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953. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre IX. De l’esprit général de la littérature chez les modernes » pp. 215-227

Le raisonnement mathématique est, comme les deux plus grandes idées de la haute métaphysique, l’espace et l’éternité. […] Les anciens savaient animer les arguments nécessaires à chaque circonstance ; mais de nos jours les esprits sont tellement blasés, par la succession des siècles, sur les intérêts individuels des hommes, et peut-être même sur les intérêts instantanés des nations, que l’écrivain éloquent a besoin de remonter toujours plus haut, pour atteindre à la source des affections communes à tous les mortels.

954. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre II. La langue française au xvie siècle »

Les premiers humanistes qui essayèrent, dans des traductions ou autrement, d’appliquer la langue vulgaire à de hautes pensées, se sentirent fort embarrassés. […] » Personne ne s’en fit scrupule : l’enrichissement de la langue était une nécessité liée au développement de l’esprit ; puisque la formation populaire avait laissé perdre du latin tout ce qui représentait la haute culture, il fallait bien aller l’y rechercher, maintenant qu’on voulait s’approprier cette culture.

955. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Paul Bourget, Études et portraits. »

J’entendais dans le lointain des aboiements épouvantables, et je vis dévaler du haut de la colline fauve, à grandes enjambées, des formes blanches… J’eus peur, pourquoi ne le dirais-je pas ? […] Je vois que c’est le peuple le plus rapace et le plus égoïste du monde ; celui où le partage des biens est le plus effroyablement inégal, et dont l’état social est le plus éloigné de l’esprit de l’Évangile, de cet Évangile qu’il professe si haut ; celui chez qui l’abîme est le plus profond entre la foi et les actes ; le peuple protestant par excellence, c’est-à-dire le plus entêté de ce mensonge de mettre de la raison dans les choses qui n’en comportent pas… Nous sommes, certes, un peuple bien malade ; mais, tout compte fait, nous avons infiniment moins d’hypocrisie dans notre catholicisme ou dans notre incroyance, dans nos mœurs, dans nos institutions, même dans notre cabotinage ou dans nos folies révolutionnaires.

956. (1911) La valeur de la science « Deuxième partie : Les sciences physiques — Chapitre IX. L’avenir de la Physique mathématique. »

C’est là surtout, je l’ai suffisamment montré plus haut, que les difficultés s’accumulent ; on a beau entasser les hypothèses, on ne peut satisfaire à tous les principes à la fois ; on n’a pu réussir jusqu’ici à sauvegarder les uns qu’à la condition de sacrifier les autres ; mais tout espoir d’obtenir de meilleurs résultats n’est pas encore perdu. […] Cela est évidemment toujours possible et je ne retire rien de ce que j’ai dit plus haut.

957. (1897) Manifeste naturiste (Le Figaro) pp. 4-5

Combien, aux homélies d’Ibsen, nous préférons la violente volupté, l’impudeur d’une rustique et robuste héroïne, la fresque ardente où se répandent les hautes foules que créa Zola ! […] Au lieu d’évoquer de charmantes amantes et de suaves seigneurs chimériques, nous chanterons les hautes fêtes de l’homme.

958. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre IV Le Bovarysme des collectivités : sa forme imitative »

Elle n’y a pas toujours réussi et le dommage fut ici d’autant plus sensible que le génie franc, mêlé déjà au génie latin, représentait sous son aspect le plus original et avec son développement le plus haut la civilisation du moyen âge. […] La faculté d’inventer des formes originales, ce qui est proprement la génialité, y fut poussée au plus haut point, tant chez quelques grands hommes que parmi la foule anonyme.

959. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préfaces de « Han d’Islande » (1823-1833) — Préface d’avril 1823 »

Méditant ce petit traité littéraire et didactique, il était encore dans cette mystérieuse ivresse de la composition, instant bien court, où l’auteur, croyant saisir une idéale perfection qu’il n’atteindra pas, est intimement ravi de son ouvrage à faire ; il était, disons-nous, dans cette heure d’extase intérieure, où le travail est un délice, où la possession secrète de la muse semble bien plus douce que l’éclatante poursuite de la gloire, lorsqu’un de ses amis les plus sages est venu l’arracher brusquement à cette possession, à cette extase, à cette ivresse, en lui assurant que plusieurs hommes de lettres très hauts, très populaires et très puissants, trouvaient la dissertation qu’il préparait tout à fait méchante, insipide et fastidieuse ; que le douloureux apostolat de la critique dont ils se sont chargés dans diverses feuilles publiques, leur imposant le devoir pénible de poursuivre impitoyablement le monstre du romantisme et du mauvais goût, ils s’occupaient, dans le moment même, de rédiger pour certains journaux impartiaux et éclairés une critique consciencieuse, raisonnée et surtout piquante de la susdite dissertation future. […] Du reste, ces hautes matières ne se rattachaient pas encore très visiblement au sujet de cet ouvrage, et il eût été fort embarrassé de trouver une liaison qui l’y conduisît, quoique l’art des transitions soit singulièrement simplifié depuis que tant de grands hommes ont trouvé le secret de passer sans secousse d’une échoppe dans un palais, et d’échanger sans disparate le bonnet de police contre la couronne civique.

960. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La défection de Marmont »

Et il l’a frappé au nom de quelque chose de plus haut, de plus grand, de plus saint que l’intérêt de l’histoire et même que l’intérêt de l’Empire et de la patrie. […] Malgré une absence de composition que le sujet litigieux choisi par l’auteur explique et suffisamment justifie, c’est aussi une histoire où le sens politique se révèle autant que le sens moral, et monte aussi haut.

961. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIe entretien. Sur le caractère et les œuvres de Béranger » pp. 253-364

Mais, indépendamment de ces patrons littéraires, le jeune Béranger en avait trouvé un plus haut et plus puissant dans Lucien Bonaparte. […] Ces vers ne sont pas d’une bien haute poésie, mais ils sont d’un profond accent de patriotisme, qui est la poésie du poète politique. […] Les expériences, les confidences, les repentirs y tombent de plus haut de l’âme de l’un dans l’âme de l’autre, comme les grandes ombres des montagnes dont parle Virgile tombent sur leurs pieds à mesure que le soleil baisse : Majoresque cadunt altis de montibus umbræ. […] Quand Béranger, s’arrêtant tout à coup comme saisi au pan de sa redingote par quelque main invisible, et prenant à deux mains son gros bâton de bois blanc à pommeau d’ivoire, il dessinait sur le sable des figures inintelligibles, tout en dissertant avec une éloquence rude, mais fine, sur les plus hautes questions de religion, de philosophie ou de politique ! […] Dans le cinquième, on le verra s’entretenir des plus hautes questions de diplomatie avec M. 

962. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite et fin.) »

Lorsque la lecture fut terminée (et ce fut là toute la séance, une petite demi-heure en tout), l’enthousiasme n’eut pas de bornes ; le prince eut à passer, au retour, entre une double haie de fronts qui s’inclinaient avec un redoublement de révérence ; chacun en sortant exprimait son admiration à sa manière, et Cousin, selon sa coutume, plus haut que personne ; il s’écriait en gesticulant : « C’est du Voltaire ! […] M. de Lancy, que nous avons connu administrateur de la bibliothèque Sainte-Geneviève et qui avait autrefois rempli un poste assez important au ministère de l’intérieur, aimait à raconter des anecdotes qu’il savait d’original, notamment celle-ci : Un jour un des hauts personnages qui avait dû financer avec M. de Talleyrand, et qui tenait à savoir pourtant si son argent n’était pas resté en chemin, et s’il était bien arrivé à son adresse, exigea un signe, une marque qui l’en assurât. […] … ou tout autre mot58 ; ce qui fut fait et qui tint lieu de reçu. — Pour un descendant de si haute race, et un si fier aristocrate, n’est-ce pas deux fois honteux et humiliant ?  […] Par suite, il considérait sa haute situation comme une mine d’or. […] C’est un fait qu’à Mayence, il demanda à un prince très haut placé : Combien Talleyrand vous a-t-il coûté ? 

963. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DÉSAUGIERS. » pp. 39-77

On remonterait plus haut encore et c’est Horace lui-même qui a dit : Laudibus arguitur vini vinosus Homerus. […] … » — Toute une philosophie sociale va se mêler insensiblement à cet élan du poëte, et nous voilà bien loin de la gaieté. — M. de Laprade, à son tour, célébrant la Coupe, dans une pièce pleine de beaux vers, a dit : Des hautes voluptés nous que la soif altère, Fils de la Muse, au vin rendons un culte austère, Buvons-le chastement, comme le sang d’un Dieu. […] Une couple de fois, il parut vouloir tenter une scène plus haute : en 1806, il donna seul le Mari intrigué, comédie en trois actes et en vers, très-faible, qui fut jouée au théâtre de l’Impératrice, autrement dit théâtre Louvois ; en 1820, il atteignit aux cinq actes, également en vers, et fit jouer à l’Odéon, une comédie, l’Homme aux précautions, dont je n’ai rien absolument à dire. […] L’ami de Chateaubriand et de Lamennais a su rendre la chanson digne de la familiarité et du tous-les-jours de ces hautes imaginations, de ces nobles intelligences. […] Béranger a de la sensibilité, de la malice, de l’élévation, je ne veux certes pas prétendre qu’il n’ait pas aussi de la gaieté ; mais cette gaieté, il songe vite à s’en servir, à s’en couvrir, à s’en faire un cadre, un véhicule et un auxiliaire pour aller à mieux et viser plus haut, tandis qu’elle était à la fois la forme et le fond, la source et le fleuve même chez Désaugiers.

964. (1860) Cours familier de littérature. X « LXe entretien. Suite de la littérature diplomatique » pp. 401-463

Ce fut le jour de la plus haute sagesse de la France depuis 1789 : ce jour prouva que l’expérience profite aussi même aux révolutions. […] Prenons pour exemple la France, et, sans remonter trop haut et sans utilité dans le vague de l’histoire, examinons quel était le système de ses alliances avant la révolution, et quel système d’alliance lui serait réellement le plus profitable aujourd’hui, dans l’état tout différent où se trouve maintenant l’Europe. […] On ne s’apercevait pas que le protestantisme, en s’étendant en Allemagne, y formait une ligue religieuse, la plus envenimée des ligues, contre l’Autriche, vieille catholique d’habitudes espagnoles sous Philippe II et le duc d’Albe ; on ne s’apercevait pas, enfin, qu’un empire mystérieux et immense était né en Moscovie, grandissait en Orient et au Nord, et allait bientôt demander un espace proportionné à sa croissance en Pologne, dans la Turquie d’Europe et dans la haute Allemagne. […] M. de Talleyrand (on l’a vu), même après Austerlitz, Wagram et le traité léonin de Presbourg, se hâta de saisir la première circonstance décisive et la première lueur de haute raison dans Napoléon pour renouer, par un lien indissoluble, le mariage de Napoléon avec Marie-Louise, l’alliance entre les deux monarchies. […] Or voici, selon nous, comment la géographie diplomatique de l’Europe se serait dessinée à ses yeux exercés, et comment il aurait, de ce coup d’œil de haut sur les choses, conclu au système le plus actuel d’alliance, soit pour la guerre, soit pour la paix, convenable à son pays.

965. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXIVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (3e partie) » pp. 365-427

L’ancienne race humaine a pu voir se lever dans les hautes régions du Nord les magnifiques constellations du Midi, qui, longtemps invisibles, reviendront après des milliers d’années. » V L’ère des mathématiciens succéda à l’ère des découvertes géographiques et à la découverte des télescopes : Kepler, Bacon, Galilée, Tycho Brahé, Descartes, Newton, Leibnitz, surgirent. […] Anaxagore explique le mouvement apparent de la sphère céleste, dirigée de l’Est à l’Ouest, par l’hypothèse d’un mouvement de révolution général dont l’interruption, comme on l’a vu plus haut, produit la chute des pierres météoriques. […] Bates va expliquer ce qu’il peut y avoir de vrai là-dedans : « Dans ces forêts tropicales, chaque plante, chaque arbre, semble rivaliser avec le reste à qui s’élèvera plus vite et plus haut vers la lumière et l’air, branches, feuillage et tronc, sans pitié pour le voisin. […] L’utilité de cette disposition saute aussi vite aux yeux que celle des arcs-boutants de maçonnerie destinés à soutenir une haute muraille. […] Ce sont les racines aériennes des épiphytes (aroïdées), qui vivent sur les cimes, en plein air, qui se passent fort bien d’emprunter leur nourriture à la terre et sont comme une seconde forêt par-dessus la première, qui s’attachent à demeure aux plus fortes et aux plus hautes mères branches, et retombent droit comme un fil à sonde, tantôt isolément, tantôt en paquets, s’arrêtant ici à moitié chemin du sol, finissant ailleurs par y toucher et par y enfoncer leurs radicules. » XXII « Le taillis de la forêt vierge change d’un endroit à l’autre.

966. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

Après avoir dîné deux jours à sa table, dans son palais de Parme, elle reconnut en moi en ami de la maison des Bourbons, et elle me conduisit elle-même dans les chambres hautes de son palais pour m’y faire voir, avec une visible indifférence, les reliques de sa grandeur impériale données par la ville de Paris à l’époque de son mariage et de ses couches. […] LI Quoi qu’il en soit, j’écrivis les premières strophes de cette harmonie aux sons de la cornemuse d’un pifferaro aveugle, qui faisait danser une noce de paysans de la plus haute montagne sur un rocher aplani pour battre le blé, derrière la chaumière isolée qu’habitait la fiancée ; elle épousait un cordonnier d’un hameau voisin, dont on apercevait le clocher un peu plus bas, derrière une colline de châtaigniers. […] J’en sortais souvent seul, le matin, pour aller, dans les hautes montagnes de ce pays enchanté, chercher des points de vue et des paysages ; je ne m’attendais certainement pas à rencontrer de point de vue sur le cœur humain, ni des poèmes en nature ou en action qui me feraient penser toute ma vie, comme à un songe, à la plus divine figure et à la plus mélancolique aventure qu’un poème eût jamais fait lever devant moi. […] La beauté sereine du temps m’engagea à monter beaucoup plus haut, jusque dans la montagne. […] Ils disaient qu’ils avaient entendu dire, par le plus vieux moine du couvent de là-haut, que les Zampognari, c’est notre nom de famille, étaient descendus, dans le temps des guerres des Pisans contre les Florentins, d’un jeune officier toscan prisonnier des Pisans, qui s’était sauvé de la tour de Pise, où il attendait la mort, avec la jeune fille du capitaine geôlier de sa tour, et qu’il s’était bâti, au plus haut de la montagne, alors déserte, une cabane sous les châtaigniers pour y vivre de peu avec sa maîtresse.

967. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxive Entretien. Réminiscence littéraire. Œuvres de Clotilde de Surville »

Souvenez-vous des hautes et vastes collines, du vieux manoir à tourelles démantelées, jetant son ombre aux pieds des forêts sur les prés de la pente, du ruisseau qui coulait à voix basse sous la rangée de saules, dans le vallon auprès du château, des troupeaux de moutons sous la conduite du vieux berger qui montaient après que l’humidité malsaine était évaporée sur la colline élevée ; souvenez-vous des attelages luisants de bœufs qui descendaient pour labourer la glèbe dans les terres qui dominaient les prairies fumantes du paysage. […] Regardez les bras demi-nus de belles jeunes demoiselles à moitié vêtues, écartant d’un geste encore endormi les volets de leur chambre haute pour voir le beau matin du jour qui se lève et pour écouter la cloche de l’église rustique convoquant tout le monde à l’angélus. […] Mes premières rêveries, ombres avancées de la vie future, m’emportaient de site en site plus haut et plus vite que les sabots de mon coursier. […] Tout ce que je trouvais sous la main dans la petite bibliothèque très-expurgée et très-dépouillée de la chambre haute où les vieux livres de la maison gisaient épars sur les rayons. […] M. de Surville était, nous disait M. de Davayé, un très-bel homme, jeune encore, d’une taille haute et imposante, d’une physionomie profonde, d’une expression de figure réservée et douce ; on ne lui parlait qu’avec déférence comme à quelqu’un qui porte le respect devant lui.

968. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série «  Leconte de Lisle  »

rendit l’espoir au désespéré et le fit surgir comme un prophète sur la plus haute tour d’Hénokia, la cité cyclopéenne. […] C’est le soir ; ils rentrent dans la ville avec leurs femmes et leurs troupeaux,     Suants, échevelés, soufflant leur rude haleine     Avec leur bouche épaisse et rouge, et pleins de faim Le tombeau de Kaïn est au sommet de la plus haute tour. […] Alors le déluge éclate, et… Quand le plus haut des pics eut bavé son écume, Thogorma, fils d’Élam, d’épouvante blêmi, Vit Kaïn le vengeur, l’immortel ennemi D’Iavèh, qui marchait, sinistre, dans la brume, Vers l’arche monstrueuse apparue à demi. […] Ils prisent assez haut l’honneur de Dieu pour le venger par des supplices, et le salut de leurs frères pour y employer les bûchers. […] Savez-vous bien que cela suppose deux sentiments éternels et très humains, portés l’un et l’autre au plus haut degré : le désenchantement de la vie, et, seul remède durable, l’amour du beau, et du beau sans plus : j’entends le beau plastique, celui qui est dans la forme et qui peut se passer de la notion du bien, celui qu’on sent et qu’on reconnaît indépendamment de tout jugement moral, sans avoir de haine ou d’amour pour ce qui en fait la matière, que ce soit la Nature ou les actions des hommes ?

969. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Conclusion »

C’est, au contraire, de ces viriles souffrances que s’est inspiré, dans ses œuvres récentes, un poète de plus haut vol, disciple original de Lamartine, et successeur brillant d’Alfred de Vigny. […] C’étaient de belles fêtes pour l’esprit que ces leçons où l’exposition la plus lucide mettait sous nos yeux les quatre systèmes élémentaires nés des premières réflexions de l’homme sur lui-même, sensualisme, idéalisme, scepticisme, mysticisme ; où la dialectique la plus pénétrante démêlait le vrai d’avec le faux dans chaque système, et combattait les erreurs de l’un par les vérités de l’autre ; où l’éloquence, inspirée du seul intérêt de ces hautes matières, nous rendait quelque chose de l’ampleur de Descartes et de l’éclat de Malebranche ; où, charmés et persuadés, nous sentions notre nature morale s’élever et s’améliorer par les mêmes plaisirs d’esprit qui formaient notre goût. […] Peut-être eût-on désiré pour une si belle plume une fortune plus haute que l’histoire ou la critique des systèmes ; peut-être un nouvel effort supérieur d’invention et de démonstration, pour nous faire monter quelques échelons de plus vers l’inaccessible, eût-il plus servi la philosophie que les modestes affirmations de l’éclectisme. […] Est-il vrai que plus d’un auditeur de la Sorbonne, sous le charme de tant de belles paroles sur Dieu, l’homme, le monde et leurs rapports, s’achemina vers Notre-Dame plus qu’à demi conquis aux vérités religieuses, qu’enseignaient, du haut de la chaire chrétienne, des prédicateurs plus loin des voies des grands sermonnaires que le philosophe ne l’était des voies de Descartes ? […] Il faut me taire également sur tant de beaux exemples de l’éloquence politique, telle qu’elle s’est fait entendre du haut de la tribune, plus pratique et plus près des affaires que dans les assemblées de la révolution, moins étroitement nationale que chez nos voisins, élevée, libérale, philosophique, ne séparant jamais la cause de la France de la cause du genre humain.

970. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juillet 1886. »

Tannhaeuser et Lohengrin avaient marqué le point de départ de l’homme de génie ; Tristan et Iseult se dressait comme une cime du haut de laquelle se pouvait découvrir tout le nouveau royaume du drame musical. […] Le matelot chanteur continue à faire entendre, du haut de son mat, sa chanson nostalgique. […]   Du haut d’une terrasse, elle le regarde approcher ; elle lui adresse, en agitant son écharpe, mille signes enfiévrés. […] Richard Wagner est le maître de ces conclusions toutes puissantes, qui vivent de leur seule beauté, qui résument supérieurement l’intensité d’une œuvre et qui sont poignantes par cela simplement qu’elles emportent l’esprit des auditeurs aux plus hautes sphères de l’idéal humain. […] Ne sait-il pas exprimer les conceptions les plus hautes, les plus philosophiques, autant que les émotions exquises et charmantes ?

971. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 décembre 1886. »

C’est à la fois une allusion à l’origine norraine du mythe et un ressouvenir des vers donnés plus haut. […] Aux jours de la jeune vaillance des âmes, le gazouillement magique appelait les héros aux vocations les plus hautes. […] L’homme qui, en Belgique, se montra l’adversaire avoué, irréconciliable de Wagner et qui mit à le combattre une opiniâtreté aveugle de sectaire, était précisément celui que sa haute culture intellectuelle et sa profonde science musicale rendaient le mieux apte à deviner le génie novateur, à le faire comprendre et admirer de ses contemporains. — Mais combien de fois, en matière musicale, n’a-t-on pas vu ceux qui devaient faire la lumière, employer leurs efforts à répandre l’erreur ? […] L’un de ces wagnériens de la première heure, est, après ceux que j’ai désignés plus haut, M. […] Edmond Evenepoel (1846-1931), musicologue, haut fonctionnaire belge, grand wagnérien, était le père du peintre Henri Evenepoel.

972. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1883 » pp. 236-282

Mercredi 31 janvier C’est beau ce Paris, la nuit, vu du haut du Trocadéro, c’est beau, cette obscurité solide, sillonnée de feux. […] Dans cette contemplation, tombait, un jour, un vers de Virgile, dit tout haut par un camarade : ce vers le touchait, le remuait. […] Dimanche 15 juillet Une élégante, chez laquelle je me trouvais, après avoir pendant un quart d’heure blagué la maladie du comte de Chambord, et sa mort future, termine par cette phrase : « J’ai commandé une robe noire, que je porterai, si je ne suis pas en province… vous concevez, à Paris, n’être pas en noir… moi, ce serait ridicule. » Mardi 17 juillet Pendant que j’attendais des livres, dans la salle de lecture de la bibliothèque, je regardais un bossu : tout le haut de la tête d’un bossu, est dans le bas de sa mâchoire. […] L’on pense les hécatombes de Prussiens, que je faisais du haut du ciel, et dans des circonstances toujours nouvelles. […] Là, je trouve chez le mari, une prompte et sympathique compréhension de ma pensée, chez la femme une tendre estime pour le vieil écrivain, et chez tous les deux une amitié, égale, continue, et qui n’a ni haut ni bas dans l’affection.

973. (1833) De la littérature dramatique. Lettre à M. Victor Hugo pp. 5-47

Personne n’a admiré plus franchement que moi vos hautes poésies ; je ne dois pas les citer. […] Elles seraient distribuées à toutes les académies, à tous les professeurs de l’université, aux élèves de l’école polytechnique, de droit, de médecine, et enfin à tous les jeunes gens qui reçoivent une haute instruction de la générosité de la nation. […] Il eut l’avantage d’avoir pour auditeur le célèbre Paësiello qui, après avoir écouté tout l’opéra avec beaucoup d’attention, s’avança froidement vers le jeune compositeur et lui dit tout haut en présence d’une nombreuse société : « Vous ne savez pas la composition, votre ouvrage ne vaut rien ; cependant j’entrevois dans certaines parties l’espoir du talent ; venez chez moi, je vous donnerai des leçons. […] Le rédacteur des articles Spectacles était si bien connu par sa vénalité, que les actrices disaient tout haut quel était l’impôt, soit cachemire ou diamants, qu’elles payaient à cet aristarque. […] Maintenant, à une première représentation, on donne à l’auteur tout le parterre, une partie de l’orchestre, les galeries et les petites loges du haut ; la recette ne se compose que des loges louées et de quelques stalles.

974. (1913) La Fontaine « V. Le conteur — le touriste. »

parce qu’ils considèrent l’humanité elle-même directement et non pas parce détour et par ce faux-fuyant qui consistent à la représenter sous des figures d’animaux ; ils sont, en quelque sorte, ramenés à une certaine ligne normale, non pas sans doute, encore une fois, à une ligne de moralité, mais cependant d’études sérieuses, sensées, et jusqu’à un certain point assez hautes. […] Le Vieillard et les trois Jeunes Hommes est presque d’une haute moralité, point encore tout à fait, il est bien certain que c’est seulement un conseil de sagesse, de prudence, de discrétion et de modestie, mais toutes ces choses, si elles ne sont pas des vertus, commencent à être de très belles qualités, et des demi-vertus si Ion peut ainsi dire. […] Ce n’est pas un « Voyage de Chapelle et de Bachaumont » ; c’est un voyage de La Fontaine ayant le caractère domestique et familial au plus haut degré. […] La Fontaine regarde la Loire du haut du pont d’Orléans : « Les voiles des bateaux sont fort amples, cela leur donne une majesté, de la vie, et je m’imaginai voir le port de Constantinople en petit. […] Quelques mots encore, intéressants, sur la vue, la brillante et majestueuse vue que l’on a du haut du château d’Amboise.

975. (1903) Le problème de l’avenir latin

C’est au prix de l’abâtardissement qu’ils ont reçu du vainqueur l’initiation à la haute vie civilisée. […] L’être surmental des hautes civilisations expie sa supériorité par un manque de foi dans les choses. […] Est-ce que ce sentiment de lassitude intime, que nous notions plus haut, n’atteste pas à lui seul le mensonge de notre infatuation ? […] Ce serait comme une haute expérience d’élevage à laquelle la nation tout entière serait intéressée et participerait en une certaine mesure. […] C’est sur le roc le plus haut de ce qui est aujourd’hui le Gaouirisankâ, pointe extrême des monts Himalayens.

976. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Louis XIV n’avait pas été seulement le roi de France, il avait été la plus haute et la plus accomplie formule de la Monarchie dans les temps modernes. […] Que Rodolphe Salis, qui est un noble homme, infiniment plus haut que tout cela, se soit laissé surprendre et n’ait pas vu du premier coup l’énormité de la chose, soit. […] Farre, pour ne pas remonter plus haut. […] Par bonheur, il a l’âme trop haute pour en souffrir. […] C’est ce que je nommais, un peu plus haut, la source unique de son inspiration.

977. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

Le mari, peu disposé à laisser ce genre de ridicule ternir à la porte de son étude l’éclat de ses panonceaux, s’indigna, parla haut, et Eugène dut espacer ou cesser ses visites. […] Au Salon, membre influent du jury, invité à Compiègne par l’Empereur, ayant le goût de la vie mondaine où se déployaient ses qualités de brillant causeur, il semblait promis aux plus hautes satisfactions de carrière. […] L’oiseau se laisse tomber comme s’il était mort, prend un débris, donne un coup d’aile et remonte ; il s’élève en faisant de grands cercles ; arrivé très haut il se fixe. […] Fromentin prendrait parfaitement place dans cette série, n’étaient les différences de degré qui font que sa place de critique est moindre, sa place de romancier plus haute. […] Celui-ci, en sa clairvoyante sincérité, n’a pas une très haute idée de lui-même comme peintre ; mais il sait gré à la peinture d’avoir organisé sa vie, de l’avoir installé dans un beau métier.

978. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1894 » pp. 185-293

À une allusion sur la vente de ces jours, il laisse échapper un petit mouvement nerveux, et d’une voix rêche, dit que les amateurs sont des brocanteurs en chambre, dissimulant mal son effroi des ventes, où le haut chiffre où sont cotés ses tableaux aujourd’hui, peut faiblir demain. […] Un ciel gros bleu, traversé de nuages, qui ressemblent à des fumées noires d’industries ; dans le haut du ciel, la lumière électrique de la Tour Eiffel, avec son rayonnement de crucifix lumineux. […] » s’écriait tout à coup le petit domestique qui l’accompagnait, et Clemenceau voyait en effet un homme, couché sur le ventre, et qui, lorsqu’il l’appelait ne répondait pas, se mettait à ramper à quatre pattes, en s’éloignant de lui, et dont il ne savait la place, que par le remuement du haut des brindilles. […] Des trois chambrettes du haut de la maison, dans l’une desquelles est mort mon frère, il a été fait deux pièces, dont la moins spacieuse ouvre sur la grande, par une baie qui lui donne l’aspect d’un petit théâtre, dont la toile serait relevée. […] Le féroce, dans un déboulement, ventre à terre, du haut d’une colline, pareil au nuage noir d’un orage, est traité avec une furia de travail, dans une noyade d’encre de Chine, qui lui donne une parenté avec les tigres de Delacroix.

979. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre II. Le rôle de la morale » pp. 28-80

Mais, plus loin, plus haut, les choses se compliquent et la philosophie a beau jeu. […] Ici les divers moyens analysés plus haut de faire cesser le désaccord entre les natures et les désirs, restent inefficaces. […] Et pareillement un ordre abstrait, intérieur, dont l’origine est méconnue, qui paraît sortir du moi lui-même, et représenter soit sa nature essentielle la plus haute, soit une volonté supérieure et divine. […] Il parle haut, il interdit de vérifier ses titres, parce que la discussion lui serait fatale. […] Si l’on emploie le mot « devoir » en de pareils cas, c’est en le prenant dans le sens positif invoqué plus haut, au sens où c’est le devoir d’un joueur d’échecs de ne pas mettre son roi en prise.

980. (1890) L’avenir de la science « X » pp. 225-238

Ce n’était pas un grossier matérialisme, ne comprenant, ne sentant que le corps ; ce n’était pas un spiritualisme abstrait, substituant des entités à la vie ; c’était une haute harmonie, voyant l’un dans l’autre, exprimant l’un par l’autre les deux mondes ouverts devant l’homme. […] Champollion était arrivé à trouver belles les têtes égyptiennes ; les juifs trouvent le Talmud plein d’une aussi haute morale que l’Évangile ; les amateurs du Moyen Âge admirent de grotesques statuettes devant lesquelles les profanes passent indifférents. […] Il faut la placer plus ou moins haut dans l’échelle de l’idéal, mais ne pas blâmer l’auteur d’avoir pris la chose sur tel ton et par conséquent de s’être refusé tel ordre de beautés. […] Cuvier aurait pu disséquer durant toute sa vie des animaux domestiques sans soupçonner les hauts problèmes que lui a révélés l’étude des mollusques et des annélides. […] Et ne croyez pas que pour cela elle renonce à la haute admiration.

981. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre troisième. La volonté libre »

La résolution, enfin, ne peut pas ne point nous donner une impression de force personnelle portée au plus haut degré d’intensité. […] Est-ce sous cette forme toute négative qu’elle la conçoit ; ou n’est-ce pas avant tout, comme nous l’avons fait voir plus haut, sous la forme positive d’une indépendance du moi par rapport aux motifs et mobiles particuliers qui influent sur sa volonté ? […] Ce pouvoir ascendant est sans nul doute un bien et doit être un objet de désir, comme le pouvoir qu’a un oiseau de toujours voler plus haut que tels rameaux d’un arbre : sursum voluntas. Un dernier pas dans la réflexion intérieure nous fait comprendre que la plus haute expansion de notre moi et de sa spontanéité indépendante n’est pas l’égoïsme, mais l’amour universel d’autrui. […] Une intelligence qui conçoit l’univers et l’identification volontaire de son individualité avec l’universel ne saurait demeurer indifférente à cette idée, la plus haute de toutes en même temps que la plus large.

982. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIV : Récapitulation et conclusion »

Si les espèces sont seulement des variétés bien tranchées, dont les caractères ont atteint un haut degré de permanence, nous pouvons comprendre ce fait : depuis qu’elles se sont séparées du tronc commun, elles ont déjà varié en certains caractères par lesquels elles sont devenues spécifiquement distinctes, et par conséquent ces mêmes caractères sont plus sujets à de nouvelles variations que les caractères génériques, qui se sont transmis sans changement durant une plus longue période. […] C’est une règle de haute généralité que les habitants de chaque contrée aient une parenté évidente avec les habitants de la contrée la plus voisine d’où il ait pu lui arriver des immigrants. […] De là, sans dédaigner de prendre en considération l’existence actuelle de gradations intermédiaires entre deux formes quelconques, nous serons conduits à peser avec plus de soin et à évaluer plus haut la somme actuelle des différences qui existent entre elles. […] L’étude des productions domestiques prendra une plus haute valeur. […] Mais les premiers effets de la concurrence vitale, de la sélection naturelle et de la divergence des caractères qui en a été la suite, ont dû causer l’extinction d’un nombre considérable de classes naissantes, ébauches moins bien réussies de ces premiers essais d’organisation ; et la proportion de ces races vaincues aux races victorieuses peut avoir été énorme, si l’on songe à la haute raison géométrique de reproduction des êtres inférieurs.

983. (1870) La science et la conscience « Chapitre I : La physiologie »

Jusqu’ici pourtant la lutte n’était qu’entre des doctrines spéculatives, et l’esprit s’agitait dans les hautes régions de la pensée. […] On sait les tâtonnements, les incertitudes, les contradictions de l’histoire et même de l’économie politique dans cette partie la plus haute, mais aussi la plus difficile de leur œuvre. […] le génie, c’est-à-dire la plus haute expression, le nec plus ultra de l’activité intellectuelle, n’être qu’une névrose ? […] On a vu plus haut MM.  […] En sorte que le développement de la liberté est en raison directe du développement de la raison, et que l’état de sagesse est le plus haut degré où puisse atteindre notre libre volonté.

984. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

Nous voudrions également montrer comment il est possible de maintenir à l’histoire son haut caractère d’enseignement moral avec la nouvelle méthode qui en a fait une œuvre éminemment scientifique depuis le début de notre siècle. […] On a fait à tort à Bossuet l’honneur de le considérer comme le créateur de la philosophie de l’histoire dans ce grand Discours sur l’histoire universelle, qui ne serait que le magnifique développement d’un lieu-commun de théologie, si la science historique de l’antiquité ne s’y retrouvait souvent avec cette haute manière de dire les choses qui n’appartient qu’à Bossuet. […] C’est à Montesquieu et à Vico que commence véritablement la science de l’histoire ; nous disons la science et non la philosophie, parce que la science proprement dite ne dépend d’aucune des hautes spéculations qui constituent en réalité la philosophie de l’histoire, telles que les idées de perfectibilité humaine, de progrès universel, d’évolution graduelle et nécessaire. […] Renan, on n’y rencontre guère d’adorateurs du succès, du moins dans les hautes régions de la pensée. […] Il semble que ce soit pour répondre à cette haute leçon d’histoire, que Victor Cousin s’écrie dans un accès de désintéressement national et de libéralisme constitutionnel : « Quia été le vainqueur ?

985. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

… D’un point de vue plus haut, la fleur est une fin en soi. […] L’amour, en particulier, l’intéresse au plus haut point. […] Gloire à Ponchon au plus haut des cieux. […] L’odelette et la chansonnette n’égaleront jamais la haute poésie. […] C’est lui qui m’a initié à la haute vie intellectuelle, à l’ivresse de la pensée libre.

986. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

Elle était étonnante l’influence que les principaux médecins exerçaient dans ce temps-là en France sur leurs malades de la haute société, et surtout sur les personnes du sexe ; elles avaient pour eux une confiance tendre et soumise, et leur admiration sans bornes était accompagnée des attentions les plus recherchées. […] Vicq d’Azyr avait à un haut degré le sentiment de la connexion et de la solidarité des sciences : en ce sens il avait l’esprit éminemment académique et encyclopédique, et, s’il nous paraît de loin aujourd’hui avoir été avant tout de la famille de ceux qui sont des messagers publics et des organes applaudis, nul ne peut dire de cet homme de talent sitôt moissonné, qu’il n’eût pas été aussi, à d’autres moments, un investigateur heureux et un inventeur. […] Semblable à ce météore terrible qui, formé de mille courants divers, menace du haut de la nue les sommets escarpés et semble être destiné par la nature à maintenir l’égalité physique sur le globe, la foudre révolutionnaire qui est en vos mains, et que dirige habilement votre génie, continuera de renverser les trônes, fera tomber les têtes superbes qui voudraient s’élever au-dessus du niveau que vous avez tracé ; elle établira l’égalité politique et (l’égalité) morale, qui sont les bases de notre liberté sainte… Voilà jusqu’où l’exaltation de la peur et l’espoir de se faire pardonner de Couthon, Saint-Just et consorts, pouvaient conduire le ci-devant médecin de la reine, un écrivain académique élégant.

987. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

Je sais des hommes d’étude et de lecture approfondie qui placent Fleury très haut, plus haut qu’on n’est accoutumé à le faire aujourd’hui, qui le mettent en tête du second 265 rang ; ils disent « que ce n’est sans doute qu’un écrivain estimable et du second ordre, mais que c’est un esprit de première qualité ; que ses Mœurs des israélites et des chrétiens sont un livre à peu près classique ; que son Traité du choix et de la méthode des études, dans un cadre resserré, est plein de vues originales, et très supérieur en cela à l’ouvrage plus volumineux de Rollin ; que son Histoire du droit français, son traité du Droit public de France, renferment tout ce qu’on sait de certain sur les origines féodales, et à peu près tout ce qu’il y a de vrai dans certains chapitres des plus célèbres historiens modernes, qui n’y ont mis en sus que leurs systèmes et se sont bien gardés de le citer ; que Fleury est un des écrivains français qui ont le mieux connu le Moyen Âge, bien que peut être, par amour de l’Antiquité, il l’ait un peu trop déprécié ; que cet ensemble d’écrits marqués au coin du bon sens et où tout est bien distribué, bien présenté, d’un style pur et irréprochable, sans une trace de mauvais goût, sans un seul paradoxe, atteste bien aussi la supériorité de celui qui les a conçus. » Pour moi, c’est plutôt la preuve d’un esprit très sain. […] Chacun remarqua qu’en donnant la communion à Mme la duchesse de Bourgogne, le 6 mai 1703, « M. de Meaux n’était pas ferme sur ses pieds, et qu’il ne devrait plus faire de pareilles actions publiques. » Le jour de l’Assomption (15 août de la même année), en voulant assister à une procession de la Cour, il donna un spectacle qui affligea ses amis, et Madame, cette Madame mère du Régent, que nous connaissons tous, ne se faisait faute de lui dire tout haut le long du chemin durant la cérémonie : « Courage, monsieur de Meaux !

988. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — I — Vauvenargues et Fauris de Saint-Vincens » pp. 1-16

On avait tiré de ses courts et inachevés ouvrages la plus haute idée qu’on se pût faire de l’homme. […] Autant pour tous ceux qui sont de l’espèce de Figaro, de Gil Blas et de Panurge, de ce Panurge « sujet de nature à une maladie qu’on appeloit en ce temps là faute d’argent, c’est douleur sans pareille (et toutefois, dit Rabelais, il avoit soixante et trois manières d’en trouver toujours à son besoin, dont la plus honorable et la plus commune étoit par façon de larcin furtivement fait) » ; — autant pour cette bande intrigante et peu scrupuleuse, la question d’argent est à la fois importante et légère, objet avoué de poursuite et de raillerie, un jeu et une occupation continuelle, et à toute heure sur le tapis, autant c’est un point sensible et douloureux pour ces natures pudiques et fières, timides et hautes, qui n’aiment ni à s’engager envers autrui ni à manquer à personne, qui ont souci de la dignité et de l’indépendance autant que les autres de l’intérêt. […] Cela revient à dire que les hommes sont des hommes, et que les meilleurs sont les moins imparfaits : chez ceux-ci les hautes parties se maintiennent supérieures et subsistent ; mais les accidents de tous les jours les déconcertent plus d’une fois et les font ondoyer, comme dirait Montaigne.

989. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Questions d’art et de morale, par M. Victor de Laprade » pp. 3-21

En revanche, il traite fort mal Horace ; il en parle de haut, comme d’un sensuel et d’un sceptique. […] Un écrivain de beaucoup d’esprit, un jeune maître en ironie, a pris en main la défense de cette faculté déliée, de cette arme qui est la sienne, en rendant compte du livre de M. de Laprade3 ; il a très-bien montré qu’avoir au plus haut degré le sentiment du ridicule et de la sottise, ce n’était point nécessairement n’être sensible qu’au mal. […] Il se pose gravement cette question : « Examinons, dit-il, cette idée du haut de la morale et de l’histoire.

990. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 64-81

. — Je dis qu’il est commode, car du haut de la religion, de cette idée inexpugnable et infaillible, on est à l’aise pour courir sus à toutes les opinions et à tous les partis, au siècle tout entier. […] Appuyé qu’il est à ces hautes colonnes du temple, regardez-le d’un peu loin : la menace s’ennoblit, la laideur s’efface ; ses invectives les plus grosses, comme ses méchancetés les plus fines, prennent aisément un caractère de justice inexorable et de sévérité vengeresse. […] « Il est doué d’une haute taille, d’une voix assez nette, d’un beau galon d’officier du roi, qui se voit même sur ses habits bourgeois.

991. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

N’oublions pas que Don Quichotte est le dernier des chevaliers et qu’il n’est le plus ridicule que parce qu’il prétend reprendre les choses de plus haut ; s’il parodie les preux d’un autre temps par sa folie, il les parodie dans la patrie du Cid, et là où hier encore on répétait les chants populaires du Romancero. […] Guéri, enfin, il fut gratifié d’une haute paye de trois écus par mois. […] Quoi qu’il en soit de ce dernier projet qu’on lui a prêté et par où il eût renouvelé Spartacus, il fit preuve, durant cette longue captivité, des plus hautes qualités viriles qui imprimèrent une admiration reconnaissante au cœur de ses compagnons et qui inspirèrent du respect à ses maîtres.

992. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

Le vœu des Polonais était connu et avait maintes fois retenti assez haut. […] Mais M. de Senfft est un de ces hommes qu’on ne peut bien connaître sans connaître aussi sa femme ; car il lui était entièrement attaché, dévoué et même jusqu’à un certain point soumis ; il l’était parce qu’il appréciait en elle les plus hautes vertus, les plus tendres délicatesses ; il avait pour elle un vrai culte comme on en aurait pour une femme qu’on n’aurait adorée qu’à distance, comme pour une Laure ou une Béatrix. […] Pendant que M. de Senfft, à la veille de l’éclatant démenti de l’histoire, se montre ainsi à nous un peu la dupe des confidences de Fouché qui, évidemment (comme l’abbé de Pradt, et avec plus de malice), était entré dans ses vues, avait médit du pouvoir qu’il servait et ne s’était pas fait faute de gémir sur les folies du maître, il m’a paru curieux de citer une lettre de Napoléon adressée, vers ce temps, à son ministre de la police, et qui, dans sa sévérité encore indulgente, va droit au défaut de l’homme, rabat fort de cette haute idée trop complaisante et remet à son vrai point ce prétendu génie du duc d’Otrante, un génie avant tout d’ingérence audacieuse et d’intrigue.

993. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

En nous supposant dociles, — plus dociles que nous ne l’avons été, — il nous a tenus par la main et nous a conduits où il voulait, au plus haut degré de l’autel d’où nous voyons désormais toute chose, le passé et l’avenir, la terre et le ciel. […] Il emploie sa méthode haute et méprisante ; il impose. […] Bossuet voit de haut : Montesquieu serre de plus près.

994. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite et fin.) »

Et osera-t-on bien comparer aussi, du plus loin qu’on veuille s’y prendre, à cette dame plus que vulgaire de Tourvoie, Mme de Montesson, qui tenait dans les dernières années la Cour du duc d’Orléans et qui réussit à être épousée ; celle-ci, une vraie madame de Maintenon en diminutif, un parfait modèle de maîtresse de maison dans la plus haute société, faible auteur de comédies sans doute, mais actrice de salon excellente, ingénieuse dans l’art de la vie et dans la dispensation d’une fortune princière, personne « de justesse, de patience et de raison », qui ne pouvant, sur le refus du roi, être reconnue pour femme légitime, sut par son tact sauver une position équivoque, éviter le ridicule et désarmer l’envie, saisir et observer, en présence d’un monde malin et sensible aux moindres nuances, le maintien si délicat d’une épouse sans titre ? […] En revenant à Paris, après y avoir passé toute une semaine à m’évertuer en si haute compagnie, j’aurais dit peut-être ouf ! […] Rochambeau, qui servait sous lui, a rapporté fort exactement ce premier exploit avec tous ses risques, et il a cité un propos chevaleresque du maréchal : « Il n’y a personne dans l’armée qui ne pense comme moi qu’il vaut mieux se faire moine au haut du Monte del Toro que de rentrer en France sans avoir pris Mahon. » Le succès répondit à l’audace.

995. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Gaston Paris et la poésie française au moyen âge »

Gaston Paris a d’abord, au plus haut degré, l’esprit scientifique. […] Je serais charmé de m’appeler Montmorency : ce serait une joie pour moi d’avoir été déjà glorieux bien loin dans le passé ; mais, si nous ne sommes pas de haute lignée par le sang et le nom, nous sommes du moins, nous les lettrés, d’une grande et vieille race intellectuelle : nous remontons à Téroulde et par-delà, plus haut que les Montmorency ; et cela nous console amplement, et nous remercions M. 

996. (1894) Propos de littérature « Chapitre III » pp. 50-68

Lisez celui-ci : Avec la double odeur de la chair et du soir Et les souffles épars comme des chevelures Voici luire des torches hautes au bois noir. […] Theuriet, (malgré bien des choses), parce qu’il a compris la « princesse verte », qu’il nous a fait voir des sous-bois où la lumière est fraiche et comme élastique, qu’il nous a récité la cantilène des ramilles et qu’il a bien aussi, je crois, pressenti l’immémoriale épopée des hauts arbres. […] La monotonie de maintes strophes immobiles est moins frappante dans ce milieu grandiose, tandis que la haute futaie, encadrant avec harmonie la noblesse des images humaines, fait naître en déesse propice une atmosphère de rêverie qui les caresse de son souffle.

997. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VIII. Les écrivains qu’on ne comprend pas » pp. 90-110

Je sais par les textes aimés que le poète est haut et sûr. […] Que le comte Tolstoï sait mal le français, — ce qui ne l’empêche point de se dresser entre les puissants constructeurs de romans du siècle, aussi haut que Balzac, que Stendhal, que Dickens. […] Il arrive bien qu’on parle tout haut sans interlocuteur.

998. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

Voici les premières : quand dans une société a dominé longtemps la tendance en une direction donnée, quand l’art, pendant une série d’années, s’est complu à montrer de préférence une face du monde, il est naturel, comme nous le disions plus haut, qu’on soit las de voir toujours la même chose, de marcher toujours du même côté. […] Le trajet qu’elle accomplit ressemble à ces routes de montagne qui serpentent en lacets ; on semble, en les gravissant, repasser plusieurs fois au même endroit ; on est toujours, en réalité, plus avant et plus haut. […] A regarder de haut l’évolution de l’Europe occidentale et de la France en particulier, on y reconnaît une série de successions par opposition qui se sont produites entre de vastes ensembles.

999. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Lorsqu’il eut été élu malgré lui archevêque de Cantorbéry le 6 mars 1093, pendant un voyage qu’il faisait en Angleterre (l’Angleterre alors et la Normandie n’étaient presque qu’un même pays depuis la conquête), Anselme ne trouva point en lui toutes les qualités et les ressources nécessaires à sa position nouvelle ; en gardant toutes ses vertus, il ne sut point les armer suffisamment pour les conflits et les combats du siècle ; cette haute dignité ecclésiastique de primat d’Angleterre, à laquelle il dut un surcroît de célébrité, un mélange d’éclat et de disgrâce, deux exils, des retours triomphants et bénis, et finalement sa canonisation peut-être, cette haute dignité nous le montre plutôt inférieur à lui-même et dépaysé dans les affaires, craintif, obstiné et indécis, débile sinon d’âme, du moins de caractère. […] Évitons ces retours, du reste bien naturels, de l’humeur, et mettons notre pensée plus haut, reprenons notre influence dans une sphère plus sûre, j’entends celle des lettres sérieuses et pratiquées dans leur véritable esprit.

1000. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Les romans de M. Edm. de Goncourt » pp. 158-183

Dans une famille de vielle richesse bourgeoise, et de hautes charges militaires, sous la galante et faible tutelle d’un grand-père épris, l’éveil d’âme d’une petite fille, sa vie de dignitaire minuscule dans l’hôtel du ministère de la guerre ; la naissance de son imagination par la musique, les lectures sentimentales, et cette précoce surexcitation que causent dans une cervelle à peine formée les exercices religieux préparatoires à la première communion  l’esquisse de ses passionnettes et de ses amourettes  puis le développement de la jeune fille fixé en ces moments capitaux : la puberté, le premier bal, la révélation des mystères sexuels  enfin l’étude, en cette élégante, de tout le raffinement de la toilette, des parfums du corps et des façons mondaines  son affolement de ne pas se marier, le léger hystérisme de sa chasteté, l’anémie, une lugubre lettre de faire part  en ces phases se résume le récent roman de M. de Goncourt, le dernier si l’auteur maintient, pour notre regret, un engagement de sa préface. […] Enfin le possesseur de cette curieuse intelligence, il faut le figurer jeté dès sa jeunesse, avec son frère et son semblable, dans les remous de la vie parisienne, promenant l’aigu de son observation, la délicate nervosité de son humeur, dans le monde des petits journaux, des cafés littéraires, des ateliers, dans les grands salons de l’empire, habitant aujourd’hui une maison constellée de kakémonos et rosée de sanguines, le cerveau nourri par une immense et diverse lecture : à la fois érudit, artiste et voyageur, au fait de l’esprit des boulevards, de celui de Heine et de celui de Rivarol, instruit des très hautes spéculations de la science, l’on aura ainsi la vision peut-être exacte, en ses parties et son tout, de cet artiste divers, fuyant exquis, spirituel, poignant, solide  l’auteur des livres les plus excitants et les plus suggestifs de cette fin de siècle. […] Il suffit de dire que presque toutes ces Pages retrouvées, sont des morceaux de bonne ou de haute littérature, pour marquer la différence entre les feuilles d’il y a une trentaine d’années et celles de la nôtre.

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