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62. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

À toutes les vies qu’on publiait alors, ce qui manquait, c’était précisément la vie ! […] Mais cette première partie est peut-être la plus curieuse, la plus réellement biographique de la vie de Bossuet, parce qu’elle était la plus obscure, — s’il est permis pourtant de dire qu’il y eût jamais de l’obscurité dans la vie de Bossuet, de ce soleil pour qui Dieu a essuyé l’azur dans lequel il devait monter avec une splendeur si tranquille, et préparé un firmament. […] Mais le bonheur de Goethe tient surtout à l’insensibilité de son âme, tandis que sous la croix pectorale de Bossuet il y avait un cœur qui pouvait être déchiré… Cette incroyable félicité de Bossuet commença pour lui avec la vie. […] Ni la lecture des œuvres de Bossuet, ni ses lettres, ni ses Élévations, ni ses écrits mystiques, ni cent passages de ses sermons, n’ont pu modifier ce jugement faux, coulé en plomb dans le moule à bêtises de la tête des sots, lequel jugement vient de la gloire de Bossuet et de l’éclat extérieur de sa vie, mais qu’une autre partie de cette vie pourrait réfuter, comme ses œuvres, si l’on prenait la peine de l’invoquer ! Eh bien, c’est cette partie de la vie de Bossuet que j’appelle la plus biographique et la plus utile à connaître pour nous expliquer ce grand homme, que Floquet a particulièrement étudiée.

63. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre V : Règles relatives à l’explication des faits sociaux »

Les formes les plus complexes de la civilisation ne sont que de la vie psychique développée. […] Si la vie collective ne dérive pas de la vie individuelle, l’une et l’autre sont étroitement en rapports ; si la seconde ne peut expliquer la première, elle peut, du moins, en faciliter l’explication. […] L’homme est donc naturellement réfractaire à la vie commune, il ne peut s’y résigner que forcé. […] Pour eux, la vie sociale est essentiellement spontanée et la société une chose naturelle. […] Si tant est qu’elle existe avant toute vie sociale.

64. (1881) La psychologie anglaise contemporaine «  M. Georges Lewes — Chapitre II : La Psychologie »

Sa vie individuelle entre comme élément dans une vie collective. […] La vie leur semble l’antithèse de l’action mécanique. […] La vie précède-t-elle l’organisation ? […] Nous ne savons plus ce qu’est la vie. […] par lesquels les deux vies se mêlent et se confondent.

65. (1899) Le préjugé de la vie de bohème (article de la Revue des Revues) pp. 459-469

Cette triple cérémonie a donc mis en vedette et en honneur la vie des artistes pauvres. […] Voilà sa joie profonde, voilà le secret de son sourire, voilà le secret du succès de la Vie de Bohème, parmi les bourgeois épanouis. […] Il faut le dire sans plus attendre : la bohème n’a aucun rapport avec la vie de l’artiste pauvre. […] Le bohème a sa fin dans son état transitoire lui-même ; il raconte toute sa vie qu’il va créer, jusqu’au jour où il prend l’attitude du vieux lutteur que la dureté de la vie a empêché de se révéler. […] L’homme qui, appuyé sur l’expérience de la vie parisienne, et mû par une puissante compassion pour les êtres qui promènent sans défense des dons admirables à travers les dangers de la vie, écrirait ce code de leur organisation morale et matérielle, cet homme réaliserait une des œuvres les plus hautement bienfaisantes de tous les siècles.

66. (1893) Du sens religieux de la poésie pp. -104

Mais aussi la vraie vie n’est pas dans ce chemin sanglant de notre sang, la vraie vie est en nous. […] — Non pas hors de l’humanité, l’art égale la vie et il n’v a point d’art sans la vie. Mais la vie ne consiste pas tout entière en ses immédiates apparences. […] Eh bien, rien n’est aussi éloigné de cet idéal que la conception de la vie moderne en général, conception d’après laquelle la vie animale tend toujours davantage à gouverner la vie raisonnable. […] Elle pleure depuis dix-huit siècles. — Les deux existences de Marie-Madeleine, c’est la vie ancienne et c’est la vie moderne, toutes les Vénus heureuses et rieuses et puis toutes les Madones douloureuses.

67. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Quelle est la réalité de la vie ? […] La vie égoïste, mondaine, la vie des intérêts et des luttes, évidemment, n’est point la vie réelle, puisqu’elle se termine par la mort. […] Dans l’Unité qui seule est, vivons la seule vie. […] Et Tolstoï nous montre le bonheur, seulement, dans la fusion de notre vie avec la commune Vie. […] Jésus oppose à la vie personnelle non la vie d’outre-tombe, mais la vie commune qui se fond avec la vie présente, passée et future de toute l’Humanité.

68. (1922) Gustave Flaubert

ma bonne vie d’étudiant ! […] Une pauvre vie, une vie tout de même ; le roman d’une pauvre vie, mais d’une vie ! […] On peut appeler leurs vies à tous deux des vies manquées. […] Car la vie de Félicité et la vie de Julien sont au contraire des vies gagnées. […] Tandis que la vie de Félicité est le type de la vie la plus simple, la vie de Julien est le type de la vie la plus tragique.

69. (1911) L’attitude du lyrisme contemporain pp. 5-466

La vie ramène de communs états d’âme. […] Pour l’enfant, tout est vie et substance. […] La lumière du jour te pénètre, ô ma vie ! […] La vie y est comme une provocation perpétuelle. […] Il y a là deux vies autonomes, vie de l’esprit et action pratique, qui ne parviennent ni à s’équilibrer, ni à se mêler.

70. (1895) Nos maîtres : études et portraits littéraires pp. -360

Il renonce à la volonté et à la vie égoïstes pour fondre sa vie, plus joyeusement, dans la vie universelle. […] Car la littérature des notions et la littérature musicale recréent des modes différents de la vie, mais de la même vie. […] c’est notre vie. […] Mais quelle vie ? […] L’artiste est celui qui peut créer une vie.

71. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre IV. Le roman »

Car la vie matérielle soumet à ses nécessités le travail littéraire ; le besoin d’argent règle la production. […] Plus violente est, dans la Vie de Marianne, la peinture de la boutique de Mme Dutour. […] Inutile de raconter la vie décousue, inquiète, désordonnée de l’écrivain. […] Prévost a fait cette simple histoire avec quelques souvenirs de sa vie orageuse : il l’a contée rapidement, sans dissertations et sans gros effets, avec un naturel qui donne la sensation de la vie même. […] Rousseau nous développe une vie.

72. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Il réfléchit sur tous les moyens de s’ôter la vie. […] Mais quelle était sa vie intime ? […] Manfred veut en finir avec la vie. […] Mais, en 1807, il quittait son collège bien aimé, pour une vie encore plus douce, la vie de famille à la campagne. […] Sans doute, à aucune époque de la vie de M. 

73. (1902) L’humanisme. Figaro

Toute esthétique est, en somme, une conception de la vie appliquée au cas particulier de l’art. […] Ils négligèrent délibérément non plus seulement la vie subjective, le moi romantique, mais la vie entière, subjective et objective, toute la vie ; ils se cloîtrèrent dans le Rêve. […] C’est de leur vie même qu’étaient faits leurs rêves. […] Nous sommes plongés dans la vie : il faut la comprendre et la vivre. […] Poètes, chantons la vie : c’est notre vraie façon, à nous, d’y collaborer.

74. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXI. Sainte Térèse »

Elle n’eût point passé dans, la vie en y laissant de trace, mais la vie eût passé sur elle, et en passant l’eût engloutie. […] Elle en avait senti le fil de feu s’abattre sur elle et sur son frère, à la lecture de la Vie des Saints. […] Nous parlons surtout de ses grandes œuvres spirituelles, sa Vie écrite par elle-même et ce Château de l’âme, sur lequel un jour nous reviendrons. […] C’est une Blanche de Castille au cloître, mais supérieure à la mère de saint Louis par cela seul qu’elle est restée vierge et n’en fut pas moins mère — la mère de tous ceux qu’elle enfanta à la vie religieuse et qu’elle éleva pour les cieux ! Cette Sainte Térèse-là, inconnue, n’est révélée que par sa Vie.

75. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre IV. De l’amour. »

qu’il est heureux le jour où l’on expose sa vie pour l’unique ami dont notre âme a fait choix ! […] tous ces écrivains, ces grands hommes, ces conquérants s’efforcent d’obtenir une seule des émotions que l’amour jette comme par torrent dans la vie. […] Peut-être, pour qu’il ne fut pas trop supérieur au nôtre, ont-ils déjà reçu tout le bonheur que nous espérons dans l’autre vie ; peut-être que pour eux il n’est pas d’immortalité. […] L., si, pour passer ma vie avec elle, il avait fallu me résigner à cet état, j’aurais mendié depuis trente ans, et nous aurions encore été bien heureux ! […] Il est vrai, l’amour qu’elles inspirent donne aux femmes un moment de pouvoir absolu, mais c’est dans l’ensemble de la vie, dans le cours même d’un sentiment, que leur destinée déplorable reprend son inévitable empire.

76. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre IV. Conclusions » pp. 183-231

Si grande que soit la difficulté, il faut l’affronter. — Considérant la littérature comme une expression de la vie, nous allons distinguer par elle, par son mode de réalisation, quelques éléments essentiels de la vie, quelques forces dont l’action se combine en d’infinies variations. […] Si le principe coïncidait avec les intérêts du groupe, il y aurait arrêt de vie ; le groupe, c’est le passé, l’acquis ; le principe c’est l’idéal, l’avenir. […] Réciproquement : partout où le principe d’une liberté grandissante a été étouffé (par exemple en Allemagne, en Espagne), la vie nationale s’est arrêtée. […] Toute idée est le résultat d’un ensemble infiniment complexe et individuel ; mais renoncer aux idées, parce qu’elles sont subjectives, ce serait renoncer à la vie. […] À mesure qu’on verra mieux le rapport intime de la littérature avec la vie totale, on connaîtra mieux aussi l’ascension de la vie et la mission du poète.

77. (1910) Muses d’aujourd’hui. Essai de physiologie poétique

Elle déposera secrètement toute son âme, toute sa chair, toute sa vie, dans son œuvre. […] La poésie, comme tout ce ce qu’on appelle art, est un rythme qui recrée de la vie. […] Ceci est curieux : à cette heure, où nous tendons de plus en plus à l’analyse, nous plaçant en spectateur isolé des contingences, voici un poète, une femme, qui tente une synthèse de la vie, essaie de plonger sa petite vie individuelle dans toutes les vies. […] La vie est son propre but à elle-même. […] La vie est une naïve image d’Epinal.

78. (1888) Poètes et romanciers

L’analyse ou la vie, il faut choisir. […] Où commence l’âme, où finit la vie ? […] Sa biographie s’arrête comme sa vie publique, comme sa vie chantante, à peu près en 1830. […] La vie commence avec les végétaux. […] Elle n’a troublé que la surface de la vie.

79. (1898) Les personnages de roman pp. 39-76

Soustraits à certaines obligations, aux travaux absorbants, aux luttes pour le pain quotidien où une grande part de l’attention et de la volonté humaine se dépense, on peut supposer qu’ils ont, mieux que d’autres, le loisir de goûter ce que la vie a d’amer et de doux quand elle est la vie pleine, la vie calme. […] On ne remarque aucune tendance analogue dans la vie réelle. […] On dirait qu’elles ont vécu, puisqu’elles ont le dédain souriant de la vie. […] Et cela dure toute une vie. […] C’est de lui que vient la vie, de plus en plus pleine, de ces êtres de fiction.

80. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre I. De l’évolution de la vie. Mécanisme et finalité »

De l’évolution de la vie. […] En est-il ainsi des lois de la vie ? […] S’il y a de la finalité dans le monde de la vie, elle embrasse la vie entière dans une seule indivisible étreinte. […] La vie, elle, progresse et dure. […] La vie procède par insinuation.

81. (1841) Discours aux philosophes. De la situation actuelle de l’esprit humain pp. 6-57

Ainsi l’Église et la vie future qu’elle annonçait, et dont elle enseignait les voies, étaient le complément ou la réparation de la vie séculière et de la vie terrestre. […] Ensuite la vie nous revient. […] La vie, c’est la synthèse. […] Et ces phénomènes, que nous appelons mort, sont encore de la vie, de la vie à part, si je puis parler ainsi, mais de la vie ; car la mort absolue est une pure conception de notre esprit. […] Considérez-le maintenant sous le scalpel de l’anatomiste : voilà son cœur et ses artères, mais ils ne battent plus ; ses nerfs, ses muscles, ses os, mais plus de mouvement, plus de vie ; au lieu de cette vie d’ensemble, de cette vie unitaire, une vie de décomposition, une vie de mort, pour ainsi dire, a commencé partout.

82. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre Premier »

Il prend la vie en horreur et jure d’en affranchir ses semblables. […] On ne sort pas de la vie par une porte heureuse quand on y reste trop longtemps ». […] C’est alors que le dégoût de la vie prend un nom dans les langues antiques. […] Sous l’Empire, l’ennui de la vie en devient l’horreur. […] On se battait à propos de tout et à propos de, rien, pour le plaisir de jouer sa vie, à pile ou face, sous une lanterne.

83. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre V. Des personnages dans les récits et dans les dialogues : invention et développement des caractères »

Lisez les contes de Perrault, sans dédain, et les légendes populaires, les vies des saints sur lesquelles n’ont pas travaillé des hommes d’esprit ; lisez Homère. […] Vous apprendrez insensiblement à nuancer les teintes, à assouplir les attitudes, à démêler et à rendre la complexité de la vie. […] Dans l’exécution, cela devient l’enflure, le vague, le faux, tout le contraire de la vie. […] C’est là qu’il faut avoir observé la vie, et accumulé les expériences. […] Tous les grands principes de la psychologie, toutes les lois et tous les faits de la vie morale, apparaîtraient ; le jeu mystérieux des causes infiniment petites et mêlées serait découvert.

84. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre V. Jean-Jacques Rousseau »

Vie de Rousseau. — 2. […] Restauration de la vie intérieure et sentimentale. — 4. […] Mais surtout, disait Galiani, l’Emile est faux parce qu’il ne prépare pas à la vie : qu’est-ce que la vie ? […] Il a mis le bonheur dans la vie de famille, sérieuse et tendre. […] I IL Beaudoiti, la vie et les œuvres de J.

85. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Sainte Térèse » pp. 53-71

Cette héroïne de la vie spirituelle est infinie d’intuition, de profondeur, de subtilité. […] Elle n’eût point passé dans la vie en y laissant de trace, mais la vie eût passé sur elle, et en passant l’eût engloutie. […] Elle en avait senti le fil de feu s’abattre sur elle et sur son frère, à la lecture de la Vie des Saints. […] Nous parlons surtout de ses grandes œuvres spirituelles, sa Vie écrite par elle-même, et ce Château de l’âme sur lequel un jour nous reviendrons. […] Cette sainte Térèse-là, inconnue, n’est révélée que par sa Vie.

86. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Que lui importe encore que la vie animale soit le terreau où plongent les racines de notre vie supérieure ? […] Elle veut la vie. […] La vie la fatigue, l’excède, lui répugne. […] La vie ondoie autour de lui, opulente et changeante. […] Pour certaines têtes il est la vie elle-même, et c’est la vie qui est un mauvais songe.

87. (1896) Le IIe livre des masques. Portraits symbolistes, gloses et documents sur les écrivains d’hier et d’aujourd’hui, les masques…

« Notre vie n’est rien, si elle n’est pas vraiment notre vie. » L’originalité de la vie est aussi nécessaire et plus belle encore que toutes les autres originalités. […] C’est la vie individuelle créée ou recréée par l’anecdote. […] cette vie ! […] … je t’en supplie… Ta vie ! […] « Grâce à ce don, les symboles, c’est-à-dire les Idées, surgissent des ténèbres, s’animent, se mettent à vivre d’une vie qui n’est plus notre vie contingente et relative, d’une vie essentielle, la vie de l’Art, l’être de l’Être.

88. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre III. Les immoralités de la morale » pp. 81-134

Sérieusement appliquées, elles auraient vite désorganisé ou supprimé toute vie. […] L’instinct social obscur et les instincts égoïstes aussi résistent souvent à ces produits morbides de la vie, sous qui la vie se continue, en d’assez mauvaises conditions d’ailleurs. […] Les rôles sont bien distribués dans la comédie de la vie. […] Le bonheur, les joies, la vie peuvent être obtenus par surcroît, mais ils sont secondaires. […] Il n’était pas préparé à la vie collective par la suite des siècles où l’hérédité et les conditions de leur vie ont façonné ses ancêtres.

89. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mai 1886. »

L’Art, nous dit Wagner, doit créer la vie. […] Voir, entendre, c’est créer en soi des apparences, donc créer la Vie. […] Nous avons le besoin, toujours plus vif, pour conserver les sentiments de l’art, que les impressions de la vie nous soient données, dans la vie artistique, par d’autres moyens que dans la vie réelle. […] Or la vie est l’union intime de ses trois modes. […] Ils font ainsi des œuvres où manque la vie, déformant leur vision pour la poétiser.

90. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Paul Bourget »

Paul Bourget La Vie inquiète. […] Parmi les Parnassiens à la suite de Gautier, le byronisme de l’auteur de La Vie inquiète lui a-t-il été reproché comme l’infériorité attardée d’un autre temps et comme une impossibilité d’atteindre le niveau du sien ? […] Dans ce recueil, où tout, malgré le titre qu’il porte, n’est pas cependant le génie cruel de l’anxiété dans la vie, ce malheur avant le malheur et qui nous gâte jusqu’à l’espérance, il y a (il faut bien l’avouer) çà et là, comment dirai-je bien ?… quelques parnasseries, qui, à mesure que le volume avance, disparaissent ; car ce livre est comme la vie, puisque c’est la vie d’un talent très jeune : à mesure qu’il avance, il se muscle et se virilise. […] Seulement, — au lieu de lui en faire un reproche, à ce poète d’un temps meilleur dans ce temps mauvais, je lui en fais une gloire, — c’est cette inquiétude que l’auteur de la Vie inquiète a retrouvée.

91. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

La musique est, à notre vie morale, ce que l’industrie est à notre vie matérielle. […] Il y a et il doit y avoir une contradiction entre sa vie morale et sa vie matérielle. […] Son amour de la vie est énergique, car Werther aime la vie autant qu’on peut l’attendre d’une nature aussi riche, mais il ne peut en jouir. […] Elle entre en eux comme un aliment au lieu d’en sortir comme une perte d’âme ; elle vient de la vie et les conduit à la vie. […] Qu’est-ce qui constitue la vie ?

92. (1891) Esquisses contemporaines

Elle s’éloigne par là de la vie, car la vie est toujours organique et progressante. […] Or, la vie de l’homme est de vouloir. […] Elle est bien simple, la vie humaine. […] Je ne considère pas même la vie personnelle de l’homme. […] Il comprit, il est vrai, le christianisme sous la forme d’une vie ; mais la vie se réduisait pour lui au sentiment et à la logique.

93. (1887) Discours et conférences « Réponse au discours de M. Louis Pasteur »

Nul n’a parcouru d’une marche aussi sûre les cercles de la nature élémentaire ; votre vie scientifique est comme une traînée lumineuse dans la grande nuit de l’infiniment petit, dans ces derniers abîmes de l’être où naît la vie. […] Ils avaient changé les bases de la vie ; mais leur confiance dans l’esprit humain était absolue. […] Littré s’était attaché et auxquelles il déclarait devoir le bonheur de sa vie. […] Littré toute sa vie. […] La fin d’une si belle vie aurait dû être calme, douce et consolée.

94. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XI : M. Jouffroy moraliste »

Le bonheur est donc une ombre, la vie une déception, nos désirs un piège trompeur. […] La veille, il avait un foyer domestique, un abri, un avenir, un plan de vie. […] Jouffroy avec l’immortalité du bœuf et la fécondité dans la vie future. […] Son génie promit plus que ne tint sa vie, et il eut moins qu’il ne mérita. […] Il n’y chercha point la règle, mais l’occupation de sa vie.

95. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

« La vie morale même d’un homme dépend du sort, etc. […] Jay, ce n’est pas dans cette vie agitée que j’entreprendrai quelque chose de sérieux. […] Que différente eût été ma vie sans cette faiblesse des membres ! […] Il eût été impossible alors que je traînasse une vie ridicule. […] De mois en mois comme la vie s’écoule !

96. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre troisième. L’idée-force du moi et son influence »

Dès lors, l’être peut agir pour l’avenir, à distance ; il peut agir pour la totalité de sa vie individuelle, et même pour sa vie conçue comme éternelle. […] Parce qu’une certaine connexion et union est effectivement nécessaire à la vie, soit organique, soit mentale. […] Et non seulement cette unification et cette concentration sont nécessaires à la vie physiologique, mais elles sont, par cela même, nécessaires à la vie psychique, à la conscience et à la sensation. […] La tendance à la répétition de soi, à l’identité, est donc essentielle à la vie même. Si la vie se sent et jouit de se sentir, elle voudra persister dans cette sensation et dans cette jouissance.

97. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Août 1886. »

Dans de récents articles, M. de Wyzewa a résumé la théorie wagnérienne de l’Art : « l’Art doit créer la Vie … il faut, au-dessus de ce monde des apparences habituelles profanées, bâtir le monde saint d’une meilleure vie : meilleur par ce que nous le créons … » Il montre ensuite que « l’artiste ne peut prendre les éléments de cette vie supérieure nulle part, sinon dans notre vie inférieure, dans ce que nous appelons la Réalité. » Or, dans Parsifal, Wagner, tout en se servant de signes empruntés à cette Réalité, a voulu créer une Vie aussi éloignée que possible des « apparences habituelles profanées ». […] Plüddemann), La vie et l’art : notes esthétiques sur le drame musical (F. […] Puis, ces recréations de vies luxuriantes et apaisées, la Fest Marsch, Siegfried-Idyll. […] C’est ; d’abord50, une entrée à quelque monde, lointain, de nouvelles réalités, et c’est le confus emmêlement de vies religieuses, lointaines, comme en l’attente de leur forme … Alors le Pur et Folax une âme pure, où entre la vie d’une vie très exaltée, et d’une vie très concupiscente, très adorante, l’éternel languir, le souffrir et le jouir éternel de l’âme, et la vie de fornication, — la vie luxurieuse et mystique, — jusque le surgissement, en lent exhaussement, triomphal, de la vie voulue. Car Amfortas, c’est Parsifal visionnaire d’une vie concupiscente ; Klingsor, c’est encore la vision, en Parsifal, d’une vie autrement vécue ; et Kundry, les Filles, ce n’est rien que des visions de Parsifal ; les chevaliers, toutes ces ombres, les images de sa voyance : vie de l’âme religieuse et charnelle.

98. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

Cet ouvrage est beaucoup plus complet que les Vies des Peres du désert, par M. […] La vie des Saints de M. […] Vies des Saints du P. […] Vies des Saints, in-8°. […] Je ne vous citerai point les vies particuliéres d’un grand nombre de Saints ; le champ seroit trop vaste ; mais vous ne pouvez vous dispenser de lire les Vies de St.

99. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Milton »

Milton Milton, sa vie et ses œuvres, par M.  […] C’est la vie pour la vie de Milton qu’il va nous dire, la vie pour la vie et pour son détail, — et non pour faire de cette vie la cause du talent de Milton et pour retrouver dans son talent l’empreinte de cette vie tout entière. […] L’aisance même, le bien-être, les pieds chauds de la vie bourgeoise, leur sont aussi contraires que son étroitesse, et j’aimerais mieux pour ces adorés de mon cœur le soliveau de l’hirondelle ! […] Il tint une école et même il aima ce métier, qu’il garda la plus grande partie de sa vie. […] Le génie de Milton résistant à la vie qu’il a menée soixante ans et même à la volonté de Milton !

100. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

Sa conception de la vie. […] Les religions parlent d’une vie future par où cette vie terrestre se prolongerait à l’infini. […] Sa conception de la vie. […] Il ne maudit pas la vie. […] Ces genres vivent de leur vie propre.

101. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Marcel Prévost et Paul Margueritte »

Ce qu’il nous raconte, c’est l’éducation de deux âmes par la vie. […] Au sortir de sa vie provinciale, elle a de cruelles déceptions, dont elle ne sait pas prendre son parti. La vie du jeune ménage est plus que serrée : ils ont à peine trois mille francs pour vivre. […] N’es-tu pas lasse de la vie que nous menons ? […] Il sortirait d’eux toute une race, et c’était la vie vraie, naturelle, la vie simple et grande.

102. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Montmorency » pp. 199-214

Renée, au milieu des distractions d’une vie politiquement active, est resté littéraire et se maintient tel. […] Bon de cette bonté qui tue ceux qui aiment, Montmorency la tua tous les jours de sa vie. […] Il est des vies qui n’ont, en effet, que la mort, et ces vies-là ne sont pas rares dans l’Histoire. […] il avait toujours été si heureux qu’il avait sans doute le sentiment du néant de la plus belle vie ! […] Le livre de Renée nous fait assister à sa vie cloîtrée, avec autant de renseignement et d’animation qu’il nous avait fait assister à sa vie du monde.

103. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Pierre Loti »

Cette vie de marin, si différente de la nôtre, songez quels effets elle peut avoir sur l’âme. […] Et ce futur grand écrivain s’assigne un idéal de vie de plus en plus différent de la vie de l’écrivain et du littérateur de profession. […] Et que sont ces pauvres petits plaisirs intellectuels auprès des grandes joies animales de la vie physique ! […] Car n’est-ce pas une pitié que, pouvant connaître la terre entière et multiplier par là notre vie et notre être, nous demeurions confinés dans notre clapier ? […] Et la question s’agite obscurément en lui, de savoir ce qui vaut le mieux de cette vie délicieuse, innocente, insignifiante et puérile, ou de l’autre vie, la vie d’Occident, celle qui a le vice et le mal, l’effort et la vertu.

104. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Il en fait une représentation symbolique de la vie rustique ou de la vie des villes. […] Mais comme ils manquent de tempérament, de vie ! […] Comme il aime la vie ! […] Son œuvre sent bon la vie simple, loyale, fervente. […] « Une vie d’écrivain.

105. (1903) Articles de la Revue bleue (1903) pp. 175-627

Elles me rappellent les vies de Plutarque. […] Une tendance générale se remarque chez tous : c’est la volonté de prendre au sérieux la vie, la vie individuelle et la vie sociale, c’est de réaliser dans leurs œuvres toute l’humanité qui est en eux. […] Il faudrait alors penser qu’avec lui s’est arrêtée la Vie. […] Fixer le réel, le devenir, la durée, la vie qui s’écoule. […] La Vie n’est pas quelque chose de fixe.

106. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre sixième. Le roman psychologique et sociologique. »

C’est bien là ce que la vie est philosophiquement, — sinon toujours réellement, en raison de toutes les causes perturbatrices qui font que presque aucune vie n’est achevée, n’est ce qu’elle aurait dû être logiquement. […] La vie est une dépendance réciproque et un équilibre parfait de toutes les parties ; mais l’action, qui est la manifestation même de la vie, est précisément la rupture de cet équilibre. […] Dans la réalité, les grandes scènes d’une vie humaine sont préparées de longue main par cette vie même : l’individu des heures sublimes peut se révéler dans les moindres actes : il se fait pressentir à tout le moins, car celui qui sera capable ne fût-ce que d’un élan, et dût-il avoir besoin de toute une vie pour le préparer, n’est pas absolument semblable à celui qui ne renferme rien en soi. […] Le roman, simple et complexe comme la vie, n’exclut rien, accueille tout témoignage, il peut tout dire et tout contenir. […] J’ai eu, tout jeune, un pressentiment complet de la vie.

107. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la religion. »

La vie se passe au-dedans de soi, les circonstances extérieures ne sont qu’une manière d’exercer un sentiment habituel ; l’événement n’est rien, le parti qu’on a pris est tout, et ce parti, toujours commandé par une loi divine, n’a jamais pu coûter un instant d’incertitude. […] Les succès ou les revers ne donnent à la conscience des dévots ni contentement ni regret ; la morale religieuse ne laissant aucun vague sur aucune des actions de la vie, leur décision est toujours simple. […] Sans doute, le plus efficace des repentirs, serait des actions vertueuses ; mais à la fin de la vie, mais même dans la jeunesse, quel coupable peut espérer de faire autant de bien qu’il a causé de mal ? […] Un de ses grands attraits pour le peuple a été d’abord l’intérêt, l’agitation même qu’elle répandait sur sa vie. […] Les anciens ont bravé la mort par le dégoût de l’existence, mais nous avons vu des femmes nées timides, des jeunes gens à peine sortis de l’enfance, des époux, qui s’aimant, avaient dans cette vie ce qui peut seul la faire regretter, s’avancer vers l’éternité, sans croire être séparés par elle, ne pas reculer devant cet abyme où l’imagination frémit de tout ce qu’elle invente, et moins lassé que nous des tourments de la vie, supporter mieux l’approche de la mort.

108. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

C’est un stoïcisme chrétien, qui préfère l’action à la contemplation, et la vie civile au cloître. […] Quoi qu’il ait prêché toute sa vie comme il improvisait. […] Il mourut jeune, à quarante ans, ayant gaspillé sa vie et son talent. […] Baudrillart, Olivier de Serres, sa vie et ses travaux, 1886. […] Dans ses Discours de la vie et de la mort (1575).

109. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre II. Le comique de situation et le comique de mots »

Certes, ce genre de comique se rencontre assez facilement dans la vie de tous les jours. […] S’il est vrai que le théâtre soit un grossissement et une simplification de la vie, la comédie pourra nous fournir, sur ce point particulier de notre sujet, plus d’instruction que la vie réelle. […] Or la comédie est bien un jeu, un jeu qui imite la vie. […] Le fil qui le relie à la vie réelle est bien fragile. […] La comédie de caractère pousse dans la vie des racines autrement profondes.

110. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

Quelle est la part de Dieu, quelle est la part de l’homme dans la vie religieuse et dans la vie morale elle-même ? […] Qui donne le branle à la série de mouvements qui constituent la vie organique ? […] Il en est de même dans l’ordre de la vie universelle. […] C’est ainsi que le physiologiste explique toute la vie morale par l’organisme. […] « Ce n’est qu’après l’extirpation de la vie maligne et corrompue du vieil homme, dit-il, que nous passons dans la vie de l’homme nouveau.

111. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Guizot »

Fidèle aux habitudes de toute sa vie, Guizot prend encore cette forte et majestueuse position, mais il se contente de la prendre. […] Ainsi, Guizot, qui a écrit à la tête de son livre le mot Vie, — Vies de Quatre grands chrétiens français, — n’avait pas, en réalité, le droit de l’écrire, puisqu’il ne nous donne qu’une biographie dédoublée. […] La vie privée s’adosse à, la vie publique, et il n’est pas permis à l’historien de les séparer. […] il faut, pour l’honneur du protestantisme, qu’on voie aussi clairement dans la vie de Calvin que dans celle de Notre-Seigneur Jésus-Christ ! […] … Là sera l’étonnement pour ceux qui liront cette vie des Quatre grands chrétiens français.

112. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre V. Le roman romantique »

Le monde et la vie n’ont pas de sens : et comment vivre sans savoir pourquoi l’on vit ? […] Le mal d’Obermann, c’est que ne croyant plus à la religion, ne pouvant rien par sa raison, il s’épuise, se ronge, use sa vie dans l’ennui ; il n’agit point, parce que la vie et le but de la vie lui sont incompréhensibles. […] Sa vie n’est plus qu’un prodigieux labeur d’écrivain. […] Théories à part, elle est curieuse surtout des âmes et de la vie. […] Vie de Henri Brûlard (autobiographie).

113. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série «  Leconte de Lisle  »

Il se dit alors que la vie est mauvaise et que l’action est inutile ou funeste. […] Or, à quoi bon condamner la vie ? […] On a encore d’autres raisons d’accepter la vie. « Pourquoi je vis ? […] En effet, au moment du sacrifice, un étalon prend la place de la victime  Maudite soit la vie ! […] Leur vie même, qui les exerçait tout entiers, était comme une œuvre d’art dont ils s’enchantaient.

114. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Harmonies poétiques et religieuses — II »

Depuis lors, certaines croyances, certaines doctrines morales sur la vie, sur les hommes, sur l’âme et sur Dieu, se sont répandues dans le monde et ont pénétré dans tous les cœurs. […] L’originalité des grands poètes, on le sait, consiste surtout à voir et à exprimer la nature, la vie et les hommes par un côté intime et nouveau. […] Ses idées sur l’amour et la beauté, sur la mort et l’autre vie, sont telles que chacun les pressent, les rêve et les aime. […] Dieu même n’est plus là pour lui tendre la main comme à un enfant ; Dieu, c’est le grand tout, c’est le flux et le reflux de vie universelle, c’est l’Océan de l’être. […] Dans Milly, dans la Vie cachée, le poète s’est essayé à des peintures qui, pour avoir plus de calme et de familiarité, n’en ont pas moins leur grandeur.

115. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

Il en est de la vie comme de la personne la plus aimée : il n’y a pas tellement loin de la haine passionnée à l’amour ; c’est précisément parce qu’on l’a trop aimée, trop rêvée idéale, cette vie passagère, trop embrassée dans de rares et uniques instants, qu’on se met ensuite, quand on a l’âme grande, à s’en dégoûter opiniâtrement et à s’en déprendre. […] La vie tumultueuse de Rancé reçut à diverses reprises des avertissements qui le frappèrent et lui donnèrent à penser. […] Il est âgé de trente-huit ans et demi, et Dieu lui accordera trente-six années de vie encore, l’espace des plus longs desseins. […] Les réponses à ces lettres, les lettres qu’on lui écrivit à lui-même, seraient plus variées et toucheraient à tous les points de la vie. […] (Parmi les jugements proprement dits, qui ont paru au sujet de la Vie de Rancé, nous indiquerons les très-beaux et très-respectueux articles de M.

116. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

Il réagissait contre sa vie commerciale, — sa vie d’échéances, d’expéditions, de correspondances mises jour, en écrivant ici et là et en agaçant cette publicité dont tout jeune homme s’éprend dans les premières années de la vie. […] À cette phase de sa vie, le démon du roman obsédait Audin. […] Ce grand travailleur creusait sous lui assez profondément le sol pour que le tour d’un siècle suffît au labeur entier de sa vie, quand même cette vie n’eût pas été si promptement interrompue par la mort. […] Mort douce comme sa vie, et comme son esprit ! […] Un jour cependant, le malheur, pour parler comme le monde, passa dans cette vie inénarrable.

117. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — I. » pp. 162-179

Il se crut dévot, se fit une retraite charmante joignant les Incurables, et y mena quelques années une vie forte édifiante. […] Il avait en lui un ressort qui dérangeait le train de vie où il s’était mis et qui empêchait la suite, la persévérance nécessaire au plein succès. […] Mais durant cet intervalle s’était venu placer un événement qui fut décisif dans sa vie et qui brisa dès le commencement sa carrière. […] Le vrai et le meilleur témoin est Lassay, qui a raconté en détail, et avec une admiration tendre, l’histoire de celle qu’il regretta toute sa vie. […] la longueur de ma vie me paraît insupportable quand je la compare à la longueur des jours que j’ai passés depuis la perte effroyable que j’ai faite.

118. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Antoine Campaux » pp. 301-314

L’auteur du livre que voici compte vingt-deux de ces éditions dont les deux dernières furent celles de Prompsaut en 1832, et en 1854 celle du bibliophile Jacob, et, de toutes les vies, la vie qu’il consulte le plus est celle de Colletet, car Colletet a écrit une vie de Villon, Colletet qui, crotté jusqu’à l’échine, Allait chercher son pain de cuisine en cuisine. […] Il la chanta, non par affectation ou forfanterie, comme les bohèmes de notre temps, qui n’ont pas même le naturel de leurs vices, mais parce que cette Bohème était sa vie et, qui sait ? […] Sans cette vie, sur laquelle la morale a bien le droit d’allonger ses moues, qui peut dire que le talent de Villon n’aurait pas péri ? […] Campaux d’avoir creusé jusque-là dans les vers de Villon, et opposé ainsi les sentiments à la vie du poète. […] Campaux la rattrape aujourd’hui, et la force à regarder l’âme de l’homme empreinte dans ses vers, pour faire pardonner à sa vie.

119. (1914) Une année de critique

douce vie de l’âme ! […] ce n’était que ça, la vie ? […] Elle le serait peut-être dans la vie. […] Est-ce ainsi que va la vie ? […] Il célèbre la vie, la force, la santé.

120. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre V. Le souvenir du présent et la fausse reconnaissance »

Dans cette dernière affection, le sujet croit avoir déjà vécu plusieurs fois sa vie actuelle. […] Parmi ces faits, il en est qui tiennent évidemment à un appauvrissement de la vie normale. […] Il ne se surajoute pas à la veille : c’est la veille qui s’obtient par la limitation, la concentration et la tension d’une vie psychologique diffuse, qui est la vie du rêve. […] Mais que faut-il entendre ici par « attention à la vie » ? […] Elle ne fait plus corps avec la vie réelle.

121. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre III. Le comique de caractère »

Tout cela intéresse l’essentiel de la vie. […] La vie ne se recompose pas. […] En organisant le rire, elle accepte la vie sociale comme un milieu naturel ; elle suit même une des impulsions de la vie sociale. […] C’est la continuité mouvante de notre attention à la vie. […] On se relâche de l’attention qu’on devrait à la vie.

122. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

la vie est brève et l’amour infini. […] Ces créatures irréfléchies auront toujours beaucoup d’attrait pour les hommes voués à la vie intérieure. […] Le but de la vie, c’est vous, Clémentine, qui me l’avez révélé. […] Elle était toute petite, ma vie ; mais c’était une vie, c’est-à-dire le centre des choses, le milieu du monde. […] Chacun fait à sa manière le rêve de la vie.

123. (1913) Le bovarysme « Deuxième partie : Le Bovarysme de la vérité — III »

Or, ce qui éclate tout d’abord dans ce spectacle de la vie phénoménale, c’est qu’elle nous apparaît comme une chose en mouvement. […] Quelle que soit l’hypothèse, il reste que la vie phénoménale ne nous est donnée que dans le mouvement. […] Devenir autre est la loi de la vie. Or dans l’être qui prend conscience de la vie qui l’anime et en forme une représentation, cette loi se transforme et devient la nécessité de se concevoir autre. Avec le pouvoir départi à l’homme de se concevoir autre qu’il n’est, on possède donc le rythme même de la démarche de la vie en tant qu’elle prend conscience d’elle-même.

124. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « J.-K. Huysmans »

Huysmans, pour qui la vie n’est pas le pâturage de M.  […] Eux seuls, ces esprits blasés et tombés dans l’enfance des vieilles civilisations, s’intéresseraient aux efforts et aux rétorsions de ce misérable Des Esseintes, corrompu par l’ennui, qui engendre toutes les autres corruptions, et qui s’imagine qu’on peut prendre à rebours la vie, — cette difficulté de la vie !  […] Huysmans, qui fait le Titan contre la vie, ne se montre qu’un imbécile Tom Pouce quand il s’agit de la changer ! […] Mais ils ne touchent pas à la vie, — à l’essence de la vie, — ils ne s’acharnent pas sur elle. […] Ils n’ont pas la spléenétique audace d’un simple romancier du xixe  siècle, qui croit pouvoir créer une vie à rebours de la vie.

125. (1914) Boulevard et coulisses

Car il n’y a pas que l’œuvre à faire, il y a la vie à gagner. […] J’ai retrouvé au hasard de la vie quelques-uns de ces personnages. […] Aucun mystère n’entoure leur vie régulière et ordonnée. […] C’est la solution indiquée de sa vie. […] Comment entendiez-vous la vie ?

126. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre IV. Poésie lyrique »

Cet homme de Schopenhauer, « qui n’aurait été conduit ni par son expérience personnelle, ni par des réflexions suffisamment profondes, jusqu’à reconnaître que la perpétuité des souffrances est l’essence même de la vie ; qui au contraire se plairait à vivre, qui dans la vie trouverait tout à souhait ; qui de sens rassis consentirait à voir durer sa vie telle qu’il l’a vue se dérouler, sans terme, on à la voir se répéter toujours ; un homme chez qui le goût de la vie serait assez fort pour lui faire trouver le marché bon, d’en payer les jouissances au prix de tant de fatigues et de peines dont elle est inséparable », cet homme-là ne se répandrait guère en chants lyriques ; et cet homme-là, c’est nous. […] Ayant à compter plus d’émotions que d’actions dans leur vie, ils n’avaient pas tant besoin d’une épopée, mais ils créèrent naturellement une poésie lyrique. […] L’amant à genoux, humble, dévot, ardent, reçoit la vie ou la mort de sa dame : il désire l’honneur et le bien de sa dame plus que sa vie propre : il a assez de bonheur, s’il aime : il est joyeux de souffrir, et accroît son mérite en souffrant. […] Elle n’avait guère vécu que d’une vie factice, n’ayant pas eu la bonne fortune de rencontrer un de ces esprits en qui elle se fût transformée, de façon à devenir une forme nécessaire du génie national. Elle ne fut chez nos trouvères qu’une doctrine apprise, science, comme dit Montaigne, logée au bout de leurs lèvres, vaine et froide idéalité, aristocratique dessin d’une vie élégante, dont l’élégance consiste à exclure les sentiments naturels et à s’abstraire des conditions réelles de la vie.

127. (1901) Figures et caractères

Donc séparer la vie politique de la vie poétique. […] Vie stoïque et triste. […] Il « bâilla sa vie » et quelle vie ! […] Il menait ici la vie que M.  […] L’art qui crée une vie au-delà de la vie s’amuse parfois à en imiter les objets.

128. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Balzac »

Balzac a souffert plus que personne, en raison de son omnipotente supériorité et de la vie qu’il s’était créée, de ces insectes littéraires. […] Les livres que nous écrivons, moulent toujours un peu notre vie. […] Le calme et serein Walter Scott eut aussi cette destinée de connaître la cruauté des dettes qu’il faut payer avec son cerveau… Mais, jusque-là, sa vie avait été libre et heureuse, et le malheur qui le frappa ne l’atteignit que dans sa vieillesse, tandis que Balzac l’eut, dès sa jeunesse, sur sa vie toujours ! […] je crois bien qu’elle se l’est dit, Madame de Hanska, dans le gonflement d’orgueil de son âme d’être le but suprême de la vie d’un homme comme Balzac ! […] Il ne bouleverse pas la vie : il l’exalte et il la soutient.

129. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iv »

Il appartient au christianisme social, voisin du Sillon, qui veut rendre la vie terrestre possible et établir dans l’humanité le règne de Dieu. […] Il a une âme qui est un psaume. »‌ La vie familiale des pasteurs, en se mêlant à leur vie sacerdotale, a fourni au cours de ces deux années de beaux traits que les fidèles recueillent comme des leçons et des exemples, pour supporter vaillamment les angoisses de la guerre.‌ […] Nous sommes sur les sommets de la vie morale.‌ […] J’ai vécu ce soir l’heure merveilleuse de ma vie, celle pour laquelle j’étais préparé dès ma naissance. […] La beauté de la vie vaut mieux que la vie elle-même. »

130. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome I

Ils haïssaient la rudesse de la vie des camps. […] J’utiliserai les retailles de la vie, si j’en ai. […] Sa vie sentimentale et morale a précédé ou accompagné sa vie intellectuelle. […] On n’a besoin que des faits dans la vie. […] Quand cet amoureux de la vie physique décrit un de ses héros précisément il laisse de côté les détails de cette vie physique et note seulement les détails de la vie morale.

131. (1902) La poésie nouvelle

La vie. […] En tout cas, fuir et renouveler sa vie ! […] que la vie est quotidienne !  […] ma vie est aux plis de ta jupe fidèle !‌ […] La poésie ne sera plus la reproduction directe de la vie, mais seulement une allusion à la vie.‌

132. (1905) Promenades philosophiques. Première série

Ce que nous aimons dans la vie, ce n’est pas la vie telle qu’elle est, c’est la vie telle qu’elle pourrait être, telle que nous la désirons. […] La vie qui est bonne, ce n’est pas celle que l’on connaît, mais celle que l’on ne connaît pas ; ce n’est pas la vie passée, c’est la vie à venir. […] Loin, peut-être, que ce soit la pensée qui pense la vie, c’est la vie qui anime la pensée. […] La Vie, qu’est-ce que la vie ? […] Qu’est-ce que la vie ?

133. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Le matin de la vie est comme le matin du jour, plein de pureté, d’images et d’harmonies. […] J’appris à connaître la mort sur les lèvres de celui qui m’avait donné la vie. […] Ce dégoût de la vie que j’avais ressenti dès mon enfance revenait avec une force nouvelle. […] Ô misère de ma vie ! […] On ne hait les hommes et la vie que faute de voir assez loin.

134. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Henry Rabusson »

Ils donnent l’idée de la vie la plus élégante, la plus somptueuse, la plus digne en somme d’être vécue. […] Car, si tout n’était pas vanité, si toute vie n’était attendue par la mort, il serait horrible de songer que nous ne connaissons qu’une vie médiocre, que nous n’avons pas de génie, que nous ne faisons rien de grand, que nous ignorons même à peu près la vie sensuelle et passionnelle et les « mille et trois » de don Juan, et que nous ne sommes pas « comme des dieux », ainsi que parlent les livres saints. Mais, encore que l’idée de la vanité universelle soit un grand soulagement, nous préférons quand même aux romans de la vie élégante les romans de la vie plate, misérable et grossière — parce qu’ils nous emplissent d’une infinie pitié. […] Même le duc de Trièves, le représentant par excellence de la haute vie, n’en impose pas autrement à M.  […] Ce n’est point l’expression de sa vie, c’est sa vie même qui est pour lui l’œuvre d’art.

135. (1911) Jugements de valeur et jugements de réalité

Si le blé a de la valeur, c’est qu’il sert à l’alimentation et entretient la vie. […] Tout comme la vie intellectuelle, la vie morale a son esthétique qui lui est propre. […] La vie économique elle-même ne s’astreint pas étroitement à la règle de l’économie. […] La vie morale n’est pas moins riche en contrastes de ce genre. […] La vie n’y est pas seulement intense ; elle est qualitativement différente.

136. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

Maurice Barrès a été frappé de l’importance exceptionnelle prise dans la vie intellectuelle contemporaine par l’idée sociale. […] Ainsi, agrandissant notre vie personnelle, nous sentirons des milliers de vies mêlées à la nôtre. […] Henry Bordeaux ne s’intéresse qu’aux figures vraies et vivantes : il aime la vie, il comprend la passion de vivre. […] Mais cette vie ardente que l’auteur de la Peur de vivre aime à décrire, c’est la vie du devoir et non la vie éparpillée et trépidante de l’agitation dissipée. […] Il s’est très vite dégagé de tout ce qui devait paraître trop voulu dans sa conception légèrement ironique de la vie provinciale.

137. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre III. “ Fantômes de vivants ” et “ recherche psychique ” »

J’ai lu quelque part l’histoire d’un sous-lieutenant que les hasards de la bataille, la disparition de ses chefs tués ou blessés, avaient appelé à l’honneur de commander le régiment : toute sa vie il y pensa, toute sa vie il en parla, et du souvenir de ces quelques heures son existence entière restait imprégnée. […] Que si nous passons aux autres fonctions de la pensée, l’hypothèse que les faits nous suggèrent d’abord n’est pas celle d’un parallélisme rigoureux entre la vie mentale et la vie cérébrale. […] Le cerveau, en dehors de ses fonctions sensorielles, n’a d’autre rôle que de mimer, au sens le plus large du terme, la vie mentale. […] Mais par là il canalise, et par là aussi il limite, la vie de l’esprit. […] Nous ne le devons pas, parce que notre destination est de vivre, d’agir, et que la vie et l’action regardent en avant.

138. (1887) Discours et conférences « Discours à l’Association des étudiants »

car la vie est devant eux. » Des deux parties du programme de la vie scolaire, travailler beaucoup, s’amuser beaucoup, je n’ai connu, à vrai dire, que la première. […] De même, pendant vos promenades, pendant vos repas, pendant tous les actes de la vie. […] La gaieté de la conscience suppose une bonne vie. […] J’ai visé par-dessus tout, dans ma vie, à conserver le repos de ma conscience, et j’y ai réussi. […] Préparez-vous pour la vie une ample provision de bonne humeur.

139. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

Joinville : relation de son œuvre aux vies de saints. — 3. […] L’Histoire de saint Louis est une vie de saint. […] Les vies du martyr se répandirent en grand nombre : il en est une qui est remarquable. […] L’article essentiel de sa foi, c’est que Dieu peut prolonger la vie des hommes qui le prient. […] À consulter : Vie.

140. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque (1re partie) » pp. 145-224

» « Est-ce là, poursuit Socrate, s’inquiéter des chances de vie ou de mort ? […] Entre la vie et l’éternité, on se sent homme si on regarde Socrate, on se sent dieu quand on l’écoute. […] L’entretien glisse ensuite, par une pente naturelle, sur la question du suicide, pour l’homme fatigué de la vie. […] Le jour ne naît pas de la nuit, car la nuit est ténèbres, et le jour lumière ; la veille ne naît pas du sommeil, car la veille est l’homme éveillé, le sommeil est l’homme endormi ; la vie ne naît pas de la mort, car la vie est l’absence de la mort, et la mort est la privation de la vie. […] En reconnaissance de sa guérison du mal de la vie actuelle.

141. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Edgar Poe »

Nous en voulons douter à cause de sa vie. Cette vie fut orageuse, coupable, et, dit-on, dégradée, mais elle fut malheureuse. […] Sa vie et son talent effraient. […] Il n’a pas que le spleen de la vie, il a aussi celui de la mort ! […] Sa vie tout entière, à ce robuste et malade génie, fut, jusqu’à sa dernière heure, un délire et un tremblement.

142. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Appendice »

Heureux les enfants qui ne font toute leur vie que dormir et rêver ! […] Dieu, l’infini, et l’air pur qui vient de là est la vie. […] Car, pour la vie banale, Dieu, je l’espère, m’en délivrera toujours. […] C’est alors, mon ami, que je passai les jours les plus cruels de ma vie. […] Et combien de fois doit-il changer dans la vie ?

143. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « PENSÉES » pp. 456-468

Rien de plus juste : ce malheureux goût de style et d’art est comme une gale qui s’attache à vous et gâte toute votre vie. […] La vie actuelle nous fait tant de bruit, que nous nous imaginons volontiers qu’il n’y en a jamais eu de pareille. […] A un certain âge de la vie, si votre maison ne se peuple point d’enfants, elle se remplit de manies ou de vices. […] La vie de famille est pleine d’épines et de soucis mais ce sont des soucis fructueux ; les autres sont des épines sèches. […] Le soir de la vie appartient de droit à Celle à qui l’on a dû le dernier rayon.

144. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Sa vie ; enfance et formation du caractère. — 2. […] À cette date la vie littéraire de Chateaubriand est finie : sa vie politique va commencer647. […] Chateaubriand avait attaché toute sa vie à son moi. […] Son éducation, la vie à Combourg ne lui ont pas appris à penser. […] Chateaubriand n’avait pas besoin de nous le dire ; on sent que cette vie militaire a été vécue.

145. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre II. L’âme et le corps »

Elle nous montre que la vie de l’âme ou, si vous aimez mieux, la vie de la conscience, est liée à la vie du corps, qu’il y a solidarité entre elles, rien de plus. […] À la philosophie incombe la tâche d’étudier la vie de l’âme dans toutes ses manifestations. […] Mais que tel ou tel d’entre eux vienne nous dire que c’est là de la science, que c’est l’expérience qui nous révèle un parallélisme rigoureux et complet entre la vie cérébrale et la vie mentale, ah non ! […] La symphonie dépasse de tous côtés les mouvements qui la scandent ; la vie de l’esprit déborde de même la vie cérébrale. […] Disons, si vous voulez, que le cerveau est l’organe de l’attention à la vie.

146. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « L’obligation morale »

Sur cette heureuse illusion repose une bonne partie de la vie sociale. […] Elle se rattache aux phénomènes les plus généraux de la vie. […] En fait, quand nous posons que le devoir de respecter la vie et la propriété d’autrui est une exigence fondamentale de la vie sociale, de quelle société parlons-nous ? […] Mais cet élan propre à la vie est fini comme elle. […] La vie morale sera une vie rationnelle.

147. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

Elles sont contraintes à une vie hasardeuse, solitaire, humiliée. […] Il est d’une race où la vie a besoin de bases. […] Et la vie de Victor Hugo ? […] Or il en a été de même de la vie littéraire. […] Les circonstances de la vie et le goût du silence firent le reste.

148. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — IV »

Intervertissant les termes de la proposition précédente, ce souci fait de la connaissance un moyen et de la vie le but. […] L’animal ne fut plus qu’un édifice aux formes diverses construit en grande partie avec de la substance morte pour abriter la vie multiple des cellules. […] Tout ce qui, a pour effet de rendre possible la vie sociale et d’en favoriser le développement doit être considéré comme utile à la vie même de l’espèce. […] Si la vie abondante de l’espèce n’a d’autre intérêt que de rendre la connaissance possible, si elle n’est elle-même, ainsi qu’on en a posé l’hypothèse, qu’un moyen pour la connaissance de se réaliser, on peut imaginer que des vérités nouvelles seront un jour inventées pour réglementer dans les limites qui conviennent le nombre des naissances sur une planète où il est déjà possible de prévoir une densité trop grande de la vie humaine. Ainsi les vérités ne sont, indissolubles qu’en apparence et durant le temps qu’elles sont utiles à la vie ou à la connaissance.

149. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre I. Du comique en général »

Nous la traiterons, si légère soit-elle, avec le respect qu’on doit à la vie. […] Issue de la vie réelle, apparentée à l’art, comment ne nous dirait-elle pas aussi son mot sur l’art et sur la vie ? […] Le rire doit répondre à certaines exigences de la vie en commun. […] Ce n’est plus de la vie, c’est de l’automatisme installé dans la vie et imitant la vie. […] Les exemples abondent dans la vie journalière.

150. (1892) Un Hollandais à Paris en 1891 pp. -305

La vie est dure ! […] Oui, c’est là le cadeau que la vie met dans notre berceau. […] L’amour d’une vierge l’avait fait réfléchir sur sa vie. […] La vie l’amuse et il ne regarde pas en arrière. […] Quelle cruauté envers la vie ! 

151. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIIe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset » pp. 409-488

… mais à condition de ne pas durer toute la vie ! […] La jeunesse est la vie en sève ; c’est aussi le génie en fleur. […] Un excellent livre de lui, intitulé Vie et ouvrage de J. […] L’enfance est ainsi bien souvent la promesse de la vie. […] tu ne vis, comme le vieillard blasé, que de la vie sénile des sens.

152. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

Il faut avoir confiance dans l’avenir et se plaire dans le nuage où la vie est suspendue. […] Mais, si je n’y prends garde, je vais achever le portrait avant d’avoir commencé à esquisser la vie. […] Aucune femme honnête ne venait égayer la vie de ces rats de livres à forme humaine. […] Quel contraste de la vie de Gray à Cambridge avec celle de Matthisson à Nyon ! […] Je racontais a Gray ma vie et mon pays, mais toute sa vie à lui était fermée pour moi ; jamais il ne me parlait de lui, il y avait chez Gray entre à présent et le passé un abîme infranchissable : quand je voulais en approcher, de sombres nuées venaient le couvrir.

153. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

Il se rencontrera peut-être alors quelque moraliste, qui aura passé sa vie à noter chaque acquisition de son expérience. […] Des textes et de la sèche érudition, il extrait la vie, vie de Cicéron, ou d’Horace, ou de Virgile, vie de la société romaine aussi en ses divers états, à ses diverses étapes : son style translucide atteint avec une égale aisance les formes sensibles et les invisibles forces, l’être individuel et l’âme collective. […] Cet acte suffit à une vie. […] Vie et Correspondance, publ. […] Ledrain, Renan, sa vie et son œuvre, 1892, in-8.

154. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

Sa vie et ses pensées, publiées par M.  […] Elle est précédée d’un avant-propos, d’une histoire des manuscrits de Maine de Biran, puis d’une notice sur sa vie. On n’aurait dû y mettre que cette vie. […] Il donne l’idée que la première condition pour être psychologue est d’être infirme, ce qui ne se doit dire d’aucune science vraie : « Quand on a peu de vie, dit-il, ou un faible sentiment de vie, on est plus porté à observer les phénomènes intérieurs. […] Maine de Biran est de ceux qui passent leur vie à se creuser un puits artésien en eux-mêmes : l’eau ne vint que tard et pas abondamment.

155. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

S’ils n’étaient point partis ce jour-là, leur sûreté et leur vie eussent été compromises. […] Aussi la vie ne m’est plus rien, je la déteste… Il s’est tué à force de travailler : il ne m’a pas voulu écouter ; je lui avais bien dit qu’il ferait le malheur de ma vie après en avoir fait le bonheur. […] Du moment qu’elle vivait, elle dut arranger sa vie. […] Sa vie, comme la vie italienne en général, et celle que l’on mène à Florence en particulier, était très-régulière, et jusqu’à la monotonie. […] Elle s’ingéniait, en un mot, à animer et à égayer la vie autour d’elle.

156. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Victor Duruy » pp. 67-94

À aucun moment ni dans aucune partie de la vie et de l’œuvre de mon illustre prédécesseur, je n’aurai d’autre embarras que d’égaler mon respect et ma louange aux mérites d’une vie et d’une œuvre si évidemment bienfaisantes. […] Car, dans cette vie si bien composée, la période illustre eut des préparations longues et fortes. […] Irréprochable unité de dessein dans cette longue vie ! […] Ce qui ne devait être qu’une étude préliminaire a été l’occupation de ma vie. […] Recueillons sa vie comme un exemple.

157. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion dynamique »

Jusque-là, tous les vivants avaient bu avidement à la coupe de la vie. […] Il s’agissait pour lui de s’évader de la vie, qui lui était particulièrement cruelle. […] Sa vie n’est donc pas encore divine. […] Disons que c’est désormais, pour l’âme, une surabondance de vie. […] Ils ont, par là même, indiqué au philosophe d’où venait et où allait la vie.

158. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

Et qui ne voit que la cruauté, ou tout au moins une large indifférence est la condition de toute vie ? […] La vie sociale a les mêmes exigences que la vie individuelle. […] Prendre le sentiment de ce qu’il y a d’éphémère, de relatif, de contingent en eux, c’est parfois en assurer ou en prolonger la vie. […] Il saura enfin que son ironie est une forme passagère de la vie. […] C’est qu’ils se contredisent moins que l’homme et qu’ils sont moins contredits par la vie.

159. (1890) L’avenir de la science « IX »

Assurément, c’est une bien vaine existence que celle de l’érudit curieux qui a passé sa vie à s’amuser doctement et à traiter frivolement des choses sérieuses. […] Puis, quand chacune des séries d’études devint assez étendue pour absorber des vies entières et présenter un côté de la vie universelle, chaque branche devint une science indépendante et laissa le tronc commun appauvri par ces retranchements successifs. […] Il y a donc là un problème, important s’il en fut jamais, et de la solution duquel sortiraient des données capitales sur tout le sens de la vie humaine. […] — Possibilité et mode d’apparition de la vie organique et de la vie humaine. […] Quelle est la vie humaine qui, dans l’état actuel de la science, suffirait à explorer tous les côtés de cet unique problème !

160. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre X. Prédictions du lac. »

Une totale indifférence pour la vie extérieure et pour le vain appareil de « confortable » dont nos tristes pays nous font une nécessité, était la conséquence de la vie simple et douce qu’on menait en Galilée. […] Les accessoires de la vie y sont insignifiants auprès du plaisir de vivre. […] C’est pourquoi je vous le dis : Ne soyez pas inquiets de l’aliment que vous aurez pour soutenir votre vie, ni des vêtements que vous aurez pour couvrir votre corps. La vie n’est-elle pas plus noble que l’aliment, et le corps plus noble que le vêtement ? […] Le christianisme naissant, du reste, ne faisait en ceci que suivre la trace des Esséniens ou Thérapeutes et des sectes juives fondées sur la vie cénobitique.

161. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Henri Murger. Œuvres complètes. »

Mürger pendant sa vie, et qui, maintenant qu’il n’est plus là pour les entendre, ne voudront peut-être pas qu’on en parle, si l’on en dit un bien absolu ? […] Le malheur de la vie des poètes est d’ailleurs toujours le bonheur de leur gloire. […] Henri Mürger, dont la destinée ne fut point heureuse, après tout, quand on jauge sa vie, M.  […] Tous firent cette poule de la Vie de Bohême, et ils la laissèrent gagner à celui qui l’a signée, mais elle ne l’enrichira pas. […] Ce n’est donc pas la Vie de Bohême qui fait la réputation actuelle de M. 

162. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Corneille »

Quant à la vie de Corneille, à la vie en dehors des œuvres, il l’a éclairée autant qu’il a pu. […] Levallois essaie-t-il d’y allumer la paillette de feu qui l’éclaire, cette vie restera toujours un clair-obscur sublime, et il ne doit pas s’en désoler. […] — mais aussi dans cette vie étouffante, bourgeoise et pauvre, qui en est une troisième, — paraît plus idéal et plus grand. […] qu’il n’y ait pas grand-chose à raconter en événements comme la biographie les recueille, dans cette vie dont presque tous les faits sont intellectuels, hormis les tapages de la gloire. […] Il souffrit… Et quoique l’amour des vieillards soit comique dans les comédies et dans la vie, dont elles sont l’imagé, le sien se marqua du tragique de son génie et de sa fierté.

163. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre vii »

C’est à cela que je dois la vie, peut-être bien. […] Son premier avantage est de permettre une grande dignité et même une grande élégance de vie. […] En faisant un retour sur ma vie passée, je finis par lui découvrir quelque utilité, ce qui m’adoucit la perspective de la mort. […] C’est à la lueur du système royaliste qu’ils jugeaient la vie et les livres, mais quels sagaces connaisseurs de poésie et de prose ! […] … » Et ailleurs encore ce cri : « Malheureuse génération qui ne trouve la gloire qu’en perdant la vie ! 

164. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

« Les dessous de la vie », qu’est-ce que cela ? […] Émile Zola  Et « l’entour de la vie » ? […] Nous les voyons vivre d’une vie lente et profonde. […] La plupart ont la notion du péché, une vie intérieure au moins aussi développée que leur vie de relations sociales. […] Rien ; nul dogme, pas même celui d’une vie et d’une sanction d’outre-tombe.

165. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XII. MM. Doublet et Taine »

Doublet et Taine, ce qui lui a manqué jusqu’à cette heure : — la vie et la fécondité ? […] qu’est-ce que la vie ? […] La voix de l’homme est un fait ultramondain étranger au cosmos et particulier à l’homme, venant, nous le voulons bien, d’une vie antérieure, mais à la condition que cette vie antérieure sera Dieu. […] Nos puissances tombent en poussière à mesure que nous avançons dans la vie, et la vie elle-même n’est qu’un germe supérieur que nous décomposons jusqu’à la mort, Quant aux procédés de M.  […] Elle est plus laide qu’elle n’était du temps de sa vie.

166. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « L’abbé Monnin. Le Curé d’Ars » pp. 345-359

C’est de l’histoire, et de l’histoire sacrée ; car c’est la vie d’un saint, — d’un saint qui vivait hier encore, — écrite par un homme qui l’a assisté en ses travaux apostoliques, et racontée avec un détail infini. […] Il y resta humble curé toute sa vie. […] C’était toute sa personne, toute son action, tous les points de sa vie à la fois. […] Selon moi, la vie du Curé d’Ars est une véritable originalité dans l’ordre hagiographique, et j’en connais peu qui fassent plus penser. Ce qui m’étonne dans cette vie d’hier, qui probablement sera une légende demain, ce n’est pas ce qui se trouve dans la vie des autres Saints de tous les âges et qui leur est commun à tous : les vertus, les grandeurs, les miracles, les communications directes avec Dieu, les adorations des foules prosternées ; mais c’est ce qui est particulier au Saint que fut le Curé d’Ars.

167. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIV : Récapitulation et conclusion »

Pourquoi chaque collection de fossiles ne montre-t-elle pas avec une entière évidence la gradation et la mobilité des formes de la vie ? […] Durant de telles périodes, il y a probablement plus de variabilité dans les formes de la vie, durant les périodes d’affaissement, plus d’extinctions. […] Je ne puis voir de limite à cette puissance dont l’effet est d’adapter lentement et admirablement chaque forme aux relations les plus complexes de la vie. […] Rien n’empêche d’admettre que cette matrice universelle n’ait eu à l’une des phases de son existence le pouvoir d’élaborer la vie. […] Ce sont des jets plus ou moins vigoureux, qui tous se sont élancés à la fois de la racine même de l’arbre de vie, mais qui ont persisté plus ou moins longtemps.

168. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « VI »

comment, dans l’unité qui est la vie, l’art est-il né, à côté de la réalité ? […] L’art théâtral isolait dans la vie une vie plus intense ; et des esprits subtils cherchèrent si de la vie une vie plus spécialisée encore et plus intense ne pouvait pas être tirée. […] Ne sera-ce point le sommet du fictif, et de l’art — cette vie plus intense que la vie réelle créée dans la vie à côté de la réalité — et ne sera-ce point le suprême accomplissement de cet idéal d’intensification des sensations, cette réduction de la sensation à un mode de sentir unique ? […] Et puis le quotidien des jours harcelés entre la vie et quelques rêves. […] Quelle est la loi de la totalité sensationnelle qu’est la vie ?

169. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Ils vivent une vie ralentie. […] Quelques dizaines de siècles de vie sociale n’ont pu effacer des centaines de siècles de vie purement animale ou de vie soumise du moins à tous les rythmes de la nature. […] La vie n’est qu’un phénomène physique. […] Le reste de sa vie n’est que somnambulisme. […] Sinon, à quoi bon la vie ?

170. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Mais peut-être lui-même, pendant ce temps, s’aperçoit-il, le malheureux, qu’il s’est une dernière fois déçu, et qu’il n’y a point dans la vie de refuge contre la vie ! […] C’était la première fois de sa vie. […] Il lui offrit de passer sa vie loin du monde, seul avec elle. […] Au contraire de Pater, qui a toute sa vie refusé de s’ouvrir, toute sa vie il s’est ouvert, révélant au premier venu les plus intimes secrets de son âme. […] On sait de quelle indiscrète façon il a raconté la vie de Carlyle, qui lui avait confié en mourant le soin de raconter sa vie.

171. (1896) Essai sur le naturisme pp. 13-150

On ne m’excusera pas de citer ce fait de la vie publique (comme si la littérature n’était pas aussi de la vie publique ?) […] (La Vie Héroïque). […] On comprendra le symbolisme sacré de la vie réelle. […] Ce sont de magnifiques emblèmes de vie paisible, tumultueuse ou de labeurs : Temple de la nature où la vie s’accomplit. […] Bornons-nous à évoquer sa vie avec tendresse.

172. (1903) Le problème de l’avenir latin

La vie politique, la vie municipale, l’administration, le droit également se romanisent. […] Le meilleur de sa vie s’écoule en syllabes. […] La chaleur de la vie n’est plus en nous. […] Serait-ce là tout l’intérêt de la vie ? […] Les élans les plus spirituels de la vie d’une société sont étroitement liés à la vie des corps.‌

173. (1892) Sur Goethe : études critiques de littérature allemande

Voilà comment ces humbles personnages réfléchissent dans leur vie particulière la vie générale du siècle. […] Adieu, la fraîcheur de vie ! […] Mais quelle vie que celle de Heine ! […] La volupté n’est-elle pas une forme, comme une autre, de la vie universelle, et la vie, par cela seul qu’elle est la vie, n’est-elle pas légitime et sainte ? […] De tels caractères et de telles vies restent toujours et partout des caractères et des vies d’exception.

174. (1898) Émile Zola devant les jeunes (articles de La Plume) pp. 106-203

Et j’estime que l’exemple de sa vie peut être proposé aux jeunes hommes de notre âge. […] » mais qui l’a recherchée toute sa vie ! […] La vie ne craignait pas d’en créer un de plus dans le défi brave de son éternité. […] La vie, la vie qui coule en torrent, qui continue et recommence vers l’achèvement ignoré ! […] La vie née sans fin de la mort.

175. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre III. De la survivance des images. La mémoire et l’esprit »

La vie psychologique se ramène alors tout entière à ces deux éléments, la sensation et l’image. […] Nous touchons ici à un phénomène essentiel de la vie mentale. […] Ce ne sont pas là des formes contingentes de notre vie psychologique. […] Notre vie psychologique normale oseille, disions-nous, entre ces deux extrémités. […] Ce sont là, disions-nous, autant de répétitions de notre vie passée tout entière.

176. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (1re partie) » pp. 337-416

La grande manufacture d’horlogerie avait alors son centre dans cette Suisse, où la vie pastorale s’unit depuis le moyen âge à la vie industrielle, lui conservant les mœurs pures, tout en accroissant la modeste richesse des familles. […] Il y a de la crapule au fond de ce caractère comme il y en a au fond de cette vie. […] Il se cache comme l’oracle dans une vie volontairement ténébreuse afin de s’y faire rechercher. […] Quelle autorité morale que sa vie ! […] Voilà un cynique qui prend, non pour épouse, mais pour instrument de plaisir brutal et pour esclave, une pauvre fille enchaînée à sa vie par le déshonneur, par la faim et par le dévouement de son sexe aux vicissitudes de la vie !

177. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIIe entretien. Littérature latine. Horace (2e partie) » pp. 411-480

C’est la vie prise au vol ; voilà pourquoi tout vit et tout vole encore dans ces pages fugitives du poète romain. […] Il professe la vanité de la politique et de la philosophie ; une seule chose est réelle : jouir de la vie. […] Ces deux amis, incapables de jalousie, ne rivalisaient que d’affection l’un pour l’autre ; Horace ne pensait qu’à jouir de la vie, Virgile qu’à survivre à la vie dans l’immortalité d’un grand poème. […] Porte-le en sûreté, je t’en adjure, aux rivages de l’Attique, et garde-moi en lui la moitié de ma propre vie !  […] toi maintenant le regret et la terreur constante de ma vie, que les dieux te gardent des écueils écumants des Cyclades ! 

178. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

La vie n’a de prix que par le dévouement à la vérité et au bien. […] Ce fut la crise la plus grave de ma vie. […] La vie sortait de lui ; il m’entraina. […] Et cette vie n’avait qu’une seule source, un seul principe, M.  […] Mais sûrement la vie de ce pauvre H. de *** a été traversée par quelque grand naufrage.

179. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre deuxième. Le génie, comme puissance de sociabilité et création d’un nouveau milieu social »

Pour le génie proprement créateur, la vie réelle au milieu de laquelle il se trouve n’est qu’un accident parmi les formes de vie possible, qu’il saisit dans une sorte de vision intérieure. […] Nous sommes faits de la même étoffe que les rêves, et notre pauvre petite vie est environnée de sommeil. […] Le génie est une puissance d’aimer qui, comme tout amour véritable, tend énergiquement à la fécondité et à la création de la vie. […] Produire par le don de sa seule vie personnelle une vie autre et originale, tel est le problème doit que résoudre tout créateur. […] Qu’est-ce que la vie du sage Pierre Corneille a eu en d’héroïque ?

180. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

S’il veut nous retrancher toutes les passions qui troublent la vie, en éloignant de notre vue les objets de ces passions, c’est qu’il estime au moins la réalité de la vie. Dès que la vie est réelle, elle est bonne : il ne s’agit que de savoir en user. […] Il a fini par se dire que la méditation de la mort était une duperie, que la méditation de la vie était meilleure, et qu’au lieu de regarder toujours la mort, il valait mieux regarder la vie, comme incertaine en général, mais enfin comme présentement certaine. […] Avec toutes ses grâces, il ne faut pas hésiter à dire que cette règle de vie est mauvaise et fausse. […] Il réduit l’éducation à la formation de l’honnête homme, et restreignant la littérature à l’usage de l’honnête homme, il l’enferme dans la morale, dans la recherche d’une règle de la vie, et la description des formes de la vie.

181. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Paul Bourget  »

J’ai essayé de montrer, à l’occasion de Stendhal, de Tourguéniev et d’Amiel, quelques-unes des fatales conséquences de la vie cosmopolite. […] L’aristocratie intellectuelle a pour rançon une sensibilité douloureuse à toutes les vulgarités de la vie réelle. […] Car cette situation est trop extraordinaire, trop en dehors de toutes les probabilités de notre vie. […] Elle aussi, le spectacle de la souffrance d’un autre (de son mari) l’a ramenée à une conception chrétienne de la vie. […] Puis, les tragédies de l’amour occupent-elles donc toute la place dans la vie ?

182. (1890) L’avenir de la science « XIII »

Encore moins puis-je pardonner ce coupable morcellement de la vie scientifique qui fait envisager la science comme un moyen pour arriver aux affaires et prélève les moments les plus précieux de la vie du savant. […] Un homme ne fait bien qu’une seule chose ; je ne comprends pas comment on peut admettre ainsi dans sa vie un principal et un accessoire. […] Je conçois un cadre de vie très étendu, universel même. […] Mais, à travers toutes ces métamorphoses, ils auront l’honneur d’avoir fourni des éléments essentiels à la vie de l’humanité. […] quand la vie est si courte et qu’il s’y présente tant de choses sérieuses, ne vaudrait-il pas mieux prêter l’oreille aux mille voix du cœur et de l’imagination et goûter les délices du sentiment religieux, que de gaspiller ainsi une vie qui ne repasse plus et qui, si on l’a perdue, est perdue pour l’éternité ?

183. (1912) L’art de lire « Chapitre III. Les livres de sentiment »

Mais aussi il y a augmentation de notre personnalité en ce sens que, dans cette vie d’emprunt, nous nous sentons vivre plus puissamment, plus amplement, plus magnifiquement qu’à l’ordinaire. Et ce moi d’emprunt, vivant d’une vie plus riche que le moi proprement dit, c’est encore nous-mêmes. […] Une des plus fortes parmi ces sensations est celle-ci : voir dans le roman ce qu’on avait vu dans la vie, mais le voir d’une façon plus nette et plus accusée. […] Ce sont des livres oit nous sont présentés des êtres dont l’intérêt même est d’être en dehors de la moyenne, en dehors de la vie connue et en dehors de la vie telle que, à l’ordinaire, nous voudrions qu’elle fût. […] Celui, par exemple, qui ne peut lire que des narrations, le lecteur d’Alexandre Dumas, n’est pas pour autant un homme d’action et quelquefois même il est très paresseux, mais le plus souvent il n’est ni un observateur des autres ni un observateur de soi-même et il n’a ni vie intérieure ni vie extérieure intellectuelle.

184. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Eugénie de Guérin, Reliquiae, publié par Jules Barbey d’Aurevilly et G.-S. Trébutien, Caen, imprimerie de Hardel, 1855, 1 vol. in-18, imprimé à petit nombre ; ne se vend pas. » pp. 331-247

Je révèle cela, monsieur, à votre amitié, à cet intérêt chrétien qui suit l’âme dans l’autre vie. » Et comme cet ami (M.  […] un tout petit ouvrage où j’encadrerais mes pensées, mes points de vue, mes sentiments sur un objet… J’y jetterais ma vie, le trop plein de mon âme qui s’en irait de ce côté. […] que le soleil a de vie ! […] Elle a des ardeurs de vie ascétique. Il y a des moments où, n’était son père, elle penserait à se faire sœur de charité : « Au moins ma vie serait utile.

185. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

L’homme qui n’a pas souffert ne sait rien de la vie ; il en ignore les abîmes et les hauteurs, les ombres et la lumière. […] Tu pourrais, moins emporté dans ta course, semer l’abondance et la vie sur tes rivages ; hélas ! […] Cette heure fut décisive ; ce moment fit crise dans sa vie. […] Bien des personnes qui ont connu Veyrat dans sa vie parisienne sont, grâce à Dieu, encore vivantes et peuvent se souvenir. […] Le Ciel a châtié tous les jours de ma vie.

186. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Conclusion. »

Quand on vante le charme que les passions répandent sur la vie, c’est qu’on prend ses goûts pour des passions. […] Les passions sont l’élan de l’homme vers une autre destinée, elles font éprouver l’inquiétude des facultés, le vide de la vie ; elles présagent, peut-être, une existence future, mais, en attendant elles déchirent celle-ci. […] Les enfants reçoivent la vie goutte à goutte, ils ne lient point ensemble les trois temps de l’existence ; le désir unit bien pour eux le jour avec le lendemain, mais le présent n’est point dévoré par l’attente, chaque heure prend sa part de jouissance dans leur petite vie : chaque heure a un sort tout entier indépendamment de celle qui la précède ou de celle qui la suit, leur intérêt ne s’affaiblit point cependant par cette subdivision ; il renait à chaque instant, parce que la passion n’a point détruit tous les germes des pensées légères, toutes les nuances des sentiments passionnés, tout ce qui n’est pas elle enfin, et qu’elle anéantit. […] Il ne serait pas juste de vanter autant la puissance intérieure de l’homme, si ce n’était pas, par la nature et le degré même de cette force qu’on doit juger de l’intensité des peines de la vie. […] Si l’objet qui vous est cher vous est enlevé par la volonté de ceux dont elle dépend, vous pouvez ignorer à jamais ce que votre propre cœur aurait ressenti, si votre amour, en s’éteignant dans votre âme, vous eût fait éprouver ce qu’il y a de plus amer au monde, l’aridité de ses propres impressions ; il vous reste encore un souvenir sensible, seul bien des trois quarts de la vie ; je dirai plus, si c’est par des fautes réelles dont le regret occupe à jamais votre pensée, que vous croyez avoir manqué le but où tendait votre passion, votre vie est plus remplie, votre imagination a quelque chose où se prendre, et votre âme est moins flétrie que si, sans événements malheureux, sans obstacles insurmontables, sans démarches à se reprocher, la passion par cela seulement qu’elle est elle, eût, au bout d’un certain temps, décoloré la vie, après être retombée sur le cœur qui n’aurait pu la soutenir.

187. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre onzième. »

Rien pourtant qui diffère plus que leur vie. […] Sa vie à cet égard est d’un aussi utile exemple que ses Maximes. […] Une blessure qu’il reçut à la bataille de la porte Saint-Antoine, et qui mit sa vie en danger, lui ôta le moyen de suivre jusqu’au bout la rébellion du prince de Condé. […] La vie ne peut pas être à la surface des œuvres de l’esprit et n’être pas dans le fond ; la beauté du langage n’est pas un fard mensonger, c’est la couleur inaltérable de la vie. […] Ce sont des mots à remettre au vocabulaire, pour l’écrivain qui saura leur donner la vie en les employant au service de la vérité.

188. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Th. Dostoïewski »

La vie lui paraît ainsi, de dehors et de loin, décousue et étrange. […] Il ne semble pas que Dostoïewski se propose jamais l’étude d’une âme entière dans son développement et ses réactions aux influences de la vie. […] La vie spirituelle de Raskolnikoff est trop intense et trop désintéressée. […] Dans ses livres se trouvent les paroles les plus riches en pardon pour tous ceux en qui la vie imprime ses stigmates et fait sourdre les lents sanglots. […] Dans cette vie obscure et dans cette ville neigeuse ou torride, l’intelligence vacillante et la sensibilité malade de Dostoïewski se sont émues et déployées.

189. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

Pour la liberté aussi bien que pour l’honneur, on peut et l’on doit aventurer la vie. […] Sa vie littéraire commence à ce moment ; il avait trente-sept ans ; marié, sans fortune, homme d’imagination, n’ayant gagné à sa première vie militaire que de l’estime et des blessures, il se dit, après son début de Galatée, qu’il y avait à faire de belles choses dans les lettres, et particulièrement à entreprendre pour le théâtre qui était resté comme dans l’enfance. […] Je le soupçonnerai, si l’on veut, d’avoir eu une ou deux qualités de trop pour la pratique de la vie, trop de franchise, par exemple, d’ouverture ou de hauteur de cœur, trop de confiance en soi ou dans les autres. […] Des êtres nouveaux, des créatures dont on n’avait pas l’idée et qui n’existaient pas la veille, entraient en possession de la vie et allaient courir le monde pour ne plus jamais mourir. […] J’aime à suivre pour guide, dans ce résumé de la Vie de Cervantes, Ticknor, cet exact et judicieux historien de la littérature espagnole.

190. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Les romans de M. Edm. de Goncourt » pp. 158-183

C’est par une suite d’incidents et de tableaux de ce genre que M. de Goncourt depeint en leurs moments caractéristiques de larges périodes de l’existence de ses créatures, l’enfance de Chérie et l’enfance de celle qui sera la fille Elisa, la vie errante des frères Zemganno avant leurs débuts à Paris, et la vie amoureuse, traversée d’inconscients regrets, de la Faustin au bord du lac de Constance. […] Et grâce à son habitude d’accorder le pas à ses observations sur ses idées générales, à ne point plaider de cause et à ne pas émettre de considérations sur la vie, M. de Goncourt a pu se tenir à égale distance de ces philosophies nuisibles à toute vue exacte de la vie, et antiscientifiques : l’optimisme et le pessimisme. Il s’est contenté d’observer, de noter et de résumer, sans conclure, sans se rallier à l’une des deux moitiés de la conception de la vie, sans que sa sagacité ou son coup d’œil soient altérés par une théorie préconçue nécessairement fausse parce que partielle. […] Grâce aux infinies ressources de son style et au biais particulier de sa manie observante, il est parvenu à saisir quelques-uns des faits profonds et obscurs de notre vie cérébrale. […] Nous ne connaissons pas de portrait plus évocateur et plus animé, gesticulant et parlant, traversé d’onde, de vie et de pensée, plus délicatement modelé par la sympathie des souvenirs exacts.

191. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — II »

Jouffroy au reste ne se pose pas la question dans ce sens ; il entend surtout par destinée de l’individu, la fin pour laquelle le moi a été placé sur la terre, eu égard à ce qu’il était avant cette vie et à ce qu’il deviendra après la mort. Or l’humanité, dans le sens où il l’entend, l’humanité, collection et succession de tous les individus humains, n’a pas d’âme, n’a pas de vie antérieure, n’a pas de vie ultérieure ; elle n’a qu’un développement historique ; ce qu’on peut entendre par sa destinée ne saurait signifier relativement à elle ce que signifie le mot de destinée appliqué à l’homme. […] La vie de l’homme en effet lui afflue de tous côtés par les relations qu’il soutient avec les autres hommes et avec la nature ; cette vie qu’il reçoit de l’univers, il la rend, il la rayonne à son tour en vertu d’une force propre et d’un foyer intérieur. […] Chaque génération, et dans la génération chaque individu, devront recommencer ce travail de Danaïdes, qui sera désormais la plus importante affaire de la vie. […] Ce que les psychologues appellent l’activité du moi, nous l’appelons la vie, le sentiment, l’amour.

192. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre I. Les mémoires »

Habitués longtemps à ne chercher d’éminents exemplaires de notre humanité que parmi les ouvriers bruyants de l’histoire politique, ou les brillants héros de la vie mondaine, nous nous complaisons aujourd’hui à saisir dans des vies plus modestes et plus obscures l’âme des siècles lointains, si irréductible tout à la fois et si identique à la nôtre. […] Enfin, sans y penser, sans y prétendre, Palissy est un écrivain : il y a dans son style si net et si spontané, une force d’imagination qui fait jaillir l’expression non seulement adéquate à l’idée, mais représentative de la vie. […] En même temps s’était formé un public curieux de tels récits, et qui dans l’antiquité même ne goûtait rien tant que les vies, les portraits d’âmes grandes et hautaines se dépeignant par leurs actions. […] Mais je veux dire qu’il rend la vie, et que nous ne voyons pas seulement dans son récit des enchaînements de faits extérieurs, nous y saisissons par surcroît les réalités morales qui leur servent de support. Aux Mémoires personnels se rattachent toute sorte de vies et de récits où le narrateur, quel qu’il soit, a pour objet de déployer la richesse ou la beauté de quelque nature héroïque ou illustre.

193. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre IV. L’antinomie dans l’activité volontaire » pp. 89-108

Sur le point de disparaître, elles sont prêtes à reprendre le cycle des efforts et des douleurs et à dire encore une fois : oui à la vie. […] Il se rencontre dans la vie. […] Il est pour eux un moyen de vaincre dans la lutte pour la vie leurs adversaires moins maîtres de leurs nerfs. […] Dans un pays vieux, dans une société policée, la plupart des actes de la vie physique et intellectuelle sont réglés par des lois. […] Les besoins de la vie y sont trop réduits pour que la pauvreté y soit dure à supporter.

194. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Dargaud »

— qui se font tout seuls au fond des âmes, par une mystérieuse assimilation du sentiment et de la vie, celui que Dargaud a publié sous le simple titre de : La Famille, nous semble un de ces livres-là. […] Il est d’usage et de tradition de donner à Clio une plume de fer, comme si l’histoire ne devait pas avoir toutes les variétés de la vie ! […] … Car voilà le sujet du livre de Dargaud : les premières impressions de la vie, l’enfance, la jeunesse, le passé ! […] La première communion, dans la vie d’un enfant catholique, n’est-ce pas le premier amour… pour Dieu ? […] Pour ceux qui prennent l’existence au sérieux et qui croient qu’elle a l’importance d’un but immortel, tout est enseignement de mal ou de bien dans la vie.

195. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « André Chénier »

Cette vie, d’ailleurs, valait-elle la peine d’être racontée ? […] Le reste de la vie d’André n’est plus qu’une vie littéraire et nous ne savons que trop ce que c’est qu’une vie littéraire, le reste n’est qu’une existence de gratte-papier et de journaliste ; car il le fut, et il n’y a pas là de quoi faire rêver. […] Elle le diminue dans les faits de sa vie, qui sont honorables, oui ! […] Parmi les poètes, tout le monde n’est pas comme lord Byron et le Camoëns, dont les vies furent aussi poétiques que les œuvres. […] On ne vit dans son œuvre et on n’admira que la vie grecque, évoquée et ressuscitée avec une précision de contour et une délicatesse de coloris incomparables.

196. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Lamartine »

Ils ne sont donc ni la vie littéraire, ni la vie politique de Lamartine » cet homme de double gloire. C’est sa vie obscure. C’est la délicieuse vie obscure des hommes célèbres, la nuit charmante avant l’aurore de leur gloire, et dont lord Byron, blasé de la sienne, disait avec mélancolie : « Il n’y a dans la vie qu’un malheur, c’est de n’avoir plus vingt-cinq ans !  […] Faculté non de dupe, mais de poète, faculté enchanteresse et qu’il eut toujours, et non pas seulement dans ses vers, où la nature est plus belle que la réalité, mais dans la vie et même dans la vie politique, où sa nature de poète l’égara. […] Les détails de ce temps de jeunesse, qui va de la vie presque pastorale de l’enfant à la vie militaire du jeune homme, sont de l’intérêt le plus contrasté et le plus attachant.

197. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « André Theuriet »

Car l’élégie est aristocrate et supprime les dures conditions de la vie réelle. […] George Sand nous a montré des gentilshommes ruraux et des filles nobles vivant d’une vie campagnarde ; et M.  […] C’est cette parcimonie même qui donnait tant de ragoût aux moindres semblants de vie plus aisée, aux petites douceurs exceptionnelles, aux crêpes du carnaval, aux cadeaux modestes du premier de l’an, aux deux sous des jours d’« assemblée » ! […] Elle avait toute la beauté du sacrifice désintéressé: car cette vie n’était si étroitement ordonnée que pour permettre au fils, à l’héritier, de connaître un jour une forme supérieure et plus élégante de la vie. […] » — Je sais que nul romancier, pas même George Sand, n’a su mêler aussi étroitement la vie des hommes et la vie de la terre sans absorber l’une dans l’autre ; ni mieux entrelacer l’histoire fugitive des passions humaines et l’éternelle histoire des saisons et des travaux rustiques  Je sais aussi que rien n’est plus charmant que ses jeunes filles ; car, tandis que la campagne les fait simples et saines, la solitude les fait un peu rêveuses et capables de sentiments profonds  La solitude, soit aux champs, soit dans les petites villes silencieuses, nul n’a mieux vu que M. 

198. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Saint-Pol-Roux (1861-1940) »

Ainsi, en cette note, l’auteur élucide l’œuvre : glose de la Nature, parmi le pèlerinage de la Vie. […] La Vie triomphe de la Mort, la Mort de la Vie ; puis la Vie elle-même renaît de la Mort, et c’est le spectacle éternel de Faust à Axël ! […] Edmond Pilon. — Œuvre humaine, essentiellement d’Amour et de Vie ! […] L’homme s’appelle Magnus ; la femme, identifiée avec la vie, n’est autre que Divine ; Elle, c’est la mort, la Dame à la Faulx. […] C’est le drame de la mort, et par conséquent, si l’on veut, celui de la vie, mais de la vie toujours en face de la mort, donc seulement celui de la mort, quoi qu’en dise M. 

199. (1909) Nos femmes de lettres pp. -238

Tel est le secret de la vie romantique… tel aussi le secret de l’âme d’Antoine Arnault. […] Non pour ma vie, non pour toujours, mais pour une heure, mais pour une nuit ! […] Bientôt le salut de cette créature lui devient plus cher que sa propre vie. […] L’heure du concours commence avec le premier âge pour ne finir qu’avec la Vie. […] De toute leur énergie nous les avons vus démentir et repousser les instincts conservateurs de vie.

200. (1896) Études et portraits littéraires

Est-ce la vie humaine vécue selon sa loi, que nous avons vue être la loi de toute vie ? […] Pas de vie morale sans cela. […] Sa Vie de M.  […] Cette maxime condamne sa vie. […] Au fond, il avait peur de la vie.

201. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

C’est une figure magique, sans vie, une idole. […] Se peut-il que tu sois si épris de la vie, — cette vie qui t’a rendu si misérable ! […] Je le demande, de quelle utilité est ma vie ? […] Qu’est ma vie ? […] N’est-ce point sur cet ensemble de la vie de l’homme qu’il faut le juger ?

202. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIII : Affinités mutuelles des êtres organisés »

EMBRYOLOGIE : ses lois s’expliquent par ce fait que les variations survenues à une phase quelconque de la vie de l’individu sont héritées par sa postérité à un âge correspondant. — XI. […] Ces ressemblances, bien qu’en étroite connexion avec la vie entière de ces divers êtres, sont regardées simplement comme des caractères analogiques ou d’adaptation. […] — Nous avons vu que les représentants de la même classe, indépendamment de leurs habitudes de vie, se ressemblent par le plan général de leur organisation. […] — Ses lois s’expliquent par ce fait que les variations survenues à une phase quelconque de la vie de l’individu sont héritées par sa postérité à un âge correspondant. […] Il y a des groupes entiers d’animaux et certains représentants d’autres groupes, chez lesquels l’embryon, à aucune époque de sa vie, ne diffère considérablement de l’adulte.

203. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface et poème liminaire des « Contemplations » (1856-1859) — Préface (1859) »

La vie, en filtrant goutte à goutte à travers les événements et les souffrances, l’a déposé dans son cœur. […] Est-ce donc la vie d’un homme ? Oui, et la vie des autres hommes aussi. Nul de nous n’a l’honneur d’avoir une vie qui soit à lui. Ma vie est la vôtre, votre vie est la mienne, vous vivez ce que je vis ; la destinée est une.

204. (1890) L’avenir de la science « III » pp. 129-135

Voilà une philosophie, c’est-à-dire une façon de prendre la vie et les choses. […] Le monde est-il donc un cimetière, la vie une cérémonie funèbre ? […] Il tient d’ailleurs plus profondément à la vie, et la raison en est simple. […] Est-ce trop de critique qui a desséché les vaisseaux qui lui portaient la vie ? […] La vie était tombée à un effrayant bon marché.

205. (1856) Cours familier de littérature. I « IIIe entretien. Philosophie et littérature de l’Inde primitive » pp. 161-239

Est-ce dans le respect de la vie humaine ? […] C’est un fanal placé sur le rivage où nous n’abordons qu’après le naufrage de la vie. […] La vie est le témoignage de la vie. » Elle dit : « Ce Dieu, Être des êtres, est infini, parfait, éternel. […] Pourquoi m’as-tu ravi ma part de ciel, de lumière, d’air, de jeunesse, de joie, de vie ? […] C’est Celui qui n’a ni commencement ni fin, et qui ne peut être appelé ni la vie ni la mort, car il est au-dessus et en dehors de la mort et de la vie !

206. (1902) Le chemin de velours. Nouvelles dissociations d’idées

Quelle vie et de quels hommes ? […] La vie est un fait physique. […] Cette école existe : c’est la vie. […] Il reste beaucoup de vie à plusieurs, mais la félicité de la vie leur manque. […] La vie est terrible.

207. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre troisième »

» Voilà le secret même de la tragédie ; voilà cette ressemblance avec la vie, qui en fait toute la vérité. […] Toutes les parties de l’œuvre tirent leur beauté de cette ressemblance avec la vie. […] La lutte de la passion et du devoir, qu’est-ce autre chose en effet que la vie elle-même ? […] Et en quel temps de la vie cette lutte prend-elle fin ? […] et peut-il y avoir ressemblance avec la vie là où la vie elle-même n’est pas tout le sujet ?

208. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre ii »

Rien que leur vie intérieure pour les soutenir dans cette interminable faction.‌ […] Jamais je n’ai si bien vu le pont entre cette vie et la suite. » (Lettre communiquée.)‌ […] Ils semblent avoir hâte de se dire les uns aux autres ce que la vie et la mort soulèvent en eux de réflexions. […] Je suis donc privé de la plus grande joie de la vie » (Roger Cahen. […] Rien d’un être ne peut demeurer caché dans une telle vie pleine d’épreuves décisives.

209. (1927) Les écrivains. Deuxième série (1895-1910)

… Ma vie a quelque chose d’inexpliqué… On dirait un rêve ! […] Chaque personnage, même celui qui passe, a une vie intense. […] De même que Goncourt, Rodenbach aimait que la poésie émanât directement de la vie, de l’intimité de la vie. […] Viélé-Griffin sait la vie. Et qu’est-ce que la vie pour M. 

210. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VI : Difficultés de la théorie »

Cependant, la structure de chacun de ces oiseaux lui est utile dans les conditions de vie particulières où il est placé, puisque chacun d’eux ne vit qu’en vertu d’une lutte ; mais elle n’est pas nécessairement la meilleure possible dans toutes les conditions de vie qui peuvent se présenter pour eux. […] C’est un problème qui nous importe aussi peu que celui de l’origine première de la vie elle-même. […] Il n’est point douteux que beaucoup des types primitifs de la vie animale ne se soient éteints sans nous laisser de vestiges reconnaissables, et ce sont probablement ces types déjà détruits de l’aurore de la vie organique qui ont donné naissance aux êtres si tranchés que nous connaissons aujourd’hui. […] La faculté électrique de certains animaux n’est donc point un fait isolé, en dehors des coutumes de la vie. […] Mais on comprend que certaines formes transitoires, encore à demi amphibies, ont pu se perpétuer dans des stations lacustres isolées, et que de là elles ont pu gagner la mer en descendant les fleuves, et s’adapter ensuite peu à peu à une vie toute maritime, comme les Phoques et les Cétacés en général, cherchant dans l’Océan une retraite contre les reptiles mieux adaptés à la vie amphibie et contre d’autres mammifères mieux adaptés à la vie terrestre.

211. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

Or, comment ignorer cette première et féconde moitié d’une belle vie ? […] L’unité de la vie même de l’écrivain se retrouve dans cette diversité.  […] Jamais intérieur en apparence insignifiant n’a pris plus de vie sous un pinceau et une expression plus pénétrante. […] En 1821, M. de Chateaubriand, ambassadeur à Berlin, continue le récit de cette vie de jeunesse. […] La vie confuse, remuée, enthousiaste, de ces années-là, s’anime devant nous.

212. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Est-il donc vers ce qui n’est plus, le sens de la vie ? […] C’est la vie qui l’intéresse, la vie mouvante et sa couleur changeante, ce qui bouge et passe. […] Mais dans la mort la vie germe. […] Cette vie, M.  […] Il fait oublier la vie qu’il oublie.

213. (1904) Essai sur le symbolisme pp. -

La vie ne consent à s’enfermer en des vases clos, que morte et en lingots. […] Le temps semble s’arrêter, et la vie, au lieu de s’écouler, dilate notre cœur. […] Chaque parole tue la voix intérieure, fige la vie en des attitudes conventionnelles. […] Leur somme constitue l’intensité qualitative d’une vie. […] Les corsets de fer où se déviait la belle taille de l’idée se sont rompus sous la poussée de la vie.

214. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre II. Distinction des principaux courants (1535-1550) — Chapitre II. Jean Calvin »

Rabelais absout la nature par la vie. […] Ce qu’il veut, c’est la bonne vie. […] Il peut sembler qu’il y ait contradiction entre sa théologie et sa morale : n’est-ce pas la liberté qui fonde la bonne vie et rend la vertu possible ? […] Il meurt en 1564 ; ce fut un homme de vie pure, de grand esprit, d’une sincérité absolue, qui, s’unissant à sa logique, le fit dur. […] Bungener, Calvin, sa vie, son œuvre et ses écrits, 2e édit., 1863.

215. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution d’Angleterre »

Tout y est fait avec cette poussière, arrosée de flammes, qui fut l’homme, et son sang et sa vie ! […] Je ne sais pas si Guizot, à une autre époque de sa vie intellectuelle, n’a pas cru à cette généralisation, à cette abstraction, à cette panthéification (qu’on me passe le mot !) […] La vie de Washington date de ce moment glorieux dans le développement suprême de Guizot. […] Les crimes, les iniquités que Guizot lui reproche, ne sont que les iniquités et les crimes d’un parti auquel il resta fidèle pendant sa longue vie. […] Lilburne est un homme chez lequel la vie morale reste puissante, au milieu de toutes ses fautes, de ses égarements, de ses folies.

216. (1888) Études sur le XIXe siècle

Sous quel aspect nous apparaissaient alors la vie humaine et le destin ! […] Cette idylle d’amitié fut ce que Leopardi eut de meilleur dans sa vie. […] Est-ce les pénétrer, les comprendre, revivre leur vie, les évoquer ? […] M. de Amicis la comprend comme il comprend la vie. […] Elle sera le but de ma vie, l’unique objet de mes soins, de mes efforts.

217. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Voltaire et le président de Brosses, ou Une intrigue académique au XVIIIe siècle. » pp. 105-126

La vie de Voltaire est une comédie : la correspondance avec d’Alembert nous en fait voir les coulisses et le fond ; le reste n’est plus ou moins que de l’avant-scène. […] Voulez-vous me vendre votre terre à vie ? […] Il faut convenir que cette vente viagère, qui se faisait sous forme extérieure de bail à vie, prêtait à bien des chicanes, du moment qu’on en voulait faire ; c’était un bail bien enchevêtré. […] C’est vous-même qui empoisonnez une vie si bien faite d’ailleurs pour être heureuse. […] Tout cet éclat passé et non oublié, Voltaire reste donc propriétaire à vie et usufruitier de Tourney, mais il s’en dégoûte bientôt et n’est plus et ne veut plus être que le patriarche de Ferney.

218. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

Passage de l’histoire philosophique à l’expression de la vie : Thierry. […] Michelet veut voir comment la France est née, comment elle a formé sa personnalité morale, de quelle vie elle a vécu. Mais « la vie a une condition souveraine et bien exigeante. Elle n’est véritablement la vie qu’autant qu’elle est complète ». […] Il avait « le don des larmes », une âme frémissante, qui partout aimait, partout sentait, partout mettait la vie.

219. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

Vos petits billets de tous les courriers sont toute ma vie. […] C’est le fruit de la vie quand la vie est longue. […] J’aurai du moins un grand tombeau en échange d’une petite vie. […] J’y finirai volontiers ma vie, si vous voulez y venir. […] Tout est fini, vie passée comme vie présente.

220. (1898) Essai sur Goethe

La pauvre fille passe maintenant sa vie à pleurer et à prier. […] mais laisse-moi la vie. […] L’aîné, Charles-Auguste, était intelligent, ardent, plein de vie. […] De plus en plus, la conception qu’il se faisait de sa propre personnalité, de l’art et de la vie, l’éloignait de la vie. […] Elle ne prenait aucune part à sa vie intellectuelle.

221. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame Sand ; Octave Feuillet »

je ne serai contredit par personne quand je dirai que des quelques livres qui ont fait le plus de cette fumée de bruit qui s’en va, comme l’autre fumée, le plus retentissant a été la Vie de Jésus, par Renan, et demandez-vous où elle en est déjà, cette Vie de Jésus ? […] La Vie de Jésus tombera prochainement dans le néant du même silence. […] Qu’il nous menace, tant qu’il voudra, maintenant, de sa critique contre les premiers temps du Christianisme, il ne trouvera jamais de sujet d’un scandale supérieur à la Vie de Jésus qu’il nous a donnée. […] Et cependant il y a eu deux livres — tous les deux de simples romans — qui ont fait entendre leur petit bruit de guimbarde à côté du vaste mugissement de la Vie de Jésus. […] Le prêtre catholique que madame George Sand a peint plus d’une fois dans sa vie y est repris et peint une dernière… mais on ne reconnaît plus ici le pinceau qui fit passer devant nos yeux, dans Lélia, le prêtre Magnus et le cardinal Annibal.

222. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

« Une vie retirée, libre, indépendante des volontés ou des caprices d’un autre, une vie d’études et de travail », voilà le but et le désir de cet enfant merveilleusement intelligent et totalement dépourvu. […] C’est avec un sentiment respectueux pour le Maître, dont la mémoire nous est toujours présente, que j’analyse son passage du séminaire à la vie laïque. […] Avec sa tonsure, sa soutane, il est frénétique de jouir de la vie. […] Nul des sentiments que nous connaissons à Ernest Renan ne nous permet de le considérer comme ayant accepté le catholicisme à un instant quelconque de sa vie intellectuelle. […] Examinez d’un peu haut ces deux façons de comprendre la vie !

223. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre IV : Sélection naturelle »

Elle accorde un plein exercice à chaque organe nouvellement formé ; et l’individu modifié est placé dans les conditions de vie qui lui sont les plus favorables. […] Les caprices de l’homme sont si changeants, sa vie est si courte ! […] Il favorise pareillement l’action directe des circonstances physiques changeantes et des conditions de vie nouvelles qui en résultent. […] Néanmoins des formes simples et inférieures peuvent se perpétuer pendant longtemps si elles sont convenablement adaptées à leurs simples conditions de vie. […] La quantité de vie possible peut augmenter, et cette augmentation est justement une conséquence de la loi de divergence des caractères.

224. (1886) Le roman russe pp. -351

Un poème lyrique est un être vivant d’une vie furtive qui réside dans l’arrangement des mots ; on ne transporte pas cette vie dans un corps étranger. […] Tarass est un poème épique en prose, le poème de la vie cosaque d’autrefois. […] La vie n’a rien de mieux à lui offrir. […] As-tu goûté de la vie libre, enrôlé parmi les haleurs de barques ? […] Tous ces gens-là existent, ils ont été vus dans la vie réelle.

225. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Gustave Droz » pp. 189-211

Il n’est pas tout à fait la vie parisienne, cependant. La vie parisienne est quelque chose de plus compliqué que ces esquisses piquantes et frivoles. […] Mais enfin si ce n’est pas exactement toute la vie parisienne que ce journal, c’en est une partie. […] Et cet écrivain de ce temps, ce sceptique, ce brillant oseur de La Vie parisienne, — cette brillante osée !  […] L’Ange exterminateur qui nous punit de toutes les fautes de notre vie, disait madame de Staël, c’est l’être que nous aimons.

226. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre X : De la succession géologique des êtres organisés »

Mais nous n’aurions pas su davantage quelles conditions de vie défavorables en avaient empêché jusqu’alors l’accroissement ; si une seule circonstance ou plusieurs avaient agi ensemble ou séparément ; en quel degré chacune d’elles avait agi et à quelle phase de la vie des individus. […] — L’un des faits les plus étonnants que la paléontologie ait constaté, c’est que les formes de la vie changent presque simultanément dans le monde entier. […] Ce grand fait de la succession parallèle des formes de la vie à la surface du monde s’explique aisément par la théorie de sélection naturelle. […] Celles-ci doivent avoir encore plus de moyens que les souches dont elles sortent, de l’emporter dans la grande bataille de la vie et de pouvoir se conserver et se perpétuer. […] Les habitants de chaque période successive dans l’histoire du monde n’ont pu exister qu’à la condition de vaincre leurs prédécesseurs dans la bataille de la vie.

227. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

Aucun nuage ne troubla les beaux jours qui durèrent autant que leur vie. […] C’est là que je passe ma vie seul, sans femme, sans enfants et sans esclaves. […] la vie n’est qu’une épreuve. […] La vie, remplie de projets passagers et vains, est-elle autre chose qu’un songe ? […] Vie de Thésée.

228. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — II »

Il se préoccupait que ses dernières pensées fussent dans une disposition telle qu’elles ne contrediraient pas, mais compléteraient l’harmonie de toute sa vie.‌ Une fois encore, il y a trois ans, il s’était assuré de la solidité des assises sur lesquelles il avait bâti sa vie morale. […] Mais pour ceux qui savent combien était haut le sentiment de la responsabilité chez ce parfait honnête homme, il paraîtra que ses dernières préoccupations, — celles où il puisa la paix suprême, — ont été pour un examen de conscience plus intime et où il s’arrêta moins à peser les idées auxquelles il avait lié sa vie qu’à venfier la façon même dont il avait usé de la vie.‌ […] Dans cette exquise Vie de Jésus, élégie et idylle mêlées, dont la grâce toujours enchantera les artistes, déjà nous avons cessé de trouver un contentement moral. […] Si mêlé qu’il fût à la vie parisienne, cet illustre maître n’avait plus grand’chose de commun avec les préoccupations morales actuelles.

229. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIIe entretien. Cicéron (2e partie) » pp. 161-256

Quelle est l’infamie domestique dont ta vie n’ait pas été chargée ? […] enfin quelle est la vie que tu mènes ? […] Ce mélange de la vie publique et de la vie méditative, cette alternative de l’éloquence et de la philosophie dans la vie du même homme d’État, qui allait mourir sous le glaive des sicaires d’Antoine après avoir combattu les sicaires de Clodius, ne se retrouve dans aucun de nos grands hommes de tribune moderne au même degré. […] La politique l’avait odieusement rejeté dans la vie inactive. […] Par ce moyen la vie d’ici-bas tiendra déjà d’une vie céleste, et nous en serons mieux disposés à prendre notre essor quand nos chaînes se briseront.

230. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens II) Henry Fouquier »

Là ils écrivent toute leur vie les choses quelconques qu’ils sont capables d’écrire. […] C’est un miroir sensible largement ouvert au monde et à la vie. […] Fouquier, par les préoccupations dont ils portent souvent la trace, par la profondeur et la subtilité de l’expérience dont ils témoignent, laissent entrevoir derrière cette vie de grand laborieux une autre vie non moins remplie, une vie de grand épicurien. […] Une pervenche intacte fleurit au cœur éternellement jeune de ce Parisien cuirassé d’expérience, durci au feu de la vie de Paris. […] En somme, il y a trois vies dignes d’être vécues (en dehors de celle du parfait bouddhiste, qui ne demande rien) : la vie de l’homme qui domine les autres hommes par la sainteté ou par le génie politique et militaire (François d’Assise ou Napoléon) ; la vie du grand poète qui donne, de la réalité, des représentations plus belles que la réalité même et aussi intéressantes (Shakespeare ou Balzac), et la vie de l’homme qui dompte et asservit toutes les femmes qui se trouvent sur son chemin (Richelieu ou don Juan).

231. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXVI. La sœur Emmerich »

Elle les a gardés nus toute sa vie, troués qu’ils étaient des clous du Sauveur, car c’était une stigmatisée ! […] Nous savons bien que la vie de la sœur Emmerich renverse ce que les savants appellent modestement les lois naturelles, comme s’ils les tenaient dans leur main ! […] À dater de ce jour, qui changea la vie de Brentano, Emmerich devint pour lui la poésie elle-même, devant laquelle toute autre poésie vaincue devait se taire… et il tut la sienne. […] Jésus-Christ. — Vie de N. […] Jésus-Christ. — Vie de la Sainte Vierge, — par la sœur Emmerich, — traduites par M. l’abbé Cazalès.

232. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Mercier » pp. 1-6

Hasard heureux quand ces formes sont reproduites avec le double sentiment de l’exactitude et de la vie, et quand ces ouvrages qu’on réimprime sont choisis avec discernement ! […] Avec la religion, avec le goût, lui manque la vie. […] Une époque qui aurait vécu plus que ce siècle, glacial et forcené tout ensemble, qui niait tout et qui croyait que nier tout c’était vivre, aurait eu un peintre doué de ce don merveilleux de la vie. […] …) il y eut un moment unique de vie retrouvée. Le siècle se sentait… Eh bien, ce moment de vie trouva son peintre, doué du don de la vie dans des proportions plus grandes que la vie réelle.

233. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVe entretien. Vie de Michel-Ange (Buonarroti) »

Disons brièvement sa vie : elle fut longue, comme la vie de ceux à qui la Providence réserve beaucoup d’espace pour ce qu’ils ont à accomplir ici-bas. […] Tout grand ouvrier en philosophie, en religion, en politique ou en art, laisse de sa vie dans son œuvre. […] Sa vie, tout opposée à celle de Raphaël, ivre de jeunesse, d’amour et de luxe, était celle d’un cénobite. […] Sa veuve, qui accourait de Naples pour le rappeler à la vie, apprit son infortune en route. […] Cette mort assombrit pour jamais l’horizon déjà sombre de la longue vie de Michel-Ange.

234. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE IX »

Elle avait vendu sa vie, on vendit sa mort. […] Il y avait un drame dans son récit, il en est sorti sans effort, comme la vie sort de la vie. […] Qu’il rentre bien vite dans le grand jour, dans la lumière, dans la salubrité de la vie. […] Le sort en est jeté, il a raté sa vie. […] Quel est l’amant inconnu auquel elle vient ainsi de fiancer sa vie !

235. (1920) Action, n° 2, mars 1920

Elle concerne l’homme dans la vie ordinaire, où les passions sont si rares. […] Aucun, on peut le dire, n’a de date dans la vie de Max Jacob. Ils sont nés de l’effort de sa vie éternelle et sans repos. […] Un livre de poète, de vrai poète que la vie assassina et qui n’aimera jamais assez la vie pour l’assassiner à son tour. […] Il gémit, il se lamente, il désespère, inapte à la vie, à l’espoir.

236. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Louis Vian » pp. 373-387

Et enfin, dans ces derniers temps, nous avons eu Dupin, ce vieux soulier ferré de Dupin, extrait des crottes du Morvan, qui n’a jamais écrit une seule phrase de langue ou de sentiment français en toute sa vie, qui fut longue ! […] Louis Vian a-t-il vu, comme moi, cette sécheresse à travers les faits qu’il rapporte de cette vie publique et privée, restée imposante ? […] Montesquieu était un artiste en tout, qui savait arranger sa vie comme ses phrases, d’une concentration si savante. […] N’ayant été chrétien qu’à sa mort, il fut donc philosophe toute sa vie, mais un philosophe boutonné dans sa philosophie et ne donnant pas dans la déboutonnée et la scandaleuse du temps. […] La vie intellectuelle de Montesquieu le préoccupe autant que sa vie morale, sociale et physique.

237. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVI. Buffon »

Il avait mis tant d’ordre dans sa vie, qu’il put, sans inconvénient, la partager ! […] Il adore Buffon, et depuis trente ans il lui a donné probablement bien plus de vie qu’il n’en a reçu de ce grand-homme. […] Seulement, dans ce volume sur les Manuscrits, que je regarde comme l’épi vidé de l’autre beau volume si plein sur les Idées et les travaux de Buffon, il y a cette biographie extérieure que M. de Flourens n’avait encore jusqu’ici qu’ébauchée et dont on peut se passer d’autant moins, quand il s’agit de cet homme, d’une si magnifique ordonnance, que son talent explique sa vie comme sa vie explique son talent, et que les triples pentes de l’esprit, du caractère et de la destinée se confondent et forment son identité. […] Une fois nommé à cette fonction, l’homme d’ordre de l’intimité apparut dans la vie publique. […] « Quand il met sa grande robe sur les petits objets, elle fait mille plis », disait gracieusement pour la première fois de sa vie, en parlant de lui, ce goitre de Suisse, Mme Necker.

238. (1903) La renaissance classique pp. -

René a motivé ses dégoûts et son renoncement à la vie. […] C’est elle encore qui enseigne le chemin de la vie ! […] C’est cette « sagesse » de la vie qui nous servira de guide. Nous essaierons de chanter, de raconter la vie. […] On retrouve là leur mépris de la vie saine dans ses manifestations normales.

239. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIX. Progression croissante d’enthousiasme et d’exaltation. »

Fidèle à sa pensée que les soucis de la vie troublent l’homme et l’abaissent, Jésus exige de ses associés un entier détachement de la terre, un dévouement absolu à son œuvre. […] Ne craignez point ceux qui ôtent la vie du corps, et qui ne peuvent rien sur l’âme. […] Tenir à la vie, c’est se perdre ; sacrifier sa vie pour moi et pour la bonne nouvelle, c’est se sauver. […] A force de détacher l’homme de la terre, on brisait la vie. […] Sans doute, il avait fait dès lors le sacrifice de sa vie.

240. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVI. M. E. Forgues. Correspondance de Nelson, chez Charpentier » pp. 341-353

L’identité de la vie qu’on raconte donne à deux livres d’histoire dont l’un a précédé l’autre dans le temps l’air d’un modèle et d’une copie : mais, de cette fois, il n’en est pas ainsi. […] Les Anglais ont fait une renommée à sa Vie de Nelson parce que c’était la Vie de Nelson. […] Mais la vie du grand Amiral n’a pas été que sa fonction, et son individualité est plus compliquée… Ce héros, et presque ce saint du pays des Excentricités profondes, a des singularités qui semblent incompréhensibles ! […] Regardez-y et voyez si, dans aucune vie, vous en avez vu de plus frappants, de plus nombreux, de plus continus ! […] On connaît les faits de cette vie éclatante dans laquelle, je l’ai dit, l’Épique et le Romanesque élargissent le cadre ordinaire de l’Histoire, et le livre de M. 

241. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Nelson »

L’identité de la vie qu’on raconte donne à deux livres d’histoire, dont l’un a précédé l’autre dans le temps, l’air d’un modèle et d’une copie ; mais, de cette fois, il n’en est pas ainsi. […] Les Anglais ont fait une renommée à sa Vie de Nelson parce que c’était la Vie de Nelson. […] Regardez-y et voyez si, dans aucune vie, vous en avez vu de plus frappants, de plus nombreux, de plus continus ! […] On connaît les faits de cette vie éclatante dans laquelle, je l’ai dit, l’Épique et le Romanesque élargissent le cadre ordinaire de l’Histoire, et le livre de M.  […] Mais il ne s’agit pas de connaître plus qu’on ne sait de la vie de Nelson, dont on sait tout, mais de l’écrire.

242. (1924) Critiques et romanciers

Les gens ne ressemblent point à leurs âmes ; et leur vie apparente n’est point l’image de leur vie intime et profonde. […] La « vie secrète » n’est point sage. […] La vie secrète ! […] La peinture de la vie humaine que M.  […] Non : la vie est banale.

243. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville »

La vie politique s’y passe à discuter s’il faut raccommoder un chemin ou bâtir un pont. […] J’ai lu beaucoup de choses dans ma vie sur l’immortalité de l’âme, et je n’en ai jamais été aussi complètement convaincu qu’aujourd’hui. […] La vie du député, aujourd’hui, est une vie vulgaire, si même elle n’est pas abrutissante pour le grand nombre. […] Royer-Collard, vient de nous être bien nettement accusé : ce fut là l'embarras et comme l’empêchement de sa vie publique. […] Royer-Collard : « La démocratie coule à pleins bords », fut, en quelque sorte, le texte de méditation que se proposatoute sa vie Tocqueville.

244. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

Ils sentaient le divin en eux-mêmes. » (Vie de Jésus. […] Importance de la vie humaine. […] Opinions simples sur la conduite de la vie. […] Mais elle s’en relèvera par toute une vie d’abnégation. […] Les derniers ouvrages du comte Tolstoï et son genre de vie.

245. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XIX. »

« Maintenant, maintenant, vie laborieuse. […] Il n’est besoin de rappeler ce que même l’épicurien Horace a trouvé de touchant sur la brièveté de la vie et les regrets de l’amitié qui survit. […] Tout cela est bien peu pour soutenir l’âme à la dernière heure, et l’inspirer durant la vie. […] cette vie tremblante et courte, dédions-la toute au Seigneur. […] « Liés à toi, à ta vie intérieure, nous éclatons au dehors par la prière et le chant.

246. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

Tu as choisi la meilleure part de toutes les parts de la vie, si ce n’est pas la plus belle ! […] Est-ce que la vie est si longue qu’il faille en dépenser tant sur les grandes routes ? […] Mais, s’il a trouvé la vie dans l’indépendance, il est resté loin encore de l’idéal. […] Les grands artistes en tout genre ont seuls ce don de la vie, hélas ! […] Je voulais emporter pour moi un souvenir vivant, un souvenir écrit de ce moment de ma vie !

247. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

Je ne sais si j’aurai assez de vie et de force pour remplir un plan aussi vaste. […] Quel dommage que les hasards de la vie ne l’aient pas conduit en Galilée ! […] A quoi se réduirait la vie d’Alexandre, si on se bornait à, ce qui est matériellement certain ? […] Une grande vie est un tout organique qui ne peut se rendre par la simple agglomération de petits faits. […] Un tel redressement est beaucoup plus difficile pour l’Évangile, la vie publique de Jésus ayant été plus courte et moins chargée d’événements que la vie du fondateur de l’islam.

248. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Que pense-t-il de la vie ? […] Qu’ai-je à attendre de la vie ?  […] Sa vie lui semble amère et vide. […] Et pourtant elle aime la vie. […] Je suis au bout de ma vie.

249. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre I. Les idées et les œuvres. » pp. 234-333

Il se croyait perdu, il s’était cru perdu toute sa vie. […] C’est de cette vie que naissent ses vers. […] La vie morale dans la vie vulgaire, voilà son objet, l’objet de ses préférences. […] N’est-ce point là une vraie vie de poëte ? […] Les lois de la vie y sont suspendues ou transformées.

250. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Art français » pp. 243-257

sa préoccupation et sa gloire de mépriser ses conditions de vie, le sens naturel dont elle vient, le sens naturel qui la perçoit. […] Tout un mois, chaque année, au sortir des noires et mélancoliques études de la vie contemporaine, il était le travail dans lequel se recréait, comme en de riantes vacances, leur goût du temps passé. […] Le fils de Gavarni, Pierre Gavarni, que nous ne saurions trop remercier, a complété notre travail sur la vie de son père, par la communication entière de ses papiers. […] Gavarni, en effet, fut toujours très écrivassier de ses impressions, de ses sensations, de ses aventures psychologiques, et, sauf les dernières années de sa vieillesse, où le philosophe ne formule plus sur ses journaux que des pensées, — toute sa vie, il l’a écrite. […] Elle en avait fait des papillotes… Et c’étaient deux années de la vie de Gavarni.

251. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vielé-Griffin, Francis (1864-1937) »

. — La Clarté de vie (Chansons à l’ombre, Au gré de l’heure, In memoriam, En Arcadie) [1897]. — Phocas le Jardinier (1898). — La Légende ailée de Wieland le Forgeron (1899). […] La petite parcelle de vie qui bat au cœur d’une plante n’est-elle pas identique à celle qui vibre en nous ? […] de quelle limpide et réconfortante beauté il est, ce livre, la Clarté de vie ! […] Analyser Clarté de vie serait le relire, et je ne sais le juger que par des images. […] Car il a toujours soumis ses libres dons d’image, de vie, de rythme et d’émotion, à une pensée souveraine, qui donne une raison à chaque création, chaque élan, chaque mot de sa belle inspiration momentanée.

252. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — II »

Voici donc que cet illustre penseur nous fournit, en sortant de la vie, un document très grave sur la qualité de son caractère et sur l’interprétation de ses idées. […] C’est à m’avancer dans cette soumission que j’emploierai les dernières années de ma vie.‌ […] C’est un mot sous lequel il n’y a plus un fait, et j’ai passé ma vie à combattre ce genre de vague. […] Pourquoi ne pas installer là tous ces rêves religieux qui satisferaient notre besoin de poésie, qui autoriseraient notre conception morale de la vie ? […] Selon moi, ils possèdent la vraie poésie de la vie.‌

253. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

La vie elle-même était alors considérée comme un voyage. […] Ils oseront dire que Jésus-Christ n’a pas été parfait dans la vie contemplative, et que l’esprit de vie s’est retiré de l’Église. […] quand la passion s’empare de la vie. […] Il renaît à une vie nouvelle ; il est sauvé. […] La grande période généreuse de sa vie va s’ouvrir.

254. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « I » pp. 1-20

Je joue avec la vie ; voilà la seule chose à quoi elle soit bonne. J’ai essuyé de bien cruelles afflictions en ma vie ; le baume de Fier-à-bras que j’ai appliqué sur mes blessures a toujours été de chercher à m’égayer. […] Cet endroit me paraît le seul de la vie de Voltaire qui fasse désirer encore des éclaircissements de détail. […] Il vient un temps, aimable Thalie, où le goût du repos et les charmes d’une vie retirée l’emportent sur tout le reste. […] — Nous continuerons de parcourir librement la vie de Voltaire, en prenant autant que possibles nos preuves et témoignages dans le recueil nouveau.

255. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Ils vivent de la vie des dieux immortels. […] De ma vie je n’avais vu rien de semblable. […] Brochard, une doctrine morale, une règle de vie. […] Perdez-vous plus que moi en perdant la vie ? […] Cela est toute sa vie.

256. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, le 8 décembre 1885. »

C’était un charme aimable, l’ancienne musique ; on créait une vie légère, on ordonnait des créations de vie légère, et aux auditeurs étaient des visions douces, agréantes, aisées ; les symphonistes ne rêvaient point de symphonies fantastiques, et l’opéra ne voulait pas être une épopée nationale. […] Or, Racine avait composé ses réalistes créations de vie réelle ; et Beethoven instituait la musique expressive des suprêmes vies ; Gluck entrevoyait dans la musique un drame de vie ; le drame complet d’art complet naissait ; et Richard Wagner achevait ces créations d’humaine vie, ces drames, Tristan, la Tétralogie, Parsifal. […] Il y a deux théâtres de musique : le théâtre de Gluck et de Beethoven, celui de Wagner, le théâtre du drame intense, profond, impitoyable de la vie ; — et le théâtre de Mozart et de Rossini, le théâtre de Grétry, des musiciens français depuis Rameau, notre tradition française, certes, avec les ordinaires émotions de la vie commune. […] … » des voix de jeunes hommes s’ajoutent, que la vie a touchés, et qui se lamentent, moins adorants hélas ! […] Il a une allure plus souple, plus rapide pour se prêter mieux à la vie du drame.

257. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. » pp. 479-498

V, p. 414), quand l’ambitieux, jeune encore et non rassasié, s’insinue, se pousse et aspire ; l’autre au faîte de la vie (t.  […] Les années 1706 et 1707 amenèrent une crise dans la vie de d’Antin. […] Quoique cette place ne semblât point faite pour honorer un homme de sa condition, il la désirait surtout par le motif de l’accès qu’elle procurait auprès du roi, et de l’assiduité qui était pour d’Antin la vie même. […] Il dit du mal de la Cour et nous en déduit le fort et le faible, mais il a la bonne foi d’en avouer tout l’attrait : Il faut cependant avouer qu’il est difficile de quitter ce pays-là quand on y a passé une partie de la vie ; et, malgré tous les vices et les défauts que j’y ai remarqués, il y a un petit nombre d’hommes et de femmes avec qui on peut passer agréablement sa vie, et mieux qu’ailleurs, par la difficulté de les assembler. […] Son caractère est pour nous plus intéressant que sa vie.

258. (1905) Études et portraits. Portraits d’écrivains‌ et notes d’esthétique‌. Tome I.

La vie actuelle, c’est-à-dire peu. […] Mais cette complication est comme celle de la vie même. […] … Cette devise est-elle vraie des événements de cette vie ? […] Je ne reconnais qu’un mot d’ordre ici-bas : Vive la vie ! […] Il appelait cela « dépenser sa vie en expériences ».

259. (1896) Les Jeunes, études et portraits

C’est la vie de l’atelier, la vie des rues, la vie du home. […] Alors la vie valait d’être vécue, une vie heurtée, contrastée, folle et sublime. […] C’est un grand intérêt de moins dans sa vie. […] La vie est devenue correcte et ennuyeuse. […] Qu’est-ce que la vie militaire ?

260. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIIe entretien. De la littérature de l’âme. Journal intime d’une jeune personne. Mlle de Guérin » pp. 225-319

Que de mécomptes dans la vie ! […] C’est comme le sel qui préserve affections et actions de la corruption de la vie. […] c’est que la vie et la mort sont sœurs et naissent ensemble comme deux jumelles. […] trouver un jour long, tandis que la vie tout entière n’est rien ! […] Mais ce temps fut court ; le malheur lui avait abrégé la vie ; la poitrine était atteinte.

261. (1890) L’avenir de la science « XVI »

Toute la vie suprasensible, toute l’âme d’une nation. […] C’est la vie divine de l’enfance, où Dieu se révèle de si près à ceux qui savent adorer. […] Car celui-ci saisissait la vie complète, et l’analyse ne la saisit pas. […] L’unité primitive était sans vie, car la vie n’existe qu’à la condition de l’analyse et de l’opposition des parties. […] Ils n’aiment pas à scinder la vie, et tout leur paraît avoir vie.

262. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIe entretien. L’Imitation de Jésus-Christ » pp. 97-176

Il avançait dans la vie, et il recueillait son âme. […] C’était sa vie en deux mots. […] Non seulement ses œuvres, mais sa vie entière, l’attestent. […] Plût à Dieu que leur vie eût répondu à leur science ! […] La mort de tout est la condition de la vie universelle.

263. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XVIII. »

En retour de la doctrine de vie, chantons ingénument le petit Enfant tout-puissant ! […] De deux vases différents, la destinée verse la vie aux humains. […] Regarde-moi, ô dispensateur de la vie spirituelle ! […] une vie fermée, nuit et jour, à la douleur. […] Et peut-être faut-il que je lui fasse l’oblation de ma vie.

264. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

car, dans son sein, la vie     S’était, hélas ! […] Il manque dans la première édition un ravissant passage, la description de la vie heureuse à Chaillot, pendant les semaines qui suivent la sortie de Saint-Lazare. […] Les débuts, les inconstances de l’abbé Prévost, ses allées et venues de la vie monastique à la vie mondaine, sont si connus et ont été si souvent racontés que je n’y reviendrai pas ; j’ai publié autrefois moi-même des lettres intéressantes qu’il écrivit au moment de sa fuite de chez les Bénédictins et quelque temps après. […] Ne doutez pas, monseigneur, que mon infortune ne soit une leçon dont l’effet durera autant que ma vie. […] Dom Prévost rentrant finalement au bercail et enterré dans le préau ou sous les dalles du cloître, c’est un trait de plus qui achève et clôt les disparates de sa vie.

265. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mme de Graffigny, ou Voltaire à Cirey. » pp. 208-225

Sa vie était un roman plus touchant sans doute que ceux qu’elle a écrits. […] Voltaire, du premier jour qu’il débuta dans le monde et dans la vie, semble avoir été lui tout entier et n’avoir pas eu besoin d’école. […] Mais, dès qu’il est parti, rien n’est moins divertissant que cette vie de paradis. […] Le fait est que la belle dame rend au poète la vie un peu dure. […] madame, criait-il de plus belle, il faut de la bonne foi, quand il y va de la vie d’un pauvre malheureux comme moi ! 

266. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Préface de la seconde édition »

Alors que nous avions dit expressément et répété de toutes les manières que la vie sociale était tout entière faite de représentations, on nous accusa d’éliminer l’élément mental de la sociologie. […] On nous accorde aujourd’hui assez volontiers que les faits de la vie individuelle et ceux de la vie collective sont hétérogènes à quelque degré ; on peut même dire qu’une entente, sinon unanime, du moins très générale, est en train de se faire sur ce point. […] Il n’est pas moins inadmissible que chaque aspect de la vie, chacun de ses caractères principaux s’incarne dans un groupe différent d’atomes. La vie ne saurait se décomposer ainsi ; elle est une et, par conséquent, elle ne peut avoir pour siège que la substance vivante dans sa totalité. […] Et ce que nous disons de la vie pourrait se répéter de toutes les synthèses possibles.

267. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Byron »

, dans Lara, ce poème fait avec dix mystères, Kaled, le page, aime d’un amour sans sexe le maître de sa vie. […] Non content des sentiments ordinaires de la vie, Byron s’invente des sentiments dans lesquels triomphe mieux que dans tous les autres la pureté de son génie. […] Il disait presque dans ses inventions comme le Sauveur le disait dans sa vie mortelle : « Laissez venir les petits enfants jusqu’à moi !  […] , je demande combien devait en avoir Byron, le nerveux et muable Byron, si vibrant aux plus simples contacts de la vie ? Le vrai sens de Byron est aussi difficile à trouver que le sens de Lara, dont on ignore les crimes et la vie.

268. (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

La connaissance des causes des phénomènes de la vie à l’état normal, c’est-à-dire la physiologie, nous apprendra à maintenir les conditions normales de la vie et à conserver la santé. […] Son problème consiste à déterminer la condition élémentaire des phénomènes de la vie. […] Il n’y a aucune réalité objective dans les mots vie, mort, santé, maladie. […] Pourquoi l’entrée de l’oxygène dans l’organisme est-elle nécessaire à la vie ? […] Mais, quant aux phénomènes intimes de la vie, ce sont deux animaux identiques.

269. (1890) L’avenir de la science « X » pp. 225-238

Autonomie parfaite, création intime, vie en un mot : telle est la loi de l’humanité. […] Quelle pâle chose que la vie ! […] Il serait trop pénible d’avoir consacré sa vie à déchiffrer un texte difficile sans qu’il fût admirable. […] Ce n’est pas la Bible qui est belle ; ce sont les mœurs bibliques, la forme de vie décrite dans la Bible. Ce n’est pas tel poème de l’Inde qui est beau, c’est la vie indienne.

270. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « Remarques finales. Mécanique et mystique »

La seconde concerne plus spécialement l’évolution de la vie. […] Qu’arriverait-il si notre vie devenait plus austère ? […] Nous en dirions autant de l’instinct et de l’intelligence, de la vie animale et de la vie végétale, de maint autre couple de tendances divergentes et complémentaires. […] Là s’arrêtait l’évolution de la vie. […] C’est l’organe de l’attention à la vie.

271. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Troisième partie. Dictionnaire » pp. 243-306

La Vie Littéraire. […] — La Vie parisienne. […] — La Vie. […] — Les Arts de la Vie. […] La Vie Blésoise, sept. 1905. — Photographies.

272. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Le gaillard voulait « vivre sa vie ». […] Veuille la vie les épargner ! […] Elle est dans ces poèmes comme dans la vie, et non à côté de la vie, au bout de la vie, au dénouement : elle est dans tous les épisodes, à toutes les minutes ; et elle est dans l’étoffe même de la vie, tramée avec le fil des Parques. […] absurdité ; pendant sa vie ? […] Et la vie, la vie même des héros, le détail de toutes leurs journées en tisse l’étoffe remuante.

273. (1896) Le livre des masques

On en connaît la théorie, qui semble culinaire : Prenez une tranche de vie, etc. […] Et c’est tout ; c’est toute une vie, c’est toute la vie. […] Un autre nom a été donné, historiquement, à un tel état de vie : quiétisme ; cette phrase de M.  […] Il le devint à la fin de sa vie : ainsi il connut toutes les formes de l’ivresse intellectuelle. […] Georges Eekhoud est un dramaturge, un passionné, un buveur de vie et de sang.

274. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Réja, Marcel (1873-1957) »

Réja, Marcel (1873-1957) [Bibliographie] La Vie héroïque (1897). — Ballets et variations (1898). […] Henry Davray Un précédent volume, La Vie héroïque, avait révélé M.  […] Il faut lire ses Ballets et variations pour se rendre compte du résultat obtenu : tout geste et toute attitude a une puissance d’expression en raison de telle cadence et de tel rythme ; la danse et le ballet, rudimentaires encore, sont les moyens par lesquels peut s’exprimer la vie, toute la vie. […] Tout d’abord, il raconte les Sujets, qui sont les danses élémentaires, polka, valse, gavotte, menuet et pavane ; puis les Coryphées, où il démontre ses théories et en indique toutes les applications possibles ; enfin, dans les Variations et les Ballets, il développe magnifiquement ses primordiales données et fait mouvoir magiquement la vie, toute la vie.

275. (1908) Promenades philosophiques. Deuxième série

L’intelligence, d’autre part, cultivée à l’excès, transforme la vie réelle en vie de représentation. L’homme civilisé ne vit plus sa vie, il vit une vie factice, une vie apprise, soumise beaucoup moins aux choses qu’à l’idée qu’il se fait des choses. […] La vie est un phénomène fixe. […] La vie est stable et le milieu est instable. […] C’est une attitude assez commune dans la vie.

276. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre II. Attardés et égarés »

Naissance de la vie mondaine. […] Une demi-italienne, la fille d’une Savelli de Rome, Catherine de Vivonne, inaugure la vie mondaine en France vers 1608 : et en 1610, peut-être avant, Honoré d’Urfé commence à publier son Astrée, qui offre un idéal de vie distinguée et charmante. […] Il trace des modèles d’une belle vie, sans peines et sans devoirs que par l’amour, à qui elle est dédiée. […] L’horreur du vulgaire naturel qui, appliquée aux menues circonstances de la vie sociale, produisait la recherche spirituelle des petits vers, tourne en passion du romanesque quand il s’agit de former une conception générale de la vie. […] C’est le point de vue où il faut se placer pour comprendre non seulement la vie de cette époque, mais aussi la littérature précieuse.

277. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

— Parlez-moi de votre vie de Pise. […] Rien ne sauve dans cette vie-ci que l’occupation et le travail. […] Ce caractère de prudence évite bien des peines, mais décolore la vie. […] Sans elle la vie n’est qu’une fantasmagorie. […] Il sentit vivement cette privation pendant le reste de sa vie.

278. (1890) L’avenir de la science « XXII » pp. 441-461

On ne tardera donc pas à rire de ces rieurs et à retrouver le goût de la vie sérieuse. […] La morale et le sérieux de la vie n’ont pas d’autre preuve que notre nature. […] Toute doctrine, comme toute institution, porte en elle le germe de vie et le germe de mort. […] C’est la vie, toujours la vie 197. […] Méthode pour arriver à la Vie bienheureuse, dernière leçon.

279. (1869) Philosophie de l’art en Grèce par H. Taine, leçons professées à l’école des beaux-arts

Un festin éternel en pleine lumière, voilà le ciel pour le Grec ; partant, la plus belle vie est celle qui ressemble le plus à cette vie des dieux. […] Ils ont porté la vie sociale aussi légèrement que la vie religieuse. […] Ce contraste s’exprime en deux mots : leur vie et leur esprit sont simples, notre vie et notre esprit sont compliqués. […] Il est honteux de s’attarder chez soi ; la vie de la caserne prime la vie du foyer. […] La vie, c’est donner sa fleur, puis son fruit ; quoi de plus ?

280. (1890) L’avenir de la science « XXI »

Ce fut dans les camps et au milieu des hasards d’une vie aventureuse que Descartes médita sa méthode. […] Malheur à la génération qui n’a eu sous les yeux qu’une police régulière, qui a conçu la vie comme un repos et l’art comme une jouissance ! […] Une conception étroite et régulière de la vie affaiblit les facultés créatrices. […] Le prophète, le poète des premiers âges passeraient pour des fous au milieu de la terne médiocrité où s’est renfermée la vie humaine. […] Ainsi plus s’accroît le nombre des satisfaits de la vie, plus l’humanité devient lourde et difficile à remuer ; il faut la traîner.

281. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « De Stendhal »

Rareté charmante, du reste, dans un homme qui s’est mêlé d’écrire, — dont le talent n’a pas fait la vie, mais dont la vie, au contraire, a fait le talent ! Or, c’était cette vie justement qu’a révélée, du moins en fragments, la Correspondance. C’était cette vie que la Critique a pu consulter pour expliquer un talent bizarre souvent, mais incontestable, trop grand pour n’être pas compté dans la littérature contemporaine. […] Ils tournent autour de lui-même comme la vie de chaque jour que cette correspondance réfléchit ou domine ; mais l’homme qui les regarde, qui les peint ou les juge, n’est pas changé. […] Ce n’était pas une négation qui pouvait la féconder, ce n’était pas une négation qui pouvait l’élargir, lui ouvrir les entrailles, lui verser la vie !

282. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Stendhal » pp. 43-59

Rareté charmante, du reste, dans un homme qui pourtant s’est mêlé d’écrire, — dont le talent n’a pas fait la vie, mais dont la vie, au contraire, a fait le talent. Or, c’était cette vie justement qu’a révélée, du moins en fragments, la Correspondance. C’était cette vie que la critique a pu consulter pour expliquer un talent bizarre souvent, mais incontestable, trop grand pour n’être pas compté dans la littérature contemporaine. […] C’est encore aussi ce Fabrice (de la Chartreuse), ce Julien Sorel d’une autre époque, quand la vie, qui veloute les choses en les usant, eut adouci l’âpre physionomie du premier. […] Ce n’était pas une négation qui pouvait l’élargir, lui ouvrir les entrailles, lui verser la vie !

283. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1868 » pp. 185-249

Dans le bain de siège de son père, qui sous la chaleur se dessouda, — et rendit à la vie Eudore-Werther. […] Il nous donne la vie qu’il a écrite de sa bien-aimée sœur. […] Nous avons passé trois semaines à vivre cette vie. […] Il y a un recul qui remet les petites choses et les petites gens de la vie littéraire à leur place. […] Nous venons de lire les vingt volumes de l’Histoire de ma vie.

284. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre III. De l’étude. »

Le travail, de quelque nature qu’il soit, affranchit l’âme des passions dont les chimères se placent au milieu des loisirs de la vie. […] L’amour de l’étude, loin de priver la vie de l’intérêt dont elle a besoin, a tous les caractères de la passion, excepté celui qui cause tous ses malheurs, la dépendance du sort et des hommes. […] La sage modération des philosophes studieux dépend, peut-être, du peu de temps qu’ils consacrent à rêver aux événements de leur vie, autant que du courage qu’ils mettent à les supporter. […] Il accomplit les actions ordinaires de la vie comme dans un état de somnambulisme ; tout ce qui pense, tout ce qui souffre en lui, appartient à un sentiment intérieur, dont la peine n’est pas un moment suspendue. […] faites qu’il s’aide du plus beau de vos présents, de la faculté de penser, pour juger la vie au lieu de l’éprouver !

285. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXII. La comtesse Guiccioli »

Or ces témoins de la vie de Byron n’étaient qu’un. C’était Celle qui avait été sa vie dans le sens le plus intime et le plus poétique du mot. […] Je me suis replongé dans les premières sensations intellectuelles et les premières admirations de ma vie ; mais ces sensations retrouvées, je ne les ai pas dues à celle de qui j’en attendais de plus vives et de plus complètes. […] Comme les enfants, du reste, Byron, partout, autant dans sa vie que dans ses œuvres, a été l’être vrai de tous les contrastes, et il n’y eut jamais d’autre explication à donner de son génie et de ses œuvres que cette vérité. […] Byron jugé par des témoins de sa vie. — Chez Amyot.

286. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le comte Gaston de Raousset-Boulbon »

Ruiné en très peu de temps par le train d’une vie que ne comporte plus en France la médiocrité des fortunes, il ne s’appliqua pas sur le front le pistolet qui fit long feu quatre fois sur le front prédestiné de Clive. […] Quoi qu’il en soit, c’est une biographie à la manière des temps actuels bien plus qu’une vie historique composée, profonde et sévère. […] Traduit devant un conseil de guerre, il ne chargea point ses compagnons, mais fut accusé et chargé par eux pour sauver leur vie, — plus tué par cela que par les balles, trahi par des amis, chose plus cruelle que d’être fusillé ! […] Toute la vie de Raousset tient entre ces deux refus de se mettre à genoux, digne encadrure de son incoercible fierté ! […] Comme la vie morale est au-dessus de la vie intellectuelle, les héros sont au-dessus des poètes, et Raousset était un héros.

287. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

La vie nous corrompt. » « Vicieux, je te condamne à quitter ou le vice ou la vie. […] — De vie bien employée ? […] Liaison de la vie avec la mort. […] Songez que sa vie est attachée à la vôtre. […] Est-ce qu’on ignore combien la vie a peu de prix à vos yeux ?

288. (1864) Le roman contemporain

Il raconta sa vie, qui était courte et peu fertile en incidents. […] Ses livres ne conquièrent pas plus de partisans à la vie de bohème qu’à la vie du pays latin. […] Où trouver un Maxime prêt à risquer sa vie pour sauver celle de Flora ou de Nina ? […] La loi, c’est la force ; le but de la vie, la jouissance ; il n’y a rien au-delà. […] Cette créature humaine était venue dans la vie comme cela.

289. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le comte-pacha de Bonneval. » pp. 499-522

Celui-ci, qui était déjà ce qu’il sera toute sa vie, répondit hardiment « qu’on ne cassait pas un homme de son nom ». […] Ce qu’on vient de voir faire à Bonneval dans cette première partie de sa vie se renouvellera exactement dans toutes les époques suivantes. […] Cette blessure au bas-ventre l’assujettissait à porter un bandage de fer ou plutôt une plaque d’argent qu’il garda toute sa vie. […] Cependant il me semble que nous devrions balancer votre cœur ; et lorsqu’elle vous fera exposer votre vie, je devrais vous faire prendre les précautions qu’elle permet. […] Je vous embrasse de tout mon cœur et voudrais acheter de la moitié de ma vie le bonheur de cette lettre.

290. (1887) Discours et conférences « Discours prononcé à Tréguier »

Quarante ans, quel long espace dans la vie humaine ! […] Dans un temps où le mal général est le dégoût de la vie, nous continuons à croire que la vie vaut la peine qu’on en poursuive le but idéal. […] Mais, touchant au terme de ma vie, je peux vous dire un mot d’un art où j’ai pleinement réussi, c’est l’art d’être heureux. […] J’ai toujours eu le goût de la vie, j’en verrai la fin sans tristesse ; car je l’ai pleinement goûtée. Et je mourrai en félicitant les jeunes ; car la vie est devant eux, et la vie est une chose excellente.

291. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — I » pp. 139-158

La vie ne s’est montrée pour moi que trop dure depuis que je t’ai entendue pour la dernière fois. […] Ton esprit, d’en haut, se pencha-t-il sur ton fils désolé, malheureux déjà dans ce voyage à peine commencé de la vie ? […] Une vie si solitaire n’aurait sans doute pas tardé à produire une récidive de mélancolie, s’il n’avait eu l’idée, qu’il jugea une inspiration d’en haut, de se rapprocher d’une famille avec laquelle il avait fait connaissance quelques mois auparavant. […] Cette vie à demi monastique s’accordait avec une joie intérieure et une allégresse véritable ; elle était assurément des plus conformes à ce qu’exigeaient alors le raffermissement moral et la sensibilité si récemment ébranlée de Cowper. […] Timide lui-même et si sujet à la terreur, Cowper faisait de ces animaux à lui un rapprochement naturel : il leur appliquait le mot miséricordieux et humain du poète : « non ignora mali… », et il eût volontiers répété aussi avec un poète de l’Orient : « Ne fais point de mal à une fourmi qui traîne un grain de blé, car elle a une vie, et cette douce vie lui est chère.

292. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — M. de Sénancour, en 1832 »

Il s’y exaltait aux délices de la vie sauvage, et entretenait cette mère indulgente du projet d’aller s’établir seul dans une île ignorée.  […] Il est probable qu’à une certaine époque de sa vie le véritable Oberman a essayé réellement de devenir ce solitaire. […] Que le résultat de la vie vous a été contradictoire à tous deux ! […] On a remarqué que madame de Staël prodiguait la vie ; elle-même a remarqué que M. de Guibert, dans son discours de réception à l’Académie, répéta, je ne sais combien de fois, le mot de gloire. […] L’élévation dans la permanence, c’est la maxime favorite qui domine et abrite en quelque sorte sa vie.

293. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

Cette idée est mieux entrée en nous, que l’homme n’est que l’effort dernier, l’épanouissement de la Vie totale. […] Il nous procure cette douceur de rentrer, volontaires et conscients, dans le royaume de la vie sans pensée, dans notre pays d’origine. […] Dans le Marinier, les détails abondent sur la vie du fleuve, sur la manœuvre des bateaux, sur leur disposition intérieure, etc. : a-t-on la sensation de la Loire ? […] Bientôt l’élève s’ennuie, recommence sa vie folle ; d’Artannes continue de veiller sur elle : elle l’envoie promener… jusqu’au jour où ils reconnaissent qu’ils s’aiment d’amour. […] Puis, la vie d’un notaire, d’un avoué, d’un professeur, n’est-elle pas une vie mesquine, pleine de contraintes et de servitudes, à côté de celle d’un propriétaire rural ?

294. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

Aujourd’hui, le prix de la vie est un prix de course. […] Rien de sérieux, rien de réel, rien qui serre de trop près les misères et les rigueurs de la vie. […] Il renonce à Cyprienne, des lèvres, sinon du cœur… La vie est si chère ! […] Il n’y a rien de plus gauche qu’une bourgeoise dépravée parodiant la vie des courtisanes. […] Son attitude a tout révélé : le vieillard, mis subitement en face du corrupteur de sa vie, pousse un cri de rage.

295. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. Vitet à l’Académie française. »

Tout cela reste juste, et pourtant dans la vie réelle, dans l’exacte ressemblance, les choses ne se passent jamais tout à fait ainsi : M.  […] C’est une source abondante d’inspiration que l’honnêteté du cœur, que le désintéressement de la vie. […] Il est assez ordinaire, on le sait, d’être bon dans la première partie de la vie ; cette première bonté tient à la nature, à la jeunesse, à ce superflu de toutes choses qu’on sent au-dedans de soi ; on a de quoi prêter et rendre aux autres. […] il est des talents jactancieux qui se font gloire d’étaler et de produire au jour les tristes objets dont ils ont rempli leur vie. […] En un mot, la clef de bien des destinées poétiques, à ce second âge de développement, se trouverait dans celle relation étroite avec la vie.

296. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre II. Le lyrisme bourgeois »

Aussi, pendant la plus grande vogue de la poésie courtoise, voit-on se maintenir ou apparaître des genres plus vulgaires, dont l’avantage est de raffermir au contact de la terre et de la vie les esprits étourdis de leur ascension dans les régions éthérées de la dévotion sentimentale. […] Volontiers aussi les faiseurs de chansons se regardaient eux-mêmes et disaient leur vie, ses joies et ses misères ; les pauvres diables qui attendaient leur subsistance de la libéralité des nobles patrons ou des auditeurs populaires, étaient amenés à se prendre pour sujets de leurs chansons comme de leurs fabliaux. […] C’était un pauvre diable de ménestrel, que la malechance poursuivit toute la vie, beaucoup de légèreté aidant, et un peu de vice. […] A la nourrice près, c’est l’image de toute sa vie. […] Voilà le bon et le vrai lyrisme : et c’est pourquoi il ne fallait pas oublier le pauvre diable qui, le premier chez nous, dans la laide et vulgaire réalité de cette vie, a recueilli un peu de pure émotion poétique.

297. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Baudelaire, Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique, par Eugène Crépet. »

Triton, guéri, devient chef des piqueurs du comte, et Wolfgang passe sa vie à la chasse avec Triton. « Ce trompette, à son insu, corrompt, séduit le marquis. […] Chose inattendue : vers la fin de sa vie, de sa pauvre vie si sombre où la débauche morne et appliquée, puis l’opium, le haschich, et, enfin, l’alcool, avaient fait tant de ravages, son catholicisme si peu chrétien, son catholicisme impie et sensuel, celui des Fleurs du mal, semble s’épurer et s’attendrir, et lui descendre  ou lui remonter  dans le cœur. […] de la simplicité, de la piété, de l’humilité : « Je me jure à moi-même de prendre désormais les règles suivantes pour règles éternelles de ma vie ; « Faire tous les matins ma prière à Dieu, réservoir de toute force et de toute justice, à mon père, à Mariette et à Poë comme intercesseurs : les prier de me communiquer la force nécessaire pour accomplir tous mes devoirs, et d’octroyer à ma mère une vie assez longue pour jouir de ma transformation ; travailler toute la journée, ou du moins tant que mes forces me le permettront ; me fier à Dieu, c’est-à-dire à la justice même, pour la réussite de mes projets ; faire, tous les soirs, une nouvelle prière, pour demander à Dieu la vie et la force pour ma mère et pour moi ; faire, de tout ce que je gagnerai, quatre parts : une pour la vie courante, une pour mes créanciers, une pour mes amis, et une pour ma mère ; obéir aux principes de la plus stricte sobriété, dont le premier est la suppression de tous les excitants, quels qu’ils soient. » Plus je me rapproche de l’homme et plus je reviens de mes préventions contre l’artiste. […] Enfin il est certain que Baudelaire n’a pas été gâté par la vie. […] C’est la description outrée et complaisante des plus désolants détails de la réalité physique, et c’est, dans le même moment, la traduction épurée des idées et des croyances qui dépassent le plus l’impression immédiate que font sur nous les corps  C’est l’union de la sensualité la plus profonde et de l’ascétisme chrétien. « Dégoût de la vie, extase de la vie », écrit quelque part Baudelaire.

298. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

Molière : vie et caractère. — 3. […] L’exactitude dont il se piquait n’avait pas rapport à l’extérieur de la vie, mais à l’intérieur des âmes. […] Moland, Molière, sa vie et ses œuvres, 1886. […] Loiseleur, les Points obscurs de la vie de Molière, in-8, 1877. […] Chardon, Nouveaux Documents sur la vie de Molière, in-8, Picard, 1886.

299. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre II. Le rôle de la morale » pp. 28-80

L’acceptation de la vie sociale implique un certain optimisme fondamental à l’égard de la société, comme l’acceptation de la vie, le simple fait de ne pas se tuer implique un certain optimisme à l’égard de l’existence. […] Sans ce mensonge, le succès au combat ne serait plus possible, et faute de ce succès, la vie disparaîtrait. […] Pour mieux préparer une vie future illusoire, elles ont menacé la durée de la vie réelle. […] Le bonheur dans la vie présente, l’harmonie, par la volonté de Dieu, dans une nouvelle vie, l’accord final des désirs et des actes sur la terre, mais seulement chez une humanité future, enchantent les esprits et les plient à la loi sociale. […] L’individu est un élément social, sans doute, et pour cela, il doit subordonner sa vie à la société.

300. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préface des « Rayons et les Ombres » (1840) »

Entre Eden et les Ténèbres il y a le monde ; entre le commencement et la fin il y a la vie ; entre le premier homme et le dernier homme il y a l’homme. […] De la passion combinée avec l’action, c’est-à-dire de la vie dans le présent et de l’histoire dans le passé, naît le drame. […] Quand la peinture du passé descend jusqu’aux détails de la science, quand la peinture de la vie descend jusqu’aux finesses de l’analyse, le drame devient roman. […] Si obscur et si insuffisant qu’il soit, on ne peut lui interdire, en présence des pures et éternelles conditions de la gloire, cette contemplation qui est sa vie. […] Dans ses drames, vers et prose, pièces et romans, il mettrait l’histoire et l’invention, la vie des peuples et la vie des individus, le haut enseignement des crimes royaux comme dans la tragédie antique, l’utile peinture des vices populaires comme dans la vieille comédie.

301. (1866) Nouveaux essais de critique et d’histoire (2e éd.)

Sa vie et son caractère. […] La vie animale surabondait en lui. […] La vie est une affaire. […] Nous ne sommes point ici dans la vie pratique et morale, mais dans la vie imaginaire et idéale. […] La vie sédentaire remplaça la vie nomade ; le régime patriarcal fit place aux monarchies militaires.

302. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

Le principe de l’art, selon nous, est dans la vie même ; l’art a donc le sérieux de la vie. […] La lutte pour la vie, simplement simulée, est donc devenue un jeu. […] Il faut d’abord distinguer entre la vie de l’organe particulier qu’affecte la sensation et la vie générale de l’organisme. […] La comédie ne vaut pas la vie. […] En somme l’idéal de l’industrie, étant l’économie de la force, est bien la vie ; car c’est dans la vie que la force est le plus épargnée, c’est là le foyer qui produit le plus en dépensant le moins ; or la vie est l’idéal même de l’art.

303. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. Le Chateaubriand romanesque et amoureux. » pp. 143-162

Depuis le commencement de ma vie, je n’ai cessé de nourrir des chagrins ; j’en portais le germe en moi comme l’arbre porte le germe de son fruit. […] Ce qui est singulier, c’est qu’il n’a guère dans sa vie rencontré de femme qui ne lui ait donné raison. […] Ainsi, dans les années du déclin, il passait sa vie, et trompa tant qu’il put la vieillesse. […] Ma vie n’est qu’un accident ; je sens que je ne devais pas naître. […] Ma vie est maintenant resserrée plus que jamais.

304. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Les détails que vous me demandez sur une vie si mobile et si cachée se réduisent à bien peu. […] Ma vie languit où Dieu le veut : je marche à l’autre en tâchant d’y bien conduire mes enfants. […] Mais cette affection clairvoyante et courageuse n’a fait que traverser ma vie, envolée de côté et d’autre. […] Ondine suivait sa ligne de vie à part, en amitié, en étude. […] Comme on sent que cette jeune âme ne demandait pas mieux que de reprendre au soleil et à la vie !

305. (1892) Portraits d’écrivains. Première série pp. -328

Il dispose souverainement de la vie humaine. […] Dumas et la logique de la vie. […] La vie est-elle bonne ou mauvaise ? […] Daudet a le don de la vie. […] Cela même est la vie.

306. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

La vie tient dans les phénomènes physiques le même rang que la volonté dans l’ordre moral. […] Mais il y a une heure pour tout dans la vie des peuples, c’était en France l’heure de l’Angleterre. […] Tout semblait conspirer alors au triomphe de sa politique, à la gloire de son nom, à la félicité de sa vie. […] Une faute, selon le monde, fut le tardif, mais suprême bonheur de sa vie. […] Heureuse dans son berceau, heureuse dans sa vie, heureuse dans sa tombe.

307. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre II. La poésie lyrique » pp. 81-134

Gregh, un simple appel de chef d’école, il y a une grande et douloureuse émotion d’art et de vie. […] — Mais la vie après tout n’en est pas moins la vie. […] « Mais ce qui paraît absolument neuf chez lui, c’est son dessein de faire entrer dans la poésie tous les thèmes de la vie moderne et, pour tout dire, de réconcilier l’art et la vie. […] Soucieux même de conformer sa vie à ses chants, il a revêtu la robe sacerdotale. […] Jusqu’à présent les femmes avaient considéré la passion, la vie, la morale, au point de vue imposé par le mâle.

308. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Sophie Arnould »

Ces éblouissants éblouis ont gardé dans les yeux l’impression des éclairs de cet esprit qui en avait tant lancé dans sa vie, et ils croient toujours en voir briller, dans ses lettres éteintes, quand, de fait, il n’y en a plus. […] », s’est élancé, comme un oiseau, dans le plus bleu de la vie. […] Le côté extérieur, pittoresque, esthétique des choses leur semble le grand côté de la vie, et voilà leur excuse ! […] J’ai admiré, au commencement de ce chapitre, qu’il ait conservé son bel éclat de vie et de jeunesse, — car les livres sont parfois plus heureux que les hommes, — mais si, à cet éclat de jeunesse et de vie qui n’a point pâli, M. Edmond de Goncourt avait ajouté de ces choses qu’inspire la vie et qui nous font la mieux comprendre, à mesure que nous la perdons, le livre, œuvre éclatante et charmante, aurait pu devenir un chef-d’œuvre.

309. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Brispot »

De tous les livres que peuvent publier la science et la foi réunies, le plus élevé dans tous les temps, mais le plus utile dans les temps actuels, c’est à coup sûr la Vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ. […] Au bout d’un certain temps, la balbutie de l’erreur et son radotage se rejoignent dans la vie des générations comme dans la vie individuelle. […] L’auteur de la Vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ, en traduisant les Évangiles a voulu les vulgariser. […] » Et l’auteur de la Vie de Jésus-Christ ne s’est pas contenté de ces noms anciens et illustres, l’éternel honneur des premiers temps. […] Telle est, en quelques mots, cette Vie de Notre-Seigneur Jésus-Christ, que toutes les âmes pieuses accueilleront avec applaudissement.

310. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Edgar Poe » pp. 339-351

Il n’a pas que le spleen de la vie, il a aussi celui de la mort ! […] Revanche de la pensée, cette force spirituelle contre l’immoralité fangeuse de la vie, ce fut sa grande anxiété, à cet Hamlet américain ! […] Baudelaire, un suicide, la mort bohême, finit la vie bohême d’Edgar Poe. « Un malin, dans les ténèbres du petit jour, raconte amèrement M.  […] Sa vie tout entière, à ce robuste et malade génie, fut, jusqu’à sa dernière heure, un délire et un tremblement ! […] Le Robinson de la poésie, dans son île d’Amérique, eut mieux que Vendredi, pour supporter et partager la vie.

311. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (2e partie) » pp. 5-80

À l’âge de quinze à vingt ans, à cette époque de l’existence où l’horizon de la vie est tout voilé d’une brume chaude qui noie et qui colore les contours secs de toutes choses ; à ce moment où la vie, commencée sans qu’on en aperçoive le terme, paraît longue comme l’infini ; à cette heure où cette vie n’a pas dit encore son dernier mot à l’adolescent qu’elle caresse ; à cette minute où l’amour, qui n’est au fond que l’éternité de la vie, déborde du cœur dans les sens et des sens dans le cœur, comme un océan de cette vie qui baigne tous les objets et qui les transfigure ; à cette période de votre jeunesse, disons-nous, avez-vous jamais voyagé en Italie, en rêvant, éveillé, la félicité d’Éden sous le ciel d’été de la campagne de Naples ou de Rome ? […] Quel avantage n’y a-t-il pas dans ces attachements qui donnent de l’intérêt à la vie et qui retrempent l’énergie du cœur ? […] Pour elle, le problème semble déjà résolu ; elle n’a plus qu’un souffle de vie, ce souffle est dans son cœur. […] Il y a des organisations qui n’ont pas la trempe de leur volonté ; la vie les tue par leur puissance même de trop sentir. […] Et si vous doutez de son talent, regardez sa vie et regardez sa mort ; il a vécu de ses rêves, il a peint du sang de son cœur, il est mort de son génie.

312. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

Il y a plus de rapports qu’on ne le suppose entre la vie et le goût. […] et que ta mémoire S’enfonce avec la vie au cœur de cette eau noire ! […] Mais, ce jeune homme débordant de vie était loin du jour où l’on se demande : « Pourquoi et comment ai-je vécu ?  […] Une herbe, un grain de blé, mon Dieu, voilà la vie. […] que m’importe ou la mort ou la vie ?

313. (1884) Articles. Revue des deux mondes

De tous les philosophes du progrès, de Lasaulx est sans contredit celui qui a donné le plus de développement et de précision à la théorie qui prétend retrouver dans la vie des nations les phases diverses de la vie humaine. […] C’est aux penseurs d’Ionie que l’on doit les premières spéculations méthodiques sur les causes et les conditions de la vie. […] Après les êtres inanimés, viennent les plantes, qui diffèrent entre elles par l’inégalité de la quantité de vie qu’elles possèdent. Comparées aux corps bruts, les plantes paraissent douées de vie ; elles paraissent inanimées comparées aux animaux. […] Il faut bien expliquer cette unité d’harmonie, ce consensus qui est la vie de l’individu.

314. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres publiées par M. de Falloux. »

Sa vie et ses œuvres publiées par M. de Falloux. […] L’homme naturel, l’homme robuste, en pleine possession de la vie, et censé le mieux portant aux yeux du naturaliste, lui paraît, comme à saint Augustin, le grand malade qu’il s’agit de convaincre qu’il est malade et de guérir. […] Dans ses méditations sur la vieillesse, Mme Swetchine pense surtout aux femmes, si négligées d’ordinaire dès qu’elles ont passé la moitié de la vie. […] c’est un bienfait de plus, c’est la Providence qui lui ménage des veilles et qui le tient sur un qui-vive perpétuel aux limites de la vie, aux abordsde l’éternité. […] Si la vie du vieillard a été vertueuse, le long regard jeté par lui sur le passé est plein de douceur ; il contemple tous les éléments, tous les gages d’un immortel et heureux avenir.

315. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

Vie de Jésus par M.  […] Ce ne sont pas des ennemis d’un jour qu’on se fait en s’affichant de cette manière ; ils sont acharnés et pour toute la vie. […] A qui s’adresse cette Vie de Jésus, en effet ? […] Un jour viendra où eux ou leurs fils regretteront cette Vie de Jésus ainsi présentée. […] Il en a désormais, de ces démêlés avec une notable et peu aimable portion de l’humanité, pour le reste de sa vie.

316. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

C’est, comme pour elle, la vie qui est le caractère du talent de Philarète Chasles. […] Sainte-Beuve n’eut jamais le flot de vie et de verve qui roule, un peu échevelé, à la manière des vagues, dans tout ce que Chasles a écrit. […] C’est un Voyage, non plus à travers ses ennemis, mais à travers sa vie et ses livres. […] Il a eu toute sa vie la prétention d’en être un, et sa gloire, s’il en était un, serait de le rester. […] car le tous-les-jours de la vie des peuples est aussi bête que le tous-les-jours de la vie des hommes, et le Génie lui-même se morfondrait à la raconter.

317. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Zola s’est poussé tout seul dans la vie. […] Mais, dans la vie, il n’y a pas que l’amour. […] Il avait donc, à la Bibliothèque, deux fois sa vie : sa vie matérielle, car il se contente de peu et met son idéal au-delà des rêves de l’argent, et sa vie spirituelle. […] Mais on ne s’avise pas de tout dans la vie. […] comme on voudrait effacer tout cela de sa vie.

318. (1912) Chateaubriand pp. 1-344

En 1790, il mène une vie fort dissipée. […] La vie que je traîne n’est pas très malheureuse. […] Il ne la leur pardonnera de sa vie. […] Pendant trente ans de ma vie elles m’ont fait horreur. […] Un plaisir qui a duré la moitié de sa vie.

319. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIVe entretien. Épopée. Homère. — L’Odyssée » pp. 445-524

On y menait la même vie, seulement un peu plus large dans le château, un peu plus mercenaire dans le village. […] Il se reposait dans cette douce halte de la vie qu’on appelle une belle vieillesse, avant de mourir. […] L’Iliade, c’est une scène de la vie des guerriers ou des princes ; l’Odyssée, c’est notre vie de tous les jours à tous ! […] quel autre rêve visite les mères quand leurs fils sont absents ou exposés aux dangers de la vie ?  […] c’est l’évangile de la vie rurale : l’esclave et le maître y sont égaux devant la poésie et devant la nature.

320. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

Les pages qui le suivent consolent par d’augustes spectacles d’avoir vu et pénétré la vie. […] Les œuvres où Flaubert s’est le plus abandonné au terne cours de la vie, sont teintes parfois d’incomparables beautés de style et d’âme. […] Et ces êtres qui présentent à la vie la carapace de leur stupidité, rubiconds et point méchants, oppriment, grâce à d’obcènes accoup-plements, ces admirables femmes, Mme Bovary, supérieure par la volonté, Mme Arnoux supérieure par les sentiments, qui, avilies ou contenues, subissent le long martyre d’une vie de tous côtés cruellement fermée. […] Et la vie passe sur elles ; de petits incidents ont lieu : la bêtise d’une république succède à la niaiserie d’une royauté ; quelques années de vie de province s’écoulent en vides propos et minces occurences ; des entreprises sont tentées auprès d’elles, réussissent ou échouent sans qu’il leur importe, et dans ce plat chemin qui les conduit et tous à une formidable halte, elles ne sentent intensément que le malheur de songer à leur sort. […] Il semble qu’à la fin de sa vie, le pessimisme de Flaubert se soit pénétré de douceur.

321. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXIXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 129-192

pourra peut-être intéresser pour toi les braves gens ; et qui sait encore s’il ne pourra pas arriver jusqu’à monseigneur le duc et t’obtenir la grâce de la vie ? […] Il est bon, il est saint, il nous aime, il risquera sa vie même pour nous sauver. […] Le sauver tout seul en te laissant mourir ou captive à sa place, cela ne se peut pas, disait en moi la voix céleste ; tu sens bien qu’il n’y consentirait jamais, lui qui t’aime plus que sa vie et qui a risqué sa liberté et sa vie pour te venger des sbires qui t’avaient blessée et avaient cassé la patte de ton chien ! […] plutôt mourir que de me sauver la vie par un tel crime ! […] Je ne l’aurais pas inventé, en toute ma vie, de moi-même.

322. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

Je suis las du monde et de la vie ; plus je vais, plus je m’en dégoûte. […] Peu importe après tout comment se passe le peu qui me reste de vie. […] Il y a dans la vie morale des grandes âmes ardentes de ces cris décisifs : il y a eu tel cri décisif dans la vie de Pascal ; il y a eu tel cri non moins décisif dans la vie de La Mennais, cri longtemps étouffé, mais nous venons de le surprendre. […] Plus libre, il aurait passé sa vie à chercher sa vocation sans la trouver davantage. […] Tout m’est à charge, la vie est trop pesante pour moi.

323. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

C’est fièrement douloureux d’interrompre ainsi les seules douceurs consolantes de ma vie. […] Martin (du Nord), que je suis saisie de douleur par celle de Mlle Mars, cette bien-aimée de toute ma vie. […] Cette vie terrestre est vraiment un exil, cher frère. […] Martin (du Nord), dont la vie a été bonne à tous ceux qui l’ont approché. […] Sainte-Beuve, le 13 avril 1869 : « … Il ne peut rien y avoir de plus attachant et de plus sérieux que ces lettres qui nous font entrer dans l’intimité d’une existence toute simple, d’une vie qui par là même ressemble à la vie de la plupart.

324. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre III. Littérature didactique et morale »

Je crois que derrière les allégories scolastiques qu’il fait mouvoir, il aperçoit et s’efforce d’atteindre la réalité concrète de la vie. […] Avec une netteté et une puissance d’expression singulières, il voit la fuite incessante des phénomènes, l’écoulement universel de tout ce qui a reçu être et vie. […] Ainsi l’amour est, selon l’intention de la nature, le vainqueur de la mort, c’est la source, le fondement, le pivot de la vie universelle. […] La bonne vie naturelle et, partant, le bonheur ne sont-ils pas à la portée de tous ? […] Mais de plus, Jean de Meung a le sens de la vie, surtout, il faut le dire, de la vie basse et ignoble : il peint grassement les mœurs de la canaille.

325. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre I. Les mondains : La Rochefoucauld, Retz, Madame de Sévigné »

Il rentre en France, et sa volonté embrasse la seule vie qui pût conserver sa gloire. […] Retz est bien cornélien toute sa vie d’un bout à l’autre est une œuvre de volonté. […] La vie, qui d’abord lui fut dure, l’obligea à se retrancher tout ce qui n’était pas sens pratique et vertu utile. […] La voilà chargée d’élever les enfants de Mme de Montespan : c’est le coup de fortune, qui change sa vie. […] Peut-être tend-elle trop à développer les vertus actives qui rapportent : on sent dans cette morale un peu terre à terre une femme que la vie a battue et rapetissée.

326. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre IX. Eugénie de Guérin »

Eugénie de Guérin, morte, a gardé l’attitude de toute sa vie. […] Nous n’avons pas aujourd’hui à écrire la vie de Guérin, malheureux comme tout ce qui vaut quelque chose. […] Toucher à cette période suprême de la vie de Guérin et de son agonie ne nous appartient pas. […] Seulement son génie d’expression sembla hériter et doubler de cette vie que la douleur tarissait en elle. […] Pour Eugénie de Guérin, le mot de vanité n’a de sens que quand il exprime le néant de la vie.

327. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Il s’ennuie, il rêve, il ne sait que faire de sa vie. […] Ils n’ont ni dégoût de la vie ni honte de l’amour. […] Vivant dans la campagne, nous prenons plaisir aux images qu’elle nous offre d’une vie plus simple que la nôtre et qui glisse par degrés jusque dans la vie inconsciente : vie des animaux, vie des arbres et des fleurs, vie des eaux et des nuages. […] Et quelle vie ! […] La vie, en somme, n’a pas trop mal servi M. 

328. (1903) La pensée et le mouvant

La vie intérieure est cette mélodie même. […] Et si une vie n’y suffit pas ? […] Et c’est pourquoi il a parlé toute sa vie. […] Il cherche moins à définir la vie que la science de la vie. […] Telle est la vie humaine.

329. (1913) Les livres du Temps. Première série pp. -406

Il y a travaillé toute sa vie. […] Ce n’était que ça, la vie !  […] La vie spéculative est une chose, la vie pratique en est une autre. […] Apologie pour la vie des champs. […] Il n’est pas fait pour la vie.

330. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Et pourquoi cette double vie ? […] Elle y prit des délicatesses de vie. […] que la vie est quotidienne ! […] Le livre gagne ainsi en vie apparente, sans perdre de sa vie intime. […] Et c’est d’une vie si profonde !

331. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Il avait borné ses vues, c’est lui qui l’a dit, à la recherche de tout ce qui peut contribuer à la félicité temporelle de la vie. Or, combien peu d’hommes peuvent, par leur condition, se contenter de la philosophie de Descartes, ou tirer parti de sa science, pour la conservation de leur vie ? […] Quel bien me revient-il de ne pas douter de l’immortalité de mon âme, si j’ignore de quelle façon il en sera disposé après la vie ? […] Il s’agit de savoir ce qu’il est, où il va, comment il doit se conduire dans la vie, quel sens donner à la vertu ou au vice, à la santé, à la maladie ; il s’agit d’un pari — il l’a dit lui-même — où la vie est engagée, où il importe, de toute la différence qu’il y a entre la vie et la mort, de mettre toutes les bonnes chances de son côté. […] Il ne voulait que croire, et se mettre en paix, dans la solitude de sa pensée et le secret de sa vie, sur le mystère de sa destinée.

332. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

Toute ma vie repassait, comme une confession générale, devant mes yeux. […] Et pourquoi écrit-on la vie des dieux, ô ciel ! […] J’étais fait en arrivant à Paris ; avant de quitter la Bretagne, ma vie était écrite d’avance. […] Tu ne peux te figurer comme il était charmant avant que la vie qu’il menait l’eût épuisé. […] Il était la vie, l’âme, le boute-en-train de tout le monde.

333. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

La vie locale ? […] De vie morale, pas davantage. […] Un roman n’est pas de la vie représentée. C’est de la vie racontée. […] Le conte de sa vie ?

334. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIVe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Ma vie passée n’a été qu’une suite de malheurs ; ma vie actuelle est pleine d’agitations et de trouble. […] Le médecin présenta un miroir et une lumière à sa bouche : le miroir ne fut point terni du souffle de la vie et la lumière resta immobile. […] Sa vie littéraire se termina par cette éclatante déception. […] Ses arbres et ses fontaines semblaient le pleurer ; il faut avoir passé comme moi par la dépossession pour connaître l’amertume de la vie. […] La femme meurt, et Chactas en reste stupéfié pendant sa longue et triste vie.

335. (1870) La science et la conscience « Chapitre II : La psychologie expérimentale »

L’humanité se révèle jusque dans les actes les plus simples de la vie matérielle. […] Sa raison lui révèle une fin à poursuivre dans le développement de la vie psychique et physique. […] Si elle tient sa méthode de Bacon, c’est à Hume qu’elle emprunte le principe de sa théorie des phénomènes de la vie morale. […] Que la vie morale a ses lois comme la vie physique, rien de plus. […] Les lois des phénomènes ne se laissent point observer directement, pas plus dans la vie morale que dans la vie physique ; elles ne se révèlent à la science humaine qu’à la suite d’opérations plus ou moins laborieuses ayant pour but de les dégager de la variété des accidents qui les enveloppent.

336. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

La vie serait trop triste sans cela. […] Ô charmantes images de la vie ! […] Comme je m’imaginais comprendre la vie et l’amour ! […] La vie elle-même est-elle jamais tout à fait innocente ? […] Sans doute, la vie de la terre est une dure vie.

337. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Pierre Corneille »

Les vies complètes, poétiques, pittoresques, vivantes en un mot, de Corneille et de Molière, restent à faire ; mais à M.  […] Le fait principal de ces premières années de la vie de Corneille est sans contredit sa passion, et le caractère original de l’homme s’y révèle déjà. […] Nourris la plupart dans une discipline austère, ils ont sans cesse à la bouche des maximes auxquelles ils rangent leur vie ; et comme ils ne s’en écartent jamais, on n’a pas de peine à les saisir ; un coup d’œil suffit : ce qui est presque le contraire des personnages de Shakspeare et des caractères humains en cette vie. […] Il avait mis toute sa vie et toute son âme au théâtre. […] Ce morceau a été écrit à l’occasion de l’Histoire de la Vie et des Ouvrages de Pierre Corneille, par M. 

338. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion statique »

Se rattache-t-elle à d’autres manifestations de la vie ? […] Ces deux types achevés de vie sociale se font donc pendant et se complètent. […] Tous les autres vivants, cramponnés à la vie, en adoptent simplement l’élan. […] Si l’élan de vie détourne tous les autres vivants de la représentation de la mort, la pensée de la mort doit ralentir chez l’homme le mouvement de la vie. […] adieu la vie !

339. (1897) Aspects pp. -215

Une bonne femme répéta : « Sur ma vie, il est tout nu !  […] Une fois dans sa vie, M.  […] La Beauté, elle est multiforme comme la vie. […] Un poète s’est en allé à travers la vie. […] vivre sa vie multiforme au paroxysme, voilà, en effet, la sagesse.

340. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre V. Du jeu, de l’avarice, de l’ivresse, etc. »

Après ce sentiment malheureux et sublime qui fait dépendre d’un seul objet le destin de notre vie, je vais parler d’une sorte de passions qui soumettent l’homme au joug des sensations égoïstes. […] On ne trouve de bon dans la vie que ce qui la fait oublier ; et si l’émotion pouvait être un état durable, bien peu de philosophes se refuseraient à convenir, qu’elle serait le souverain bien. Il est, et je tâcherai de le prouver dans la troisième partie de cet ouvrage, il est des distractions utiles et constantes pour l’homme qui sait se dominer ; mais la foule des êtres passionnés, qui veulent échapper à leur ennemi commun, la sensation douloureuse de la vie, se précipitent dans une ivresse qui, confondant les objets, fait disparaître la réalité de tout. […] quelle irrécusable preuve de malheur, que ce besoin d’éviter le cours naturel de la vie, d’enivrer les facultés qui servent à la juger ! […] Quel but que soi pour sa propre vie !

341. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

La Hollande convenait mieux à son humeur et à sa santé ; il y goûtait la liberté de l’incognito, l’ordre, l’aisance de la vie. […] De ce port où se repose Montaigne, il va s’élancer à la recherche des vérités qui régleront sa vie. […] Ce sont ses admirables lettres à la princesse Elisabeth, sur le traité de Sénèque : De la vie heureuse. […] Le naturel dans les écrits n’est pas d’une autre sorte que le naturel dans la vie humaine. […] Baillet, Vie de Descartes.

342. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre IX et dernier. Conclusion » pp. 586-601

Tout ce que l’on dit pour et contre les lumières ressemble aux inconvénients et aux avantages qu’on peut attribuer à la vie. […] C’est elle qui sert à connaître tout ce qu’il y a de bien dans la nature ; c’est elle qui peut seule ajouter à tous les biens de la vie la durée et le repos. […] L’on doit donc s’affranchir, s’il se peut, des craintes douloureuses qui pourraient troubler l’indépendance des méditations, confier sa vie à la morale, son bonheur à ceux qu’on aime, et ses pensées au temps, au temps, l’allié fidèle de la conscience et de la vérité. […] Mais qu’on voudrait, au prix de la moitié de la vie qui reste à parcourir, ne pas être entrée dans la carrière des lettres et de la publicité qu’elles entraînent ! […] Vie malheureuse et trois fois malheureuse !

343. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « G.-A. Lawrence »

Seulement, nous souhaitons à Lawrence que de telles distractions soient désormais sa vie, et que tout ce qui fut jusque-là sa vie ne soit plus que ses distractions ! […] Après avoir lu ce mâle début de Lawrence dans l’observation du cœur humain et de la vie des classes élevées en Angleterre, je suis convaincu que je tiens là — non pas entièrement venu, mais très apparent déjà, — un maître dans l’ordre du roman, et, s’il n’a pas la conscience de cela, il faut que la Critiqué la lui donne. […] L’auteur de Guy Livingstone est idéal de sentiment et d’expression, de société et de caractère, dans un temps où nous nous mourons du mal de cœur de la réalité, qu’on nous donne pour l’art ou la vie ; il est idéal parce qu’il est un byronien d’abord et ensuite un dandy, préoccupé, comme tout dandy, de la beauté des attitudes de son orgueil ; il l’est encore parce que tous les caractères de son roman sont pris dans un milieu humain et social exceptionnel, parce que le high life est la vie des classes supérieures, qui valent mieux que les autres de cela seul (comme le mot le dit) qu’elles sont au-dessus. […] Il n’y a certainement pas un gentilhomme dans tous les comtés de l’Angleterre dont la vie, dans son ensemble, ne pût ressembler à la sienne. La vie de Livingstone est la vie de tout le monde, à sa hauteur sociale.

344. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Maurice de Guérin »

Pour lui, pour Maurice de Guérin, — et celui qui écrit ces lignes a été profondément mêlé à sa vie, — l’émotion désintéressée que donne le génie et la perfection de son langage étaient bien au-dessus de tous les profits, toujours grossiers et vains, de la renommée ! […] Chateaubriand, Gœthe, Sénancour et Ballanche lui-même ont tous plus ou moins souffert de la vie, — du moral ou du physique de la vie, — de ses passions positives ou du vague de ses passions (comme l’a dit l’un deux, qui même a inventé l’expression), — tandis que Guérin n’a simplement souffert que de la pensée, un mal très précis, mais très exceptionnel. […] Celle que l’on a arrangée ici pour les besoins du moment n’appuie sur rien, — et, d’ailleurs, même en n’appuyant pas, ne nous donne qu’une époque de la vie de Guérin, et l’époque la moins intéressante de la vie de ce poète qui n’était encore que la larve de lui-même quand il s’en revint de la Chesnaye vers nous qui le revîmes à Paris ! Cette biographie d’un poète qui était plus la Poésie encore dans sa vie que dans son talent, ce n’est pas le fusain rapide de Sainte-Beuve qui en tiendra lieu, si je ne m’abuse, et un jour ou l’autre, soyez tranquille ! […] Dans les derniers jours de sa vie, Barbey d’Aurevilly se promettait encore de l’écrire.

345. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « G.-A. Lawrence » pp. 353-366

Lawrence que de telles distractions soient désormais sa vie, et que tout ce qui fut jusque-là sa vie ne soit plus que ses distractions ! […] Lawrence dans l’observation du cœur humain et de la vie des classes élevées en Angleterre, je suis convaincu que je tiens là, — non pas entièrement venu, mais très-apparent déjà, — un maître dans l’ordre du roman, et, s’il n’a pas la conscience de cela, il faut que la Critique la lui donne. […] Il n’y a certainement pas un gentilhomme dans tous les comtés de l’Angleterre dont la vie, dans son ensemble, ne pût ressembler à la sienne. La vie de Livingstone est la vie de tout le monde, à sa hauteur sociale. […] Comme les héros de lord Byron, Guy Livingstone est un de ces Puissants taillés pour l’histoire et qui, les jours où l’histoire se tait, — car il y a de ces jours-là dans la vie des peuples, — débordent de leur colosse inutile le cadre de la vie privée.

346. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre II. L’homme »

La vie bourgeoise était gaie, avant la Révolution, dans les provinces. […] C’est de ces sortes de songes qu’il a rempli sa vie. […] Et ce sont pourtant ces heures si clairsemées qui donnent un prix à notre vie. […] En ce moment, on n’aperçoit plus sa basse condition, ses moeurs irrégulières ; bien des gens ne changeraient pas son coeur ni sa vie contre le coeur ou la vie du grand roi. […] Voir pour tous les détails, l’excellente vie de La Fontaine par M. 

347. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

Moi-même, à la fin de l’année 1830, j’éprouvai dans ma vie morale des troubles et des orages d’un genre nouveau. […] Après 1848, votre vie changea de lit ; la mienne aussi. […] On comprend l’homme par sa vie avant de le comprendre par ses œuvres. […] Il ne lui arriva de plaider qu’une seule fois en sa vie, et sans faire la réplique. […] Mais, dans son estimable Vie d’Horace, M. 

348. (1856) Jonathan Swift, sa vie et ses œuvres pp. 5-62

L’apparition de cet ouvrage et son prodigieux succès eurent sur la vie de Swift une influence décisive et irréparable. […] C’est une autre vie que la nôtre, c’est encore la vie. […] Ni la vie de Swift, ni ses douleurs ne nous sont inutiles, car ce n’est que d’un tel homme et que d’une telle vie que Gulliver pouvait sortir. […] Prendre au sérieux le monde et les grandeurs du monde, la vie et les occupations de la vie, la science, la politique, les passions, les plaisirs ; se plaire dans cette mêlée, désirer et craindre avec emportement, voilà un des penchants de l’âme humaine, une des habitudes de sa pensée, et le mouvement perpétuel du monde en découle. Mais les maux de la vie, le sentiment de sa brièveté, des échecs irréparables, parfois un penchant naturel de l’âme donnent, pour nous, au monde et à la vie une tout autre figure.

349. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Ce fut un des meilleurs moments de sa vie littéraire. […] Heureux celui dont la vie est tombée en fleurs ! […] La vie morale et la vie physique sont des manifestations égales qui se transforment et se mêlent. […] C’est une autre façon de voir la vie, mais c’est bien toujours de la vie. […] Zola n’ait pas la vie longue.

350. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

La vie de Saint-Évremond se partage en deux moitiés bien distinctes. […] La duchesse de Mazarin fut une partie essentielle de la vie de Saint-Évremond, et plus essentielle que Ninon elle-même. […] Elle réfléchissait dans un âge et dans un train de vie où à peine les autres sont capables de penser, et elle, qui resta jeune si longtemps par l’esprit, elle se trouva mûre par là aussi avant l’âge. […] Elle ne partit point ; elle continua sa même vie, en en baissant légèrement le ton. […] De quelque sorte que cela soit, qui m’aurait proposé une telle vie, je me serais pendue.

351. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — I. » pp. 127-148

Il les lut ; il lut surtout les Vies de Plutarque, qui, par un heureux hasard, s’y étaient mêlées. […] Ici, nous trouvons l’aveu d’une faute de Franklin, et ce qu’en son langage d’imprimeur il appelle l’un des premiers errata de sa vie. […] Franklin eut, pendant toute sa vie, une marche constante, progressive, et qui tenait à un plan invariable. […] Pour peu que vous aimiez la vie, ne gaspillez pas le temps, car c’est l’étoffe dont la vie est faite. […] Il a redit la même pensée, à quelques variantes près, à toutes les époques de sa vie.

352. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

La prudence, la maturité semblaient avoir de bonne heure présidé à toute sa vie. […] Ils ont un esprit sérieux et des idées larges ; nés également pour la vie intérieure et la vie publique, ils seront bons pères de famille et bons citoyens. […] Le professeur a besoin d’une vie domestique établie. […] C’est ma vie de Caen, hélas ! […] c’est son dernier mot, le mot de toute sa vie.

353. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Or, l’ennui vient de l’absence de vie. […] Un jour on s’est battu pour Gluck, un autre jour pour Piccini… mais pour Gœthe on restera tranquille, il n’y a que la vie pour engendrer la vie, le feu pour faire l’incendie. […] L’artiste sublime est toujours plus ou moins saignant des coups de la vie. […] comme cette vie allemande, bourgeoise et aulique d’une petite cour d’Allemagne, rien de plus bête que les événements de la vie de Gœthe depuis Strasbourg jusqu’à Weimar. […] faire tenir toute sa vie dans ce moment !

354. (1896) Les idées en marche pp. 1-385

Ils la croient bonne à fuir la vie. […] Quelle belle vie que celle de Tolstoï ! […] La page vibre de vie puissante. […] La meilleure partie de ma vie s’est écoulée. […] La polémique, voilà la vie.

355. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Ô vérité, sincérité de la vie ! […] Un système de philosophe vaut un poème, un poème vaut une découverte scientifique, une vie de science vaut une vie de vertu. […] Il ne mène pas une vie recluse. […] Qu’on nous montre, au lieu des petitesses de la « grande vie », de petites vies et de grandes âmes. […] La vie est bonne.

356. (1899) Musiciens et philosophes pp. 3-371

Combien pensent, comme Gontcharoff, que la vie des gens qui travaillent est pauvre en sujets pour l’artiste et que notre vie à nous, oisifs, en est au contraire toute remplie ! […] La vie ouvrière est une matière artistique tout aussi variée et profonde que la vie des riches, par cela seul qu’elle est une manifestation de la Vie. […] La musique ajoute véritablement de la vie à notre vie. […] À ce que la vie n’anime plus le tout. […] La phrase l’emporte sur la page et en obscurcit le sens, la page devient vivante aux dépens du tout, le tout n’est plus un tout… La vie, la vibration et l’exubérance de la vie sont refoulées dans les plus petits organes, le reste est pauvre de vie.

357. (1892) Essais sur la littérature contemporaine

La vie est-elle bonne, ou est-elle mauvaise ? […] pourquoi la vie surtout ? […] L’imitation de la vie n’est donc vraiment complète qu’autant que, comme la vie même, elle enveloppe un jugement sur la vie. […] à ce compte, le roman cesserait d’être une imitation de la vie. […] C’est que l’homme n’est point fait pour l’art, ni la vie pour être imitée ou satirisée par les auteurs ; la vie est faite pour être vécue ; et l’imitation de la vie, comme l’art même, sont faits pour l’homme.

358. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

Il vient un moment dans la vie où La Rochefoucauld plaît beaucoup et où il paraît plus vrai peut-être qu’il ne l’est. […] Ces premiers travers ont barré plus d’une vie. […] Sa vie et son portrait ne sauraient être ici brusqués en passant : elle mérite une place à part et elle l’aura. […] Quel est donc le mystère de la vie ? […] Il y a des moments où la vie, le fond de la vie se rouvre au dedans de nous comme une plaie qui saigne et ne veut pas se fermer.

359. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — II » pp. 18-34

Les derniers jours que passa Guérin à La Chênaie eurent de la douceur, mais une douceur souvent troublée ; il sentait en effet que cette vie de retraite allait cesser et que l’époque des vacances amènerait pour lui la nécessité d’un parti à prendre. […] Il y eut là une nouvelle et importante station dans sa vie. […] » Aucune circonstance de sa vie, pas même l’inclination qui détermina son mariage, n’est venue démentir ce jugement qu’il portait sur lui-même ; il n’aima jamais qu’à la surface et, pour ainsi dire, devant le premier rideau de son âme : le fond restait mystérieux et réservé. […] Les trois ou quatre années que Guérin vécut à Paris, et où il vécut de cette vie de privations et de lutte, d’études et de monde, de relations diverses, ne sont nullement des années à mépriser ni à voiler. Cette vie est celle que beaucoup d’entre nous ont connue, et qu’ils mènent encore.

360. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Le père Monsabré »

La vie est ailleurs. […] Ces hommes sont affranchis par leur genre de vie de tout souci matériel et ont d’ailleurs toutes les certitudes : dès lors comment seraient-ils tristes ? […] Sa vie a des échos dans notre vie ; à la peinture de nos misères il reconnaît sa propre misère. […] Faire de notre vie la pâture de sa curiosité ! […] N’est-ce pas que je vois sortir de vos yeux comme un flot de votre vie qui vient se mêler à ma vie ?

361. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Pensées, essais, maximes, et correspondance de M. Joubert. (2 vol.) » pp. 159-178

La vie de M. Joubert est toute dans ses Pensées ; mais on ne dirait pas de cette vie le peu qui est à en dire, si l’on ne parlait de Mme de Beaumont. […] Enfin, il faut aimer la vie quand on l’a : c’est un devoir. […] Mme de Beaumont avait si peu d’attache à la vie, qu’il semblait qu’en le voulant, il n’eût tenu qu’à elle de vivre. […] Ma vie intime va tout entière se passer entre le ciel et moi.

362. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Ernest Renan »

Cauteleur et poltron, l’auteur de la Vie de Jésus a très bien compris que diminuer Jésus-Christ de sa divinité, c’est diminuer le Christianisme… simplement de la vie, et que la difficulté est de bien s’y prendre pour opérer tout doucement cette diminution importante. […] Voilà tout ce que la Critique vient de dire à Renan, en se taisant sur la nouvelle introduction qu’il a mise à sa fameuse Vie de Jésus, éditée pour la treizième fois… Certes ! […] Souvenez-vous du bruit de tonnerre que fit, quand elle parut, la Vie de Jésus ! […] L’auteur de la Vie de Jésus, qui troue les Évangiles, n’atteint que l’Église évangéliste et ne ricoche pas même sur nous, dont la tête chaude a pris l’alarme ! […] La Vie de Jésus (Nain Jaune, 22 juillet 1863 et 5 mai 1866).

363. (1925) Proses datées

La vie avait pu le changer, mais il n’avait rien changé à sa vie. […] Sa conception baroque de la vie fut d’une profonde sincérité. […] Ne nous a-t-il pas invités à descendre de son œuvre dans sa vie, non seulement dans sa vie publique et sentimentale, mais aussi dans sa vie profonde, celle de ses idées et de ses croyances ? […] Il me dit sa vie. […] Elle seule fut la passion constante de sa vie.

364. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VI. M. Roselly de Lorgues. Histoire de Christophe Colomb » pp. 140-156

Le nom de l’homme, nous le savons bien, était lumineux, mais la lumière ne tombait pas assez à plein sur toute sa vie. […] Christophe Colomb, en effet, est de tous les grands hommes celui dans la vie duquel la main de Dieu se fait le mieux voir et le plus à nu. […] Pour ceci, il fallait une force de vie morale sans laquelle la force de la vie intellectuelle défaillait et le triomphe du génie devenait impossible. Cette force de vie morale, le christianisme pouvait seul la créer… M.  […] Si le Saint-Esprit est quelquefois descendu parmi les hommes, sous forme de colombe, les hommes purent croire qu’il était descendu, sous ce nom, encore une fois parmi eux, tant Colomb garda toute sa vie les commandements de Dieu, dans ses malheurs et dans sa gloire !

365. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Toute la vie intellectuelle de l’Angleterre se ressent de cet instinct dominant. […] De telles personnes semblent faites pour la vie calme et saine des forêts et des champs, et c’est là aussi la vie qu’elles préfèrent. […] Il en est de même de tous les détails de la vie. […] Qui pourrait dire à quelle province de la vie elles appartiennent ? […] Oui, vous dira-t-elle, c’était bien un vrai fils de la vie et de la nature qui m’a touché, car la nature et la vie se sont réveillées en moi à son contact.

366. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Conclusion. Le passé et le présent. » pp. 424-475

Ce n’est pas en vain que la conquête a tourné cette race vers la vie militante et les préoccupations pratiques. […] À l’étrangeté, à la rareté de ce spectacle, on comprend pour la première fois la vie du pays humide. […] Quand on a mangé toute sa vie des navets, on ne regrette pas les oranges. […] Certainement la bataille de la vie est plus âpre et plus obstinée ici qu’ailleurs ; quiconque fléchit, tombe. […] Les chances de la vie sont tragiques ici et la punition de l’imprévoyance est atroce.

367. (1890) L’avenir de la science « XVIII »

La vie de l’humanité, comme la vie de l’individu, pose sur des contradictions nécessaires. La vie n’est qu’une transition, un intolérable longtemps continué. […] Le but, c’est la vie entière prise dans son unité. […] Non ; son but est de passer à une vie nouvelle. […] On tient trop à sa volonté et aussi à la vie.

368. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre II. La vie de salon. »

La vie de salon. […] La vie n’est plus une fête dès qu’on est obligé d’en surveiller les apprêts. […] George Sand, Histoire de ma vie, I, 78. […] de Loménie, I, 23  Vie de mon père, par Rétif de la Bretonne, passim.) […] — George Sand, Histoire de ma vie.

369. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Troisième partie de Goethe. — Schiller » pp. 313-392

Marmier, a résumé cette vie dans une préface de sa traduction de ce grand homme. […] On sent dans sa vie l’imitation puissante et habile, mais enfin l’imitation partout. […] la plus belle solennité de la vie marque le terme du printemps de la vie. […] Élevée au-dessus de la vie terrestre, elle planera sous la voûte du ciel azuré. […] Voilà pourquoi il fut accusé d’insensibilité et de personnalité dans sa vie.

370. (1900) Molière pp. -283

Il y avait dans tout cela de quoi exaspérer pour toute sa vie un homme infiniment moins patient que Molière ! […] Quoi qu’il en soit, Molière éprouva pour elle une de ces passions furieuses d’arrière-jeunesse auxquelles on ne peut guère s’abandonner sans y engager sa vie tout entière, et cette passion fut le tourment de sa vie. […] Plus Molière avance dans la vie, plus la bravade devient forte, plus le défi est de génie. […] La nature, très prévoyante en cela, n’a pas voulu, ce semble, que les hommes songeassent trop à la fin fatale de leur vie. […] C’est l’amour de soi-même, c’est l’amour de la vie, avec une avidité plus insatiable, avec une ambition plus immense, c’est l’amour de la vie prolongée au-delà du tombeau, victorieuse au-delà de la mort ; il n’y a pas autre chose chez Orgon, pas autre chose chez Argan.

371. (1905) Propos littéraires. Troisième série

S’il a tant dit que la vie est un bien, c’est uniquement parce qu’il n’a jamais par « la vie » entendu que la vie intellectuelle. […] À vrai dire, il y fut toute sa vie. […] Aussi ses livres, sans rien nous dire de sa vie, suivent sa vie. […] Mon but est de peindre la vie. […] Voilà la vie.

372. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jean Richepin »

Si l’on n’était forcément renseigné, par les journaux ou autrement, sur la personne et sur la vie de M.  […] La basse crapule même a une saveur de révolte ; c’est le retour à la vie animale, chez des êtres qui l’avaient dépassée : cette vie n’est donc plus innocente et sans signification comme chez les bêtes ; il s’y mêle la joie d’une perversité et d’une protestation contre l’ordre prétendu de l’univers. […] Remarquez d’ailleurs que ce qui est surtout pittoresque, c’est la vie d’en haut, et celle d’en has, la vie conçue comme une vision de Véronèse ou comme une vision de Callot. […] Richepin a pu contribuer elle-même à développer sa passion de la vie irrégulière et insurgée. […] Le poète mêle la bonne nature à la vie de ses gueux, qui prennent ainsi des airs de faunes autant que de « mendigots ».

373. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

La troisième, où « donner vie aux idées modernes, selon la science, sur l’avenir des mondes et de la Vie » : donc, philosophique et sociologique. […] mais la vie est-elle logique ?) […] En leur nom George Bonnamour pouvait répondre à l’aveu « d’immense fatigue » de Rémy de Gourmont : « Nous sommes pleins de vie et nous aimons la vie. […] Il se donna aussi, comme Barrès, hanté par elle dès notre temps, à l’aventure politique… Les devoirs de la vie, hélas ! […] Lorsque tout le Parnasse tend au soin noble et précieux du mot et de l’image, en quoi d’ailleurs il perd contact avec la réalité et la vie, Baudelaire, lui, entre avec passion dans la vie qu’il veut étrange et pantelante.

374. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

Sa vie est vraiment « humaine », toute pleine de belles larmes, et de faiblesse, et d’héroïsme. […] Vie exquise que celle où l’amour, et tous les amours, s’achèvent en charité. […] Et c’est par là que la vie de Mme de Sévigné est curieuse  plus peut-être que ses écritures. […] Mme de Sévigné a passé sa vie à adorer une Ombre — comme sa grand’mère sainte Chantal. […] Sa vie, d’abord, le prouverait, toute solitaire et, jusqu’à ces dernières années, toute en dehors des « cadres » officiels.

375. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

Puisqu’elle n’a pas été une sainte, Valérie demeure son titre principal, celui autour duquel, bon gré mal gré, se rattache sa vie. […] Mais on sent ici, à travers le déguisement et l’idéal, une réalité particulière qui donne au récit une vie non empruntée. […] J’ai souvent réfléchi aux causes qui font que tous ceux qui vivent dans le grand monde finissent par se détester les uns les autres, et meurent presque tous en calomniant la vie. […] Dans les résultats et les actions de la vie, cette vacillation se retrouvait. […] Nous hâtons de tous nos vœux cette publication (1844). — Depuis lors la Vie de Mme de Krüdner par M.

376. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

Durant ces vingt-deux années, comment s’était passée la vie de l’orphelin Farcy ? […] L’impression qui résulte de ces vers, quand on les a lus ou entendus, est celle d’un stoïcisme triste et résigné qui traverse noblement la vie en contenant une larme. […] Un goût vague ne se suffit pas à lui seul, et c’est pourquoi il est si aisé au premier venu de me faire abandonner ce qui tout a l’heure me semblait ma vie. […] C’est qu’en effet il ne lui a manqué d’abord qu’une femme aimée, pour entrer en pleine possession de la vie et pour s’apprivoiser parmi les hommes. […] J’ai résisté à mes penchants, qui me portaient à la vie solitaire et contemplative.

377. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

Aussitôt hors du lit, tout ce qu’il y avait de vie sur son visage, disparaît. […] Cette pauvre Rose est la mort, mais la mort tout occupée de la vie. […] Une habitude, une affection de vingt-cinq ans, une fille qui savait notre vie, ouvrait nos lettres en notre absence, à qui nous racontions nos affaires. […] Enfin, j’ai besoin de relire nos confessions, notre livre préféré entre tous, un journal de notre double vie, commencé le jour de l’entrée en littérature des deux frères et ayant pour titre : Journal de la vie littéraire (1851-188.), journal qui ne doit paraître que vingt ans après ma mort. […] Voir cette préface à l’autobiographie Journal des Goncourt, Mémoires de la vie littéraire.

378. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Villemain » pp. 1-41

Voilà cette vie, qui peut faire rêver, mais qu’après tout on explique. […] Or, comme la vie des hommes les plus superficiels a beaucoup plus d’unité qu’on ne croit, Villemain est mort comme il a vécu. […] Villemain a fini sa vie comme il l’a commencée, en faisant de la rhétorique qu’il croit de la littérature. […] La rhétorique a fait toute la vie de Villemain et elle n’est pas près de la défaire. […] On n’en change pas dans un dernier livre, quand on est à l’extrémité de la vie.

379. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

La vie des Diderot, des d’Alembert, des Duclos est la vie commune aux gens de lettres de ce temps-là. […] Vie pénible, détresse. […] On dirait qu’il va devenir capable de « vie intérieure ». […] C’est l’amant de la nature et de la vie simple qui décrira la vie qu’on mène dans la maison de Clarens. […] Il est de plus en plus sensible à la vie simple et rurale.

380. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Tout ce qu’il y a eu entre ces deux âges de la vie disparaît ; il ne reste que l’intrinsèque des hommes. […] Ballanche, “toutes les pensées d’existence et d’avenir se tiennent ; pour croire à la vie qui doit suivre celle-ci, il faut commencer par croire à cette vie elle-même, à cette vie passagère”. […] Par vous, je suis revenu à la vie du dehors, au mouvement de ce monde, et de là, sans secousse, aux vérités les plus sublimes. […] Lorsque, comme nous, on déplore les sottises des deux partis, on passe sa vie à gémir. […] ce n’est encore qu’une année de votre vie !

381. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

Ces cadeaux lui rappelaient les solennités de sa vie domestique […] Ma vie, à moi, est dans mes deux filles. […] Je conclus à la vie du Chinois. […] Je demeurai là huit ans, sans voir personne, et menant une vie de paria. […] Au bout de trois heures, ma vie se mêlait à sa vie !

382. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Louis Veuillot »

Louis Veuillot connut, dans son enfance, la vie humble, étroite, indigente. […] C’est que le petit journaliste avait déjà une vie intérieure. « Ah ! […] Cela semble une chose épouvantable d’être tenu à une vie honnête et réglée par le grand devoir divin. […] Il ignorait le sens de la vie : un jour, il le connaît. […] Sa vie me semble, au contraire, admirable et presque surnaturelle d’unité.

383. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo, romans (1832) »

Quelles qu’on en suppose la forme, l’inspiration et l’humeur, ils se réduisent toujours à être une excursion d’assez longue haleine dans le monde et dans la vie. […] Le drame est plus court, plus concentré, plus fictif ; il est plus à la merci d’un seul événement, d’une seule idée ; l’exaltation en dispose aisément ; il peut se détacher, s’arracher davantage du fond de la vie commune. […] Delmar a perdu son ami, son frère par serment, le nègre Bug, qui lui a sauvé la vie, et dont il a causé involontairement la mort : de là son deuil éternel et ses soupirs étouffés. […] On le voit, il n’a pas encore senti la vie, selon la mesure infinie qui la tempère ; il n’a pas éprouvé à la fois un goût de miel et d’absinthe dans la fusion d’un même breuvage. […] mais vous n’êtes pas encore descendu à la vie de tous, à cette vie humaine, vous n’êtes pas encore au roman !

384. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XV. De l’imagination des Anglais dans leurs poésies et leurs romans » pp. 307-323

Où est le grain de poussière qui n’a pas eu de la vie ? […] a war Eternal war with woe………………… Qu’est-ce que la vie ? […] Ces longueurs, en effet, lassent quelquefois l’intérêt, mais la lecture des romans anglais attache, par une suite constante d’observations justes et morales, sur les affections sensibles de la vie. […] Les anciens romans français peignent des aventures de chevalerie, qui ne rappellent en rien les événements de la vie. […] Ce n’est pas le dur lien des lois humaines, ce lien si souvent étranger au choix du cœur, qui forme le nœud de leur vie, c’est l’harmonie elle-même, accordant toutes leurs passions dans le sentiment de l’amour.

385. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VIII : Hybridité »

Parallélisme entre les effets des changements dans les conditions de vie et ceux des croisements. — VII. […] La fécondité, soit des premiers croisements, soit des hybrides, est plus aisément affectée par des conditions de vie défavorables que celle des espèces pures. […] Entre la stérilité qui résulte d’un tel changement dans les conditions de vie et celle des hybrides, il y a de nombreuses analogies. […] Parallélisme entre les effets des changements dans les conditions de vie et les effets des croisements. […] Les deux séries de faits doivent se rattacher l’une à l’autre par quelque lien inconnu essentiellement corrélatif avec le principe même de la vie.

386. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Edmond et Jules de Goncourt »

C’est une jeune fille comme il peut y en avoir dans tous les mondes, mal élevée comme on peut l’être dans tous les mondes, et dont on oublie, et qui oublie elle-même, son mauvais ton, à mesure que la vie la prend, la vie telle qu’elle est faite, sérieuse et quelquefois tragique… Il n’y a pas, à proprement parler, de bourgeois et de bourgeoisie là-dedans. […] La matérialité y étouffe tout : la pensée, l’émotion, la passion, le drame et la vie ! […] La vie n’y est point, la vie de l’intelligence et du cœur, la vie de la réflexion, de la pensée, du pathétique, la vie supérieure enfin, — et cela n’étonne pas chez un naturaliste ! — mais l’autre vie non plus, la vie inférieure, la vie même des choses. […] La littérature actuelle en est donc à dire, comme le petit Savoyard : « Un petit sou me rend la vie ! 

387. (1929) Les livres du Temps. Deuxième série pp. 2-509

On eût pu lui faire grâce de la vie. […] La Fontaine, évidemment, n’a pas eu une belle vie. […] Il est presque plus moral que la vie réelle. […] Quel élan vers la vie intense et dionysiaque ! […] Mais ils croyaient vivre d’une vie plus pure, plus intense et même plus féconde que la vie pratique, et ils avaient bien raison.

388. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque (2e partie) » pp. 81-155

Rien ne me paraît préférable à une vie solitaire et tranquille. […] Le compte qu’il rend de sa vie à son ami Lélio de Vaucluse ressemble à une page des Confessions de saint Augustin. […] maintenant je t’aime, maintenant je t’honore, parce qu’avec la couleur de ta chevelure tu as enfin changé ta vie !  […] Cette mort fut douce, poétique, amoureuse et sainte comme sa vie. […] Il se consacre seulement à la voir, à la suivre, à la célébrer comme une divinité visible pendant toute sa vie.

389. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre II. L’antinomie psychologique l’antinomie dans la vie intellectuelle » pp. 5-69

Draghicesco substitue la théorie de la conscience épiphénomène de la vie sociale. […] Draghicesco, c’est que le cerveau y est à la fois la condition et l’effet de la vie sociale. […] Il suppose par-delà notre moi empirique et engagé dans la vie sociale un moi pur, extraspatial et extrasocial, réédition plus subtile du moi transcendant de Kant et de Fichte. — Le fondement métaphysique de la vie sociale, d’après M.  […] Comte, multiplie les actes de foi nécessaires à la vie sociale. […] Quand le doute a une fois attaqué un point de la vie intellectuelle et de la vie sociale, il se propage forcément de proche en proche, comme une carie qui gagne une dent après l’autre.

390. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juin 1885. »

Wagner poursuit l’étude des prodigieux instincts qui ont, dans la vie et dans l’art, préservé Beethoven de la corruption environnante. […] Elle signifie l’alliance, naturelle, nécessaire, des trois formes de l’Art, plastique, littéraire, musicale, dans la communion d’une même fin, unique : créer la vie, inciter les âmes à créer la vie. […] Mais quelle est, dans le champ étendu de la vie, la part spéciale que doit produire la Peinture ? […] Degas, le dominateur prodigieux de la vie plastique ; un tableau de M.  […] Whistler ; et une merveilleuse scène de la vie, une jouerie de jeunes filles, dans une cour, par M. 

391. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Elle a trop réfléchi sur la vie. […] Mais peu de vies sont ainsi. […] Je t’aimerai toute ma vie. […] Sa vie est-elle donc si pure ? […] Il en a maintenant pour la vie.

392. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre premier. De l’amour de la gloire »

Les routes qui conduisent à un si grand but, sont remplies de charmes ; les occupations que commande l’ardeur d’y parvenir, sont elles-mêmes une jouissance ; et dans la carrière des succès, ce qu’il y a souvent de plus heureux, c’est la suite d’intérêts qui les précèdent, et s’emparent activement de la vie. […] Si les Romains sont insensibles à l’éloquence de Cicéron, son génie nous reste ; mais où, pendant sa vie, trouvera-t-il sa gloire ? […] Les plus grandes découvertes ont été faites dans la retraite de l’homme savant, et les plus belles actions, inspirées par les mouvements spontanés de l’âme, se rencontrent souvent dans l’histoire d’une vie inconnue ; c’est donc seulement dans son rapport avec celui qui l’éprouve, qu’il faut considérer la passion de la gloire. […] L’homme vertueux ne fait de grands sacrifices que pour fuir la peine du remord, et s’assurer des récompenses au-dedans de lui : enfin, la félicité de l’homme lui est plus nécessaire que sa vie, puisqu’il se tue pour échapper à la douleur. […] L’homme accoutumé à compter avec l’histoire, ne peut plus être intéressé par les événements d’une existence commune ; on ne retrouve en lui aucun des mouvements qui le caractérisaient, il ne sent plus la vie, il s’y résigne.

393. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre IV : La philosophie — I. La métaphysique spiritualiste au xixe  siècle — Chapitre I : Principe de la métaphysique spiritualiste »

Comment pourrais-je même passer de l’un à l’autre sans interruption, sans solution de continuité, s’il n’y avait pas en moi, outre la conscience de cette pluralité phénoménale, la conscience d’une unité continue, qui est la trame de toute ma vie, et qui en fait même l’intérêt, comme dans un drame l’unité d’action est l’âme et la vie du drame ? […] La vie n’est donc pas seulement une existence, c’est une action, et le sujet pensant n’est pas seulement un être, c’est une force. […] Nous ne remontons par la mémoire que jusqu’à une certaine période de notre vie, et les intervalles vides de souvenir s’augmentent et grandissent à mesure que nous rétrogradons par la pensée. […] L’intensité de sa vie intérieure semble varier à tous les instants, et son être ne fait que monter ou descendre sans qu’on puisse mesurer ces diverses oscillations. […] Naville sur Maine de Biran, sa vie intime et ses écrits (5 juillet 1851).

394. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « L’abbé de Choisy. » pp. 428-450

Sa vie ressemble à une comédie des plus diverses et des moins vraisemblables, et l’on ne saurait dire avec lui où finit le déguisement. […] Son père avait passé sa vie dans les intendances, dans les ambassades, et il était, en dernier lieu, chancelier de Gaston, frère de Louis XIII. […] Il faut que je passe ma vie à la Cour avec mes amis, ou dans mon cabinet avec mes livres ». […] peut-être que par là ce seront les deux plus belles années de ma vie. […] Sa vie elle-même a son coin dans l’histoire comme une des anecdotes les plus singulières du Grand Siècle.

395. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Histoire » pp. 179-240

Où reprendre la vie psychique, où retrouver le for intérieur, où ressaisir l’humanité de ces morts ? […] Quoi donc, une manifestation plus émue de la personnalité de l’âme pendant sa vie terrestre ? […] Le lecteur ne doit pas s’attendre à trouver ici une suite de vies entières. […] Elle associera à cette vie, qui dominera le siècle ou le subira, la vie complexe de ce siècle ; et elle fera mouvoir, derrière le personnage qui portera l’action et l’intérêt du récit, le chœur des idées et des passions contemporaines. […] Par l’analyse psychologique, par l’observation de la vie individuelle et de la vie collective, par l’appréciation des habitudes, des passions, des idées, des modes morales aussi bien que des modes matérielles, nous voulons reconstituer tout un monde disparu, de la base au sommet, du corps à l’âme.

396. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

La vie consiste en sang. […] Toute la vie de Montaigne s’en est ressentie. […] Le mesme passage que vous feistes de la mort à la vie, sans passion et sans frayeur, refaictes le de la vie à la mort. […] … Nous troublons la vie, par le soing de la mort ; et la mort, par le soing de la vie : l’une nous ennuye ; l’aultre nous effraye. […] À lui seul appartient le souffle de la vie nouvelle.

397. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

Vie muette, animale, pleine d’étranges rêves, féconde en légendes. […] Le parfait répugne à la vie. […] Mais ce proverbe est aussi faux dans la vie des nations que dans celle des individus. […] Voilà ma vie ; je ne quitte pas mon cabinet une fois en quinze jours. […] Vingt millions d’hommes, de femmes et d’enfants, vingt millions de vies, vingt millions de vies qui s’entre-croisent et font une trame.

398. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre II. Lois de la renaissance et de l’effacement des images » pp. 129-161

À chaque instant, dans la vie courante, nous mettons cette règle en pratique. […] III Ce ne sont là encore que des conditions générales de la réviviscence ; on les obtient en comparant une image prise en un point quelconque de la vie à une autre image prise aussi en un autre point quelconque de la vie. […] « Un homme, dit Abercrombie, né en France, avait passé la plus grande partie de sa vie en Angleterre, et, depuis plusieurs années, avait perdu entièrement l’habitude de parler français. […] Des correspondances et des séparations semblables, mais partielles et temporaires, se rencontrent dans la vie courante65. […] Macnish, Philosophy of Sleep, p. 215. — Dr Azam, De l’amnésie périodique ou doublement de la vie.

399. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Les bénédictins eux-mêmes faillirent payer de leurs vies cette hospitalité suspecte. […] Les canzoni (odes) sont mortes, le sonnet vit et a donné la vie à Laure. […] Si l’emploi de tant de temps, de génie, d’artifices, avait eu un plus juste et plus digne objet, dans quel calme heureux et consolant tu verrais aujourd’hui s’écouler ta vie ! […] Tu as consumé sans fruit le printemps de ton âge, et peut-être en sera-t-il ainsi du reste de ta vie, jusqu’à la dernière soirée de ton hiver. […] Son déréglement de vie excita contre lui la haine des troupes.

400. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre septième. »

L’idée de l’humanité n’est plus une tradition confuse : c’est l’occupation même et la vie des intelligences. […] Quelle vie pouvait suffire à la satisfaire ? […] et qui peut se flatter dans une vie d’homme d’avoir assez appris, pour cesser de douter ? […] Mais ici ce n’est plus la sagesse humaine qui est la règle de la vie, c’est la religion. […] L’introduction à la vie dévote parut en 1608.

401. (1864) Études sur Shakespeare

Le joug de Rome était secoué, la vie monastique abolie. […] La matière était là, attendant l’esprit et la vie. […] Ce n’est là que la matière du drame ; ce n’est pas là que Shakespeare en cherchera la vie. […] Le besoin de la vie de famille s’est-il fait sentir à lui ? […] Une disposition naturelle à jouir vivement de toutes choses rendait également propre au bonheur d’une vie paisible celui qu’elle avait distrait des vicissitudes d’une vie agitée.

402. (1940) Quatre études pp. -154

La vie sportive n’y est pas négligée, comme bien on pense ; la vie sociale y est active. […] — Quelle vie ! […] Le grand poète était Tennyson : fut-il jamais plus heureuse vie ? […] La vie que nous menons sur cette terre, il n’en doutait pas un seul instant, n’est qu’un essai ; les âmes accèdent à une vie supérieure qui complète leur rêve. […] Encore moins peut-on se contenter des atomes grossiers dont parlaient Épicure et après lui Lucrèce : ne contenant rien d’analogue à la vie, comment donneraient-ils la vie ?

403. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

Son œuvre est un poème, sa vie une poésie : en lui naissance, patrie, nature, génie, vie, amour, infortune et mort, tout est d’un poète. […] Celui-là n’avait porté son imagination que dans ses poèmes ; sa vie avait eu la médiocrité et la régularité du bon sens. […] Beaucoup de pages de ces poésies intimes expliquent les mystères de son âme et de sa vie. […] Quelle perspective humaine nous restait-il à lui offrir pour nous faire désirer la continuation de sa vie ? […] Le porteur de cette lettre vous dira que Scipion Rossi, mon oncle, veut marier ma sœur avec un pauvre gentilhomme qui ne lui promet qu’une vie misérable.

404. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Balzac » pp. 17-61

Quel écrivain, quel moraliste, quel observateur, si spirituel et si original qu’il pût être, avait eu l’idée d’un Esprit des Lois de la vie élégante ? […] Un traité de la vie élégante, partout où il s’écrit, fût-ce en Chine, n’est jamais que cela. […] « Le dandysme — dit Balzac — est une hérésie de la vie élégante », et il a raison. […] Mais ils le redoublèrent, ils l’exagérèrent, ils lui donnèrent une vie et une intensité nouvelles ; car nommer les choses, c’est les créer, a dit Mahomet, ce grand métaphysicien en turban ! […] Les dandys de la bande du prince de Galles (bande est bien le mot), en tentant de s’élever au-dessus de la vie, tombèrent au-dessous.

405. (1890) Le réalisme et le naturalisme dans la littérature et dans l’art pp. -399

Après avoir largement participé à la vie générale des êtres, l’homme sentit se développer en lui la vie spirituelle. […] Selon le christianisme le bonheur de la vie future est subordonné à la sainteté de la vie présente. […] Il ne leur sera plus permis de s’abstraire et de se désintéresser de la vie courante. […] Quoi qu’il en soit, Tolstoï peint avec la vie de tous les jours la vie des grands jours. […] J’aurais seulement voulu faire penser à l’homme voué à gagner sa vie à la sueur de son front.

406. (1890) L’avenir de la science « Sommaire »

Sanctification de la vie inférieure. Unité de la vie supérieure. […] La réflexion attache à la vie. […] Grande vie désintéressée. […] Simultanéité de deux vies.

407. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Caro. Le Pessimisme au XIXe siècle » pp. 297-311

Il a tirebouchonné sa voie depuis Job jusqu’à Homère, depuis Homère jusqu’à Lucrèce, et depuis Lucrèce jusqu’à Leopardi, en passant par tous les Mélancoliques intermédiaires et séculaires qui ont souffert de la vie et qui ont poussé leur cri contre la douleur ! […] Par exemple, il se trompe sur Joseph de Maistre, qui n’a nullement maudit la vie parce qu’il a voulu que l’Expiation rachetât, aux yeux de Dieu, tout un monde en chute ! […] Pope aussi était contrefait, mais, pris dans l’étau de son corset de fer, il n’envoya jamais, du fond de cette torture, d’injure à Dieu et de crachat sur la vie, dont Dieu, qui veut qu’on se soumette à sa Providence, a toujours gardé le secret ! Parmi ces maudisseurs du don de la vie, j’aime encore mieux la femme que M.  […] eux, n’ont rien d’humain. — Les blessés de la vie qui saignent, qui ont reçu blessures sur blessures ; — les pessimistes sensibles qui s’acharnent contre la vie, dont ils souffrent, comme la bête mord le fer qui la frappe, sont au moins des hommes.

408. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Georges Caumont. Jugements d’un mourant sur la vie » pp. 417-429

Voilà, en deux mots, ces Jugements d’un mourant sur la vie, qui sont moins des jugements que des furies et des imprécations ! […] Jugements sur la vie, ne lui appartient pas. […] Âme cramponnée à la vie comme le chêne est attaché à la terre, sensibilité qui n’a rien de panthéistique, et pour qui l’univers tout entier a moins d’importance que les battements de son propre cœur ! […] elle est folle, elle est égarée, cette faible tête, à l’aurore d’une vie qu’elle va perdre, ce qui la bouleverse ; mais elle est belle encore, comme Oreste était beau quand il était en proie aux Furies. […] … Son éditeur (un ami au doigt sur sa bouche) ne le dit pas, et j’aurais pourtant bien voulu savoir le dernier mot de cette rugissante agonie, qu’il nous décrit, à mesure qu’elle vient, avec une rage plus forte que la vie.

409. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. J. Autran. Laboureurs et Soldats, — Milianah. »

La vie par le fer, ense et aratro, car la guerre, c’est la vie, malgré la mort qu’elle sème autour d’elle ; c’est la vie morale qui importe bien plus que la vie physiologique ! […] de me voir quitter par intervalle (ce n’est donc qu’un instant) les régions purement lyriques pour aborder le terrain de la réalité. » Et il ajoute, en chiffonnant une idée juste : « A l’origine des littératures, les scènes de la vie agricole et de la vie militaire constituent les plus fécondes sources d’inspiration (constituent une source, quelle poésie !)  […] Mais nous disons qu’il faut chanter la vie agricole et la guerre, parce que ces choses sont grandes, magnifiques, éternelles, et qu’en multipliant les formes sous lesquelles elles se traduisent aux yeux des hommes, elles n’ont pris ni un jour, ni une heure, aussi belles et plus belles peut-être qu’aux premiers moments de la création. […] Il faut l’énergie de Crabbe, par exemple, pour donner à une histoire de ferme ou d’hôpital le relief, la profondeur et l’intimité de vie sans lesquels la poésie n’est qu’une rimaillerie plus ou moins perfectionnée. […] Dans ce noir Lubeston, chargé d’antiques bois, Le tonnerre et les bois mugissaient à la fois, Le ciel y ruisselait, immense cataracte, Quelle vie, à cette heure, en fût sortie intacte ?

410. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Ronsard »

Quelques fragments de ce grand poète, qui est à la langue poétique moderne ce que Rabelais est à la langue de la prose, avaient suffi, en 1830, pour que la vie — la vraie vie — apparût dans ce qu’on croyait la mort, et pour que le génie de la poésie française, révolté enfin des compressions et des mutilations qu’il avait lâchement endurées depuis près de trois siècles, se reconnût, avec orgueil et acclamation, dans Ronsard. […] Mais tous, tous, tant qu’ils aient été et quoi qu’ils soient, ont été plus ou moins trempés dans ce cuvier de couleur vermeille qui est la couleur de la vie et de la poésie de Ronsard, et dont ceux-ci sont ressortis écarlates, ceux-là pourprés ou seulement roses, mais tous érubescents, tous teints de cette ardente couleur de la vie que les xviie et xviiie  siècles, voués à l’incolore, avaient effacé partout et fini par ne connaître plus ! […] C’est celle-là, qui n’est même ressuscitée que parce qu’elle était immortellement humaine ; que parce que nous étions las et dégoûtés des veines saignées à blanc, des cadavres exsangues et des poussières faites par les xviie et xviiie  siècles ; que parce que nous avions soif de la vie, et que nous l’avons reconnue, la vie, au premier soupir qu’elle a poussé et à la première pierre qu’on a dérangée à ce vieux tombeau de Ronsard ! […] Mais il n’y avait pas eu réellement de vie poétique organisée ; mais d’homme complet dans sa force et dans sa majesté de poète, il n’y en avait pas eu avant Ronsard, Ronsard est l’Adam de la poésie française, et, comme Adam, il est né homme, armé de toutes ses facultés ! […] Il le fut également dans son génie et dans sa vie.

411. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIe entretien. Cicéron » pp. 81-159

Quelques lignes d’abord sur sa vie, que nous avons écrite dans un autre ouvrage. […] Malheur à qui n’a pas été poète une fois dans sa vie ! […] « À quelle vie, Catilina, es-tu désormais condamné ! […] Ce fut l’époque poétique de sa vie ; le loisir et l’infortune le refirent poète. […] Voilà la vie de Cicéron, orateur et homme d’État : maintenant voyons ses œuvres.

412. (1890) L’avenir de la science « XVII » p. 357

Notre principe, à nous, c’est qu’il faut régler la vie présente comme si la vie future n’existait pas, qu’il n’est jamais permis pour justifier un état ou un acte social de s’en référer à l’au-delà. […] Ainsi, toujours l’homme a trouvé ouverte devant lui une grande école de vie supérieure. […] si nul ne l’a reçu à son enfance pour le faire naître à la vie morale ? […] Forte de toute la vie de la nation, elle en est le premier besoin et le premier droit. […] Imaginez une mort vulgaire pour couronner la vie de Jésus, quelle différence !

413. (1888) Portraits de maîtres

Partout il introduisit la vie et la nouveauté. […] Notre vie courte n’en fut pas moins entière. […] « Qu’est-ce que la vie ?  […] Qui n’eût voulu les guérir au prix de sa vie ? […] Ne dis plus jamais que tu ne peux rien pour moi, quand tu me rends la vie, la vie de l’âme.

414. (1925) Comment on devient écrivain

Ouvrez ses livres : c’est la vie même. […] La vie n’est pas bourrée que de monstres. […] Cette vie laborieuse formait leur idéal commun. […] Il faut donc copier la vie, pour rendre la vie ; et copier vos personnages dans la vie, si vous voulez que vos personnages vivent. […] Peint-on les choses d’après la vie ?‌

415. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre V. La Fontaine »

Dans cette vivacité et cette mobilité d’impressions, une vie s’en va à vau-l’eau : mais l’étoffe est riche pour la poésie. […] Ses légendaires distractions ne l’empêchaient pas de voir clair dans la vie : le caractère était mou et ployable en tous sens, mais l’intelligence était aiguisée et pénétrante. […] Elles sont d’abord un tableau de la vie humaine et de la société française. […] Regardez ses chats, ses lapins, ses chèvres, son héron : il dessine avec une précision, une vie étonnantes, la forme extérieure de l’animal, silhouette, attitudes, démarche. […] C’est du conte et de tous ses compléments lyriques, que se dégage la morale de notre poète, sa conception de la vie, du bonheur et du bien.

416. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre VII. L’antinomie pédagogique » pp. 135-157

L’un est fait de tous les états mentaux qui ne se rapportent qu’à nous-mêmes et aux événements de notre vie personnelle. […] Durkheim regarde comme la condition essentielle de la vie en société. […] Au point de vue de la réussite dans la vie, en encombrant l’esprit d’idéaux scolaires auxquels la vie donne souvent un démenti : ou point de vue du développement intellectuel, en soumettant l’intelligence à une discipline pour laquelle elle n’est pas faite. […] Il s’apercevra de la contradiction qui existe entre les idéaux scolaires et la vie réelle. […] Dans la vie il verra triompher une tout autre échelle des valeurs que celle du mérite.

417. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Lawrence Sterne »

Sérieux (stem veut dire sérieux en anglais) ; Sterne, au nom duquel la vie, cette farceuse, ajouta comiquement le titre de Révérend, comme si M.  […] Il le fut toute sa vie, mais naturellement, mais gracieusement, et de pied en cap, bien avant de songer à écrire son Tristram Shandy. […] » Sterne fut toute sa vie un bouffon de ce genre. […] Sterne, qui était faible de complexion, se rompit un vaisseau dans la poitrine, dont il cracha le sang toute sa vie. […] Son succès de Tristram Shandy, auquel il ajouta de nouvelles parties, ne s’épuisait pas, mais sa vie s’épuisa avant sa gloire et son génie.

418. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mlle de Lespinasse. » pp. 121-142

La vie de Mlle de Lespinasse commença de bonne heure par être un roman et plus qu’un roman. […] La vie de d’Alembert en devint plus douce, la considération de Mlle de Lespinasse s’en accrut. […] Du premier jour qu’elle fut à Paris, elle y parut aussi à l’aise, aussi peu dépaysée que si elle y avait passé sa vie. […] l’excès de mon inconséquence égare mon esprit, et le poids de la vie écrase mon âme. […] Elle recourt surtout à l’opium pour suspendre sa vie et engourdir sa sensibilité dans les attentes.

419. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Émile Zola » pp. 70-104

Zola emprunte ces éléments à la vie réelle, et les reproduit tels que sa mémoire et ses sens et les ont perçus et emmagasinés. […] Que cet amour de l’équilibre physique et moral n’est qu’une part d’un amour plus général, celui de la vie, un indice le montre. […] Et si les plaintes sur l’inutilité, la tristesse et l’odieux de la vie humaine ne sont point constantes dans les livres de M.  […] Mais il a le don suprême de la vie, il sait souffler sur un être et faire que les tempes battent, que les yeux regardent, que les muscles se tendent. […] Pour la classe bourgeoise, pour les gros manœuvres de la vie, il est inimitable.

420. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VII. Mme de Gasparin »

Or l’auteur des Horizons célestes est devenu fort, en ces neuf mois qui suffisent à créer la vie. […] Quel temps pour parler de la vie future ! car ce sujet n’est rien moins que la vie future et le secret de notre destinée éternelle. […] Vous n’y trouverez que ce problème résolu de la vie future, pressentie, et nécessitée par la misère de la vie actuelle et par la lettre, la lettre même des promesses divines. […] la vie dans le définitif, l’individualité dans l’harmonie ! 

421. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre II. Lord Byron. » pp. 334-423

On a maudit ses idées pendant sa vie ; on a tâché de dénigrer son génie après sa mort. […] Il a combattu toute sa vie contre le monde dont il est issu, et pendant sa vie comme après sa mort, il a porté la peine des ressentiments qu’il a provoqués et des répugnances qu’il a fait naître. […] Partout où est la vie, même bestiale ou maniaque, est la beauté. […] Quelle étrange vie que la leur, tour à tour reposée et violente ! […] Voyez Stendhal, Vie de Giacomo Rossini, et Stanley, Vie de Thomas Arnold.

422. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

Je n’eus guère là-bas de vie littéraire, sauf un jour un brusque rappel. […]        La vie et la mort, qu’est-ce ? […] Paterne Berrichon nous a conté ce qu’il savait (et il est le mieux informé) sur les détails de la vie de Rimbaud, vie d’ailleurs prédite théoriquement dans ses œuvres ; malheureusement, M.  […] Telle est cette œuvre courte et touffue indiquant le départ hors d’une vie ordinaire vers quelque vie mentale et personnelle, sur laquelle on ne nous donne pas plus de détails. […] Sans doute d’autres que Rousseau et Voltaire vécurent la vie des faits, Lamartine, Hugo ; mais ne se gardèrent-ils pas de confondre les genres, et n’y eut-il point deux parts dans leur vie et dans leurs livres ?

423. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre III. De la tendresse filiale, paternelle et conjugale. »

Bientôt les événements dans leur réalité nous présentent nos enfants élevés par nous, pour d’autres que pour nous-mêmes, s’élançant vers la vie, tandis que le temps nous place en arrière d’elle, pensant à nous par le souvenir, aux autres par l’espérance ; quels parents sont alors assez sages, pour considérer les passions de la jeunesse comme les jeux de l’enfance, et pour ne pas vouloir occuper plus de place parmi les unes que parmi les autres ? L’éducation, sans doute, influe beaucoup sur l’esprit et le caractère, mais il est plus aisé d’inspirer à son élève ses opinions que ses volontés ; le moi de votre enfant se compose de vos leçons, des livres que vous lui avez donnés, des personnes dont vous l’avez entouré, mais quoique vous puissiez reconnaître partout vos traces, vos ordres n’ont plus le même empire ; vous avez formé un homme, mais ce qu’il a pris de vous est devenu lui, et sert autant que ses propres réflexions à composer son indépendance : enfin, les générations successives étant souvent appelées par la durée de la vie de l’homme à exister simultanément, les pères et les enfants, dans la réciprocité de sentiments qu’ils veulent les uns des autres, oublient presque toujours de quel différent point de vue ils considèrent le monde ; la glace, qui renverse les objets qu’elle présente, les dénature moins que l’âge qui les place dans l’avenir ou dans le passé. Il n’est rien qui exige plus de délicatesse de la part des parents, que la méthode qu’il faut suivre pour diriger la vie de leurs enfants sans aliéner leur cœur ; car il n’est pas même possible de sacrifier leur affection à l’espoir de leur être utile, toute influence durable sur la conduite finissant avec le pouvoir du sentiment, le point juste n’est presque jamais atteint dans cette relation. La tendresse des enfants pour leurs parents se compose, pour ainsi dire, de tous les événements de leur vie ; il n’est point d’attachement dans lequel il entre plus de causes étrangères à l’attrait du cœur, il n’en est donc point dont la jouissance soit plus incertaine. […] Il est heureux, dans la route de la vie, d’avoir inventé des circonstances qui, sans le secours même du sentiment, confondent deux égoïsmes au lieu de les opposer ; il est heureux d’avoir commencé l’association d’assez bonne heure pour que les souvenirs de la jeunesse aidassent à supporter, l’un avec l’autre, la mort qui commence à la moitié de la vie ; mais indépendamment de ce qu’il est si aisé de concevoir sur la difficulté de se convenir, la multiplicité des rapports de tout genre qui dérivent des intérêts communs, offre mille occasions de se blesser, qui ne naissent pas du sentiment, mais finissent par l’altérer.

424. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre II. De la philosophie. »

Il faut qu’on ait appris à concevoir la vie passivement, à supporter que son cours soit uniforme, à suppléer à tout par la pensée, à voir en elle les seuls événements qui ne dépendent ni du sort, ni des hommes. […] Ce qui conduirait surtout à penser que la vie est un voyage, c’est que rien n’y semble ordonné comme un séjour. […] Voulez-vous laisser aller la vie au gré du vent qui lui fait doucement parcourir des situations diverses ? […] Vous le pouvez facilement ; et lorsqu’aucun des événements de la vie n’est précédé, ni suivi par de brûlants désirs, ni d’amers regrets, l’on trouve une part suffisante de félicité, dans ces jouissances isolées que le hasard dispense sans but. […] La douleur de la destruction se fait sentir avec toute la force de l’existence ; c’est assister soi-même à ses funérailles ; et, violemment attaché à ce triste et long spectacle, renouveler le supplice de Mézance, lier ensemble la mort et la vie.

425. (1890) L’avenir de la science « XIV »

Au surplus, ma complète ignorance de la vie réelle m’y rendrait tout à fait incompétent. […] Le but de la société est la réalisation large et complète de toutes les faces de la vie humaine. […] Certains ordres religieux qui appliquaient à l’étude cette tranquillité d’esprit, l’un des meilleurs fruits de la vie monastique, réalisaient autrefois ces grands ateliers de travail scientifique, dont la disparition est profondément à regretter. […] On fournit ainsi au contribuable, souvent matérialiste endurci, l’occasion, rare en sa vie, de faire un acte idéaliste. Le jour où il paie ses contributions est le meilleur de sa vie.

426. (1846) Études de littérature ancienne et étrangère

On sait peu de chose de sa vie. […] Le consulat de Cicéron est la grande époque de sa vie politique. […] La réponse que nous cherchons se trouvera dans la vie même du philosophe de Chéronée. […] C’est la Vie d’Apollonius de Thyanes, par Philostrate. […] Pour te débarrasser de la vie !

427. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

Mais, pour bien comprendre Horace, ce La Fontaine lyrique des Latins, il faut d’abord vous raconter sa vie dans les plus intimes détails, car les œuvres d’Horace et sa vie c’est une même chose. […] Écoutez donc cette vie. […] Pourquoi mourir, puisqu’une vie longue et douce s’ouvrait encore devant lui ? […] Je les ai beaucoup explorées moi-même au matin de ma vie. […] Son incurie et sa modestie avaient négligé de rassembler ses œuvres fugitives pendant sa vie.

428. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

On résume en un clin d’œil sa vie et ses œuvres ; on se demande : Qu’avons-nous perdu ? […] Voici sa vie en deux mots. […] Voilà la vie ! […] Au désert, la vie jusqu’à la tombe reste fidèle à la haine ou à l’amitié du berceau. […] me dit-elle ; je n’en ai plus ; elles n’ont pu supporter la vie du désert : je les ai renvoyées en Europe.

429. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

À vrai dire, ce projet demeura pendant toute la vie de l’auteur de Faust, comme durant la courte vie d’André Chénier, placé devant ses yeux comme un idéal à réaliser. […] Vous n’irez pas sans doute chercher la justice en dehors de la vie ? La vie commence avec les végétaux. […] la vie est assurée… Qu’importent que les individus disparaissent, après avoir accompli leur tâche et semé la vie ? […] Sur une pareille matière, il fallait répandre à flots la lumière, la couleur, la vie.

430. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Non seulement il ne s’élève pas par de semblables lectures, mais il y perd le goût de la vie réelle, de celle qu’on ne rêve pas, et qu’on subit. […] Le grand poète sait bien qu’il faut s’arrêter sur ces idylles brèves des vies misérables ; que la pitié de ceux qui lisent le lui demande. […] Et ainsi le roman anglais est un roman plus que le nôtre près du peuple, plus conforme au cours même de la vie et mieux en harmonie avec l’esprit des simples. […] Nous ressemblons à ces gens naïfs qui essayent de toucher un arrérage de rente sans présenter un certificat de vie. […] Prenez la vie comme elle est, de préférence la vie si peu connue des travailleurs, de ceux qui sont presque toute la France, et dites-la.

431. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le marquis de la Fare, ou un paresseux. » pp. 389-408

Et qui donc débuta plus agréablement que lui dans la vie ? […] Il passait sa vie à Saint-Maur chez M. le Duc, à Anet ou au Temple chez les Vendôme, à l’hôtel de Bouillon chez la nièce de Mazarin. […] Il dormait partout les dernières années de sa vie. […] Et c’est ici qu’on a droit de s’élever contre cette philosophie et cette théorie que La Fare avait voulu ériger d’après lui-même, et qu’on peut lui dire : Divin ou humain, il me faut un ressort dans la vie, sans quoi tout se relâche ! […] Que chacun, de son mieux, fasse et enfonce son sillon dans la vie.

432. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre V. Séductions pour la compréhension de la psychologie indigène. — Conclusion »

. — B) Idées ; Indifférence pour la vie. […] Pour atteindre ces buts divers, le noir sacrifiera tout, même sa vie qu’il considère comme chose négligeable, car il ne voit au-delà de la vie que ce pis-aller peu effrayant : le néant. […] Ce mépris de la vie est facile à constater dans les contes. […] Ils acceptent que leur vie soit courte, sous condition qu’elle soit bonne. […] Et en effet la conception de la vie reste profondément matérialiste malgré tous les enseignements de l’Islam.

433. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « « L’amour » selon Michelet » pp. 47-66

Ce travail dure toute la vie. […] C’est une succession, souvent longue, de passions fort différentes, qui alimentent la vie et la renouvellent. » Autrement dit, un amour, c’est une vie. […] » Cette idée le ravit, que la vie de la femme soit rythmée, par les lunaisons, ainsi qu’un beau poème. […] Renan y était venu vers la fin de sa vie, comme on le voit dans la préface de l’Abbesse de Jouarre. […] La vie est plus simple, plus plate, moins montée de ton.

434. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Verlaine, Paul (1844-1896) »

Contre cette loi, le poète n’est pas sans s’être rebellé, mais, en somme, il la subit, et le drame de sa vie lui a fait la douloureuse atmosphère nécessaire au drame de son œuvre, — le simple duel du rêve et de la vie, de l’esprit et de la chair. […] Tu es le meilleur et le plus heureux. » [La Vie littéraire (1892).] […] Il a contribué à réconcilier la littérature avec la vie. [La Vie et tes Livres (1896).] […] Il est vrai que, sauf les plaquettes publiées à la fin de sa vie, il n’a pas fait, à proprement parler, de mauvais livre.

435. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VI. »

Tout s’explique dans ce prodige, non pas seulement par l’heureuse condition du climat et de la race, mais aussi par les accidents de la vie sociale et par la Culture que recevait l’homme. […] Selon diverses notions de sa vie, moins connue que ses vers, il visita l’Égypte, et partagea la fortune d’un frère aventureux comme lui, qui servait dans les armées du roi d’Assyrie. […] Par là même, sa vie réelle est peu connue ; et son histoire semble une légende mythologique. […] Avant ces nouveaux détails, il n’y avait sur sa vie que la tradition de Leucade et l’épître romanesque d’Ovide sur cette tradition ancienne, si elle n’est vraie. […] Il n’y a donc plus qu’à douter du dénouement comme du reste, peut-être, de la vie de Sapho.

436. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre V. Des trois ordres de causes qui peuvent agir sur un auteur » pp. 69-75

Il est permis de croire que l’exaltation religieuse de Pascal, son renoncement si brusque et si absolu à la vie du monde, voire même à la vie scientifique, furent dus en grande partie au mal obscur et grave qui l’atteignit à la fleur de l’âge et le coucha si jeune au tombeau. […] Il faudrait plutôt l’étudier sur la masse restée sédentaire et par conséquent ayant subi, sa vie durant, l’action continue des mêmes causes naturelles. […] Soumettez un caractère faible à une éducation sévère et rigide ; il en restera ployé pour toute sa vie. […] Puis, c’est la vie du cœur : amour, amitié, haine, la vie politique avec ces grands événements où l’individu est enveloppé et roulé comme une goutte d’eau dans un fleuve. Ajoutez la vie mondaine, les salons, les cafés, les théâtres, les concerts, les fêtes publiques, les voyages.

437. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le marquis de Grignan »

Mais pour son compte particulier, ce Grignan des Grignans n’ajouta, lui, à sa vie obscure, qu’une mort obscure. […] Il était entré dans la vie par la plus large, la plus triomphale, la plus appienne des grandes naissances… La race dont il descendait était presque royale à force d’être féodale, et elle gouvernait la Provence depuis des siècles. […] Ils sont tous comme lui, — à moins que d’être des grands hommes, plus hauts que tous les marquis ; ils sont tous, individuellement, dans leur vie, ce qu’il fut dans sa vie. […] Telle était la vie générale, la vie régulière, correcte, irréprochable, réglée comme un papier de musique… militaire et dansante, de toute la noblesse française au temps de Louis XIV, de ce roi qui fut aimé de sa noblesse autant que de La Vallière, et qui ne méritait ni de l’une ni de l’autre le sentiment qu’il eut de leur immortelle fidélité ! Et c’est là ce qui donne tout à coup une importance et une grandeur à cette histoire : c’est que la vie du marquis de Grignan est la vie de tous ces anciens et puissants féodaux qui sont devenus des gentilshommes de cour, — de simples gentilshommes par amour du roi !

438. (1898) La poésie lyrique en France au XIXe siècle

À ces impressions d’enfance, ajoutez les impressions de la vie de famille. […] Ou, au contraire, pensons-nous que le dernier jour de cette vie mortelle est le commencement d’une autre vie, alors, c’est cette autre vie qui importe et c’est dans cette autre vie qu’il faut mériter le bonheur. […] Il traverse la vie sans rien connaître de ses mesquineries. […] Alfred de Musset pense que dans la vie il n’y a que l’amour. […] Car, si les petites gens ont droit à la vie poétique, c’est pourquoi ?

439. (1923) Paul Valéry

Mais l’une et l’autre se ressemblent en ce qu’elles créent directement de la vie sans passer par l’imitation de la vie donnée dans la nature. […] par le diamant fatal, par le contact de la vie à vivre. […] La puissance de la vie est là. […] Il est lui-même, il fait sa partie dans cette nécessité étrange où nous sommes de vivre non pas une vie, mais deux vies, deux vies alternées, et celle du sommeil peut être la plus vraie. […] L’argument de la flèche me nie, nie la vie en niant le changement.

440. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Paul Nibelle »

Ainsi que nous le disions plus haut, la qualité suprême de cette trilogie romanesque c’est une remarquable sensibilité touchée par la vie et qui rend éloquemment son premier accord. […] la vie est faite (et le talent aussi !) […] Mais quand la nature ne le donne pas, la vie peut le donner avec la culture de ses douleurs, et Nibelle, qui est au début de la vie, n’en a pas encore reçu tous les dons ! […] Sensible et vibrant comme il l’est, avec ce beau flot de sang vermeil qui ne bout pas, mais qui circule si largement dans ces Légendes de la Vallée où les tièdes impressions de la réalité nous montent au front comme des émanations de vie, l’auteur de Berthe et du Chercheur de Rives n’a-t-il donc pas mieux à faire qu’à se plonger, masque de païen sans visage, dans l’odieuse tristesse d’Épicure ? […] Grâce à cette faculté caméléonesque, que, de tous les penseurs dans l’art et dans l’humanité, Shakespeare eut au degré le plus incomparable, et que Walter Scott, son descendant en ligne directe, et Gœthe, son descendant en ligne collatérale, eurent tous les deux après lui, l’auteur du Prométhée put singer puissamment la vie de cette société morte, dont les beaux Vampires de la Renaissance avaient tari le cadavre de leurs lèvres brillantes et enivrées.

441. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Egerton Castle est fidèle, tant il y passe de mouvement et de vie. […] Ses yeux sont petits ; toute la vie semble s’être concentrée en eux. […] Marie Mancini voulait revoir la France et l’oublieux qui avait brisé sa vie. […] De là le monde où nous sommes, et la vie ! […] Suivent les historiettes de la vie galante.

442. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

La moyenne de la vie est de quarante ans. C’est vraiment trop d’humanités dans la vie de l’humanité, et un jour elle retournera à la vie sauvage, à la vie agricole et chasseresse, à la vie des temps, où l’homme vivait réellement les années qu’il passait sur cette planète. […] Voyant un moment les yeux du docteur se tourner vers le petit plâtre, d’un geste allant de sa mère à sa triste personne, elle disait : « C’est cela seul qui peut me faire supporter la vie, la vie telle que je l’ai !  […] Un jeune homme fatigué, lassé de la vie, revient dans son pays, dans la Camargue, avec ses fièvres et ses eaux. […] Je lui fais raconter son horrible vie, cette vie, où il existe encore des peines corporelles d’un code du temps des galères, comme la double boucle.

443. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie, II, 38.] […] Ce que le mouvement même de la vie nous dérobe, nous ne lisons ses romans que pour l’y découvrir. […] Et quand nous ne vivons pas ainsi, nous sommes blessé d’une façon éternelle dans notre vie présente, ce qui revient à dire que nous sommes vicié dans notre vie éternelle » [Cf.  […] Collignon, L’Art et la vie de Stendhal, Paris, 1868 ; — A.  […] Ledrain, Renan, sa vie et ses œuvres, Paris, 1892 ; — James Darmesteter, Notice sur la vie et l’œuvre de M. 

444. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

Mahaffy traite expressément de la vie sociale et de la pensée des Grecs. […] L’art est dans la dépendance de la vie. […] L’aspect visible de la vie ne contient plus désormais pour nous le secret de l’esprit de la vie. […] « L’Irlandais, nous dit-il, a répudié les réalités de la vie, et les réalités de la vie se sont montrées les plus fortes ». […] Il est passif, et il accepte les lois de la vie.

445. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

C’est cette vie brillante des feux qui ne s’allument qu’une fois, de la flamme, vierge et céleste, d’un premier amour, et qui conduit deux êtres charmants à la mort partagée, à la tombe partagée, comme fut partagée en un clin d’œil toute leur vie ! […] Voyez, en effet, ces nuances diverses de la vie, qui n’en sont pas les dégradations ! […] Mais Shakespeare, sur la vie duquel plane un si mystérieux silence, Shakespeare a-t-il vraiment été cet homme-là, et d’où le savent ceux qui l’affirment ?… Déduire la vie d’un homme de ses œuvres, cela n’est pas très sûr. […] Balzac l’intérêt de la vie actuelle et l’intérêt aussi de la passion fouillée et épuisée dans le cœur de l’homme où l’on va la chercher, quel qu’il soit !

446. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

La vie d’un homme ne contient pas deux œuvres pareilles. […] La vie de famille, entremêlée des travaux de sa place, suffisait à ses désirs. […] Toute sa vie jusqu’ici s’est passée en lectures et en conversations. […] une occasion de vivre, mais non pas la vie elle-même. […] Sténio débute dans la vie.

447. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Préface »

S’imaginer que les menus détails sur sa propre vie valent la peine d’être fixés, c’est donner la preuve d’une bien mesquine vanité. […] Cela est bien ; il faut continuer : la vie est au bout de cette dissection à outrance. […] L’oubli et le silence sont la punition qu’on inflige à ce qu’on a trouvé laid ou commun, dans la promenade à travers la vie. […] Le plus simple écolier sait maintenant des vérités pour lesquelles Archimède eût sacrifié sa vie. […] Il ne se plaignit jamais de la vie, quoique la vie n’ait guère eu pour lui que les récompenses qu’on se donne par les joies de l’intérieur.

448. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

Voilà le caractère de Pétrarque, racontons sa vie. […] Disons le mot : sa vie est le roman d’une grande âme. […] On pressent que nous allons parler de sa passion pour Laure, passion qui fut sa vie, sa faute et sa gloire. […] J’habite Parme, j’y passe ma vie dans l’église ou dans mon jardin. […] La vie qu’elle avait menée était si pure, que son âme ne pouvait pas être troublée par l’incertitude de l’avenir.

449. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre cinquième. Genèse et action des principes d’identité et de raison suffisante. — Origines de notre structure intellectuelle »

II. 4° Les lois de la vie physiologique et sociale. — Leur part dans notre structure intellectuelle. […] La sélection naturelle, en effet, présuppose elle-même les lois physiologiques ; les « accidents heureux » de la vie impliquent la vie même avec ses tendances fondamentales. […] Il n’est pas, comme le croient les sensualistes, un résultat tardif de l’expérience extérieure ; il est une nécessité primitive, un postulat pratique, une thèse nécessaire à la vie même et sans cesse confirmée par la persistance de la vie. Outre les nécessités de la vie physiologique, il en est d’autres encore qui ont contribué, dans une large mesure, à notre structure cérébrale et intellectuelle : ce sont les nécessités de la vie sociale. […] Sensation et réaction motrice, c’est-à-dire volonté, voilà le fond de la vie.

450. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Je lançai ces deux âmes sœurs, mais devenues étrangères l’une à l’autre, dans la carrière de leur évolution à travers les modes de leur vie renouvelée. […] C’est pendant quarante ans d’une pareille vie que la traduction et les notes de M.  […] Le poète qui allait venir avait donc sa place marquée dans le temps. » « Être conçu dans l’exil et y mourir », ajoute Ozanam, « remplir de hautes magistratures et subir les dernières infortunes, ce destin a été celui de beaucoup d’autres ; mais d’autres circonstances avaient ménagé à Dante une autre vie que la vie publique, une vie de cœur dont il faut, pour le comprendre, pénétrer les mystères. […] « Ma vie est repliée derrière moi comme la tente des pasteurs. […] « J’accomplis aujourd’hui ma quarantième année, plus que la moitié du chemin ordinaire de la vie.

451. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

De 1806 à 1870 — depuis Iéna jusqu’à Sedan — la vie littéraire, en Allemagne, fut confondue avec la vie politique et sociale. […] Enfin, une vie plus douce semble commencer. […] C’est beaucoup, pour une vie si courte. […] Ils haïssaient la grossièreté de la vie des camps. […] Jamais de la vie !

452. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

A son retour, il reprit, plus que jamais, son train de vie qu’il n’avait guère interrompu en terre papale, et mourut de débauche avant quarante ans. […] Après plusieurs voyages, retiré aux environs de Paris, il commençait une vie heureuse dans laquelle l’étude et l’amitié empiétaient de plus en plus sur les plaisirs, quand la Révolution éclata. […] Regnier, dans le cours de sa vie, n’eut qu’une grande et seule affaire : ce fut d’aimer les femmes, toutes et sans choix. […] Dans ce chef-d’œuvre, une ironie amère, une vertueuse indignation, les plus hautes qualités de poésie, ressortent du cadre étroit et des circonstances les plus minutieusement décrites de la vie réelle. […] Il avait bien pu, dans un moment d’amoureuse ivresse et de découragement moral, écrire à de Pange : Sans les dons de Vénus quelle serait la vie ?

453. (1890) L’avenir de la science « V »

Philosopher est le mot sous lequel j’aimerais le mieux à résumer ma vie ; pourtant, ce mot n’exprimant dans l’usage vulgaire qu’une forme encore partielle de la vie intérieure, et n’impliquant d’ailleurs que le fait subjectif du penseur solitaire, il faut, quand on se transporte au point de vue de l’humanité, employer le mot plus objectif de savoir. […] Appliquée à la nature, elle en a détruit le charme et le mystère, en montrant des forces mathématiques là où l’imagination populaire voyait vie, expression morale et liberté. […] Sans doute ce monde enchanté, où a vécu l’humanité avant d’arriver à la vie réfléchie, ce monde conçu comme moral, passionné, plein de vie et de sentiment, avait un charme inexprimable, et il se peut qu’en face de cette nature sévère et inflexible que nous a créée le rationalisme, quelques-uns se prennent à regretter le miracle et à reprocher à l’expérience de l’avoir banni de l’univers. […] Un homme conséquent dans son système de vie est certainement un esprit étroit. […] Voyez aussi Méthode pour arriver à la Vie bienheureuse, 4e leçon).

454. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE RÉMUSAT » pp. 458-491

Toute sa vie, elle a écrit beaucoup de lettres, et longues, qui se sont conservées la plupart et pourraient se recueillir. […] On peut y ressaisir sous d’autres noms le calque ou le reflet de ses propres impressions successives dans sa vie de palais. […] C’est toute une vie intime, une veine cachée au monde, et dont il ne se doute pas. […] La religion, hors dans certains cas particuliers, veut une vie active. […] Laissez faire à la vie et au temps pour nous en apporter.

455. (1913) La Fontaine « I. sa vie. »

sa vie. […] Aussi je me suis demandé si je vous dirais la vie de La Fontaine. […] Nous n’avons rien sur sa vie d’étudiant en droit. […] Mais la vie de La Fontaine à Paris est maintenant celle-ci : c’est la vie de la société des quatre amis, comme on l’a appelée. […] La Fontaine, évidemment, n’a pas eu une belle vie.

456. (1927) Approximations. Deuxième série

Dans « André Maurois Ariel ou la vie de Shelley », Du Bos relève le péril à traiter de la vie d’un homme de génie dont la poésie naît de l’absence de toute attache à la vie. […] Ta vie est-elle à toi ? […] — Tu es à moi, dit-il, jure-le, pour toute la vie ! […] Le poème s’interrompt sur ce pathétique hémistiche : « Alors qu’est-ce que la vie ? […] Vie de Henri Brulard, édition Champion, t. 

457. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIII. Des tragédies de Shakespeare » pp. 276-294

Il fait sentir cette impression redoutable, ce frisson glacé qu’éprouve l’homme, alors que, plein de vie, il apprend qu’il va périr. […] La protection tutélaire qu’ils peuvent accorder au timide objet de leur choix, la gloire qu’ils peuvent réfléchir sur une faible vie, est leur charme le plus irrésistible. […] La folie, telle qu’elle est peinte dans Shakespeare, est le plus beau tableau du naufrage de la nature morale, quand la tempête de la vie surpasse ses forces. […] La société lui retire ce qui est la vie, avant que la nature lui ait donné la mort. […] Enfin les caractères tragiques seront-ils tirés des souvenirs, ou de l’imagination, de la vie humaine, ou du beau idéal ?

458. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre III. L’écrivain »

Il s’agit de peindre toute la vie humaine, et non plus seulement les parties défendues de la vie humaine. […] Les paysans s’y trouvent, et à côté d’eux les rois, les villageoises auprès des grandes dames, chacun dans sa condition, avec ses sentiments et son langage, sans qu’aucun des détails de la vie humaine, trivial ou sublime, en soit écarté pour réduire le récit à quelque ton uniforme ou soutenu. […] Tâchez de n’être point sot, de connaître la vie, de n’être point dupe d’autrui ni de vous-même, voilà, je crois, l’abrégé de ses conseils. […] Il veut qu’on suive « ses leçons », qu’on mette à profit cette vie éphémère. Il loue Epicure, il parle de la mort en païen, il voudrait, comme Lucrèce, « qu’on sortît de la vie ainsi que d’un banquet, remerciant son hôte. » Il ne semble pas songer qu’il y ait quelque chose au-delà de la vie et du plaisir.

459. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre IV. Littérature dramatique » pp. 202-220

Ghéon (Le Pain, l’Eau de Vie) sont plus âpres. […] « Le théâtre, ce miroir de la vie, est un mouleur formidable de l’âme des foules et même de l’âme de l’élite. Car il agit sur l’être humain tout entier : sens, âme, esprit ; et il agit par un exemple, par une action éloquente, aussi réelle et plus intense que la vie. […] Mais placez à son centre l’âme consciente avec tous ses pouvoirs, faites rayonner à son foyer incandescent la divine Psyché, déployez ses ailes — et le théâtre sera le miroir de la vie meilleure, l’éducateur du peuple, l’initiateur qui conduit l’homme à travers la forêt de la vie et les mirages du rêve au sommet des plus hautes vérités. […] Charles Méré développe des théories intéressantes sur l’avenir et la vie de la tragédie moderne.

460. (1860) Ceci n’est pas un livre « Décentralisation et décentralisateurs » pp. 77-106

— Est-il possible de se laisser émouvoir par un poète qui donne — dans ses vers — sa vie pour sa bien-aimée, et refuse un manchon de trente francs à sa femme ! […] Mais, ô décentralisateurs, ce que vous appelez la fièvre, n’est-ce pas tout bonnement la vie ? Cette vie, cette activité de la pensée, c’est la centralisation qui la donne et qui peut seule la donner. C’est de ce contact perpétuel des intelligences réunies, de cet échange incessant des idées — de la main à la main — que sort la vie ! […] Et puis, en somme, nous sommes dans une époque d’activité, de vie, — de vie forcenée, de fièvre, comme vous dites.

461. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’Empire Chinois »

Ajoutons que cette place éminente, l’abbé Huc ne la devra pas uniquement aux circonstances de sa vie et à l’acquis de son voyage, mais à des qualités personnelles que la Critique ne peut oublier. […] Si les philosophes du salon de madame Necker reconnaissaient, un soir, « qu’un caractère est toujours simple quand une seule chose l’intéresse », comment un missionnaire, qui n’a que l’idée fixe de sa foi à propager, pourrait-il manquer, quoi qu’il fasse, de cette simplicité qui est la plus haute expression humaine dans l’ordre de l’intelligence ou de la vie ? […] dans le mépris des enfants pour la mère, ne reboira pas la vigueur et la vie dans ce lait des mères, méprisé comme l’eau. […] Bien des esprits plus fanatiques que ce prêtre, transformé en observateur, n’en proclameront pas moins la supériorité de la Chine et croiront à la force de sa vie, parce qu’ils verront dans le livre même de Huc ces mouvements d’un peuple rusé, vénal, mercantile, actif, fripon, et par-dessus tout spirituel, qui survivent à la vraie vie éteinte, la vie morale, la vie de la conscience et du cœur. […] Il a celui-là qui, luxe inutile pour les individus comme pour les peuples, orne la vie, mais n’est pas la vie, et qui n’empêche pas de mourir !

462. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Goethe »

Baschet, — c’est le passage de sa vie de jeune homme encore incertaine à sa vie d’auteur triomphale et olympienne. » Goethe passait dieu. […] La pensée et l’art étaient plus pour lui que la vie. […] On ne le trouve même pas dans ces lettres, qui ne sont plus l’art comme Werther, mais la vie, un fragment de la vie, et qu’un art stérilement littéraire n’a pas manqué de glacer. […] Il n’y a que celle-là qu’il eut toute sa vie à son coude, cet Extérieur, et hors de laquelle on peut dire qu’il ne voyait rien. […] À force de fouiller dans ces êtres indécis indiqués par Goethe en quelques traits parfois puissants, mais toujours rares, Saint-Victor a fini par les accoucher de la passion et de la vie.

463. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Vie de la Révérende Mère Térèse de St-Augustin, Madame Louise de France »

Vie de la Révérende Mère Térèse de St-Augustin, Madame Louise de France Vie de la Révérende Mère Térèse de Saint-Augustin, Madame Louise de France, par une religieuse de sa communauté ; Louis XV et sa famille, par H.  […] Si c’avait été la vie de quelque irrévérente et scandaleuse cabotine, on en aurait eu pour quinze grands jours de jérémiades dans les journaux sur le malheur d’avoir une cabotine de moins dans Paris, et les plumes les plus célèbres auraient mis leur honneur à faire queue de paon à sa mémoire. […] Chateaubriand, qui en était un très fastueux, Chateaubriand, vieux d’âge et plus vieux encore de mépris, avait eu, un jour, la sombre fantaisie d’écrire, par mépris des choses contemporaines, la vie du trappiste Rancé, et son livre avait été sa Trappe, à lui, d’où il nous disait qu’il fallait mourir. L’obscure religieuse qui a écrit la Vie de la Mère Térèse de Saint-Augustin, n’a ni la splendeur ni le mépris de Châteaubriand. […] Et comme l’amour même de Madame Louise pour son père Louis XV, au nom duquel elle offre sa vie en expiation et en sacrifice, pourrait paraître encore un sentiment par trop divin à la petite raisonnette humaine, ce ratiocinant Bonhomme se rejette à « l’ascendant du prêtre !

464. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

La vie n’est pas gaie. […] On y sent un idéal de forte vie. […] Il est vaste, mouvant, animé, plein de vie. […] Cet ordre assure la sécurité de la vie. […] Sa vie entière est une idée suivie.

465. (1902) Le critique mort jeune

La tombe rendait la vie. […] C’est aussi la condition même de la vie. […] J’ai le droit de refaire ma vie. […] Retournons à la vie sincère du pithécanthrope notre aïeul. […] La vie était trop courte : tant de labeurs, de réformes !

466. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « François Villon, sa vie et ses œuvres, par M. Antoine Campaux » pp. 279-302

François Villon, sa vie et ses œuvres, par M.  […] En fait de joyeuse vie, le fond des traditions ne change pas. […] Il dut cependant quitter Paris, et pendant quatre ans entiers il mena une vie errante et en France et aux frontières de France : l’idée de suicide lui traversa un instant l’esprit. […] On ne sait rien de la vie du poète après Le Grand Testament. […] Une idylle, composée, il y avait quatre-vingts ans environ, par un ancien évêque de Meaux, Philippe de Vitry, sur le bonheur de la vie champêtre, continuait de faire fureur, et le bûcheron Franc-Gontier et dame Hélène sa femme (un Philémon et une Baucis plus jeunes) recrutaient, parmi les badauds de la cité, bien des admirateurs à froid de la vie des forêts, louant la médiocrité non dorée, l’eau pure du ruisseau et le gland du chêne.

467. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. » p. 232

d’où vient que tu t’affliges presque de cette preuve incontestable de l’immortalité de notre vie ? […] par l’humble Thisbé, qui use sa vie au service de ce littérateur. […] Vers la fin, elle y mettait sans doute aussi de la réserve et se privait de les voir, sentant qu’elle vivait d’une tout autre vie. […] Combien la vie est dure et marâtre puisqu’elle amène des hommes d’un tel mérite à devenir ce que celui-ci devient… et deviendra ! […] Sans être plus méchants que nous, les riches ne peuvent absolument pas comprendre que l’on n’ait pas toujours assez pour les besoins les plus humbles de la vie.

468. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Madame de Krüdner et ce qu’en aurait dit Saint-Évremond. Vie de madame de Krüdner, par M. Charles Eynard »

Vie de madame de Krüdner, par M.  […] Charles Eynard, à qui l’on doit déjà une Vie du célèbre médecin Tissot, prépare depuis longtemps une biographie complète de Mme de Krüdner. […] Eynard, elle passait sa vie à lui prouver sa tendresse par des attentions infructueuses à force de délicatesse. […] « La vie ressemble à la mer, qui doit ses plus beaux effets aux orages. […] Une vie comme celle de Mme de Krüdner, et de la façon dont vient de l’écrire M. 

469. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Gil Blas, par Lesage. (Collection Lefèvre.) » pp. 353-375

On ne sait de sa vie que bien peu d’événements. […] Cela m’amuse ; cela me détourne de mal faire. » — L’innocente vie ! […] Toutes ces scènes chez l’archevêque sont admirables de naturel, et respirent une douce comédie insensiblement mêlée à toutes les actions de la vie. […] Cette sorte de dissidence, poussée jusqu’à l’aversion, se marque dans tous les actes de sa vie littéraire. […] Sur la fin de sa vie il n’avait le plein usage de ses facultés que vers le milieu de la journée, et on remarquait que son esprit montait et baissait chaque jour avec le soleil.

470. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Murger, Henry (1822-1861) »

Murger, Henry (1822-1861) [Bibliographie] Scènes de la vie de Bohême (1851). — Le Pays latin (1851). — Scènes de la vie de jeunesse (1851). — Le Bonhomme jadis, un acte (1852). — Propos de ville et Propos de théâtre (1853 et 1859). — Scènes de campagne (1854). — Le Roman de toutes les femmes (1854). — Ballades et fantaisies (1854). — Le Sabot rouge (1860). — Le Serment d’Horace (1860). — Les Nuits d’hiver (1861). […] Ses meilleurs endroits sont toujours les ébauches faciles, assez gracieuses dans leur facilité, d’un homme qui, peut-être, sera un artiste demain… En parcourant ces pages incorrectes et lâchées, et ces vers dans lesquels l’émotion ne peut sauver le langage, on a senti que cette langue de poète avait le filet… On ne le lui coupa pas et jamais il ne se l’arracha… Dans ses Nuits d’hiver comme dans sa Vie de Bohême, il n’a pas plus d’inspiration personnelle qu’il n’a de style à lui. […] , mais les quelques gouttes qui ne sont pas tombées de cette coupe du pauvre ne lui ont jamais échauffé le front, pour lui communiquer la chaleur profonde, la vraie vie et la fécondité. […] Théophile Gautier Avec Murger s’en va l’originalité la plus brillante qu’ait produite le Petit Journal ; car c’est là qu’il a fait ses premières armes et qu’ont paru d’abord les Scènes de la vie de Bohême qui sous forme de livre et de pièce devaient obtenir un si vif succès.

471. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Le caprice gouverne sa vie, et son cœur ne connaît pas le repentir. […] Bon gré, malgré, il faut rire en écoutant le récit de cette vie joyeuse et folle. […] C’est là pourtant la vie du bohémien. […] Régina est libre ; elle attend l’homme qu’elle aime, à qui elle a confié sa vie. […] Quelque parti qu’ils prennent, leur vie est sauve.

472. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Non, mais pour un développement de vie intérieure. […] Le Maître que j’ai le plus respecté dans ma vie, M.  […] Elle risque de dépersonnaliser l’esprit, en substituant l’image de la vie à la vie même, l’expression de la réalité à cette réalité. […] Les fonctions inconscientes de la vie physiologique ne sont pas identiques aux fonctions conscientes de la vie intellectuelle et morale. […] à propos de la Prodigieuse vie d’Honoré de Balzac, par M. 

473. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section III. Des ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la bienfaisance. »

La bonté existe en nous comme le principe de la vie, sans être l’effet de notre propre volonté ; elle semble un don du ciel comme toutes les facultés, elle agit sans se connaître, et ce n’est que par la comparaison qu’elle apprend sa propre valeur. […] Lorsqu’on est fidèle à cette résolution, ces hommes mêmes qui troubleraient le repos de la vie, si l’on se rendait dépendants de leur reconnaissance, vous donnent cependant des jouissances momentanées par l’expression de ce sentiment. […] Qu’il est heureux celui qui a sauvé la vie d’un homme ! […] on ne sait pas ce qu’on donne en sauvant la vie, mais en vous arrachant à la douleur, en renouvelant la source de vos jouissances, on est certain d’être votre bienfaiteur. […] quand le vautour est au cœur, quand il dévore le principe de la vie, c’est là qu’il faut porter ou le calme ou la mort.

474. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Charles Dickens »

S’il parvient à mettre debout quelque être portant les stigmates composites de la vie, c’est par surcroît et par à côté de l’émotion qu’il lui inspire. […] Ses peintures de passion ne décrivent l’amour qu’en termes tout à fait vagues et, bien que son livre de notes, publié dans la Vie de J. […] Les œuvres d’art sont l’image apaisée de la vie. […] Ce fut là une mauvaise passe dont Dickens se souvint toute sa vie, avec un mélange d’humiliation, de colère, qu’il ne surmonta jamais. […] Il eut les dehors, le caractère, la vie, l’art surtout d’un enthousiaste.

475. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Theuriet, André (1833-1907) »

. — Contes de la vie de tous les jours (1887). — L’Affaire Froideville (1887). — Contes de la vie intime (1888). — Amour d’automne (1888). — L’Amoureux de la préfète (1889). — Deux sœurs (1889). — Contes pour les soins d’hiver (1889). — Reines des bois (1890). — L’Oncle Scipion (1890). — Le Bracelet de turquoises (1890). — Charme dangereux (1891). — Jeunes et vieilles barbes (1899). — La Chanoinesse (1893). — L’Abbé Daniel (1893). — Surprises d’amour (1843). — Contes forestiers (1894). — Jardin d’automne, poésies (1894). — Nos oiseaux (1894). — Paternité (1894). — Rose-Lise (1894). — Contes tendres (1895). — Flavie (1895). — Madame Véronique (1895). — Contes de la Primevère (1895) […] — Deuil de veuve (1897). — Lilia (1897). — Philomène (1897). — Dans les Roses (1898). — Lis sauvage (1898). — Le Refuge (1898). — Le Secret de Gertrude (1898). — La Vie rustique (1898). — Dorine (1899). — Fleurs de cyclamens (1899). — La Vie rustique (1899). — Nos oiseaux (1899). — Villa Frangeville (1899). […] André Lemoyne Ce qui ressort surtout des poèmes d’André Theuriet, c’est l’amour de la nature forestière, l’intime souvenir de la vie campagnarde et, en même temps, une pitié profonde pour les souffrants, les déshérités de ce monde qui vont courbes sur la glèbe ou errants sur les routes, à l’heure où le soir tombe et quand s’illumine dans la nuit la fenêtre des heureux. […] Aujourd’hui, nous avons le Jardin d’automne, des pensées d’arrière-saison pour ainsi dire, des effets du soir de la vie.

476. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Œuvres de Maurice de Guérin, publiées par M. Trébutien — I » pp. 1-17

Après trois années d’une vie indépendante et toute parisienne, aux approches de la mort, les siens eurent la consolation de le voir redevenir chrétien. […] Ce sera bien sa manière, à lui ; dans les images fidèles qu’il nous offre de la nature, l’homme, l’âme est toujours en présence ; c’est la vie réfléchie et rendue par la vie. […] La nature est fraîche, rayonnante ; là terre semble savourer avec volupté l’eau qui lui apporte la vie. […] Si l’on pouvait s’identifier au printemps, forcer cette pensée au point de croire aspirer en soi toute la vie, tout l’amour qui fermentent dans la nature ! […] Leur mission d’amour accomplie, elles sont mortes, comme une mère qui périt en donnant la vie.

477. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

Pascal : sa vie, son humeur […] La licence des opinions et de la vie a deux causes principales. […] Il le désespère, l’écrase, l’oblige de renoncer à tout ce qui fait la vie aimable et douce, à la science même et à l’exercice de l’esprit : une seule œuvre est nécessaire et permise, celle du salut, dont la pensée doit être la seule pensée de l’homme, et toute sa vie. […] Cependant il mène une vie assez mondaine, à Clermont et à Paris. […] Car selon le calcul des probabilités, on a avantage à parier que la religion est vraie, à régler sa vie, comme si elle était vraie.

478. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

La vie était l’unique manifestation divine. La vie c’était Dieu, le grand moteur, l’âme de l’univers. […] La vie n’est-elle pas pleine d’illusions, d’apparences trompeuses ? […] la vie a-t-elle une âme ? […] Tout le monde a connu au moins une fois dans sa vie un de ces personnages dont la grande vie étonne, en raison des faibles ressources qu’on leur sait.

479. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « L’abbé Galiani »

Sa vie eût été différente, et sa gloire, dans la mémoire des hommes, serait mieux que ce trait de feu qui l’a traversée, mais qui a passé, et que le but de cette Correspondance est de raviver. […] À l’origine de sa vie, il eut le malheur d’être heureux. […] Une fois à Naples, il entra dans la gravité du magistrat, dans la préoccupation soucieuse des affaires, dans la correction de la vie utile, ces atroces gaines ! […] Que n’aurait pas pu être l’abbé Galiani, si les circonstances, dont nous sommes plus ou moins les girouettes, avaient soufflé d’un autre côté sur sa vie ? […] Antiquaire, il avait trouvé l’épée de César Borgia, et c’est à propos de cette épée qu’il pensa à écrire la vie de l’homme indéchiffrable de scélératesse qui l’avait portée.

480. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIVe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 257-320

C’était la plus belle et la plus gracieuse des femmes qui m’eût jamais apparu dans ma vie. […] Il y a ainsi dans la vie des apparitions qui auraient pu enchanter l’existence, mais qu’on ne rencontre que trop tôt ou trop tard. […] Ces monuments de sa dignité forcée, couverts de la poussière du temps, lui rappelaient évidemment des années de splendeur qu’elle eût voulu effacer de sa vie. […] Je ne rencontrais sur les bords des sentiers que des spectacles de vie pastorale, de félicité rustique, de sécurité et de paix. […] Ce qui nous émeut fortement, ce qui revient perpétuellement dans notre mémoire, fait partie de notre vie.

481. (1839) Considérations sur Werther et en général sur la poésie de notre époque pp. 430-451

Il n’en est plus ainsi, même dès le milieu de la vie ; et l’on apprend alors pourquoi la religion, cette science de l’âme, a mêlé l’horreur du meurtre à l’attentat contre soi-même. […] Cet ange tombé, se soutenant dans sa révolte, est encore dans la vie. […] Basile, qui aimait tant la nature, il y a cinq siècles où, païens et chrétiens, tout ce qui a une vie de désir se tourne avec passion vers la retraite. […] Le soleil, dans son cours, le gouverne ; sa vie dépend de ses rayons ; suivant le mois de l’année et le temps qu’il fait, il erre en furieux dans le ciel ou dans l’enfer. […] Mais ce n’est pas là exprimer sa vie ; ce n’est là qu’une œuvre de mémoire, pour ainsi dire, et d’érudition.

482. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VII. Repos »

De la vie moderne, grossière sous son élégance apparente, ricane en s’efforçant au plaisir superficiel ; mais tout autour, joie et douleur, profondeur et poésie et noblesse farouche, la vie des imagiers bretons sourit, pleure, chante. […] Le soleil se lève et toute la nature chante à celui qui va mourir un hymne de vie. […] Directement, il ne dit qu’un fragment d’une vie. […] Jadis, à première lecture, je préférai le centre du livre, tout de précision et de vie pleine. […] Il se réveille, se relève et, comme tous les convalescents, voici que joyeux il consent à la vie.

483. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Jean Lahor (Henri Cazalis). »

La conception du monde et de la vie que se sont formée, il y a trois ou quatre mille ans, les solitaires des bords du Gange, voilà que beaucoup d’entre nous y sont revenus et qu’elle convient parfaitement à l’état de nos âmes. […] Et ainsi, toutes les impressions particulières que nous donnent les objets du monde physique, il les approfondit et les agrandit aussitôt par l’idée toujours présente que tout s’enchaîne et se tient dans le rêve ininterrompu de Maïa… Les frontières deviennent indistinctes entre les différentes formes de la vievie végétale, animale et humaine. […] Il sait aussi que l’amour est inséparable de la mort, parce que la mort est inséparable de la vie… Et maintenant lisez les Chants de l’Amour et de la Mort : Je voudrais te parer de fleurs rares, de fleurs Souffrantes, qui mourraient pâles sur ton corps pâle. […] comme cela fait accepter la vie, ce court voyage à travers les apparences ! […] Après l’avoir relu, je le mets décidément à l’un des meilleurs endroits de ma bibliothèque, non loin de l’Imitation, des Pensées de Marc-Aurèle, de la Vie intérieure et des Épreuves de Sully-Prudhomme  dans le coin des sages et des consolateurs.

484. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Merlin de Thionville et la Chartreuse du Val-Saint-Pierre. »

On hésite à dire un mot sur de telles tentatives, inspirées par d’honorables sentiments et poursuivies avec opiniâtreté pendant toute une vie. […] Ce livre, c’est la Vie et Correspondance de Merlin de Thionville, publié par M.  […] Pour mieux l’apprécier, commençons par nous rendre compte de ce que fut dans sa vie publique Merlin de Thionville. […] Il s’ensuivit entre eux, pour toute la vie, une amitié inviolable. […] Je n’ai point de parti pris contre les cloîtres et contre la vie monastique en général.

485. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « GRESSET (Essai biographique sur sa Vie et ses Ouvrages, par M. de Cayrol.) » pp. 79-103

GRESSET (Essai biographique sur sa Vie et ses Ouvrages29, par M. de Cayrol. […] Je ne le crois pas, et pourtant je vais refeuilleter sa vie et ses ouvrages avec M. de Cayrol, me bornant à toucher quelques traits çà et là. […] Au commencement de 1751, il se maria dans sa ville natale, et n’en sortit plus qu’en deux ou trois occasions obligées ; il y passa les vingt-six dernières années de sa vie. […] Il ne tiendrait pas à M. de Cayrol que nous ne vissions dans ces années de retraite de Gresset l’époque la plus remplie littérairement et la plus fertile de sa vie. […] Ce sont là de ces faiblesses telles qu’il en arrive aux gens honnêtes un peu amollis par la vie domestique ; mais on se demande ce qu’est devenu l’homme d’esprit.

486. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre v »

Mais il est d’autres Israélites en grand nombre, enracinés depuis des siècles et des générations dans le sol de France et mêlés familièrement aux bonheurs, aux malheurs de la vie nationale. […] Cette confusion avec la vie du monde donne à notre vie une grandeur, une beauté incomparables… »‌ Ainsi attaché à la splendeur universelle, il défie le destin. « J’ai confiance que quoi qu’il arrive aujourd’hui, demain, dans huit jours, je me suis monté assez haut pour dominer les événements et ne les regarder qu’avec curiosité ». […] J’ai fait cet effort-là autrefois, dans la première partie de la vie, avant la guerre. […] Seul, absolument seul jusqu’à cette heure, il nous représente, au milieu de la guerre, une attitude d’amateur qui fut celle, vis-à-vis de la vie, d’un nombre immense de jeunes lettrés. […] Être de ceux qui auront contribué directement à te rendre ton berceau natal sera pour moi une bien douce joie et comme un complément à notre vie si unie et si tendre.

487. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Alfred de Musset » pp. 364-375

Il n’avait pas dix-huit ans : le front mâle et fier, la joue en fleur et qui gardait encore les roses de l’enfance, la narine enflée du souffle du désir, il s’avançait le talon sonnant et l’œil au ciel, comme assuré de sa conquête et tout plein de l’orgueil de la vie. […] On essayait à l’envi de monter ces petites pièces dans les loisirs de la vie de château. […] Que manquait-il donc en ces années au poète, bien jeune encore, pour être heureux, pour vouloir vivre et aimer la vie, pour laisser son esprit courir et jouer en conversant sous des regards prêts à lui sourire, et son talent désormais plus calme, plus apaisé, s’animer encore par instants et combiner des inspirations renaissantes avec les nuances du goût ? […] Comme un soldat téméraire, il ne sut pas d’avance préparer la seconde moitié du voyage ; il eût dédaigné d’accepter ce qu’on appelle sagesse et qui lui semblait la diminution graduelle de la vie. […] Lui, il n’a su que haïr la vie, du moment, pour parler son langage, qu'elle n’était plus la jeunesse sacrée.

488. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre I. Vue générale du seizième siècle »

Elle se mettait à aimer la vie : elle rêvait la vie comme une fête et comme une œuvre d’art, bonne et belle, elle y réintégrait la bienfaisante douceur de ces biens naturels que l’antiquité avait tant adorés, la lumière, l’espace, les ombrages, les eaux, les fleurs ; elle y jetait toutes les commodités, toutes les splendeurs de la richesse et du luxe, tous les agréments de la société. […] L’étude de l’antiquité et la vie de cour sont comme les deux portes par où un air frais et vivifiant arrive à notre littérature. […] Même dans la libre philosophie, dans Rabelais, comme plus tard dans Montaigne, rétablissement d’un idéal de la vie pratique devient la fin principale que poursuit la raison. […] Ces sciences et la philologie se séparent de la littérature : celle-ci garde l’homme moral, et le grand traducteur du siècle, Amyot, offre Plutarque, non aux philosophes, ni aux grammairiens, mais à tous ceux qui veulent savoir ce que c’est que l’homme et que la vie. […] Mais ou conçoit que la vie ne s’ajuste point exactement à nos cadres : les périodes que j’ai indiquées ne sont pas séparées par une limite toujours précise ; elles montent l’une sur l’autre, se pénètrent ; il y a des prolongements, des enclaves.

489. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VII. La littérature française et les étrangers »

La vie de société en France et en Europe. […] J’ai dit quelle impression la vie anglaise tout entière avait laissée en Voltaire. […] Wieland porte dans toutes ses œuvres et toute sa vie l’empreinte profonde des idées et de l’esprit français. […] Notre vie de société possède un don de séduction infinie. […] Paris attirait les étrangers, qui ne venaient pas seulement en dévorer les beautés extérieures et les plaisirs publics : ils voulaient vivre de sa vie, être admis dans ces salons que toute l’Europe connaissait, et dont ils gardaient toute leur vie l’éblouissement.

490. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XII. L’antinomie morale » pp. 253-269

Bayet manifeste, de son côté, une tendance à restreindre le champ d’action de l’art moral scientifique et à soustraire à son contrôle toute une part importante de la vie individuelle. Il y a, selon ce moraliste, toute une partie de notre être : la partie intime, la vie intérieure, la vie de la pensée et du sentiment devant laquelle s’arrêtera l’art-moral-scientifique. […] Bayet laisse à chacun la faculté de cultiver, à ses risques et périls, son « jardin secret ». — « L’art social, dit-il, s’abstiendra d’intervenir aux heures douloureuses de la vie intérieure. […] En effet, on connaît le lieu commun des moralistes sur l’étroite solidarité qui unit la vie intérieure de l’individu à sa conduite extérieure et sociale. […] Car c’est dans ce jardin secret que germent les semences qui s’épanouiront plus tard dans le grand jardin public de la vie sociale.

491. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVIII. Institutions de Jésus. »

» Et Jésus insistant avec plus de force encore : « Je suis le pain de vie ; vos pères ont mangé la manne dans le désert et sont morts. […] » Jésus renchérissant encore : « Oui, oui, dit-il, si vous ne mangez la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez son sang, vous n’aurez point la vie en vous. Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang est en possession de la vie éternelle, et je le ressusciterai au dernier jour. […] Les paroles que je vous dis sont esprit et vie. » Les douze restèrent fidèles, malgré cette prédication bizarre. […] On voulut voir dans la consécration du pain et du vin un mémorial d’adieu que Jésus, au moment de quitter la vie, aurait laissé à ses disciples 865.

492. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXVIII. Caractère essentiel de l’œuvre de Jésus. »

Son parfait idéalisme est la plus haute règle de la vie détachée et vertueuse. […] La vie de François d’Assise n’est aussi qu’un tissu de miracles. […] Jésus, pendant trois ans, put mener une vie qui, dans nos sociétés, l’eût conduit vingt fois devant les tribunaux de police. […] Mais jamais personne autant que lui n’a fait prédominer dans sa vie l’intérêt de l’humanité sur les petitesses de l’amour-propre. […] Philostrate, Vie d’Apollonius, IV, 2 ; VII, 11 ; VIII, 7 ; Eunape, Vies des sophistes, p. 454, 500 (édit.

493. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1854 » pp. 59-74

* * * — Je ne passe jamais à Paris devant un magasin de produits algériens, sans me sentir revenir au mois le plus heureux de ma vie, à mes jours d’Alger. […] La volupté d’être vous pénètre et vous remplit, et la vie devient comme une poétique jouissance de vivre. […] Au bout de deux jours, nos couverts sont presque mis de force chez lui, et nous voilà de la maison, menant une vie paresseuse et doucement coulante. […] je sais bien, me dit-elle, que si je faisais seulement la vie six mois, je serais morte. […] mes Goncourt, les vilains échantillons de petite bourgeoisie qu’il m’a été donné de voir dans ma vie, s’écriait un soir Gavarni.

494. (1880) Goethe et Diderot « Note : entretiens de Goethe et d’Eckermann Traduits par M. J.-N. Charles »

Mais j’admettais très largement qu’il avait de hautes facultés critiques et qu’il savait pénétrer profondément dans la pensée, la vie et les hommes. […] Quoi qu’il en fût, du reste, quand Eckermann le connut Gœthe ne faisait plus ce qu’il avait fait toute sa vie. […] C’est donc au critique qu’eut affaire Eckermann durant cette période dernière de la vie de Gœthe. […] Ampère sur son propre théâtre, à lui, Gœthe, qu’un tel critique devait être un homme dans la maturité de la vie, ayant toutes les expériences, et Eckermann ajoutait sa sagacité à celle de Gœthe pour conclure, bien entendu, comme Gœthe. […] la véritable et la seule originalité de Gœthe, de cet Allemand qui, comme les autres Allemands, était idéaliste et poète, c’est d’avoir, Ixion infidèle, quitté la nuée pour embrasser la terre ; c’est d’avoir fait de la vie un art, bien plus qu’il n’a fait de l’art une vie ; c’est de s’être préoccupé, jusqu’à nous en faire mal au cœur, de l’utilité et de la pratique ; de jouer, enfin, au petit Machiavel, même littéraire, en n’étant qu’un petit Jérémie Bentham.

495. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIII. M. Nicolardot. Ménage et Finances de Voltaire » pp. 297-310

On lui avait appliqué une espèce de faux axiome qu’il avait inventé : c’est que la vie des hommes célèbres est dans leur pensée et qu’on ne doit la chercher que dans leurs écrits. […] Nicolardot qui n’a pas, lui, au cœur, l’indignation sainte de M. de Maistre, et dans sa main le pinceau de feu de ce coloriste inspiré, ce livre froid, méthodique, dur comme le fait qui s’y entasse en grêle coupante, réconciliera certainement les admirateurs de Voltaire avec le foudroyant portrait des Soirées de Saint-Pétersbourg, car il y a pis pour l’honneur de Voltaire que ce supplice en effigie auquel de Maistre l’a cloué, et ce sont les pages bien autrement impitoyables, où on le retrouve descendu, culbuté de son piédestal dans la vie, dans cette vie d’un moment qui passe et qu’on croit oubliée, cette vie qui tombe comme une escarre de notre immortalité historique, quand nous sommes immortels, et que voici ressuscitée et ramenée tout à coup sous le regard, dans ce qu’elle eut de plus chétif, de plus obscur et de plus honteux ! […] Plus étonnant que Boswell, ce roi des biographes selon Macaulay, car Boswell avait vécu dans la vie de Johnson et M. Nicolardot n’a vu Voltaire que dans l’histoire, il le suit pas à pas dans cette vie qu’il reconstitue autour de lui, grain de poussière par grain de poussière. […] À ce déchiquètement moral de la vie d’un homme qui, lui aussi, déchiqueta pendant soixante ans tant de réputations au gré de ses passions et de ses caprices, on croirait à cette espèce de haine qui dit œil pour œil et dent pour dent, et on se tromperait.

496. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Lamennais »

À ces deux moments d’une vie rompue et qu’il jeta, comme une branche d’arbre cassée, de deux côtés si différents, Lamennais avait le masque colossal que le génie se compose lui-même et qui fait croire à la toute-puissance de la vie et de l’intensité dans ces sublimes infirmes, dans ces pauvres créatures souvent délicates et souffrantes, que ce soit Lamennais lui-même, Pascal ou Byron, et c’est ce masque oublié, délacé dans des lettres familières et faciles, où l’on respire même de son talent, qui permet de trouver, sous l’écrivain, l’homme. […] … mais la Correspondance est là… une malingre chose humaine, apte aux tendresses du cœur et enfermant sa vie entre deux ou trois amitiés d’hommes et de femmes, qui le consolèrent toujours de tout dans les afflictions de sa gloire. […] Quoiqu’il ne fût pas moine, il comprenait profondément ce bonheur silencieux et monacal de la claire et tranquille cellule où l’on reste seul, « avec un petit livre, dans un petit coin », et tant qu’il le put, et eut égard aux nécessités que lui avaient créées son genre de talent et sa renommée, il réalisa toujours cette vie méditative et solitaire. […] Je voudrais que nous fussions doux avec la vie, mais cela, j’en conviens, est plus difficile. » Et il le trouvait plus difficile parce qu’il était, comme beaucoup de doux, susceptible de grandes colères. […] C’est elle qui lui fit écrire ce mot d’avenir à la tête de son journal, le plus grand acte de sa vie, et ce fut elle encore qui le fit croire à l’avenir de l’humanité, avec l’obstination d’un utopiste de Bretagne.

497. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Horace Walpole »

Horace Walpole est le précurseur immédiat de Brummell, qui, lui, — je l’ai dit dans sa Vie, — ne fut absolument qu’un dandy, sans un zeste de plus, — un zeste des citrons dont il faisait du punch ! […] Mais il ne cessa, toute sa vie, de chiffonner, de brocanter, de flâner aux boutiques de curiosités, de calliborgner aux vitrines ! […] Il passa sa vie à se moquer de sa vie et à n’en rien changer. […] « Mais je ne lui ressemble — écrivait-il — que par les rides. » Le plus grand malheur de sa vie furent ces rides-là et la goutte, une goutte anglaise comme son dandysme ! […] Un moment, la vie les avait séparés, mais ils s’étaient rapprochés par la force des premières années, qui décident toujours des dernières dans nos pauvres cœurs, si craie soient-ils !

498. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Achille du Clésieux »

Ceux qui ont le plus goûté aux fleurs amères et aux poisons de la vie parmi les poètes, sont les plus puissants. […] La vie n’est belle et touchante qu’en se retournant, et elle le devient… de ce qu’elle est perdue ! […] Il est resté, toute sa vie, un lamartinien. […] Mais la respectueuse obéissance à la volonté paternelle, et le sacrifice de sa vie, et de celle pour qui on donnerait dix fois sa vie au serment qu’on a fait à une mère mourante ; cet obscur et cruel devoir qui n’a pas, lui, d’attitude sculpturale et plastique, est plus difficile à comprendre dans la noblesse de son humilité. […] Il l’est aussi dans la vie.

499. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Roger de Beauvoir. Colombes et Couleuvres. »

On dirait que ce sont les couleurs du livre de M. de Beauvoir, livre de deuil, puisqu’il reflète une vie, mais qu’une imagination restée virginale, on ne sait trop par quel procédé, éclaire des teintes d’une rose de Bengale immortelle. […] On comprendra jusqu’au titre même du recueil, ce titre de « Colombes et Couleuvres » qui n’est pas là une vaine opposition d’idées, mais l’antithèse atrocement moqueuse de la vie — l’amour et la haine, la calomnie et l’innocence, les nectars et les poisons. […] Vous saurez ma vie ; — elle est dans ce livre, Dans les noirs soucis qui courbent mon front. […] … La Muse de M. de Beauvoir a plus d’un rapport avec une célèbre courtisane, restée sincère et tendre, malgré les dissipations de sa vie. […] Le Christianisme n’est pas seulement une civilisation qui renferme en soi toutes les civilisations possibles : c’est aussi le dernier mot de la nature humaine prise dans ce mystère de la vie qui l’étreint et qui la déchire.

500. (1923) Nouvelles études et autres figures

Et pourtant le travail est la grande loi de la vie. […] Une vie si laborieuse et si parcimonieuse recèle aussi de la beauté. […] C’est la réflexion que je me faisais en relisant la vie de Shelley, cette vie orageuse qui, le 8 juillet 1822, s’abîma dans un ouragan. […] Il ne résista pas à ces humiliations et à cette vie d’enfer. […] Quelle a été sa vie ?

501. (1904) Zangwill pp. 7-90

La masse travaille ; quelques-uns remplissent pour elle les hautes fonctions de la vie ; voilà l’humanité. […] Cette vie nous est plus chère que la vie du corps, puisque nous sacrifions volontiers celle-ci à celle-là. Remarquez bien que je ne parle pas seulement de la vie dans l’opinion, de la réputation, du souvenir. […] Tel innommé a été peut-être plus grand qu’Alexandre ; tel cœur de femme qui n’a dit mot de sa vie a mieux senti que le poëte le plus harmonieux. — Je parle de la vie par influence, ou, selon l’expression des mystiques, de la vie en Dieu. […] L’opinion que la conscience absolue a de lui, le souvenir qu’elle garde de lui, voilà la vraie vie du juste, et cette vie-là est éternelle.

502. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis »

Quoique sa vie eût été si pleine et si utile, il regrettait souvent le temps qu’il avait perdu. […] Sa vie avait été celle d’un philosophe, sa mort fut celle d’un sage. […] Au milieu de ces illusions délicieuses, Laurent fut obligé de redescendre aux tristes réalités de la vie. […] L’exemple d’un assassinat impuni menaçait sa vie et sa popularité. […] L’intrépide Laurent déroula son manteau, qu’il tenait du bras gauche, et, tirant son épée de la main droite, disputa sa vie aux conjurés.

503. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre X. La littérature et la vie de famille » pp. 251-271

Ce sont les relations de ces différentes personnes entre elles qui en forment la vie. […] L’histoire des mœurs en notre siècle rencontre bien des cas où des personnages réels ont emprunté des traits à des personnages fictifs, où la vie a imité cette imitation de la vie qu’est en partie la littérature ! […] § 2. — Revenons à la vie de famille. […] Notre siècle nous a fait voir, dans la vie réelle comme sur les planches, le père camarade et parfois frère cadet de son fils. […] En somme, comme nous allons le voir, ses effets sont sur plus d’un point l’inverse de ceux que produit la vie mondaine.

504. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1861 » pp. 361-395

La naissance, la vie, la mort, ces trois accidents de l’être ; sont des opérations chimiques. […] Ces grands fonds d’ombre tout grouillants, éclaboussés de lueurs sur leurs arêtes, et qu’on dirait pochés par le pinceau de Goya, renferment une vie fantastique. […] Et quelle anonyme poussière ferait tout ce passé de millions d’hommes, qui est sous nous, sans cette signature de leur nom et de leur vie déposée là ! […] Quelle vie que cette vie des lettres ! […] Et à propos des Quatre Syndics il s’écrie : « C’est plus vivant que la vie ; c’est de la vie condensée et précipitée comme on pourrait en mettre dans une bouteille d’eau de seltz, chargée au point d’éclater ! 

505. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre III. De la nature du temps »

Or notre durée intérieure, envisagée du premier au dernier moment de notre vie consciente, est quelque chose comme cette mélodie. […] Il faudrait alors que sa vie se passât à la contemplation d’un mouvement extérieur se prolongeant sans fin. […] Il accomplirait ainsi un voyage coextensif à sa vie consciente. […] Pas tout à fait, parce que nous vivons une vie sociale et même cosmique, autant et plus qu’une vie individuelle. […] Mais le changement n’existerait que pour cette conscience capable de comparer l’écoulement des choses à celui de la vie intérieure.

506. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVII. De la littérature allemande » pp. 339-365

Un habitant d’une planète où la vie n’a point de terme, interroge un ange qui lui donne des nouvelles de notre terre, sur ce que c’est que la mort. « Quoi ! lui dit-il, il est vrai que vous connaissez un pays où le fils peut être pour jamais séparé de celle qui lui a prodigué les plus tendres marques d’affection pendant les premières années de sa vie ! […] Se peut-il que, sur cette terre, on veuille du don de la vie, lorsqu’elle ne sert qu’à former des liens que doit briser la mort, qu’à aimer ce qu’il faut perdre, qu’à recueillir dans son cœur une image dont l’objet peut disparaître du monde où l’on reste encore après lui !  […] Ils la décrivent telle qu’elle doit frapper des regards attentifs, lorsque les soins de la culture, les travaux champêtres, qui rappellent la présence de l’homme et les jouissances de la vie tranquille, sont d’accord avec la disposition de l’âme. […] Un joug volontaire met cependant obstacle, à quelques égards, au degré de lumières qu’on pourrait acquérir en Allemagne, c’est l’esprit de secte : il tient dans la vie oisive la place de l’esprit de parti, et il a quelques-uns de ses inconvénients.

507. (1864) Physiologie des écrivains et des artistes ou Essai de critique naturelle

quels arguments pris de la vie de chaque jour ! […] Le fardeau de la vie présente est allégé, peut-être par le rêve indistinct d’une autre vie réparatrice. […] Que d’œuvres dans cette courte vie ! […] C’est la vie, la puissance et l’allégresse ! […] La vie antique était beaucoup plus favorable à la statuaire que la vie moderne.

508. (1911) Visages d’hier et d’aujourd’hui

Mais toute sa vie et tous les instants de sa vie furent un madrigal joli, sincère et pieux à Notre-Dame la Musique. […] La vie ne lui était pas commode. […] Il nous semble que l’unité soit la vie ; et la vie est la seule réalité que nous concevions. […] La vie l’appelait au dehors, la vie impérieuse, exigeante et qui refuse de vous laisser tranquille. […] Partout la vie est facile et heureuse.

509. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame de Genlis sur le dix-huitième siècle et la Révolution française, depuis 1756 jusqu’à nos jours — I »

I Ce n’est pas d’aujourd’hui que madame de Genlis fait les avances envers le public ; il y a longtemps qu’elle se croit comptable d’explications envers lui, et qu’elle lui distribue son histoire, comme une dette, en précis de conduite, en souvenirs, en romans : mais ce n’étaient là que des à-compte trop légers envers les contemporains et la postérité ; voici venir enfin, sous forme de mémoires, la plus considérable, la plus officielle, et probablement aussi la dernière édition de sa vie. […] A parler sérieusement, il n’est qu’un cas où le personnage vivant ait plein droit d’invoquer avec éclat et franchise l’attention publique sur l’intimité de ses pensées et de sa vie ; c’est quand ce personnage est public lui-même, que ses actes extérieurs sont dévolus à l’opinion, et qu’il les discute par-devant elle : ses mémoires ne sont rien alors qu’un plaidoyer qu’il lance dans les débats, et le procès se poursuit jusqu’à ce que vienne l’histoire. […] Elle aussi peut-être s’imagine appartenir au public, non-seulement par ses écrits et ses travaux littéraires, mais encore par sa vie et par les rôles politiques qu’elle a successivement revêtus. Elle a pu se croire une puissance dans le siècle, du moment qu’elle s’en est venue accomplir, vers l’an de grâce 1800, je ne sais que le mission prédestinée, dogmatisant parmi les châteaux et les palais, à la plus grande gloire d’en haut ; et maintenant que la lumière est revenue, qu’on n’a plus que faire de précurseur, et que la vie militante a fait place à la vie privée, c’est peut-être un devoir à ses yeux d’enregistrer publiquement les mérites et indulgences qui lui reviennent de cette pieuse lutte, engagée sous son patronage. […] Nous y voilà donc ; la singularité s’explique, les Mémoires de madame de Genlis sont et devaient être un acte public, comme tous ceux de sa vie une sorte de compte rendu au monument enfin plus que littéraire ; et qu’on cesse de s’étonner que, consacrant cette publication mémorable, le libraire Ladvocat ait fait frapper une médaille en bronze.

510. (1874) Premiers lundis. Tome II « Théophile Gautier. Fortunio — La Comédie de la Mort. »

S’occupant d’abord de peinture, vivant avec plusieurs amis, poêles, peintres, sculpteurs, de la pure vie d’atelier, il en eut les préoccupations exclusives, le genre sans nuance, et, qu’il nous permette de le dire, quelques-unes des singularités extrêmes, en même temps que l’émulation sérieuse, les études sincères, l’ardeur et l’audace d’esprit. […] Dans son premier point de vue intitulé la Vie dans la Mort, le poète, errant le 2 novembre dans un cimetière, y suppose la vie non encore éteinte, et essaye de se représenter les tourments, les agonies morales, les passions ulcérantes de tous ces morts, si, vivant encore d’une demi-existence, ils pouvaient sentir et savoir ce qui se continue sans eux sur la terre : Sentir qu’on a passé sans laisser plus de marque Qu’au dos de l’océan le sillon d’une barque ;   Que l’on est mort pour tous ; Voir que vos mieux aimés si vite vous oublient, Et qu’un saule pleureur aux longs bras qui se plient   Seul se plaigne sur vous. […] Le second point de vue, la Mort dans la Vie (et ces espèces de jeux de mots symétriques, vie dans la mort, mort dans la vie, sont bien dans le goût du moyen âge), présente une vérité réelle plus aisée à reconnaître, tout ce qu’il y a de mort et d’enseveli au fond de l’âme de ceux qui passent pour vivants : Et cependant il est d’horribles agonies Qu’on ne saura jamais ; des douleurs infinies    Que l’on n’aperçoit pas.

511. (1887) Discours et conférences « Discours prononcé aux funérailles de M. Stanislas Guyard, Professeur au Collège de France »

L’amour du bien public, le sentiment abstrait du devoir formaient l’unique mobile de sa vie. […] La vie était pour lui tellement identifiée avec le travail qu’un ordre de repos lui sembla insupportable. […] La vie s’était toujours montrée à lui par le côté austère. […] Courte est une vie scientifique ; mais immense est un capital où rien ne se perd. […] Ta vie sera pour tous ceux qui t’ont connu une leçon de désintéressement, de patriotisme, de travail et de vertu.

512. (1911) Études pp. 9-261

Il la portait parmi sa vie. […] Sous votre rayon ma vie se développe et s’épanouit. […] Plus de suite peut-être endormirait le sentiment qu’elle a de sa vie. […] Morne vie qui se dépense au fur et à mesure en tout petits actes inépuisables. […] seulement nous pourrons connaître, pure et voluptueuse, notre propre vie.

513. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

Dans la vie commune, l’homme est l’être public, la femme est l’être domestique. […] Ce fut dès ce jour l’amertume du reste de sa vie. […] Voltaire avait abrité en Suisse, à soixante-deux ans, son génie, au moment où sa vie littéraire finissait, et où il commençait sa vie philosophique. […] Malgré ses pleurs, au péril de sa jeune vie, on a persisté à les séparer. […] Ce fut l’époque véritablement civique de sa vie.

514. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre III. Comédie et drame »

Il ne s’agit plus de peindre la vie, mais de faire aimer la vertu et détester le vice. […] C’est moins une représentation sensible de la vie, qu’une analyse piquée d’épigrammes. […] La Vie de Marianne parut de 1731 à 1741, le Paysan parvenu de 1735 à 1736. Sur la fin de sa vie il fréquenta chez Mme du Deffand et Mme Geoffrin. […] Larroumet, Marivaux, sa vie et ses œuvres, Paris, 1882, in-8 (2e éd., 1893, in-12) ; F.

515. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

Sa manière d’être intérieure, sa véritable vie n’est connue que de lui ; mais, en récrivant, il la déguise ; sous le nom de sa vie il fait son apologie : il se montre comme il veut être vu, mais point du tout comme il est. […] C’est de lui aussi que date dans notre littérature le sentiment de la vie domestique, de cette vie bourgeoise, pauvre, recueillie, intime, où s’accumulent tant de trésors vertueux et doux. […] Son style, comme sa vie même, a contracté quelque chose des vices de sa première éducation et des mauvaises compagnies qu’il a hantées d’abord. […] Le matin de la vie est comme le matin du jour, plein de pureté, d’images et d’harmonies. […] Pourtant rien n’égalera comme légèreté, comme fraîcheur et allégresse, la description de la vie aux Charmettes.

516. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Pour la serrer dans mes bras, la créole aux yeux bleus, aux cheveux blonds, j’aurais donné ma vie avec joie, je l’aurai donnée, comme la donne Chérubin, sans hésitation, sans regret, ainsi qu’une chose payée outre mesure. […] Et de la politique l’opportunisme descendra bientôt dans la pratique de la vie, et il y aura de l’opportunisme dans l’honneur, dans la morale, etc. […] Et de cette vie de voyage, de ces compagnonnages avec des êtres de toutes sortes, de ces lectures économiques, statistiques, sociales, dans une existence où n’existe pas le besoin du sommeil, il est sorti un tout autre garçon, que celui que j’ai connu. […] * * * — La gravité de la vie présente a fait à l’homme une jeunesse sérieuse, réfléchie, mélancolique. […] La vie est vraiment bien habilement arrangée, pour que personne ne soit heureux.

517. (1902) Propos littéraires. Première série

Une continuation de sa propre vie, sa vie pensée et exprimée par d’autres. […] jamais de la vie ! […] Jamais de sa vie ! […] Jamais de sa vie ! […] Il l’appelle Vie supérieure, Vie transcendantal, Vie divine, Vie absolue.

518. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Pas de vie plus unie que la sienne. […] Nous sommes une parcelle de la vie universelle. […] Ce qu’on sait de sa vie est fait pour inspirer le respect. […] Il ne s’agit point d’expérimenter la vie. […] C’est à elle qu’il dut la vie et le pouvoir.

519. (1853) Portraits littéraires. Tome I (3e éd.) pp. 1-363

Il veut régler sa vie et consacrer à Manon le travail de ses journées. […] On sent à chaque page que des Grieux, en défendant Manon, défend sa propre vie. […] Je sais que chacun des récits inventés par cet artiste laborieux est plein de vie dans la plus haute acception du mot, non de cette vie bruyante dont se composent les aventures, mais de cette vie intellectuelle et morale qui forme le fonds même de la poésie. […] Sandeau, lire le récit de leur vie. […] Sandeau, par la réalité, par le mouvement et la vie.

520. (1932) Les idées politiques de la France

Qui sent la vie organique de la Révolution française sent, par le même mouvement, la vie organique du radicalisme. […] Leur vie est liée à celle de leur éternelle adversaire. […] C’est ainsi qu’en vingt ans de vie parlementaire, M.  […] Il le rend au courant de la vie. […] Comme le roman, elle laisse jouer à tous les délégués de la vie, à tous les délégués à la vie, leur libre jeu.

521. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

Le Poète et Pythagore furent donc Une exception, une vie en dehors de la vie commune. […] La vie semble ne vouloir rien de complet— que le malheur. […] Un désir de vie pratique et d’action s’empara de lui. […] Sa vie ; hélas ! […] La plupart en meurent ou restent malades toute leur vie.

522. (1890) Le massacre des amazones pp. 2-265

Elle aime à voir se mêler sa vie et celle de ses enfants. […] Le voici malade, entre la vie et la mort, le pauvre petit. […] Le vote féminin ne changera-t-il donc rien à la vie ? […] Attendri, je pardonne à celle qui a créé un peu de vie humaine d’avoir quelquefois fabriqué de la vie parisienne. […] La vie extérieure de la femme est moindre que celle de l’homme, sa vie intérieure est plus profonde ; c’est peut-être cette différence qui constitue tout le fameux « mystère féminin ».

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