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1079. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse sociologique »

— Nous avons dit que le succès d’un livre et en général d’une œuvre d’art est le résultat d’une concordance entre les facultés de l’auteur, les facultés exprimées dans l’œuvre, et celles d’une partie du public qui doit être considérable pour que le succès le soit ; cette concordance est variable par suite des variations du public, et ainsi se trouvent expliquées les fluctuations et la fortune des genres, des styles, des arts, des auteurs, à travers le temps et l’espacedu. […] Les « études de fortune », devenue par la suite « études de réception », sont les héritières de ces premières réflexions psycho-sociologiques sur la notion de « public ».

1080. (1914) Boulevard et coulisses

Quant à leurs directeurs, ils représentaient pour nous, Paris, la réputation, la fortune, la gloire. […]   Les petites déclassées Les mêmes causes exactement qui ont jeté, il y a trente ans environ, dans la publicité et le journalisme des milliers de jeunes bourgeois sans fortune, instruits et mécontents, poussent, aujourd’hui, vers le théâtre, d’innombrables jeunes filles pauvres, de toute éducation et de toute condition.

1081. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre III. Poëtes françois. » pp. 142-215

La postérité le mettra au nombre de ces citoyens généreux, qui, malgré une fortune bornée, ont plus honoré & encouragé les lettres, que quelques Souverains. […] Ce fut à ses vers qu’il dut sa fortune.

1082. (1855) Préface des Chants modernes pp. 1-39

Qu’elle vienne, et l’occupation ne lui manquera pas ; elle aura fort à faire ; car en ne touchant pas aux idées qui remuent le monde maintenant, nous semblons capitaliser notre propre fortune pour rendre plus riche encore notre jeune héritière. […] X avec Mme Z surveillée par un mari jaloux qui surprend le secret de la naissance de X et le force à épouser Mlle K, afin d’être libre de torturer à son aise cette pauvre Mme Z à laquelle il doit la fortune qui lui permet de faire des folies pour la petite P dont le père, autrefois condamné aux galères, et maintenant employé dans la police, est devenu, sous un déguisement de diplomate, l’amant de la riche princesse W, etc., etc., etc.

1083. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

Il avait de la fortune, il jouissait, tant en pensions qu’en rentes, de 30 000 livres de revenu, dit Petitot.

1084. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — I. » pp. 131-146

On raconte encore que, sans fortune comme il était d’abord, il avait demandé vingt femmes en mariage, « dont dix-neuf se sont repenties de l’avoir refusé ».

1085. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — I » pp. 56-70

Montluc, dès l’enfance, dut chercher fortune et à se frayer sa voie : « Encore que je sois gentilhomme, si suis-je néanmoins parvenu degré par degré, comme le plus pauvre soldat qui ait été de longtemps en ce royaume. » Nourri en la maison du duc Antoine de Lorraine, au sortir de page il fut pourvu d’une place d’archer dans la compagnie de ce prince sous le chevalier Bayard, qui en était le lieutenant.

1086. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Lettres sur l’éducation des filles, par Mme de Maintenon » pp. 105-120

D’abord il s’agit surtout de pauvres filles qu’on élève pour servir ; les avis de Mme de Maintenon sont proportionnés à leur condition : Dieu vous a voulu réduire à servir ; rendez-vous-en capables, et accommodez-vous à votre fortune.

1087. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Fanny. Étude, par M. Ernest Feydeau » pp. 163-178

Il y en a qui, se croyant personnellement intéressés dans ces sortes de récits, en veulent à l’auteur et déclarent que c’est être cruel, que c’est être parfaitement désagréable, de forcer ainsi d’honnêtes gens (c’est-à-dire eux-mêmes) à se poser nettement, désormais, dans leurs intrigues et ce qu’on nomme les bonnes fortunes, une question d’amour-propre et un point d’honneur qu’ils aimaient autant sous-entendre et éluder.

1088. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

. — Et arrivé à Trente, après avoir réussi : Je me livre à la fortune, mais je m’en défie ; et si la chance est favorable, je m’en défierai plus encore et rechercherai les postes secondaires que vous prétendez que je ne dois plus accepter.

1089. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

Ce n’est pas en vain qu’on a été choisi, même pour manquer le rôle de César, et qu’en tombant au premier souffle du Destin, on est une preuve, un illustre pronostic de plus de la fortune de César.

1090. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Campagnes de la Révolution Française. Dans les Pyrénées-Orientales (1793-1795) »

Figure attachante, originale, pleine de générosité et de candeur ; vieil officier gentilhomme devenu le plus allègre et le plus jeune des généraux républicains ; uniquement voué au drapeau, à la patrie ; sans arrière-pensée, sans grand espoir ; ne sachant trop où l’on allait, mais pressé, mais avide comme tous les grands cœurs de réparer les retards de la fortune et de signaler ses derniers jours par des coups de collier valeureux et des exploits éclatants !

1091. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

Le bon Eckermann, qui avait peur que la conversation ne changeât de cours, essaya de la ramener en disant : « Je crois cependant que c’est surtout quand Napoléon était jeune, et tant que sa force grandissait, qu’il a joui de cette perpétuelle illumination intérieure : alors une protection divine semblait veiller sur lui ; à son coté restait fidèlement la fortune ; mais plus tard… —  Que voulez-vous ?

1092. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite et fin.) »

Chaque pays et chaque siècle a eu sa variante de Madeleine ; et il y aurait d’elle, pour le dire en passant, toute une histoire à faire : « Histoire de la Madeleine, de sa légende, de ses représentations et portraits, au point de vue de la littérature et de l’art. » Ici c’est une coquette, c’est surtout une glorieuse ; elle énumère et se chante à elle même tous ses avantages, santé, naissance, richesse, noble train, grand apparentage : « Fortune m’a sur toutes élevée » ; c’est son refrain favori.

1093. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

« Heureux, est-on tenté de s’écrier quand on lit ces choses, heureux qui réussit à passer sa vie sans être dans ces alternatives de faveur et de disgrâce ; que les nécessités d’une carrière, l’aiguillon d’un continuel avancement ne commandent pas ; qui n’a pas soif de pouvoirs et d’honneurs ; qui n’est pas ballotté entre Colbert et Louvois, au risque d’oublier entre les deux sa conscience, d’étouffer ses scrupules et d’y perdre même le sentiment d’humanité ; qui n’est ni persécuteur ni victime, ni hypocrite, ni dupe, ni écrasant ni écrasé ; qui, après avoir connu sans doute quelques traverses de la vie et avoir essuyé quelques amertumes inévitables (sans quoi il ne serait pas homme), s’échappe le plus tôt qu’il peut, retire son âme de la foule et de la presse (comme dit Montaigne), passe le restant de ses jours « entre cour et jardin », ne voyant qu’autant qu’il faut et n’étant pas vu ; aussi loin de l’ovation que de l’insulte ; qui se soustrait en soi-même aux appels et aux tentations de la fortune non moins qu’aux irritations sourdes de l’envie et des comparaisons inégales qu’elle suggère, aux ennuis de toutes sortes, aux iniquités souvent qui s’en engendrent ; qui aime de tout temps quelques-unes de ces choses innocentes et paisibles qu’aimait et cultivait Foucault dans la dernière moitié de sa vie, mais sans en avoir taché comme lui le milieu, sans y avoir imprimé une note brûlante, et en pouvant, d’un bout à l’autre, reparcourir doucement, à son gré, et supporter du moins tous ses souvenirs ! 

1094. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. » pp. 31-51

Mathos eut là encore un retour de fortune ; il battit dans une sortie le collègue d’Hamilcar, et l’ayant pris, lui fit subir le même supplice qu’on avait infligé à Spendius, en l’attachant ignominieusement à la même croix.

1095. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

Il faut dire ici que M. de Talleyrand, tout en profitant de sa position pour augmenter sa fortune par des moyens quelquefois peu délicats, ne s’est jamais laissé engager, même par les motifs d’intérêt les plus puissants, à favoriser des plans qu’il pouvait regarder comme destructeurs pour le repos de l’Europe.

1096. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Lettres d’Eugénie de Guérin, publiées par M. Trébutien. »

Nés tous deux d’une ancienne famille noble du Midi fort déchue en fortune, mais restée fidèle jusqu’au bout aux sentiments et à l’honneur de la race, ils auront plus contribué à l’illustrer que tous les preux chevaliers d’autrefois à jamais oubliés et perdus dans la nuit des âges.

1097. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite et fin.) »

Et osera-t-on bien comparer aussi, du plus loin qu’on veuille s’y prendre, à cette dame plus que vulgaire de Tourvoie, Mme de Montesson, qui tenait dans les dernières années la Cour du duc d’Orléans et qui réussit à être épousée ; celle-ci, une vraie madame de Maintenon en diminutif, un parfait modèle de maîtresse de maison dans la plus haute société, faible auteur de comédies sans doute, mais actrice de salon excellente, ingénieuse dans l’art de la vie et dans la dispensation d’une fortune princière, personne « de justesse, de patience et de raison », qui ne pouvant, sur le refus du roi, être reconnue pour femme légitime, sut par son tact sauver une position équivoque, éviter le ridicule et désarmer l’envie, saisir et observer, en présence d’un monde malin et sensible aux moindres nuances, le maintien si délicat d’une épouse sans titre ?

1098. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « GLANES, PÖESIES PAR MADEMOISELLE LOUISE BERTIN. » pp. 307-327

Un bel âge littéraire complet, ou du moins une vraie gloire de poëte de premier ordre, serait un bonheur et un coup de fortune pour tous ceux de valeur qui l’auraient précédé.

1099. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires de madame de Staal-Delaunay publiés par M. Barrière »

Le mot a fait fortune, et il a fait tort aussi à la véracité de l’auteur.

1100. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre IV. De l’amour. »

Si l’on veut sentir le prix de la gloire, il faut voir ce qu’on aime honoré par son éclat ; si l’on veut apprendre ce que vaut la fortune, il faut lui avoir donné la sienne ; enfin, si l’on veut bénir le don inconnu de la vie, il faut qu’il ait besoin de votre existence, et que vous puissiez considérer en vous le soutien de son bonheur.

1101. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre V. La Fontaine »

Sous l’apparente fadeur des idylles de madame Deshoulières426, dans les retours fréquents qu’elle fait sur sa fortune, quand on perce les transparentes allégories, il y a bien de l’amertume, un triste désenchantement des hommes et de la vie, un fond singulier de libre pensée.

1102. (1900) L’état actuel de la critique littéraire française (article de La Nouvelle Revue) pp. 349-362

Jules Lemaître a été le révélateur du genre, et sa fortune a décidé de la direction de toute une série de normaliens.

1103. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre X. La commedia dell’arte en France pendant la jeunesse de Molière » pp. 160-190

La jeune troupe, obligée de lutter contre la mise en scène splendide du Petit-Bourbon, et contre les grandes pièces de l’hôtel de Bourgogne, Rodogune de Pierre Corneille, Jodelet ou le Maître-Valet de Scarron, La Sœur de Rotrou, ne faisait pas fortune.

1104. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Le symbolisme ésotérique » pp. 91-110

La fréquence des suicides au sein de la fortune et des plaisirs est une démonstration évidente de cette vérité.

1105. (1759) Observations sur l’art de traduire en général, et sur cet essai de traduction en particulier

Nos littérateurs trouveraient surtout un avantage considérable à traduire ainsi par morceaux détachés certains ouvrages qui renferment assez de beautés pour faire la fortune de plusieurs écrivains, et dont les auteurs, s’ils avaient eu autant de goût que d’esprit, effaceraient ceux du premier rang.

1106. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre premier. Considérations préliminaires » pp. 17-40

Semblable à ces nobles caractères dont les erreurs mêmes sont généreuses, il n’a pu jamais être dégradé ni par ses fautes, ni par les infidélités de la fortune.

1107. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

Alfred de Vigny, lui-même, ce cygne, s’abattit un instant, sur cette mare… Avec une vanité littéraire qui ressemblait à de l’hystérie, Mme Louise Colet, ce bas-bleu putipharéen, aux Joseph récalcitrants parmi les faiseurs d’articles — comme Sainte-Beuve, par exemple, qui n’entendit jamais à rien et qui lui jeta, à cette lamproie, son secrétaire, Octave Lacroix, pour s’en débarrasser, Mme Colet avait trop d’impétuosité dans l’amour-propre pour être habile ; mais elle n’en était pas moins intrigante au profit du talent qu’elle croyait avoir ; dévouée, corps et âme, à sa fortune littéraire et à des besoins de publicité dont aucune femme n’eut la rage au même degré qu’elle… Son ambition était d’être poëte, encore plus qu’écrivain…, mais cette femme du pays de la poésie facile, cette Phocéenne plus de Marseille que de Phocée, était, en poésie, à ses compatriotes Barthélémy et Méry, ce qu’un sureau vidé est à des flûtes.

1108. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

La Gloire est la sœur jumelle de la Fortune.

1109. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VI : M. Cousin philosophe »

N’écoutez pas ces esprits superficiels qui se donnent pour de profonds penseurs, parce qu’après Voltaire, ils ont découvert des difficultés dans le christianisme ; vous, mesurez vos progrès en philosophie par ceux de la tendre vénération que vous ressentirez pour la religion de l’Évangile… Ne fléchissez pas le genou devant la fortune, mais accoutumez-vous à vous incliner devant la loi.

1110. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVI. »

Ainsi, sous ce règne d’Auguste, si favorable aux arts, dit-on, dans cette heureuse maturité de l’idiome et du génie romain secondée par la paix de l’empire, chez ce peuple où se réfléchit alors le génie de la Grèce, parmi des conditions tout à la fois d’affinité naturelle et d’imitation, la poésie lyrique, cette belle parure du théâtre d’Athènes et des fêtes d’Olympie, cette voix antique de la religion et de la patrie, n’eut qu’un seul interprète, plus ingénieux que grand, plus ami du plaisir que de la vertu, de la fortune que de la gloire.

1111. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Elle veut pour sujets de ses enseignements des rois, des personnages historiques, des fortunes éclatantes, de grands exemples. […] Gonzague, des utiles talents de le Tellier, et de cette fortune qui ressemble un peu au légitime avancement d’un fonctionnaire exact et capable. […] A la fin, pressé par les prélats, il céda, soit triomphe de la vérité chrétienne, soit effet d’un changement de fortune qui l’avait rendu ou indifférent ou plus facile sur des choses de pure spéculation. […] Le fond n’avait pas changé ; l’abbé de Fénelon n’était pas moins déclaré pour le pur amour que l’archevêque de Cambrai : c’était la même opiniâtreté dans l’attachement au sens propre : mais, tant qu’il avait eu à ménager sa fortune à venir, cette opiniâtreté s’était dissimulée à son insu, tantôt sous d’humbles doutes, tantôt sous la promesse sincère de se rendre aux premières raisons évidentes.

1112. (1923) L’art du théâtre pp. 5-212

On cite le cas de chefs-d’œuvre qui, momentanément, pour des raisons particulières, ont échoué du vivant de l’auteur, bien qu’ils fussent d’accord avec leur temps sur les principes essentiels ; leur fortune sur le théâtre n’a été qu’un peu différée. […] Il poursuivra sa carrière avec des fortunes diverses, sans grand éclat — Beaumarchais est une exception. […] Ce fut la Farce du Pendu Dépendu qui développait un miracle de la Légende Dorée ; il essuya les plâtres d’un théâtre régulier récemment fondé à Montmartre, en face d’un public auquel il n’était en rien destiné, puis s’épanouit dans son vrai milieu avec une fortune inattendue. […] D’autres théâtres « à côté », à la suite de la Petite Scène qui poursuivait sa carrière, forçaient bientôt l’attention : le Rideau de Paris, le Rideau gris (de Marseille), la compagnie de fortune recrutée par Jean-Louis Barrault pour monter Numance de Cervantès et enfin le Théâtre des Quatre Saisons qui passe l’hiver à New-York et où le peintre André Barsacq, ancien collaborateur de Dullin et de la Compagnie des Quinze, donne actuellement sa mesure.

1113. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

On ne vit jamais au monde un homme plus simple, moins ébloui de sa fortune. […] On sait comment la mort d’Alexandre VI ruina la fortune de César et comment, trahi par Gonzalve de Cordoue, le duc des Romagnes dut renoncer à tous droits sur les États qu’il avait conquis. […] Il sut rassembler les meilleures troupes de l’Italie ; et toutes ces circonstances, jointes à une fortune insolente, font de lui un victorieux et un formidable. » Nul doute que César Borgia n’ait été un des plus habiles hommes de son temps. […] Elle était Grecque, mais elle était reine ; reine et, par là, hors de la mesure et de l’harmonie, hors de cette fortune médiocre qui fut toujours dans les vœux des Grecs et qui n’entra dans ceux des poètes latins que littérairement et par servile imitation. […] Mais de tous les hommes qui durent leur fortune à l’amour, Julien est peut-être celui qui prit le moins de soin de plaire aux femmes.

1114. (1910) Études littéraires : dix-huitième siècle

Nous voici sur le Chemin de Fortune. Deux gentilshommes se rencontrent non loin du palais de Fortune. […] J’ai soupçon que l’assurance de l’homme doué de la puissance naturelle qui fait la fortune de M.  […] Ce n’est pas un monument à élever ; c’est une fortune littéraire à faire. […] On dirait qu’il y a couru quelque danger pour sa vie, sa fortune ou sa popularité.

1115. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

tombent sur moi tous les fléaux de la fortune et de la nature pour me rendre un remède si doux !  […] … Je suis livré à moi-même, soumis à ma pesante fortune et je n’ai personne sur qui m’appuyer : Que l’indépendance est bonne !  […] L’auteur avait été préparé à écrire dans ce genre par les difficultés et les chagrins d’une vie dont les débuts n’annonçaient guère la haute fortune qui la devait couronner. […] Dans le même temps, il perd ses parents, sa femme, sa santé et sa fortune, et se voit réduit à chercher des moyens de vivre dans un travail qui lui répugne. […] Le renversement subit de sa fortune lui fait, d’ailleurs, une loi de l’activité.

1116. (1892) Essais sur la littérature contemporaine

Mais ce que j’en retiens comme absolument vrai, c’est que, sans la critique, le naturalisme n’aurait jamais fait la fortune qu’on lui a vu faire. […] Aussi, combien de fois, à ses débuts, quand il n’était l’auteur encore que de la Fortune des Rougon ou de la Conquête de Plassans, ne s’est-il pas plaint que M.  […] Il était, à la vérité, peu favorisé du côté de la fortune, et il s’en est plaint amèrement dans son Journal, — plus amèrement qu’on ne le voudrait. « Naître sans fortune est le plus grand des maux » ; et encore : « Mon père resta seul avec peu de fortune : malheur dont rien ne tire quand on est honnête homme !  […] Mais lui, tout ce qu’il a fait, en n’en développant que les côtés les plus vulgaires, ç’a été bien plutôt d’en compromettre, et non pas d’en aider la fortune.

1117. (1825) Racine et Shaskpeare, n° II pp. -103

c’est bien vrai. » L’avocat reprend : « Comprenez donc que des phrases académiques sont officielles et partant faites pour tromper quelqu’un ; donc il y a inconvenance à les lire en petit comité, et surtout entre gens de fortunes égales. » Ah ! […] Beaucoup d’hommes élevés dans un respect religieux pour d’antiques doctrines s’effraient des progrès de la secte naissante, et semblent demander qu’on les rassure…… Le danger n’est pas grand encore, et l’on pourrait craindre de l’augmenter en y attachant trop d’importance…… Mais faut-il donc attendre que la secte, entraînée elle-même au-delà du but où elle tend, en vienne jusque-là qu’elle pervertisse par d’illégitimes succès cette masse flottante d’opinions dont toujours la fortune dispose35. » Trouvera-t-on de l’inconvenance à voir un homme obscur examiner un peu quels ont été les succès légitimes ou non de la masse flottante qui compose la majorité de cette Académie ? […] On voit Napoléon impatient du repos et songeant à la France : « La fortune me servit au retour d’Égypte sur cette même mer qui entoure ma patrie ; m’aurait-elle abandonné ? 

1118. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier »

L’arrivée de Fouché comme gouverneur semblait devoir donner à sa fortune une face nouvelle ; la place de secrétaire-général de l’intendance d’Illyrie lui fut proposée ; il négligea ces avantages, et l’occasion rapide ne revint pas. […] Il avait tâché de renoncer, dès 1820, à la politique si effervescente ; son insouciance pour sa fortune personnelle n’avait pas changé.

1119. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre I. De l’action »

Il épuisa sa force à former un malheur Pour mieux se mesurer avecque leur valeur ; Et, comme il vit en eux des âmes non communes, Hors de l’ordre commun il leur fit des fortunes. […] « Notre triste destinée en voulant ainsi, et les dieux irrités contre nous à cause de nos fautes nous ayant abandonnés, la fortune alors vous fut si favorable que les superbes capitaines de Rome se rendirent maîtres de notre Germanie à force d’armes. » (Le maladroit imite les périodes cicéroniennes.)

1120. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

Partout il jette des regards si perçants qu’il découvre toujours une retraite assurée où il puisse, quelque injure que lui fasse la fortune, se tranquilliser. » « Toutes ses productions sont parfaites en leur genre, non seulement celles qui sont animées, mais même celles qui sont faites pour tenir à la terre par leurs racines. […] « Mes concitoyens m’excuseront donc, ou plutôt me sauront quelque gré si, lorsque la république a été à la merci d’un seul, je ne me suis ni caché, ni enfui, ni découragé, ni conduit en homme vainement irrité contre le pouvoir ou les circonstances ; si enfin je ne me suis montré ni flatteur ni adulateur de la fortune d’un autre, jusqu’au point d’avoir honte de la mienne.

1121. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVI. La littérature et l’éducation publique. Les académies, les cénacles. » pp. 407-442

Au moyen âge, quantité de villes en possédaient une ; Toulouse avait déjà « ses jeux floraux », dont Ronsard et Victor Hugo n’ont point dédaigné de cueillir les fleurs symboliques ; Clermont, Rouen avaient leurs « puys » et le grand Corneille, avant de tenter fortune à Paris, brigua les couronnes de sa cité natale. […] La mode et les engouements qu’elle suscite, la contagion de l’exemple, le désir d’associer sa fortune à celle d’écrivains déjà connus déterminent beaucoup de débutants à professer des théories contraires à leur propre talent et partant à composer des œuvres forcément médiocres.

1122. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 mai 1885. »

Les deux maîtres étaient partis d’une situation égale : tous deux placés, sans fortune personnelle, dans un monde où les choses utiles, seules, sont payées, où les choses belles doivent, pour être récompensées, flatter les goûts extérieurs ; où les choses sublimes demeurent, nécessairement, sans rémunération. […] Le Guide Musical(6 et 23 avril) : amusante polémique avec Le Ménestrel, touchant le « succès », et « les recettes » des Maîtres Chanteurs ; d’elle ressort que les Mai tres Chanteurs ont obtenu la meilleure fortune, à Bruxelles.

1123. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

Les coups de fortune, les travestissements, les révélations subites, les secrets de famille, les ténébreuses intrigues, d’acharnées et gratuites inimitiés, déterminent sans cesse le cours de l’action, sans que la suite même de ces incidents parvienne à s’ordonner logiquement. […] La fortune de sa famille se rétablit en partie ; Dickens put, comme il le désirait ardemment, aller à une école passable ; il entra chez un avoué ; ayant appris la sténographie, il devint reporter judiciaire puis parlementaire de divers journaux ; il publia dans l’un d’eux des sortes de chroniques qui plurent et qui ont été réimprimées sous le titre d’Esquises par Boz.

1124. (1840) Kant et sa philosophie. Revue des Deux Mondes

La philosophie suit la même fortune, puisque la philosophie n’est tantôt que la base secrète, et tantôt le faîte de ces trois grands développemens de l’esprit, et leur expression la plus pure et la plus élevée. […] La philosophie du protestantisme suivit sa fortune.

1125. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

Dans Le Pressoir, cette jolie comédie-idylle de Mme Sand, un paysan dit d’une jeune fille sans fortune dont il ne veut pas pour son fils : « J’avoue qu’elle est charmante et très douce. » Ce dernier mot, dit d’une certaine façon villageoise, fait un gracieux effet : et pourtant c’est un peu cherché et calculé en fait de naturel : celui de l’abbé Prévost coulait de source.

1126. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — III. (Fin.) » pp. 162-179

Lui et ses collègues, au nom de la France, conclurent en janvier 1608 un traité de ligue et d’alliance défensive avec les États-Généraux des Provinces-Unies, traité qui avait cet avantage de ne pas faire dépendre la fortune de la république de la paix dont on allait discuter les conditions, de la mettre à même de s’en passer ou de n’y adhérer qu’à bon escient.

1127. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — I » pp. 1-17

Fontenelle y explique, de cette manière distinguée et fine qui est la sienne, les sources de la fortune de Dangeau, sa bonne mine, son attention à plaire, son art et son savoir-faire au jeu sans jamais déroger à la probité.

1128. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Eugénie de Guérin, Reliquiae, publié par Jules Barbey d’Aurevilly et G.-S. Trébutien, Caen, imprimerie de Hardel, 1855, 1 vol. in-18, imprimé à petit nombre ; ne se vend pas. » pp. 331-247

C’est d’une dernière branche de cette noble race, déchue en fortune, mais restée intègre par les sentiments, que naquit Maurice de Guérin au château du Cayla près d’Alby, le 4 août 1810, le dernier de quatre enfants.

1129. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Guillaume Favre de Genève ou l’étude pour l’étude » pp. 231-248

» Pour Guillaume Favre le bonheur n’était point si court qu’un brûlant été, ni si passager qu’un jour d’orage ; il sut le fixer autant qu’on le peut ici-bas, et il se serait plu sans nul doute à répéter et à s’appliquer à lui-même, s’il l’avait connue, cette page riante et modérée que je lisais dernièrement dans le journal familier d’un homme de son âge, et qui y est inscrite sous ce titre assez naïf, Le Paradis sur terre 42 : En faisant ce matin, de bonne heure, une promenade agréable et par le temps le plus délicieux, respirant l’air le plus pur et admirant la tranquille et paisible gaieté du paysage, je me disais : Un homme de Moyen Âge, jouissant d’une bonne santé et d’une fortune un peu au-dessus de ses besoins stricts, et par là dans une situation sociale indépendante, pouvant se donner le séjour de la campagne en été, celui d’une grande ville en hiver, ayant quelque goût pour la littérature et les beaux-arts, usant de tous ces avantages qui peuvent cependant se trouver réunis assez facilement, et les appréciant avec un peu de philosophie, ne pourrait-il pas dire qu’il serait ingrat de penser avec le sage Salomon : Vanité des vanités, tout n’est que vanité ?

1130. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — I » pp. 107-125

Il parle une fois très sensément contre l’astrologie judiciaire ; il paraît avoir une conception assez juste et assez saine du système du monde ; il démontre par des considérations physiques et naturelles la chimère qu’il y a à prétendre tirer des horoscopes sur la fortune des hommes ; et l’instant d’après, parlant d’un voyage en mer que fait devant Dieppe la princesse Marie et d’un vent violent qui, se levant tout d’un coup, aurait pu la mettre en danger : « Cela me fit souvenir, dit-il, d’un songe que j’avais eu la nuit précédente pour un certain débordement d’eaux que je m’étais imaginé, comme il arrive assez souvent. » Il ne croyait pas à l’astrologie, et il a l’air de croire aux songes.

1131. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance diplomatique du comte Joseph de Maistre, recueillie et publiée par M. Albert Blanc » pp. 67-83

— Sur l’incendie de Moscou : Il faut l’avouer : ces flammes ont brûlé la fortune de Napoléon.

1132. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française à l’étranger pendant le xviiie  siècle, par M. A. Sayous » pp. 130-145

Qu’un certain docteur, Justin Martyr, par exemple, ait dit une chose sans y avoir pensé, elle n’en vaut pas moins pour cela, et il ne faut pas désespérer qu’elle fasse fortune.

1133. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir a l’histoire de mon temps. Par M. Guizot »

Les intérêts, c’est-à-dire les finances, l’industrie, les branches diverses de la fortune publique, leurs rapports, leur jeu mobile, leurs crises, le mécanisme et le thermomètre du crédit, les signes et pronostics qui en résultent à chaque instant, il les sait peu, il ne les sait guère plus que M. 

1134. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Essais de politique et de littérature. Par M. Prevost-Paradol. »

Qu’on ne se figure pas que le talent seul et l’esprit suffisaient ; il fallait autre chose encore ; il fallait une certaine fortune, une certaine position, des alliances dans le monde.

1135. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Halévy, secrétaire perpétuel. »

Mais l’Éloge de Simart, le dernier de ceux qu’Halévy a eu à prononcer, est des meilleurs ; j’y noterais à peine un ou deux endroits pour le trop de mise en scène ou la fausse élégance de l’expression ; l’analyse des travaux de l’artiste y occupe une juste place, et toute cette partie est traitée avec bien du sérieux, et cependant avec animation et vie : « Simart, au reste, ne courait pas après la popularité ; il l’attendait, non comme l’homme de la fable attendait la Fortune, mais debout et laborieux.

1136. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poème des champs, par M. Calemard de Lafayette (suite et fin) »

Calemard de Lafayette était, il y a une quinzaine d’années, un jeune littérateur de Paris ; il s’occupait de poésie et de critique ; il était du groupe de l’Artiste et en train de se faire un nom, tout en se livrant à ses goûts préférés, lorsque, vers ce temps, des circonstances de famille et de fortune l’enlevèrent à la vie parisienne : il avait le bonheur et l’embarras d’être propriétaire foncier ; il se retira dans ses terres aux environs du Puy, dans la Haute-Loire, et se mit à les exploiter lui-même ; il prit goût à l’agriculture, à l’amélioration du sol et des colons ; l’amour de la poésie l’y suivit, et il combina ces deux amours, celui des champs et celui des vers : il en est résulté le poème dont j’ai à parler et qui a paru il y a quelques mois.

1137. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « M. de Pontmartin. Les Jeudis de Madame Charbonneau » pp. 35-55

M. de Pontmartin nous a assez étalé son état de fortune pour que nous sachions qu’il ne pouvait faillir par les mêmes raisons que le pauvre Mürger, s’il est vrai pourtant que l’aimable Mürger ait eu les torts qu’il lui reproche.

1138. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Etienne-Jean Delécluze »

Delécluze (car je ne puis jouer si longtemps), quitta la pension en 1793, avant d’avoir pu achever ses études : son père, architecte fort occupé, avait de la fortune et possédait une jolie habitation à Meudon.

1139. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Les menaces, les imprécations le poursuivent ; mais toujours revêtu de l’inviolable étole, s’en servant comme d’un bouclier, bravant les traits qu’on n’ose lui lancer que de loin et en tremblant, il arrive à l’une des portes principales, parvient à l’ouvrir par un tour de main digne de Samson, et, à la vue de tous, sort sans trop se presser, majestueux et triomphant, emportant avec lui la fortune de Carthage.

1140. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Daphnis et Chloé. Traduction d’Amyot et de courier »

Goethe y voit encore et surtout le paysage, la beauté des lignes environnantes, les contours : j’y vois pourtant d’autres choses moins belles ; j’ai Gnathon qui me dégoûte ; j’ai surtout ces parents qui remplissent le quatrième livre tout entier, ces parents honorables, réputés honnêtes gens dans leur cité, qui ont cependant exposé leurs enfants de gaîté de cœur, les uns parce qu’ils en avaient déjà assez (ils en conviennent) et qu’ils estimaient leur famille assez nombreuse, un autre parce que, disait-il, il était alors sans fortune ; ils les ont exposés, celui-ci comptant sur un passant plus humain que lui, les autres n’y comptant même pas ; ces infanticides qui, s’ils ne sont plus à la carthaginoise et sanglants, sont anodins et à la grecque, m’indignent, m’affligent du moins, m’avertissent que j’ai affaire, malgré toutes les Nymphes et toutes les Grâces, à un niveau de civilisation inférieure et dure.

1141. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

L’ancien Raoul, le mystérieux personnage d’il y a dix ans, le dessinateur de la Roche-Fée, que Sibylle n’avait jamais oublié, qu’elle retrouve après des voyages, noble, riche, maître de sa fortune, et qu’elle se met sérieusement à aimer, est fort lié avec un savant, Gandrax, au nom revêche, et dont M. 

1142. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite.) »

Don Quichotte a eu le sort du petit nombre de ces livres privilégiés qui, par une singulière fortune, par un accord et un tempérament unique de la réalité individuelle et de la vérité générale, sont devenus le patrimoine du genre humain.

1143. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre. »

L’idée du bruit, de la publicité, de la gloriole, ne venait jamais tenter ces serviteurs méritants et obscurs du roi ou de l’État (c’était tout un) ; ils touchaient du doigt le nœud des questions pendantes, le ressort des plus grands événements et des fortunes souveraines ; ils avaient à leur disposition des trésors de documents, les sources de l’histoire ; ils les gardaient avec religion.

1144. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

Hors de là il est terre à terre : il broche et publie ses feuilles moins pour dire la vérité qui le possède et l’enflamme, moins pour satisfaire à une passion de bon sens et de raison, que pour s’en faire un moyen de subsistance ou de fortune.

1145. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

On lit dans son Journal à cette date : « Le poëte sans fortune est le plus malheureux des hommes : la courtisane ne livre que son corps, libre de garder au fond du cœur les sentiments qui lui restent ; l’autre, au contraire, doit, pour vivre, livrer ses soupirs, ses émotions, les pensées qui lui sont chères, et jusqu’aux plus secrètes profondeurs de son âme, et cela à un public libre de noircir le tout de la plus injurieuse critique ou du mépris le plus insultant. » — C’est le Journal d’où sont tirées ces paroles si senties, qu’il serait curieux de connaître : on nous le doit.

1146. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite et fin.) »

Si j’ai défini le patois du Midi, « une langue qui a eu des malheurs », je me contenterai de définir le patois de Franche-Comté, « une langue qui est restée à l’état rustique et qui n’a pas fait fortune. » Ce serait le juste complément de la définition.

1147. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [I] »

En 1801, après la paix de Lunéville, Jomini donna sa démission de sa place au ministère helvétique et revint à Paris tenter la fortune.

1148. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « APPENDICE. — CASIMIR DELAVIGNE, page 192. » pp. 470-486

Qu’on se rappelle, dans le quatrième acte, le moment décisif entre Mortins et Édouard : faut-il jouer le tout pour le tout, et, sur l’espérance d’un avenir peut-être chimérique, sacrifier le présent, l’ordre établi, tant de fortunes et d’existences ?

1149. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre X. De la littérature italienne et espagnole » pp. 228-255

Les hommes de lettres d’Italie, pour retrouver les manuscrits antiques qui devaient leur servir de guides, ayant besoin de la fortune et de l’approbation des princes, étaient plus éloignés que dans tout autre pays du genre d’indépendance nécessaire à cette philosophie.

1150. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre premier. De l’amour de la gloire »

Si les revers de la fortune désenchantent l’enthousiasme, que sera-ce, s’il s’y mêle des torts qui, cependant, se trouvent souvent réunis aux qualités les plus éminentes ?

1151. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Fils peu tendre, vieux garçon, citoyen désintéressé de la fortune publique, enfin parfaitement égoïste, il n’a pas l’excitation qui vient du cœur.

1152. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre IV. L’heure présente (1874) — Chapitre unique. La littérature qui se fait »

Jules Lemaître960 a eu la même fortune que Renan : il a passé par le séminaire ; et puis, il a traversé l’École Normale.

1153. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

« La langue d’Amphitryon est la plus souple, la plus épanouie, la plus polie, la plus savoureuse, la plus riante, la plus pure qu’on ait écrite. » Quand il nous parle de Labiche, il n’y a plus que Labiche et son rire épique ; et quand il nous parle d’Octave Feuillet, il n’y a plus qu’Octave Feuillet et son délicieux romanesque, consolateur de l’homme dont le cœur est supérieur à sa fortune.

1154. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Alphonse Daudet  »

La fortune littéraire de M. 

1155. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les deux Tartuffe. » pp. 338-363

Onuphre n’est pas dévot, mais il veut être cru tel… Aussi ne se joue-t-il pas à la ligne directe, et il ne s’insinue jamais dans une famille où se trouvent tout à la fois une fille à pourvoir et un fils à établir ; il y a là des droits trop forts et trop inviolables : on ne les traverse pas sans faire de l’éclat, et il l’appréhende… Il en veut à la ligne collatérale : on l’attaque plus impunément ; il est la terreur des cousins et des cousines, du neveu et de la nièce, le flatteur et l’ami déclaré de tous les oncles qui ont fait fortune… Etc., etc… » Oh !

1156. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IX. Inquiets et mystiques » pp. 111-135

Il constate un souffle de socialisme emportant jusque ceux-là même que la fortune a favorisés.

1157. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre onzième. »

Il est telles de nos pensées que nous traitons comme nos biens de fortune ; nous les changeons dès que leur forme nous lasse, nous leur imposons nos caprices.

1158. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Légendes françaises. Rabelais par M. Eugène Noël. (1850.) » pp. 1-18

Dolet y fait parler un pendu qui avait eu l’honneur, après son exécution, d’être disséqué dans l’amphithéâtre public de Lyon par Rabelais en personne, ou qui du moins lui avait fourni le sujet d’une belle leçon d’anatomie : En vain la Fortune ennemie a voulu me couvrir d’outrages et d’opprobre, disait le pendu dans les vers de Dolet ; il était écrit qu’il en serait autrement.

1159. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Les Gaietés champêtres, par M. Jules Janin. » pp. 23-39

Prenez ce feuilleton du 6 octobre au bas de la cinquième colonne, coupez-le au bas de la neuvième, et vous avez votre chapitre tout fait qui s’intitule : « Mademoiselle Déjazet en 1851 », au moment où la Fortune dit à cette chose légère, comme elle a dit, un jour ou l’autre, à tous les vainqueurs, à toutes les reines, à toutes les bergères : C’est assez.

1160. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame la duchesse d’Angoulême. » pp. 85-102

Sortie de France, à Vienne, puis à Mittau où on la marie à son cousin, partout, dans les exils divers où la ballotta la fortune, elle est la même : la vie du Temple est là comme dans le fond de son oratoire, pour dominer chacune de ses journées et lui en dicter l’emploi.

1161. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame, duchesse d’Orléans. (D’après les Mémoires de Cosnac.) » pp. 305-321

Pour la perte de ma fortune, je n’y fus pas trop sensible ; je n’avais jamais pu me persuader que les espérances que l’on me donnait fussent solides, quoiqu’à juger par toutes les apparences, le succès en fût indubitable ; mais perdre une si grande, si parfaite, si bonne princesse, une princesse qui pouvait réparer le tort que ma chute m’avait fait ; non, si j’avais eu le cœur véritablement délicat et sensible, il m’en devait coûter la vie.

1162. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Ducis. » pp. 456-473

Quand mes cheveux étaient prêts à blanchir, la mienne, avec un sentiment de douce compassion, voyant mes distractions nombreuses, l’indépendance de mes goûts, mon incapacité absolue pour les affaires et la fortune, me disait (c’était son mot) : « Mon enfant !

1163. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

» L’abbé Barthélemy devait avoir, au fond du cœur, moins de facilité à bien augurer de l’avenir : c’est lui qui avait écrit dans une lettre de Callimédon à Anacharsis, en parlant des préjugés et des superstitions populaires : « Mon cher Anacharsis, quand on dit qu’un siècle est éclairé, cela signifie qu’on trouve plus de lumières dans certaines villes que dans d’autres, et que, dans les premières, la principale classe des citoyens est plus instruite qu’elle ne l’était autrefois. » Quant à la multitude, sans excepter, disait-il, celle d’Athènes, il la croyait peu corrigible et peu perfectible, et il ajoutait avec découragement : « N’en doutez pas, les hommes ont deux passions favorites que la philosophie ne détruira jamais : celle de l’erreur et celle de l’esclavage. » Tout en pensant ainsi, il n’avait nulle misanthropie d’ailleurs, et n’était point porté à se noircir la nature humaine : « En général, disait-il, les hommes ont moins de méchanceté que de faiblesse et d’inconstance. » Les événements de la Révolution vinrent coup sur coup contrister son cœur, et détruire l’édifice si bien assis de sa fortune.

1164. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 24, des actions allegoriques et des personnages allegoriques par rapport à la peinture » pp. 183-212

Depuis long-tems ils ont fait fortune.

1165. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Seconde partie. Nouvelles preuves que la société a été imposée à l’homme » pp. 243-267

Il fait beau déclamer contre les conquérants qui se jouent de la vie des hommes, et contre ces marchands avides qui vont tenter la fortune dans mille climats divers.

1166. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre V. Mme George Sand jugée par elle-même »

Comme Alexandre Dumas, cet autre conteur facile, elle a toujours eu l’affreuse fortune de plaire à tous les publics !

1167. (1900) Le lecteur de romans pp. 141-164

Il se nomme Jacques et il est amoureux ; il se nomme Albert et il pleure sur l’abandon de sa meilleure amie ; il se nomme Dominique et des embarras de fortune lui rendent difficile la résignation nécessaire à la vieillesse qui s’annonce.

1168. (1887) La banqueroute du naturalisme

Zola, — dont je ne connais, pour moi, que le premier roman : La Fortune des Rougon, où il y ait quelque ombre de naturalisme, — enfermait soigneusement ses règles sous six clés, comme l’autre, quand il ajoutait un nouveau tome à l’histoire de ses Rougon-Macquart.

1169. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre V : M. Cousin historien et biographe »

Mais quand à Mme de Longueville ou à Mlle de La Vallière on ose comparer Mme de Maintenon avec les calculs sans fin de sa prudence mondaine et les scrupules tardifs d’une piété qui vient toujours à l’appui de sa fortune, nous protestons de toute la puissance de notre âme.

1170. (1916) Les idées et les hommes. Troisième série pp. 1-315

Et, s’il avoue ses bonnes fortunes de polisson par la campagne, qui sait ? […] Déceptions et aubaines occuperont sa vie ; la bonne et la mauvaise fortune, péripéties quotidiennes, il les supportera de son mieux, et assez mal généralement, avec trop de chagrin, trop d’allégresse. […] Il ne conteste pas que cet « homme illustre » ait bien agi en maintes circonstances et, de sa fortune et de ses talents, secondé des malheureux : orgueil ? […] Il est, à leur sujet, d’accord avec toute une jeunesse que les « lumières » nouvelles ont éblouie, avec son ami le chevalier de Pange, élégant ennemi de ces privilégiés « pour qui la nature n’a pas autant de partialité que la fortune ». […] bien, si Lucile épousait Christophe Ongrand, les deux domaines, réunis et exploités avec un soin pareil, seraient une fortune : et les parents de Lucile n’auraient plus à craindre la pauvreté, qui les guette, ne nous le dissimulons pas.

1171. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

L’intégrité de son caractère se manifestait par un absolu dédain de toutes les distinctions officielles, comme de la fortune, comme du succès littéraire. […] Un intime sentiment de leur droit atavique les éclairait d’instinct sur la ligne à suivre pour que le pays jouât en Europe un rôle digne de son histoire, en même temps que le souci de l’intérêt national intimement lié à celui de la dynastie les incitait à gérer de leur mieux la fortune commune. […] Quand en 1826 il proposa, sans grand enthousiasme d’ailleurs, une loi qui assurait la constitution de solides patrimoines en rendant facultatif le legs de la fortune familiale à l’aîné des enfants, il rencontra une résistance qu’il dut renoncer à vaincre. […] On en reconnaît la cause si l’on se rappelle que la fortune des classes comblées de cette époque était surtout terrienne. […] Pour ne parler que de nos compatriotes, presque tous les Français qui l’avaient approché rapportaient de cette rencontre l’idée d’un homme de premier ordre, égal à sa fortune.

1172. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 3665-7857

La fortune des personnages intéressés dans l’intrigue, est durant le cours de l’action comme un vaisseau battu par la tempête : ou le vaisseau fait naufrage ou il arrive au port : voilà le dénouement. Aristote divise les fables en simples, qui finissent sans reconnoissance & sans péripétie ou changement de fortune ; & en implexes, qui ont la péripétie ou la reconnoissance, ou toutes les deux. […] Combien d’auteurs célebres doivent leur fortune à d’obscurs écrivains qu’ils n’ont jamais daigné nommer ? […] La fortune, la mort, le tems, tout cela est reçû. […] On adoroit la fortune dans son favori ; il est disgracié, on le méprise : mais ce retour n’est que pour le peuple ; aux yeux de celui qui voit les hommes en eux-mêmes, la prospérité ne prouve rien, l’adversité n’a rien à détruire.

1173. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

Zola lui répondit mélancoliquement : « Vous, vous avez une petite fortune qui vous a permis de vous affranchir de beaucoup de choses… Moi, j’ai été obligé de passer par toutes sortes d’écritures, oui d’écritures méprisables… Eh, mon Dieu ! […] Jacques de Liniers, né à Niort le 25 juillet 1753, cadet de famille, avait quitté de bonne heure son pays pour chercher fortune à travers le monde. […] « Dans vingt ans d’ici, disait-il à la jeunesse française, dans la préface du Disciple, vous aurez en main la fortune de cette vieille patrie, notre mère commune. […] » Il est vrai qu’il ajoutait aussitôt : « Un récit de voyage peut être une œuvre d’utilité publique, s’il peut inspirer aux jeunes gens de loisir et de fortune le goût des pérégrinations lointaines. […] La liste de ses bonnes fortunes, après tout, n’a rien de particulièrement glorieux.

1174. (1898) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Troisième série

Ce travail de l’imagination sur l’amour, c’est ce que Stendhal, d’un mot qui a fait fortune, appelle la cristallisation. […] Nées d’une égalité relative dans les fortunes, elles maintiennent et augmentent cette égalité, qui leur plaît, par tous les moyens qui sont en leurs pouvoirs : l’impôt progressif, c’est-à-dire l’impôt sur les riches, les entraves au droit de tester, les droits de l’épouse sur sa fortune patrimoniale, les droits des enfants sur leur fortune à venir sont parmi les principes qui sont chers aux démocraties. […] Les acquéreurs de ce droit étaient devenus une classe, à peu près héréditaire, très indépendante par sa fortune, possédant hérédité, traditions, perpétuité, esprit de corps : bref, une aristocratie. […] La seule manière que les hommes aient de se distinguer les uns des autres dans les sociétés modernes, c’est la fortune. […] Elle est très peu héréditaire, les fortunes ne s’augmentant, et même ne se conservant, que par le travail, et toutes choses, bravoure militaire, mœurs traditionnelles, dignité et austérité magistrales, étant plus facilement héréditaires que le travail continu ; les fortunes, par conséquent, se faisant et se défaisant avec une extrême facilité d’une génération à l’autre.

1175. (1903) Hommes et idées du XIXe siècle

En 1808, l’Empereur sent que sa fortune chancelle ; les événements d’Espagne ont soulevé une réprobation unanime ; en France même on admire le courage des Espagnols ; la capitulation de Dupont à Baylen, celle de Junot à Cintra portent au prestige de l’Empereur un coup fatal. […] Car il se peut bien qu’il y ait toujours dans la destinée de chacun de nous beaucoup d’inexpliqué et que l’imprévu y joue son rôle ; cependant, nous restons convaincus que nous en sommes en partie les maîtres et qu’il y a un lien entre nos sentiments, nos actes et notre fortune. […] Le roman historique avait eu chez nous une vogue considérable, tout en y faisant une médiocre fortune littéraire ; nous n’avons rien de comparable à l’œuvre de Walter Scott, et nos meilleurs livres en ce genre ne sont pas excellents. […] Lafargue, ont reçu une bonne éducation, mais que l’absence de fortune oblige au travail et met en lutte avec les vrais besoins. […] Il est entouré de tout ce qui rend la vie plus agréable et plus facile : fortune, élégance, distinction de la naissance et du rang.

1176. (1913) Les livres du Temps. Première série pp. -406

On y retrouve la finesse la souplesse et la grâce qui ont fait la brillante fortune de ses précédents ouvrages du même genre. […] La masse des hommes est faible, mobile parce qu’elle est faible, cherche fortune où elle peut, fait son bien sans vouloir le mal d’autrui, et mérite plus de compassion que de haine. […] Certes elles ont rendu à la civilisation des services considérables, qui justifient largement leur fortune, au moins à l’origine. […] Pour satisfaire une coûteuse fantaisie, il s’adresse naturellement à sa mère, qui possède une grosse fortune en propre. […] C’est un des grands mystères de ma grâce, dit Dieu, que cette part de fortune, de chance, de gratuité.

1177. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

Rivarol disait de lui : « Il fait un sort à chaque vers, et il néglige la fortune du poème !  […] Une lettre écrite par lui en France sur son voyage était à l’instant un événement de société ; un bon mot qu’il avait dit sur des pirates fit fortune.

1178. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Théocrite »

On voit qu’à un certain moment, revenu en Sicile, il songea pour sa fortune à se tourner vers Hiéron de Syracuse. […] Oui, bien souvent, comme il le dit, ses Grâces, qu’il envoyait dès l’aurore tenter fortune le long des portiques, s’en revinrent à lui le soir nu-pieds, l’indignation dans le cœur, lui reprochant d’avoir fait une route inutile, et elles s’assirent sur le fond du coffre vide, laissant tomber leur tête entre leurs genoux glacés : « A quoi bon ces chanteurs ?

1179. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre II. La vie de salon. »

» on reçoit d’elle, comme M. de Talleyrand, le brevet de parfait savoir-vivre qui est le commencement d’une renommée et la promesse d’une fortune. — Sous une telle « institutrice », il est clair que le maintien, le geste, le langage, toute action ou omission de la vie mondaine devient, comme un tableau ou un poème, une œuvre d’art véritable, c’est-à-dire infinie en délicatesses, à la fois aisée et savante, si harmonieuse dans tous ses détails que la perfection y cache la difficulté. […] Un parlementaire, comme un seigneur, doit se faire honneur de sa fortune ; voyez dans les lettres du président de Brosses la société de Dijon ; elle fait penser à l’abbaye de Thélème ; puis mettez en regard la même ville aujourd’hui279.

1180. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

Il se lia d’une amitié étroite avec Jacques Colonna, de la grande famille romaine de ce nom ; cette amitié, fondée sur un goût commun et passionné pour les lettres antiques et pour la vertu, fut pour lui une consolation et une fortune. […] Ô fortune !

1181. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (1re partie) » pp. 397-476

Ce premier grand tableau, sur lequel Léopold Robert fondait en idée sa fortune d’artiste et l’espérance de sa renommée, lui était commandé par un de ses opulents compatriotes de Neuchâtel. […] Le poète glissa, sans s’en apercevoir, de l’admiration et de la reconnaissance dans la passion ; il n’y perdit pas la vie comme Léopold Robert, mais il y perdit sa fortune, sa liberté et sa raison.

1182. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIIe entretien. Littérature politique. Machiavel (2e partie) » pp. 321-414

Je l’ai connu intimement, et je n’ai rien vu d’humain en lui que la forme mortelle : c’était un de ces caractères où la vertu est si naturelle et si modeste qu’elle n’a besoin d’aucun effort et d’aucune ostentation pour se tenir debout dans toutes les fortunes. […] Les meilleurs soldats des ducs de Savoie sont toujours descendus de ces montagnes ; leur douceur les rendait disciplinaires ; leur subordination féodale les conservait dévoués à la bonne ou à la mauvaise fortune de leurs princes ; leur intrépidité froide les rendait solides comme le devoir au poste où on les avait placés pour vaincre ou mourir.

1183. (1860) Cours familier de littérature. X « LVe entretien. L’Arioste (1re partie) » pp. 5-80

Cet excellent homme adorait sa nièce, et surtout sa petite-nièce ; il gouvernait la fortune et servait tout à la fois de père spirituel et de père temporel à la maison. […] Sans doute la médiocrité de fortune d’Arioste fut l’obstacle qui s’opposa à leur union, car elle l’aimait et elle pressentait sa gloire.

1184. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXIXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (1re partie) » pp. 241-314

Je devais attendre de la fortune le retour des heures où le passé revivait et se représentait devant moi, où je jouissais d’une énergie intellectuelle assez grande, d’un bien-être physique assez complet pour élever mon âme à cette hauteur à laquelle il faut que je parvienne pour être digne de voir de nouveau reparaître en moi les idées et les sentiments de Goethe. — Car j’avais affaire à un héros que je ne devais pas abaisser. […] « On m’a toujours vanté comme un favori de la fortune ; je ne veux pas me plaindre et je ne dirai rien contre le cours de mon existence ; mais au fond elle n’a été que peine et travail, et je peux affirmer que, pendant mes soixante et quinze ans, je n’ai pas eu quatre semaines de vrai bien-être.

1185. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VII, seconde guerre médique. »

Quelques bateaux rompus pouvaient engloutir la fortune des Perses dans un détroit irritable. — Artabane terminait par ces graves paroles, que Némésis aurait pu mettre dans la bouche d’un de ses prophètes : « Vois comme la Divinité foudroie les êtres qui dominent les autres, et ne souffre pas qu’ils s’en fassent accroire, tant que les petits ne l’irritent point. […] C’était tenter terriblement la Fortune, mais c’était savoir aussi qu’elle aime les hardis qui lui font violence.

1186. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1864 » pp. 173-235

Il ne faut jamais dans le monde défendre un ami, c’est le moyen de faire achever un blessé… On jette bien vite une autre personne en pâture à la conversation. » 14 février Il y a de monstrueuses fortunes de la banque, où la femme fait quotidiennement la charité, du déjeuner à l’heure du Bois. […] En revenant à pied, il nous entretient spirituellement des choses et des gens de son temps, nous raconte la vente qu’il conclut, au prix de 600 francs, d’un roman du général Hugo, le père de Victor Hugo, qui s’appelait La Vierge du monastère… Il nous dit ensuite le brusque saut de fortune qu’il fit, presque du matin au soir, lors de son succès de la Villeliade, passant d’un déjeuner de trois sous, et d’une chambre qui n’avait de lumière que par la porte, à une richesse de près de 40 000 francs, à un appartement de 500 francs par mois, à une toilette en argent, achetée au Palais-Royal chez Barbichon Walter… Puis soudain, il nous exalte la beauté merveilleuse, la beauté divinement ingénue de la princesse Mathilde à quatorze ans, lorsqu’il la rencontra, pour la première fois, chevauchant en amazone, à Florence.

1187. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1872 » pp. 3-70

Le marié et la mariée se font pourctraire, et Ziem est à la tête de quarante francs, une somme qu’il croit si bien une fortune, qu’en arrivant à Lyon, il se fait conduire en voiture au théâtre où l’on joue Moïse. […] Il ne peut, n’est-ce pas, y être question de progrès, du mérite des femmes, des principes de 89, de toutes les Lapalissades qui font la fortune des gens sérieux.

1188. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Le Comte Léon Tolstoï »

Il décrit l’influence du séjour d’un beau cavalier dans le château des Bolkonsky sur la sœur recluse, laide et pure du prince André, ou l’émoi profond dans lequel la présence de cet homme à bonnes fortunes jette Natacha fiancée, mais délaissée et tendue à se briser dans l’impuissant désir de son fiancé absent ; le romancier marque la bizarre jouissance de Nicolas Rostow, ruiné au jeu, rentrant dans le salon de sa famille et entendant sa sœur chanter une note particulièrement claire ; toujours est révélée la merveilleuse faculté de l’âme humaine à se prêter aux formes que lui imposent les variations de son ambiance ; en de plus hautes conjonctures, c’est le prince André, dangereusement blessé à Austerlitz, et qui, tombant, distingue de son regard distrait des férocités humaines la profondeur de l’inaltérable ciel bleu, développant sa silencieuse voûte au-dessus du fracas fumeux de la canonnade dans la haute paix de l’infini ; c’est le prince Pierre résolu à assassiner. […] Comme Lévine, il a rencontré sur sa route un pauvre d’esprit dont les paroles ont retenti dans son cœur, comme une voix intérieure, et ce Slave dont l’âme violentée et repoussée par les durs dogmes de la science occidentale, demandait au monde plus de bonté qu’il n’en contient, cet aristocrate, cet homme de fortune, ce grand écrivain s’est retiré à la campagne, écrit des contes pour les moujiks, s’adonne à des travaux manuels, fait des souliers et raccommode des poêles, donne son bien en aumône, prêche la vie populaire, le refus du serment, le pardon des injures, l’union avec une seule femme, interdit le divorce, le service militaire, la violence, la résistance aux méchants, les injures et menace de fonder une nouvelle secte de gens scrupuleux et troublés dont il sera le patriarche, devenu aujourd’hui un grand vieillard de soixante ans, les cheveux longs rejetés en arrière du front creusé de profondes rides, au-dessus des yeux plus caves, mais fermes, inébranlablement fermes, les joues creuses autour du large nez et ployant sur de massives pommettes, la bouche droite, saillante et close, au milieu d’une longue barbe blanche tombant sur de larges épaules, l’air vénérable et sûr, de la certitude de ceux qui ont cru à jamais ; l’air noble et d’une joie austère, de la joie de ceux qui sont affermis dans leur foi.

1189. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

L’antiquité, la dignité survivent à la dégradation de sa fortune. […] Non ; le monde en a tant vu, et il connaît tellement les misérables ressorts par lesquels la fortune élève ou abaisse les conquérants d’ici-bas, qu’il ne s’étonne guère plus des vicissitudes des empires que de l’amoncellement et de l’écroulement d’une vague en écume sur le lit de l’Océan.

1190. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — II. (Fin.) » pp. 254-272

Mais l’empereur Joseph meurt (20 février 1790), son adoré Joseph II, comme il l’appelle, et avec lui la fortune du prince de Ligne s’arrête ; sa carrière se brise ou du moins se ferme.

1191. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — I. » pp. 80-97

À toutes ses questions le comte de Foix répond volontiers, et il promet à l’historien pour son ouvrage un crédit dans l’avenir et une fortune que nulle autre histoire ne lui disputera : « Et la raison en est, disait-il, beau Maître, que depuis cinquante ans en çà sont advenus plus de faits d’armes et de merveilles au monde qu’il n’en étoit de trois cents ans auparavant. » Encouragé par un tel suffrage, Froissart s’applique de plus en plus à mettre son langage au niveau des actions qu’il a à raconter ; car il n’a rien tant à cœur que d’étendre et rehausser sa matière, dit-il, et d’exemplier (enseigner par des exemples) les bons qui se désirent avancer par armes.

1192. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Cet homme, qui passera une grande partie de sa vie auprès des grands et à s’insinuer dans leur fortune, avait en lui un certain principe d’indépendance le plus contraire au métier de courtisan ; il n’aimait pas à être soumis ni à obéir : Je ne me soucie point de commander, disait-il, mais l’obéissance m’est insupportable. — Ce sentiment, ajoutait-il, est né avec moi ; je l’ai eu dès mon enfance, et à peine en étais-je sorti, que je secouai le joug de la domination paternelle aux dépens de tout ce qui m’en pouvait arriver ; et, pendant plusieurs années, je me réveillais la nuit avec un mouvement de joie que me donnait la pensée de ne plus dépendre de personne.

1193. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

Celui-ci aurait voulu que le jeune prince fît face à l’orage, qu’il demeurât à la tête de l’armée jusqu’à la fin de la campagne, qu’il cherchât à prendre quelque revanche sur la fortune ; il le lui disait non plus sur un ton de directeur spirituel et de précepteur, mais sur le ton d’homme d’honneur et de galant homme qui sent la générosité de conduite dans tous les sens : Quand un grand prince comme vous, Monseigneur, ne peut pas acquérir de la gloire par des succès éclatants, il faut au moins qu’il tâche d’en acquérir par sa fermeté, par son génie et par ses ressources dans les tristes événements.

1194. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Chateaubriand. Anniversaire du Génie du christianisme. » pp. 74-90

Voyez les fripons en place, la fortune allant au scélérat, l’honnête homme volé, assassiné, méprisé.

1195. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — II. (Fin.) » pp. 361-379

On avait parlé d’exclure de la nomination ceux qui tenaient des pensions du gouvernement ; il se crut obligé de déclarer à l’Assemblée qu’il tenait, des grâces et des pensions du gouvernement, la plus grande partie de sa fortune : Je ne crois pas que l’on pense à moi pour la députation, disait-il, mais je dois cet éclaircissement, qui m’en éloigne à jamais ; je crois même devoir prévenir mes collègues que dans le cas où, malgré cette motion et les motifs d’exclusion qu’elle établit, on me ferait l’honneur de me nommer, je me ferais un devoir de refuser.

1196. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — I. » pp. 409-426

Navez ces paroles tout empreintes d’affection amicale et d’esprit de famille : Il est vrai que tu as tout pour te trouver heureux d’être au monde : tu te trouves dans ta patrie, honoré et considéré pour ton talent brillant ; estimé, aimé par toutes les personnes qui te connaissent ; regardé par la Fortune de son œil le plus favorable ; heureux époux, heureux père.

1197. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Préface pour les Maximes de La Rochefoucauld, (Édition elzévirienne de P. Jannet) 1853. » pp. 404-421

Nous mettons un genou en terre devant celles qui n’ont jamais failli ; mais quand à Mlle de La Vallière ou à Mme de Longueville on ose comparer Mme de Maintenon, avec les calculs sans fin de sa prudence mondaine et les scrupules tardifs d’une piété qui vient toujours à l’appui de sa fortune, nous protestons de toute la puissance de notre âme.

1198. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — I » pp. 57-75

J’avais eu tellement l’air de l’épouser d’abord aux yeux de certaines personnes, que je sentais bien que je nuirais plus que je ne servirais à son retour de fortune en insistant.

1199. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — III » pp. 337-355

On dirait qu’il va triompher enfin de la fortune, qu’il en a raison à force de mérite, et qu’elle lui sourit.

1200. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « La princesse des Ursins. Ses Lettres inédites, recueillies et publiées par M. A Geffrot ; Essai sur sa vie et son caractère politique, par M. François Combes » pp. 260-278

Or, c’est précisément de cet éminent degré de condition et de fortune qu’elle va partir, à cet âge, pour désirer au-delà et pour concevoir de plus hautes espérances.

1201. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Journal d’Olivier Lefèvre d’Ormesson, publié par M. Chéruel » pp. 35-52

L’origine était peu de chose : un grand-père, né de quelque honnête marchand, de quelque commis au greffe, avait commencé la fortune, humblement, laborieusement ; il s’était élevé degrés par degrés, en passant par tous les bas et moyens emplois, en se faisant estimer partout, en se rendant utile, nécessaire, en sachant mettre à profit les occasions ; il avait à la fin percé, il était arrivé, déjà mûr, à quelque charge honorable et y avait assez vieilli pour confirmer son bon renom : il avait eu un fils, pareil à lui, mais qui, né tout porté, avait pu appliquer dès la jeunesse les mêmes qualités à des objets en vue et en estime, à des affaires publiques et d’État.

1202. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mémoires de Mme Elliot sur la Révolution française, traduits de l’anglais par M. le comte de Baillon » pp. 190-206

Je lui exprimai mes regrets qu’il ne fût pas resté en Angleterre lorsqu’il y était ; il me répondit qu’il l’aurait désiré, mais qu’on n’aurait pas voulu le lui permettre… Il m’assura qu’il avait toujours envié la vie d’un gentilhomme campagnard anglais, et que, pendant que ses ennemis l’accusaient d’avoir voulu se faire roi, il aurait volontiers échangé sa position et toute sa fortune contre une petite propriété en Angleterre, avec les privilèges de ce délicieux pays, qu’il espérait revoir encore… Je lui conseillai alors de s’arracher aux mains des misérables qui l’entouraient, et de ne pas les laisser abuser de son nom pour commettre de si horribles attentats.

1203. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

Sa philosophie diffère peu de celle de Montaigne, de ce Michel dont l’Éloge en ce temps-là était mis au concours par l’Académie, et que, lui, sans tant de façons, il lisait et relisait sans cesse : « Il ne m’eût fallu peut-être que sa fortune pour le valoir de tout point, génie à part cependant.

1204. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Œuvres complètes d’Hyppolyte Rigault avec notice de M. Saint-Marc Girardin. »

Dans le premier, il commit une faute par excès de préoccupation morale : à force de vouloir éviter la chronique scandaleuse, il se jeta dans la chronique vertueuse et raconta comment des demoiselles de sa connaissance, millionnaires, prenaient leurs maris parmi des jeunes gens distingués et sans fortune, précepteurs de leurs jeunes frères.

1205. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Une monarchie en décadence, déboires de la cour d’Espagne sous le règne de Charles II, Par le marquis de Villars »

Son père qui, dans sa jeunesse, était très-beau, qu’on surnommait Orondate parce qu’il ressemblait à un héros de roman, qui avait eu des duels brillants au temps de la mode des duels, et avait mérité, par là la faveur du prince de Conti, ce qui fut le point de départ de sa fortune, s’était depuis distingué à la guerre et y serait probablement arrivé jusqu’aux emplois les plus considérables, s’il n’avait rencontré en chemin l’inimitié de Louvois, qui lui barra tout avancement.

1206. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Journal de la santé du roi Louis XIV »

Le Roi sait toutes les historiettes de Louis XV, ce qu’il en faut croire et ce qu’il en faut rabattre ; il nous montre le Parc-aux-Cerfs réduit à ses justes et presque modestes proportions ; il nous dit l’emploi que Mme de Pompadour faisait de sa fortune en amie des arts ; il nous livre les comptes de dépenses de Mme Du Barry au luxe effréné.

1207. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

« On m’a toujours vanté comme un favori de la fortune, disait-il (27 janvier 1824) ; je ne veux pas me plaindre et je ne dirai rien contre le cours de mon existence.

1208. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite.) »

Après ce coup il se sauve de Scarioth et vient chercher fortune en Judée.

1209. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis du Belloy (suite et fin.) »

Ce n’est pas sans bien des précautions qu’il risque sa remontrance : « Quoiqu’il n’y ait que bien peu de temps que nous nous connaissions, depuis que vous avez acheté ce champ proche du mien, et qu’il n’y ait guère rien eu jamais de plus entre nous, cependant, soit votre mérite, soit le voisinage, que je fais bien entrer pour quelque chose dans l’amitié, m’oblige à vous dire tout hardiment et en ami que vous me paraissez faire au-delà de votre âge et plus que votre état de fortune ne l’exige… » Et en effet, ce Ménédème à qui il s’adresse paraît avoir soixante ans et plus ; il a un fonds de terre excellent, des esclaves en nombre, et il fait la besogne d’eux tous comme s’il était seul.

1210. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Œuvres de M. P. Lebrun, de l’Académie française. »

Contre la puissance et le Vaisseau de l’Angleterre, par exemple, en 1808, le disciple et l’héritier de Malherbe s’écriait énergiquement Je vois, aux plaines de Neptune, Un vaisseau brillant de beauté, Qui, dans sa superbe fortune, Va d’un pôle à l’autre porté : De voiles au loin ondoyantes, De banderoles éclatantes, Il se couronne dans les airs, Et seul sur l’humide domaine, Avec orgueil il se promène, Et dit : « Je suis le roi des mers. » Mais voici la belle strophe, celle de l’invective et de la menace, tout à fait à la Malherbe, et un peu dans son style légèrement vieilli : Il n’a pas lu dans les étoiles Les malheurs qui vont advenir ; Il n’aperçoit pas que ses voiles Ne savent plus quels airs tenir ; Que le ciel est devenu sombre, Que des vents s’est accru le nombre, Que la mer gronde sourdement, Et que, messager de tempête, L’alcyon passe sur sa tête Avec un long gémissement.

1211. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite.) »

De même, la première leçon qu’un père prévoyant devrait donner à son fils, si ce fils se destinait à devenir un critique journaliste, ce serait, selon moi : « Mon fils, n’ayez pas le goût trop dégoûté ; apprenez à manger de tout. » Or, imaginez un poète, c’est-à-dire un être accoutumé à cultiver et à chérir un idéal, à le caresser dès l’enfance sur l’aile de la fantaisie, imaginez ce poète subitement mis à pied par la fortune et obligé par métier d’essayer de toutes les combinaisons, de déguster tous les breuvages et toutes les boissons à leur entrée, ou, si vous aimez mieux, de tremper le doigt dans toutes les sauces.

1212. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Legkzinska »

Fille d’un roi électif et détrôné, ayant connu de bonne heure les vicissitudes extrêmes de la fortune, moins princesse que noble et pauvre demoiselle, elle était avec son père et sa mère au château de Wissembourg, profitant de l’hospitalité française à la frontière et vivant avec les siens d’une pension assez mal payée, lorsqu’on vint lui annoncer qu’il ne tenait qu’à elle d’être reine de France.

1213. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet »

Chargé d’inspecter les hommes et les approvisionnements destinés à cette expédition aventureuse, Malouet pouvait dire : « C’était un spectacle déplorable, même pour mon inexpérience, que celui de cette multitude d’insensés de toutes les classes qui comptaient tous sur une fortune rapide, et parmi lesquels, indépendamment des travailleurs paysans, on comptait des capitalistes, des jeunes gens bien élevés, des familles entières d’artisans, de bourgeois, de gentilshommes, une foule d’employés civils et militaires, enfin une troupe de comédiens, de musiciens, destinés à l’amusement de la nouvelle colonie.

1214. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Dans toutes les parties de l’Amérique que j’ai parcourues, je n’ai pas trouvé un seul Anglais qui ne se trouvât Américain, pas un seul Français qui ne se trouvât étranger. » Après l’inclination et l’habitude, il relève l’intérêt, cet autre mobile tout-puissant, surtout dans un pays nouveau où « la grande affaire est incontestablement d’accroître sa fortune. » Et comment ne seraient-elles point encore de Talleyrand ces réflexions morales si justement conques, exprimées si nettement, sur l’égalité et la multiplicité des cultes, dont il a été témoin, sur cet esprit de religion qui, bien que sincère, est surtout un sentiment d’habitude et qui se neutralise dans ses diversités mêmes, subordonné qu’il est chez tous (sauf de rares exceptions) à l’ardeur dominante du moment, à la poursuite des moyens d’accroître promptement son bien-être ?

1215. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

Le profil lui-même apparaît, l’attitude grandiose se dessine du moins : l’injure des temps et de la fortune est en quelque sorte réparée.

1216. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre IV »

« Pour la partie historique de la Fortune des Rougon écrit-il à la suite de la déclaration précitée75, je me suis adressé au livre de Ténot sur les événements tragiques qui se passèrent dans le Var, en décembre 1851 ; et je me souviens que ce fut Jules Ferry qui me fournit les notes dont j’avais besoin pour faire vivre dans la Curée, les transformations de Paris du baron Haussmann.

1217. (1892) Boileau « Chapitre VII. L’influence de Boileau » pp. 182-206

Nous pouvons donc rentrer en France, et y regarder la fortune posthume de notre critique.

1218. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre II. Distinction des principaux courants (1535-1550) — Chapitre I. François Rabelais »

il est aussi délibéré « plagiaire » que Molière, avec une fortune pareille.

1219. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VI, « Le Mariage de Figaro » »

Figaro n’est plus seulement le valet qui sert son maître : il « vole à la fortune », mais, argent à part, il y a de la protection dans son service ; c’est l’homme sensible, heureux de remplir le vœu de la nature en rapprochant des amoureux.

1220. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

Trois de ces Mémoires me paraissent se distinguer dans la foule : ceux de Mme de Rémusat943, qui a pour ainsi dire donné le branle, une femme intelligente, curieuse, un peu commère ; ceux de Marbot944, un soldat, très brave et pas du tout paladin, qui nous donne la note très juste et très réelle de l’héroïsme militaire du temps, mélange curieux de naturelle énergie, d’amour-propre excité et d’ambition d’avancer ; ceux enfin de Pasquier945, un honnête homme sans raideur, excellent serviteur de tous les régimes pour des motifs légitimes, fidèle à ses maîtres sans servilité, à sa fortune sans cynisme, et très clairvoyant spectateur de toute l’intrigue politique ou policière qui se machinait derrière le majestueux tapage des batailles946.

1221. (1890) L’avenir de la science « V »

Mais ce qui ne l’est pas moins, c’est qu’une doctrine n’a désormais quelque chance de faire fortune qu’en se rattachant bien largement à l’humanité, en éliminant toute forme particulière, en s’adressant à tout le monde, sans distinction d’adeptes et de profanes.

1222. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVI » pp. 413-441

L’actrice qui excellait à l’exprimer sur la scène, et qui passait même pour l’inspirer à l’auteur, était la Champmeslé, comédienne excellente, mais courtisane dangereuse qui avait séduit le jeune Sévigné, dont elle dérangeait la fortune, en donnant des soupers où Racine et Boileau se trouvaient.

1223. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

C’est dans l’oisiveté et la petitesse que la vertu souffre, lorsqu’une prudence timide l’empêche de prendre l’essor et la fait ramper dans ses liens : mais le malheur même a ses charmes dans les grandes extrémités ; car cette opposition de la fortune élève un esprit courageux, et lui fait ramasser toutes ses forces, qu’il n’employait pas.

1224. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. de Lamartine. (Les deux premiers volumes. — Pagnerre.) » pp. 389-408

Il ne manque à toutes ces parties si fréquentes chez M. de Lamartine, et qui sont la rencontre et la fortune perpétuelle de sa plume, il ne leur manque, pour paraître vraiment belles, que d’être portées sur une trame solide et bien construite, sur une trame étudiée, travaillée et sévère.

1225. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le surintendant Fouquet. (Article Fouquet, dans l’Histoire de Colbert, par M. P. Clément.) 1846. » pp. 294-312

Le surintendant trouvait de l’argent sur ses promesses (personnelles), mais la prudence ne lui conseillait pas d’engager si avant sa fortune particulière dans la publique ; il allait pourtant passer par-dessus, quand de grands et doctes personnages lui montrèrent clairement qu’il ne le pouvait ; car de prêter ces grandes sommes sans en tirer aucun dédommagement, c’était ruiner impitoyablement sa famille ; d’en prendre le même intérêt qu’un homme d’affaires, cela était indigne et même usuraire ; de faire un prêt supposé sous le nom d’un autre, c’était une fausseté.

1226. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Étienne, ou une émeute littéraire sous l’Empire. » pp. 474-493

Étienne avait été heureux ; il avait rencontré l’à-propos, et la fortune lui avait souri.

1227. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

Je le tire d’une lettre adressée à son ancienne amie miss Mary Stevenson, devenue mistriss Hewson : J’ai trouvé, lui écrit-il de Philadelphie (6 mai 1786), j’ai trouvé ma famille ici en bonne santé, dans de bonnes conditions de fortune, et respectée par ses concitoyens.

1228. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

En effet, lorsqu’une haute et jeune destinée a subi de ces catastrophes soudaines et qui sont restées par quelque côté mystérieuses, lorsqu’un prince a disparu de manière à toucher les imaginations et à laisser quelque jour à l’incertitude, bien des têtes travaillent à l’envi sur ce thème émouvant ; les romanesques y rêvent, se bercent et attendent ; les plus faibles et ceux qui sont déjà malades peuvent sérieusement s’éprendre et finir par revêtir avec sincérité un rôle qui les flatte, et où trouve à se loger leur coin d’orgueilleuse manie ; quelques audacieux, en même temps, sont tentés d’y chercher une occasion d’usurper la fortune et de mentir impudemment au monde.

1229. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1853 » pp. 31-55

Et cet homme qui avait de la fortune, qui avait beaucoup de mille livres de rente, allait demander le maximum de la peine pour un délit dont nous n’étions pas coupables.

1230. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre III. Zoïle aussi éternel qu’Homère »

Chez l’abbesse de Nivelles, princesse du Saint-Empire, demi-recluse et demi-mondaine, et ayant, dit-on, recours, pour se mettre du rose aux joues, au même moyen que l’abbesse de Montbazon, on jouait des charades ; entre autres celle-ci : — La première syllabe est sa fortune ; la seconde serait son devoir. — Le mot était Vol-taire.

1231. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

Ajoutez que l’absence de grandes fortunes constituées par la loi et l’extrême mobilité des biens sont cause que chacun est obligé d’employer toute son énergie à vivre et à se procurer un certain bien-être : or cette perpétuelle occupation n’est pas toujours très-favorable à l’élévation des idées et à la noblesse du caractère.

1232. (1912) L’art de lire « Chapitre VIII. Les ennemis de la lecture »

Continuons de lire La Bruyère ; il connaît la question ; il est homme qui a fait un livre et qui a désiré très vivement être lu et qui était assez intelligent pour comprendre, mieux encore que tout autre chose, les raisons qu’on pouvait avoir de ne le lire point ou de le lire mal : « Ceux qui par leur condition se trouvent exempts de la jalousie d’auteur ont, ou des passions, ou des besoins qui les distraient ou les rendent froids sur les conceptions d’autrui ; personne presque, par la disposition de son esprit, de son cœur et de sa fortune, n’est en état de se livrer au plaisir que donne la perfection d’un ouvrage. » Et c’est-à-dire qu’un des ennemis de la lecture, c’est la vie même.

1233. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Seconde partie. Des mœurs et des opinions » pp. 114-142

L’égalité ne sera pas même parmi les justes dans le séjour de la félicité qui leur est préparée, car il est dit dans l’Évangile : « Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père. » L’égalité est dans la société, sauf la différence des fortunes, sauf la différence des rangs, sauf la différence des facultés, sauf enfin l’inégalité.

1234. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Ce qu’il peignit, ce ne fut pas plus la caractéristique du faubourg Saint-Germain que de toute autre société qui a la prétention de savoir vivre, parce qu’elle vit dans une atmosphère de fortune et de luxe.

1235. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Et lorsqu’à tant de variations utiles on ajoute l’alliance d’un parti politique, le crédit prêté par la rénovation de l’histoire, le talent des maîtres, le silence des adversaires, et par-dessus tout l’irrésistible sympathie de l’esprit poétique et nuageux du siècle, on comprend la nécessité de cette longue fortune et de cette solide domination.

1236. (1888) Portraits de maîtres

Délicieuse création de Célie Merquem régissant avec sa houlette philanthropique une rude colonie de pêcheurs et soumettant la vertu populaire au dévouement armé par la science et la fortune, transfiguré par la jeunesse et la beauté. […] Il proclame cette gloire que des désastres ne peuvent abolir, cet honneur que ne sauraient effacer les vicissitudes de la fortune. […] Une fortune pour le temps ! […] Le premier livre contient ces deux parties distinctes : fin de la Convention, exorde de la fortune napoléonienne. […] Sans doute la fortune de professeurs tels que Michelet ou Quinet ne se rencontre pas fréquemment ; mais ne serait-il pas désirable de retrouver plus souvent chez leurs successeurs universitaires cette pratique d’exhortations morales et de conseils patriotiques.

1237. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

Vous, simples citoyens, ne cessez de réclamer ces assemblées primaires qu’aucune puissance n’a droit à vous ravir… Dites-vous bien que telle est en France l’immense majorité des amis de l’ordre, que, même après qu’elle est décimée, il en reste partout assez pour comprimer la horde impure qui a juré le pillage de vos fortunes et l’assassinat de vos personnes. […] « Sans doute encore nous avons été frappés de cette utilité politique, qu’après tant de déplacements funestes, et dans un État si vaste, le pouvoir acquière plus de fixité ; qu’il persévère longtemps dans les mêmes mains, surtout lorsque ces mains se montrèrent heureuses, lorsque le chef a fait d’illustres preuves de talent, lorsque, respecté dans son pays et redouté en Europe à l’égal de nul autre, il semble avoir identifié avec sa fortune la fortune publique.

1238. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre premier. La Formation de l’Idéal classique (1498-1610) » pp. 40-106

Qui donc l’a dit, quel moraliste ou quel prédicateur, La Bruyère ou Bourdaloue, qu’à l’origine de toutes les grandes fortunes on trouvait communément « des choses qui font frémir » ? […] Alexandre ou César pour avoir éprouvé l’inconstance de la fortune ? […] 3º Le caractère de l’Astrée. — Aspect général de l’œuvre ; — et que, bien loin que les épisodes y soient, comme dans d’autres romans de la même forme, des hors-d’œuvre par rapport au récit principal, c’est le récit principal qui n’est que le prétexte ou l’occasion des épisodes. — Diversité d’intérêt qui en résulte : — 1º Episodes historiques [Eudoxe et Valentinian, IIe partie, livre 12] ; — 2º Allusions contemporaines [Euric, Daphnide et Alcidon, IIIe partie, livre 3] ; — 3º Inventions personnelles [Damon et Madonthe, IIe partie, livre 6]. — La forme des récits n’est pas moins variée : — descriptions [IIe partie, livre 5] ; — conversations [IIe partie, livre 12] ; — narrations [IIIe partie, livre 7], on y trouve des modèles de tout, de lettres encore et de sonnets d’amour ; — sans compter quelques pages d’une touche plus réaliste ou plus brutale. — Du style de l’Astrée : — son élégance et sa clarté ; — sa douceur et sa fluidité ; — sa justesse dans l’abondance, — sa valeur psychologique ; — et, comme conséquence, de la peinture des variétés de l’amour dans l’Astrée. — L’amour sensuel et brutal [Eudoxe et Valentinian, IIe partie, livre 12] ; — l’amour volage et capricieux [Hylas, Ire partie, passim] ; — l’amour jeune et passionné [Chryséide et Arimant, IIIe partie, livres 7 et 8] ; — l’amour chevaleresque [Rosanire, Céléodante et Rosiléon, IVe partie, livre 10] ; — l’amour mystique [Céladon et Astrée]. — Variété des caractères. — Qu’il ressort enfin de l’ensemble du livre une impression de charme et d’apaisement sans analogue jusqu’alors dans la littérature ; — qui explique sa fortune, l’une des plus prodigieuses qu’il y ait dans l’histoire littéraire : — et sa longue influence.

1239. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

Ceux qui ne sont pas doués réussissent en apparence, dans le moment, plus que ceux qui sont doués ; ils ont la fortune, les honneurs, la réputation, plus vite que les autres. […] Je veux parler des fils de bourgeois, une race qui a profité de la fortune de médecins, d’avocats, de négociants, qui n’a rien fait, rien appris, qui s’est jetée dans les clubs de jeux, qui a la manie des chevaux, de l’élégance, qui touche à tout, même à l’écritoire, qui achète même une maîtresse et un quart de journal, qui veut commander aux femmes et aux écrivains, c’est en vue de cette race nouvelle que le philosophe Proudhon terminait ses appréciations sur M.  […] On ne sait pas trop comment ces « fils de bourgeois, une race qui a profité de la fortune de médecins, d’avocats, de négociants, qui n’a rien fait, rien appris, etc., etc., qui touche à tout, même à l’écritoire, qui achète même une maîtresse et un quart de journal, qui veut commander aux femmes et aux écrivains », on ne sait pas trop, dis-je, comment ce pauvre monde si maltraité et qui n’en peut mais, est responsable des mécomptes de M.  […] Ce mot profond a fait fortune.

1240. (1898) Impressions de théâtre. Dixième série

Albert Guinon, — sans doute à force d’y songer, — a eu la fortune d’exprimer totalement leur souffrance, comme il avait su, auparavant, exprimer totalement leur désir. […] Ce qu’elle rêve, c’est simplement la revanche du passé par la conquête d’une nouvelle fortune. […] Alors il avoue brutalement sa trahison, et il ajoute : « Nous n’avons donc plus qu’à nous séparer à l’amiable ; mais : vous savez que je suis maître de la fortune. » Cette fortune, c’est Laure qui l’a apportée en dot. « Gardez votre argent, s’écrie-t-elle, et laissez-moi ma fille !  […] Dans le calme séjour où Jacques Dangy jouit en paix de sa fortune et de sa sagesse, M.  […] N’a-t-il pas au moins le droit de se retrouver dans la même position de fortune qu’avant l’aventure, et n’est ce point assez des irréparables souffrances morales qu’elle lui aura values ?

1241. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

N’oublions pas que ce sont des philosophes qui ont fait la fortune des Saint-Germain et des Cagliostro. […] Je ne sais résister ni aux mauvaises fortunes ni aux bonnes. […] Aulard, qui recueille avec un zèle infatigable les documents pour servir à l’histoire de l’époque à laquelle il a attaché son nom et sa fortune. […] Pour moi, je suis chaque année avec un intérêt plus vif et plus inquiet la fortune de nos études classiques. […] Je lui laisse le soin de mes biens et le gouvernement de ma fortune.

1242. (1907) Propos de théâtre. Quatrième série

Confier son propre nom au vaisseau qui porte la fortune d’Hugo aux âges futurs ne serait pas du tout une maladresse. […] Ce pleutre de Raguais accepte à peu près, laissant à sa femme une partie seulement de la fortune qui est à elle. […] Encore est-il qu’il s’est amusé, je veux dire passionné pendant deux heures, et que, quand il a eu cette rare fortune, il pardonne toujours. […] Ils ne s’aiment point et ils sont tous les deux, elle et lui, hommes à bonnes fortunes, si je puis m’exprimer ainsi et je m’exprime fort exactement. […] Juliette refuse, redoutant, sans se rendre compte encore des choses, la disproportion colossale de fortune entre Jean et elle.

1243. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — II. (Fin.) » pp. 213-233

Un courrier expédié au duc qui était alors à Soissons, courrier dont les dépêches avaient pour objet de l’apaiser et de le retenir, ne put partir faute de vingt-cinq écus, et le duc passa le Rubicon : Telle est, dit Mézeray, la condition des plus grandes affaires, que, lorsqu’elles sont à un certain point où elles ne peuvent pas subsister longtemps, il ne faut que le moindre incident pour les faire tomber d’un côté ou d’autre ; et, si la fortune permettait qu’il fût évité, les choses pourraient se mieux tourner et prendre toute une autre pente.

1244. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — I. » pp. 431-451

Il a tout d’abord un retour de plaisir sur la bonté de la nature qui, ayant pu aussi bien le faire naître esclave, sauvage ou paysan, a placé son berceau dans un pays libre et civilisé, à une époque de science et de philosophie, au sein d’une famille d’un rang honorable et convenablement partagée des dons de la fortune.

1245. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — I. » pp. 495-512

Et puis, quelles que soient, dans les deux cas, les inégalités de ressources, de talent, de prévision et de calcul, ce qui me frappe, c’est combien, malgré ces différences positives tout à l’avantage de l’entreprise moderne, la part de la fortune reste grande et souveraine, et combien, après avoir un peu plus ou un peu moins cédé au génie humain, elle ne recule que pour reprendre le dessus à quelque distance dans le résultat, et pour se ménager en quelque sorte la revanche de plus loin.

1246. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

Car dans ce rappel mainte fois répété : Memento, homo…, l’orateur tout à coup se retourne plus particulièrement vers quelques-uns de ceux qui l’écoutent, l’ambitieux, l’avare et l’homme de fortune, le grand seigneur, la femme mondaine, et il leur dit, à chacun, après une description particulière de leur mal et en leur étalant une poussière de mort, semblable à la leur, à ce qu’elle sera un jour : Venez et voyez !

1247. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

Les sujets auxquels Chapelle méditait de s’appliquer n’étaient rien moins que la nature même des choses au physique et au moral, la structure du monde et la composition de l’homme, le libre arbitre, la fortune, le destin, la Providence, la nature de l’âme ; il voulait, d’après Épicure, Lucrèce et Gassendi, reprendre et couler à fond toutes ces matières : il n’avait peut-être pas tout à fait cuvé son dernier vin de la veille le jour où il avait conçu ce grand projet, dont la nouvelle était allée à Bernier jusqu’aux contins de l’Indoustan.

1248. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « De la poésie de la nature. De la poésie du foyer et de la famille » pp. 121-138

Homme du monde accompli, il était réservé à l’extérieur : « Il avait pour tout ce qui lui était indifférent une politesse froide qu’on pouvait quelquefois confondre avec le dédain. » Cette circonspection tenait sans doute à plusieurs causes : il avait vécu dans une petite cour et dans un grand monde où sa fortune ne répondait point à sa condition ; il avait de la dignité et une délicatesse susceptible qu’il ne voulait pas exposer aux blessures.

1249. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Une Réception Académique en 1694, d’après Dangeau (tome V) » pp. 333-350

Le confrère que nous avons perdu ne devait rien à la fortune : riche dans toutes les parties qui font un véritable homme de lettres, il n’avait aucun de ces titres éclatants qui relèvent son successeur : son esprit aisé et pénétrant, etc.

1250. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

C’est une situation que j’ai évitée par suite de la position où j’ai toujours vécu, n’ayant ni présent ni avenir de fortune quelconque.

1251. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Histoire de Louvois et de son administration politique et militaire, par M. Camille Rousset, professeur d’histoire au lycée Bonaparte. (Suite et fin) »

C’était dans cette guerre de 1667, entreprise contre l’Espagne pour soutenir les droits de la reine sur les Pays-bas espagnols, et qui fut marquée par une suite ininterrompue de succès et de sièges heureux : « Je ne trouvai dans mon chemin, dit-il, que mes bons, fidèles et anciens amis les Hollandais, qui, au lieu de s’intéresser à ma fortune comme à la base de leur État, voulurent m’imposer des lois et m’obliger à faire la paix, et osèrent même user de menaces en cas que je refusasse d’accepter leur médiation.

1252. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Que ces petites montres de sa ruine qui paraissent encore au-dessus de la bière, c’était la Fortune qui les avait conservées pour le témoignage de cette grandeur infinie que tant de siècles, tant de feux, la conjuration du monde réitérée à tant de fois à sa ruine, n’avaient pu universellement éteindre.

1253. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Histoire du roman dans l’Antiquité »

D’abord révolté, récalcitrant, ruant et fort roué de coups, voulant parler et crier à tous ce qu’il est, ce qu’il a sur le cœur, et ne parvenant qu’à braire, puis soumis et résigné, il n’a pas tardé à s’apercevoir que le plus sage pour lui est encore de faire son métier d’âne en conscience ; peu à peu, la curiosité aidant, il y prend presque plaisir et trouve çà et là, pour prix de sa patience, de petits dédommagements, jusqu’à ce qu’à la fin son mérite singulier le tire du pair et qu’il devienne un âne savant et tout à fait célèbre, un âne à la mode, un âne à bonnes fortunes.

1254. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Étienne-Jean Delécluze, (suite et fin) »

Étienne donne un démenti formel à cette première satire d’Horace : il n’envie personne, il n’a jamais aspiré à un autre sort que le sien ; il est vrai qu’il n’a jamais eu proprement de profession (hormis pour un temps très court), et que de bonne heure une fortune suffisante lui a permis de lire, d’étudier à son aise et de se livrer à l’heureuse modération de ses penchants.

1255. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Oeuvres inédites de la Rochefoucauld publiées d’après les manuscrits et précédées de l’histoire de sa vie, par M. Édouard de Barthélémy. »

Il va trouver de la réputation où il trouvera peu d’intérêt ; et sa mauvaise fortune fera paraître un mérite à tout le monde, que la retenue de son humeur ne laissait connaître qu’aux plus délicats.

1256. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. (suite) »

La Rochefoucauld, tout politique, disait de même et diversement : « La Fortune et l’humeur gouvernent le monde. » Une réflexion ne vous frappe-t-elle pas ?

1257. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni (suite et fin.) »

Quand on lui rappelait le temps passé, et qu’on lui demandait s’il ne regrettait pas l’emploi de sa fortune, il répondait en souriant et de l’air d’un chat qui vient de boire du lait : « Ah !

1258. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite et fin.) »

Ce sentiment se prononce surtout lorsque Sigognac, honteux d’être à charge à ses tristes compagnons sans leur rendre aucun service, et les voyant en peine et tout désemparés depuis la perte du pauvre Matamore, s’offre à le remplacer lui-même, à mettre de côté sa véritable épée, et, sous le nom grotesque de Capitaine Fracasse, qui sera désormais le sien, à faire son rôle sur les tréteaux, en attendant fortune meilleure : un regard d’Isabelle l’en récompense.

1259. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois par M. Camille Rousset. Victor-Amédée, duc de Savoie. (suite et fin.) »

Ce sont chaque jour de nouveaux incidents, des objections de détail : questions de douanes, questions de régiments à accorder au roi et du chiffre des hommes, tout devient matière à discussion, à retard, il vire et revire dans son procédé, à chaque changement de fortune plus ou moins favorable à nos armes.

1260. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

Je n’ai plus qu’à esquisser l’historique du succès de Don Quichotte parmi nous, et de sa fortune en deçà des Pyrénées, en France.

1261. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Mme Roland avait péri le 9 novembre 1793 : Robespierre tombait le 9 thermidor (27 juillet 1794) ; moins d’un an après, dans l’été de 1795, parurent les Mémoires de Mme Roland ; ils avaient pour titre : Appel à l’impartiale Postérité par la citoyenne Roland, femme du ministre de l’intérieur ; ou Recueil des écrits qu’elle a rédigés pendant sa détention aux prisons de l’Abbaye et de Sainte-Pèlagie ; imprimé au profit de sa fille unique, privée de la fortune de ses père et mère, dont les biens sont toujours séquestrés.

1262. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat. »

laissons Saint Simon parler et peindre : « De l’esprit, dit-il, dans son admirable et brûlant croquis de La Feuillade, une grande valeur, une plus grande audace, une pointe de folie gouvernée toutefois par l’ambition, et la probité et son contraire fort à la main, avec une flatterie et une bassesse insignes pour le roi, firent sa fortune et le rendirent un personnage à la Cour, craint des ministres et surtout aux couteaux continuels avec M. de Louvois. ».

1263. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

Il dut quitter Versailles après le 14 juillet, et son impopularité n’eut de refuge assuré qu’à Vienne, où était née sa fortune avec le vice originel qui y était attaché.

1264. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « HISTOIRE de SAINTE ÉLISABETH DE HONGRIE par m. de montalembert  » pp. 423-443

Il est faux que je me sois réfugié en Belgique ; ce qui est vrai, c’est que sans fortune, ayant donné ma démission d’une place de bibliothécaire, je suis allé, au mois d’octobre 1848, c’est-à-dire sept ou huit mois après le 24 février, professer à l’Université de Liege et y vivre de ma littérature, puisque pour le moment cette littérature n’avait plus cours en France.

1265. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « JASMIN. » pp. 64-86

La fortune se fait d’abord un peu prier ; le salon n’est pas tout à fait plein, il n’est pas vide non plus, et, comme dit le proverbe, s’il ne pleut pas, il bruine.

1266. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « THÉOPHILE GAUTIER (Les Grotesques.) » pp. 119-143

Mais, pour mener à bien cette inspiration de caprice et de fantaisie, il n’eut ni le talent assez ferme, ni la fortune et les étoiles assez favorables.

1267. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN FACTUM contre ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 301-324

Il essaye de décomposer et d’expliquer la fortune d’André Chénier par toutes les raisons les plus étrangères au talent même et au charme de ses vers ; il côtoie complaisamment les suppositions les plus gratuites en finissant par les rejeter sans doute, mais avec un regret mal dissimulé de ne les pouvoir adopter : « On se demanda, écrit-il (lorsque ces Poésies parurent), si on n’admirait pas sous la garantie d’une muse posthume l’effort d’un esprit moderne ; si, sous la main d’un éditeur célèbre et poëte lui-même, telle épître ou telle élégie n’avait pas pu s’envoler d’un champ dans un autre, et sans qu’il lui fût bientôt permis de revenir à la voix de son premier maître.

1268. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE DURAS » pp. 62-80

Sous les différences d’éducation et de fortune, on découvrirait peut-être chez toutes deux d’autres rapports.

1269. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « CHRISTEL » pp. 515-533

M…, sans fortune, sans pension, la fière et noble veuve avait vécu, durant deux années, de quelques économies, de la vente de quelques bijoux, des restes enfin d’une situation qui avait pu sembler brillante.

1270. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 193-236

CCLXVI Je marchai du lever du soleil jusqu’à son coucher, mon mezaro rabattu et refermé sur mon visage pour que les passants ne m’embarrassent pas de leurs rires et de leurs mauvais propos sur la route, pensant en eux-mêmes, en me voyant si jeune et si seule, que j’étais une de ces filles mal famées de Lucques qui vont chercher à Pise et à Livourne les bonnes fortunes de leurs charmes, auprès des matelots étrangers.

1271. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

Étudiez l’incomparable style de Bossuet ; prenez le Sermon sur la mort, et tous ces conseils s’éclairciront ; vous y verrez la métaphore brusque ou préparée, suivie ou abandonnée, plongée au milieu des termes propres ou de métaphores dissemblables, lâchée dès qu’elle ne serait plus qu’une curiosité ou un obstacle, avec une souplesse et une fortune merveilleuses, sans autre règle apparente que l’universelle et l’infaillible règle de donner à la pensée l’expression adéquate, transparente, qui n’y ajoute rien et n’en retranche rien : Multipliez vos jours, comme les cerfs que la fable ou l’histoire de la nature fait vivre durant tant de siècles ; durez autant que ces grands chênes sous lesquels nos ancêtres se sont reposés et qui donneront encore de l’ombre à notre postérité ; entassez, dans cet espace qui paraît immense, honneurs, richesse, plaisir : que vous profitera cet amas, puisque le dernier souffle de la mort, tout faible, tout languissant, abattra tout à coup cette vaine pompe, avec la même facilité qu’un château de cartes, vain amusement des enfants ?

1272. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Henry Rabusson »

Il a le tour d’esprit d’un moraliste et surtout d’un « maximiste » : on tirerait de ses livres toute une collection de maximes et réflexions, dont on ferait un joli manuel du mondain et de l’homme à bonnes fortunes.

1273. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Alphonse Daudet, l’Immortel. »

Alphonse Daudet, renonçant au fauteuil qu’on lui tenait tout prêt, ne renonce à rien, puisqu’il a déjà tout, « la gloire et la fortune », comme dans la chanson.

1274. (1829) De la poésie de style pp. 324-338

Ces deux îles jetées aux deux extrémités de la terre, L’une aux mers d’Annibal, l’autre aux mers de Vasco, ces deux îles que le poète décrit si sombres et si terribles, où Napoléon a pu naître et mourir, où son ombre revient régner dans les tempêtes, et où viendront, à l’appel de son ombre, tous les peuples de l’avenir, ces deux îles sont le symbole de la fortune de Napoléon.

1275. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre X. Les sociales »

Tu ne jouis pas de la pensée : tu jouis un peu de l’espoir et du désir de la pensée ; tu es heureux surtout de voir que nous croyons à tes bonnes fortunes.

1276. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Se croyant quitte désormais envers sa conquête, il livra sa fortune aux vents et aux flots, et à son étoile.

1277. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

» C’est le même moraliste, contemporain de Cromwell, qui a dit cet autre mot si vrai et qu’oublient trop les historiens systématiques : « La fortune et l’humeur gouvernent le monde. » Entendez par humeur le tempérament et le caractère des hommes, l’entêtement des princes, la complaisance et la présomption des ministres, l’irritation et le dépit des chefs de parti, la disposition turbulente des populations, et dites, vous qui avez passé par les affaires, et qui ne parlez plus sur le devant de la scène, si ce n’est pas là en très grande partie la vérité.

1278. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

De ces divers écrivains, ainsi agrégés, qui avaient commencé ou qui continuèrent alors de concert la fortune du journal, quatre noms sont restés de loin associés dans le souvenir comme représentant la critique littéraire sous l’Empire : Geoffroy, Dussault, Hoffman et M. de Féletz, qui vient de mourir le dernier.

1279. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. » pp. 432-452

» qui se croit privilégiée en douleur, en malheur ; qui a des étonnements, des attendrissements sur elle-même, sur ses propres fortunes ; qui, à chaque chance humaine qui lui arrive, se dit : « Cela n’arrive qu’à moi ! 

1280. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Balzac. » pp. 443-463

Pour lui, « un grand artiste aujourd’hui, c’est un prince qui n’est pas titré ; c’est la gloire et la fortune ».

1281. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Frédéric le Grand littérateur. » pp. 185-205

Les réflexions par lesquelles Frédéric termine son récit de la guerre de Sept Ans ressemblent très bien à une page de Polybe : « À deux mille ans de distance, c’est la même façon de juger les vicissitudes humaines, et de les expliquer par des jeux d’habileté mêlés à des jeux de fortune. » Seulement l’historien-roi est, en général, plus sobre de réflexions.

1282. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — II. (Suite et fin.) » pp. 421-440

C’est une marque de leur abattement qui ne leur fait pas d’honneur ; car, dans quelque mauvais état que soient les affaires, les grands esprits et les grands courages se raidissent davantage contre la mauvaise fortune.

1283. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame Sophie Gay. » pp. 64-83

[NdA] Ce roman de Laure d’Estell n’avait été écrit et publié par Mme Gay que pour venir au secours d’un oncle et d’une tante, M. et Mme B… de L…, qui se trouvaient sans ressources en rentrant de l’émigration, et dans un temps où elle-même n’avait pas encore la fortune qu’elle eut depuis.

1284. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

Il était dans sa vingt et unième année quand il perdit son père qui lui laissa quelque fortune, assez pour être indépendant des clients ou des libraires, et, son génie dès lors l’emportant, il se donna tout entier aux lettres, à la poésie, et, entre tous les genres de poésie, à la satire.

1285. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Donc 150 francs étaient toute sa fortune, et le voyage en troisième jusqu’à Paris, coûtait une centaine de francs.

1286. (1911) Jugements de valeur et jugements de réalité

Un timbre-poste n’est qu’un mince carré de papier dépourvu, le plus souvent, de tout caractère artistique ; il peut néanmoins valoir une fortune.

1287. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

Depuis que cet excellent Colline est en bons termes avec la fortune ; depuis qu’il peut s’écrier : “ Et moi aussi, je suis créancier ! 

1288. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre V. Séductions pour la compréhension de la psychologie indigène. — Conclusion »

Le noir — ceci résulte de sa littérature même — voit à l’existence divers buts, presque tous matériels d’ailleurs : La conquête du pouvoir, celle de la fortune, celle de la femme désirée.

1289. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IX. Mémoires de Saint-Simon » pp. 213-237

que Dubois était destitué de tout talent, pour le porter à une si prodigieuse fortune et pour l’y soutenir !

1290. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

Mais, s’il a été victime dans son talent de son éducation anglaise, il l’a été bien autrement dans sa fortune.

1291. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Baudelaire  »

dans le livre chaque poésie a, de plus que la réussite des détails ou la fortune de la pensée, une valeur très importante d’ensemble et de situation, qu’il ne faut pas lui faire perdre en la détachant.

1292. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

Hormis en effet le plan de son poème, qui est ambitieux, et le labeur que l’on y sent, comme l’enclume, si elle avait une âme, sentirait le marteau, Les Bretons n’ont guère (quand ils les ont toutefois) que les qualités idylliques qui firent la fortune de Marie et de quelques pièces du poème qui suivit celui de Marie : La Fleur d’or.

1293. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

Il y a des hommes et des femmes, en grand nombre, qui trouvent que le bonheur n’a pas de patrie nécessaire, que la joie et le souci d’une fortune à faire ou à augmenter, d’une famille à élever, d’une âme à ennoblir, d’une place à tenir dans l’amitié de quelques-uns et dans l’estime de tous, suffisent amplement à remplir les heures et à les rendre brèves.

1294. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XV. »

À la passion de la liberté et de la gloire elle viendra substituer le culte de la fortune, l’idolâtrie de la victoire ; puis, par un contraste séduisant et vrai, elle célébrera l’amour du repos, la passion de l’insouciance.

1295. (1888) Impressions de théâtre. Première série

. — D’autre part, si vous avez un frère dont les désordres ont ruiné votre mère ; si ce frère recommence ses folies et fait un nouveau million de dettes, vous pouvez être un assez bon cœur, mais vous n’irez peut-être pas jusqu’à lui sacrifier votre fortune personnelle. […] Voici le duc d’Aléria qui a mangé deux fortunes, celle de sa mère et celle de son frère : ce doit être un bien aimable homme ! […] L’inconnu rencontré par Francine est justement le clerc de notaire que Lucien a fait venir pour établir l’état respectif de leurs deux fortunes (car ils vont se séparer). […] Elle a cette idée fixe qu’elle gagnera quelque jour une fortune et, quand elle perd, elle trépigne et braille comme un enfant en colère. […] Et qui sait surtout si vous ne feriez pas le petit mouvement du pouce qui supprimerait, à trois mille lieues d’ici, le mandarin chinois et vous donnerait une fortune ?

1296. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

Il sent bien qu’elle l’aime aussi ; mais, avant de lui demander sa main, il veut s’assurer que ce n’est pas surtout pour sa noblesse et pour sa fortune qu’elle l’aime. […] Il est fier de sa fortune : c’est qu’il s’est donné beaucoup de mal pour la gagner et que, d’ailleurs, la fortune attire aux hommes beaucoup de considération. […] Il confie ses capitaux à Lecardonel, espérant doubler sa fortune : c’est que, quand on a de l’argent, on en désire toujours davantage. […] est-ce que vous ne savez pas de quelle façon commencent toutes les grandes fortunes ? […] Elle fait approcher sa fille Rolande, lui confie la triste vérité, et que déjà elle a laissé entamer sa propre fortune pour payer les dettes de son mari.

1297. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome IV pp. 5-

Il est notable que de tous les écrits paraphrasés sur l’histoire du Messie, aucun n’est si naturel, que le Nouveau-Testament : aussi ce livre a-t-il fait fortune ! […] Ainsi la plus faible circonstance influe sur le sort de tous les illustres navigateurs, et le mystère du cœur humain se dévoile, en quelques vers, au chagrin passager qui surmonte la force d’Alcide, dont l’âme soutint les plus redoutables coups de la fortune. […] « Considérez que depuis si longtemps que je chante votre Tage et vos Lusitains, la fortune m’entraîne errant sans cesse accablé de nouvelles peines et de nouveau dommages, tantôt battu des mers, tantôt essuyant les périls de la guerre inhumaine, semblable à Canacée qui, se condamnant à la mort, d’une main tient toujours l’épée, et de l’autre la plume. […] « Jeunes, mais occupés de la cause commune, « Nos regards, cette nuit, épiaient la fortune. […] Le retour de fortune qui enlève aux Troyens les fruits de leurs succès, bien que si surprenant par son effet rapide, est pressenti dès la réapparition du vengeur de Patrocle, que le désespoir arrache à son repos funeste.

1298. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Né en Bretagne, d’une famille aristocratique, mais sans fortune, la révolution étant survenue il se décide à émigrer et alla s’enrôler dans l’armée de Condé, sans avoir cependant des convictions légitimistes bien solides. […] « En Allemagne, disait-il, une pareille feuille serait impossible. » En effet, ce qui fit le succès et la fortune des doctrinaires ce fut leur esprit de corps, et le soin qu’ils mirent à se pousser mutuellement. […] Ils ont ouï dire que la mélancolie faisait aujourd’hui fortune, et les voilà qui se sont mis aussitôt à hurler sur tous les tons de noires complaintes et de grotesques élégies. […] On lui attribue la création des mots : ensoleillé, et enténébré, termes, qui ont fait fortune. […] Ce premier crime le pousse à un autre et il finit par tuer son fils,-sans le reconnaître, il est vrai, mais aussi par cupidité, car le fils, grâce à son honnêteté a su faire fortune et voudrait la partager avec ses parents.

1299. (1923) Au service de la déesse

Les Latins la confondaient avec la Fortune. […] Cependant, Auguste, au dire de Suétone, mendiait, chaque année, un jour : il espérait conjurer de cette façon la Fortune qui a de si rudes vengeances. […] Au surplus, ce ne sont pas les meilleures idées qui ont ici-bas la plus belle fortune ou la plus ample, ainsi que l’histoire en témoigne assez tristement. […] Aucune doctrine n’a eu, de nos jours, une telle fortune. […] Or, la France a été « le lieu du plus grand exercice de la guerre » ; la voici obligée d’être « le lieu du plus grand exercice du travail » : est-ce qu’elle n’a point à réparer ses provinces du Nord et à refaire sa fortune ?

1300. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

Rien de plus ordinaire parmi nous que de réaliser un emploi, une charge, une dignité ; nous personifions la raison, le goût, le génie, le naturel, les passions, l’humeur, le caractere, les vertus, les vices, l’esprit, le coeur, la fortune, le malheur, la réputation, la nature. […] & que si ces objets n’étoient point réels, nos peres n’auroient jamais inventé ces noms, & nous ne les aurions pas adopté : de même lorsqu’on dit la nature, la fortune, le bonheur, la vie, la santé, la maladie, la mort, &c. les hommes vulgaires croient par imitation qu’il y a aussi indépendemment de leur maniere de penser, je ne sais quel être qui est la nature ; un autre, qui est la fortune, ou le bonheur, ou la vie, ou la mort, &c. car ils n’imaginent pas que tous les hommes puissent dire la nature, la fortune, la vie, la mort, & qu’il n’y ait pas hors de leur esprit une sorte d’être réel qui soit la nature, la fortune, &c. […] Figure d’élocution qui se fait lorsqu’on recommence divers membres de période par le même mot : en voici un exemple tiré de l’Ode d’Horace à la fortune, Liv. […] ) la fortune elle-même, cette maitresse des évenemens.

1301. (1899) Arabesques pp. 1-223

Puis il rompit avec ses anciens frères d’armes et il eut cette singulière fortune qu’on lui offrit un banquet pour célébrer la fondation de l’école romane. […] Nous n’avons donc pas à vous défendre parce que nous savons qu’un ouvrier, un artiste, un savant dépourvu de fortune sont aussi malheureux de l’autre côté de la frontière que du nôtre. […] Moyennant quelques chèques habilement distribués, il vide ses magasins, se fait décorer et se retire bientôt des affaires avec une fortune — honnête. […] On redoute le vrai au point qu’on emploie les subterfuges les plus bizarres afin de se le dissimuler à soi-même et qu’on garde rancune aux gêneurs qui s’efforçant de le remettre en évidence. — Prenez, par exemple, un Bourgeois nanti de quelque fortune, doué d’une intelligence moyenne, ni très bon ni très méchant, et qui, les jours où la rente a baissé, se sent enclin à soupçonner que « tout ne va peut-être pas pour le mieux dans le meilleur des mondes ». […] On sait comment les choses se passent : chaque arrondissement contient quelques malins qui se forment en comité pour envoyer siéger dans cette caverne d’Ali-Baba qu’on appelle la Chambre un notable choisi à cause de sa fortune, de sa voix sonore ou de son habileté à tromper les simples.

1302. (1890) Journal des Goncourt. Tome IV (1870-1871) « Année 1871 » pp. 180-366

À ce moment surgit dans la chaire, une barbe blanche, qui, après s’être gargarisé avec quelques phrases puritaines, demande à l’assemblée de voter la proposition suivante : « Les membres de l’Assemblée nationale, et aussi bien Louis Blanc, Schœlcher, que les autres, les membres de l’Assemblée nationale, ainsi que les autres fonctionnaires, sont déclarés responsables, sur leur fortune privée, de tous les malheurs de cette guerre, et tout autant pour ceux qui périssent du côté de Versailles, que du côté de Paris. En sorte, dit-il, en entrant dans des explications, qu’un représentant de province sera très désagréablement surpris, quand le paysan, chez lequel on aura rapporté le corps de son fils, viendra lui réclamer, sur sa fortune, la pension qui lui est due. » La proposition mise aux voix n’est pas votée, je ne sais par quel empêchement. […] » fit ironiquement le peintre. — « Monsieur n’est pas chasseur ; s’il l’était, ce que je lui dis, ce ne l’étonnerait pas… quand nous attaquons un tas, nous croyons notre fortune faite… et ça recommence comme ça, à chaque nouveau tas !  […] Flaubert me conte l’inespérée fortune de la Présidente (Mme Sabatier, la femme au petit chien dont Ricard a fait un si beau portrait) qui a reçu un titre de 50 000 livres de rente, deux jours avant l’investissement de Paris, un envoi de Richard Wallace, qui avait couché avec elle dans le passé, et lui avait dit : « Tu verras, si je deviens jamais riche, je penserai à toi !  […] Alors, ô fortune, Signeux m’envoya dix francs en timbres-poste, parce qu’on ne nous laissait pas d’argent !

1303. (1908) Après le naturalisme

S’il hait les hommes, c’est parce qu’il n’en a pas besoin, et le seul moyen de s’en passer, c’est, avec la fortune, une situation sociale indépendante et assurée de la sécurité parfaite. […] Bien des fortunes politiques et monétaires se fondèrent là, à la faveur des troubles de toutes sortes. […] Le peuple est loin de posséder cette science et l’on voudrait que la raison du nombre le nantît du droit de décider de notre destinée — après l’avoir refusé à l’élite qui y consacre cependant sa supériorité — cette élite nouvelle qu’on aperçoit composée non d’une aristocratie de sang ou de fortune, mais des intelligences prédominantes de la nation ?

1304. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff (suite) » pp. 317-378

Il avait reçu une assez bonne éducation et fait ses études à l’Université ; mais, né dans une condition très précaire, il avait compris de bonne heure la nécessité de se frayer une carrière et de se faire une petite fortune. […] Elle avait une jolie fortune, dans laquelle l’héritage paternel tenait moins de place que les économies du mari. […] Pendant vingt ans, notre pauvre Allemand chercha fortune.

1305. (1895) Les confessions littéraires : le vers libre et les poètes. Figaro pp. 101-162

De cette règle, les poètes peuvent induire que le nombre de leurs rimes possibles vient d’être doublé ; ils doivent donc rimer — et plus richement que jamais — car leur fortune s’est accrue. […] Dût-il me vouer aux foudres isiaques, dût-il même… m’envoûter, je tire de mes cartons cette bluette innocente, et pas du tout ésotérique, sur la vanité de l’effort terrestre : PHILOSOPHIE Pierrot, nimbé de clair de lune, Bourre sa pipe avec fierté, Car il sait que toute infortune, Toute fortune est vanité. […] Telle aux nocturnes cieux la fortune est égale Des enfants de Léda, race de Jupiter, Dont fut l’affection après l’heure fatale, Tracée en double signe au-dessus de la mer.

1306. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Et c’est pourquoi, lorsque ses amis de Port-Royal, sa tante, ses parents de la Ferté-Milon s’entendent pour l’envoyer à Uzès, où l’appelle son oncle le chanoine Sconin, qui lui fait espérer un « bon bénéfice », Jean Racine, se voyant sans fortune, se laisse faire. […] (De la fortune d’Alexandre, I, 6.) […] Sachez seulement que le sujet de Timocrate est tiré du roman de Cléopâtre, de La Calprenède ; que le héros de la pièce joue un double personnage ; que, sous le nom de Timocrate, roi de Crète, il assiège la reine d’Argos ; que, sous le nom de Cléomène, officier de fortune, il défend cette reine dont il aime la fille ; que la pièce à partir du troisième acte n’est qu’une série de surprises et de coups de théâtre adroitement ménagés ; que le dénouement est fort ingénieux ; que Timocrate me paraît, aujourd’hui encore, un des chefs-d’œuvre du drame à énigmes ; et que je ne pense pas que, ni chez Scribe, ni chez M.  […] Mais, peu après, elle offre à Néron son propre appartement « pour cacher des plaisirs dont un si jeune âge et une si haute fortune ne sauraient se passer », et elle lui donne de l’argent tant qu’il en veut.

1307. (1914) Note conjointe sur M. Descartes et la philosophie cartésienne pp. 59-331

Que les hautes fortunes n’ont jamais couronné les parfaits appareils de mécanismes. […] Que quand c’est si bien fait que ça ça ne réussit jamais, ça ne reçoit jamais ce gratuit accomplissement, ce gracieux couronnement d’une haute fortune. […] Cette remise aux mains d’un autre, ce laissons aller, ce et puis je ne m’en occupe plus qui est au creux des plus hautes fortunes. […] À la fortune. […] Leurs fortunes sont conjointes.

1308. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

Il avait peur, se sentait subitement inférieur à sa fortune et tout près d’en être écrasé. […] sa propre fortune, la réussite de sa propre ambition, la pitance de son propre appétit. […] Brutalement il comprit la source de sa fortune. […] Il tenait son titre de son grand-père, général sous le premier Empire, et sa fortune de son père, qui l’avait conquise honorablement dans l’industrie. […] Sa confiance en lui-même, son aplomb convaincu, sa grande fortune, imposaient au monde, et il ne manquait pas de gens qui l’admiraient.

1309. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

Un viveur parisien, un peu déclassé, un inutile de grand cercle, parvient à se faire nommer préfet ; sa préfecture lui donnera des ressources pour réparer les brèches que l’existence mondaine a faites à sa fortune, et cela pour ne pas infliger à sa femme une réduction du train de sa maison. […] L’Écolier répond : — Nous transfrelons le Séquane en dilucule, et crépuscule, nous déambulons par les compiles de l’urbe, nous despumons la verbocination Latiale… et si par forte fortune il y a rarité de pécune en nos marsupies pour l’escot, nous dimittons nos codices et vestes opignerées, prestolants les tabellaires à venir des pénates et lares patriotiques. […] Comme, en son genre, il ne manquait ni d’esprit, ni même de cynisme, il disait encore « qu’être avare n’était petit qu’avec une petite fortune, et que la sienne ne l’était pas ». […] Je suis resté fidèle à mes amis, dans la mauvaise fortune plus encore que dans la prospérité.

1310. (1922) Le stupide XIXe siècle, exposé des insanités meurtrières qui se sont abattues sur la France depuis 130 ans, 1789-1919

Sa fortune, depuis cent ans, est liée à la conception de l’animalité humaine et de l’origine animale de l’homme, bourde immense que nous retrouverons. […] Il peut se rencontrer, par fortune, un bûcheron qui ait quelques notions d’horlogerie ; mais, même s’il a ces notions, sa hache ne lui permet pas de les appliquer aux rouages délicats de la montre. […] Le déterminisme, chapitre détaché du positivisme, mais qui eut, pendant une cinquantaine d’années, une fortune et une vogue supérieures à celles du positivisme, n’envisage pas la question du pourquoi des choses. […] La fortune d’un tel touche-à-tout dans le régime des assemblées est certaine. […] Prenez un révolutionnaire, trempez-le, pendant plusieurs années, dans l’eau tiède des honneurs et de la fortune, et vous obtenez un libéral.

1311. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

Avec un esprit fin et pénétrant comme le sien, prompt à s’assimiler les personnes et les objets, vous comprenez quelle fortune d’observations il vient d’amasser et rapporte à la maison. […] Voici M. de Virieux, un jeune niais qui joue avec fatuité les commissionnaires intimes ; M. de Bernheim, un faux artiste qui fait de la peinture de société ; M. de Castellas qui, pour contenter sa vanité quinquagénaire, se décore d’aventures amoureuses qu’il n’a pas eues et pourrait être condamné pour port illégal de bonnes fortunes. […] ———— Beaucoup de littérateurs se plaignent de manquer du loisir que donne la fortune, d’être hâtés sans cesse par la pauvreté, de ne pouvoir enfin travailler à leurs heures. « Ah ! s’ils avaient de la fortune ! […] Mais la fortune a bien aussi ses inconvénients.

1312. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

Le comique, c’est à la fois l’extravagance de la volonté sans but et sans règle, qui échoue parce qu’elle vogue à la dérive à travers l’absurde, et la sécurité de l’homme fort, qui, se sentant bardé de fer et cuirassé contre sa propre fortune, brave les contretemps et rit quand son vaisseau sonne contre un écueil. […] Ses personnages, comiques non pas pour autrui seulement, mais surtout pour eux-mêmes, ne paraissent jamais sérieusement malheureux, parce que, étant au-dessus de leur sottise, ils sont au-dessus de leur fortune.

1313. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre I. Principe des mœurs sous l’Ancien Régime. »

Un homme, pour suivre le roi à la chasse, une femme pour être présentée à la reine, doit établir au préalable, devant le généalogiste et par pièces authentiques, que sa noblesse remonte à l’an 1400  Ensuite c’est une certitude de fortune ; il n’y a que ce salon pour être à portée des grâces ; aussi bien, jusqu’en 1789, les grandes familles ne bougent pas de Versailles, et, nuit et jour, sont à l’affût. […] Hommes et femmes, on les a choisis un à un ; ce sont tous des gens du monde accomplis, ornés de toutes les grâces que peuvent donner la race, l’éducation, la fortune, le loisir et l’usage ; dans leur genre, ils sont parfaits.

1314. (1864) Cours familier de littérature. XVII « Ce entretien. Benvenuto Cellini (2e partie) » pp. 233-311

Il était évident que son génie aspirait à s’égaler à la fortune de son protecteur, et que les lauriers grandioses de Michel-Ange l’empêchaient de dormir. […] IX Benvenuto, mobile et mécontent, laissa à Paris son hôtel et ses ateliers à Ascagne, et partit pour l’Italie, en passant par Plaisance ; il fut reconnu par le bâtard du pape Farnèse, Pier Luigi, et, faisant contre mauvaise fortune bon cœur, il alla le voir.

1315. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

Ils ressemblent à ces femmes bien élevées et sans richesses, qui ne peuvent souffrir un époux vulgaire, et à qui une union mieux assortie est interdite par la fortune. […] « Je crois être dans le vrai en insistant sur cette médiocrité de fortune et de condition rurale dans laquelle était né Virgile, médiocrité, ai-je dit, qui rend tout mieux senti et plus cher, parce qu’on y touche à chaque instant la limite, parce qu’on y a toujours présent le moment où l’on a acquis et celui où l’on peut tout perdre : non que je veuille prétendre que les grands et les riches ne tiennent pas également à leurs vastes propriétés, à leurs forêts, leurs chasses, leurs parcs et châteaux ; mais ils y tiennent moins tendrement, en quelque sorte, que le pauvre ou le modeste possesseur d’un enclos où il a mis de ses sueurs, et qui y a compté les ceps et les pommiers ; qui a presque compté à l’avance, à chaque récolte, ses pommes, ses grappes de raisin bientôt mûres, et qui sait le nombre de ses essaims.

1316. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

Les ouvriers grecs n’alloient point apparemment chercher fortune au service du roi des perses, aussi volontiers que le faisoient les soldats grecs. […] Quel homme devoit être Agrippa qui fit une fortune si prodigieuse sous un prince aussi bon juge du mérite que l’étoit Auguste.

1317. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Granier de Cassagnac » pp. 277-345

Comme le berger de Virgile, ils honoraient ces pénates de bois, en attendant que la fortune les fît d’or. » Tel fut Cassagnac au début de sa vie politique, et tel il a été toujours. […] On y voit Louis-Philippe lui-même, fatigué, anxieux, incertain, portant mal cette couronne qu’il n’a pas fortement saisie et prêt à l’abandonner, comme il abandonna bientôt les précautions qu’il avait prises d’abord contre l’avenir et les trahisons de la fortune.

1318. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Empereurs ou rois, qui n’ont plus rien à désirer du côté de la fortune, n’y trouvent rien aussi qui gêne leurs plaisirs, et nés, et destinés à mourir dans leur pourpre, rien ne traverse, ni ne partage, ni ne rompt leur passions, si ce n’est les obstacles qu’elles se créent à elles-mêmes en courant à leur satisfaction. […] On pourrait aisément retourner toute l’argumentation de Brunetière et prouver que les souverains sont moins libres que leurs sujets ; les bonnes fortunes leur sont faciles, l’amour-passion leur est interdit, et ils n’ont pas l’air d’en souffrir beaucoup.

1319. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Les riches ne considèrent plus leur fortune comme un moyen de supériorité légale, mais comme un instrument de tyrannie ; le peuple qui sous les gouvernements héroïques ne réclamait que l’égalité, veut maintenant dominer à son tour ; il ne manque pas de chefs ambitieux qui lui présentent des lois populaires, des lois qui tendent à enrichir les pauvres. […] Mais il sentit les inconvénients de cette méthode négative : d’ailleurs un revers de fortune l’avait mis hors d’état de faire des frais d’impression si considérables.

1320. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

Elle l’aimait lorsqu’il était plus grand que sa fortune ; et elle l’aimait encore davantage lorsqu’il était plus grand que ses malheurs.

1321. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

L’amitié du père Lefebvre pour le jeune Daru avait commencé à Tournon dès l’année 1776, quand celui-ci n’avait que neuf ans ; elle dura jusqu’à la fin, doucement flattée et enorgueillie dans l’élévation et la juste fortune de celui à qui il écrivait en 1788 : « Votre gloire doit faire la consolation de mes cheveux blancs, ne négligez rien pour la rendre solide. » À cet effet, le père Lefebvre n’épargnait pas à son ancien élève les conseils du sage et de l’homme de goût : Voulez-vous que je tous parle franchement, mon cher Daru ?

1322. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Le président Hénault. Ses Mémoires écrits par lui-même, recueillis et mis en ordre par son arrière-neveu M. le baron de Vigan. » pp. 215-235

Heureux dès sa jeunesse, ayant reçu du ciel la fortune, la bonne mine, le désir de plaire et l’art de jouir, il vécut de bonne heure dans le meilleur monde ; il respira, sur la fin du règne de Louis XIV, cet air civilisé le plus doux et le plus tempéré pour lequel il était fait ; il continua sa carrière fort avant dans le xviiie  siècle sans en partager les licences ni les ardeurs, fut l’ami intime et le familier de tous les gens en place, le patron ou l’amphitryon des gens de lettres, parmi lesquels il prit un rang distingué que chacun s’empressa de lui offrir.

1323. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Une petite guerre sur la tombe de Voitture, (pour faire suite à l’article précédent) » pp. 210-230

Sensuel et prudent, il avait dû commencer par établir sa fortune et son bien-être ; il s’était attaché pour cela à des prélats qui l’avaient pourvu de bénéfice, et en dernier lieu à l’évêque du Mans, M. de Lavardin, qui l’en avait comblé : depuis des années, il vivait grassement dans les obscures délices et la meilleure chère du Maine, en ecclésiastique épicurien.

1324. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — II » pp. 375-394

Puis, quand il vit la guerre inévitable, il eut les pronostics les plus sombres ; il lui semblait que Frédéric s’était engagé dans un labyrinthe d’où il aurait peine à sortir, qu’il s’était remis de gaieté de cœur dans une situation extrême : « Je vois que dans peu, lui écrivait-il, tout ce qu’un État a de précieux sera abandonné à la fortune, les biens, la vie, la réputation, la gloire, la sûreté de la société. » Frédéric lui fait vingt réponses meilleures les unes que les autres : On commet, mon cher frère, deux sortes de fautes : les unes par trop de précipitation, les autres par trop de nonchalance.

1325. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

Je constate seulement ces filiations tardives et assez inattendues, ces vicissitudes et ces retours de fortune et de destinée, et j’y vois surtout, j’ose l’avouer, une image de la fluctuation et du caprice des pensées humaines.

1326. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — II » pp. 126-147

Avec une fortune modique, Marolles sut amasser deux fois des recueils dignes des cabinets royaux.

1327. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

Dans le grand nombre d’idées et de projets d’amélioration qu’il a agités, le temps a fait son triage, et il en est vraiment qui, par un singulier tour de roue de la Fortune, semblent devenus des à-propos.

1328. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Ce qui la séduisit surtout dans cette union fut la certitude que sa petite sœur ne la quitterait pas, qu’elle resterait maîtresse de lui prodiguer ses soins et de lui servir de mère. » « On cita, parmi les seigneurs russes dont ce mariage avait frustré les vœux, un jeune homme auquel la naissance, la fortune et de rares qualités d’esprit ouvraient une grande destinée, le baron, depuis, comte Strogonof.

1329. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. De Pontmartin. Causeries littéraires, causeries du samedi, les semaines littéraires, etc. »

Grâce à Dieu, cette moralité de convention est chaque jour démentie dans la réalité et dans la pratique : les filles de femmes célèbres et même trop célèbres, de celles qui ont été le plus bruyamment admirées ou critiquées, ont chance, si elles sont belles et pleines de mérite, de devenir, selon les rangs et les fortunes, ou femmes d’avocats distingués, ou marquises et même duchesses.

1330. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite.) »

Il craint toute espèce de dépendance, et par cette raison il a mieux aimé, étant en France, gagner sa vie en copiant de la musique, que de recevoir les bienfaits de ses meilleurs amis qui s’empressaient de réparer sa mauvaise fortune.

1331. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite et fin.) »

Outre le droit qu’elle a sur mon admiration et ma reconnaissance, elle en a un tout particulier sur cet agréable travail33, entrepris sous ses auspices : je lui en fais l’hommage avec mystère, parce que je ne puis le faire à découvert ; ceux qui ont éprouvé le doux transport qu’excite dans l’occasion le souvenir d’un bienfait signalé, ne désapprouveront pas que mon cœur cherche à se soulager lorsqu’il ne peut se satisfaire ; ils ne seront pas surpris de me voir ajouter que dans mes regrets d’être obligé de taire l’illustre Objet de sentiments si légitimes, si naturels, et qui ne demandent qu’à se produire, je me console quelquefois par l’espérance qu’on le devinera, sans que j’aie couru le risque de tomber dans le malheur de lui déplaire. » On me dira que c’est là une Épître dédicatoire ; mais cette Épître ne portant aucun nom, elle n’est évidemment pas pour la montre ; c’est la reconnaissance toute pure qui s’épanche, et tout ce que nous savons, c’est que l’humble auteur anonyme, du temps qu’il était moine, ayant été rencontré par Mme de Boufflers dans le jardin d’un couvent où elle était entrée par hasard, avait profité de l’occasion pour l’intéresser au récit de ses malheurs ; il lui avait dit tous les dégoûts qu’il avait à essuyer dans sa profession ; et elle, touchée de son sort, l’avait fait relever de ses vœux, avait pris soin de sa fortune et, avec la liberté, lui avait rendu le bonheur.

1332. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Lettres inédites de Michel de Montaigne, et de quelques autres personnages du XVIe siècle »

Elle le fut à moi et ne l’avait été que deux fois auparavant, quelques années y avait, à M. de Lansac et fraîchement à M. de Biron, maréchal de France, en la place duquel je succédai ; et laissai la mienne à M. de Matignon, aussi maréchal de France… La fortune voulut part à ma promotion par cette particulière circonstance qu’elle y mit… Alexandre dédaigna les ambassadeurs corinthiens qui lui offraient la bourgeoisie de leur ville ; mais quand ils vinrent à lui déduire comme Bacchus et Hercule étaient aussi en ce registre, il les en remercia gracieusement. » Montaigne s’égaye et badine.

1333. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite et fin.) »

L’on n’est pas toujours heureux à la guerre ; c’est un métier où la fortune met beaucoup du sien.

1334. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

« Jeune, avec du cœur, de l’âme, de l’esprit, de l’instruction, et ce qu’il faut de fortune pour vivre indépendant », il va dans le monde ; il y a des succès et y est aimé.

1335. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite.) »

On a ainsi le duc d’Orléans, Mirabeau, La Fayette, Mathieu de Montmorency, le futur consul Lebrun, ce dernier très agréablement dessiné ; car Malouet s’entend mieux à montrer ces caractères moyens qu’à exprimer les personnages extrêmes : « Enfin un homme dont la fortune s’est élevée depuis au niveau de ses talents, dont les opinions s’étaient manifestées pour la conservation des trois Ordres, arrive comme vaincu dans le camp des vainqueurs ; et là, sans se mêler jamais à aucune autre discussion que celle des finances, il abandonne la Constitution à sa triste destinée dans toutes ses conséquences politiques ; mais il la soutient, il la défend dans tout ce qui est relatif aux impôts, aux monnaies, aux assignats, aux recettes et aux dépenses de l’État.

1336. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

. — « Les traits, a dit La Bruyère, découvrent la complexion et les mœurs », et il ajoute : « mais la mine désigne les biens de fortune ».

1337. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Ce qui n’est pas douteux, c’est que vers 1799 la jeune Marceline accompagna sa mère à la Guadeloupe, où elles comptaient retrouver un parent qui y avait fait fortune.

1338. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « QUELQUES VÉRITÉS SUR LA SITUATION EN LITTÉRATURE. » pp. 415-441

On craint de compromettre désormais une fortune qu’on sent tenir un peu du caprice et du hasard : on en vient, si l’on n’y prend pas garde, au silence prudent.

1339. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

Les amants que chaque femme prend et laisse à la file ; les fureurs au théâtre pour ou contre la Lemaure et la Pelissier ; le duc d’Épernon, qui, par manie de chirurgie, va trépanant à droite et à gauche, et tue les gens pour passer son caprice d’opérateur ; la mode soudaine des découpures, comme plus tard celle du parfilage, mais poussée au point de découper des estampes qui coûtent jusqu’à 100 livres la pièce : « Si cela continue, ils découperont des Raphaël ; » la manière dont on accueille les bruits de guerre : « On parle de guerre ; nos cavaliers la souhaitent beaucoup, et nos dames s’en affligent médiocrement ; il y a longtemps qu’elles n’ont goûté l’assaisonnement des craintes et des plaisirs des campagnes : elles désirent de voir comme elles seront affligées de l’absence de leurs amants ; » on entend tous ces récits fidèles, on assiste à cette décomposition du grand règne, à ce gaspillage des sentiments, de l’honneur et de la fortune publique ; on s’écrie avec la généreuse Mlle Aïssé : « A propos, il y a une vilaine affaire qui fait dresser les cheveux à la tête ; elle est trop infâme pour l’écrire ; mais tout ce qui arrive dans cette monarchie annonce bien sa destruction.

1340. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Boileau »

Le mot de Voltaire, Ne disons pas de mal de Nicolas, cela porte malheur, fit fortune et passa en proverbe ; les idées positives du xviiie  siècle et la philosophie condillacienne, en triomphant, semblèrent marquer d’un sceau plus durable la renommée du plus sensé, du plus logique et du plus correct des poëtes.

1341. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre V. Des ouvrages d’imagination » pp. 480-512

L’ordre social qui, chez les anciens, créait des esclaves, creusait encore plus avant l’abîme de la misère, élevait encore plus haut la fortune, et donnait à la destinée humaine des proportions vraiment théâtrales.

1342. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre II. De l’expression »

C’est Progné « qui caracole, frisant l’air et les eaux », c’est Perrette qui « d’un oeil marri quitte sa fortune à terre répandue », c’est le souper du croyant « qui s’envole » avec la colombe.

1343. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

Ce revenu de trois mille francs fut la seule fortune de Fénelon jusqu’à l’âge de quarante-deux ans.

1344. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

Adèle, ambitieuse et sèche, épouse un vieux pour sa fortune, la dévore en quelques années et, après toutes sortes d’intrigues malpropres pour pousser son mari, se retrouve veuve et sans un sou, et se réfugie à Paris, où nous savons bien ce qu’elle deviendra.

1345. (1890) La fin d’un art. Conclusions esthétiques sur le théâtre pp. 7-26

On sait la fortune du Moulin-Rouge, du Nouveau-Cirque et de ses lions, de la Plaza et de ses taureaux.

1346. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XX. La fin du théâtre » pp. 241-268

On sait la fortune du Moulin-Rouge, du NouveauCirque et de ses kanguroos.

1347. (1887) Discours et conférences « Réponse au discours de M. Louis Pasteur »

Si plus tard le travail amena pour lui la fortune, ce fut à son insu, sans qu’il l’eût voulu et presque malgré lui.

1348. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

Le cas s’est présenté pour la Semaine de Guillaume du Bartas, qui fit surtout fortune en Allemagne, et pour les Contes fantastiques d’Hoffmann, qui furent mieux accueillis en deçà qu’au-delà du Rhin.

1349. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

Une fortune considérable pour le temps, et qui montait, dit-on, à plus de trois cent mille livres, lui procurait une honorable indépendance.

1350. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

L’honneur domestique et la religion de la famille respirent dans ces recommandations affectueuses à ses sœurs : Avant tout, n’épousez que des hommes dont la conduite et les sentiments puissent aller avec les vôtres ; eussent-ils peu de fortune, pourvu qu’ils y suppléent par un état ou une capacité de travail, ne vous arrêtez pas à cet obstacle.

1351. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Diderot. (Étude sur Diderot, par M. Bersot, 1851. — Œuvres choisies de Diderot, avec Notice, par M. Génin, 1847.) » pp. 293-313

Cette médiocrité dans tous les genres est la suite d’une curiosité effrénée et d’une fortune si modique, qu’il ne m’a jamais été permis de me livrer tout entier à une seule branche de la connaissance humaine.

1352. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

Un Français réfugié, Jordan de Berlin, qui le visita en 1733, parle de lui en des termes qui nous le font entrevoir sous cet aspect universellement respecté : « M. de Fontenelle est magnifiquement logé ; il paraît très à son aise, et richement partagé des biens de dame Fortune.

1353. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Théodore Leclercq. » pp. 526-547

Il se dit à lui-même comme il fait dire sensément à l’un de ses personnages : « Jules sait fort bien occuper son temps ; il a de la fortune, des talents : que ferait-il d’un emploi ?

1354. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Notice historique sur M. Raynouard, par M. Walckenaer. » pp. 1-22

Le moment pour Raynouard de faire son entrée en littérature n’était pas venu ; il retourna courageusement dans son pays reprendre l’exercice de sa profession d’avocat, et réparer les brèches que cette interruption avait faites à sa petite fortune.

1355. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le Brun-Pindare. » pp. 145-167

Un second coup d’un autre genre qu’il éprouva et qui acheva de rompre ses projets de poèmes et de longs travaux, fut la banqueroute du prince de Guémené, chez qui il avait placé sa modique fortune (1783).

1356. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — II. (Suite et fin.) » pp. 341-361

Ce Simple discours fut incriminé : « Sachez, avait-il dit, qu’il n’y a pas en France une seule famille noble, mais je dis noble de race et d’antique origine, qui ne doive sa fortune aux femmes : vous m’entendez. » C’était là une impertinence historique, et qui parut attentatoire à tout l’ordre de la monarchie.

1357. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Michaud, de l’Académie française. » pp. 20-40

Michaud s’enflamma, fit des vers qui furent accueillis, et, encouragé par un sourire, il ne tarda pas à venir à Paris tenter la fortune des lettres.

1358. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — II. (Fin.) » pp. 308-328

Mme d’Épinay, dans les derniers temps de sa vie, s’était vue atteinte dans sa fortune ; les réformes que M. 

1359. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — II. (Fin.) » pp. 350-370

Il en concluait qu’il fallait recourir « aux idées immuables », à celles qui « conviennent également aux moments de triomphe et aux jours de défaite, aux temps de la fortune et à ceux de l’adversité ».

1360. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Saint-Simon »

Il n’est pas moins certain qu’il y a eu divers bâtards de princes, de seigneurs et de particuliers qui se sont élevés, par leur mérite, au-dessus du sort de leur origine, et qui ont été revêtus de biens et d’emplois et quelques-uns même d’éclatants ; mais, si on les examine, on les trouvera inhabiles à tous autres biens qu’à ceux de la fortune, et que parmi tout le lustre acquis par leur mérite et la protection de leurs parents, les lois n’ont pas fléchi en leur faveur… De là ces noms si communs dans les plus considérables illégitimes, le bâtard de Bourbon, le bâtard d’Orléans, le bâtard de Rubempré, et tant d’autres de princes, de seigneurs et de particuliers, appelés ainsi de leur temps, sans qu’ils eussent d’autres dénominations, par laquelle ils sont transmis jusqu’à nous dans les histoires. » Tel est, pour le mâle et pratique esprit de Saint-Simon, le point de départ du Mémoire sur les légitimés.

1361. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rivarol » pp. 245-272

Il eut l’ivresse de cette fortune.

1362. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « X. Ernest Renan »

Parmi les trois ou quatre enfants gâtés (qui resteront marmots) de ce siècle gâté, et que la Fortune a pris par le menton pour les faire nager, M. 

1363. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — L’inter-nationalisme »

  De même que le sens réel de l’individualisme, scruté depuis les temps historiques, apparaît presque toujours faussé, la notion de solidarité nouvellement découverte et formulée, a été trahie par ceux-là même qui en firent la fortune.

1364. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XI : M. Jouffroy moraliste »

Aujourd’hui, il a tout perdu, et il faut qu’il relève ce que la fatalité de la fortune a détruit. » II Cette reconstruction est la découverte de la destinée humaine.

1365. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre X. »

Les frères d’Eschyle, les deux guerriers dignes de son nom par leur courage, comme son courage à lui-même était digne de son génie, le pressaient un jour d’écrire un hymne à l’honneur d’Apollon ; il leur répondit « que la chose était faite dès longtemps, et pour le mieux, par le poëte Tynnichos ; que si à l’œuvre de celui-ci il opposait maintenant une œuvre nouvelle et sienne, elle aurait même fortune que les statues récentes des dieux, en présence de leurs statues antiques : c’est-à-dire que celles-là, rudes et simples, sont réputées divines, et que les autres, plus jeunes et travaillées avec plus d’art, sont admirées, mais qu’elles ont moins du dieu en elles. » Devant Eschyle, son ancien de si peu d’années, Pindare dut raisonner de même ; et, content de sa gloire lyrique renouvelée sous tant de formes, liée à tant de faits royaux et domestiques, il n’avait pas à essayer cette autre gloire du théâtre élevée si haut dans Athènes.

1366. (1896) Les Jeunes, études et portraits

Le mot ne fit pas fortune, quoiqu’il fût en isme, qu’il eût été proposé dans une préface, et imprimé en lettres capitales. […] Son imagination s’est enflammée au récit de la surprenante fortune de Napoléon. Il est travaillé lui aussi du désir de faire fortune. […] Il a gaspillé sa fortune et ce qui lui restait de santé. […] Cette rapide et brillante fortune s’explique par bien des causes.

1367. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

Il y a quelque chose de plus extraordinaire que la personne de Scarron et que la fortune de Françoise d’Aubigné : c’est le mariage du cul-de-jatte et de la « belle Indienne », future maîtresse de la France. […] Et c’est pourquoi il faut la plaindre malgré son extraordinaire fortune. […] Et, malgré moi, je crois lui voir des airs avantageux d’homme à bonnes fortunes, un contentement de soi, qu’il n’a peut-être pas. […] C’est le vrai Pierre, qui a pu se tirer des mains des Espagnols, qui est allé fouiller l’or au Mexique et qui, devenu riche, vient chercher les siens pour leur faire partager sa fortune. […] Cette Némésis étant quelque chose d’intelligent et de vivant, on pouvait l’apaiser en allant au-devant de ses exigences, en lui abandonnant de bonne volonté une partie de son bien ; et c’est pourquoi Polycrate jette son anneau à la mer, voulant conjurer par là la mauvaise fortune.

1368. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Il y a bien, dans le théâtre d’Emile Augier, deux ou trois fils de banquiers qui ne peuvent supporter cette idée que leurs pères doivent leur fortune à des manœuvres réprouvées par la morale, encore que tolérées par le Code, mais qui n’en perdent pourtant pas le sommeil et n’en continuent pas moins à mener assez joyeuse vie. […] Par une fortune singulière, il se trouve qu’une partie considérable de la vie de Molière nous est presque entièrement inconnue, et que, dans celle que nous connaissons, beaucoup de points demeurent obscurs. […] Il chasse à l’héritière ; il prétend épouser la fille d’un banquier brésilien dont il sait que l’immense fortune a une origine malhonnête… Mais attendez ! […] On nous apprend qu’il a donné quarante mille francs, le tiers de sa petite fortune, à un ami pour lui sauver l’honneur. […] Je ne rappelle pas le mot admirable de Bossuet : qu’« il y a à l’origine de toutes les grandes fortunes des choses qui font frémir ».

1369. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

Quand Ariste lui révèle que tout cela était un stratagème pour faire que Trissotin « se découvrît » et que rien de la fortune de la famille n’est perdu, elle se réjouit, non pas du retour de la fortune, mais de la confusion où cela va jeter Trissotin : … J’en ai la joie au cœur, Par le chagrin qu’aura ce lâche déserteur. […] Philaminte a-t-elle douté un instant de l’authenticité des deux lettres qui lui annoncent la perte de toute sa fortune ? […] Et, comme vous le marquez si bien, elle ne se réjouit pas du retour de la fortune, mais de la confusion de Trissotin, Par le chagrin qu’aura ce lâche déserteur. […] Elle montre suffisamment, à l’annonce de ses revers de fortune, une âme solide, stoïque même, et dès cet instant elle échappe entièrement au ridicule. […] Maurice Albert, pour se montrer digne du nom très honorable qu’il a la fortune de porter, continue son Histoire du théâtre français secondaire depuis 1725 jusqu’à nos jours.

1370. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

Mortimer, mené au billot, dit avec un sourire49 : « Il y a un point dans la roue de la Fortune où les hommes n’atteignent — que pour rouler en bas la tête la première. […] Base Fortune, now I see that in thy wheel There is a point to which when men aspire, They tumble headlong down. […] So dearly I respected both your fame And quality, that I would first have perish’d In my sick thought, than e’er have given consent To have undone your fortunes, by inviting A marriage with so mean a one as I am.

1371. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

On peut s’étonner aussi qu’après les chefs-d’œuvre de Corneille, la fortune de ce grand art eût continué d’être douteuse, et que Corneille lui-même n’eût pas trouvé dans sa sublimité le secret de ne point reculer, en tant d’endroits de ses ouvrages, en deçà des réformes de Malherbe. […] On fermait par des louanges la bouche qui pouvait parler, et, pour conjurer la critique, on prodiguait aux lecteurs les caresses dans des préfaces où l’on intéressait leur vanité à la fortune du livre. […] Le roi vient au secours du talent sans fortune ; il ne gage plus les successeurs des bouffons de ses ancêtres96.

1372. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — II. Duclos historien » pp. 224-245

Un compliment adressé à ce ministre et d’un heureux tour avait singulièrement réussi : « Tous les dépôts, disait Duclos, m’ont été ouverts par les ordres de M. le comte de Maurepas, à qui le roi a confié le département des lettres, des sciences et des arts, comme s’il eût consulté ceux qui les cultivent. » Ces jolis mots ont toujours faveur en France, et, mis en tête même d’un livre grave, ils contribuent à sa fortune.

1373. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

Dans cette petite personne si mignonne, si distinguée, si au-dessus de sa condition, si glorieuse tout bas et si raisonneuse, dans cette Marianne du roman il y a quelque chose de Mme de Maintenon jeune et guettant en tout honneur la fortune ; mais c’est Mme de Maintenon rapetissée et vue en miniature, avec plus de grimace qu’elle n’en eut jamais.

1374. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

. — Le fondement de ma fortune a pour texte ces deux mots, que j’ai déjà déclarés à plusieurs personnes : Il y a un métier à faire où il y a prodigieusement à gagner, c’est d’être parfaitement honnête homme.

1375. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — III » pp. 132-153

Lui, il était plutôt un adversaire de la noblesse, bien que la sienne fût bonne, et il n’entrait pas dans les doléances qu’il entendait faire autour de lui : « Les gentilshommes, disait-il, qui se plaignent en leur qualité de n’être pas assez accommodés des biens de la fortune, sont de pauvres brochets de l’étang qui n’ont pas assez de carpes à manger ; non, il n’y a à plaindre que ceux qui manquent selon la nature. » D’Argenson aimait à la fois la royauté et le peuple ; il voulait le bien du public, sans être pour cela républicain : « Les républiques n’ont point de tête ; les monarchies n’ont bientôt plus de bras, car la tête les énerve.

1376. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire du règne de Henri IV, par M. Poirson » pp. 210-230

Mais, même en ne réussissant dès le premier jour qu’à demi, il montra déjà qu’il avait pour lui : la fortune de la France et qu’il était le roi de l’à-propos.

1377. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « François Villon, sa vie et ses œuvres, par M. Antoine Campaux » pp. 279-302

Si Villon a eu bien des traverses et des mésaventures dans sa vie, il a eu bien du bonheur après sa mort, le plus grand bonheur et la meilleure fortune pour un poète : il a fait école ; il a fait tradition, et a eu même sa légende.

1378. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

Que de fortunes diverses, que de hasards !

1379. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. » p. 232

Dans les moments de calamité de fortune, vous voyez que c’est un secours immense, et je vous embrasse de toute ma tendresse pour la manière dont vous venez de vous le prouver à vous-mêmes… » Les lettres à Mme Pauline Duchambge ont un caractère particulier.

1380. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [I] »

C’est alors que, sur le déclin du moyen âge, un poème qui ne semblait point destiné d’abord à la grande fortune qu’il eut depuis, le Roman de la Rose, causa, parmi les esprits cultivés, une vive distraction, et apporta dans le courant des idées poétiques une perturbation étrange ; ce qui n’était d’abord qu’un accident devint (comme cela s’est vu souvent en France) l’occasion d’un entraînement général, d’une véritable révolution dans le goût.

1381. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

La fortune, en effet, qu’il obtint plus tard de son chef par héritage d’un oncle, n’était pas près de lui venir, et, comme tous les fils de famille, il sentait quelque gêne de sa dépendance.

1382. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ULRIC GUTTINGUER. — Arthur, roman ; 1836. — » pp. 397-422

Arthur marié, puis veuf et libre avec une grande fortune, devient la proie d’une passion qu’il ne fait qu’indiquer en éclairs énergiques, sinistres, d’une de ces passions tardives dont Properce disait : Sæpe venit magno fœnore tardus Amor, et qui le laisse dans un état de consternation et de ruine morale, sujet de ce livre : nous assistons aux diverses phases de la réparation, de la guérison.

1383. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DE LA LITTÉRATURE INDUSTRIELLE. » pp. 444-471

Les talents nouveaux et les jeunes espoirs n’ont plus trouvé de groupe déjà formé et expérimenté auquel ils se pussent vallier ; chacun a cherché fortune et a frayé sa voie au hasard ; plusieurs ont dérivé vers des systèmes tout à fait excentriques, les seuls pourtant qui offrissent quelque corps tant soit peu imposant de doctrine.

1384. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

Arrivé dans le Nord, sa première idée fut qu’il n’avait pour ressource que son pinceau, et, comme tant d’honorables émigrés, il se préparait à en vivre ; mais la fortune changea : il put garder l’épée, et, au service de la Russie, il parvint graduellement au rang de général.

1385. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LOYSON. — POLONIUS. — DE LOY. » pp. 276-306

A la voix de la Fortune, Il n’ira point de Neptune Tenter les gouffres mouvants, Ni, sur la foi des étoiles, Livrer d’intrépides voiles A l’inconstance des vents… C’est de lui toute cette ode, qui a pour titre : les Goûts du Poëte, et qui est inspirée du Quem tu Metpomene semel, reste charmant de ton, de sobriété, de sens ferme et doux ; c’est de la bonne poésie du temps de Chaulieu, d’il y a vingt-cinq ans ou d’il y a un siècle.

1386. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

L’un d’eux, Hébroïn, essaye encore de maintenir en honneur l’idée de vieille race et de défendre le pouvoir sacré de ses rois ; mais, après une lutte vigoureuse et des fortunes très-diverses, il succombe ; un de ces leudes dont il combattait, l’avénement lui fend la tête d’un coup de hache. « On peut peser à loisir, écrit l’historien de la Royauté, les crimes, le génie, les vertus et les vices de cet homme extraordinaire : bornons-nous à dire que la hache de son assassin brisa toute la race des Mérovéades.

1387. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE PONTIVY » pp. 492-514

Le peu de fortune qu’elle avait, et l’envie de sa tante de se débarrasser d’une pupille de cet âge, décidèrent à l’accorder.

1388. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (6e partie) » pp. 129-176

C’était un de ces admirateurs de la fortune antique, qui n’adoraient en elle que la divinité du succès.

1389. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIe Entretien. Chateaubriand »

Je l’avais considérablement agrandie depuis ; les désastres très-immérités de ma fortune (quoi qu’on en dise) m’ont forcé de la vendre à bas prix, six cent mille francs, pour payer mes créanciers.

1390. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

Ce que les autres hommes n’obtiennent que par un génie, une fortune ou un effort exceptionnels : le souvenir de la postérité, la mention de leurs noms dans les annales futures, les princes en sont sûrs par cela seul qu’ils sont venus au monde, et si tout est vanité, comme je n’en doute point, cela est pourtant une des vanités les plus recherchées des mortels.

1391. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIII. Retour de Molière à Paris » pp. 225-264

Molière déployait une verve endiablée dans ces jeux, qui, de son propre aveu, contribuèrent singulièrement à sa fortune.

1392. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7761-7767

Il flatte notre vanité par l’idée de la préférence que la fortune nous donne, & de l’attention que les autres ont sur notre bonheur ; il satisfait notre curiosité, en nous donnant un spectacle.

1393. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

Villon et Marot sont deux poètes sortis du peuple ; le caprice de la fortune a laissé l’aîné dans la bassesse de sa naissance, et a élevé le cadet jusqu’à la domesticité de la cour.

1394. (1900) Poètes d’aujourd’hui et poésie de demain (Mercure de France) pp. 321-350

À l’effort initial des poètes qui, les premiers, tentèrent la fortune d’une poésie nouvelle se joignirent bientôt d’autres efforts.

1395. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XI. La littérature et la vie mondaine » pp. 273-292

La cour, les ruelles, les salons, par qui cette action s’exerce, sont toujours le rendez-vous d’une société triée ; aristocratie de naissance, aristocratie de fortune, aristocratie de talent s’y rencontrent et y fraternisent.

1396. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVIII. Formule générale et tableau d’une époque » pp. 463-482

et, en même temps que grandissent la fortune et le savoir du Tiers-Etat, la littérature tend aussi à s’embourgeoiser.

1397. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chansons de Béranger. (Édition nouvelle.) » pp. 286-308

La troisième strophe semble atteindre un moment au sublime : Un conquérant, dans sa fortune altière, Se fît un jeu des sceptres et des lois ; Et de ses pieds on peut voir la poussière Empreinte encor sur le bandeau des rois.

1398. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Gil Blas, par Lesage. (Collection Lefèvre.) » pp. 353-375

L’auteur, dans ce récit étendu, développé et facile, a voulu représenter la vie humaine telle qu’elle est, avec ses diversités et ses aventures, avec les bizarreries qui proviennent des jeux du sort et de la fortune, et surtout avec celles qu’y introduit la variété de nos humeurs, de nos goûts et de nos défauts.

1399. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « L’abbé Galiani. » pp. 421-442

Les ministres changent, se succèdent : sa fortune, bonne assurément, mais non pas au niveau de ses talents, s’arrête au même point.

1400. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Mme de Caylus et de ce qu’on appelle Urbanité. » pp. 56-77

Le mari qu’on lui donna, M. de Caylus, très ordinaire pour la fortune, était, à d’autres égards, des moins dignes d’elle.

1401. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Condorcet, nouvelle édition, avec l’éloge de Condorcet, par M. Arago. (12 vol. — 1847-1849.) » pp. 336-359

André Chénier, témoin des mêmes actes, et jugeant Condorcet dans la mêlée comme un transfuge de sa cause, de la cause des honnêtes gens, s’écriait : C…, homme né pour la gloire et le bien de son pays, s’il avait su respecter ses anciens écrits et su rougir devant sa propre conscience ; homme dont il serait absurde d’écrire le nom parmi cet amas de noms infâmes, si les vices et les bassesses de l’âme ne l’avaient redescendu au niveau ou même au-dessous de ces misérables, puisque ses talents et ses vastes études le rendaient capable de courir une meilleure carrière ; qu’il n’avait pas eu besoin, comme eux, de chercher la célébrité d’Érostrate, et qu’il pouvait, lui, parvenir aux honneurs et à la fortune, dans tous les temps où il n’aurait fallu pour cela renoncer ni à la justice, ni à l’humanité, ni à la pudeur.

1402. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame de La Vallière. » pp. 451-473

Mme de La Vallière s’y portait de son côté avec tout le zèle d’une femme de chambre, dont la fortune dépendrait des agréments qu’elle prêterait à sa maîtresse.

1403. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mademoiselle de Scudéry. » pp. 121-143

En effet, cette estimable personne, longtemps maltraitée par la fortune, s’était de bonne heure accoutumée aux compliments qui pouvaient lui être utiles : il entrait un peu de savoir-faire au fond de tout son mauvais goût.

1404. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « L’abbé Maury. Essai sur l’éloquence de la chaire. (Collection Lefèvre.) » pp. 263-286

À dix-neuf ans, Maury, animé d’ambition et plein de confiance en ses forces, déclara à ses parents qu’il voulait aller à Paris tenter la fortune.

1405. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires de Marmontel. » pp. 515-538

Menacé de ruine à son tour et voyant sa fortune crouler avec l’ancien ordre de choses, il songea à s’abriter dans quelque asile champêtre pour continuer d’y vaquer à l’éducation de ses enfants.

1406. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. Anecdotes. » pp. 123-144

Il s’exécuta toutefois en galant homme et se maria à vingt-cinq ans (12 novembre 1764) sans avoir, elle ni lui, la moindre fortune.

1407. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — II. (Suite.) » pp. 23-46

Il se demandait si c’en était fait pour lui de la grande gloire, si l’avenir lui réservait encore quelque occasion, et, comme il le disait amoureusement, « si la Fortune aurait encore pour lui un dernier sourire ».

1408. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — II. (Suite.) » pp. 220-241

Je ne sais si j’ai bien fait toucher du doigt au lecteur tous les points singuliers et les traits distinctifs de cette destinée et de cette fortune bizarre du Mariage de Figaro, une représentation arrachée, malgré le roi et les magistrats, par la Cour, par le public et par l’auteur, triomphante et déréglée, se tournant contre ses propres spectateurs, s’aidant tour à tour de tous les moyens auxiliaires de scandale, de sensibilité et de bienfaisance, et menant au plus beau moment son héros à Saint-Lazare ; traitement infamant et indigne, dont il se trouve toutefois presque consolé, puisqu’il en est sorti une ordonnance de comptant de deux millions cent cinquante mille livres.

1409. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Voltaire et le président de Brosses, ou Une intrigue académique au XVIIIe siècle. » pp. 105-126

Et c’est toujours en homme lésé et dupé, en homme généreux et désintéressé, ne visant qu’au bien d’autrui et ne marchandant pas d’ailleurs son plaisir, que Voltaire fait des siennes dans cette terre de Tourney, et qu’il se passe tous ses dégâts et toutes ses lésines : Je mets mon plaisir à rendre fertile un pays qui ne l’était guère, et je croirai, en mourant, n’avoir point de reproches à me faire de l’emploi de ma fortune… Je continue très certainement à faire le bien de la terre en agrandissant les prés aux dépens de quelques arbres… J’ai tout lieu de me flatter que vous ne me troublerez pas dans les services que je vous rends, à vous et votre famille.

1410. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

Dureau de La Malle, et il y avait fait mettre cette inscription philosophique, qui semblait protester à demi contre ces honneurs que pourtant il ne répudiait pas : en 1802 le voyageur volney devenu sénateur, peu confiant dans la fortune, a bâti cette petite maison plus grande que ses désirs.

1411. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Histoire » pp. 179-240

Préface de l’édition illustrée (1878)41 Les auteurs de ce livre ont eu la fortune de peindre en pied une Marie-Antoinette que les récentes publications des Archives de Vienne n’ont pas sensiblement modifiée.

1412. (1694) Des ouvrages de l’esprit

Ceux qui par leur condition se trouvent exempts de la jalousie d’auteur, ont ou des passions ou des besoins qui les distraient et les rendent froids sur les conceptions d’autrui : personne presque, par la disposition de son esprit, de son cœur et de sa fortune, n’est en état de se livrer au plaisir que donne la perfection d’un ouvrage.

1413. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre X. Des Livres nécessaires pour l’étude de la Langue Françoise. » pp. 270-314

Son titre fit sa vogue & sa fortune.

1414. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Le Prince » pp. 206-220

Deux bohémiennes l’accostent, lui prennent la main, lui prédisent des enfans et charmans, comme vous pensez bien, un jeune mari qui l’aimera à la folie, et qui n’aimera qu’elle, comme il arrive toujours ; de la fortune, il y avait une certaine ligne qui le disait et ne mentait jamais ; une vie longue et heureuse, comme l’indiquait une autre ligne aussi véridique que la première.

1415. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « X. M. Nettement » pp. 239-265

Nettement, doivent tenir pour la vérité, ce fut cet enfant gâté de la Fortune qui passa toute sa vie à se plaindre d’elle, et qui, ingrat avec ses maîtres comme il l’était avec la Gloire, ne vit jamais, dans les idées ou les événements qui créent des devoirs aux âmes élevées, rien de plus que des occasions de colorer sa pensée et d’ajouter à sa popularité.

1416. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

La fortune des villes varie beaucoup. […] Ce que j’en dirai aujourd’hui atteste moins son talent, que les aventures singulières de sa vie, et les secours qu’il tirait de ce talent, au milieu des crises de sa fortune. […] Cette secte avait deux caractères singuliers, qu’elle reçut de la diversité de ses fortunes et de ses périls : tantôt elle était purement ascétique, solitaire, pythagoricienne ; tantôt elle était guerrière et impitoyable. […] Ainsi, ces pairs de la cour de Charlemagne font très honnêtement leur métier de chevaliers ; ils ont beaucoup d’aventures, donnent ou reçoivent grand nombre de coups de lance ; mais je ne vois pas qu’ils fassent une très haute fortune, à l’exception du bon Ogier le Danois, qui n’épouse pas une reine, mais une fée, et devient immortel par ses enchantements.

1417. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

C’est exactement ce que disaient les contes en attribuant ces bonnes ou mauvaises fortunes au caprice des fées. […] Avec sa fortune énorme, ou réputée telle en cet âge d’or, comment ne s’est-elle pas mariée ? […] Tolstoï eut à cette époque, en France et un peu partout, une éclatante fortune. […] Comment, dans ses rencontres étonnantes, démêler ce qui est l’effet de l’art et ce qui vient de la fortune ?  […] Assurément le hasard (bien défini) ou la fortune, comme dit M. 

1418. (1898) Essai sur Goethe

Quant aux œuvres qui n’ont point eu la fortune d’être ainsi vulgarisées, Gœtz de Berlichingen, Egmont, Tasso, les Affinités électives, elles flottent dans des brumes de plus en plus incertaines. […] Nous nous réjouirions de cet écervelé, qui ne se contenterait pas de quelques vulgaires bonnes fortunes isolées. […] On nous sépara, nous fumes ravis l’un à l’autre, toi parce que ton père, trop amoureux de la fortune, te maria avec une femme riche, mais d’un certain âge ; moi, parce que, sans raison particulière, on m’obligea à donner ma main à un homme opulent, honorable, mais que je n’aimais point. Nous redevînmes libres, toi le premier et la petite maman te laissa en possession d’une grande fortune ; moi, plus tard, à l’époque même où tu revins de tes voyages. […] Mais fortune oblige : elle ne peut que gâter son mari, gouverner ses terres, embellir ses jardins.

1419. (1910) Propos littéraires. Cinquième série

Et puis, et précisément parce qu’il les chérissait comme des découvertes personnelles, il faut avouer qu’il leur faisait une jolie fortune. […] Sur quelques seigneurs qui suivaient sa fortune, pour une raison ou pour une autre, peu sûrs ; sur le peuple, très papalin d’ordinaire, mais qui était corps inconsistant et qu’il fallait acheter et racheter sans cesse. […] Vous, Monsieur, qui êtes riche et qui n’avez pas d’enfants, et c’est même un peu pour cela que vous êtes riche, vous laissez votre fortune à votre neveu sans aucune condition et vous faites à l’Académie un legs conditionnel et à libellé limitatif et impératif. […] Carnegie pourrait être intitulé Conseils aux jeunes gens pour faire fortune consciencieusement. […] Lang, est un personnage en deux personnes : il a en lui du Mattioli et du Martin ; « les fortunes des deux hommes se sont trouvées combinées en un même mythe ».

1420. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

L’homme : un type d’avoué retors, plat, piteux, le dos courtisan, un geste perpétuel de s’excuser, de demander grâce, grâce pour ses croix, pour ses palmes, son rang dans cette Académie où sa rouerie d’homme d’affaires servait d’agent de fusion entre tant d’éléments divers à aucun desquels on n’aurait pu l’assimiler, grâce pour cette extraordinaire fortune, grâce pour cet avancement à la nullité, à la bassesse frétillante. […] Il s’agit d’un héritage de plusieurs millions réclamé par une famille qui y a droit ; les formalités administratives aidant, ladite famille s’est lassée et la fortune va revenir à l’État. […] La fortune lui arrive, les succès, les honneurs ; il n’a plus qu’à jouir de la vie. […] Nous ne voudrions pas décourager les grands riches qui font construire des hôpitaux à coups de millions dont la dépense n’effleure même pas leurs colossales fortunes, mais je ne puis m’empêcher de constater la justesse de cette pensée : Le riche, très riche, ne peut connaître les joies de la bienfaisance.

1421. (1914) L’évolution des genres dans l’histoire de la littérature. Leçons professées à l’École normale supérieure

Vous savez tous, au moins en gros, ce que c’est que le mot et que l’idée d’Évolution ; la fortune qu’ils ont faite ; et ce qu’on en peut dire ; que, depuis une vingtaine d’années, ils ont envahi, l’une après l’autre, pour les transformer ou les renouveler, toutes les provinces de l’érudition et de la science. […] Or, s’il est toujours bon de se défier un peu des nouveautés, et d’attendre — surtout pour les faire entrer dans l’enseignement — qu’elles aient, selon le mot expressif de Malebranche, de la barbe au menton, nous pouvons être certains, qu’après vingt-cinq ou trente ans maintenant écoulés, la doctrine de l’évolution doit avoir eu quelque chose en elle qui justifiait sa fortune. […] Les théories de Diderot ne firent pas fortune. […] et qu’ayant dit tout à l’heure que ses théories n’avaient point fait fortune en son temps, je me trompais, ou que je me trompe en parlant maintenant de l’étendue de son influence ? […] Non, les théories de Diderot n’ont point fait fortune ; on n’a point imité son Fils naturel et son Père de famille, comme on a fait les tragédies de Voltaire ou les romans de Rousseau.

1422. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Si deux fois la chute de son parti semble abattre ou retarder sa fortune, il se tient debout sans beaucoup d’effort, par réflexion et sang-froid, préparé aux événements, acceptant la médiocrité, assis dans une tranquillité naturelle et acquise, s’accommodant aux hommes sans leur céder, respectueux envers les grands sans s’abaisser, exempt de révolte secrète et de souffrance intérieure. […] When men of rank and figure pass away their lives in these criminal pursuits and practices, they ought to consider that they render themselves more vile and despicable than any innocent man can be, whatever low station his fortune or birth have placed him in.

1423. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre I. Le Roman. Dickens. »

L’homme d’affaires de la succession dresse la liste des brevets, nominations, dates et chiffres, et révèle aux lecteurs positifs l’espèce de ses placements et l’histoire de sa fortune ; les arrière-neveux et les petits-cousins publient la description de ses actes de tendresse et le catalogue de ses vertus domestiques. […] Tout ce qu’on sait, ou plutôt tout ce qu’on répète, c’est que Dickens est né en 1812, qu’il est fils d’un sténographe, qu’il fut d’abord sténographe lui-même, qu’il a été pauvre et malheureux dans sa jeunesse, que ses romans publiés par livraisons lui ont acquis une grande fortune et une réputation immense.

1424. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Louis Veuillot »

Croirait-on, à les voir couverts de cheveux blancs, de croix d’honneur, de lunettes d’or, de toges et d’habits brodés, fiers, bien nourris, maîtres de cette société qu’ils grugent… croirait-on que leurs calculs sont dérangés, que leur sommeil est troublé par le bruit du fouet dont ils ont eux-mêmes armé un pauvre petit diable sans nom, sans fortune et sans talent ! […] Toujours il dédaigna la fortune.

1425. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre huitième »

De tous les chefs-d’œuvre de notre scène, aucun n’a eu au même degré cette fortune unique de ne réussir pas moins à la représentation qu’à la lecture. […] Vous avez fort contrarié Agrippine, qui a fait la fortune de son fils et qui veut continuer à la gérer ; mais, en revanche, vous avez fait plaisir à Néron ; c’est un excellent fils : il n’est pas homme à secouer le joug, mais il le sent, et il sait gré à ceux qui lui conseillent de régner.

1426. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1875 » pp. 172-248

Mardi 16 mars Des coups de fortune faits, ces jours-ci, sur les fonds espagnols, par quelques-uns de nos confrères de la littérature et du journalisme, la conversation des Spartiates va à l’étymologie, et l’on recherche celle de petit crevé. […] Une autre voix. — Oh, la séductrice famille que cette famille Sarah Bernhardt… Vous n’avez pas connu la charmante petite Régina, morte à dix-neuf ans… Une autre voix. — Oui, on estime à quatre-vingts millions de rente, la fortune que les jésuites possèdent en France, et cela est établi par une enquête secrète, faite tout dernièrement… C’était assez difficile, ils n’ont que des actions au porteur… le gouvernement a fait des recherches, pour arriver à savoir quelles étaient les personnes qui touchaient ces titres.

1427. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Delzant me dit, que la grande fortune d’Ozy n’a pas été faite par les dons, cependant très considérables, que lui ont faits ses amants, mais bien plutôt par les placements qu’elle a fait faire de ces dons par ses amants, qui étaient presque tous des gens de bourse. […] Paul Alexis a lu son testament, daté, de trois semaines avant sa mort, où il institue comme héritière sa nièce Simone, réserve le quart de sa fortune à ses ascendants, et fait quelques legs à des amis.

1428. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre dixième. Le style, comme moyen d’expression et instrument de sympathie. »

295 Episode de Miette et Silvère dans la Fortune des Rougon :     Il eut un tressaillement, Il resta courbé, et immobile. […] La Fortune des Rougon, p. 218.

1429. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Pendant que madame de Staël faisait la fortune de son Gœthe, l’Allemagne rapetissait et insultait notre Molière, qu’elle ne comprenait pas… Elle voulait en finir avec la France. […] Du reste, c’est le sort de cette théorie d’avoir vengé les gens d’esprit, insultés par l’outrageante fortune de Gœthe.

1430. (1714) Discours sur Homère pp. 1-137

Il paroît enfin lui-même ; la fortune change : il fait lui seul un carnage épouvantable des troyens ; fait fuir à son aspect, ce même Hector qui avoit vû fuir devant lui toute l’armée des grecs ; et il le tuë avec tant de facilité, qu’on ne comprend pas comment après cela les troyens oseront seulement tenter de se défendre. […] Peut-être que la vie entiere d’un héros, maniée avec art, et ornée des beautés poëtiques, en seroit une matiere raisonnable. à quel titre condamneroit-on un ouvrage qui seroit le modele de toute la vie, la morale de tous les âges et de toutes les fortunes ? […] La fortune de chaque combat roule presque toujours sur un seul homme ; et Homere obscurcit à dessein toutes les figures du tableau, pour faire sortir davantage celles qu’il veut exposer en vûë.

1431. (1891) Esquisses contemporaines

Les majorités démagogiques, sous prétexte de répartitions égalitaires, ne tarderont point — c’est le rêve que déjà elles caressent ouvertement — à violer la propriété individuelle, qui fera retour à l’État, reconnu désormais seul possesseur légitime de la fortune publique et seul distributeur du travail. […] L’idéal le plus pur de la liberté aboutissant à l’oppression, la manifestation la plus haute de la justice méconnaissant les droits individuels, l’abolition des privilèges du rang et de la fortune excitant l’envie et menant à la ruine, la seule forme acceptable de gouvernement conduisant à l’impuissance politique, au discrédit et au désordre : telles sont les contradictions flagrantes, fondées elles-mêmes sur des contradictions plus intimes, au sein desquelles se débat la société contemporaine. […] La fortune publique et la fortune privée étaient compromises dans leur essor et voyaient diminuer leurs sources. […] sa fortune littéraire est engagée dans cette réponse.

1432. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

On évalue à plus de deux cent mille francs la fortune dont il fut doté lorsqu’il vint au monde10. […] La famille enfin, et je dis : « Voilà j’ai remarqué la petite une telle, qui m’irait. » Si on me répond : Grosse fortune, belle position, je dis : Trottez. […] Saint-Caprais, avec sa grande barbe et sa fatuité de clubman à bonnes fortunes, avait un trop gros ventre pour plaire à Georgette. […] Outre-mer, on aime la force physique, les records, les gageures inouïes, la réclame, les fortunes stupéfiantes, tout ce qui étonne, tout ce qui abasourdit, tout ce qui « épate. ». […] Il y a dans ce récit fourmillant de faits et nourri de substance tout ce qu’il faut pour assurer la fortune d’un livre et pour accroître une renommée qui semblait ne plus pouvoir grandir.

1433. (1924) Souvenirs de la vie littéraire. Nouvelle édition augmentée d’une préface-réponse

Il a deviné la fortune mobilière, la puissance de l’Association, les chemins de fer, l’artillerie. […] Peu soucieux d’affronter la vie de bohème, Dodillon prépara son examen de vétérinaire et alla s’installer à Provins, où il fit une petite fortune qui lui permit d’écrire des romans et de voyager. […] Sa fortune l’exposant à de fréquentes demandes d’argent, il secourait volontiers ses amis, mais toujours avec un peu de résistance et certaines réflexions restrictives. […] Les réalisations de la gloire et de la fortune ne donnèrent même pas à Emile Faguet le désir de prendre un appartement un peu plus convenable. […] Les spectacles du Théâtre d’Orange inaugurés par Mariéton, qui a bien sacrifié à cette entreprise une trentaine de mille francs de sa fortune personnelle, eurent au début une véritable grandeur.

1434. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

Le meunier, dans nos petits poèmes, est volontiers un homme à bonnes fortunes, un peu faraud, beau marjolin et faisant grande fricassée de cœurs. […] Les bonnes fortunes du militaire sont attestées par une longue renommée. […] Sa fortune était faite. […] À l’issue de la réunion il s’attacha pieusement aux pas du grand homme, et puis, le soir, radieux, il écrivit à ses frères son heureuse fortune. […] Voici comment il s’explique sur sa profession : Je fais des mariages ridicules : j’unis des barbons avec des mineures, des maîtres avec leurs servantes et des filles mal dotées avec de tendres amants qui n’ont point de fortune.

1435. (1903) Propos de théâtre. Première série

Il a eu une fortune extraordinaire. […] Seulement, vous êtes sans fortune. La fille de Félix n’épouse pas un homme sans fortune. […] Voyez la façon tranquille, sereine (et ici sans affectation ni hypocrisie possibles) dont elle apprend la perte de toute sa fortune. […] Trissotin se retire aussitôt, et Clitandre au contraire offre toute sa fortune à la famille de celle qu’il aime. — C’est alors qu’Ariste déclare que les lettres qu’il a apportées étaient supposées.

1436. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — II. (Fin.) » pp. 110-133

Il trouva d’ailleurs hors de France mainte compensation pour sa fortune : son père seulement n’en trouva point à son absence.

1437. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « De la tradition en littérature et dans quel sens il la faut entendre. Leçon d’ouverture à l’École normale » pp. 356-382

En Grèce seulement, par une fortune singulière et un reste de privilège natal, cette littérature sacrée, dans la bouche des Basile et des Chrysostome, retrouva sans effort l’abondance et l’harmonie, et comme des accents de Platon ; mais à Rome, mais en Afrique, le latin des premiers Pères fut dur, recherché, tourmenté, en même temps que la pensée neuve, excellente et souvent sublime.

1438. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid, (suite.) »

Un seul bourgeois, Martin Antolinez, a pourvu Mon Cid et les siens de pain et de vin, et il s’attache à sa fortune.

1439. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville »

Quitter son pays à cet âge pour aller chercher fortune sur une terre étrangère, quelle misère !

1440. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres mêlées de Saint-Évremond »

Il s’appliqua dans sa jeunesse au métier des armes, s’acquit l’estime des généraux sous lesquels il servit, et, arrivé au grade de maréchal de camp, il pouvait prétendre à une plus grande fortune militaire, lorsqu’une lettre de lui, très-spirituelle et satirique, sur la paix des Pyrénées et contre le cardinal Mazarin, lettre adressée au marquis de Créqui et connue seulement de trois ou quatre personnes, fut trouvée dans une cassette déposée chez Mme du Plessis-Bellière, dont on saisissait les papiers.

1441. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

« J’admirai, continue Rancé, la simplicité de cet homme, et le mettant en parallèle auprès des grands dont l’ambition est insatiable, et qui ne trouveroient pas de quoi se satisfaire quand ils jouiroient de toutes les fortunes, plaisirs et richesses d’ici-bas, je compris que ce n’étoit point la possession des biens de ce monde qui faisoit notre bonheur, mais l’innocence des mœurs, la simplicité et la modération des désirs, la privation des choses dont on se peut passer, la soumission à la volonté de Dieu, l’amour et l’estime de l’état dans lequel il a plu à Dieu de nous mettre. » Ce sont là (suivant l’heureuse expression de Dom Le Nain) de ces premiers coups de pinceau auxquels le grand Ouvrier se réservait d’en ajouter d’autres encore plus hardis pour conduire Rancé à la perfection.

1442. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger en 1832 »

À dix-sept ans, muni de ce premier fonds de connaissances et des bonnes instructions morales de sa tante, Béranger revint à Paris, auprès de son père, qui s’y trouvait pour le moment dans une position de fortune très-améliorée .

1443. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — L'abbé de Lamennais en 1832 »

Pendant les intervalles de la controverse vigoureuse à laquelle on l’aurait cru tout employé, serein et libre, retiré de ce monde politique actif où le Conservateur l’avait vu un instant mêlé et d’où tant d’intrigues hideuses l’avaient fait fuir, entouré de quelques pieux disciples, sous les chênes druidiques de La Chênaie, seul débris d’une fortune en ruine, il composait les premières parties d’un grand ouvrage de philosophie religieuse qui n’est pas fini, mais qui promet d’embrasser par une méthode toute rationnelle l’ordre entier des connaissances humaines, à partir de la plus simple notion de l’être : le but dernier de l’auteur, dans cette conception encyclopédique, est de rejoindre d’aussi près que possible les vérités primordiales d’ailleurs imposées, et de prouver à l’orgueilleuse raison elle-même qu’en poussant avec ses seules ressources elle n’a rien de mieux à faire que d’y aboutir.

1444. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. NISARD. » pp. 328-357

Nisard l’a fait pour quelques-uns, pour Perse par exemple), c’est être inexorable comme le hasard et le succès, c’est vouloir même être plus sévère que la plus ingrate fortune, bien loin de profiter de tous les droits bienveillants d’une critique attentive et pénétrante.

1445. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

Politique avisé autant qu’homme aimable, plein d’expédients et de ressources, fertile, infatigable, possédant à fond les affaires et les portant avec légèreté et grâce, les égayant presque toujours dans le ton, il était le chef de cette école de diplomates dont Chaulieu avait connu de brillants élèves, et dont il a fait un groupe à part dans son Élysée : Dans un bois d’orangers qu’arrose un clair ruisseau Je revois Seignelai, je retrouve Béthune, Esprits supérieurs en qui la volupté Ne déroba jamais rien à l’habileté, Dignes de plus de vie et de plus de fortune !

1446. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

La dernière guerre de Louis XIV tirait à sa fin ; les emplois à l’armée étaient devenus très-rares ; mais il avait l’espérance, commune à une infinité de jeunes gens, d’être avancé aux premières occasions ; et, comme lui-même il l’a dit par la suite en réponse à ceux qui calomniaient cette partie de sa vie, « il n’étoit pas si disgracié du côté de la naissance et de la fortune qu’il ne pût espérer de faire heureusement son chemin. » Las pourtant d’attendre, et la guerre d’ailleurs finissant, il retourna à La Flèche chez les pères jésuites, qui le reçurent avec toutes sortes de caresses ; il en fut séduit au point de s’engager presque définitivement dans l’Ordre ; il composa, en l’honneur de saint François Xavier, une ode qui ne s’est pas conservée.

1447. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Il le presse de questions sur les nobles de sa province, sur les tenants et aboutissants de chaque famille : « Je sais bien que la généalogie ne fait pas votre étude, comme elle aurait été ma marotte si j’eusse été d’une fortune à étudier selon ma fantaisie. » Il complimente son frère et se réjouit de le voir touché de la même passion que lui, de connoître jusqu’aux moindres particularités des grands hommes.

1448. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Discours préliminaire » pp. 25-70

Ce qui frappe l’imagination, c’est la décision de la fortune, c’est le succès de la valeur.

1449. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre I »

En guenilles, pieds nus, ne mangeant que du pain noir, mais couvant dans son cœur le petit trésor sur lequel il fondait tant d’espérances, il guettait l’occasion, et l’occasion ne manquait pas. « Malgré tous ses privilèges, écrit un gentilhomme en 1755651, la noblesse se ruine et s’anéantit tous les jours, le Tiers-état s’empare des fortunes. » Nombre de domaines passent ainsi, par vente forcée ou volontaire, entre les mains des financiers, des gens de plume, des négociants, des gros bourgeois.

1450. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre II. Les romans bretons »

Tous ces poèmes tournent autour d’Arthur, le roi toujours pleuré, et toujours espéré, dont les Bretons, dans l’énergique persistance de leur sentiment national, ont fait le symbolique représentant de la fortune de leur race.

1451. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. Le théâtre romantique »

Cette morale est de la plus vulgaire médiocrité : partout l’argent, la position, la carrière, la fortune ; le plus bas idéal de succès positif et d’aise matérielle, voilà ce que Scribe et son public appellent la raison.

1452. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

La pratique du gouvernement représentatif, où tous les ressorts d’une grande société sont mis au jour, nous a persuadé que nous sommes très bons juges de la politique, que nous n’ignorons pas la guerre, que nous nous entendons en finances et en administration, que rien ne nous échappe des rapports de la fortune publique avec l’esprit général du gouvernement.

1453. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’expression de l’amour chez les poètes symbolistes » pp. 57-90

C’est folie que de courir après la fortune.

1454. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

Mihir Nerseh, dans une proclamation adressée aux Arméniens pour les détourner du christianisme, leur demande comment ils peuvent croire des gueux mal habillés, qui préfèrent les gens de petit état aux gens de bonne maison et sont assez absurdes pour faire peu de cas de la fortune.

1455. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Discours préliminaire, au lecteur citoyen. » pp. 55-106

On n’aura pas de peine à se le persuader, si l’on pense qu’un homme de Lettres n’arrive aux honneurs, aux places, aux récompenses, & même aux bénéfices, que par les Philosophes, & que, se déclarer contre eux, c’est se fermer la porte à toute espece de fortune.

1456. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre I. Le Bovarysme chez les personnages de Flaubert »

Ils ont exactement les sentiments et les opinions qu’exigent leur profession, leur fortune et leur monde, et il semble bien que les uns et les autres seraient fort empêchés de penser, d’agir et d’être hommes s’ils n’étaient d’abord notaire, fonctionnaire, prêtre ou gentilhomme.

1457. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1859 » pp. 265-300

Les parents veulent bien livrer au mari, le corps, la santé, le bonheur d’une fille, enfin toute sa femme, — sauf sa fortune.

1458. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre II. Le fond et la forme dans la littérature indigène. »

A ce thème se rattache le suivant : Association d’hommes ou d’êtres merveilleusement doués en vue de parvenir à la fortune. — Ces contes rappellent ceux de Grimm et de Bechstein, intitulés Sechse kommen durch die ganze Welt.

1459. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IX. Eugénie de Guérin »

Tirée de sa campagne, amenée en parure, comme une princesse des contes de fées, sous l’éclat intimidant des lustres, elle y vint sans embarras, sans disgrâce, avec un aplomb chaste et patricien qui disait bien, malgré les torts de la fortune, pour quel rôle social elle était faite.

1460. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Une foule d’écrivains s’y essayent ; plusieurs y gagnent une fortune, une réputation, on pourrait dire une gloire d’une espèce particulière ; ils voient leur nom et leurs œuvres pénétrer dans des milieux où n’ont jamais pénétré ceux des maîtres de la littérature française ; ils intéressent, ils font pleurer, ils égayent, ils ennuient un peuple entier ; ils sont les vrais créateurs et les vrais soutiens d’une certaine presse, investis d’une puissance plus immédiate sur ses destinées que tous les écrivains politiques, les économistes, les critiques, les reporters et les correspondants de la rédaction, et je me rappelle que l’administrateur général d’un des plus importants petits journaux de Paris me disait que, dans la première semaine après le commencement d’un feuilleton, le tirage du journal montait ou s’abaissait de cinquante mille, de quatre-vingt mille exemplaires par jour, selon que le feuilleton plaisait ou ne plaisait pas.

1461. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre I. La conscience et la vie »

A quel signe reconnaissons-nous d’ordinaire l’homme d’action, celui qui laisse sa marque sur les événements auxquels la fortune le mêle ?

1462. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre III. La complication des sociétés »

Mais, à ce régime dormant, substituez l’animation de notre fièvre commerciale : production à outrance, circulation incessante, hausses et baisses inattendues, — dans ce mouvement perpétuel de toutes les valeurs, les fortunes se font et se défont en un clin d’œil.

1463. (1769) Les deux âges du goût et du génie français sous Louis XIV et sous Louis XV pp. -532

Il faut donc en rapporter l’origine à ce Prince, digne à tous égards des faveurs de la fortune qui, cependant, parut le croiser dans toutes ses entreprises. […] Pourquoi, lui disait-il, mettre ainsi à l’écart l’instrument de votre gloire & de votre fortune ? […] Baron à qui on attribue l’Homme à bonnes fortunes, & qui se piquait encore plus d’être le héros de la Piece que d’en être l’Auteur. […] m’écriai-je, quelle sera donc la fortune de nos neveux a-5 !

1464. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

il promet de désintéresser ses anciens actionnaires, c’est-à-dire de sacrifier au scrupule imprévu dont il a été soudainement envahi la moitié de sa fortune ! […] Je vois très bien Henri donnant un coup d’épée pour un mot malsonnant qu’il aura entendu sur son père, je ne le vois pas exigeant de but en blanc le sacrifice d’une fortune à laquelle il doit tous ses plaisirs et dont l’origine, déjà lointaine, peut être légitimée, après tout, par des sophismes assez spécieux… Décidément, M.  […] honnête (Madame Caverlet, les Effrontés), — et des enfants obligeant leurs pères à rendre une fortune mal acquise (Effrontés, Ceinture dorée). […] Comme si nos aïeux n’avaient pas poussé leur fortune, les hommes en acceptant tout du roi et les femmes en ne lui refusant rien !  […] Les amoureux se mettent à causer comme des amoureux ; la petite femme fait des projets d’avenir ; elle parle avec tendresse de la bonne mère Yvonne ; le petit mari tire de sa poche le portefeuille qui contient leur petite fortune… Soudain on entend un coup de canon. « Qu’est-ce que c’est que cela ?

1465. (1910) Propos de théâtre. Cinquième série

Ce règne de Louis-Philippe qui, très évidemment et, semblait-il, à ne pas pouvoir s’y tromper, s’annonçait si favorablement à Casimir Delavigne, ne lui porta point du tout fortune et il n’y eut guère que des déboires. […] En octobre 1845, il partit pour Berlin et il aboutit à Vienne, où sa fortune allait prendre enfin une face nouvelle. […] Christine Enghauss, c’était ses pièces jouées, c’était la gloire et c’était la fortune, sans compter que c’était l’amour. […] Le succès lui vint, et la gloire, et, sinon la fortune, du moins l’aisance. […] La pièce est charmante… Pour commencer par une parenthèse, savez-vous bien que le lieutenant de police Lenoir est cause de ceci que la langue française s’est « enrichie » d’une locution, du reste très douteuse, mais qui a fait une fortune immense !

1466. (1904) Propos littéraires. Deuxième série

Il critique, si l’homme recherche honneurs, puissance, fortune, c’est pour se les procurer, et non pas pour jouir du plaisir d’en priver les autres. […] Ils ne seraient ni taquins, ni malicieux, ni médisants quand ils n’auraient pas intérêt à l’être ; c’est-à-dire qu’ils ne le seraient presque jamais ; ni corrupteurs pour le plaisir de corrompre, ni insolents dans la fortune ; car cela ne sert à rien ; ni trompeurs pour le plaisir de jouer un bon tour ; ni despotiques pour le plaisir de faire sentir aux autres leur faiblesse, etc., etc. […] Là est le secret de sa haute fortune littéraire. […] Vers la fin, il eut deux bonnes fortunes. […] Mais cette fortune il n’en jouit guère et elle ne lui servit point de marchepied ou de tremplin, tant la mort vint vite traverser son œuvre.

1467. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre III. La nouvelle langue. » pp. 165-234

Tour à tour on le voit à l’armée du roi Édouard, gentilhomme du roi, mari d’une demoiselle de la reine, muni d’une pension, pourvu de places, député au parlement, chevalier, fondateur d’une famille qui fit fortune jusqu’à s’allier plus tard à la race royale. […] Voyez sa Vision de la Fortune, gigantesque figure.

1468. (1903) Articles de la Revue bleue (1903) pp. 175-627

Sully Prudhomme a obéi à une pensée généreuse en instituant une rente qui permettra chaque année à un jeune poète, ayant plus de talent que de fortune, d’éditer son premier volume de vers. […] Mais valait-il mieux ne rien tenter en faveur du talent trahi par la fortune ?

1469. (1888) Études sur le XIXe siècle

Et c’est avec ce sens, c’est peut-être à cause de ce sens que le tableau a eu en Angleterre une fortune unique, qu’il a été promené de ville en ville et reproduit avec un succès énorme par la gravure. […] Et le jeune ’Ntoni, qui a écouté à l’auberge les conversations d’aventuriers de passage, qui est las de peiner sans trêve pour se retrouver toujours au même point, qui veut être riche et faire le bonheur de sa famille, quitte Trezza pour aller chercher fortune à travers le monde. […] Puis, une nouvelle charge : le jeune ’Ntoni revient, sans avoir fait fortune et paresseux, dérouté, ivrogne. […] Souvent la fortune des femmes coûte plus cher aux maris que la pauvreté, tandis que le pain et l’amour suffisent toujours… Ta mère, elle-même… « — Ma mère, fit le jeune homme en rougissant un peu, ne sait encore rien pour le moment. […] En 1840, il essaye de sortir de son insuffisante position de fortune et spécule : il perd 20 000 francs.

1470. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

« On peut être poli sans être dissimulé, on peut assurément être l’un & l’autre sans être bien sçavant, & plus communément encore on peut être bien sçavant sans être sort poli. » Il ne voit pas ce que le luxe a de commun avec les auteurs, dont la plupart sont si mal partagés des biens de la fortune. […] Il eut de la fortune & s’en fit honneur, vivant avec les grands & les recevant à sa table. […] Guillaume de Saint-Amour étoit d’un village de ce nom, dans le comté de Bourgogne ; un canonicat de Beauvais fit toute sa fortune. […] Le nom d’Arnauld porte l’idée d’un de ces génies faits pour éclairer les hommes ; d’une de ces imaginations ardentes & fougueuses qui saisissent & rendent vivement les choses ; d’une de ces ames pures, courageuses, inébranlables, trop au-dessus de la fortune, pour lui sacrifier le sentiment si flatteur d’être tout par son propre mérite, & rien par elle. […] Sur l’espoir d’une fortune imaginaire, auprès d’un évêque janséniste, on fit courir, d’un bout du royaume à l’autre, un jeune professeur de philosophie à Douai, lequel vendit ses meubles, perdit sa place, & dépensa tout son argent.

1471. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre I. La Restauration. »

Tel autre se pique de faire des chansons, de bien jouer de la guitare. « Russell avait un recueil de deux ou trois cents contredanses en tablature, qu’il dansait toutes à livre ouvert. » Jermyn est connu pour ses bonnes fortunes. « Un gentilhomme, dit Etheredge, doit s’habiller bien, danser bien, faire bien des armes, avoir du talent pour les lettres d’amour, une voix de chambre agréable, être très-amoureux, assez discret, mais point trop constant. » Voilà déjà l’air de cour tel qu’il dura chez nous jusque sous Louis XVI. […] VI Quatre écrivains principaux établissent cette comédie ; Wycherley, Congrève, Vanbrugh, Farquhar628, le premier grossier et dans la première irruption du vice, les autres plus rassis, ayant le goût de l’urbanité plutôt que du libertinage, tous du reste hommes du monde et se piquant de savoir vivre, de passer leur temps à la cour ou dans les belles compagnies, d’avoir les goûts et la carrière des gentilshommes. « Je ne suis pas un écrivain, disait Congreve à Voltaire, je suis un gentleman. » En effet, dit Pope, « il vécut plus comme un homme de qualité que comme un homme de lettres, fut célèbre pour ses bonnes fortunes, et passa ses dernières années dans la maison de la duchesse de Marlborough. » J’ai dit que Wycherley, sous Charles II, était un des courtisans les plus à la mode. […] Une femme comme il faut se couche au matin, se lève à midi, maudit son mari, écoute des gravelures, court les bals, hante les théâtres, déchire les réputations, met chez elle un tripot, emprunte de l’argent, agace les hommes, traîne et accroche son honneur et sa fortune à travers les dettes et les rendez-vous. « Nous sommes aussi perverses que les hommes, dit lady Brute, mais nos vices prennent une autre pente. […] Maugre all which, ’twas to stand fast, As long as monarchy should last ; But when the state should hap to reel, ’Twas to submit to fatal steel, And fall, as it was consecrate, A sacrifice to fall of state, Whose thread of life the fatal sisters Did twist together with his whiskers, And twine so close, that Time should never, In life or death, their fortunes sever : But with his rusty sickle mow Both down together at a blow.

1472. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

Delahaye a l’air de s’imaginer que les enfants, seuls, ont besoin de comprendre l’histoire, et, dans son excessive politesse pour ces grands, ces vieux enfants qui sont les hommes d’aujourd’hui, il feint de ne pas avoir écrit pour eux, — comme superflues, — ses explications si lumineuses de la fusion des races, de l’implantation géniale du christianisme, du rôle providentiel, — accepté ou non, — du rude Clovis, de l’action gigantesque de Charlemagne ; de l’avènement et de l’écroulement des dynasties, de la lente et laborieuse fortune capétienne ; il n’adresse qu’aux collégiens sa belle comparaison, si concluante, de la corruption antique avec la saine rigueur du moyen âge ; c’est pour eux qu’il démolit, — avec quels biceps et quelle tranquillité ! […] Je serais, certes, ingrat si j’oubliais après cela de mentionner Néron, un gros caniche de bon naturel, extrêmement gras, et qui m’aimait à ce point que, rendant visite deux années plus tard à Mr Andrews, il me reconnut sur la route de Sibsey à Stickney, et courut me lécher les mains et le visage, exprimant par ses aboiements la même idée que ces vers du divin Racine : Oui, puisque je retrouve un ami si fidèle, Ma fortune va prendre une face nouvelle ! […] Mais pour l’instant, j’étais affamé, épuisé par la traversée de cette mer démontée, et Symons, à mon exemple, dévora, — tandis que nous devisions durant deux bonnes heures, de toutes choses sous le soleil : Paris, poésie, fortune (les poètes ne pensent à rien d’autre… et à juste titre) —, une boîte entière, une de ces longues, hautes boîtes en fer-blanc, de biscuits pour le thé, « Muffins »16 en anglais, avec force gin et soda17 pour faciliter la descente, le tout parfumé de vagues cigarettes. […] Fortune des mots !

1473. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

De la jeunesse, une figure décente, une fortune aisée, assez d’esprit pour ne pas dire des bêtises sans le savoir, assez de conduite pour ne pas faire des sottises, comme moi, en sachant bien qu’on en fait, une naissance et une éducation qui n’avilisse pas ses enfants, et qui ne me fasse pas épouser toute une famille de Cazenove, ou gens tels qu’eux1, c’est tout ce que je demande. […] Je crois que cela est sans danger pour sa fortune. […] Pour qui connaît la vie ultérieure de Benjamin Constant, la pièce a tout son prix : « By all that is deemed honorable and sacred, by the value I set upon the esteem of my acquaintance, by the gratitude I owe to my father, by the advantages of birth, fortune and education, which distinguish a gentleman from a rogue, a gambler and a blackguard, by the rights I have to the friendship of Isabella and the share I have in it, I hereby pledge myself, never to play at any chance game, nor at any game, unless forced by a lady, from this present date to the 1st of january 1793 : which promise if I break, I confess myself a rascal, a liar, and a villain, and will tamely submit to be called so by every man that meets me.

1474. (1932) Le clavecin de Diderot

Rocher païen ou Eglise catholique, les lieux d’asile et de salut, vus de la mer ou de la rue, défient ceux que la mauvaise fortune, le désir d’aller plus loin, condamnèrent à chercher gouttes et brindilles de soi-même, écumes et bribes de sensations, vapeur et paillettes d’idées. […] C’était, s’il m’en souvient, un brave patron-boulanger qui s’était retiré une fois fortune faite. […] La sagesse eût été de s’arranger à ce qu’elle durât, la sagesse eût été, selon l’expression de notre code, de gérer sa fortune en bon père de famille.

1475. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « L’Académie française »

C’est proprement un prix d’encouragement à un jeune écrivain peu favorisé de la fortune et qui mérite de l’intérêt par son talent.

1476. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

Tant qu’il resta au service, il était de ceux dont on pouvait dire comme de Boufflers : « Les neiges et les glaces étaient les tapis favoris de cet homme indomptable. » Après sa retraite, et à demi ruiné de fortune, il se cantonna dans un lieu très-âpre, sur un roc escarpé qui barre une double gorge sans cesse battue des vents du nord ; il y vécut dans les travaux de défrichement, changeant le roc en verger d’oliviers, adoré mais craint de ses vassaux, et la terreur des traitants et commis à la ronde.

1477. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

Une éducation plus saine et plus solide, des fortunes plus modiques, des mariages plus d’accord avec les vraies convenances, devront sans doute associer de plus en plus, nous l’espérons, la femme et l’époux par l’intelligence comme par les autres parties de l’âme ; mais il n’y a pas lieu pour cela à transformer les anciennes vertus, ni même les grâces : il faut d’autant plus les préserver.

1478. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « François Ier, poëte. Poésies et correspondance recueillies et publiées par M. Aimé Champollion-Figeac, 1 vol. in-4°, Paris, 1847. »

Ce manuscrit commence tout simplement par une lettre en prose que le roi prisonnier écrit à une maîtresse dont on ignore le nom : « Ayant perdu, dit-il, l’occasion de plaisante escripture et acquis l’oubliance de tout contentement, n’est demeuré riens vivant en ma mémoire, que la souvenance de vostre heureuse bonne grace, qui en moy a la seulle puissance de tenir vif le reste de mon ingrate fortune.

1479. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (4e partie) » pp. 81-143

« Le pavé de Paris avait beau être là tout autour, les hôtels classiques et splendides de la rue de Varenne à deux pas, le dôme des Invalides tout près, la Chambre des députés pas loin ; les carrosses de la rue de Bourgogne et de la rue Saint-Dominique avaient beau rouler fastueusement dans le voisinage ; les omnibus jaunes, bruns, blancs, rouges, avaient beau se croiser dans le carrefour prochain : le désert était rue Plumet ; et la mort des anciens propriétaires, une révolution qui avait passé, l’écroulement des antiques fortunes, l’absence, l’oubli, quarante ans d’abandon et de viduité, avaient suffi pour ramener dans ce lieu privilégié les fougères, les bouillons-blancs, les ciguës, les achillées, les hautes herbes, les grandes plantes gaufrées aux larges feuilles de drap vert pâle, les lézards, les scarabées, les insectes inquiets et rapides ; pour faire sortir des profondeurs de la terre et reparaître entre ces quatre murs je ne sais quelle grandeur sauvage et farouche ; et pour que la nature, qui déconcerte les arrangements mesquins de l’homme et qui se répand toujours tout entière là où elle se répand, aussi bien dans la fourmi que dans l’aigle, en vînt à s’épanouir dans un méchant petit jardin parisien avec autant de rudesse et de majesté que dans une forêt vierge du nouveau monde.

1480. (1824) Observations sur la tragédie romantique pp. 5-40

Qu’est-ce auprès de lui que les intrigues de cour, que la fortune des princes, que les malheurs du monde ?

1481. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre IV. Racine »

Les grandes fortunes poétiques ne pouvaient guère se faire qu’au théâtre ; notre débutant commence à travailler pour les comédiens410.

1482. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Il amplifie ses expériences de la fragilité des choses, des caprices de la fortune, de l’injustice des hommes ; il amplifie les effets et les retentissements de son génie.

1483. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

Cette démocratie se distingue des systèmes abolis d’abord en ceci qu’elle ne fait point de la culture le privilège d’une caste, mais la rend accessible à tous les enfants et jeunes gens bien doués, sans distinction de naissance, ni de fortune ; et secondement en ceci qu’elle estime infiniment plus haut un homme cultivé et intelligent qu’un fils de prince ou un millionnaire ignorant ou borné.

1484. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre septième. »

C’étaient de nouveaux enrichis, passant soudainement de la pauvreté à l’opulence, et possédés par leur fortune au lieu de la posséder, selon le précepte des sages.

1485. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

Le possesseur d’une fortune empêche ses héritiers d’en jouir.

1486. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « I »

Déroulède, qui a sacrifié son temps, ses relations, sa fortune, à la cause qu’il soutient, n’a jamais songé à partir en guerre contre les drames du maître.

1487. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « II »

La musique, il est vrai, reste au-dessous de la conception poétique ; mais nos regrets sont de courte durée, car, dès l’entrée d’Elsa, la mélodie atteint ce degré de richesse qui a fait la fortune de l’œuvre dans toute l’Europe musicale.

1488. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 457-512

  Entraîné par l'amour de la gloire à tous les genres, &, par une vive sensibilité, à toutes les passions, ces deux mobiles sont devenus le ressort principal de ses talens, & la regle du différent usage qu'il en a fait, Modeste, s'il eût été universellement encensé ; doux, s'il n'eût point été contredit ; religieux, & zélateur du Culte dans lequel il est né, pour peu que ce chemin eût pu le conduire à la fortune ou à la célébrite : on l'eût vu le modèle & le défenseur des vrais principes, en tout genre, si l'intérêt de sa vanité eût pu s'accorder avec aucune espece de dépendance.

1489. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XII, les sept chefs devant Thèbes. »

Si la fortune les favorise, leur impudence est intolérable ; si la frayeur les saisit, le mal n’en est que plus grand pour la ville et pour la maison.

1490. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

Le légataire de Sainte-Beuve, qui administre son testateur lui-même comme sa fortune, — comme une propriété dont on a, aux termes de la loi, le droit d’user et d’abuser, crierait comme une oie du Capitole (il a déjà crié) si on touchait un peu rudement à son illustre maître, et qu’on discutât son talent en le réduisant à ce qu’il est, sans exagération et sans ambages.

1491. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

C’est vous qui m’avez appris à fuir les sentiers de la foule et, au lieu d’élever ma fortune, à tâcher d’élever mon cœur. » Il a été ministre, pair de France, professeur, à quoi a-t-il donc renoncé ?

1492. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Μ. Ε. Renan » pp. 109-147

Ernest Renan, l’adversaire du surnaturalisme en histoire, est resté jusque dans le volume des Origines du Christianisme qu’il a publié, sous le titre de : Marc-Aurèle ou la fin du monde antique, fidèle à l’idée qui a fait sa fortune.

1493. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre II. La qualité des unités sociales. Homogénéité et hétérogénéité »

Ces considérations permettent peut-être de juger une théorie qui a vite fait fortune : celle qui veut que fatalement la division du travail, condition nécessaire de tout progrès humain comme de tout perfectionnement biologique, entraîne l’inégalité.

1494. (1773) Discours sur l’origine, les progrès et le genre des romans pp. -

L’histoire a daigné perpétuer le souvenir de ses bonnes fortunes.

1495. (1929) Les livres du Temps. Deuxième série pp. 2-509

Obtiendra-t-il un retour de fortune, comme Stendhal, avec lequel son esprit présente quelques analogies ? […] » Vogüé reconnaît qu’à l’origine le recrutement était plus brillant : « Bon nombre des premiers qui abordèrent à l’Athos étaient des victimes de la prodigieuse instabilité byzantine : fortunes politiques brisées, débris des conspirations de cour, proscrits du tyran de la veille, rhéteurs vaincus de l’académie, capitaines battus à la frontière, cochers dépassés dans le cirque… » De nos jours, « le grand secret de vie de l’Institution », c’est « l’horreur invincible de l’Orient pour la dure loi du travail ». […] C’est évidemment une tare que d’être désintéressé : espérons pour cette jeunesse si morale qu’elle donnera l’exemple de la fortune !

1496. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Les jongleurs français, qui venaient en nombre chercher fortune aux cours de Castille, y apportèrent ces chansons elles-mêmes, et les jongleurs espagnols, formés à l’école des nôtres, reproduisirent d’abord sans arrière-pensée la version française : les ennemis de Charlemagne, étant des « Sarrasins », des « païens », on n’hésitait pas à prendre parti contre eux. […] Et arrivé sur l’Alpe, laquelle était chargée de neige, il survint une fortune de temps avec chasse-neige, si bien que les chevaux se faisaient avec la neige des brodequins aux pieds, et ils choppaient et même tombaient souvent, et les enfants étaient en grand péril… Et comme on se reposait un moment, survint ledit Giovanni Bottadio, et il passait marchant très fort ; pour quoi ledit Andrea l’appela et lui dit : « Frère, plaise-vous nous faire un peu de compagnie pour l’amour de Dieu, afin que ces enfants ne périssent pas !  […] Tu n’as retiré aucun fruit des préceptes que je t’ai donnés : tu te chagrines de m’avoir perdu quand tu ne peux me recouvrer ; tu as essayé de me prendre quand il t’est impossible de m’atteindre ; et tu crois qu’il y a dans mes entrailles une perle plus grosse qu’un œuf d’autruche, quand mon corps tout entier n’atteint pas cette grosseur146 . » Le rédacteur du roman grec a donné à cette fable une morale qui n’était certainement pas dans sa source indienne et qui ne lui convient guère : « Non moins sots sont les hommes qui ont confiance dans les idoles, qui adorent des dieux façonnés par eux et se figurent être gardés par ceux dont ils sont les gardiens. » Ce roman de Barlaam et Joasaph a eu une fortune singulière147. […] De cette version arabe est issue une version juive qui, par un nouveau retour de fortune, a fait servir la légende, originairement bouddhique, puis chrétienne, puis musulmane, à l’enseignement des doctrines du judaïsme154. […] L’oiseau lui dit : « Ne te repens jamais au sujet d’une chose passée 172. » L’oiseleur satisfait de cette maxime le lâcha ; il se posa sur le tronc de l’arbre, et dit : « Ne crois que ce dont tu auras constaté la réalité. » Puis il vola jusqu’au sommet et dit : « Tu as perdu ta fortune, que tu avais entre les mains. — Comment ?

1497. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre I. La Renaissance païenne. » pp. 239-403

Samuel Bernard, qui a fait fortune dans les fermes, a carrosse et sera ministre du roi. […] Des attentes et des rebuts, beaucoup de tristesses et beaucoup de rêves, quelques douceurs et tout d’un coup un malheur affreux, une fortune petite et une fin prématurée : voilà bien une vie de poëte. […] L’un achète, l’autre ne peut payer ; celui-ci fait fortune ; son voisin fait, banqueroute. […] Far from those wrangling law-suits, aulæ vanitatem, fori ambitionem, ridere mecum soleo : I laugh at all, “only secure, lest my suit go amiss, my ships perish, corn and cattle miscarry, trade decay, I have no wife nor children, good or bad, to provide for ;” a mere spectator of other men’s fortunes and adventures, and how they act their parts, which methinks are diversely presented unto me, as from a common theatre or scene.

1498. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Elle avait de la beauté et du savoir, mais nulle fortune. […] … « Les fables de La Fontaine n’ont rien de comparable aux faits et gestes du Corbeau qui domine la pièce la Fortune du Ramoneur, poignante comme un drame. — Molière égale à peine la profondeur philosophique de la pièce des Deux Amis, et même de Polichinelle retiré du monde ou du Sac de charbon. […] « Il faut, nous dit Montaigne, tant de rencontres à la bâtir, que c’est beaucoup si la fortune y arrive une fois en trois siècles. » Et il confesse qu’après la mort de La Boëtie, toute sa vie, cependant douce et pleine de tranquillité, n’était plus que fumée et nuit obscure. […] Il avait vendu Lucile trois louis, et il disait de son libraire : — Cet homme, suppôt de police, a fait fortune ; il est mort au moment d’en jouir.

1499. (1889) Les artistes littéraires : études sur le XIXe siècle

Ils n’ont pas subi cette mauvaise fortune de voir passer en des mains maladroites l’instrument dont ils avaient usé, et dont seuls ils étaient aptes à tirer un complet effet : leurs imperfections n’ont pas été accentuées et placées en évidence ; leurs mérites n’ont pas été brutalement exagérés jusqu’à se tourner en défauts. […] On peut présumer qu’une fortune à peu près identique sera réservée par l’avenir à MM. de Goncourt. […] Attaqué de son vivant, il a eu, après sa mort, cette rare fortune d’être regardé comme un dieu par des écoles rivales, qui chacune l’ont revendiqué avec une admiration exclusive, et ne se sont pas aperçues qu’il les englobait toutes. […] Théodore de Banville est généralement accepté comme un maître, il a subi les conséquences des faveurs dont l’avait comblé la fortune. […] Théodore de Banville, le plus grave reproche qu’il ait à subir, ce n’est pas sans doute d’avoir négligé l’idée, ou même, comme on l’a dit, de l’avoir oubliée absolument : d’autres que lui, des plus incontestés et des plus grands ne l’ont pas surpassé à ce point de vue, et nul n’a songé cependant à leur en faire un grief : mais il a eu cette bizarre mauvaise fortune de posséder une science innée de la métrique telle que, sur ce chapitre, il demeure sans rival, et ce fut sinon sa ruine, tout au moins l’occasion d’un inappréciable préjudice.

1500. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

Mais Voltaire nous dit a qu’il y était subordonné aux autres, qui lui étaient supérieurs par la fortune et la faveur. » L’Estoile avait le plus grand de tous les mérites : il acceptait docilement les plans du cardinal et les suivait avec soumission. — Colletet était une espèce de bohème bourgeois, connu pour ses amours ancillaires. […] Après sa querelle avec le cardinal, son peu de fortune le force à rentrer à Rouen. […] De rage, Je rêvai sous le toit de mon cinquième étage Queje faisais fortune en rendant coup pour coup : Je m’endormis mouton et me réveillai loup. […] L’on mange ailleurs des fruits précoces ; l’on force la terre et les saisons pour fournir à sa délicatesse ; de simples bourgeois, seulement à cause qu’ils étaient riches, ont eu l’audace d’avaler en un seul morceau la nourriture de cent familles, tienne qui voudra contre de si grandes extrémités, je ne veux être, si je le puis, ni malheureux, ni heureux ; je me jette et me réfugie dans la médiocrité. » (Chapitre Des Mens de fortune. […] Victorien Sardou ne nous montre ici que la superficie des choses ; qu’il eût été intéressant d’étudier un peu à fond le type du parvenu de l’Empire, de l’homme du peuple devenu prince par son épée, mélange de simplicité, de brutalité et d’idéalisme (car, pour le soldat de ce temps-là, la guerre fut réellement, pendant vingt ans, un métier, — ce qui ne s’est pas revu depuis, — et il y eut en lui du condottiere et de l’homme de proie, et aussi du troubadour, comme en témoigne la naïve et fastueuse phraséologie du temps ; et tout cela ensemble faisait un héros), si vous regrettez que l’auteur de Madame Sans-Gêne n’ait point essayé de nous peindre « l’état d’âme » très spécial et très curieux d’un de ces protagonistes soudains de la grande épopée, et les contre-coups et les retentissements d’une si invraisemblable fortune dans une âme fruste et mal préparée, et les étonnements, et l’espèce d’assurance éblouie devant une pareille destinée… je vous répéterai que M. 

1501. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

Elle vivait séparée de sa famille et avait quelque fortune, ou du moins elle en avait eu. […] En un mot, elle y avait perdu tout, mais tout, fortune et réputation. « J’ai souffert horriblement de la familiarité de ces gens-là, dit-elle, « mais comment refuser de leur rendre service ? […] Je demandai l’opinion de mon compagnon de route ; mais il avait appris la prudence, ou peut-être me trouvait-il trop curieux. « Bruant », me dit Marcel Schwob, « a découvert une nouvelle veine de poésie, et il est arrivé à son jour et son heure ; la fortune est venue à lui et il est resté artiste sérieux ; voilà qui promet un succès durable. […] » — « Excellentes. » Le poète tira ces mots d’une distance infinie. « Mes parents avaient quelque fortune ; elle n’a pas duré longtemps entre mes mains. […] Jules Renard a eu l’originalité de suivre le précepte qu’on lui criait de toutes parts, et comme la fortune aime à venir en aide aux ingénus, il a obtenu dès le commencement de sa carrière sa place à lui dans le monde des lettres, ce qui ne veut pas dire peu de chose.

1502. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Jocelyn (1836) »

Les objections au genre de succès que nous appelons de tous nos vœux et qui nous semble désirable pour l’honneur moral d’une nation chez qui la classe moyenne adopterait Jocelyn, autant que pour la fortune de Jocelyn lui-même, ces objections se tireraient plutôt, selon nous, des longueurs du livre et de certaines abondances descriptives ; car on peut dire plus que jamais de Lamartine en ce poëme, comme il dit de certains arbres des Alpes au printemps :   La sève débordant d’abondance et de force  Coulait en gommes d’or aux fentes de l’écorce.

1503. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LOUISE LABÉ. » pp. 1-38

Puis, ces treize années de jeunesse et de passion écoulées, elle se serait laissé épouser par le bon Ennemond Perrin, beaucoup plus âgé qu’elle, qui lui aurait offert sa fortune, son humeur débonnaire et ses complaisances, à défaut de savoir et de poésie ; elle aurait fait en un mot un mariage de raison, un peu comme Ariane désolée (chez Thomas Corneille) si elle avait épousé ce bon roi de Naxe, qui était son pis-aller.

1504. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

» Si le noble, l’intéressant, mais trop fragile Alexandre avait été un Charlemagne véritable, un monarque en tout à la hauteur de sa fortune, Mme de Krüdner était plus que justifiée : mais alors eût-elle été nécessaire ?

1505. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre II. Principale cause de la misère : l’impôt. »

En second lieu, pour la capitation, qui, à l’origine, distribuée en vingt-deux classes, devait peser sur tous à proportion de leurs fortunes, on sait que, dès l’abord, le clergé s’en est affranchi moyennant rachat ; et, quant aux nobles, ils ont si bien manœuvré, que leur taxe s’est réduite à mesure que s’augmentait la charge du Tiers.

1506. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

Pendant ce demi-siècle, où la France a occupé la scène, et où vous avez participé, tantôt à sa fortune, tantôt à ses conquêtes, tantôt à ses revers dans le Nord, tantôt aux orages féconds de ses révolutions intestines, un nouvel esprit, de nouveaux besoins, constitutionnels, politiques, sont nés en Italie.

1507. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

Vous saurez, comme nous, malgré la loi commune, Porter le cœur toujours plus haut que la fortune, Un cœur qui dans sa foi jamais ne se dément ; Et, de votre œuvre, à vous, quel que soit l’instrument, Ou le fer, ou la plume à mes doigts échappée, Tout sera dans vos mains noble comme l’épée.

1508. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (3e partie) » pp. 369-430

« L’Assemblée constituante, composée d’hommes mûrs, assis dans l’État, classés dans la hiérarchie sociale, n’avait eu que l’ambition des idées de la liberté et de la gloire ; l’Assemblée nouvelle avait celle du bruit, de la fortune et du pouvoir.

1509. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIe entretien. La passion désintéressée du beau dans la littérature et dans l’art. Phidias, par Louis de Ronchaud (1re partie) » pp. 177-240

ce présent n’a qu’un jour ; ils habitent, dans la permanence de leurs pensées, avec les immortels de l’histoire et de l’art ; ils sont contemporains de tous les passés et de tous les avenirs ; ils sont les abstractions supérieures de notre infime personnalité ; ce qu’ils habitent le moins, c’est notre terre : leur conversation, comme dit l’Apôtre, est avec les esprits invisibles ; purs esprits eux-mêmes, ils sont imperméables à nos misères de fortune ou de vanité.

1510. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (1re partie) » pp. 305-364

XVI Hugo, certes, était bien loin de songer alors à reprendre en sous-œuvre une révolution sociale, pendant que nous étions occupés, au risque de notre popularité, de notre fortune et de notre vie, à en restreindre et à en régulariser une autre.

1511. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (3e partie) » pp. 161-219

Il n’avait plus rien à faire sur la terre : il s’était préparé à la mort par un long testament pour une médiocre fortune.

1512. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série «  M. Taine.  »

Général, consul, empereur, il reste officier de fortune et ne songe qu’à son avancement.

1513. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

La vapeur contrainte pour la première fois à mouvoir des bateaux et des voitures ; la conquête de l’air entreprise par d’audacieux aérostats ; la foudre obligée de dire son secret et de suivre la route qu’on lui trace ; le magnétisme dévoilant quelques-uns de ses mystères, qui font l’étonnement de la foule et la fortune des charlatans : voilà, non le tableau complet, mais une esquisse rapide des fruits que fait naître une observation plus attentive du monde extérieur.

1514. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Division dramatique. » pp. 64-109

En ces rencontres donc, il faut trouver des couleurs pour obliger un homme à faire éclater tout haut sa passion, ou bien lui donner un confident avec lequel il puisse parler comme à l’oreille ; en tout cas, le mettre en lieu commode pour s’entretenir seul et rêver à son aise, ou enfin lui donner un temps propre pour se plaindre à loisir de sa mauvaise fortune.

1515. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Villemain » pp. 1-41

La fortune de l’enfant fut naturellement celle de l’homme.

1516. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vii »

La fortune est le plus puissant auxiliaire ; il ne faut pas la dédaigner ; d’ailleurs, ce dédain n’est jamais sincère.

1517. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Il sentait le ridicule de l’orgueil en délire ; il le raillait chez les autres, avec âpreté, afin de s’en préserver tout le premier, et il refusait tout : et la députation, et l’Académie, et la fortune, afin de ne pas perdre la tête et de garder intacte sa figure de bonhomme honnête, modeste et populaire. […] Les douze cents francs que me versa l’éditeur furent une fortune pour moi.

1518. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Mais à l’époque de Molière, ce ridicule existait beaucoup moins dans les maisons bourgeoises que dans la haute aristocratie, où il n’était pas aussi ridicule, puisque le rang et la fortune laissent un loisir dont il semble que les dames elles-mêmes ne sauraient faire un meilleur usage qu’en s’instruisant. […] Jean Poquelin n’avait jamais pardonné à un fils qui « pouvait vivre honorablement dans le monde », d’avoir quitté son nom et sa profession de tapissier pour se jeter sur le théâtre, et quand Molière voulut plus tard, avec la fortune princière qu’il avait acquise, donner quelque secours à son père dans le besoin, le vieillard rejeta ses offres, et réduisit ce fils, qu’il appelait amèrement monsieur Molière, à lui venir en aide sous le nom du physicien Rohault son ami461.

1519. (1841) Discours aux philosophes. De la situation actuelle de l’esprit humain pp. 6-57

et ne seraient-ce pas les classes élevées, ces classes qui les méprisent, qui en ont horreur, qui les jugent, ne seraient-ce pas elles qui paieraient le tribut au bourreau, si la roue de la fortune avait tourné différemment ? […] Les religions anciennes, en consacrant ou en permettant l’inégalité de fortune et de conditions, reconnaissaient pourtant l’égalité humaine, puisque, par le ciel et le paradis promis, elles réparaient, sur la terre, l’inégalité qu’elles autorisaient ; et c’est ainsi qu’elles constituaient le droit, lequel, vu la similitude de notre nature, ne peut être que l’égalité.

1520. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

Elle n’a pas de fortune. […] Un jeune soldat sans fortune, joli garçon nommé Arsace, la tente assez bien ; seulement, elle ne le tente guère : le gaillard ne dissimule pas beaucoup la prédilection qu’il a pour des jeunesses. […] Cela tient à maints phénomènes, tels que le progrès de la démocratie, la nouvelle répartition de la fortune, l’influence de l’étranger, le désordre national. […] La situation que tu m’as faite dans ta maison ne me permet pas de me subalterniser, aux yeux des personnes que tu reçois, par des dehors peu en rapport avec ta fortune. […] Du reste, ce jeune homme est digne de sa fortune.

1521. (1884) La légende du Parnasse contemporain

Mais celui là serait parfaitement méprisable qui verrait dans la fortune autre chose qu’un complément médiocre de la gloire, autre chose qu’une satisfaction secondaire obtenue par surcroît ; et quiconque la veut trop rapide, cette fortune, quiconque ne consent pas à souffrir longtemps, n’a qu’à rester dans la vie commune, n’a qu’à renoncer aux magnifiques chimères. […] Déjà, Alphonse Lemerre est assez opulent, pour que M. de Rothschild s’inquiète, la nuit, dans ses songes, de cette fortune grandissante ! Fortune dont nous nous réjouissons.

1522. (1853) Portraits littéraires. Tome II (3e éd.) pp. 59-300

Quant à Maurice d’O, fille d’honneur de la reine, qui se dévoue à la fortune de Louis de Rohan, je ne saurais ni l’aimer ni l’approuver ; car une femme ne peut aimer longtemps, sans s’avilir, un homme quelle méprise. […] Latréaumont traîne Louis de Rohan au supplice comme une victime prédestinée ; à vrai dire, il n’y a pas de lutte engagée entre le grand seigneur disgracié et le soldat de fortune. […] Placé entre une femme qui l’aime et un démon qui l’entraîne au fond de l’abîme, entre Maurice, qui lui sacrifie son honneur, qui lui offre sa fortune, et Latréaumont, qui l’a ruiné afin de pouvoir acheter son nom, Louis de Rohan pouvait devenir un personnage vraiment tragique. […] Il nous semble donc que la fortune des pièces de M. 

1523. (1890) Les princes de la jeune critique pp. -299

Ne sont-ils pas les dispensateurs ordinaires du succès, de la célébrité, et, comme de nos jours la célébrité se monnaie fort bien, de la fortune ? […] Honneur avant tout à ceux dont le cœur et la fortune se dépensent en bonnes œuvres ! […] Buloz se faisait accueillante pour ce favori de la fortune ; à vingt-six ans il en devenait le critique dramatique attitré et, pendant huit ans, juge de bien des œuvres, témoin de nombreux succès et de chutes plus nombreuses encore, il achevait de s’initier aux secrets de son art ; comme un attaché militaire qui suit les manœuvres des armées étrangères, il prenait de l’expérience aux dépens des autres, et, à la fin de l’an dernier, il pouvait reparaître au théâtre, plus maître de son talent, plus sûr de ses mouvements et du terrain. […] Le jeune maître est pour l’instant dans la plénitude de son talent et de sa fortune littéraire.

1524. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

Mon grand-père, contraint à un moment de sa vie, par des revers de fortune, à chercher un emploi, avait été chef de bureau à l’octroi de Passy ; maintenant c’était la maigre retraite, à peine suffisante, la vie restreinte et, pour les filles, qui dépassaient la trentaine, l’avenir sans issue, le définitif renoncement aux espoirs tenaces, tous les rêves secrets fauchés, avant d’avoir pu fleurir ; le dévouement résigné au père vieilli et aigri. […] Peut-être trouve-t-il que dans sa position de fortune, il vaut mieux paraître un simple roturier… ou bien il ne veut pas, parce qu’il ne veut pas ; tu sais qu’il n’est pas toujours commode, donc : motus ! […] Catherine croyait, sans doute d’après une aventure analogue qu’elle connaissait, que son père s’était remarié et qu’elle avait une belle-mère qui la détestait et l’enfermait au couvent, pour lui prendre sa fortune. […] LX Bien que, depuis ma sortie du couvent, l’on fût un peu en froid avec la tante Carlotta et la grand-maman Grisi, ma mère n’avait pas cessé de considérer la danse comme ce qu’il y avait de plus beau au monde, comme la seule carrière capable de conduire, par bonds rapides, à la fortune, et elle mûrissait, secrètement, un plan admirable : c’était de faire de nous des danseuses !

1525. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Ni Verlaine ni Mallarmé n’ont eu pareille fortune. […] sans songer que Racine avait dit dans Mithridate : Jusqu’ici la fortune et la victoire mêmes Cachaient mes cheveux blancs sous trente diadèmes. […] La Vie de saint Alexis, vers le onzième siècle, nous donne des exemples de l’accord, même dans les cas où il n’est plus d’usage : Ma grant honor aveie retenude (Ma fortune j’avais conservée Sire, dist èle, com longe demoréde Ai atendude en la maison ton pédre. […] Les Quatrains de Pierre Mathieu et ceux de Pibrac, qui versifient, admirablement d’ailleurs, la morale usuelle, ont eu une fortune moins longue, mais longtemps solide.

1526. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Mettez-vous à la place d’un bon savant sexagénaire, qui verrait détruire en trois semaines la science à laquelle il a consacré sa vie, dans laquelle il a gagné les honneurs, sinon la fortune, dans laquelle il est un maître ! […] Il se hasarda tout de même à donner à son maître le bon dieu, non sans confession, mais sans armoiries, disant pour pallier son audace : « Allons, monsieur le baron, à la fortune du pot !  […] On ne voit pas bien la noblesse que peut retirer une femme de la perte de sa beauté ou un homme de la perte de sa fortune. […] Villiers de l’Isle-Adam, si riche en paradoxes où la vérité se dissimulait parfois, prétendait que le premier des Rothschild avait pour principe de ne fréquenter que des gens heureux, et c’est ainsi qu’il fit sa fortune.

1527. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

C’est une espèce d’homme roux, — la plus noble couleur du poil humain, au témoignage de la Genèse, — assez semblable à ces terribles officiers de fortune de la Guerre de Trente Ans, à la solde de Tilly ou de Wallenstein qui écumaient l’Allemagne avec leur épée, comme les sorcières de Macbeth écumaient de leurs sales doigts le chaudron aux impossibles mixtures. […] Dumas fils, au contraire, tire fortune et gloire de ce spectacle et la France, tout à fait domptée par ses domestiques et ses histrions, contemple avec un œil humide d’attendrissement ce grand nègre de métal qui se profile sur l’azur des cieux ! […] Ce furent un prince et une princesse de Bourbon qui eurent le malheur de faire sa fortune. […] Les jeunes poètes seront toujours, comme chacun sait, des fauves très doux et des insatiables qui se contentent de peu — quelque chose comme les Héliogabales de la modération — et la ferveur ambiante des Hydropathes a peut-être redonné l’essor à quelque noble oiseau bleu saignant une dernière fois dans le bleu plus profond du ciel, avant de retomber sur cette plate terre qui ne paraît ronde qu’aux géographes ou aux voluptueux favoris de la Fortune.

1528. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Si j’ai la même fortune que l’an dernier, comme il est probable, ma volonté en sera innocente ; je ferai tout pour surnager. […] Il est arrivé plus tard à la gloire, à la fortune ; mais il n’a point oublié qu’il sortait du peuple et qu’il devait sans doute à cette humble origine quelques-unes de ses meilleures qualités. […] Il voudrait que les jeunes gens de la bourgeoisie se fissent les apôtres de l’union entre les classes en s’occupant de l’instruction populaire, que les écoles, devenues écoles libres, dépendant seulement des communes, fussent à tous les degrés de l’enseignement accessibles à tous les jeunes gens sans distinction de fortune d’après le mérite seul ; enfin que la commune jouât dans la vie nationale un rôle beaucoup plus grand qu’aujourd’hui, que chacun consacrât à l’association communale le meilleur de ses forces. […] Même si son indépendance de pensée n’avait pas été garantie par son indépendance de caractère, elle l’eût été par son indépendance de fortune. […] L’histoire déroule une vaste psychologie qui embrasse dans un ordre successif toutes les notions, toutes les facultés qui constituent l’intelligence de l’homme ; chaque notion, chaque faculté se révèle tour à tour sous la forme d’un parti, d’une nation, d’une doctrine, et fait à travers les événements sa fortune dans le monde.

1529. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

A côté des méchants, c’est-à-dire de ceux qui ont laissé prendre à la volonté un développement excessif et sont devenus, au dernier degré, les monstres ou les tyrans, les Néron, les Domitien, les Robespierre, il y a les bons, c’est-à-dire ceux qui ont sacrifié leur fortune ou leur vie au bien de leurs frères ou à leur patrie : Codrus, Léonidas, Régulus, Décius, Huss, Winkelried ; et ceux qui se sont exposés de leur plein gré à la souffrance et à la mort « pour assurer à l’humanité ce qui est son bien et peut aider à son bonheur, pour préserver des vérités d’ordre général, pour extirper des erreurs graves », comme Socrate ou Giordano Bruno ; et encore les résignés, les ascètes, qui ne se sont pas contentés d’aimer les autres à l’égal d’eux-mêmes, mais qui se sont révoltés contre la volonté de vivre et l’ont domptée par le jeûne, les mortifications, la souffrance et la pauvreté volontaires. […] La théorie de l’hérédité le frappa : il pensa qu’on pouvait l’utiliser en littérature, et il conçut son histoire des Rougon-Macquart — c’est-à-dire qu’il se mit à étudier, comme il l’expose dans la préface de la Fortune des Rougon, « la lente succession des accidents nerveux et sanguins qui se déclarent dans une race, à la suite d’une première lésion organique, et qui déterminent, selon les milieux, chez chacun des individus de cette race, les sentiments, les désirs, les passions, toutes les manifestations humaines, naturelles et instinctives, dont les produits prennent les noms convenus de vertus et de vices »  Ce faisant, M.  […] De même la fortune ne se fait qu’avec des ruines, l’intelligence n’acquiert qu’en détruisant. […] Tout ce qu’on en peut conserver, c’est que le comte Tolstoï a renoncé à écrire pour augmenter sa gloire ou sa fortune ; que les ouvrages qu’il publie à présent, dégagés de toute préoccupation littéraire, sont des espèces de « traités », dont le but unique est de répandre la doctrine morale et religieuse à laquelle il s’est rallié ; que, cherchant à être conséquent avec ses nouveaux principes, il a renoncé au luxe, partage les travaux de ses paysans, considère le travail manuel comme le seul qui convienne à la condition humaine. […] Aussi a-t-elle fait fortune : elle est devenue la religion des esprits cultivés, auxquels le matérialisme genre conseil municipal répugne absolument ; elle a été le courant intellectuel le plus puissant peut-être de ce dernier demi-siècle  A ce courant, un autre vient se joindre : le pessimisme, dont Schopenhauer19 prêché la loi, et qui, déformé, exagéré et, il faut bien le dire, vilipendé par les disciples et les commentateurs, a fourni des dogmes acceptables à certains esprits que le scepticisme renanien laissait mécontents.

1530. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Il fait un opéra avec mademoiselle Bertin, et, moins difficile que les ignorants de choses de théâtre, il reconnaît que dans les poèmes d’opéra « les rimes sont les très humbles servantes des notes » ; il demande une pension pour Élisa Mercœur, qui est dans la misère ; un peu dépourvu d’argent lui-même, il paye une dette paternelle avec une somme de deux cents francs qu’il réservait pour s’acheter une montre ; minimes détails pour beaucoup, mais bien intéressants pour les écrivains à qui il est nécessaire de savoir que la fortune et la gloire ne s’acquièrent pas dès le premier coup de plume. […] La Maison de l’Enfance Voici un recueil de vers que le succès a accueilli dès son apparition, rare fortune par ce temps qui n’est guère favorable à la poésie. […] Rien de plus drôle que sa visite à l’une de ses victimes qui est venue faire fortune à Paris sous le nom de Liane de Beaugency et qui, en voyant l’insistance du paysan à vouloir lui rendre l’honneur qu’elle ne regrette pas du tout, l’envoie, en pouffant de rire, dîner à l’office avec son cocher et ses nombreux domestiques ; après quoi il est mis à la porte par la belle fille qui lui crie dans un éclat de rire et pour désarmer sa persistance : — « Mais, imbécile, c’est mon déshonneur qui fait ma fortune !  […] On a cherché bien loin la raison de la fortune subite du général.

1531. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

Cet article sur De Vigny demande plus d’une explication et non-seulement permet, mais exige un commentaire. il a eu, en effet, cette rare fortune d’être contesté et refuté par l’auteur lui-même.

1532. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. » pp. 124-157

Un cousin pourtant était passé à la Guadeloupe et y avait fait fortune.

1533. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIIe entretien. Poésie lyrique. David (2e partie) » pp. 157-220

« Je dis aux superbes : N’élevez pas si haut votre front ; car ce n’est ni de l’orient, ni de l’occident, ni du septentrion, ni du désert que vient la fortune.

1534. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (4e partie) » pp. 1-63

Il y a peu de grandes âmes qui ne sentent en naissant la persécution de la fortune, et qui ne commencent par une révolte intérieure contre la société.

1535. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 321-384

Ce fut bien là le malheur ; ces enfants s’aimaient trop pour que la fille devînt une grande dame de Lucques, et pour que le garçon fît une autre fortune que dans le cœur d’une fille des châtaigniers.

1536. (1912) Enquête sur le théâtre et le livre (Les Marges)

Il me paraît contraire à tout ce que nous savons sur la fortune des œuvres de génie qu’une d’elles puisse d’emblée séduire l’immense public.

1537. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre cinquième »

Il appréhendait les retours de fortune, et il semble qu’il voulût les conjurer, en s’y offrant avec toutes les grâces d’une modestie à laquelle, d’ailleurs, il eût été imprudent de se fier.

1538. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Ce qui a fait la fortune du catholicisme de nos jours, c’est qu’on le connaît très peu.

1539. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Edgar Allan Poe  »

Cet être, issu du mariage d’une comédienne et d’un gentillâtre que sa famille renia, ayant pour frère aîné un demi-fou et pour sœur puinée une idiote, laissé orphelin à trois ans, adopté par une famille riche et passant sa jeunesse dans ces orgueilleux états du Sud, où se recrutèrent les esclavagistes, élevé sans affection dans l’attente d’une grande fortune, dissolu, endetté, désavoué par un père adoptif, ayant mené à deux reprises pendant deux ans une vie d’aventures et de vagabondages inconnus, fut ramassé mourant de faim à Baltimore, par un vieux journaliste que ses premiers essais avaient étonné, Il vient ici une éclaircie de quelques années.

1540. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

Il avait la fortune qui le dispensa de la terrible lutte pour la vie, et qu’il remplaça noblement par la lutte pour l’esprit, qui n’est pas toujours plus heureuse… Il travailla, en effet, comme s’il eût eu besoin de travailler.

1541. (1923) Nouvelles études et autres figures

Ce n’était point, nous dit-il judicieusement, pour fuir la richesse, ni la fortune, mais l’odieuse pauvreté. […] D’ailleurs, il est toujours dangereux de mettre toute sa fortune dans la cale d’un vaisseau. […] Il était né en 179210, et il était le premier né des cinq enfants, deux fils et trois filles, d’un hobereau du Sussex, Timothy Shelley, fier de sa fortune, fier de son nom, dont il s’exagérait la noblesse, infatué de lui-même, esclave du cant, un de ces gentilshommes anglais qui donnaient à Byron la nausée de l’Angleterre. […] Un Été dans le Sahara et Une Année dans le Sahel n’ont pas seulement augmenté de deux chefs-d’œuvre notre littérature de voyage ; mais il a eu la rare fortune d’être encore plus en littérature qu’en peinture le découvreur et l’initiateur artistique d’un nouveau pays. […] Il ne profitait même pas d’un sourire de la fortune pour hâter sa marche.

1542. (1902) Propos littéraires. Première série

Et il la lui faut absolue ; égalité de droits, de fortune, de jouissances, de bien-être, de rémunération, etc. […] Mlle Vallée, orpheline de bonne heure, mais orpheline riche, a été élevée par des parents pauvres qu’elle enrichissait du revenu de sa fortune, et la voilà, à vingt ans, absolument libre de tous ses actes et éprise du mélancolique et beau M.  […] Alors elle s’est mise à exploiter ses qualités pour sa fortune. […] Cherbuliez y plaçait un de ses meilleurs romans, un de ses meilleurs, absolument digne du Cherbuliez d’il y a vingt ans, Après fortune faite, qui a cette ressemblance avec Idylle tragique, d’abord qu’il y a aussi un Américain brasseur de millions, ensuite que, si une moitié, qui est la seconde, est la meilleure partie du roman de M.  […] C’est bien lui, je le sais, qui a, concurremment avec le mot « physique sociale », créé le mot « organisme social », lequel a fait, comme celui de « sociologie », qui est aussi de Comte, une si grande fortune.

1543. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

Donc, je crois, selon l’expression de Stéphane Mallarmé, le vers libre viable ; quoi qu’il arrive désormais, il existe ; il peut régner, il peut être utilisé occasionnellement ; ceci c’est sa fortune, sa chance, son hasard, en tout cas il est. […] N’importe, le succès du sonnet aida à la fortune du mot décadence ; la presse, dont nous nous souciions fort peu en général, rattrapa le mot (déjà Robert Caze et quelques autres portaient de l’attention à ce mouvement) et l’école décadente eut plus de consistance après ce sonnet. […] Par un abandon de ses droits à de petites sœurs très cadettes, Laforgue se trouvait sans fortune aucune, et il n’avait aucune espèce d’économies. […] Zola, qui fut le théoricien, à tout instant et à son grand regret, des échappées de lyrisme s’évadent, et que ce livre imprégné de soleil, la Fortune des Rougon, n’est pas d’un pur naturaliste. […] Le romantisme allemand a eu la fortune de s’appuyer tout de suite sur le jaillissement de la poésie populaire, d’où, chez lui, un pittoresque plus sûr, mais moins éclatant et moins varié.

1544. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

Après une longue suite de fortunes diverses, favorable un jour au parti guelfe, un jour au parti gibelin, la cité, vers cette époque, restait aux guelfes. […] Là sont en très grand nombre des papes, des cardinaux, des clercs, des tonsurés de tous grades, qui, selon la dédaigneuse expression de Dante, se sont laissé tromper par « la courte moquerie des biens de la fortune. »        La corta buffa De’ ben, che son commessi alla Fortuna. […] Devenu maître en sa profession et citoyen de la ville de Francfort, où il était venu s’établir et où il se maria deux fois, en possession d’une petite fortune bien acquise, le grand-père de notre poëte avait pu quitter les ciseaux et donner à ses fils l’éducation libérale.

1545. (1890) Le réalisme et le naturalisme dans la littérature et dans l’art pp. -399

Courbet l’avait à peine adoptée, qu’elle se répandit par le monde et prit aussitôt une signification plus vague et plus étendue, comme les mots qui font une trop rapide fortune et qui sont discutés avant d’être bien établis. […] D’abord, tout en gardant ses préférences pour les honnêtes gens qui la composent, ne peut-on saisir et appréhender ceux qui errent autour d’eux pour les exploiter, l’entremetteuse, la marchande à la mode, la femme d’intrigues, l’homme à bonnes fortunes ? […] E. de Goncourt, a été écrit avec les recherches qu’on met à la composition d’un livre d’histoire et je crois pouvoir avancer qu’il est peu de livres fabriqués avec autant de causeries, de confidences, de confessions féminines : bonnes fortunes littéraires arrivant, hélas ! […] Viennent ensuite des explications injurieuses pour la nature humaine : « La moralité, qu’il ne faut pas confondre avec la religion, commence à l’aisance ; comme on voit, dans la sphère supérieure, la délicatesse fleurir dans l’âme quand la fortune a doré le mobilier. […] C’est bien indubitablement à la loi de l’équilibre physique que tout se ramène : si l’équilibre évoque l’idée de l’harmonie, de la beauté, de la noblesse, c’est une heureuse fortune.

1546. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

. — Et oui, encore, c’est une admirable tradition, devenue loi de caste, que le plébéien devenu noble ne dût plus s’enrichir ; seulement, s’il ne s’enrichissait point par le travail, il s’enrichissait par la faveur, et puisait, à Versailles, la richesse toute faite et toute liquide, comme plongeant, la coupe en main, à même la fortune publique ; et ainsi le travail du noble était interdit, mais non évitée la ploutocratie. — Et oui, les libertés locales, qu’elles s’appellent privilèges ou d’un autre nom, sont choses excellentes ; mais un intendant de Louis XIV ou de Louis XV n’est déjà guère autre chose qu’un préfet, ou un préteur ; — et ainsi de suite. […] Le roman psychologique, inventé par La Rochefoucauld et Racine, et écrit pour la première fois par Mme de La Fayette, n’avait pas eu en France une très grande fortune.

1547. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

Tel qu’il va, roule, tangue dans le dessin de Gus Bofa, voilà vingt ans qu’il marche ainsi, vingt ans qu’il peut dire à la mobile fortune : « Tu es seule mon père et ma mère, mon foyer et mes dieux. » Peut-être M.  […] La « recherche de l’absolu » nous passionne surtout ici par le mouvement dont elle ronge une vieille fortune de famille, comme dans un autre roman se rétrécit sous le feu d’une vie ardente la symbolique peau de chagrin, Balzac a puissamment ramené son roman à un roman d’argent. […] Giraudoux me paraît se relier à cette veine, participer à cette nature, comme, au contraire des Illuminations, il n’est pas un livre isolé, un aérolithe étrange, mais se relie à toute la littérature de la génération montante (qui n’est d’ailleurs pas la mienne et que je vois d’un autre rivage) il y a bien des possibilités pour qu’il fasse une fortune durable. […] Sa fortune même est consubstantielle à ce silence. […] Mais son premier mouvement est pour maintenir le silence autour de cette fortune.

1548. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre II. Les Normands. » pp. 72-164

Considérez donc ce Français, Normand, Angevin ou Manceau, qui dans sa cotte de maille bien fermée, avec son épée et sa lance, est venu chercher fortune en Angleterre. […] « Or selon mon avis, entre toutes les seigneuries du monde dont j’ay connaissance où la chose publique est mieux traitée, et règne moins de violence sur le peuple, et où il n’y a nuls édifices abattus ny démolis pour guerre, c’est Angleterre, et tombe le sort et le malheur sur ceux qui font la guerre… Cette grâce a le royaume d’Angleterre par dessus les autres royaumes, que le peuple ni le pays ne s’en détruit point, ny ne brulent, ny ne démolissent les édifices, et tombe la fortune sur les gens de guerre, et par espécial sur les nobles. » 176.

1549. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1894 » pp. 185-293

Et, comme il est question de l’excentricité du peintre, Duret raconte qu’il a été saisi à Londres, un jour où il donnait un déjeuner, où il avait pour convives la duchesse de Westminster, et je ne sais plus quel autre Anglais : tous deux les deux plus grandes fortunes d’Angleterre : convives près desquels, — il avait trouvé drôle de faire asseoir à sa table du déjeuner, les deux exécuteurs de la saisie. […] Un moment, il est question des courses, et Régamey dit assez intelligemment, que les courses sont en train de ruiner absolument la petite bourgeoisie, la classe intermédiaire entre le richard et le sans-le-sou, et quand ce tampon va être détruit, les sans-le-sou vont se trouver nez à nez avec les grosses fortunes, et là, va commencer la débâcle.

1550. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

Il quitta Fouché dans le temps précisément où il faisait bon de s’attacher de plus près à ce régime de toutes parts affermi et à ces fortunes grandissantes : « — Mais vous êtes fou, lui disait Fouché, qui avait de l’affection pour lui ; c’est le moment plutôt de rester, nous arrivons38. — Non, répondait Fauriel, ce n’est pas ainsi que je l’ai entendu. […] Mais cette tâche leur est bientôt ravie par la fortune ; elle retombe à Charles Martel et à Charlemagne, qui en confisquent aussi toute la gloire. […] Nous n’essayerons pas un seul instant de suivre la fortune du beau pays à travers les complications misérables de l’anarchie carlovingienne ; cette anarchie pourtant le servait.

1551. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

; des couplets à une jolie janséniste, et qui finissaient par cette pointe : Pour mes tendres réflexions   Quelle heureuse fortune, Si de cinq propositions   Vous en acceptez une !

1552. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

Le sacrifice est voté par acclamation ; ils viennent d’eux-mêmes l’offrir au Tiers-état et il faut voir dans les procès-verbaux manuscrits leur accent généreux et sympathique. « L’ordre de la noblesse du bailliage de Tours, dit le marquis de Lusignan545, considérant que ses membres sont hommes et citoyens avant que d’être nobles, ne peut se dédommager, d’une manière plus conforme à l’esprit de justice et de patriotisme qui l’anime, du long silence auquel l’abus du pouvoir ministériel l’avait condamné, qu’en déclarant à ses concitoyens qu’elle n’entend plus jouir à l’avenir d’aucun des privilèges pécuniaires que l’usage lui avait conservés, et qu’elle fait par acclamation le vœu solennel de supporter dans une parfaite égalité, et chacun en proportion de sa fortune, les impôts et contributions générales qui seront consenties par la nation. » — « Je vous le répète, dit le comte de Buzançais au Tiers-état du Berry, nous sommes tous frères, nous voulons partager vos charges… Nous désirons ne porter qu’un seul vœu aux états et, par là, montrer l’union et l’harmonie qui doivent y régner.

1553. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviie entretien. Un intérieur ou les pèlerines de Renève »

Il aimait lui-même beaucoup M. de Lamartine ; il avait revendu pour six ou sept cent mille francs du domaine, et il habitait ce qui en restait, ayant offert lui-même à M. de Lamartine de lui rendre la maison de son père et quelques vignes alentour, au prix coûtant, si la fortune, qui lui était si sévère, lui permettait de songer à y rentrer, et ce procédé d’homme de cœur annonçait le plus aimable et le plus sensible des acquéreurs.

1554. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

On se réglera par le respect des coutumes, par la religion établie, par les opinions modérées ; on tâchera d’être ferme dans ses actions, de se vaincre plutôt que sa fortune, « à cause, dit-il, qu’on n’est maître que de ses pensées », de ne rien désirer qu’on ne puisse avoir.

1555. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Lettres de m. l’Abbé Sabatier de Castres ; relatives aux trois siecles de la littérature françoise.ABCD » pp. -641

Croiriez-vous que dans un de ces Libelles, vraiment philosophiques, on m’ait sérieusement reproché mon peu de fortune & attaqué du côté de la naissance ?

1556. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — IV. La Poësie dramatique. » pp. 354-420

Il oublie le motif pour lequel Scarron faisoit valoir le marquisat de Quinet, & l’abbé Devertot donnoit des ouvrages avant que sa fortune fût commencée.

1557. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

L’idée de l’évolution par exemple, appliquée avec succès dans certaines parties de l’histoire de la nature, se porte audacieusement, dans l’ardeur de sa fortune nouvelle, pour la loi unique, contenant l’explication universelle des phénomènes et la solution définitive de la grande énigme.

1558. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre II. Le comique de situation et le comique de mots »

Qu’on relise le récit de Chicaneau dans les Plaideurs : ce sont des procès qui s’engrènent dans des procès, et le mécanisme fonctionne de plus en plus vite (Racine nous donne ce sentiment d’une accélération croissante en pressant de plus en plus les termes de procédure les uns contre les autres) jusqu’à ce que la poursuite engagée pour une botte de foin coûte au plaideur le plus clair de sa fortune.

1559. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Son père, un Provençal intelligent et lettré, était venu chercher fortune à Paris. […] Seul à Paris, La Reine Ulfra était toute sa fortune. […] Au théâtre comme à la guerre, le talent ne suffit pas ; il faut encore avoir pour soi la fortune. […] Or, Sardou étant d’aventure allé voir Féval, celui-ci lui dit : « Puisque Fechter veut être gibbeux, il y avait dans la rue Quincampoix, au temps de Law, un petit bossu qui louait sa bosse aux Mississippiens et qui fit fortune. […] Le premier roman, La Fortune des Rougon, est précédé d’une préface qui expose le but de l’œuvre.

/ 1718