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835. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Les Chants modernes, par M. Maxime du Camp. Paris, Michel Lévy, in-8°, avec cette épigraphe. « Ni regret du passé, ni peur de l’avenir. » » pp. 3-19

D’autres, au contraire, selon qu’ils survenaient avec plus de jeunesse et de fougue, ou avec plus de préméditation peut-être et de calcul, prenaient pour point de départ dans les œuvres du célèbre poète précisément ce qui était le terme extrême au-delà duquel n’allaient point leurs aînés. […] Dans les autres chants le poète a fait comme nous tous en notre saison, il a exhalé ses sentiments, ses regrets d’enfance, ses blessures secrètes, ses tourments de jeunesse.

836. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

et comment aurais-je pu haïr sans jeunesse ? […] Cette illumination divine, cause des œuvres extraordinaires, est toujours liée au temps de la jeunesse et de la fécondité.

837. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

Mais, plus à plaindre que Virgile, Térence n’avait que trente-cinq ans environ, la première jeunesse pour un auteur comique, l’âge même auquel Molière a commencé sa grande carrière. […] Son fils n’annonçait d’abord aucune passion trop vive ; les chevaux, la chasse et les chiens, les philosophes, ces goûts ou ces passions de la première jeunesse, il en usait, mais sans en abuser, mais sans excès.

838. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite et fin.) »

Le spectacle d’une folle jeunesse qui se noie dans les plaisirs et dans l’orgie au sortir de l’enfance est de tous les temps : il est vrai qu’ici ces circonstances caractéristiques d’être colonel presque à la jaquette et de faire sa première communion de raccroc à la dernière heure, grâce à un prince-abbé aussi édifiant, impriment à l’historiette une variété piquante et y mettent en plein la signature du xviiie  siècle. […] Il avait pour adversaires les premiers lieutenants de Frédéric, le duc Ferdinand de Brunswick, et son neveu le prince héréditaire, un héros dans toute l’ardeur de la jeunesse.

839. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre IV. Poésie lyrique »

Toutes ces chansons ne parlent que d’amour ; c’est la jeune fille, joyeuse de sa jeunesse et d’être jolie, qui se vante d’avoir un ami, ou se plaint de ne pas en avoir ; qui veut épouser celui que ses parents lui refusent, ou refuse celui qu’ils lui donnent, et nous dit leur dureté. […] Il alla dans sa jeunesse (avant 1186) en Bretagne : c’est là qu’il fit la jolie chanson les Oisillons de mon pays — ai ois en Bretagne.

840. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre X. La commedia dell’arte en France pendant la jeunesse de Molière » pp. 160-190

La commedia dell’arte en France pendant la jeunesse de Molière Après la mort du cardinal de Richelieu et du roi Louis XIII, sous le ministère de Mazarin, les troupes italiennes affluèrent à Paris. […] Et voici les vers « pour Jean Doucet et son frère voulant tromper les bohémiennes » : Quand un homme fait le brave Et se croit en sûreté Près d’une aimable beauté Qui tâche à le rendre esclave, Et qu’elle employe à cela Finement tout ce qu’elle a De charmes et de jeunesse ; Il est comme Jean Doucet Auprès d’une larronnesse Qui fouille dans son gousset.

841. (1890) L’avenir de la science « XII »

Je vais dire le plus ravissant souvenir qui me reste de ma première jeunesse ; je verse presque des larmes en y songeant. […] que l’Histoire universelle, objet d’une admiration conventionnelle, œuvre d’un théologien arriéré, pour apprendre à notre jeunesse libérale la philosophie de l’histoire !

842. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le cardinal de Retz. (Mémoires, édition Champollion.) » pp. 238-254

S’il vécut en Catilina dans sa jeunesse, a dit Voltaire, il vécut dans sa vieillesse en Atticus. […] Ce grand frondeur qui, dans sa jeunesse, avait cherché vainement à tenir la balance entre les partis, entre Monsieur, le Parlement et la Cour, et qui, à défaut de balance, avait pris l’épée, et même contre M. le Prince, en était venu dans sa vieillesse à cet arbitrage innocent.

843. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

Le tempérament de Mirabeau devait faire rêver cet autre tempérament… Le début, dans la prose de Mme Louise Colet, fut une Étude sur la jeunesse de Mirabeau ; mais le Mirabeau de cette étude, fort peu savante, n’est pas le Mirabeau historique ; c’est le Mirabeau romanesque, et ce livre n’est guère qu’un roman. […] Mme Colet se précipita, dès sa jeunesse, dans les idées de la Révolution, parce qu’elle n’était pas princesse et qu’une société où elle n’était pas princesse était nécessairement une détestable société.

844. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — Notice sur M. G. Duplessis. » pp. 516-517

Les doctes du xvie  siècle, les Étienne Pasquier et autres n’ont-ils pas eu ainsi leurs gaietés et leurs jeunesses ?

845. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Baudelaire.] » pp. 528-529

J’aime plus d’une pièce de votre volume, ces Tristesses de la lune, par exemple, délicieux sonnet qui semble de quelque poète anglais contemporain de la jeunesse de Shakespeare.

846. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Jouffroy.] » pp. 532-533

J’en donnerai un extrait à l’usage des curieux en matière de biographie littéraire et qui, une fois mis en goût sur un auteur de renom, trouvent qu’on n’en sait jamais trop : …… Peut-être ne vous sera-t-il pas indifférent d’avoir quelques détails sur la jeunesse du philosophe dont vous suiviez avec tant d’amour les leçons dans sa petite chambre de la rue du Four.

847. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XLVIII » pp. 188-192

Il a fort connu dans sa jeunesse Bernardin de Saint-Pierre, dont il a publié la vie et les écrits, dont il a même épousé la veuve.

848. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXIV » pp. 294-298

Saint-Marc Girardin, vers la fin de son discours, avait assez délicatement touché cette situation en disant : « Et pardonnez-moi, messieurs, si le souvenir de nos jeunes princes50me ramène naturellement vers ces écoles d’où ils sont sortis, vers ces lieux où j’ai mes plus doux devoirs, où il m’est donné de vivre avec les jeunes gens, et d’observer l’avenir de la patrie à travers le leur ; là aussi je vois la jeunesse toujours favorable aux bons sentiments et aux nobles pensées, toujours aisément émue quand on lui parle des saintes obligations de la famille ou de la gloire de la France ; bienveillante, j’ai droit de le croire, pour ceux qui l’instruisent, pour ceux même qui l’avertissent.

849. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Appendice. »

Dames, plaignez ma jeunesse perdue, Fleur primtanière en sa tige mordue Et desséchée !

850. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Début d’un article sur l’histoire de César »

Cette ambition unique, qu’ils se sont proposée et inculquée dès la jeunesse, et qu’ils n’ont abdiquée à aucun moment, cette éducation qu’ils se sont donnée, si exclusive, si incomplète, mais si perpétuellement tendue vers un seul point, leur a réussi ; ils ont élevé leur esprit et leur pensée jusqu’à la hauteur du but, invraisemblable pour tous et certain pour eux seuls, qu’ils contemplaient toujours et auquel ils visaient sans trêve.

851. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MARIA » pp. 538-542

Or, puisque c’est l’attrait dans la belle jeunesse Que ce luxe ondoyant que le zéphir caresse, Et d’où vient jusqu’au sage un parfum de désir, Je veux redire ici, d’un vers simple à plaisir, Non pas le jeu piquant d’une boucle enlevée, Mais sur un jeune front la grâce préservée.

852. (1875) Premiers lundis. Tome III « Lafon-Labatut : Poésies »

Celui-ci avait eu, il paraît, une vie fort errante et orageuse : après avoir un instant brillé à Paris dans la jeunesse dorée du temps, il s’était engagé, avait fait la guerre et couru le monde, puis s’était marié à Messine ; là, un jour, regrettant la patrie et songeant aux moyens d’y revenir, il lui tomba entre les mains un des volumes des Troubadours, dans la préface duquel M. 

853. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Béranger, Pierre-Jean de (1780-1857) »

Béranger a été corrupteur, mais qu’il a choisi de préférence, dans la corruption, ce côté ignoble et grossier qui n’a rien de commun avec les ardeurs de l’amour et de la jeunesse, mais qui plaît aux libertins de mauvais ton, aux sexagénaires blasés, aux Don Juan de comptoir et d’estaminet.

854. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rimbaud, Arthur (1854-1891) »

Van Bever Rimbaud laisse un bagage poétique fort restreint, et qui date de sa prime jeunesse.

855. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 329-336

Bossuet fût né avec les plus heureuses dispositions pour l’Eloquence, son éloquence dut cependant beaucoup aux travaux assidus de sa jeunesse.

856. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Doyen  » pp. 153-155

On aurait pu lui donner plus de noblesse dans le visage ; rendre ces cadavres fraîchement égorgés moins livides ; écarter la confusion, du groupe d’Enée, d’Apollon, du nuage et des cadavres, en y conservant le désordre, et éviter quelques autres défauts qui échappent dans la chaleur de la composition et qui tiennent à la jeunesse de l’artiste.

857. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Mercier » pp. 1-6

— imitant en cela les mères sans fécondité, qui gâtent le petit nombre d’enfants qu’elles eurent dans leur chétive jeunesse ou qui adoptent ceux des autres mères.

858. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Saint-Marc Girardin »

imitant en cela les mères sans fécondité qui gâtent le petit nombre d’enfants qu’elles eurent dans leur chétive jeunesse, ou qui adoptent ceux des autres mères.

859. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Elle pâtira dans sa fierté, dans sa jeunesse, dans sa tendresse. […] De tous côtés, on nous annonce une jeunesse qui vaut mieux que nous, une jeunesse que nos péchés ont avertie et qui profitera de notre exemple pour ne pas nous ressembler. […] Or, il paraît que toute une jeunesse apprit dans ses livres si attrayants l’histoire de France. […] Rosalie absente, il ne reste à la maison ni joie, ni jeunesse ; et les bambins eux-mêmes sont moroses, nerveux. […] Notre jeunesse a le sentiment d’être née dans des ruines.

860. (1846) Études de littérature ancienne et étrangère

La lecture des écrivains grecs, la passion de la poésie, la rhétorique, la philosophie occupèrent les premières années de sa jeunesse. […] Cicéron se présente avec le courage de la jeunesse, confond les accusateurs, et force les juges d’absoudre Roscius. […] Il fit d’abord, comme tribun militaire, la guerre des Cantabres, rude et ancienne école de la jeunesse romaine. […] La beauté, la jeunesse étaient enlevées par des satellites, pour être souillées par un monstre impur. […] C’est l’influence, ou de la première jeunesse, ou de cette profession de sophiste, qui devait perpétuer, jusque dans un âge plus avancé, les défauts de la jeunesse.

861. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

La jeunesse aux habits dorés osait encore se montrer ; ces muscadins devaient être bien vite réduits au silence. […] depuis le départ amer qui fera toujours ma douleur, n’ai-je pas assez payé ma jeunesse, n’ai-je pas assez payé mon amour ? […] Quelle est la cause de cette pénible rupture du poète avec la foi de ses pères et de sa jeunesse ? […] Empêchons la jeunesse de voir l’œuvre de Manet. […] — léger fardeau pour les vieillards, lourd fardeau pour la jeunesse : — Cours vite !

862. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

Chactas raconte la grande aventure de sa jeunesse quand il ne comptait encore que « dix-sept chutes de feuilles ». […] … Rêveries de ma jeunesse, pourquoi renaissez-vous dans mon souvenir ? […] Puis Eudore tombe dans tous les désordres de la jeunesse et oublie sa religion (comme fit le jeune Chateaubriand à Londres). […] De 1811 à 1814, il écrit les premiers livres, son enfance, sa jeunesse, jusqu’au départ pour l’Amérique. […] Il est jeune encore (quarante-trois ans) quand il raconte son enfance et sa jeunesse.

863. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Comme tant d’autres aussi, faute de s’être pliée à des convenances factices, mais nécessaires, elle avait vu ses espérances trompées, sa jeunesse passer sans plaisir, et la vieillesse enfin l’avait atteinte sans la soumettre. […] Je me suis jeté sur la jeunesse, et, quoi qu’on die, je ne parle presque plus à des femmes de plus de trente ans. […] À vingt ans, Benjamin Constant se considérait déjà comme bien blasé, bien vieux, et il lui échappait quelquefois de dire : Quand j’avais seize ans , reportant à cet âge premier ce qu’on est convenu d’appeler la jeunesse. […] Voici le mauvais goût du temps et de la jeunesse, la petite fanfaronnade d’impiété qui commence 144. […] Dans toutes ces lettres, si gracieuses de ton et si fines de manière, il n’y a, après tout, ni flamme, ni jeunesse, ni amour, ni même le voile d’illusion et de poésie.

864. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance. »

C’est elle qui devait me mener chez Mme de Coislin… Avec elle encore j’ai vu Mme de Saint-Julien, qui, à quatre-vingt-six ans, a une vivacité de la première jeunesse, Mme de Groslier, qui passe au moins soixante-dix ans, et qui fait le centre de la société de Chateaubriand. […] Elle l’accusait de trop de jeunesse dans les impressions, de voir le monde trop en beau, de juger trop indulgemment les hommes ; il lui répondait de Paris, le 2 mars 1815 ; « Notre dissentiment tient à ce que vous vous attachez aux personnes, et moi aux principes. […] Ceux que vous avez plaints et révérés dans le malheur, vous les aimez aussi dans la prospérité ; ceux que vous avez exécrés quand ils exerçaient la tyrannie, vous les exécrez encore quand ils sont tombés… En comparant ces deux manières de fidélité, l’une aux principes, l’autre aux personnes, je remarquerai, quoi que vous en puissiez dire, que la vôtre est beaucoup plus passionnée, beaucoup plus jeune que la mienne, et que, quelques efforts que vous ayez faits pour vous calmer par l’étude de la philosophie et une longue retraite, vous avez encore le cœur plus chaud et les sentiments plus ardents que celui que vous accusiez quelquefois de trop de jeunesse. » Bientôt la correspondance cessa, s’interrompit ; en la renouant l’année suivante, Sismondi s’y prit d’un ton fort digne, pas trop humblement, et sans faire son mea culpa du passé.

865. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DES MÉMOIRES DE MIRABEAU ET DE L’ÉTUDE DE M. VICTOR HUGO a ce sujet. » pp. 273-306

Au milieu des inexactitudes et des lacunes inévitables d’un tel mode de reconstruction, surtout avec une édition si fautive et si incohérente que celle qu’avait donnée Manuel du manuscrit de Vincennes, il n’en résultait pas moins pour l’ensemble de la jeunesse et de la première vie de Mirabeau une impression assez juste, sentimentale plutôt qu’irrécusablement motivée ; on voyait un homme dont les malheurs étaient plus grands que les torts, et les torts plus méchants que le fond. […] Ce qui l’a frappé avant tout dans Mirabeau, c’est le contraste de cette jeunesse persécutée, flétrie, verrouillée, et de son merveilleux avénement politique ; c’est le contraste de cette vie si dure de tribune et de combats journaliers avec l’inauguration unanime d’un cercueil : ce qu’il a épousé tout d’abord dans Mirabeau, c’est la question personnelle94 du génie, du génie méconnu, du génie envié et du génie triomphant : « Grands hommes, voulez-vous avoir raison demain ? […] Lerminier sur le xviiie  siècle contient quatre portraits, ou plutôt quatre statues, Montesquieu, Voltaire, Diderot, Rousseau, qui n’ont jamais apparu avec plus de jeunesse radieuse et de dégagement.

866. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (4e partie) » pp. 81-143

Voyez ce que devient le roi coupable du trône de 1830 sous le pinceau même de son panégyriste ; ce Trajan de la bourgeoisie est présenté en tyran à l’idéal de la jeunesse française. […] Quel astre vous êtes, ô jeunesse !  […] Ils se racontèrent, avec une foi candide dans leurs illusions, tout ce que l’amour, la jeunesse et ce reste d’enfance qu’ils avaient, leur mettaient dans la pensée.

867. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Celui-ci, par de lointaines hérédités, par quarante ou cinquante générations d’aïeux chrétiens, par d’indéracinables souvenirs de jeunesse, par toutes les habitudes de sa civilisation, était catholique. […] Dans les Natchez, œuvre de jeunesse, bien que publiée tardivement, le Nouveau Monde et l’Ancien Monde, l’homme de la nature, le sauvage, et l’homme de la civilisation, l’Européen ; il semble que la première idée de l’œuvre soit née d’une lecture de Rousseau. […] Chateaubriand s’y donne le plaisir de noircir dramatiquement les émotions de sa jeunesse : d’une amitié fraternelle, toute simple, innocente et commune, encore qu’ardente et nerveuse, il fait un gros amour incestueux ; il donne à René, masque transparent de lui-même, le fastueux et malsain prestige de la passion coupable, contre nature, et il invente la sublimité poétique des monstruosités morales658.

868. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre deuxième »

Né à Chinon en 1 483, d’un père qui y tenait une hôtellerie après avoir fait ses premières études dans l’abbaye des Bénédictins de Seuillé ou plutôt, comme il le dit, après avoir passé quelques années de sa jeunesse, comme les petits enfants du pays « à boire manger et dormir, à manger, dormir et boire, à dormir, boire et manger », il était venu faire son noviciat au couvent de Fontenay-le-Comte. […] Est-il vrai qu’il ait institué pour la réception des bacheliers le cérémonial observé par les étudiants de Montpellier jusqu’à la fin du xviiie  siècle, lequel consistait à faire passer le récipiendaire entre deux haies de camarades qui lui distribuaient des coups de poing, comme un joyeux adieu de jeunesse à un camarade devenu leur maître ? […] » C’est la Renaissance qui dicte à Rabelais, encore tout ému de la lecture de Platon, ces belles paroles qu’il prête à Gargantua écrivant à son fils59, les premières peut-être qui aient été exprimées dans le grand style français, les premières beautés universelles de notre littérature : « Non doncques sans juste et équitable cause je rendz grâces à Dieu, mon conservateur, de ce qu’il m’ha donné pouvoir veoir mon anticquité chenue refleurir en ta jeunesse.

869. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

Lors à toi (à Ronsard) revenant, et croyant que la peine De t’oser imiter ne seroit pas si vaine Je te pris pour patron mais je pus moins encor Avec mes vers de cuivre égaler les tiens d’or…117 En effet, les œuvres de jeunesse de Bertaut sont imitées de Desportes ; celles de son âge mûr le sont de la partie sérieuse et savante des poésies de Ronsard. […] Mais à une époque où une grande force de naturel se fait sentir jusque dans les plus fades poésies et où les défauts même qui peuvent lui être communs avec les époques de décadence ne sont que des excès de jeunesse, cette sagesse de Bertaut est quelquefois vigoureuse, et fortifie ce qu’elle corrige. […] On le voit aider des fruits de ses épargnes … La triste veuve à qui l’heur d’être mère Étoit sujet de plainte et surcroît de misère ; Racheter des, captifs ; doter la chasteté De la vierge nubile, à qui la pauvreté Refusoit un mari, fanissant en tristesse La misérable fleur de sa verte jeunesse.

870. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

On n’y pouvait distinguer qu’une certaine élégance naturelle « qui tenait à la sensibilité de la première jeunesse », sensibilité qu’il perdit bientôt et qui se flétrit comme la fraîcheur même de son visage. […] Ses excès de plaisirs avaient détruit vite en lui sa santé avec sa jeunesse. […] Peuvent-ils me rendre ma jeunesse, ou m’ôter ma pensée, dont l’usage me console de tout ?

871. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1870 » pp. 321-367

De là, mon souvenir est allé à ma première jeunesse, à mes séjours chez cet oncle Alphonse, né pour être un oratorien, et que les circonstances avaient fait négociant en Angleterre, et qui, après avoir été à peu près ruiné par un associé, tout à coup parti pour les Grandes Indes, s’était retiré avec un Horace et une giletière, dans une petite propriété du Loiret. […] Dans le premier moment, j’avais voulu arrêter ce journal à ses dernières notes, à la note du mourant se retournant vers sa jeunesse, vers son enfance… À quoi bon continuer ce livre ? […] 18 avril Tristes, comme des ombres en leurs paysages de la mort, aujourd’hui dans une longue promenade nous avons revu le Bas-Meudon, ces bords de l’eau, où autrefois nous avons été heureux avec du beau temps, des femmes, du vin, — et la santé de notre jeunesse.

872. (1913) La Fontaine « II. Son caractère. »

Il a souffert beaucoup dans une partie de son adolescence et de sa jeunesse. […] Il n’y mettait jamais rien du sien, et mes sœurs, qui, dans leur jeunesse, l’ont souvent vu à table, chez mon père, n’ont conservé de lui d’autre idée que celle d’un homme fort malpropre et fort ennuyeux. […] Je me représente La Fontaine de la façon suivante : cette fois, La Fontaine a été amoureux (le texte l’indique), parce qu’il n’était amoureux d’aucune femme ; évidemment, c’est la rêverie sur l’amour lui-même, c’est la rêverie sur la jeunesse amoureuse, c’est la rêverie sur des souvenirs lointains et chéris, comme je le disais tout à l’heure, et qui, précisément, parce qu’elle n’a pas d’objet précis  si elle en avait un, elle deviendrait un peu nonchalante comme nous voyons qu’était La Fontaine  et qui, parce qu’elle n’a pas d’objet précis, a quelque chose de vague, d’indéfini, de lointain, de mystérieux… je mets beaucoup de synonymes au mot poétique, et celui-ci aurait suffi.

873. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

Mais l’expression avait partout une parenté émouvante, et c’était la jeunesse, une joie enfantine, facile et pleine, qui déborde comme les fontaines en attendant qu’on y puise, et c’était une limpidité de regard qui disait la parfaite virginité des âmes. […] On ne sacrifie pas, pour un entraînement d’imagination, sa jeunesse, sa beauté, sa joie et sa vie ; on ne s’enferme pas dans un couvent avec les rebuts de la rue ; on ne vit pas quarante ans chaste, pauvre, sans autre volonté que celle d’obéir, parce qu’on a le goût du blanc, des fleurs artificielles et du silence, parce qu’on aime à respirer l’odeur d’un grain d’encens. […] Le seul nom d’enfance n’évoque-t-il pas un roman qui est en nous tous, et qui s’y trouve à l’état romanesque précisément, je veux dire avec la poésie de la réalité et celle du recul, avec le double attrait de la jeunesse qui se souvient et de l’expérience qui raconte, avec ces grossissements de certains épisodes, que le lointain déforme et amplifie, comme il fait, entre les branches d’arbres, pour les astres qui se lèvent ?

874. (1892) Portraits d’écrivains. Première série pp. -328

Jusqu’à la fin ils restaient jeunes, d’une jeunesse incorrigible, et arrivaient à la mort sans avoir rien appris, peut-être sans avoir rien compris. […] On peut les résumer en ces quelques conseils : « Ayez une jeunesse continente. […] Il passa sa première jeunesse à Aix, vint à Paris terminer ses études. […] Weiss a conté les souvenirs de sa jeunesse et les impressions toutes neuves de son enfance. […] Zola, le Roman expérimental : « Lettre à la jeunesse », passim.

875. (1924) Critiques et romanciers

Il n’a rien renoncé du rêve de sa jeunesse et garde ses chimères : il ne consent pas qu’elles soient des chimères, et dangereuses. […] Ces livres privilégiés n’auront pas eu d’âge ingrat, je ne sais comment ils passeront à l’éternité ; la transition n’est pas commencée : ils ont toute leur jeunesse. […] C’étaient deux écoles et, plus exactement que deux croyances, deux désinvoltures qui tentaient la jeunesse de cette époque. […] Il y a là une espèce de fureur, un foisonnement de jeunesse, une ridicule exubérance et d’un effet le plus singulier. […] Gustave Geffroy si content qu’il cède, réaliste en vacances, à l’impulsion lyrique de sa joie : « Jeunesse !

876. (1923) Critique et conférences (Œuvres posthumes II)

Leconte de Lisle, aussi bien peut-être et mieux (ça s’est vu chez d’autres, ou du moins il s’est dit que ça s’y est vu et j’ajoute que, pour cela, il m’eût fallu, comme à d’autres, l’éternelle jeunesse de certains Parnassiens, qui ne peut reproduire que ce qu’elle a lu et dans la forme où elle l’a lu). […] l’âge mûr a, peut avoir ses revanches et l’art aussi, sur les enfantillages de la jeunesse, ses nobles revanches, traiter des objets plus et mieux en rapport, religion, patrie, et la science, et soi-même bien considéré sous toutes formes, ce que j’appellerai de l’élégie sérieuse, en haine de ce mot, psychologie. […] Surtout une facture solide, même un peu trop, qui dit l’extrême jeunesse de l’auteur quand il s’en servit d’après la formule parnassienne exagérée. […] Les gens furent stupéfaits de tant de jeunesse et de talent mêlés à tant de sauvagerie et de positive lycanthropie. […] d’extrême jeunesse… Ils sortiront de cette lecture, admirateurs des poèmes connus et comme classiques, charmés de quelques pièces verveuses, Les Raisons de Nina, Ma Bohême, Sensation, un peu ou beaucoup horrifiés de certaines autres, farouches jusqu’à la cruauté, Les Poètes de sept ans, Mes petites amoureuses.

877. (1897) Aspects pp. -215

De cette œuvre on peut mettre à part les poèmes et les proses de jeunesse. […] Réveillée, sans bien s’en douter elle-même, par ces rayons précurseurs, la jeunesse lyrique arrache la taie chassieuse qui lui bouchait les yeux. […] Mais, comme ici encore, les préoccupations politiques l’emportent, il n’est guère écouté que de la jeunesse. […] D’ailleurs la répulsion que celle-ci inspire à la jeunesse s’affirme de plus en plus. […] Elle sent bon la jeunesse.

878. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

La Jeunesse de Napoléon 1, par M.  […] Jeunesse pensive, sérieuse, exemplaire, en somme ; aurore indécise et touchante d’une journée d’orage. […] Nous avons vu Joséphine à tous les moments de sa fantasque et bizarre jeunesse. […] Il faut tirer la jeunesse de toutes ces salles d’attente où elle végète et s’aigrit. […] Cette antithèse lui sembla plus saisissante que toutes les figures de rhétorique dont on avait saturé sa jeunesse pensive.

879. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — Post-scriptum » pp. 154-156

Il s’agit du garde des sceaux d’Argenson tel qu’il était en province dans sa jeunesse : Voici le vrai texte : Au reste, il était gaillard, d’une bonne santé, donnant dans les plaisirs sans crapule ni obscurité ; la meilleure compagnie de la province le recherchait ; il buvait beaucoup sans s’incommoder, avait affaire à toutes les femmes qu’il pouvait, séculières ou régulières, un peu plus de goût pour celles-ci… Il disait force bons mots à table, il était de la meilleure compagnie qu’on puisse être.

880. (1874) Premiers lundis. Tome II « La Comtesse Merlin. Souvenirs d’un créole. »

Née dans des climats brillants où la terre est pétrie d’une meilleure argile, développée d’abord et grandie en liberté, un peu sauvage, comme elle dit, ayant puisé ses premières idées sur l’hiver dans les romans, nous la voyons, dans le cours de ces volumes, fidèle à ce culte de l’été de la vie, de la jeunesse, de la beauté dont elle aime à couronner en toute occasion ses louanges.

881. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — K — Karr, Alphonse (1808-1890) »

Plus vrai encore fut l’Alphonse Karr de la première jeunesse, maigre, nerveux, vétu d’une blanche robe de moine, irrité par le spectacle de la Bêtise humaine, et ne portant alors qu’une légère et noire moustache de Scaramouche, qui semblait ponctuer la poésie de son génie railleur, venu en droite ligne d’

882. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Art français » pp. 243-257

Préface de l’édition originale (1855) Le livre a été commencé par deux frères, en des années de jeunesse et de bonne santé, avec la confiance de le mener à sa fin.

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