durable, qui se détache aussitôt et se grave, un beau sens dans un mot plein et frappant, dans une seule ligne forte, familière ou grande.
Je laisse à de plus osés de mettre la main au feu pour des questions de ce genre : il me suffit, et il doit suffire à ceux qui cherchent avant tout le caractère du personnage, que Mme de Maintenon ait eu dans l’ensemble une ligne de conduite pleine de réserve et de convenance.
Mme de Nelfort loue son fils, elle loue sa nièce ; M. de Montbreuse, homme prudent, froid, et qui cache sa tendresse sous des dehors réservés, essaye de prémunir sa fille contre ces exagérations mondaines ; il lui trace aussi la ligne de conduite qu’il voudrait lui voir tenir avec son cousin Alfred.
« Ce qui m’anime en tout objet, dit Beaumarchais, c’est l’utilité générale. » — « À chaque événement important, disait-il encore, la première idée qui m’occupe est de chercher sous quel rapport on pourrait le tourner au plus grand bien de mon pays. » Dans le courant de la guerre d’Amérique, il conçut plus d’une fois de telles idées et les mit en circulation avec bonheur ; comme, par exemple, le jour (1779) où, pour relever le courage des négociants et armateurs, il proposa au ministre de déclarer les protestants désormais admissibles dans les chambres de commerce, d’où ils étaient jusqu’alors exclus ; ou comme ce jour encore où, après la défaite navale de M. de Grasse (1782), il eut l’idée que chaque grande ville offrît au roi un vaisseau de ligne, portant le nom de la cité qui lui en ferait hommage.
Le premier livre de cette gracieuse pastorale, si connue par la traduction d’Amyot, offrait une lacune que l’on supposait n’être que de quelques lignes, et qui se trouva être de six ou sept pages, à l’endroit d’une très jolie scène de bain, puis de dispute jalouse et de baiser.
Il y a, dans tout ce qu’il nous expose de sa vie aux diverses époques, un dessous de négociations qui échappe : qu’il nous suffise de saisir sa ligne générale de conduite.
Quand, par l’effet de l’association et de l’hérédité, le travail de comparaison et de classification qu’enveloppe la perception est devenu inhérent au mécanisme des organes, alors les plaisirs élémentaires disparaissent entièrement du champ de l’observation : il n’en reste que les lignes et silhouettes, comme dans un dessin délicat.
Peut-être en effet, au point de vue physiologique, cette loi n’est-elle, comme la gravitation dans les corps et la sélection dans les espèces vivantes, qu’un cas particulier des lois qui règlent la propagation du mouvement selon la ligne de la moindre résistance.
* * * — Dans cette vie de succulence, qui est, en cette maison, le dernier mot de la cuisine provinciale, et peut-être son chant du cygne, il me vient un doux hébétement, qui me rend incapable d’écrire une ligne.
La ligne de démarcation est malaisée parfois à tracer.
Elle a étudié âprement Hegel et Fuerbach, Elle a déformé les lignes d’un front de camée à écraser tous ces œufs d’autruche, comme disait dans son dédain Joubert, cet amoureux de la lumière.
Aussi, quand les premiers articles de Macaulay parurent, vers 1823, dans cette Revue d’Édimbourg qui fit jaillir les Revues du sol, par toute l’Europe, comme Pompée se vantait de faire jaillir de terre, d’un seul coup de pied, des soldats, on s’étonna, on fut charmé de ces articles substantiels et légers qui n’étaient plus de la critique par pieds, pouces et lignes, appliquée à plat sur un livre comme la mesure d’un tailleur sur le corps d’un homme, mais qui semblaient toute une atmosphère dilatée autour de ce livre et chargée de toutes les influences dans lesquelles on le retrouvait !
Les artistes, qui voient les lignes sous le luxe ou l’efflorescence de la couleur, percevront très bien qu’il y a ici une architecture secrète, un plan calculé par le poète, méditatif et volontaire.
Il surveille les chemins de fer, les lignes fluviales, l’exploitation des forêts211.
Son style indique à chaque ligne la haine des faits particuliers et précis, l’amour de l’abstraction, l’habitude invincible de considérer uniquement et perpétuellement les qualités générales.
Et c’est en effet à ces heures-là surtout que le pauvre garçon écrivait : c’est à ces heures-là, au bruit du vent, « auprès d’un humble feu et d’une lumière vacillante » qu’il a tracé les lignes que je viens de vous lire. […] Or, René est un petit livre bizarre de quarante pages, où il n’y a peut-être pas plus de cinquante lignes qui aient été neuves à leur moment. […] C’est que, explique-t-il, « je ne vaux rien du tout en seconde ligne ». […] Ces simples lignes me paraissent prodigieuses : (Compiègne, avril 1814). […] D’autant plus que, cinq lignes après, exactement, il nous dit que le bibliothécaire de la ville de Bamberg le vint saluer à cause de sa renommée, « la première du monde, selon lui, ce qui réjouissait la moelle de mes os ».
Et qui eût empêché d’y mêler, pour varier les couleurs et les lignes, les personnages de la comédie antique avec leurs tuniques, leurs chlamydes et leurs voiles : l’esclave rusé, le parasite jovial, le leno, le miles gloriosus et les belles esclaves grecques aimées des fils de famille ? […] Je n’en suis pas moins obligé d’écrire, sur ce rien, le même nombre de lignes que si j’avais vu un drame en cinq actes et deux ou trois vaudevilles. […] Je ne sais pas du tout, en ce moment, avec quoi je remplirai ces cinq cents lignes ; je sais seulement qu’elles seront écrites pour l’heure qui m’est fixée.
Car nous n’aimons pas beaucoup, en général, ces incursions, — presque toujours et nécessairement un peu hostiles, — dans la vie privée d’un grand artiste, mais c’est à une condition, qui est que l’on connaisse au moins, avec quelque précision, les lignes essentielles de sa biographie. […] Vous rappelez-vous ces lignes du Préambule de Paul et Virginie ? […] « Les premières lignes de la préface de la Terre promise m’ont tout d’abord donné le frisson, écrivait quelqu’un l’autre jour. […] Gumplowicz, qui ne voit ce que l’histoire y gagnerait d’intérêt et de clarté, de richesse dans le détail, de simplicité dans les grandes lignes, de profondeur dans les perspectives, et de mouvement dans sa suite ? […] » Je ne connais pas de philosophie déterministe de l’histoire qui puisse prévaloir contre ces deux petites lignes de Pascal.
Il est l’homme des systèmes philosophiques tracés en grandes lignes brillantes, sans consistance, montant au ciel comme des fusées et retombant de même, après une illumination d’un instant. […] De ceux-ci la ligne de vie est assez bizarre. […] Je l’ai dit, je crois, quelque part, c’est comme si l’État, qui a une ligne de chemin de fer de Paris à Bordeaux, permettait, sans doute, à la Compagnie d’Orléans d’avoir une ligne de Paris à Bordeaux, mais forçait tous les voyageurs de la Compagnie d’Orléans à payer à l’État une redevance pour entretenir la ligne d’État Paris-Bordeaux. Il y aurait quelque chance pour qu’on ne voyageât plus que sur la ligne de l’État. […] Or, dans le même article, comme j’ai dit, cent cinquante lignes plus loin, M.
Qui sait s’il n’y a pas, dans l’angle poudreux de quelque vieille bibliothèque, un rouleau sali dont on ne toucherait les feuillets qu’avec respect et dont tout ce qui pense au monde étudierait avec fièvre les lignes a demi illisibles ? […] Dans un pamphlet (de Villiers, sans doute), La Vengeance des marquis, ou Réponse à l’Impromptu de Versailles (1664), nous voyons que Molière — l’auteur l’appelle Alcipe — prend la défense de Montfleury et retrace en quelques lignes le portrait ou le portrait-charge, pour mieux dire, de Molière acteur. […] Le célèbre portrait du Louvre, attribué pendant fort longtemps à Mignard, ne nous rend pas mieux que ces quelques lignes la physionomie pensive de Molière. […] Il en a la franchise, la verve, la bonté, le rire clair, la netteté de pensée et de langage ; il descend en droite ligne de ces écrivains sans alliage qui gardent dans leurs veines le sang même de notre vieille Gaule, les Rabelais, les Montaigne, les anciens conteurs des temps passés. […] Un nouvel autographe de Molière « Circonstance assez bizarre, l’on connaît à peine deux lignes authentiques de l’écriture de Molière.
C’est qu’elle est ainsi faite, que, de tout ce qui la touche, rien ne la pénètre profondément ; c’est que au bruit même du canon (et mes vitres sont là qui tremblent, pendant que j’écris ces lignes), elle donne audience à ses pensées, vaque à ses devoirs habituels, et cela sans trop d’efforts, suivant la pente de son caractère insoucieux. […] À présent ces deux lignes ne nous rappellent rien, et, si elles ont pour nous une signification, c’est une signification qui n’a aucun rapport avec l’idée même de Molière et avec l’effet qu’il voulait en tirer sur les hommes de son temps. […] Weiss des Débats, ces quelques lignes que je demande la permission de vous mettre sous les yeux : « L’Avare est, avec le Tartuffe, le morceau de Molière le plus rude à faire passer au théâtre. […] Un faux dévot, dit-il, ne joue pas à la ligne directe ; il ne s’insinue jamais dans une famille où il y a tout à la fois une fille à pourvoir et un fils à établir ; il y a là des droits trop forts et trop inviolables, etc. […] Il est bien peu de gens à qui il ne soit arrivé de laisser ainsi traîner, sans avoir l’air d’y prendre garde, une main sur le dos d’un fauteuil, observant de quel air l’avance est reçue et tout prêt à la retirer si le poisson ne mord pas à la ligne.
Dans Esther, le style n’a rien de bien attrayant ; sous ce rapport, M. de Balzac n’a jamais été en première ligne, et sa nouvelle production ne le fait pas monter plus haut que les anciennes. […] Les quelques lignes de la conclusion ne sont pas moins attendrissantes et terminent bien le récit. […] vous dit-il dès la première ligne et le voilà parti de nouveau enfourchant la première idée qui lui passe par la tête et vous menant grand train aussi loin que possible de son sujet.
Il faisait mieux : il les pillait ; les nouvelles de Cervantès et les pièces de Lope de Vega étaient sa mine d’or. » Qui ne croirait, en lisant ces lignes, que les Nouvelles de Cervantès se comptent au moins par dizaines, comme celles de Boccace ou de Marguerite ? […] Sauf la passion, et pour ainsi dire la rage du prosélytisme, ces messieurs n’étaient pas trop en arrière des sentiments philosophiques du siècle suivant. » Ce n’est pas nous qui le lui faisons dire, et il y a tantôt quarante ans que ces lignes ont paru ! […] N’est-ce pas, au surplus, ce que Béralde dit en propres termes, dans une longue scène du Malade imaginaire, qu’on a grand soin d’abréger au théâtre, et dont je prends, pour cette raison, la liberté de reproduire ici quelques lignes. […] Au nom du cartésianisme et de l’épicuréisme, conjurés ce jour-là contre la religion, n’est-ce pas en effet à Pascal, n’est-ce pas aux Pensées, alors parues depuis cinq ou six ans, n’est-ce pas aux moralistes chrétiens — protestants ou jansénistes, — que Spinoza répond dans les lignes suivantes ? […] Je demande pardon pour cette dernière ligne.
Naudé, lui, n’avait aucun de ces caractères qui étaient propres au siècle nouveau ; il ne se souciait en rien de l’expression littéraire, il ne s’en doutait même pas ; et pour ce qui est d’innover et de renchérir en fait de système, s’il avait jamais pensé à le faire, c’eût été dans les lignes mêmes et comme dans la poussée du xvie siècle, en reprenant quelque grande conception de l’antiquité et en greffant la hardiesse sur l’érudition. […] Parmi nos illustres ancêtres les bibliothécaires (car je n’y veux reconnaître ni compter les esclaves et les affranchis), il cite donc en première ligne Démétrius de Phalere, Callimaque, Ératosthène, Apollonius, Zénodote, chez les Ptolémées, pour la bibliothèque d’Alexandrie ; Vairon et Hygin à Rome, pour la Palatine.
Ces longs raisonnements tirés de ligne en ligne vous empêchent d’entrer d’abord en des connoissances plus hautes qui ne trompent jamais.
Elle met des agréments à toutes les lignes. […] Il en jouit comme d’un tableau ; il jouit des raffinements de la vie mondaine, des grandes lignes tranquilles de ce haut salon lambrissé, du doux reflet des longues glaces et des porcelaines luisantes, de la gaieté nonchalante des petits Amours sculptés qui s’embrassent au-dessus de la cheminée, du son argentin de ces voix flûtées qui autour de la table à thé gazouillent des médisances.
La diplomatie de chaque nation est l’expression de son caractère : Égoïste, superbe, religieuse, humanitaire et philosophique, en Angleterre ; Héroïque, généreuse et versatile, en France ; Immorale, cauteleuse et improbe, en Prusse ; Modeste, honnête et intéressée, en Hollande ; Ombrageuse et amphibie, en Belgique ; Persévérante, longanime, sans scrupule, mais non sans honnêteté, en Autriche ; Vaine, chevaleresque et loyale, en Espagne ; Grecque, habile, à petits manèges et à grandes vues, en Russie ; Consommée, universelle, sachant toutes les langues des cabinets, à Rome, Rome, la grande école de la diplomatie moderne, puissance qui ne vit que de politique sur la terre, d’empire sur les consciences, de ménagements avec les cours, de résistance derrière ce qui résiste, d’abandon de ce qui tombe, d’acquiescement aux faits accomplis ; Dépendante et adulatrice, dans les petites cours d’Allemagne et d’Italie, clientes de la force et de la victoire ; Hardie, inquiète, insatiable, en Piémont ; prompte à tout recevoir, quelle que soit la main qui donne ; prête à tout prendre, quelle que soit la main qui laisse envahir ; Alpestre, rude, pastorale, probe, mais intéressée, en Suisse ; non dépourvue d’une sorte d’habileté villageoise, se faisant appuyer par tout le monde, mais n’appuyant elle-même personne contre la fortune ; Enfin, simple et franche en Turquie, jouissance arriérée dans la voie de la corruption des cabinets européens ; puissance de bonne foi, dont la candeur est à la fois la vertu et la faiblesse ; puissance naïve qui n’a jamais eu de diplomatie que la ligne droite ; puissance qui a toujours cru à toutes les paroles, et qui n’a jamais manqué à la sienne ; puissance, enfin, destinée à être la grande et éternelle dupe de tous les cabinets, dupeurs de son ignorance et de sa loyauté. […] Il ne dépassa jamais la ligne de Mirabeau ; car il avait compris tout de suite qu’en deçà de Mirabeau on était timide, et qu’au-delà on était perdu.
Aristote se proposait, ainsi qu’il l’annonce dès les premières lignes de son ouvrage, de s’occuper de la poésie en général, et il comptait surtout traiter des trois genres principaux : la tragédie, le poème épique et la comédie, sans oublier quelques genres secondaires, et notamment le dithyrambe. […] Boileau répare cet oubli, du moins en partie, dans sa lettre de réconciliation à Charles Perrault ; mais il y semble encore mettre la Fontaine sur la ligne de Voiture et de Sarazin.
Le bâton du grand-trésorier, disait le poète, était devenu un serpent entre les mains de Sid-Hamet au rebours de la verge de Moïse ; ce bâton était attiré par les trésors cachés et par les bourses pleines ; il servait aussi à Sid-Hamet de ligne à pêcher, ligne merveilleuse qui prend le poisson et garde l’appât26 (Swift l’avait éprouvé lui-même).
C’est le style haché par trop menu de l’homme qui lire à la ligne (joli style de Paris !). […] Et quelques lignes plus bas : « Il apportait dans l’expiation la fougue et la force de sa nature.
» Quand bien même il ne subsisterait du crime monstrueux de celui que nous venons de voir présider, à l’exemple presque universel du clergé de France, aux pires violences et à la Révocation, quand il ne subsisterait, dis-je, que ce témoignage écrit de sa main, que ces quelques lignes révélatrices éclairant en traits de flammes sa nature intime, elles suffiraient, je pense, pour couvrir d’un éternel ridicule les biographes effrontés qui s’efforcent de transformer le Chef-Inquisiteur en un modèle de tendresse et de justice. […] En résumé, l’originalité de Bossuet, comme théologien, est précisément de repousser toute originalité, toute innovation, même tout développement neuf ; de se fortifier au centre de la doctrine officielle, de n’admettre que les choses consacrées et ne rejeter aucune de celles qui sont consacrées… » Cette métaphysique, ayant été définitivement située par d’autres, dans le puits sans fond des erreurs humaines, je ne crois pas nécessaire de commenter ces quelques lignes qui contiennent leur propre jugement.
Son illusion était de croire qu’après avoir été ministre influent et en première ligne, il pourrait se replier à volonté, s’associer un collègue et non un rival, se fondre intimement avec lui, et, sous cette forme agréable qu’il définit lui-même familièrement de deux têtes dans un bonnet, faire le bien de l’État, sans plus porter seul tout l’odieux et en décomposant le fardeau : Je vous parle comme je pense, écrivait-il à Choiseul ; répondez-moi de même et franchement.
Dès le 28 mai 1793, jour où l’insurrection contre eux commençait à gronder, il renonça à toute participation au Journal de Paris, c’était assez marquer sa ligne ; et, après leur mort, il s’ensevelit dans une retraite profonde.
Sa grande ligne est tant qu’il peut romaine, puis byzantine ; mais il y a un moment où, à force de la prolonger, il la perd : qu’on veuille songer que cette Histoire qui se rattache à Auguste et qui commence à Trajan, ne se termine qu’au xive siècle, à la parodie tribunitienne et à la réminiscence classique de Rienzi.
Le caractère pieux et le tour moralisant du saint roi s’y marquent à chaque ligne.
Et maintenant les nerfs rafraîchis et remontés, et les esprits réjouis, nous foulons le désert, dont les sentiers bien ménagés, se déroulant d’une courbe facile et douce et d’une ligne trompeuse, simulent un grand espace dans d’étroites limites.
Je voudrais, dans ce rapide exposé et dans l’appréciation des faits principaux, ne choquer aucun sentiment vrai, généreux, ne méconnaître aucun des titres de la conscience humaine ; et pourtant j’ai à maintenir la ligne qui reste la plus droite, la seule française, celle du large et royal chemin.
Le lendemain de sa mort, Frédéric écrivait au prince Henri ce billet, dont les dernières lignes sont mouillées de ses larmes : Mon cher frère, j’ai reçu votre triste lettre, et vous remercie de tout mon cœur de la part que vous prenez à mon affliction.
Ainsi il est étrange, me dit mon excellent avertisseur, que Voltaire s’étonne de ce que les angles ne sont pas proportionnels, quoique les sinus le soient ; car c’est une proposition élémentaire de géométrie « que les arcs de cercle sont proportionnels aux angles au centre qui les comprennent » ; mais quant à la ligne qu’on appelle sinus, ce n’est qu’une fonction de l’angle, et qui seule ne suffit pas pour le mesurer.
. — Un billet du roi, de quelques lignes, lui fournit prétexte à deux pages de réflexions (p. 365-366) sur les autres rois qui perdent leur temps de mille manières, tandis que Frédéric le perd à rimer : « Je leur pardonne de donner à la chasse, à la bonne chère, au jeu, à la représentation, plus d’heures que je n’en donne à mes amusements littéraires.
— Voulant marquer que la Suède se rétablit à vue d’œil depuis la mort de Charles XII et qu’elle peut désormais rentrer en ligne dans les combinaisons d’alliance et de ligue, il dira vivement : « Nous prenons de grandes liaisons avec la Suède, afin de lui opposer (à la czarine) cette veuve reposée. » Il a de ces trouvailles d’expression à travers ses rudesses.
Cette publication mériterait un examen à part ; la figure de Charlotte Corday s’y dessine dans toute sa pureté de ligne et sa simplicité.
La ligne de conduite que je vous recommande exige du courage, mais je crains que rien autre chose ne soit capable de prévenir les conséquences que j’appréhende si justement : c’est, en un mot, après avoir employé tous les doux moyens pour prévenir une rupture, que vous en veniez à diminuer graduellement votre intimité avec le prince, que vous soyez moins assidue dans vos visites, que vous fassiez de moins fréquents et de plus courts voyages dans ses résidences de campagne, et que vous vous rangiez vous-même à une vie de société privée et indépendante à Paris.
J’ai visité votre chambre, votre cabinet, j’ai ouvert vos armoires : je désirais de trouver quelques lignes écrites de votre main.
Les traits de son visage, trop arrondis et trop obtus aussi, ne conservaient aucune ligne pure de beauté idéale ; mais ses yeux avaient une lumière, ses cheveux cendrés une teinte, sa bouche un accueil, toute sa physionomie une intelligence et une grâce d’expression qui faisaient souvenir, si elles ne faisaient plus admirer.
L’adolescent, tout en restant écolier encore, a passé d’un âge à l’autre ; il a franchi la ligne qui sépare l’enfant du jeune homme.
Un billet rapide, une lettre aimable, un généreux sentiment exprimé peuvent donner idée d’une nature, mais ne sauraient établir toute une ligne de conduite ni certifier toute une vie.
Mais, s’il marche de mécompte en mécompte, Malouet ne se déconcerte pas trop ; il se rattache jusqu’à la fin aux branches de salut qui restent, et en même temps il dévie le moins qu’il peut de sa ligne moyenne jusque dans sa fidélité obstinée à la monarchie.
Un négociateur animé d’un plus vif sentiment national eût, certes, fait en sorte d’obtenir mieux de la bienveillance d’Alexandre, très porté pour la France à cette époque, et il eût au moins disputé le terrain pied à pied ; mais un tel négociateur ne pouvait se trouver alors dans la ligne et dans le rôle de M. de Talleyrand.
C’était de toutes les destinations la plus pénible pour Jomini ; elle était presque inacceptable : après avoir été en première ligne et en chef, il se voyait rejeté à la suite de l’état-major général, réduit à l’inutilité, ayant à prendre les ordres de l’adjudant du prince, « M.
Pas un instant d’intervalle, pas une ligne d’interstice, pas une maille brisée dans ce réseau : tout s’y prend, tout y reste, le gros, le médiocre, et jusqu’au plus menu ; tout est saisi à la fois ou tour à tour, et comparaît à la surface.
Celui à qui est dû l’honneur d’avoir le moins désespéré assurément, et qui persévère, sans indice de fatigue ni de mollesse, dans sa ligne d’alors, est M.
La nature féconde de l’île de France, cette végétation active et multipliée que l’on retrouve sous la ligne, ces tempêtes effrayantes qui succèdent rapidement aux jours les plus calmes, s’unissent dans notre imagination avec le retour de Paul et Virginie revenant ensemble, portés par leur nègre fidèle, pleins de jeunesse, d’espérance et d’amour, et se livrant avec confiance à la vie, dont les orages allaient bientôt les anéantir.
De là la division de l’ouvrage, cet extrême morcellement qui aboutit à la confusion extrême : de là ces livres multiples dont l’ordre ne s’impose pas, dans chaque livre cette abondance de chapitres, dont quelques-uns n’ont qu’un alinéa, et dans chaque chapitre, cet égrènement des idées en alinéas, dont beaucoup ont deux ou trois lignes.
J’attends les arrière-héritiers de Fiorentino et de Saint-Victor, pour savourer l’art avec lequel ils rendront compte, en leurs cinq cents lignes hebdomadaires, des productions véreuses d’un art enterré...
J’attends les arrière-héritiers de Fiorentino et de Saint-Victor, pour savourer l’art avec lequel ils rendront compte, en leurs cinq cents lignes hebdomadaires, des productions véreuses d’un art enterré… VI … Cependant que se meurt notre théâtre, notre littérature reste forte.
En juillet 1830, il était de la première ligne de ceux qui pénétrèrent sur la place du Carrousel par l’ouverture du pavillon de Rohan.
Est-il possible de mettre sur la même ligne celles d’un homme ou celles d’un peuple aux différentes époques de leur vie ?
Il le modèle dans la glaise selon les lignes d’un type idéal.
Personne, au théâtre, ne possède à un degré aussi vif le don de dessiner, en quelques lignes, des portraits vivants et frappants sous lesquels chacun place un nom.
Voici une de ses lettres en deux lignes, et qui en dit plus que toutes les paroles : De tous les instants de ma vie (1774).
Sur Fontenelle, ma conclusion sera précise : c’est que par sa tenue, par sa longévité, par sa multiplicité d’aptitudes et d’emplois, avec ce composé de qualités rares et de défauts qui ont fini par assaisonner ses qualités, il n’a point son pareil, qu’il demeure hors ligne, au-dessous des génies, dans la classe des esprits infiniment distingués, et qu’il se présente, dans l’histoire naturelle littéraire, à titre d’individu singulier et unique de son espèce.
Quel tableau léger, dessiné en trois lignes, et tranquillement complet.
Le nom et le personnage de M. de Bonald sont une de ces représentations les plus justes et les plus fidèles qu’on puisse trouver de l’ordre monarchique et religieux pris au sens le plus absolu ; il a été l’un des derniers sur la brèche et n’a pas cédé une ligne de terrain en théorie.
Bazin nous mène à ne voir en lui que le plus spirituel, le plus personnel et le plus fanfaron des intrigants, M. de Sainte-Aulaire cherche à la conduite de Retz, et à travers toutes les infractions de détail, une ligne qui ne soit pas celle uniquement d’une ambition frivole et factieuse : Bien qu’en écrivant son livre, dit M. de Sainte-Aulaire, il n’ait pas échappé aux influences que je viens de signaler (les influences régnantes et les changements introduits dans l’opinion depuis l’établissement de Louis XIV), on y trouve cependant la preuve qu’il avait tout vu, tout compris ; qu’il mesurait les dangers auxquels le despotisme allait exposer la monarchie, et qu’il cherchait à les prévenir.
Toutes les lignes de cette remarquable figure sont sèches, mais nettes et fermes.
Mme de Motteville suit exactement la ligne que Bossuet traçait en ces matières.
[NdA] Comme il m’est arrivé de parler bien des fois des mêmes hommes et que c’est par suite de ce commerce réitéré que je me hasarde ainsi à les juger en définitive, j’indiquerai encore quelques lignes de moi sur la nature de talent et d’esprit de M.
Et de même, dit-il, que celui qui a un jardin à sarcler n’entreprend point d’arracher toutes les mauvaises herbes à la fois (ce qui excéderait sa portée et sa force), mais travaille sur un seul carré d’abord, et, ayant fini du premier, passe à un second, de même j’espérais bien avoir l’encourageant plaisir de voir sur mes pages le progrès fait dans une vertu, à mesure que je débarrasserais mes lignes de leurs mauvais points, jusqu’à ce qu’à la fin, après un certain nombre de tours, j’eusse le bonheur de voir mon livret clair et net.
» Il lui trace une ligne de conduite pour réparer les torts extrêmes qu’elle s’est faits par sa légèreté et son entraînement.
Ses Mémoires secrets, « ouvrage qui tient un milieu fort intéressant entre le genre des mémoires particuliers et celui de l’histoire générale », sont aujourd’hui le seul livre à lire de lui : justice leur est rendue par Grimm en quinze lignes.
Il se plaisait à se présenter, dès les premières lignes de ce Compte rendu, comme un homme de renoncement et de sacrifice ; il était capable de bien des sacrifices en effet, excepté de celui de la louange qu’il avait à en recueillir.
Charles Henry [Charles Henry (1859-1926), physiologiste, chimiste, historien des mathématiques, a publié notamment en août 1885 dans la Revue contemporaine à laquelle collabore Hennequin comme on l’a dit plus haut, une « Introduction à une esthétique scientifique » (p. 441-469), qui vise une « esthétique des lignes » et une « esthétique des couleurs » héritières des travaux de Helmholtz, fondée sur l’expérimentation et la mathématisation.
§ IX En 1597, Shakespeare avait perdu son fils qui a laissé pour trace unique sur la terre une ligne du registre mortuaire de la paroisse de Stratford-sur-Avon : 1597.
On peut lire, de la première à la dernière ligne, tout ce que nous avons publié, on n’y trouvera point ce mot.
Néanmoins, étant données les grandes ressemblances des contes de ces deux dernières colonies7 avec ceux des trois autres pays composant le Gouvernement Général, on peut dire qu’il existe une littérature ouest-africaine, homogène dans ses grandes lignes et provenant d’une mentalité générale commune.
Écoutez sa voix majestueuse et toute-puissante qui retentit et fait tout taire, dès les premières lignes de ce Mémoire, qui se trouve involontairement un livre sublime : « De tout temps — dit-il — il y a eu des bâtards, parce que de tout temps la nature humaine est corrompue.
Heine s’y reconnaît à toute ligne, avec cette originale et moqueuse manière qui est la sienne.
Renan, « que le langage de l’homme s’est comme formé d’un seul coup, et est comme sorti instantanément du génie de chaque race », pose donc la diversité de la race à la première ligne de son affirmation.
A la condition de ne pas voir dans cette assimilation de l’organisme ou plutôt de l’hyper-organisme social, à l’organisme naturel, une identité formelle, mais une simple analogie, il semble assuré désormais que la conception sociale organique, malgré les énergiques objections qu’elle a suscitées, demeurera dans ses grandes lignes, la conception de l’avenir, et que les hypothèses bio-sociologiques d’aujourd’hui contiennent en germe la vérité de demain. « Cette assertion…, pouvons-nous répéter avec les auteurs d’un livre récent45, ne contrÉdit qu’en apparence ceux qui protestent justement contre des assimilations exagérées et hâtives entre les organismes sociaux et les organismes végétaux ou animaux.
Je pense, en écrivant ces lignes, à deux petites nouvelles, intitulées Pierrot et Caïn, composant un même volume, qui, parmi les livres signés d’un nouveau nom, est assurément un des plus originaux qui aient paru dans ces dernières années. […] » J’ai cité ces quelques lignes parce qu’elles donnent bien le ton habituel de cette âme bizarre, et expriment fidèlement la nuance d’ironie qui lui est propre. […] Une ligne de démarcation bien difficile à maintenir et à observer que celle qui sépare la violence de l’audace ; M. […] Il nous reste à mentionner une dernière faculté, la première en ligne peut-être parmi celles qui l’ont aidé à mener depuis tant d’années déjà sa laborieuse et fertile carrière, nous voulons parler de la faculté d’assimilation qu’il possède à un degré remarquable. […] Connaissez-vous ces œuvres d’architecture intermédiaire entre deux écoles dont l’une s’achève et dont l’autre commence, ces églises romanes des derniers jours surchargées d’ornements, ces chapelles et ces hôtels où la décoration du gothique expirant se marie aux lignes pures de la Renaissance ?
Victor Hugo estimait beaucoup L’Amour peintre et il aimait à en citer les premières lignes qui sont en effet d’un joli style métaphorique et, ce qui sans doute flattait l’oreille d’Hugo, tout en vers, car on pourrait très bien les disposer typographiquement ainsi : Il fait noir comme dans un four : Le ciel s’est habillé ce soir en Scaramouche » Et je ne vois pas une étoile Qui montre le bout de son nez. […] Les vers suivants — éloge du Roi et de Colbert — sont généralement pénibles à considérer, et il est désagréable de rencontrer des lignes rimées, comme celles-ci : La grandeur y paraît, l’équité, la sagesse, La bonté, la puissance ; enfin ces traits font voir Ce que l’esprit de l’homme a peine à concevoir. […] Avec une vérité assez profonde où il y a un peu d’ironie, il nous a assuré que le plus désagréable ou du moins le plus aigu des deux était détesté de tous les hommes et aimé de toutes les femmes et que le plus aimable était aimé de tous les hommes et n’était aimé, et encore en seconde ligne, que d’une seule femme qui elle-même est une désabusée. […] Onuphre n’est pas dévot, mais il veut être cru tel, et, par une parfaite quoique fausse imitation de la piété, ménager sourdement ses intérêts : aussi ne se joue-t-il pas à la ligne directe, et il ne s’insinue jamais dans une famille où se trouvent tout à la fois une fille à pourvoir et un fils à établir ; il y a là des droits trop forts et trop inviolables ; on ne les traverse point sans faire de l’éclat, et il l’appréhende, sans qu’une pareille entreprise vienne aux oreilles du prince, à qui il dérobe sa marche par la crainte qu’il a d’être découvert et de paraître ce qu’il est. […] Il vient à ses fins sans se donner même la peine d’ouvrir la bouche ; on lui parle d’Eudoxe, il sourit où il soupire ; on l’interroge, on insiste : il ne répond rien, et il a raison : il en a assez dit. » La Bruyère a raison sur ce qu’il y a de trop audacieux dans la campagne que fait Tartuffe dans la maison d’Orgon, et son Tartuffe à lui est plus habile ; cela est incontestable ; mais qu’il n’y ait aucun intrigant et captateur qui s’attaque à la ligne directe, voilà ce qu’il ne pourrait pas soutenir et dès lors Molière est dans son droit.
Le critique avisait une première ; il en rendait compte le surlendemain ; à ce compte rendu il ajoutait quelques lignes sur les nouveautés théâtrales moins importantes ; et il attendait une autre grande journée dramatique, qui, généralement, arrivait deux ou trois jours après. […] Silvain en a trop, elle n’en a pas assez : cela fait une moyenne ; mais la ligne est noble, la démarche belle et la voix excellente, et l’artiste est intelligente extrêmement. […] Et puis, chose naturelle, puisqu’il s’agit d’une actrice chez qui l’intelligence est la première qualité, les parties effacées du rôle sont venues en première ligne. […] Il y a, quelque part, une ligne de démarcation peu visible au regard et très ployable au désir. […] Il a ramassé, tassé sa matière ; il a coupé le développement, toutes les fois qu’il commençait ; il a, de plus, fait des pages de 43 lignes à 60 lettres et il nous a donné ainsi son affaire en 100 pages tout juste.
Il donnait une édition de ses ouvrages où toutes les lignes finissent par un mot entier, afin qu’aucune hésitation des yeux ne trouble l’attention du lecteur et ne compromette l’effet du discours. […] Un neveu du grand Arnauld, le principal négociateur de la fameuse ligne du Nord en 1671, un homme que Louis XIV mandait de Suède, où il était ambassadeur, pour le mettre à la place de M. de Lyonne, M. de Pompone enfin, échangeant son nom contre celui de Célidamant, écrivait de Stockholm à M. […] On a, à la première ligne, la double tradition de Voiture, l’italien, l’espagnol, où il était également versé.
En indiquant ce qui s’est vérifié, l’abbé Le Grand donne, dès les premières lignes, un aperçu et comme un tracé général de la vie et du règne qu’il va raconter.
Napoléon, voyant se replier ses tirailleurs et irrité que les Prussiens fussent près de lui échapper, fit précipiter le mouvement sur toute la ligne et lança même à la charge ses quatre escadrons d’escorte sous les ordres du général Le Tort, un de ses aides de camp.
. — « Il n’y a pas une seule ligne de mes poésies, disait-il, qui n’ait été vécue. » Nous avons tous plus ou moins, sur la foi des premiers témoins et visiteurs qui nous en ont parlé, cru Gœthe plus insensible qu’il ne l’était.
Elle se dérobe à l’absolu de la ligne ; elle sort, pour ainsi dire, du trait où elle était enfermée ; elle s’échappe et rayonne dans un éclair.
Cependant il ne cherche son effet ni dans la ligne proprement dite, ni dans la couleur.
On était moins pittoresque parmi nous du temps de Corneille ; on mettait en première ligne l’analyse morale intérieure.
Du moment que notre attaque fut indiquée par notre marche et le feu des décharges, toute la ligne s’ébranla comme en même temps et marcha dans le plus bel ordre que l’on saurait dire à Votre Majesté et avec une telle furie qu’elle enfonça tout.
Je me déplais moi-même au mal que je fais, et tout cela n’est pas agréable à un homme qui est tourné à aimer et à plaire. » Et voilà la douceur d’esprit qu’indiquait le grand peintre à la ligne sobre ; au moment où on s’y attendrait le moins, la voilà qui se dessine à nos yeux et se justifie.
« Plusieurs officiers non moins heureux qu’intrépides avaient réussi à traverser la ligne anglaise pour donner avis de ce qui se passait soit dans Gênes, soit à l’armée.
Decrès, homme d’esprit, mais malveillant et cynique : « Dès la troisième année (de ma gestion à Anvers) nous dit-il, les magasins, les cales, les principaux ateliers étaient terminés ; nous avions en construction sept vaisseaux de ligne, une frégate et deux corvettes.
À l’instant même il se dirigea sur Eylau, et il entra en ligne à la fin de la bataille, à la chute du jour.
La brochure politique, ou plutôt philosophique, qu’il a publiée sur l’état présent de la société, indépendamment de ce vif désir du bien qui respire à chaque ligne, révèle en lui un coup d’œil bien ferme et bien serein au milieu des ruines récentes d’où tant de vaincus et de vainqueurs ne se sont pas relevés.
Loyson suivait la ligne modérée de M.
Quand je dis que la critique issue en droite ligne de la philosophie du xviiie siècle se prenait surtout aux mots, je sais bien que parmi ces mots on faisait sonner très-haut ceux de philosophie et de raison ; mais, sous ce couvert imposant et creux, on était trop souvent puriste et servile.
Il continua de lire, de rêver, de causer, de marcher, bâton en main, aimant mieux dans tous les temps faire dix lieues qu’écrire dix lignes ; de promener et d’ajourner l’œuvre, étant de ceux qui sèment, et qui ne bâtissent ni ne fondent : « Quand je luis, je me consomme. » — « J’avais besoin de l’âge pour apprendre ce que je voulais savoir, et j’aurais besoin de la jeunesse pour bien dire ce que je sais. » Au milieu de ces plaintes, sa jeunesse d’imagination rayonnait toujours sur de longues perspectives : De la paix et de l’espérance Il a toujours les yeux sereins, disait de lui Fontanes en chantant sa bienvenue à Courbevoie.
Son rôle pourtant en ces années agitées ne fut pas inactif ; il suivit honorablement la ligne constitutionnelle où plusieurs de ses amis le précédaient.
Ce n’est pas là une transposition laborieusement étudiée : l’auteur ancien n’a fait que toucher pour ainsi dire en lui l’image à réveiller, et du fond de son expérience a surgi tout à coup, entre les lignes du texte latin, une physionomie familière et contemporaine.
Pour les autres, une ligne lui suffit.
Au moyen âge appartiennent certains genres que cultive la reine Marguerite, les mystères, moralités, farces ; certaines formes d’idées et de composition, les abstractions, les allégories, les constructions, si j’ose dire, massives et subtiles ; certaines doctrines, la galanterie logique et chevaleresque ; un certain extérieur enfin, une certaine attitude et démarche de l’œuvre, je ne sais quelle raideur encore gothique, une héraldique complication de lignes entortillées sans souplesse.
Voilà, dans ses grandes lignes, la doctrine de l’Art poétique.
Il porte dans ses récits le sens qu’il avait de l’action ; il extrait de la confusion des détails le petit fait unique qui contient l’essence de l’acte ou le motif de l’acteur ; et les séries de petits faits s’ordonnent vivement, dessinant avec précision la ligne sinueuse de l’action générale.
La fillette est charmée, et quand d’autres lecteurs, plus sincères, essayent de lire la lettre à leur tour, elle la leur arrache dès les premières lignes en disant qu’ils ne savent pas lire aussi bien que le monsieur de chez Gély.
Parmi les écrits qui s’inspirent de cette tendance il convient de placer en première ligne ceux de M.
pessimistes et schopenhauriens (or je vous annonce, pour peu que vous y teniez, que je n’ai jamais, pour ma part, lu une ligne du, paraît-il, décourageant Épicure teuton).
Nous sommes ici à la ligne sacrée où les doctrines se séparent ; un point de divergence entre deux rayons partant du centre met entre eux l’infini.
Une telle œuvre ne serait point alors plus servile qu’il n’est servile qu’en écrivant ces lignes je remue ma plume et mes doigts.
Si l’on voulait faire avec soin cette étude (dont nous pouvons tout au plus esquisser ici les grandes lignes), il faudrait suivre dans chaque période le régime imposé à la pensée écrite et à la pensée parlée.
Certes, la tragédie obtient de la sorte une pureté de lignes, une harmonie d’ensemble, une beauté calme et imposante pareille à celle qui nous frappe dans certaines statues antiques.
C’est pourquoi l’on ne saurait s’en tenir aux lignes dures de la formule trouvée.
Plus de cent vaisseaux de ligne se montrèrent dans ces ports.
La petite vérole vient frapper de laideur cette tête angélique, mais l’âme reste intacte et pure, derrière son masque de taches et de cicatrices ; elle le soulève pour aimer, pour prier, pour accomplir chacun des grands actes de sa vie morale ; et alors reparaît, dans la pureté de ses lignes, dans la douce plénitude de son contour, dans le suave éclat de ses rougeurs, le visage virginal enfoui sous sa lèpre, comme une perle cachée sous terre.
— Les femmes ont rendu sur le jeune Beaubourg un arrêt pareil : elles le déclarent « trop commun. » Il a la jeunesse, la gaieté, la fortune ; mais il lui manque la ligne, la race, le contour, le chic le je ne sais quoi.
» Depuis la mort de la mère de Goethe, Bettina a plus de sujet de se plaindre ; car cette bonne mère connaissait son fils et expliquait à la jeune fille comme quoi l’émotion du poète se retrouvait dans ces quelques lignes légèrement tracées, et qui eussent paru peu de chose venant d’un autre : « Moi, je connais bien Wolfgang (Goethe), disait-elle ; il a écrit ceci le cœur plein d’émotion. » Mais, depuis que Bettina n’a plus cette clairvoyante interprète pour la rassurer, il lui arrive de douter quelquefois.
[NdA] On peut voir dans l’ouvrage de M. d’Haussonville (Histoire de la politique extérieure du gouvernement français, 1830-1848), la série des dépêches de M. de Broglie, qui réglèrent alors la ligne de conduite de la France à l’égard de l’Autriche en particulier.
Les amis de Galiani, et l’abbé lui-même avaient coutume de dire de son livre sur les blés : « C’est moins un livre sur le commerce des blés qu’un ouvrage sur la science du gouvernement : il faut savoir y lire le blanc et l’entre-deux des lignes. » Le gouvernement chargea l’abbé Morellet de répondre à Galiani, et cet autre abbé, aussi grand de taille que l’autre était petit, aussi didactique et pesant de plume que l’autre était léger, fit cette réponse de manière à n’être pas lu.
Quand le duc du Maine l’épousa, et qu’il eut à choisir entre les filles non encore mariées de M. le Prince, il se décida pour celle-ci, sur ce qu’elle avait peut-être quelques lignes de plus que son aînée.
Il était dans sa ligne encore, et, en ces temps d’exaltation, il y avait une large part à faire aux essais et aux audaces en tout genre.
Il devenait de la plus haute importance que cette ville d’Orléans tînt bon pour la Fronde, sans quoi toute la ligne de la Loire était coupée, et le prince de Condé, qui arrivait de Guyenne, trouvait l’ennemi maître des positions.
Je dégage à dessein sa grande ligne, sa courbe lumineuse, que les taches et les éclaboussures de détail ne sauraient dérober ni obscurcir à cette distance où désormais la postérité le juge.
Ailleurs il parlera du livre des Évangiles : Page de vérité qu’à sa ligne dernière Le Golgotha tremblant sabla de sa poussière.
Son bon jugement se faisait jour et maintenait tant bien que mal sa ligne à travers toutes ces saillies, ces légèretés et ces pétulances.
J’arrive aux circonstances singulières qui marquèrent sa conduite dans la Révolution, et qui achèvent de prouver qu’au moral aussi il lui a manqué quelque chose, quelques lignes de plus pour être de la taille de ceux dont le courage domina les événements et ne s’y laissent point entraîner.
Quand il nous définit la qualité du sol de l’Égypte et en quoi ce sol se distingue du désert d’Afrique, ce « terreau noir, gras et léger », qu’entraîne et que dépose le Nil ; quand il nous retrace aussi la nature des vents chauds du désert, leur chaleur sèche, dont « l’impression peut se comparer à celle qu’on reçoit de la bouche d’un four banal, au moment qu’on en tire le pain » ; l’aspect inquiétant de l’air dès qu’ils se mettent à souffler ; cet air « qui n’est pas nébuleux, mais gris et poudreux, et réellement plein d’une poussière très déliée qui ne se dépose pas et qui pénètre partout » ; le soleil « qui n’offre plus qu’un disque violacé » ; dans toutes ces descriptions, dont il faut voir en place l’ensemble et le détail, Volney atteint à une véritable beauté (si cette expression est permise, appliquée à une telle rigueur de lignes), une beauté physique, médicale en quelque sorte, et qui rappelle la touche d’Hippocrate dans son Traité de l’air, des lieux et des eaux.
Il n’a pas voulu voir que Coupeau, que l’abbé Froment, que Mgr Rougon sortaient en ligne droite des Misérables, qu’ils étaient aussi faux, aussi vulgairement symboliques que Fantine, Jean Valjean, aussi loin de l’humanité que les Burgraves qui parlent par antithèses chez le grand Hugo.
Voici donc le chemin de cette composition, la religion, l’ange, le saint, les femmes qui sont à ses piés, les auditeurs qui sont sur le fond, ceux qui sont à gauche aussi sur le fond, les deux grandes figures de femmes qui sont debout, le vieillard incliné à leurs piés, et les deux figures, l’une d’homme et l’autre de femme vues par le dos et placées tout à fait sur le devant, ce chemin descendant mollement et serpentant largement depuis la religion jusqu’au fond de la composition à gauche où il se replie pour former circulairement et à distance, autour du saint une espèce d’enceinte qui s’interrompt à la femme placée sur le devant, les bras dirigés vers le saint, et découvre toute l’étendue intérieure de la scène, ligne de liaison allant clairement, nettement, facilement chercher les objets principaux de la composition dont elle ne néglige que les fabriques de la droite et du fond, et les vieillards indiscrets interrompant le saint, conversant entre eux et disputant à l’écart.
Mais, quelque peu philosophe qu’une nation puisse être sur ce point, l’orateur qui veut réussir auprès d’elle, doit se conformer aux préjugés qui la dominent, et qu’on peut appeler la philosophie du vulgaire ; le génie même les braverait en vain, surtout chez un peuple léger et frivole, plus frappé du ridicule que sensible au grand, sur qui une expression sublime peut manquer son effet, mais à qui une expression populaire ou triviale n’échappe jamais, et qui à la suite de plusieurs pages de génie, pardonne à peine une ligne de mauvais goût.
La poésie est la parole traditionnelle ; la prose est la parole écrite : les limites de la poésie et de la prose, chez toutes les nations, dans toutes les langues, reposent sur la ligne naturelle qui fut posée, à l’origine, par la force même des choses ; ou, pour parler plus exactement, par celui qui enferma les mers dans leurs bassins, et l’intelligence humaine dans la parole.
Quand la moitié du monde connu croit à la nécessité et à la justice de la Révolution française, avoir prouvé qu’elle n’est, comme l’arianisme, comme le manichéisme, et tant d’autres erreurs qui ont eu leur jour et leur règne, qu’une erreur, qui doit peut-être, comme le disait Mirabeau dans l’ivresse de son orgueilleuse parole, faire le tour du globe, mais pour passer et non pour s’établir ; avoir montré, de plus, après le vice radical du principe, les vices radicaux de ses apôtres : erreur partout, excès et crimes inutiles, — car les crimes et les excès sont toujours inutiles, et Machiavel n’est qu’un menteur ; — c’est avoir commencé à tracer la ligne que d’autres esprits creusent, à l’exemple de l’auteur de l’Histoire des Causes, et devant laquelle le génie révolutionnaire de l’avenir doit nécessairement reculer.
Quand nous écrivions ces lignes, M.
N’oublions pas que c’est à la première ligne de ce recueil qu’on trouve ces fameux coteaux modérés, qui ont fait un bruit si gai dans le temps et sur lesquels, depuis ce temps-là, on voit toujours un peu M.
Le livre que voici et dans lequel la langue poétique, non pas déchaînée, mais comme parée des entraves de sa prosodie, danse dans toutes les mesures du rythme et du mètre, au bruit de la double cymbale de ses rimes, en des vers ardents, fourmillants, mouvementés, sensuels d’éclat, de lignes courbes, de torsions charmantes, d’allures folles, un pareil livre rappelle la kermesse de Rubens, mais comprenez-le bien et ne l’oubliez pas !
À côté du gouverneur qui vient rendre ses comptes à l’empereur, des ambassades qui lui apportent des réclamations, des troupes qu’il fait changer de garnison, des vétérans qui gagnent la colonie qu’il leur a assignée, commerçants, rhéteurs, médecins se croisent sur les larges chaussées en ligne droite, avec les étudiants, les pèlerins, les touristes.
La vallée où nous entrons appartient tout entière au versant français des Pyrénées : c’est Ibañeta, immédiatement avant Roncevaux, qui marque la ligne de séparation des eaux ; il semblerait donc naturel que la frontière suivît cette ligne, au lieu qu’elle la dépasse et forme une boucle qui s’allonge en descendant sur le versant septentrional. […] L’ordre — en ligne ascendante — est celui-ci : hêtres — hêtres et genévriers, — hêtres et genévriers avec quelques pins isolés, — pins et sapins, — sapins. — On peut voir tous ces arbres en gradation régulière en allant de Sainte-Engrace au pic d’Anie34. […] Les Français leur font face, et, après beaucoup d’exploits, sont écrasés par la supériorité du nombre, exagéré ici au-delà de toute vraisemblance : les Sarrasins mettent successivement en ligne quatre cent mille hommes, que les Français, — ils sont vingt mille comme dans Turpin, — tuent presque tous avant de périr. […] Des deux autres grands seigneurs mentionnés par Einhard, il n’est resté aucun souvenir ; Roland, qu’il ne nomme qu’en troisième ligne, est devenu le héros central du poème. […] Il règne d’ailleurs dans ces quelques lignes, qui ont au moins deux sources différentes, une assez grande confusion.
L’Aphrodite qui nous entraînait à son culte ne nous trouble plus ; la femme s’est évanouie, il reste de nobles formes, des lignes agréables, mais un cheval aussi est beau, et un lion et un bœuf. […] S’il ment avec la parole, c’est le poète ; avec le son inarticulé, c’est le musicien ; avec les formes dont il fixe les attitudes, c’est le sculpteur, et son art n’est que le développement extrême du langage des gestes (dont le danseur figure un état très fugitif) ; avec les lignes et les couleurs, c’est le peintre, et que fait-il sinon de rendre aux hiéroglyphes des écritures primitive leur véritable aspect et toute leur ampleur naturelle ? […] Voyez cet art de jouir de la vie ramassé en quelques lignes : « Ne point vivre à la haste. — Savoir partager son temps, c’est savoir jouir de la vie. […] Pas une ligne, si l’on veut respecter le Pascal chrétien, ne doit se retourner contre la citadelle qu’il défend. […] Brochard, acceptent sans hésiter de définir la morale, la science du devoir, et notre esprit moderne ne conçoit pas même une morale qui ne tracerait pas à chacun sa ligne de conduite, ne lui formulerait pas certains préceptes auxquels il est tenu d’obéir.
On ne peut nier tout au moins que le style du sévère professeur ne soit fort économique ; il fait gagner presque une ligne sur deux ; soumis à ce traitement, le pauvre Mérimée, déjà peu fécond, se trouverait réduit à la paternité de quelques plaquettes, alors symboliques de sa légendaire sécheresse ! […] VI Il est fâcheux que le chapitre des périphrases soit expédié en quelques lignes ; on attendait l’analyse de cette curieuse tendance des hommes à remplacer par une description le mot qui est le signe de la chose alléguée. […] Dans les vingt premières lignes de la description de la grotte de Calypso, il y a trois fois le mot doux et quatre fois le verbe former. […] De fait, je ne lui ai jamais vu de sérieuses préoccupations au sujet d’œuvres qui passaient pourtant pour être d’une littérature plutôt ardue ; il n’en parlait jamais et je crois bien qu’il n’y pensait consciemment qu’au moment d’en écrire les terribles premières lignes ; mais, une fois le travail en train, presque toute sa vie intellectuelle s’y concentrait, les périodes de rumination subconsciente rejoignant perpétuellement les périodes de méditation volontaire. […] Les lignes isothermes ayant fléchi sur l’ouest et le centre de l’Europe, par suite d’une déviation du grand courant équatorial, la température de Londres se rapprochait de celle de Moscou.
Mais en outre elle se flétrit, elle se fane, elle se décompose, elle disparaît tout entière, cette beauté réalisée pour un temps par l’harmonie des lignes et par le contour de notre chair périssable ! […] Ici encore Maupassant ne nous a pas laissé de bien longues confidences, mais il y suffit de quelques lignes telles que celles-ci : « Ceux, dit-il, que rien ne satisfait, que tout dégoûte parce qu’ils rêvent mieux, à qui tout semble défloré déjà, à qui leur œuvre donne toujours l’impression d’un travail inutile et commun, en arrivent à juger l’art littéraire une chose insaisissable, mystérieuse, que nous dévoilent à peine quelques pages des plus grands maîtres. […] C’est dans le Roman d’un spahi que se trouvent ces lignes, qui font songer au langage dans lequel les anciens disaient adieu aux soldats morts pour la patrie : « Ils firent des prodiges de valeur et de force, les pauvres spahis, dans leur défense suprême. […] Celui-là sera peintre qui est organisé pour sentir l’harmonie des couleurs ; celui-là sera statuaire qui est prédisposé pour goûter vivement les effets qui résultent de l’harmonie des lignes. […] La biographie lui fournit quelques particularités significatives ; le plus souvent il la réduit à quelques lignes, quand il ne la relègue pas dans une note.
Il en a peur et horreur à ce point qu’il affecte de le mépriser : « Les esprits supérieurs sont naturellement portés vers l’absolu et tendent toujours à simplifier leurs idées… Le doute où les esprits médiocres se reposent est pour les esprits forts ce que l’indécision est, pour les forts caractères, un état d’inquiétude et de malaise, dans lequel ils ne sauraient se fixer. » Tout son secret est dans ces trois lignes. […] Elle n’est pas probable, elle n’est pas utile, elle n’est pas une hypothèse favorable à la classification des idées et mettant un peu de clarté dans le cerveau, comme une bonne table des matières ; elle n’est pas, pour se placer à un autre point de vue, spécieuse, agréable, élégante, attrayante, d’un joli dessin, d’une belle hardiesse ou d’une heureuse harmonie de lignes ; — elle est vraie ; elle est la vérité, et la pratique des hommes s’y doit soumettre. […] Il s’est maintenu dans cette double ligne, persuadé que son affirmation n’était point antichrétienne, ce qui est vrai, mais convaincu qu’elle confirmait son christianisme et n’en était que l’expression suprême, ce qui n’est pas démontré. […] Elle n’est point un de ces grands génies qui donnent comme un coup de barre à l’esprit public et coudent la ligne du sillage. […] Mais, du premier coup, les grandes lignes ont été saisies et marquées d’un trait vigoureux.
[Du reste] dans les courts moments de sa liberté, l’usage qu’il en fait mérite qu’il la perde. » Et Rousseau conclut (je prends pour sa conclusion le passage où sur cette question il est à la fois le plus net et le plus explicite) par ces lignes décisives : « La souveraineté ne peut être représentée par la même raison qu’elle ne peut être aliénée ; elle consiste dans la volonté générale et la volonté générale ne se représente point ; elle est la même ou elle est autre ; il n’y a pas de milieu. […] Tout d’abord Voltaire repousse comme ne la comprenant pas la différence continuelle que Montesquieu fait entre la monarchie et le despotisme : « Qu’on me dise ce que je dois entendre par despote et par monarque. » — « Où est la ligne qui sépare le gouvernement monarchique et le despotique ? […] Il est dans l’article Gouvernement du Dictionnaire philosophique.En voici les lignes essentielles : « De cet établissement, en comparaison duquel la République de Platon n’est qu’un rêve ridicule, et qui semblerait inventé par Locke, par Newton, par Halley ou par Archimède, il est né des abus affreux et qui font frémir la nature humaine… Le fanatisme absurde s’était introduit dans ce grand édifice comme un feu dévorant qui consume un beau bâtiment qui n’est que de bois. […] A prendre en ses grandes lignes l’histoire des Parlements depuis François Ier, depuis l’infâme vénalité des offices jusqu’en 1789, cette histoire fait plutôt honneur que honte à l’ancienne magistrature française. […] Voilà les grandes lignes.
Piron est un excellent préservatif contre l’ennui ; mais il s’en va dans huit jours, et je vais retomber dans mes langueurs. » L’abbé, dans sa citation, soit malice, soit inadvertance, oublia la dernière ligne et s’arrêta après le mais, en ajoutant un et cætera qui laissait le lecteur libre de remplir la phrase de toute espèce de malice. […] Elles sont rudes, obscures, d’une prose rocailleuse et en quelque sorte capricante, hérissées de dictons qui demanderaient des commentaires à chaque ligne.
Ce n’est qu’en continuant cette lecture de Malherbe avec détail, en vers et en prose, que nous pourrons apprécier à quel point il a été, dans sa ligne, le serviteur convaincu, ardent, et le hérault d’armes généreux de cette politique. […] Il s’y restreint comme dans une ligne écliptique, et ses pas ne savent point d’autre chemin… » Un reste de mauvais goût dans l’expression ; passons vite.
Quant à cette sorte de scolastique littéraire, née de la mauvaise fertilité des derniers temps, qui distingue le fond de la forme, l’art de son objet, l’écrivain de l’homme, il n’y a pas dans Fénelon une seule ligne dont elle pût s’autoriser pour un seul de ces principes d’invention récente, qui ont gâté le goût de notre nation. […] Dans son discours de réception à l’Académie française, à l’endroit où il parle si magnifiquement de la langue française, on trouve jusqu’à trois fois, en quelques lignes, les mots majesté et majestueux.
On se contenta, ne pouvant faire plus, de lui jeter à la face toute la boue dans laquelle marchaient ses personnages ; on aurait voulu l’ensevelir dans l’ignominie, confondre sa personnalité avec celle des scélérats qu’il dépeint, lui prêter les vices qu’il décrit sans vouloir remarquer la puissance d’indignation qui perce à chaque ligne. […] Zola, qui aime ardemment le travail de l’artiste, trouvait pénible de perdre son temps et ses forces à faire des lignes pour gagner son pain.
Pourquoi ne s’est-il pas développé et maintenu dans les belles lignes de ses jeunes ans ? […] Rien de franc, rien de pur ; jamais, et pour cause, la mélodie à nu, la belle ligne qui s’élance, se déroule et ne cherche à valoir que par soi. […] Mais les lignes en sont les plus claires et les formes d’écriture des plus solides et des plus classiques. […] De ce qu’a de particulier l’émotion qui le soulève et le met en état de grâce artistique, il cherche toujours à dégager les lignes de l’universel.
peut-être aurais-je quelque honte à te reconnaître en public ; en revanche, quand nul ne me verra, je te veux dévorer ligne à ligne ! […] Ce public dont tu reçois les impressions diverses arrive en droite ligne des boulevards du crime ; il a été élevé dans le mépris des vraiment belles choses ; il est glouton, il n’est pas gourmet ; il préfère une grosse pâture, à un repas délicat ; il a été dressé, de bonne heure, à dévorer, du même appétit, les galettes et les tragédies de l’Ambigu, les pommes de terre frites et les comédies de la Gaîté ; et toi-même, orchestre en linge blanc et en gants jaunes, le lorgnon à l’œil droit et la frisure aux cheveux, orchestre à demi savant, parce que tu auras fait, dans quelque collège borgne, de médiocres études et marmotté quelques vers de Virgile, serais-tu donc ton juge, plus que ne sont les gens du parterre, favorable à l’exécution des grandes œuvres de l’esprit humain ? […] Fabre a trouvé les personnages de sa comédie dans les indignations de Jean-Jacques ; mais comme Fabre était, lui aussi, de son côté, quoique dans une sphère moins élevée, une imagination active, un esprit ardent, un sophiste puissant, il s’est trouvé que cette idée du citoyen de Genève, jetée au hasard, dans un moment de caprice et de mauvaise humeur, s’est fécondée dans la tête de Fabre, qui a fini par faire une admirable comédie de ces quelques lignes que je vous ai citées plus haut.
Son livre, que j’ai essayé d’analyser à très grandes lignes, la Naissance de l’intelligence, n’en est pas moins une œuvre maîtresse. […] Supposons que le pêcheur de goujons n’ait pas le droit de pêcher des ablettes, ou que le pêcheur à la ligne dormante ne puisse jamais se servir de la ligne volante. […] Il faut agir, il faut remuer ; la vie est une suite de mouvements qui entrelacent des lignes. […] Que de charmants détails, et ce qui se lit entre les lignes, et ce qui se dit à l’oreille !
Voilà ce qu’on lit entre les lignes de ce livre allemand, qui vient à point pour rappeler à ceux qui ont l’honneur de tenir une plume les devoirs de leur état. […] On y sent l’âcreté salubre de la mer, l’haleine régulière et large des vents alizés, et ces brises molles et volages qui, au passage de la ligne, font claquer les voiles le long des mâts. […] Il n’accepta pas ; il ne put se résigner à quitter « la vie du désert, les jeux de la lumière sur les ondulations sablonneuses, les grandes lignes des paysages, la splendeur des couchers du soleil sur le Nil, et les molles clartés des nuits orientales ». […] Tout jeune, il appartint à la catégorie de ceux qui vivent pour écrire, et dont les pensées et les actions ne semblent avoir d’autre but que de laisser une trace ineffaçable, en lignes noires, sur du papier blanc. […] Nous croirons cheminer, nous aussi, sur l’herbe courte, dans la longue ligne noire des yacks porteurs de bagages, au pas rythmé des petits chevaux mangeurs de chair crue.
alors l’équilibre entre les talents et le milieu, entre les esprits et le régime social, se trouverait rétabli ; on se retrouverait à l’unisson ; la lutte, la maladie morale cesseraient, et la littérature d’elle-même redeviendrait classique par les grandes lignes et par le fond (c’est l’essentiel) ; — non pas qu’on aurait plus de talent, plus de science, mais on aurait plus d’ordre, d’harmonie, de proportion, un noble but, et des moyens plus simples et plus de courage pour y arriver.
Je serais ingrat si je ne disais que, dans ce portrait où j’ai tâché d’être ressemblant et de me tenir avant tout dans la ligne du vrai, j’ai beaucoup dû à un successeur et à un ami de M.
Basnage met la politesse dans l’arrangement et dans la recherche des mots ; mais il ne songe pas à l’ennui dont il couvre son Journal et dont il accable ses lecteurs, qui aimeraient mieux dix lignes de M.
Ses sentiments religieux et philosophiques, nous venons de les voir, au sein même de cette douleur : il les confondait volontiers et évitait peut-être de distinguer le point précis, la ligne exacte où il aurait pu établir entre eux, entre la religion et la philosophie, une différence essentielle.
Il y maintient cette ligne d’admiration et d’enthousiasme, ce concert de louanges qui n’est pas joué, qui est sincère chez nous, et qu’il serait injuste de supprimer, de sacrifier entièrement à de pures leçons (lectiones), même exactes et utiles.
Toutes les vertus que possède l’abbé Carron ravissent son cœur, et les qualités même qu’il n’a pas, ses limites du côté des idées du siècle et dans l’ordre de l’intelligence philosophique, lui semblent une vertu de plus, un signe de perfection et d’avancement dans la ligne évangélique.
Chaque ligne de ce petit écrit annonce un travailleur longtemps séquestré du monde, ignorant naïvement le train des choses, et en parlant avec une sorte d’enfance.
L’élément théocratique qui entre dans son organisation sociale lui a donné quatorze siècles d’existence63… » A-t-il bien pu, lui, M. de Bâville, dans le courant de la phrase, dire Bossuet tout court, citer d’emblée et sur la même ligne Pascal, Molière et Newton, Molière un comédien d’hier, Newton que Voltaire le premier en France vulgarisera ?
Saint-Marc Girardin dans sa ligne aussi, avec ses charmants mérites d’esprit sceptique et dégagé ; M.
Le lendemain du triomphe, au lieu d’entrer, par un mouvement qui eût semblé naturel, dans la pratique et le maniement politique, il distingua sa propre originalité et se maintint dans une ligne plus d’accord avec ses goûts véritables.
Qu’elles sont précieuses ces lignes toujours vivantes, qui servent encore d’ami, d’opinion publique et de patrie !
Enfin ils lui dirent que l’homme qui, en ligne, était le plus près de lui, venait de tomber ; aussitôt il sauta hors de son lit, s’élança hors de la tente, et fut tiré du péril et du rêve en trébuchant sur les cordes des piquets. — Après ces expériences, il n’avait point de souvenir distinct de ses rêves, mais seulement un sentiment confus d’oppression et de fatigue, et, d’ordinaire, il disait à ses amis qu’il était sûr qu’ils lui avaient joué quelque tour. » Le somnambulisme artificiel met l’esprit dans un état semblable.
On me dira que le nombre des lignes ne fait rien à l’affaire ; mais c’est qu’il n’y a peut-être pas un de ces feuilletons où l’on ne puisse faire son butin, mince ou gros, et je vous assure qu’on est saisi d’une sorte de respect devant ce labeur énorme, si vaillant et si consciencieux.
Certes, c’étaient toujours les belles lignes sculpturales, pleines de noblesse, qui nous ont arrêté dès le commencement de cette étude… » Cette espèce d’ingénuité s’explique par la vigueur même et la profonde sincérité de la conception.
Quelle agonie, aussi, qu’agite la Chimère versant par ses blessures d’or l’évidence de tout l’être pareil, nulle torsion vaincue ne fausse ni ne transgresse l’omniprésente Ligne espacée de tout point à tout autre pour instituer l’Idée ; sinon sous le visage humain, mystérieuse, en tant qu’une Harmonie est pure.
« J’ai la passion de la ligne jusqu’à la dépravation », écrit Jean de Tinan.
La ligne que depuis on a tirée entre l’Église orthodoxe et les sectes gnostiques était alors bien indécise ; tout cela faisait corps, et il y avait solidarité des uns aux autres.
Quant à la jalousie de madame de Rohan, elle n’a pas sur la surface du drame deux lignes de profondeur et de substance.
Comme premier président de la Cour des aides, la carrière de Malesherbes demanderait tout un chapitre ; il suivit la ligne de conduite des hommes les plus courageux et les plus indépendants de l’antique magistrature française, se signala par des remontrances énergiques et qui touchaient aux grands intérêts de la nation, ne rechercha en tout que la droite équité, et, s’il rencontra la popularité dans cette voie, du moins il n’y sacrifia jamais.
Ainsi l’échafaud de Marie-Antoinette est mis sur la même ligne que le courage de nos armées.
Il y a à Nuremberg, près de l’Égidien Platz, dans une chambre au deuxième étage d’une maison qui fait face à l’église Saint-Gilles, sur un trépied de fer, une petite boule de bois de vingt pouces de diamètre, revêtue d’un vélin noirâtre bariolé de lignes autrefois rouges, jaunes et vertes.
Urbem Romam principio reges habuere , dit Tacite à la première ligne des Annales.
Enfin, il oubliait que dans son siècle, même à l’époque du grand goût, Corneille, Bossuet, Pascal, et souvent même Boileau et la Bruyère, avaient à propos nommé les choses par leurs noms, et qu’ils avaient enchâssé les mots les plus simples dans des vers et des lignes énergiques ou sublimes.
Ils peuvent être actifs aussi, mais comme en seconde ligne. […] À intervalles très irréguliers, comme il convient, quelquefois formant un chapitre, quelquefois deux ou trois (les chapitres de Commynes sont courts), quelquefois simple ligne ou simple incise jetée négligemment, la remarque arrive, comme au moment même où on la désirait, c’est-à-dire au moment où on allait la faire, et l’on sait toujours gré à l’auteur de réfléchir avec vous précisément quand on était en humeur de philosopher. […] Je ne parle plus de ces froids éloges de princes ou de princesses à l’occasion de leurs voyages ; mais du compliment rapide et discret, glissé aux premières lignes ou aux dernières d’une lettre en vers, du madrigal impromptu qui coule de la plume au cours d’une épître, et qui est comme un sourire tombé sur le papier. […] Entassez les grandeurs ; le monceau comparé à lui n’augmente pas d’une ligne, il reste un rien, il n’existe pas. […] Il est même amusant de la voir reparaître très éclatante, dans les dernières lignes de la conclusion : « Là donc, Français, marchez courageusement vers cette superbe cité romaine… Donnez en cette Grècementeresse et semez-y encore un coup la fameuse nation des Gallo-Grecs.
Dans l’homme, c’est l’être social qu’on s’accorde à trouver le plus intéressant, le plus digne d’être étudié et connu ; le point de vue sociologique est devenu dominant sur toute la ligne des sciences morales. […] Je conviens que trois lignes de notice dans une encyclopédie des arts, des sciences et des lettres sont une forme de vie peu différente de la mort25, un semblant de mémoire à peine distinct de l’incognito le plus obscur, et j’accorde qu’il n’y a d’immortalité entière et parfaite que celle des écrivains qu’on lira et citera toujours. […] 3. — Seconde méditation sur le petit nombre des élus Au reste, plus j’examine la sentence du délicat ciseleur d’odes funambulesques : « Une des premières conditions du succès est d’avoir écrit en tout un petit volume… », plus je la trouve fausse, et fausse non seulement en critique, en philosophie, en histoire, en éloquence, mais en œuvres d’imagination aussi, de poésie, d’art pur, fausse en un mot sur toute la ligne. […] Au-dessus de ces grands incomplets, il convient de mettre d’abord les génies qui se sont précipités en droite ligne, impétueusement, vers le genre unique où la nature les destinait à exceller, et qui ont goûté dans l’accord parfait de leur talent principal et de leur œuvre une extase si divine qu’ils n’ont permis à aucun talent accessoire de fleurir chez eux parallèlement. […] Il n’aurait pas dû naître en Angleterre, s’il avait eu la bonne fortune de naître en France, « Robert Buchanan s’y fût tout de suite trouvé de plain-pied avec son public, et il eût accéléré le mouvement généreux qui, dans tous les siècles et sous toutes les formes, même au milieu des plus grandes erreurs, emporte toujours la nation française97. » Ces lignes sont aussi flatteuses pour nous que désobligeantes pour nos voisins, et il est possible que Léo Quesnel ait raison ; mais il est permis de conserver un doute sur la gloire que Buchanan aurait conquise en France, tandis qu’il est indubitable qu’avec un degré supérieur de talent, avec un grand et vrai génie, le poète aurait vaincu la résistance que les préjugés anglais pouvaient lui opposer d’abord.
Et les lignes qui suivent nous font comprendre qu’elle était boulotte. […] Thème romantique, ai-je dit : cela est si vrai, et la page de Jean-Jacques sur Zulietta était si nouvelle et parut si insensée quand les Confessions furent connues, que La Harpe y vit un des signes les plus probants de la folie de Rousseau. — Thème romantique, — qui dévie dans le récit de, Jean-Jacques, car il s’avise ensuite d’attribuer à quelque défaut physique secret la vile condition où Zulietta est réduite, — mais thème essentiellement romantique dans les lignes que j’ai citées. […] Les huit ou dix pages des Confessions où notre sauvage nous raconte cette représentation respirent à chaque ligne l’ivresse vaniteuse d’un auteur fieffé. […] Cette enflure est en ligne droite et dans une direction oblique. […] Il faisait remarquer que ce n’était pas la nature qui avait rassemblé à Lisbonne vingt mille maisons de six à sept étages et que, si les habitants eussent été dispersés plus également, et plus légèrement logés, le dégât eût été moindre et peut-être nul : « Tout eût fui au premier ébranlement, et on les eût vus le lendemain à vingt lieues de là, tout aussi gais que si rien n’était arrivé. » Voltaire répondit à Rousseau, en peu de lignes, qu’étant malade et garde-malade lui-même, il remettait à un autre temps sa réponse.
Et puis, chose toute naturelle, puisqu’il s’agit d’une actrice chez qui l’intelligence est la première qualité, les parties effacées du rôle sont venues en première ligne. […] Explosion de réaction sur toute la ligne des boulevards depuis la Bastille jusqu’à la porte Saint-Denis. […] Explosion de joie sur toute la ligne des boulevards. […] Je n’ai voulu ici que tracer la ligne de l’histoire des théâtres du Boulevard, considérés comme précurseurs du théâtre romantique et y aboutissant. […] Il n’y a pas encore assez de trains en un jour sur la ligne de Dieppe à Paris pour fuir les petites filles amoureuses.
Et comme par la définition du point, de la ligne, de la surface et par d’autres principes très familiers, nous parvenons à des connaissances qui mesurent enfin le ciel et la terre, de même aussi, par les raisonnements et les conséquences que l’on peut tirer de ces Fables, on se forme le jugement et les mœurs et on se rend capable des grandes choses. » Ai-je besoin de montrer qu’à son tour si Molière n’a jamais formé le dessein de « corriger » les mœurs ou de les « épurer », son Tartuffe, son Misanthrope, ses Femmes savantes sont là pour nous répondre qu’à tout le moins il a bien prétendu les « modifier » ou les « façonner » ? […] Et pour qu’enfin à tous égards les dernières années du siècle en ramènent le commencement, après ou avec les débauchés et les précieux, ce sont maintenant les « libertins » qui rentrent à leur tour en ligne. […] Mais il faut dire du second que l’on n’a pas écrit de plus beau livre en notre langue, si d’abord il contient, comme les Provinciales, d’impérissables modèles de tous les genres d’éloquence ; et qu’il ait encore sur elles cet l’avantage d’être un vrai livre, divers et un en toutes ses parties, dont il n’y a pas une page, ou même une ligne, qui ne s’inspire de l’idée de l’ensemble, et ne concoure à en démontrer la justesse. […] Béroalde de Verville, dans son Moyen de parvenir, et Tallemant des Réaux, dans ses Historiettes]. — Elle a enrichi la langue : — par détermination du sens précis des mots ; — par acquisition, invention ou création de manières de parler nouvelles ; — et surtout en enseignant « le pouvoir d’un mot mis en sa place ». — Enfin la préciosité a ennobli la langue ; — et il est vrai d’ailleurs qu’en l’ennoblissant elle a établi entre l’usage du vulgaire et celui des « honnêtes gens » une ligne de démarcation trop profonde. […] 2º La Vie, le Rôle et l’Influence de Bossuet. — Que Bossuet n’ayant jamais écrit une ligne qui ne fût un acte, l’histoire de sa vie et celle de son œuvre sont donc inséparables. — Son origine, et qu’il importe de noter qu’il sort d’une famille de magistrats ; — ses études à Dijon [collège des Godrans] ; — et à Paris, au collège de Navarre, et en Sorbonne. — Il est ordonné prêtre et nommé archidiacre de Sarrebourg, 1652 ; — son séjour à Metz [Cf.
Au dix-huitième siècle, second âge de la monarchie absolue, on vit d’un côté les pompons et les coupoles enguirlandées, de l’autre les jolis vers de société, les romans musqués et égrillards remplacer les lignes sévères et les écrits nobles. […] Dans Arcite et Palémon, dans Troïlus et Cressida, il esquisse des sentiments, il ne crée pas de personnages ; il trace avec aisance et naturel la ligne sinueuse des événements et des entretiens, mais il ne marque pas les contours précis d’une figure frappante.
Au-delà de ces grands corps de logis, on trouve en face un long édifice qui contient un grand appartement, au milieu de trente autres plus petits, tous sur une ligne et à double étage, consistant chacun en deux chambres et un cabinet, avec un perron sur le devant, de dix pieds de profondeur et de quatre pieds de hauteur. […] Sur la main gauche de ce palais, il y a un autre grand chemin en ligne collatérale, par des rues assez belles, qui sont entrecoupées de bazars.
Ils ont voulu la perfection de la forme, l’absolu, poursuivant les répétitions de mots jusqu’à cent lignes de distance, déclarant la guerre aux lettres elles-mêmes, pour qu’elles ne reviennent pas trop souvent dans une page… » Telle est l’opinion du Poète, et vous ne vous étonnerez plus désormais s’il s’attache moins à la menue grâce des détails qu’à son plan d’ensemble, à la construction architectonique de l’ouvrage. […] Les paysages naturels, les milieux tantôt urbains, tantôt bucoliques où le rythme de vie s’écoule et s’accomplit, ne sont guère considérés que comme un décor aimable : les romanciers les créent à leur fantaisie, ou s’ils en conservent la topographie, ils les modifient, n’en respectent que les lignes principales favorables à la mise en scène.
L’une est celle des yeux à stemmates nommés yeux simples, pourvus d’une lentille et d’une cornée ; l’autre est celle des yeux composés, qui agissent par exclusion des rayons qui viennent de tous les points du champ de la vision, excepté le pinceau lumineux qui arrive sur la rétine, suivant une ligne perpendiculaire à son plan. […] L’avantage qu’une forme organique peut tirer du grand nombre de ses représentants ne vient donc qu’en seconde ligne après les avantages d’ordre supérieur qu’elle peut devoir à une grande variabilité ; et on peut dire que le grand nombre d’individus ou la grande étendue de l’habitat n’est un avantage qu’entre les formes douées d’une variabilité égale, et durant une période de fixité dans l’ensemble des conditions locales.
Me D venoit de promettre dix lignes auparavant de ménager ses éxpressions. […] Faute de cette élegance qui consiste dans la beauté, dans la force et dans la grace des expressions, on tombe dans l’ennui de page en page, de ligne en ligne. […] J’oserai dire pourtant que ces corrections fréquentes, et qui reviennent à chaque ligne, font une critique très-suivie et très-détaillée de l’iliade.
6e Avoir dans sa poche un petit plan de sa conférence, en quelques lignes, pour le cas où l’on perdrait subitement la boule, ce qui arrive 7e Etre, soi. « Mais il est entendu, n’est-ce pas ? […] C’est une pièce extrêmement touffue : cinq actes, 193 pages ; des pages de 35 lignes quand il y a des tirades. […] Une comédienne qui rend un premier rôle, un rôle d’un grand nombre de lignes, et un rôle « sympathique », soit parce qu’on lui a dit que « ce n’était pas du théâtre », soit parce que la pièce est de son mari, cela ne se peut vraiment concevoir qu’avec une grande difficulté. […] Çà et là les murs de brique s’effritent, et les vitrages ont des trous d’écumoires. — Les ruines des parthénons et des cathédrales gothiques, des monuments bâtis pour les siècles, formés de matériaux résistants et lourds, de marbres et de granits lentement taillés et entassés, demeurent majestueuses et gardent une beauté de couleurs et de lignes. […] Pourquoi la petite ligne de telle bouche féminine, — pour parler comme l’auteur de la Vie intérieure, — a-t-elle la puissance de détraquer tel cerveau d’homme, de lui être toujours présente et inoubliable, en sorte que le malheureux, hanté par cette image, sera capable de tuer pour posséder la femme dont la lèvre affecte cette petite courbe, et s’il ne peut la posséder, sera capable de mourir ?
La Jérusalem céleste est située à l’extrémité supérieure d’une ligne droite qui tomberait perpendiculairement sur la Jérusalem terrestre. […] Aucun grossissement de lignes. […] Mats tous les bruits sont notés, le mouvement est rendu, l’atmosphère morale créée ; et aucune image ne serait plus prenante que l’émotion des dernières lignes qui nous jettent dans la rêverie. […] Tristesse, défaillances, suprêmes ardeurs, mélancoliques renonciations, noblesse des lignes et des vastes horizons, sérénité des tâches accomplies : vous avez là tout le roman de Dominique.
a, sous le titre : Un idéaliste de province, consacré à Victor Bérard, j’extrais ces lignes : Lamartine a introduit en France une politique des poètes et une poésie de la politique. […] Au reste, que tel ou tel se défende des tentations religieuses, qu’il opte pour le cynisme du temps qui est le sien, il constatera, se contentera de constater la rencontre en lui des injustices, des hideurs, des niaiseries dont il se trouve le point d’intersection, décidé à l’ignorance, au mépris systématique des lignes droites, courbes, brisées, trajectoires, ellipses, paraboles qui sont non seulement l’histoire du monde, mais l’écriture même de cette histoire. […] Seule, une telle inspiration nous rapproche de cet équateur (enfin à ne plus confondre avec le tiède, écœurant juste milieu) dont un point brûlant ne peut manquer de s’offrir, quelque jour, à la rencontre des lignes nées aux antipodes, aux pôles de l’homme.
Quant à nous, aujourd’hui, qui venons de lire la correspondance de Goethe avec la vraie Charlotte et avec Kestner son époux, et qui avons en même temps relu Werther, il nous semble (pour emprunter aussi une image à la Grèce) que nous pourrions dessiner la ligne sinueuse qui unit l’épaule d’ivoire de Pélops au reste du corps vivant, c’est-à-dire séparer les parties artificielles et factices d’avec celles qui étaient la vérité même.
Ondine suivait sa ligne de vie à part, en amitié, en étude.
1834 Ce qu’il y a d’excellent surtout, selon moi, aux vrais mémoires des vrais grands hommes, c’est que déjà connus par leurs œuvres publiques, par des actes ou des productions hors de ligne et qui resteraient des fruits un peu mystérieux pour le gros du genre humain, ces hommes nous apparaissent dans leurs mémoires par leur lien réel avec la nature de tous.
Demandez à l’abbé Raynal, qui serait sur la ligne de M. de La Harpe, s’il avait un peu moins d’abondance et un peu plus de goût ; au digne, au sage et honnête Thomas enfin, qui, à l’opposé du même M. de La Harpe, met tout en montagnes, comme l’autre met tout en plaines, et qui, en écrivant sur les femmes, a trouvé moyen de composer un si bon, un si estimable livre, mais un livre qui n’a pas de sexe.
Soyez bien persuadé que pas une ligne n’en paraîtra avant d’avoir subi les retouches que ma conscience et vos conseils jugeront propres à enlever à ce livre les dangers qui vous ont frappé.
Son idéal, c’est l’absence d’intrigue, la belle nudité des tragédies grecques, et voilà par où le sujet de Bérénice lui a plu : deux lignes, un seul fait ; ce n’est rien, mais l’invention consiste à faire quelque chose de rien.
Je sais bien, en écrivant ces lignes, que j’ai l’air de faire le jeu de M.
Ce que l’histoire anecdotique de nos grands écrivains nous raconte de ces manuscrits raturés à toutes les lignes, de ces rédactions premières qui n’ont été que des tâtonnements et des acheminements laborieux vers la rédaction définitive, nous autorise à dire que la langue française, si complaisante pour le lecteur, est sans pitié pour l’écrivain.
A qui croit-on, par exemple, qu’il fasse allusion dans les lignes qui suivent : « Et ici, Ménandre, avant que de passer outre, admirons ensemble les moyens dont Dieu se sert pour procurer le repos du monde, et le soin qu’il a de trouver quelquefois le bien public dans le malheur des particuliers.
Maintenant, en effet, une musique qui n’a de cet art que l’observance des lois très complexes qu’il se dicte, mais exprime d’abord le flottant et l’infus, confond les couleurs et les lignes du personnage avec les timbres et les thèmes en une ambiance plus riche de Rêverie que tout air d’ici-bas, déité costumée aux invisibles plis d’un tissu d’accords ; ou va l’enlever de sa vague de Passion, au déchaînement trop vaste pour un seul, le précipiter, le tordre : et le soustraire à sa notion, perdue devant cet afflux surhumain, pour la lui faire ressaisir quand il domptera tout par le chant, jailli dans un déchirement de la pensée inspiratrice.
Une page de Mozart avec ses contours fins et délicats, son dessin pur, élégant, sa large ordonnance, qui donne comme l’illusion de l’air et de la lumière, ressemble aussi peu que possible à une page de Wagner, où la rencontre des lignes, la singularité des profils, la disposition tourmentée, semblent plus faites pour traduire le chaos et la nuit.
Quelquefois, aux jours de fêtes publiques, on dresse les murailles de carton pour masquer les vides des monuments inachevés ; ici la ligne de ces murailles s’étend d’un bout de Carthage à l’autre.
Que diraient-ils si l’on entreprenait la construction d’un vaisseau de ligne avec la seule théorie employée par les sauvages dans la construction de leurs radeaux ?
Byron, qui exerça sur Lamartine tant d’influence, avait concentré toutes les objections à Dieu tirées du mal dans quelques lignes de Caïn : « Abel.
Et même quand le trumeau pécherait par l’art, — l’art chétif, rabougri, ratatiné, Chinois, qu’ils admirent et qu’ils préfèrent, dans l’horreur fade de son joli, aux lignes simples et grandes de la vraie beauté, — il n’en serait que mieux compris et plus goûté peut-être, — le rayonnement probable de toute œuvre d’art ou de littérature étant bien plus souvent en raison de l’abaissement du génie, qui l’a produite, que de sa hauteur.
Cousin, la duchesse de Longueville reste ce qu’on l’a toujours vue dans sa pénombre historique — et moins ce qui fait rêver, moins le mystère, moins la ligne mi-brisée d’un buste qui paraît plus beau à l’imagination charmée, parce qu’on n’en saisit pas nettement tous les contours !
Excepté cette comique idée de faire de nos fils des ouvriers sur toute la ligne, — pas tous Auvergnats, mais tous ouvriers, — il n’y a positivement… rien dans le pauvre Michelet !
Mais cette dernière syllabe « rie », je ne l’ai pas prononcée instantanément ; le temps, si court soit-il, pendant lequel je l’ai émise, est décomposable en parties, et ces parties sont du passé par rapport à la dernière d’entre elles, qui serait, elle, du présent définitif si elle n’était décomposable à son tour : de sorte que vous aurez beau faire, vous ne pourrez tracer une ligne de démarcation entre le passé et le présent, ni par conséquent, entre la mémoire et la conscience.
Ce n’est pas le moment d’examiner la grande question philosophique de l’esprit et de la matière ni celle de la liberté et de la responsabilité humaines ; redoutables problèmes qui ne sont pas faits pour être tranchés en quelques lignes.
Je ne reprocherais pas à cette énumération d’être incomplète, toute énumération de ce genre étant incomplète, si Stendhal ne mettait une certaine prétention à avoir absolument épuisé le sujet : Il y a quatre amours différents, dit-il à la première ligne. […] — Et vous étudiez Stendhal comme théoricien littéraire sans dire un mot de la théorie des milieux, de cette vue de génie qui a simplement renouvelé la critique tout entière, disons mieux, qui l’a créée, puisqu’elle en a fait une science… — Non, je ne parlerai pas de la théorie des milieux, je ne citerai pas cette ligne : « Mon but est d’exposer avec clarté comment chaque civilisation produit ses poètes » ; ni celle-ci, d’ailleurs bizarre ; car je ne vois pas les énormes différences qu’il y a entre le climat de Londres et celui de Paris, ni entre le système politique de Louis XIV et celui d’Elisabeth : « Le climat tempéré et la monarchie font naître des admirateurs pour Racine ; l’orageuse liberté et les climats extrêmes produisent des enthousiastes de Shakespeare » ; et je ne chercherai pas à réduire en système les considérations incohérentes de l’Introduction à l’histoire de la peinture en Italie, d’où l’on peut conclure tour à tour, de dix en dix lignes, que le despotisme est éminemment favorable et absolument mortel aux beaux-arts ; je laisserai de côté ces vues profondes ; parce que Stendhal n’en a rien tiré, parce qu’une théorie n’a de valeur et ne devient titre de gloire que quand on s’en sert pour expliquer un certain nombre de faits, et pour grouper et pour soutenir et pour éclairer un certain nombre de vérités particulières ; parce que, quand un auteur n’a pas fait sienne une théorie par cet usage, ne la pas vérifiée par ces applications et ne l’a pas confirmée par cette suite, on peut toujours dire à coup sûr qu’à cet état rudimentaire elle était déjà dans un de ses prédécesseurs, et que tant s’en faut qu’elle fasse honneur, qu’au contraire en avoir eu l’idée et n’en avoir tiré rien est presque une preuve que tout en la découvrant on ne l’a pour ainsi dire pas comprise. — C’est bien, je crois, le cas de Stendhal. […] Il était parti de cette idée, très répandue, je ne dis pas dans son parti, car il ne fut jamais d’aucun parti, mais dans sa classe, vers 1830, que c’était la Révolution française qui avait centralisé la France, et par conséquent fondé ou rendu facile le despotisme dans ce pays ; qu’avant la Révolution il y avait sur la surface du pays une foule de libertés, tant locales que corporatives, qui étaient à la volonté centrale des limites et des digues, et que l’œuvre de la Révolution n’avait été que de détruire toutes ces franchises. — Il ne tarda pas, en présence des faits bien étudiés, à rectifier ces notions où il y avait beaucoup de vrai et beaucoup de faux, et il a donné de l’œuvre révolutionnaire en ses grandes lignes le tableau le plus vrai et le plus précis que je sache, encore qu’il n’ait pas eu le temps d’entrer dans l’histoire proprement dite de la Révolution. […] il a l’air d’un pêcheur à la ligne. » Je ne sais pas pour qui furent faits ces vers de Victor Hugo : Quand vous vous assemblez, bruyante multitude, Pour aller le traquer jusqu’en sa solitude… Vous ne trouvez Que cet homme pensif, mystérieux et doux.
On peut dire qu’à cet égard la Rodogune de Corneille annonce ou fait déjà pressentir la tragédie de Racine, — son Andromaque ou son Bajazet, — ces chefs-d’œuvre « faits avec rien », chargés de si peu de matière, et dont l’élégante simplicité de lignes n’a d’égale, comme nous le verrons, que la richesse, la profondeur, la complexité d’observation morale. […] Et, en vérité, capable qu’il était de fondre ensemble l’hiératique mysticité des Vierges du Pérugin avec l’élégance insexuée des lignes florentines, et avec la plénitude ou l’opulence des formes romaines, Raphaël, plus consciencieux, n’eût-il pas dû s’abstenir de brouiller en lui les écoles et, avec les écoles, les idées aussi de l’auteur de l’Histoire des peintres et de la Grammaire des arts du dessin ? […] … Mais c’est peut-être Racine qui l’a le plus aimé, et c’est pourquoi nous retrouvons dans son Andromaque cette hardiesse ingénue de moyens, cette vérité d’observation, cette pureté de lignes, cet équilibre ou cette eurythmie, qui nous charment surtout dans la sculpture grecque. […] Voilà l’art moderne, moins pur assurément de formes ou de lignes, mais plus psychologique et plus voisin de nous que l’ancien ; voilà, — pour le dire en passant, — l’explication du succès prodigieux du roman de mœurs dans le siècle où nous sommes ; et voilà pourquoi c’est à la fin du xviie siècle aussi qu’il commence de paraître, avec Courtilz de Sandras, l’auteur des Mémoires de Rochefort et de d’Artagnan ; avec Mlle de La Force, avec Mme de Murat, avec Mme d’Aulnoy ; avec l’auteur du Diable boiteux, de Gil Blas, et aussi de ce Turcaret, — auquel enfin nous arrivons. […] Évidemment, Messieurs, c’est beaucoup, c’est trop dire, et en vous citant quelques lignes de cet éloge, je n’oublie pas que sous la plume de Fréron, la vivacité s’en augmente ou s’en échauffe assez naturellement du désir d’être désagréable à Voltaire.
Derrière ces bâtiments, un grand jardin ou plutôt un parc minuscule, dont l’entrée élevée de quatre marches, et s’ouvrant au-dessus d’un parterre, entre une ligne de grands arbres, joue si bien une baie de théâtre, que Daudet, avant de tomber malade, avait eu l’intention d’y jouer une espèce de farce italienne de son invention. […] Jeudi 24 septembre Une galerie de rez-de-chaussée, aux murs blancs, lignes de filets bleus, et sur le grand panneau de laquelle est peinte par le maître de la maison, une vague Assomption dans des couleurs de Lesueur.
Que dire du méditatif, du taciturne, sans parler ici ni du berger, ni du chasseur à l’affût, ni du pêcheur à la ligne, ni du veilleur de nuit, ni du trappiste, ni du bandit corse, encore moins des solitaires à demi aliénés, comme le sauvage du Var3 ! […] Les grandes lignes du système de Bonald sont magistralement coordonnées ; les vues de détail par lesquelles il prétend les confirmer sont d’ordinaire inexactes ; elles sont souvent puériles quand elles portent sur la grammaire, l’étymologie, les rapports mystérieux des mots et des idées.
Telle prose de lui a la ligne de celles de Nicole ou de Pascal, telle a la volubilité pailletée, du xviiie siècle ; tels vers sont raciniens. […] Que l’un de vous taille les feuilles de parchemin ; qu’un autre les polisse ; qu’un autre encore y trace au poinçon les lignes destinées à guider la plume de l’écrivain, etc. » Il faut concevoir l’activité soutenue que provoquait dans la paisible ambiance des cloîtres ce prodige de lenteur qu’était l’établissement d’un livre.
Mais, puisqu’on a mis les phrases à la porte, on devrait au moins rejeter les banalités, condenser en quelques lignes des jugements motivés, d’une rectitude absolue. […] Et je défie qu’on puisse alors marquer la ligne du médiocre où l’on s’arrêterait ; il y aurait toujours un pire auquel on serait bientôt forcé de descendre. […] Me dire que je me trompe, en ne mettant pas tous les écrivains sur une même ligne et en ne leur donnant pas à tous le nom de naturalistes, parce que tous ont l’intention de reproduire la nature, c’est jouer sur les mots et faire de l’esprit singulièrement fin. […] Et je n’indique que les grandes lignes ; cela s’est fait lentement, avec toutes sortes de nuances, de batailles et de victoires. […] Voici, en quelques lignes, le sujet du drame.
Par la même raison l’on done le nom de clé en termes de musique à certaines marques ou caractères que l’on met au comencement des lignes de musique : ces marques font conoitre le nom que l’on doit doner aux notes ; elles donent, pour ainsi dire, l’entrée du chant. […] Tout corps est réèlement étendu en longueur, largeur et profondeur, mais souvent on pense à la longueur sans faire atention à la largeur ni à la profondeur, c’est ce qu’on apèle faire abstraction de la largeur et de la profondeur ; c’est considérer la longueur dans un sens abstrait : c’est ainsi qu’en géométrie on considère le point, la ligne, le cercle, sans avoir égard ni à un tel point, ni à une telle ligne, ni à un tel cercle physique. […] Ainsi il n’est pas nécessaire que j’aie vu tous les cercles possibles, pour vérifier si dans tout cercle les lignes tirées du centre à la circonférence sont égales, un objet qui n’a pas cette propriété n’est point un cercle, parce qu’il n’est pas conforme à l’idée exemplaire que j’ai aquise du cercle, par l’usage de la vie, et par les réflexions que cet usage a fait naitre dans mon esprit.
Il s’arrête à toute ligne du texte qui lui permet de dessiner non une action nette et déterminée, mais une plaine, une gorge de montagnes, une prairie, un effet de lumière. […] Le génie mystique n’a jamais pesé sur son esprit ; il n’y a pas dans ses écrits une seule ligne où l’on sente le visionnaire et le fanatique. […] Sa conception, d’abord précise et limitée comme une figure géométrique, brise bientôt ces lignes rigides et prend un caractère indéfini et indéterminé. […] Cependant, en dépit de son heureuse expérience, la ligne de démarcation lui paraît tranchée de telle sorte qu’il est dangereux de la franchir. […] Pisan, un artiste hors ligne dans ce genre si ingrat et si difficile de la gravure sur bois, et qu’il n’est que juste d’associer au succès du dessinateur.
Contre eux, il y a la satire, qui est une dénonciation avec noms propres imprimés ou faciles à lire entre les lignes ; il y a la religion, le sermon, aptes, sinon à effrayer les criminels, du moins à arrêter ceux qui s’engagent sur la voie du crime ; enfin et surtout, il y a la loi. […] Rousseau ne s’aperçoit pas que sa note contredit son texte et que, même, la seconde partie de sa note contredit les premières lignes de sa note. […] Voltaire a eu un mot très judicieux, très précis, dans son jugement en dix lignes sur Molière au chapitre XXXII du Siècle de Louis XIV : « Il a été le législateur des bienséances de son siècle. » Rien de plus ? […] Le civisme, en un mot, est un des sentiments les plus profonds de Rousseau, et l’on ne s’étonnera que de ceci que je mette tant de lignes à établir cette vérité. […] Il convient aussi, et à en juger par le nombre de lignes que Rousseau consacre à cet article, il semble qu’il y attribue une extrême importance, il faut aussi exercer et développer infiniment sa coquetterie.
» Ces lignes sont-elles de Bayle ou de Montesquieu ? […] Bayle était passé maître en cet art, et il faut entendre Voltaire l’en féliciter : « Ses plus grands ennemis, dit-il à ce propos, sont forcés d’avouer qu’il n’y a pas une seule ligne dans ses écrits qui soit un blasphème contre la religion chrétienne, mais ses plus grands défenseurs avouent que, dans ses articles de controverse, il n’y a pas une page qui ne conduise le lecteur au doute et souvent à l’incrédulité. » Mais Diderot est quelque part plus explicite encore. […] Si l’on fait attention, maintenant, où Diderot a placé ces quelques lignes, en quel endroit de l’œuvre commune — dans cet article Encyclopédie, qui en est avec le Discours préliminaire de d’Alembert, le morceau capital, — on reconnaîtra que, pour avoir tracé d’abord le plan de leur Encyclopédie sur celui de la Cyclopædia de Chambers, ce n’en est pas moins de l’esprit de Bayle que se sont inspirés d’Alembert et Diderot. […] Car elle était femme d’esprit — cela se sent entre les lignes des lettres de Marais, — et quand il lui écrit qu’il « n’avait pas de plus grand plaisir que celui de son entretien », la galanterie s’en mêle, mais nous l’en croyons aisément. […] « Je fus, dit-elle, assez contente de moi…, ne m’étant pas presque écartée du vrai, dans lequel il me sembleque l’esprit forcé à quelque détour rentre aussi naturellement que le corps qui circule rattrape la ligne droite. » Fontenelle a passé par là.
Les inflexions de la ligne des monts sur le bleu du ciel, les plis et les contreplis du sol, les profondeurs des ravines, les saillies des caps, les lits des torrents ; les plateaux arides, où la terre éboulée laisse percer le sable rouge ; les maisonnettes ensevelies sous les feuilles de leurs vergers séculaires ; les arbres penchés avec leurs grands bras en avant sur les abîmes, comme pour se parer contre leur chute : tous ces horizons variés, dont chaque nuage ou chaque rayon qui traverse le firmament diversifie l’aspect et la couleur, et semble faire onduler le paysage comme une peinture mobile, ne laissent pas un regard indifférent ou uniforme dans les yeux.
J’écrivis à Hugo pour lui dire « que je l’avais lu, que j’étais tour à tour ravi du talent, blessé du système ; que la critique radicale de la société, chose sacrée parce qu’elle est nécessaire, chose imparfaite parce qu’elle est humaine, m’était antipathique ; que, si j’écrivais sur son livre, je respecterais avant tout l’homme, l’amitié, le suprême talent, le génie, cette épopée du talent ; mais qu’en confessant mon admiration pour le talent, il me serait impossible de ne pas combattre à armes cordiales le système ; et qu’en combattant le système, je froisserais peut-être involontairement l’homme et l’œuvre ; que par conséquent j’attendrais sa réponse avant d’écrire une ligne de l’admiration et de la réprobation qui bouillonnaient en moi ; et que, s’il craignait que la condamnation des idées du livre ne blessât le moins du monde en lui l’homme et l’ami, je n’écrirais rien, car, même pour défendre la société, il ne faut jamais, comme un vil séide, enfoncer même une épingle au cœur d’un ami, et qu’il me répondît donc, s’il le jugeait à propos ; que, s’il ne me répondait pas, j’interpréterais son silence, et je n’écrirais rien ».
Lisez les lignes suivantes, et jugez combien la piété bien entendue et bien sentie s’étend à tout, depuis l’étoile incommensurable jusqu’au pauvre petit chien qui n’a que ses deux pattes à laisser à sa maîtresse.
La plupart étaient très-jeunes et on les avait enrégimentés pour leur donner une occupation et une solde, plus que pour les faire servir contre leur patrie ; auxiliaires volontaires ils avaient très-peu servi en ligne contre leurs compatriotes.
Y avait-il une folie comparable à celle d’un parti éclipsé qui ne pouvait présenter en ligne de bataille pour généraux que des avocats ou des hommes de lettres, et pour soldats que des enfants ou des vieillards, reste d’une noblesse émigrée, en suspicion à la masse du peuple ?
La littérature prenait un train qui n’était pas pour le réjouir : on arrivait à l’Académie par les femmes, sans avoir écrit une ligne.
Nous disions : « Depuis que la philosophie du Dix-Huitième Siècle a porté dans toutes les âmes le doute sur toutes les questions de la religion, de la morale et de la politique, et a ainsi donné naissance à la poésie mélancolique de notre époque, deux ou trois génies poétiques tout à fait hors de ligne apparaissent dans chacune des deux grandes régions entre lesquelles se divise l’Europe intellectuelle, c’est-à-dire d’une part l’Angleterre et l’Allemagne, représentant tout le Nord, et la France qui représente toute la partie sud-occidentale, le domaine particulier de l’ancienne civilisation romaine.
Au moment de la communion, il prenait par le bas du chœur, dénouait ses cheveux, déposait ses gants sur une petite crédence préparée pour lui près du jubé, et traversait le chœur, seul, sans perdre une ligne de sa haute taille.
Un style clair, qui vaut surtout par la logique, la précision des lignes, l’enchaînement serré des idées, qui n’admet guère que des épithètes abstraites et générales ; un théâtre où les personnages sont comme détachés de leur milieu et se meuvent dans un cadre vague, indéterminé, où ils se présentent presque comme de purs esprits dont les pensées et les sentiments méritent seuls l’attention ; des tragédies simples ; d’une structure rigide et géométrique, d’une sobriété de mise en scène qui montre qu’elles s’adressent à l’âme, non aux sens ; une littérature qui se concentre tout entière dans l’étude, de l’homme civilisé, qui ne daigne ou ne sait pas voir le reste de l’univers, qui ne connaît pas la campagne, qui soumet l’imagination, « la folle du logis », aux commandements de la raison, qui marche à pas comptés, d’une allure méthodique et posée.
Une paraphrase du finale de la Walküre, par Édouard Dujardin (quelques lignes seulement) est dans le volume de contes, les Hantises, que publie M.
L’heure est donc venue de résumer en quelques lignes les travaux accomplis, pendant les quatre derniers mois, par les vaillants artistes de la troupe allemande.
Nous triomphons sur toute la ligne.
Quelques lignes seulement, dans lesquelles Wagner dit qu’il a découvert que même dans l’amour entre les sexes « on peut trouver le chemin du salut, c’est-à-dire de la négation de la volonté de vivre. » Il se flatte ainsi de pouvoir expliquer ce qui était pour Schopenhauer un sujet d’étonnement : le fait qu’on voit fréquemment des amants dont le sort rend l’union difficile, se donner ensemble la mort et mettre ainsi une fin au plus grand bonheur imaginable, plutôt que de recourir aux moyens les plus désespérés et que de supporter toutes les misères afin de rester unis le plus longtemps possible. — Dans une note on nous apprend que ce fragment de lettre date de l’époque de Tristan.
L’extériorité des sensations des sens et l’intériorité des sensations du système, créent une large ligne de démarcation entre les perceptions qui naissent des unes, et les appétits ou instincts qui naissent des autres ; et celles-ci à leur tour donnent naissance aux diverses formes de sensibilité, connues sous les noms de pensée et d’émotion.
La publicité a fait de réels progrès et, sauf de rares circonstances, nos agents, très pratiques, considèrent comme perdue toute ligne qui n’est pas employée à louer.
Vous diriez un pêcheur à la ligne, intéressé dans l’expédition d’un baleinier, et tremblant de le voir partir par un gros temps, sur une mer houleuse.
Il y a en français un diminutif en role ; exemples : Ligne Lignerole (Ficelle) Mouche Moucherolle (Oiseau) Museau Muserolle (Partie de la bride) Roux Rousserolle (Fauvette) Fève Fèverole Flamme Flammerolle Feu Furolles (Feux-follets) Fusée Fusarolle, (Terme d’architect.)
Les cônes aigus des montagnes pelées du Mâconnais et du Beaujolais, groupés à droite et à gauche comme des vagues de pierre sous un coup de vent du chaos ; sur leurs flancs, de nombreux villages ; à leurs pieds, une immense plaine de prairies semées d’innombrables troupeaux de vaches blanches, et traversées par une large ligne aussi bleue que le ciel, lit serpentant de la Saône, sur lequel flotte, de distance en distance, la fumée des navires à vapeur ; au-delà, une terre fertile, la Bresse, semblable à une large forêt ; plus loin, un premier cadre régulier de montagnes grises, muraille du Jura qui cache le lac Léman ; enfin, derrière ce contrefort des montagnes du Jura, qui ressemblent d’ici au premier degré d’un escalier dressé contre le ciel, toute la chaîne des Alpes depuis Nice jusqu’à Bâle, et au milieu le dôme blanc et rose du mont Blanc, cathédrale sublime au toit de neige qui semble rougir et se fondre dans l’éther, et devenir transparente comme du sable vitrifié sous le foyer du soleil, pour laisser entrevoir, à travers ses flancs diaphanes, les plaines, les villes, les fleuves, les mers et les îles d’Italie.
« Sous un tel ascendant, continue-t-il, nos diverses connaissances réelles pourront donc enfin former un vrai système, assujetti dans son entière étendue et dans son expansion graduelle, à une même hiérarchie et à une commune évolution, qui n’est certainement possible par aucune autre voie. » Et il conclut : « L’indispensable harmonie entre la spéculation et l’action est ainsi pleinement établie, puisque les diverses nécessités mentales, soit logiques, soit scientifiques, concourentà conférer la présidence philosophique aux conceptions que la raison publique a toujours considérées comme devant universellement prévaloir. » On remarquera que ces lignes, que j’extrais de la dernière leçon du Cours de philosophie positive, sont datées de 1842 ; elles appartiennent donc à la « première phase » de la philosophie d’Auguste Comte.
C’est la divinisation dans l’homme de la bête, c’est l’accouplement des animaux sur toute la ligne, avec une technique d’expression chauffée au désir de produire de l’effet qui doit être le grand et peut-être le seul désir de M.
Quant au Lovelace de cette Clarisse de kermesse, ce n’est plus ce Satan anglais, plus infernal que celui de Milton, ce grand et fascinant scélérat, qui est presque une excuse pour cette navrante chute de Clarisse, qui fit pleurer tous les cœurs purs de l’Angleterre, mais c’est la dernière expression de Lovelace, comme la dernière ligne du profil de l’homme aplati fait, dit-on, celui du crapaud.
Daunou « n’hésite point » à indiquer en première ligne « les chefs-d’œuvre de la poésie épique », car « ce sont les poètes qui ont créé l’art de raconter, et qui ne l’a point appris d’eux ne le sait qu’imparfaitement ». […] Les sept chapitres qui suivent y sont consacrés. — Essayons d’en esquisser d’abord, très sommairement, les lignes générales et les grandes divisions. […] Certaines erreurs accidentelles (l’omission de plusieurs lignes, par exemple) sont irréparables dans le cas, qui nous occupe, d’une copie unique. […] Les sciences historiques en sontarrivées maintenant à ce point de leur évolution où, les grandes lignes étant tracées, les découvertes capitales ayant été faites, il ne reste plus qu’à préciser des détails ; on a le sentiment que la connaissance du passé ne peut plus progresser que grâce à des enquêtes extrêmement étendues et à des analyses extrêmement approfondies dont, seuls, des spécialistes sont capables. […] S’agit-il de faits mal datés, ou simultanés, qui ne peuvent pas se ranger sur une ligne, l’ordre alphabétique s’impose : on a de la sorte des Dictionnaires : dictionnaires d’institutions, dictionnaires biographiques, encyclopédies historiques, tels que la Reale Encyklopædie de Pauly-Wissowa.
Il me semble que, pour le lire avec fruit, il faut ne pas s’attarder trop à tout son fatras de dialectique, de maïeutique et de polémique ; le lire posément et tranquillement, sans le discuter aussi minutieusement et pointilleusement qu’il discute lui-même ; recevoir l’impression générale de chaque dialogue, qui, tout compte fait, est souvent très forte ; se faire ainsi un système platonicien très simple et à grandes lignes, en transformant en lignes droites ses lignes sinueuses et ses zigzags ; contrôler et vérifier ce système ainsi obtenu sur les passages les plus élevés de tous et les plus affirmatifs que nous offre le texte ; et se donner ainsi un Platon d’ensemble, qui sera peut-être contestable, mais qui aura des chances de n’être pas trop éloigné du Platon véritable et qui en sera comme le portrait simplifié ou comme le plan à vol d’oiseau. […] Il y a une sculpture vraie, qui, cherchant à réaliser l’eurythmie des belles formes, conduit, nous le répétons toujours, au goût du bien ; et il existe une sculpture fausse qui peut séduire, soit par la mollesse des lignes et des contours, soit par l’effort et le mouvement violent, et dans un cas cette fausse sculpture énerve l’âme et dans l’autre cas elle la met dans une sorte de disposition maladive et la fatigue inutilement et détruit sa sérénité. […] Pour bien se reconnaître ou ne pas trop s’égarer dans cette organisation multiforme, autrement dit dans ces idées d’organisation politique qui ne sont pas toutes très d’accord entre elles et pour ne les ramener qu’à des lignes très générales, lesquelles, à la condition de les maintenir très générales, ne laisseront pas d’être assez nettes, il faut remarquer d’abord, que, tant dans la République que dans les Lois, sans compter quelques autres ouvrages plus courts, Platon a précisément voulu présenter, non pas un seul modèle de constitution politique, mais plusieurs. […] Le gouvernement de Sparte est donc un bon « modèle », et nous ne cesserons probablement pas de songer un peu en lui pendant tout le temps que nous tracerons les lignes générales du gouvernement que nous souhaitons.
Son opération est normale, conforme au travail de la Nature, qui retouche constamment ses œuvres, pour dégager les grandes lignes, pour les débarrasser du caduc et de l’accessoire. […] Reyssié nous fait de Milly, de Saint-Point et des environs, bref, de la nature au milieu de laquelle grandit Lamartine : paysage de Sicile ou de Grèce pendant l’été, de Norvège ou d’Écosse à partir de l’arrière-automne ; paysage aéré et découvert, à grandes lignes, avec beaucoup de ciel ; dont les images emplirent pour jamais les yeux du jeune rêveur et qui avec certains sites d’Italie, — forment le « décor », toujours largement baigné d’air et découpé en vastes plans, des Harmonies et des Méditations. […] Sur les ramilles, que le poids des fleurs inclinait, bourdonnaient les abeilles avides ; et dans les lignes habitaient les Ghandarvas, les Apsaras et des troupes de singes, ivres de joie.
Aujourd’hui encore un reste d’imbécillité barbare subsistant dans quelques esprits, refuse de mettre le Magistrat, le négociant, l’artiste renommé sur la même ligne que le militaire. […] Ces détracteurs acharnés se sont rangés absolument sur la même ligne, & rien ne les distingue plus que leur nom ; car ils ont une dose égale de fureur de pédanterie & d’animosité ; ce n’est plus un jugement que le Public lui-même va chercher dans ces feuilles ; c’est le modèle d’une Diatribe plus ou moins sanglante, plus ou moins ingénieuse. […] Il est vrai qu’un Auteur qui sent sa foiblesse & son peu d’invention, taille toujours son drap, comme fait le tailleur, sur le patron consacré : il n’ôse diriger son ciseau au-de-là de la ligne tracée ; c’est toujours la même coupe : cinq actes ou quatre repos ; quinze-cents vers distribués à quatre ou cinq personnages, & du sang répandu vers la fin.
Deux sons semblables au bout de deux lignes égales ont toujours consolé les plus cuisantes peines ; la vieille Muse, après trois mille ans, est une jeune et divine nourrice, et son chant berce les nations maladives qu’elle visite encore, comme les jeunes races florissantes où elle a paru. […] Je ne me rappelle pas une seule ligne de lui qui indique un sentiment vrai de la nature ; il n’apercevait dans les forêts que des bûches et dans les champs que des sacs de grain.
Je vous comprends : à défaut d’une loi morale, vous voulez, comme dit De Maistre, remédier au mal par des lois impitoyables ; mais, au lieu de séparer les deux sexes et de frapper le second sexe tout entier, vous tracez une ligne entre les classes, et vous dites : D’un côté de cette ligne le vice sera permis, de l’autre prohibé.
Voici les premières lignes que vous lirez ; c’est Barbouillé qui parle : Il faut avouer que je suis le plus malheureux homme du monde. […] Passez ensuite tout à fait à la fin du théâtre de Molière, au Malade imaginaire, aux dernières lignes que Molière, à la veille de mourir en jouant cette pièce, a tracées de sa main défaillante. […] Le nom de l’homme qui a écrit ces lignes ne se sépare plus dans aucun esprit du nom de la Comédie. […] Eh bien, maris de trente-cinq ans, s’il y en a qui m’écoutent, savez-vous quelle pente éternelle vous entraîne à proposer sinon à imposer des lignes de conduite, à faire des discours et des systèmes ?
Je le demande, ce récit n’est-il pas signé de Fléchier, à chaque ligne, par le bel esprit symétrique et par l’antithèse ?
Le petit avis au lecteur y répond bien mieux d’un seul mot : « Il faut prendre garde…, il n’y a rien de plus propre à établir la vérité de ces Réflexions que la chaleur et la subtilité que l’on témoignera pour les combattre141. » Voltaire, qui a jugé les Maximes en quelques lignes légères et charmantes, y dit qu’aucun livre ne contribua davantage à former le goût de la nation : « On lut rapidement ce petit recueil ; il accoutuma à penser et à renfermer ses pensées dans un tour vif, précis et délicat.
Macaulay, qui est fort suivi aujourd’hui : « Les meilleurs portraits, a dit ce grand peintre historique, sont peut-être ceux dans lesquels il y a un léger mélange de charge… Quelque chose est perdu pour l’exactitude, mais beaucoup est gagné pour l’effet… Les lignes moins importantes sont négligées, mais les grands traits caractéristiques s’impriment pour toujours dans l’esprit. » C’est ainsi qu’on raccommode après des siècles et qu’on refait bien des personnages.
Ouvrez-les ; chacune d’elles est un trésor ; il y a mis, dans un étroit espace, un long amas de réflexions, d’émotions, de découvertes, et notre jouissance est d’autant plus vive que tout cela, saisi en une minute, tient aisément dans le creux de notre main. « Ce qui fait ordinairement une grande pensée, dit-il lui-même, c’est lorsqu’on dit une chose qui en fait voir un grand nombre d’autres, et qu’on nous fait découvrir tout d’un coup ce que nous ne pouvions espérer qu’après une longue lecture. » En effet, telle est sa manière ; il pense par résumés : dans un chapitre de trois lignes, il concentre toute l’essence du despotisme.
Le philosophe va au-delà et, dans la ligne qui sépare le langage émotionnel du langage rationnel, la connaissance intuitive de la connaissance conceptuelle, c’est-à-dire dans les racines de chaque langue, il découvre la véritable barrière qui sépare l’homme de la bête. » D’après ce qui précède, et de l’aveu de M.
Le poète qui a fait cela n’était pas un coloriste, mais jamais dessin ne donna plus l’illusion de la vie par la sure netteté des lignes.
Deux lignes lui suffisent à indiquer une bataille : ce qui importe, c’est le résultat, c’est le procédé diplomatique qui en extrait ou en répare les conséquences.
Voici la dernière ligne de sa dernière lettre à sa jeune parente : « Vous parlez beaucoup de croire et de croyants.
On oublie l’amour de la vie pour l’amour de la ligne.
Et puisque je me règle d’ordinaire, dans mes jugements, sur l’impression dernière, celle qui me reste, au moment où j’écris ces lignes, est une impression de fécondité, de variété et de vie.
Le Messager dit d’abord la ruse de l’esclave envoyé par Thémistocle à Xerxès, pour lui porter le faux avis de la fuite des Grecs, le roi affermi dans sa présomption, et donnant l’ordre à sa flotte de cerner les passes du détroit ; puis le repas du soir, les exercices nocturnes des équipages, et la tranquille évolution des navires perses étendant, le matin, leurs lignes, pour capturer dans une étreinte la flotte adversaire.
La Dame aux Camélias a engendré Marco, qui a engendré Olympe, qui a engendré Turlurette et Mimi Bamboche… Dynastie malsaine dont la décroissance rappelle cette série de têtes au crayon, dans laquelle l’inclinaison d’une ligne verticale transforme insensiblement le profil de Vénus en museau de grenouille.
Enfin, deux mois après notre départ, nous nous trouvâmes sous la Ligne sans avoir éprouvé de chaleurs extraordinaires.
Les artistes qui voient les lignes sous le luxe et l’efflorescence de la couleur percevront très bien qu’il y a ici une architecture secrète, un plan calculé par le poète, méditatif et volontaire.
Alors ils auraient pu, avec toute leur science, trouver la raison de la filiation des langues et des transformations des mots lorsqu’ils passent d’une langue dans une autre ; ils auraient pu, après avoir remarqué que le son de la voix est un trait physiognomonique très important dans l’homme, peut-être le plus important de tous ; ils auraient pu, dis-je, remarquer combien est caractéristique aussi l’accent qui signale les peuples divers et qui anime leurs langues ; ils auraient pu remarquer qu’il y a des familles et des nations distinguées par l’analogie des sons de la voix comme par celle des lignes de la figure, ou des couleurs de la peau et par les habitudes des cheveux.
La manière de Courbet est plus large : il procède par plus grands traits ; tandis que Flaubert procède par petits, accumulés, surchargés, ténus, n’oubliant rien, et détachant net l’ombre d’un ciron sur son grain de poussière… Les gens qui trouvent Flaubert un bien grand homme, car il en est qui sérieusement le mettent sur la ligne de Balzac, le vantent uniquement pour son style.
et dont l’énoncé tient en quelques lignes. […] Quant aux autres, ce qu’ils peuvent attendre de plus glorieux, c’est que, dans deux ou trois siècles, un érudit mentionne une douzaine d’entre eux et consacre trente lignes à leurs œuvres en piquant dans le tas. […] » — à ce moment-là je tournais la page, et j’arrivais au chapitre xv : « De l’amour de la vierge », et je lisais ces lignes, graves comme un cantique, plus pures et plus sereines que les « vers dorés » des Hésiode, des Pythagore et des Théognis, et que j’ai trouvées, pour moi, d’une beauté merveilleusement douce et touchante : « Affin que la pucelle ne soit totallement frustée d’aymer, en premier lieu elle aymera Dieu souverainement, Jésu-Christ son espoux, sa sœur la Vierge Marie, les saints et sainctes de Paradis, l’Église de Dieu, et son bon Ange qui l’a en garde… Successivement elle aura fin de son amour à ses père et mère qui font engendrée, et par grant labeur et sollicitude, sans lesquels elle ne fust née, et les doit avoir en révérence, comme ceulx qui sont, quant à elle, au lieu de Dieu, et à iceulx doit ayder à son pouvoir. […] Moitié soumission d’esprit, moitié pédantisme naïf et contentement de savoir tant de choses, on n’écrivait pas alors une seule ligne sans alléguer ses « autorités » ; et c’est à grand renfort de citations que l’on affirmait que les roses sentent bon, que le vice est haïssable ou que la richesse ne fait pas toujours le bonheur. […] Et il écrirait des poèmes abscons en langage précieux et en lignes très inégales, assonancées.
… » Bien évidemment, il y a dans ces dernières lignes autre chose que renonciation d’un fait vulgaire ; il y a une théorie, qui explique et justifie les actions des hommes par leur tempérament, leurs aptitudes, leurs inclinations naturelles. […] Tout dévouement est louable ; mais ne mettons pas sur la même ligne l’amour qui se sacrifie et le devoir qui s’immole. […] Il n’est pas jusqu’à Mercadet, ce héros posthume de M. de Balzac, qui ne descende en ligne directe du héros de L’Auberge des Adrets : Mercadet, c’est Robert Macaire financier, spéculateur, exerçant son industrie à la Bourse, se faisant gloire de sa rouerie, étalant ses théories cyniques, et provoquant chez le spectateur, non point comme Tartufe ou l’Avare, le rire qui corrige, mais un rire complaisant et admirateur, un rire qui corrompt. […] Voilà l’abolition de l’héritage, non pas seulement en ligne collatérale comme la proposait l’école, mais radicalement, en ligne directe, comme la voulait le maître.
Quelle est la ligne ou la courbe qu’ils tracent, et quels en sont, comme je crois que l’on dit, les points d’inflexion ou de rebroussement ? […] Quelques exemples vous le feront d’ailleurs mieux entendre, si nous considérons dans l’histoire de l’art, ou dans celle de la littérature, les grandes lignes de l’histoire d’un genre, ou celles de l’évolution de l’art même. […] Mais, comme je vous l’ai dit, nous ne nous proposons que d’en retracer les lignes les plus générales ; et c’est pourquoi, de cette première période, je ne veux mettre à part, pour vous en parler, que trois œuvres, entre beaucoup d’autres. […] Ils ont laborieusement écrit des volumes, sur quelques lignes que l’imagination des poètes a créées en se jouant. […] Et, si vous aimez les rapprochements, voici quelques lignes qu’on ne s’étonnerait pas de rencontrer sous la plume de Mme de Staël : Je sais qu’il y a plusieurs personnes qui disent que la raison et les passions sont partout les mêmes ; cela est vrai ; mais elles s’expriment diversement.
Le document, comme on dit, le document, humain ou autre, triomphe sur toute la ligne ; le document, qu’il soit naturaliste ou qu’il soit archéologique, ne tend à rien de moins qu’à remplacer, qu’à détrôner la littérature et l’art. — Mon Dieu ! […] Claveret était ce singulier poète qui, dans sa tragédie intitulée le Ravissement (l’Enlèvement) de Proserpine, où la scène est tour à tour au Ciel, en Sicile, et aux Enfers, se piquait d’avoir respecté l’unité de lieu, « le lecteur, disait-il, pouvant la concevoir comme une ligne perpendiculaire du Ciel aux Enfers ; bien entendu que cette verticale doit passer la Sicile ! […] Dans le temps que les Sentiments de l’Académie allaient paraître, Corneille écrivit ces lignes, où il est difficile de ne pas voir une ironie contenue et une certaine tristesse amère, que cependant Pélisson a voulu prendre pour du respect : « J’attends avec beaucoup d’impatience les Sentiments de l’Académie, afin d’apprendre ce que dorénavant je dois suivre. […] Quant à La Bruyère, j’ai cité précédemment trois lignes de son jugement sur le Cid, mais il faut lire le passage tout entier : « Quelle prodigieuse distance, dit-il, entre un bel ouvrage et un ouvrage parfait ou régulier ! […] Voltaire lui-même, du reste, en cet endroit, après bien des remarques injustes, est forcé d’admirer enfin et d’écrire cette ligne : « Cela est digne de la tragédie la plus sublime. » — Il est vrai qu’il essaye tout de suite après de se consoler de cet aveu en renvoyant la gloire de ces belles scènes à l’auteur espagnol, quel qu’il soit. « Dès qu’il s’agit de grandeur, dit-il, il y en a toujours dans les pièces espagnoles.
Les mathématiques, toutes les sciences ne mesurent que des lignes et des mouvements. […] En l’employant on n’atteindra que les lignes générales des phénomènes, non leurs détails et leurs caractères essentiels. […] Il y avait donc des lignes de démarcation infranchissables entre les mondes ainsi créés. […] Voilà des actions sans motif. » Supposons que j’aie en main un stylet très aigu placé au milieu d’une ligne ; je dois le placer à l’un des deux points extrêmes de la ligne. […] Les points figurent les faits ; la ligne qui les relie, l’hypothèse.
Bien au contraire, Dante entre en scène dès les premières lignes de sa Comédie : il en est l’acteur principal ; Virgile et Béatrice le conduisent ; les réprouvés et les élus s’entretiennent avec lui ; il reconnaît, dans l’enfer, dans le purgatoire et dans le paradis, ses amis et ses proches ; on lui prédit sa gloire future. […] Le portrait comme nous l’entendons, la physionomie, la ligne caractéristique, telle que l’a faite, un des premiers, Masaccio, personne n’y songeait alors, et je crois que Marcel pourrait bien avoir raison. […] Entre la masse aiguë du cap Plouha, à laquelle on touchait presque, et la ligne argentée, à peine visible, que traçait le cap Fréhel au plus lointain horizon, une vaste étendue d’eau, en pleine lumière, unissait, par des effets merveilleux de coloration et de perspective, ses profondeurs glauques aux profondeurs azurées du ciel. […] Ligne, couleur, lumière, mouvement, tout est contrasté ; et pourtant c’est le même océan ; ce sont les mêmes rochers, le même ciel ; et nous sentons là je ne sais quelle identité de vie, une sorte d’individualité déterminée à qui nous donnons le même nom, et qui nous attire d’un même attrait. […] Cependant, même dans ce détail, pour peu que l’on y cherche la ligne essentielle, on retrouve la grandeur.
Les premières lignes qu’il ait écrites et les dernières qui soient parties de sa main ont été pour elle. […] Il était excellent, et presque merveilleux calculateur, comptable hors ligne. […] Ce stade du siècle, Lamennais l’a parcouru, et la ligne brisée de sa pensée en est la représentation exacte. […] Le dessein moral du livre nous est révélé par quelques lignes de l’épilogue. […] Le vieux Buffon, avec la ligne de démarcation très forte qu’il trace et qu’il maintient entre le règne animal et le règne humain, reste encore le plus raisonnable.
La Bruyère a quelques lignes de parfaite esquisse, comme lorsqu’il nous montre la jolie petite ville dont il approche, dans un jour si favorable qu’elle lui paraît peinte sur le penchant de la colline.
Si l’auteur eût mieux réfléchi, il n’aurait jamais écrit ces deux noms sur la même ligne.
« Marie, Royne. » « Une pâle aube d’hiver éclaira ces dernières lignes.
Le plan que Pascal se proposait de suivre est connu dans ses grandes lignes, d’abord par la Préface de l’édition de 1670, on Etienne Périer l’expose tel que son oncle l’avait développé devant quelques amis vers 1658 ou 1659, puis par certains fragments qui se rapportent à l’ordre et aux divisions du livre.
Charles Gounod Pour dire tout ce qu’il aura été, point ne sera besoin d’un maximum de six lignes : il suffira de le nommer.
Après avoir tracé d’une main ferme la ligne de séparation entre l’esprit et la matière, Descartes pénètre plus avant dans le problème.
Son talent était hors ligne : il avait sur tous ses condisciples de rhétorique une immense supériorité.
cela suppose l’audace du joueur, l’énergie de la lutte, le vaste coup d’œil de la spéculation transcendante ; cela se gagne dans l’océan des affaires, avec le harpon du baleinier financier qui pousse droit aux monstres d’or massif de la fortune ; et, à voir le vieux Poirier, vous diriez qu’il les a péchés à la ligne, dans quelque industrie stagnante et routinière, avec des morceaux de fromage et des sardines à un liard la pièce pour asticots.
Ce ne sont pas seulement d’incomparables paysages dont les lignes se profilent avec une grâce ensorcelante, c’est toute la vie lamentable et somptueuse des pauvres femmes turques, opprimées dans l’étau de coutumes millénaires, qui est reconstituée et racontée avec autant, de généreuse mélancolie que de flamme indignée.
Il parle, les yeux demi-fermés, avec toutes sortes d’expressions chatte, passant sur sa physionomie qui fait la morte, sur cette chair qui a pris le beau et chaud culottage de la chair d’un syndic de Rembrandt, et quand sa parole s’anime, il y a sur son front un étrange tressautement de la ligne de ses cheveux blancs, qui monte et redescend.
Le signe tout matériel qui trahit l’absence de vraie inspiration, c’est le manque d’haleine, l’essoufflement des poètes : on ne fait plus guère que des poèmes en quelques lignes.
Le corps offre seulement de grandes lignes au fusain, des plaques de blanc qui indiquent les froissures et le drapement de la robe.
Si l’on persiste à s’en servir pour mieux marquer le progrès scientifique des recherches morales, il importe de distinguer la nécessité morale de la nécessité physique, afin de maintenir la ligne profonde de démarcation qui séparera toujours le monde moral du monde physique.
Le nez se rattache au front par ce trait droit et pur qui est la ligne même de la beauté. […] Les épigrammes mêmes de l’Anthologie sont les Canzones et les Sonnets de la Grèce. — À deux mille ans de distance, sous une même lueur de crépuscule, Venise, comme dans un miroir prophétique, se dessine en lignes ioniennes dans le cadre brillant de la mer Égée. […] Nous serons forcé de raturer quelques lignes : la diplomatie de ce temps a l’audace de la casuistique : elle consulte, au besoin, le De Matrimonio, de Sanchez. […] Si la puissance diffère, l’esprit est le même : ils suivent d’un pas ferme ou chancelant la même ligne. […] En alignant les portraits, en comparant les règnes des cinq rois de cette dynastie, on obtiendrait le phénomène produit par cette série de têtes décroissantes, dans laquelle l’inclinaison d’une ligne verticale transforme insensiblement le profil de l’Apollon en tête de grenouille.
En effet, lorsqu’Étienne vit s’avancer les membres de la Convention nationale, rangés sur deux lignes, et comme il considérait attentivement cette masse d’hommes graves décorés de la ceinture et du panache tricolores, et tenant à la main un gros bouquet de coquelicots, de bluets et d’épis de blé mûr, son père lui toucha l’épaule et lui dit : « Tiens, regarde, voilà Robespierre ; c’est celui qui marche seul, devant la Convention. » Étienne porta alors toute son attention sur cet homme qui avait encore la destinée de tous les français entre les mains. […] Les deux artistes parlèrent assez longtemps au sujet du perfectionnement des lignes de la composition, sans qu’Étienne, si novice encore dans l’art, pût apprécier l’intention et la portée de ce qui fut dit. […] Bonaparte, d’ailleurs, avait donné quelques gages à ce parti, et l’on savait que lorsqu’il rédigea les préliminaires de paix signés à Tolentino, on avait eu assez de peine à lui faire effacer certaines lignes où la république française était louée outre mesure40. […] Aussi les forçait-il en quelque sorte d’apprendre la perspective, et leur enjoignait-il de porter toujours sur eux un petit carnet pour y tracer, au moyen de quelques lignes, les scènes, les mouvements et les physionomies qui pourraient attirer leur attention dans les lieux publics.
Rappelez-vous la scène de dix lignes de Mme Guérin avec Mme Lecoutellier. […] Il y a là Courbet, avec ses éternelles théories sur l’art, un peu confuses ce jour-ci, parce qu’il a oublié « d’amener son Castagnary » ; il y a là Morvieux — nom sous lequel l’auteur cache quelqu’un que je crois reconnaître, mais que je ne nommerai point de peur de me tromper — Morvieux, l’omnicontempteur et l’envieux universel, ennemi juré de quiconque a du génie, du talent ou seulement de la facilité ; Pelloquet, le penseur, qui n’a jamais écrit une ligne ni dit un mot et qui s’est acquis ainsi une immense réputation de philosophe ; et l’inventeur, et le critique et le parasite de grand homme, autrement dit le pariétaire ; et le simple idiot mangeur de haschich, etc., etc. […] » Il aurait pu citer les lignes de La Bruyère : « Il devrait y avoir (mais il n’y en a pas) des sources inépuisables de douleur pour certaines pertes… On pleure amèrement, on est sensiblement touché ; mais en est ensuite si faible ou si léger que l’on se console… » — Il aurait pu citer la Jeune Veuve de La Fontaine, et la Matrone d’Ephèse. […] ce n’est pas à grandes lignes ! […] Donnay de nous faire la biographie de Michel Aubier nous vaut une page d’histoire, une page d’histoire en deux cents lignes, qui est d’une singulière beauté mélancolique et que vous lirez avec admiration et émotion.
Sa morgue, cette hauteur d’estime où il était de lui-même, cette « réserve polie des manières du grand monde », qui n’est souvent qu’une forme du dédain, et ce qu’il semble bien que son abord eût d’hostile, tout cela, que l’on retrouve à chaque ligne de son Journal, ou que l’on entrevoit à travers le poète, M. […] Sur ce sujet, on remarquera qu’encore aujourd’hui même, c’est ce qui nous manque le plus, une histoire qui en soit une, si je puis ainsi dire ; la véritable et vivante histoire dont Nisard a tellement simplifié, réduit, et systématisé les grandes lignes qu’on prendrait la sienne pour un théorème ; l’histoire que Sainte-Beuve lui-même, dans ses Causeries, à force de battre les buissons, aurait plutôt embrouillée qu’éclaircie. […] Ni l’architecture n’imite, à proprement parler, les lignes de la nature, ni la musique, non plus, n’en imite les bruits. […] Mais que l’artiste ait voulu modeler une Aphrodite, une Victoire Aptère ou une Polyxène… ce qui est certain, c’est que dans ce corps de femme aux lignes admirablement pures et aux contours harmonieux, dans ce visage d’une sérénité plus qu’humaine, il a laissé à travers les âges une des expressions les plus hautes de la Beauté idéale. » C’est en effet une idée qui gagne et qui se répand tous les jours davantage, que, comme le sculpteur et comme le peintre, le poète a le droit de ne se préoccuper dans son œuvre que de la réalisation de la beauté. […] Ce que les couleurs et les lignes sont en effet dans les arts plastiques, ou les sons encore en musique, les mots le sont dans une langue, et, à plus forte raison, les « figures », les tours, la disposition des parties de la phrase.
Tel est notre destin, telles en sont les lois ; Tout homme pour lui-même est une vive croix, Pesante d’autant plus que plus lui-même il s’aime ; Et, comme il n’est en soi que misère et qu’ennui, En quelque lieu qu’il aille, il se porte lui-même Et rencontre la croix qu’il y porte avec lui… Cela, pour « traduire » trois lignes du texte, sans plus. […] Ce style Empire avec sa raideur de lignes, et ce qu’il y a d’ingénument académique dans le détail de son ornementation, a vraiment, et tout compte fait, de la grandeur ; il me paraît même supérieur au style Louis XIV, qui a surtout de la « pompe ». […] Toute description qui dépasse cinquante lignes cesse d’être clairement perceptible à un esprit de vigueur moyenne. […] Je ne puis plus donner que quelques lignes au Bandeau de Psyché, de M. […] Et, en même temps, la lumière de la bougie qui éclaire la cachette d’André se trahit par deux rectangles enserrant de leurs lignes de feu les deux panneaux inférieurs du bahut.
C’est la méthode des mathématiques qu’il donne aux sciences morales, lorsqu’il démêle comme les géomètres deux idées simples qu’il transforme par degrés en idées plus complexes, et qu’avec la sensation et le désir il compose les passions, les droits et les institutions humaines, comme les géomètres avec la ligne courbe et la ligne droite composent les polyèdres les plus compliqués. […] Sur cette ligne étroite, il avance exempt d’embarras et de méprises, sans être jamais dérouté par les heurts ou les changements du contour, sans permettre au fin sourire de la politesse de quitter jamais ses lèvres, sans manquer une occasion d’accueillir par le rire de la belle humeur les balourdises de son voisin.
(Les lignes suivantes, avec leur arrière-pensée esthétique, en donnent exactement le ton : « La France, qui n’est pas une terre latine, est une terre romanisée ; elle ne peut garder son originalité qu’en demeurant catholique, c’est-à-dire païenne et romaine, c’est-à-dire anti-protestante. […] Il déclarait partager en cette matière le scepticisme de Montaigne, qui est celui de beaucoup de nos contemporains : « La société des hommes, disait Montaigne, se tient et se coud à quelque prix que ce soit ; en quelque assiette qu’on les couche, ils s’appellent et se rangent en se remuant et s’entassant, comme des corps mal unis qu’on empoche sans ordre trouvent d’eux-mêmes la façon de se joindre et remplacer les uns parmi les autres, souvent mieux que l’art ne les eût su disposer… La nécessité compose les hommes et les assemble : cette coutume fortuite se forme après en lois. » Peut-être y a-t-il dans les dernières lignes autre chose que ce que M. […] L’exaltation psychique, unie à cette force de vie, atteint les plus hautes expressions du désir, du désespoir, de l’ardeur à la vie, et provoque en nous, tout au fond de notre conscience, des états inconnus dont la force surgissant pourrait bien rompre l’ordre social. » Beaucoup d’autres pages, et notamment les dernières d’« Un amateur d’âmes », pourraient renforcer ces lignes.
S’il y a du trop dans l’un et dans l’autre, que ce trop-là aide à penser, à réfléchir, et comme, après même l’avoir réduit, on en connaît mieux les personnages que si l’on était resté dans les lignes d’en deçà et à la superficie !
« Durant ces vingt années d’usage régulier, ce bâton ne s’est pas raccourci de trois lignes : preuve de la finesse de sa substance, gage de la longue vie qui l’attend.