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1254. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

Et si le bien existe, il doit seul exister ! 

1255. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIVe entretien. Littérature politique. Machiavel (3e partie) » pp. 415-477

Maintenant l’Angleterre, par la protection habile et personnelle qu’elle prête à la maison de Savoie pour la flatter d’une monarchie piémontaise universelle en Italie, l’Angleterre va prendre en Italie, pour la première fois depuis que le monde existe, la position qu’elle avait prise en Espagne contre les Français. […] … XXVIII Cette confédération, qui a déjà existé chez vous deux fois, sous la forme de ligue lombarde ou italique, n’est qu’une tradition de votre nature et de votre histoire.

1256. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIe entretien. Trois heureuses journées littéraires » pp. 161-221

La peste décimait Florence ; les vivants ne suffisaient plus à ensevelir les morts ; les cantiques funèbres qui accompagnent les cortéges aux campo santo se taisaient, faute de voix pour gémir ; les tombereaux précédés d’une clochette pour annoncer leur passage aux survivants s’arrêtaient le matin de porte en porte, pour emporter comme des balayeuses, sans honneurs, tout ce que ce souffle de la mort avait fait tomber de tous les étages pendant la nuit ; on ne se fiait pas même pour une heure à l’amitié ou à l’amour ; on n’était pas sûr de retrouver en rentrant ceux qu’on laissait, encore jeunes et sains, à la maison en gage à la contagion invisible ; le moindre adieu était un éternel adieu, le lendemain n’existait plus, l’avenir était mort avec tant de morts. […] X Mais alors ces beaux arbres existaient encore ; et, quand le soleil de midi repliait l’ombre perpendiculaire sur leur racine, c’est là que nous nous abritions du soleil pendant les heures brillantes de la journée.

1257. (1863) Cours familier de littérature. XV « XCe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin (3e partie) » pp. 385-448

si tu le pouvais, s’il existe quelque communication entre ce monde et l’autre, reviens ! […] XVII Mais il y a dans l’âme de Mlle de Guérin un principe de vie et d’immortalité qui n’existe pas dans les héroïnes de Walter Scott : c’est le mysticisme catholique exalté, qui donne la vie, la sainteté, l’émotion sacrée du martyre à la jeune châtelaine du Cayla, et la poésie profonde du cœur, qui élève ses confidences à la hauteur des écrivains ascétiques les plus éloquents ; c’est l’huile onctueuse de cette lampe que le dieu du passé s’est allumée à lui-même dans les ruines de son sanctuaire démoli.

1258. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre V. Le roman romantique »

Ce système, qui n’en est pas un, a ses inconvénients : le pire est la prolixité ; quand on n’a pas marqué d’avance le terme où l’on doit arriver, il n’y a pas de raison pour s’arrêter ; il n’y en a pas non plus pour borner l’étendue de chaque partie, par son rapport à un ensemble qui n’existe pas. […] La forme, dans Stendhal, est indifférente ; elle n’existe pas comme forme d’art ; elle n’est que la notation analytique des idées.

1259. (1839) Considérations sur Werther et en général sur la poésie de notre époque pp. 430-451

Mais quand madame de Staël écrivait cette page, les maladies d’imagination dont elle voit la peinture dans Werther n’étaient encore qu’au début de leur invasion, pour ainsi dire : un grand nombre d’ouvrages remarquables qui ont la même origine et le même effet que Werther, et une foule bien plus grande de détestables productions puisées à la même source, n’existaient pas. […] L’harmonie donc entre ces trois choses, la Nature, l’Humanité, la Famille, n’existe pas pour Werther ; et la plus grande de ces trois révélations divines, l’Humanité, est aussi celle qui brille le plus faiblement et le plus rarement à ses yeux.

1260. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 février 1885. »

Il existe un compromis, l’innovation à la mode, l’opéra réformé, mélange d’opéra et de drame, ni drame ni opéra. […] L’œuvre d’art totale a existé au temps de la tragédie grecque qui mêlait danse, chant, musique, poésie dans une œuvre à portée religieuse et politique.

1261. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 septembre 1886. »

Et je crois bien que j’admirerais Offenbach si ce maître n’avait, après lui, donné le droit d’exister à d’extravagants compositeurs d’opérettes, incapables d’être expressifs comme d’être spirituels. […] Il existe une symphonie, inédits je crois, de Georges Bizet, exécutée il y a bon nombre d’années chez Pasdeloup, où le compositeur a introduit un thème fixe à la Berlioz.

1262. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VII. Repos »

Il a trop cherché, le pauvre dément, la joie qui n’existe pas, « le baiser qui pense ». […] Le penseur, cet être rare, existe chez Lacuzon.

1263. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Victor Hugo » pp. 106-155

De là ses romans allant de coups de théâtre en crises de conscience, de situations extrêmes, en soudaines catastrophes, sans que même les interstices soient comblés par des files de petits incidents médiocres et quotidiens, tels que les chroniques et les mémoires nous les montrent exister sous les plus grands remuements de l’histoire. […] Ainsi leur agrandissement n’a pas de bornes comme il en existe pour les mots figurant des objets communs ; dans le domaine du vague, la fantaisie de M. 

1264. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

Je suis las des histoires où il n’est question que des aventures d’un roi, comme s’il existait seul, ou que rien n’existât que par rapport à lui ; en un mot, c’est encore plus d’un grand siècle que d’un grand roi que j’écris l’histoire.

1265. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

Zola, qui, du reste, ne devait exister dans la pensée de son auteur que par son exécution pittoresque. […] Le prêtre, autrefois, vivait de l’autel, et il n’existait que par l’autel, mais à présent l’autel doit mourir par le prêtre… Et voilà pourquoi le prêtre, haï et méprisé, et dont on ne devrait même plus parler si les religions étaient — comme ils le disent — finies, tient tant de place dans l’irréligieuse littérature de ce temps.

1266. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

Feydeau (et c’est là son côté inférieur comme favori) existait certainement avant que M.  […] Dans le Romuald, de M. de Custine, il y a un sermon tout entier, prêché à la fin du roman, et il ne faut pas même être catholique pour reconnaître la différence de profondeur dans l’accent qui existe entre l’œuvre d’un écrivain catholique de conscience éternelle, et celle de l’écrivain qui ne l’est que par la supposition momentanée de son esprit.

1267. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La princesse Mathilde » pp. 389-400

Ne lui parlez pas de ces idées complexes, ambiguës, où il entre du pour et du contre, de ces pensées entre chien et loup : ces nuances, ces crépuscules d’idées n’existent pas pour elle.

1268. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803 » pp. 2-15

Il en existe trop peu de semblables ; je ne sais même si, dans les annales littéraires, on trouverait à en citer une autre de pareille valeur pour l’étendue, l’intimité et l’exactitude.

1269. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Appendice — II. Sur la traduction de Lucrèce, par M. de Pongerville »

« Lucrèce veut prouver que l’enfer n’existe point ailleurs qu’en ce monde et dans le cœur des méchants : Sed Tityos nobis hic est, in amore jacentem Quem volucres lacerant, atque exest anxius angor, Aut alia quavis scindunt turpedine curæ.

1270. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « JULES LEFÈVRE. Confidences, poésies, 1833. » pp. 249-261

Ces sœurs qu’à nos chagrins le génie accorda, Clémentine, Imogen, Clarisse ou Miranda, Ces êtres fabuleux qu’adopte la misère, Et qui, sans exister, peuplent pourtant la terre, Semblaient, tous confondus sous un nom gracieux, Me dicter un roman qui m’approchait des cieux.

1271. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Des soirées littéraires ou les poètes entre eux »

A défaut de ces choix resserrés et éternels, il peut exister de poëte à poëte une mâle familiarité, à laquelle il est beau d’être admis, et dont l’impression franche dédommage sans peine des petits attroupements concertés.

1272. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

., qui, à ce qu’on assure, existent toujours, n’auraient rien de mieux à faire, au lieu des motions et harangues empruntées au portefeuille d’Anacharsis Clootz, que d’expédier dès demain, par les villages, quelques chanteurs ambulants, avec ordre de ne quitter chaque endroit que lorsque deux ou trois garçons des plus éveillés sauraient les quatre ou cinq chansons magiques : il sera mémorable, l’instant où la population de la France les redira en chœur.

1273. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre II. Définition. — Énumération. — Description »

Le sentiment n’existe pas à côté de l’intelligence et de la volonté ; mais il donne en quelque sorte aux idées et aux actes leur couleur propre.

1274. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre III. Association des mots entre eux et des mots avec les idées »

Il y en a qui sont générales et communes, et qui existent dans tous les esprits, au moins dans tous les esprits des hommes qui parlent la même langue.

1275. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre V. Le théâtre des Gelosi (suite) » pp. 81-102

Tout le rôle de la Milanaise existe, par exemple dans Gli Ingannati (les Abusés) des Étourdis de Sienne.

1276. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre III. L’antinomie dans la vie affective » pp. 71-87

Cette exigence n’existerait pas chez un individu isolé.

1277. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XII. L’antinomie morale » pp. 253-269

. — Sans doute, comme l’homme est un être complexe, comme il existe en lui deux âmes ennemies, l’âme sociale et l’âme individuelle, la morale a dû plus d’une fois tenir compte de cette dualité de notre nature et faire certaines concessions au sentiment de l’individualité.

1278. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IX. Les disciples de Jésus. »

Aucune hiérarchie proprement dite n’existait dans la secte naissante.

1279. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XI. Le royaume de Dieu conçu comme l’événement des pauvres. »

Cet usage existe encore chez les Israélites.

1280. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XIII, les Atrides. »

S’il en existait de pareils, on devait les renier et les mépriser comme des Démons impuissants. » — Tandis qu’ils délibéraient sous leur tente, une pouliche de poil pourpre, échappée d’une prairie voisine, traversa le camp au galop, en hennissant avec éclat vers le ciel.

1281. (1860) Ceci n’est pas un livre « Mosaïque » pp. 147-175

Le professeur sourit — et se retournant de mon côté : — Ce monsieur, dit-il à voix basse, vient d’émettre une balourdise qui me fait songer, malgré moi : ne croyez-vous pas qu’il existe certains mots — comme certains hommes — fatalement prédestinés à n’être jamais compris, quelque claire que soit leur signification ?

1282. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVIII. Souvenirs d’une Cosaque »

Les critiques graves trouvent cela curieux et s’en pourlèchent… Bien avant même que la dame cosaque existât, l’homme qu’elle a aimé avec tant de furie, dit-elle, avait été aimé par des femmes non moins furieuses, qui n’étaient pas Cosaques, et l’une d’elles l’enleva, qui plus cosaque est !!

1283. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXI. Mme André Léo »

Ce roman du Divorce, un de plus soignés de Mme André Léo, — esthétiquement — n’existe pas.

1284. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le Sahara algérien et le Grand Désert »

Nul n’a mieux compris, et ne devait mieux comprendre, que cette intelligente tête d’officier, les mœurs familiales et guerrières de ces tribus qui se dressent encore avec tant de majesté devant les Européens, leurs vainqueurs et leur offrent, comme une leçon, le spectacle de Barbares qui ont conservé l’intelligence de la hiérarchie, quand les peuples éclairés, comme on dit, en ont perdu jusqu’à l’instinct… La Féodalité, qui n’existe plus qu’au désert, ce fragment du Moyen Age retrouvé vivant dans les sables du Sahara, a captivé singulièrement le Croisé de la civilisation, et, malgré ses réserves un peu trop discrètes de civilisé, l’on voit bien, aux caresses de son pinceau, l’ardeur attentive et charmée de sa sympathie !

1285. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « L’idolâtrie au théâtre »

Et non seulement ils se multipliaient, mais ils se vantaient d’exister, mais après les plaisirs de l’applaudissement dans la salle ils prétendaient à l’applaudissement dans la rue.

1286. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Odysse Barot »

Pour cet historien de la littérature anglaise, il faut bien le dire, le vrai point de vue littéraire, qui est le point de vue esthétique, n’existe pas.

1287. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ernest Hello » pp. 389-403

Dans les chapitres de son livre, qui n’a que des chapitres et dont l’unité n’existe que dans la personnalité très particulière de l’auteur, ceux-là qui sont intitulés : La Lumière et la Foule, Les Ténèbres et la Foule, Les Sables mouvants, Les Préjugés, Les Caractères, Les Passions et les Âmes, La Charité intellectuelle, sont de ces choses qu’il est difficile dénommer, parce qu’elles n’ont pas d’analogue en littérature… Le côté que j’oserai appeler le côté divin de cette critique, échappera sans nul doute à ceux qui ont le mépris insolent et bestial du mysticisme de l’auteur.

1288. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Femme et l’Enfant » pp. 11-26

Il a constaté que la division des propriétés, cette vermine du plus beau sol, qui le ronge parcelle à parcelle, n’existe pas dans ce fort pays de droit d’aînesse, et que la grande propriété peut aisément y faire les frais de la grande culture qui féconde.

1289. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Sévigné » pp. 243-257

Madame de Sévigné est certainement une des femmes les plus typiquement françaises qui aient jamais existé, et voilà pourquoi les esprits très français, comme Babou, sont un peu chauvins de cette femme.

1290. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Papesse Jeanne » pp. 325-340

Donc, Emmanuel Rhoïdis, — s’il existe, s’il n’est pas quelque pseudonyme doublé d’un traducteur anonyme, ce qui ferait masque sur masque et rendrait la mystification plus sûre, — Emmanuel Rhoïdis, l’auteur de cette Papesse Jeanne 30 qui paraît si tard, serait coupable, dans ce cas, d’avoir mis un bien joli nom au bas d’une bien vilaine chose.

1291. (1880) Goethe et Diderot « Note : entretiens de Goethe et d’Eckermann Traduits par M. J.-N. Charles »

Sainte-Beuve, l’entomologiste des riens, comme le plus grand critique qui ait jamais existé, parce qu’il n’a pas un principe de morale dans la tête et que sa critique, c’est de la description d’histoire naturelle.

1292. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. le vicomte de Meaux » pp. 117-133

Et s’il eût osé, d’ailleurs, qui peut dire qu’il aurait réussi à fonder cette quatrième dynastie qui aurait supprimé ces Bourbons, tous funestes à la France, même Louis XIV, et s’il n’eût pas trouvé son écueil dans ce Royalisme, qui n’avait pas même besoin du Catholicisme pour exister ?

1293. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 201-216

Sans amitié, sans préférence, sans chaleur, sans passion, indifférent à tout, et ne faisant acte de pouvoir, et d’un pouvoir jaloux, que dans la liste des invités de ses soupers, Louis XV apparaissait, dans le fond des petits appartements de Versailles, comme un grand et maussade et triste enfant, avec quelque chose dans l’esprit de sec, de méchant, de sarcastique, qui était comme la vengeance des malaises de son humeur… Un sentiment de vide, de solitude, un grand embarras de la volonté et de la liberté, joint à des besoins physiques impérieux et dont l’emportementrappelait les premiers Bourbons, c’est là Louis XV à vingt ans, c’est là le souverain en lequel existait une vague aspiration au plaisir et le désir et l’attente inquiète de la domination d’une femme passionnée, ou intelligente, ou amusante… Il appelait, sans se l’avouer à lui-même une liaison qui l’enlevât à la persistance de ses tristesses, à la paresse de ses caprices, qui réveillât ou étourdît sa vie en lui apportant les violences de la passion ou le tapage de la gaieté.

1294. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Michelet » pp. 259-274

La vertu la plus rare, la plus étrange, et si étrange qu’on ne la conçoit même que surnaturelle, — parce que, dans l’ordre humain, elle n’existe pas, — l’humilité, est ici dans toute son incompréhensibilité, claire seulement pour Dieu et pour ceux qui y croient !

1295. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Horace Walpole »

Comme Swift, qui fut affreux, à plus de cinquante ans, comme un vieux homme à bonnes fortunes, avec les deux femmes qui l’aimèrent et dont il brisa le cœur par une férocité d’égoïsme qui le déshonora, Walpole a été cruellement dur avec l’unique femme qui l’ait aimé et dont l’amour, le seul amour octogénaire qui ait jamais existé dans l’histoire des cœurs, exalta, humilia et inquiéta tout à la fois ses mille vanités de dandy.

1296. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame de Sabran et le chevalier de Boufflers »

Rappelez-vous encore les Lettres à une inconnue, du triste Mérimée vieilli, devenu le croquemort de lui-même, et celles à la Princesse, de Sainte-Beuve (Trissotin à la princesse Uranie), et vous sentirez sur-le-champ la différence qui existe entre les lettres intimes de la comtesse de Sabran, écrites en toute vérité de sentiment et sans aucune préoccupation de la galerie, et toutes ces raclures de secrétaire et de chiffonnière que publient, après la mort des gens, des éditeurs intéressés ou badauds.

1297. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Nicolas Gogol »

Il possédera des âmes qui, aux yeux du fisc, existent tout le temps que la révision des listes n’est pas faite ; et, muni de ses titres de vente, il empruntera sur ces âmes fictives au Lombard (le Mont-de-Piété en Russie), des sommes parfaitement réelles.

1298. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVI. Buffon »

Flourens est un de ces esprits issus de Buffon dont on pourrait dire : Si Buffon n’avait pas été, existeraient-ils ?

1299. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVII. Saint-Bonnet »

Pour cela, la philosophie pesa sur l’esprit de l’homme de deux manières, par les sciences qui ne s’adressent qu’à l’esprit et qui finissent par lui donner le vertige de sa force, et par l’effet du paganisme sur l’âme, influence — il faut le reconnaître — que le dix-huitième siècle n’avait pas créée ; qui existait depuis la Renaissance, mais qui, grossie chaque jour, avait fait avalanche sur la pente escarpée de ce siècle, où toutes les erreurs entassées avaient fini par se précipiter.

1300. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Th. Ribot. La Philosophie de Schopenhauer » pp. 281-296

La sienne, qui n’est pas la leur, produit l’effet le plus inattendu à ceux qui savent que cette variété d’athée était, de sentiment et de doctrine, le pessimiste le plus absolu qui ait jamais existé et qui avait inventé cette raison pour que l’homme ne fût pas supérieur au singe : c’est qu’il n’aurait pu résister à l’horreur de la vie… La morale de Schopenhauer, — bien trop philosophe pour ne pas accrocher à la caisse de son système les deux roues d’une esthétique et d’une morale qui devaient le faire mieux rouler, — l’incroyable morale de cet homme qui ne croit pas au devoir : « bon pour des enfants et les peuples dans leur enfance », est, le croira-t-on ?

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