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650. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 septembre 1886. »

Enfin, là règne le souvenir du roi, et tout autour de la ville, très près, c’est les fameux châteaux, aujourd’hui ouverts aux visiteurs. […] Les souvenirs des scènes précédentes, d’un si bel effet, dans ce morceau peuvent être considérés comme un pastiche du fameux épisode du Final de la neuvième, dont je viens de parler ; Franz Liszt les a splendidement caractérisés et interprétés, comme du reste le rôle entier du motif de l’alto, dans sa célèbre analyse de « Harold »60. […] Et malgré les souvenirs parfois du mal, la discrète joie s’affermit ; des ondées scintillent ; rappel d’heureux passés, imaginations gaies ? […] C’est un drame en cinq actes, le drame émotionnel d’une âme pieuse : Le souvenir de soi-même, d’abord, devant le Dieu ; une plainte, les émois de la honte : ayez pitié, Maître, de moi ! […] Cette critique d’un illustre wagnérien n’est pourtant pas partagée par Wagner lui-même, qui consacra au compositeur français un texte intitulé Souvenirs sur Auber (tome IX de l’édition française des Œuvres en prose, p. 183-287).

651. (1833) De la littérature dramatique. Lettre à M. Victor Hugo pp. 5-47

Ils en ont conservé un souvenir qui de l’intérieur du temple est passé dans le monde profane. […] Vous me pardonnerez ces souvenirs classiques ou plutôt ces préceptes pour lesquels vous avez professé le plus grand mépris ; mais moi, je suis vieux, et trente succès que je leur dois me donnent bien le droit de regretter mon beau théâtre, que, dès votre entrée dans la carrière, vous avez eu le projet d’anéantir9. […] Retiré d’un monde que je dois connaître, je ne vis plus que dans mes souvenirs ; et comme je n’ai dû mes instants de bonheur et de chagrins qu’aux péripéties de la scène française, il n’est pas étonnant que dans mon intérêt, qui est celui de tous les auteurs et des comédiens, je vous adresse paternellement de justes reproches. […] Aussi ne craignent-elles pas de suivre certaines représentations d’où, après avoir été obligées de rougir du regard malin de certains hommes, elles remportent au moins dans leur intérieur des souvenirs qui ne laissent pas d’avoir quelques charmes. […] Maintenant que l’expérience doit les avoir détrompés, et qu’il ne leur reste de leurs chimères de fortune que quelques lambeaux de décoration et les vieux habits tout neufs du moyen âge16, ils se rappelleront (car le malheur ramène bien des souvenirs) qu’il existait avant vous des hommes de lettres qui, sans frais, sans dépense, aidés du talent de cinq ou six acteurs et par le seul ascendant de leur esprit et de leur éloquence, contribuaient tout à la fois à la fortune et à la gloire du Théâtre-Français.

652. (1884) Cours de philosophie fait au Lycée de Sens en 1883-1884

Ainsi réduit, le souvenir s’appelle réminiscence. […] Le souvenir peut encore s’en tenir à ce second moment. […] Le souvenir complet comprend ces trois moments. […] Tout souvenir peut s’exprimer ainsi : Je me souviens que j’ai vu telle ou telle chose. […] Elle se souvient surtout du général.

653. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome I pp. 5-537

Un tel examen ne devient curieux que s’il est tout de raisonnement, que s’il s’applique à la preuve des axiomes, et que s’il n’est pas cousu de lambeaux cités dont le souvenir ne retrace que ce que l’on sait. […] On se souvient de ces deux vers d’une épître au Roi : « Jeune et vaillant héros, dont la haute sagesse « N’est point le fruit tardif d’une lente vieillesse. […] Un petit nombre de doctes appréciateurs conserve lui seul le sentiment fidèle des beautés que remarqua son attention, et l’effet d’une situation fausse ou d’un mot aventuré n’efface pas chez lui le souvenir que lui laisse un beau travail. […] Le souvenir toujours renaissant des batailles de Marathon, de Salamine et de Platéesab, n’est arrivé jusqu’à nous qu’avec le renom qu’il y acquit dans les rangs du soldat. […] Si la fable est trop abrégée, ses situations trop rapides se confondent par leur multiplicité : les événements s’y entassent, et les coups, précipités l’un sur l’autre, ne jettent plus aucun éclat, et ne laissent nulle empreinte durable dans le souvenir.

654. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Pourtant, vous vous en souvenez, elle n’a guère été encouragée, cette pauvre Exposition. […] Cette procession du 8 mai est un de mes plus somptueux souvenirs d’enfance. […] Et, près du souvenir antique, voici le souvenir chrétien. […] Car, vous vous en souvenez, les réformes proposées par M.  […] Je me souviens de l’avoir entendue en 1872.

655. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIIe entretien. Littérature politique. Machiavel » pp. 241-320

Souvenez-vous des Dante, des Pétrarque, des Médicis, des Capponi, des Strozzi, des Guicciardini, des Michel-Ange, des Mirabeau, des Bonaparte ; poètes, artistes, écrivains, hommes de tribune, hommes d’État, hommes de guerre et de tyrannie, la Toscane est une mère féconde ; Florence a du sang étranger dans les veines. […] « Je resterai donc dans ma misère, écrit-il à son ami Vettori, sans trouver une âme qui se souvienne de mon dévouement ou qui me trouve bon à quelque chose. […] Constantinople se souvient que Rome est sa mère ; mais ces expéditions lointaines avortent ; il n’y a bientôt plus rien de romain dans Rome que le pontificat, tantôt humble délégué municipal de l’empereur d’Orient, tantôt joignant une souveraineté morale à une magistrature urbaine, autour duquel se groupent les restes de nationalité romaine. […] La dynastie bourbonienne rentre en Sicile ; Murat gouverne en héros et en administrateur ce beau royaume ; il y laisse des souvenirs de gloire et de bonté qui ne sont pas un parti, mais une estime. […] L’Irlande regrette le temps qu’il lui a fait perdre en progrès raisonnables à la poursuite de chimères sonores, et le royaume-uni de la grande fédération britannique subsiste et ne se souvient plus de son agitateur.

656. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

que le beau, cette rosée du ciel qui tombe en plein sur cette terre, coule à pleine séve de tes recherches classiques dans tes souvenirs, et de tes souvenirs dans tes vers, et de tes vers ou de ta prose dans l’âme charmée de tes lecteurs ! […] L’Athénien qui se rendait de sa maison à l’assemblée du peuple rencontrait partout sur son passage les figures des divinités protectrices de la cité, celles des magistrats et des héros révérés pour leur courage et pour leurs vertus civiques et patriotiques ; il s’avançait au milieu de la majesté de ces souvenirs comme sous les portiques d’un temple ; et la Vénération, comme une muse de la religion et de la patrie, se levait à son approche du pied des statues, et l’accompagnait à travers la ville jusqu’au lieu consacré par la solennité des délibérations populaires. […] Ceci n’a aucun caractère de l’élégance du peuple de Périclès ; cela sent le Romain ; les souvenirs seuls y sont beaux. […] Je voulais emporter pour moi un souvenir vivant, un souvenir écrit de ce moment de ma vie !

657. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIe entretien. Le Lépreux de la cité d’Aoste, par M. Xavier de Maistre » pp. 5-79

Xavier de Maistre I J’entrai au collège des Pères de la foi en 1806 ; les Pères de la foi, pseudonyme des Jésuites, étaient la renaissance d’un ordre religieux, célèbre, qui n’avouait ni ses souvenirs, ni ses prétentions au monopole de l’enseignement de la jeunesse. […] Seulement, il avait la sensibilité vive et maladive, et quand une chose l’avait impressionné fortement à une époque quelconque de sa vie, il se souvenait toujours, et il n’avait point de trêve en lui-même tant qu’il n’avait pas fait éprouver aux autres ce qu’il portait perpétuellement en lui. […] Je ne puis, en vérité, me rappeler sans plaisir le souvenir de mes jeunes écolières. […] Je conçus enfin la résolution d’incendier ma retraite, et de m’y laisser consumer avec tout ce qui aurait pu laisser quelque souvenir de moi. […] Je vis un nuage se répandre sur ma vue, et pendant quelque temps je perdis à la fois le souvenir de mes maux et le sentiment de mon existence.

658. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse sociologique »

En lisant la description d’un site connu de Paris par un romancier naturaliste, on pourra croire que le lecteur n’admirera ce morceau que s’il est exact, c’est-à-dire s’il reproduit ses souvenirs, les résidus de ses perceptions. […] Huysmans, dans les Sœurs Vatard) sera jugée bonne par un lecteur non pas simplement en raison de son extrême exactitude, mais si elle correspond à la « manière de voir » de ce dernier, c’est-à-dire à la qualité de ses sens, à sa mémoire des formes et des couleurs, à tout le mécanisme interne qu’il lui a fallu pour transformer ses sensations d’un spectacle analogue, en un souvenir semblable à celui que l’auteur s’efforce d’évoquer. […] Si l’on consulte ses souvenirs, on s’apercevra qu’il y a pour les admirateurs de Mérimée, par exemple, ou de Musset, d’Hugo, de M.  […] En 1853, il publie ses Souvenirs d’un naturaliste. […] En 1895, il publia ses Souvenirs d’un auteur dramatique.

659. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

Je ne professe pas avec vous, je cause, et si l’abandon de la conversation m’entraîne vers quelques-uns de mes souvenirs, je ne m’abstiens ni de m’y reposer un moment avec vous, ni d’allonger le chemin en prenant ces sentiers, quand ces sentiers ramènent indirectement mais agréablement à la route. […] C’était, je m’en souviens, comme une consonance encore lointaine et confuse, mais comme une consonance enfin, entre mon âme et ces âmes qui me parlaient ainsi à travers les siècles. […] Je me souviens encore du premier de ces essais descriptifs, qui me valut à mon tour l’approbation du professeur et l’enthousiasme de l’école. […] Il y vivait en philosophe, auprès de ses sœurs, suspendu par ses opinions et ses souvenirs entre deux temps ; doué d’un esprit étendu, d’une érudition profonde, d’une éloquence sobre et précise comme les affaires qu’il avait maniées. […] Je ne répéterai pas son long discours, bien qu’il soit aussi présent à mon souvenir que le timbre un peu caverneux de sa voix l’est encore à mes oreilles.

660. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

On a conservé le souvenir de quelques scènes violentes qu’il eut avec son confrère l’abbé d’Olivet, qu’il appelait un bon grammairien et un méchant homme, et à qui il n’épargnait pas l’injure en face : « C’est, disait-il, un si grand coquin que, malgré les duretés dont je l’accable, il ne me hait pas plus qu’un autre. » L’abbé d’Olivet n’était pas si impassible que Duclos voulait bien le croire : on a beaucoup dit que sa mort et l’attaque d’apoplexie à laquelle il succomba (octobre 1768) eurent pour cause une dernière altercation violente qu’il avait eue à l’Académie avec Duclos et d’Alembert. […] Je vois que Duclos était à Londres dans le printemps de 1763 ; il alla faire une visite chez Horace Walpole à Strawberry Hill, un jour où il y avait brillante compagnie, et entre autres la comtesse de Boufflers : « Ce dernier, dit Horace Walpole en parlant de Duclos, est auteur de laVie de Louis XI, se met comme un ministre dissident, ce qui est, je suppose, la livrée d’un bel esprit, et est beaucoup plus impétueux qu’agréable. » Le voyage de Duclos en Italie (novembre 1766-juin 1767) a laissé plus de traces et de meilleurs souvenirs. […] Le souvenir qu’on en garde ailleurs nuit souvent au plaisir qu’on aurait de vivre chez soi, si l’on n’en était pas sorti.

661. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

De même pour l’immortalité et pour l’avenir des destinées humaines : rendant compte, dans son Éloge de Buffon, des Époques de la nature et rappelant l’hypothèse finale du grand naturaliste lorsqu’il peint la lune déjà refroidie et lorsqu’il menace la terre de la perte de sa chaleur et de la destruction de ses habitants : Je demande, s’écrie-t-il, si cette image lugubre et sombre, si cette fin de tout souvenir, de toute pensée, si cet éternel silence n’offrent pas quelque chose d’effrayant à l’esprit ; je demande si le désir des succès et des triomphes, si le dévouement à l’étude, si le zèle du patriotisme, si la vertu même, qui s’appuie si souvent sur l’amour de la gloire, si toutes ces passions, dont les vœux sont sans limites, n’ont pas besoin d’un avenir sans bornes ? […] Souvenez-vous que la sagesse consiste plus souvent à se taire qu’à parler ; car il est toujours temps de penser, mais il ne l’est pas toujours de dire ce qu’on pense. […] Ceux qui parlent ainsi n’avaient pas présent au souvenir le remarquable passage où Vicq d’Azyr commente ce mot de Buffon : « Voilà ce que j’aperçois par la vue de l’esprit », et où il le montre dans ses diverses théories faisant en effet tout ce qu’on peut attendre de l’esprit, devançant l’observation, et arrivant au but sans avoir passé par les sentiers pénibles de l’expérience.

662. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — II. (Suite.) » pp. 463-478

Mais ces premiers paysages faits à dessein et composés avec art, qui sont relevés d’images et de souvenirs mythologiques ou classiques (Arcadie, épée de Damoclès, autels d’Esculape, etc.), me plaisent moins que ceux qui seront retracés chemin faisant et avec des traits plus naturels, sans que l’auteur ait l’air de se mettre exprès à son chevalet. […] Et il insiste sur ce que ce n’est point là le spectacle et la décoration des montagnes centrales, de ces hauteurs désolées et de ces déserts, où l’œil ne rencontre plus rien qui le rassure ; où l’oreille ne saisit pas un son qui appartienne à la vie ; où la pensée ne trouve plus un objet de méditation qui ne l’accable ; où l’imagination s’épouvante à l’approche des idées d’immensité et d’éternité qui s’emparent d’elle ; où les souvenirs de la terre habitée expirent ; où un sombre sentiment fait craindre qu’elle-même ne soit rien… Ici l’on n’est pas hors du monde ; on le domine, on l’observe : la demeure des hommes est encore sous les yeux, leurs agitations sont encore dans la mémoire ; et le cœur fatigué, s’épanouissant à peine, frémit encore des restes de l’ébranlement. […] Tableau doux et champêtre dont la simple nature a fait les frais, il doit réunir comme elle la vénérable empreinte de l’antiquité aux charmes d’une immortelle jeunesse, et se renouveler au retour de chaque année comme la feuille des arbres et comme l’herbe des prés… Cette rencontre était un heureux hasard pour la troupe dont je faisais partie, et de pareils objets lui présentaient un bien nouveau spectacle ; mais nul ne leur pouvait trouver comme moi ce charme dû à la comparaison et au souvenir, et depuis longtemps ami des troupeaux, seul je les abordais en ami, jouissant de leur curiosité, de leurs craintes et de leur farouche étonnement.

663. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

Ici c’est l’antipathie de nature et de talent qui se prononce par la bouche de Bossuet, et qui s’aiguise, à son insu, d’humeur et des souvenirs invétérés de la lutte. […] ce n’est pas seulement les honneurs de la réception qui m’ont charmé, et dont je conserverai toute ma vie le souvenir avec la reconnaissance, mais c’est bien plus ce beau modèle des prélats en qui j’ai vu et admiré plus de choses que la réputation ne m’en avait appris. […] Il écrivait le 11 décembre 1702 à Fleury, non pas à l’abbé, mais à l’évêque de Fréjus, le futur premier ministre de Louis XV, « que l’esprit d’incrédulité gagnait toujours dans le monde ; qu’il se souvenait lui en avoir souvent entendu faire la réflexion ; que c’était encore pis à présent, puisqu’on se servait même de l’Évangile pour corrompre la religion des peuples ».

664. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Mélanges scientifiques et littéraires, (suite et fin.) »

Il n’y trouvait de comparable et d’égal dans ses souvenirs que ces autres entretiens de la petite société d’Arcueil, groupée autour de Laplace et de Berthollet, et qui, active, régulière, ayant ses jours de réunion et son recueil à elle, tout armée pour le progrès scientifique le plus avancé, avait fini par inspirer quelque jalousie à l’Institut lui-même. […] Stanislas Julien ; animé par le souvenir de son fils enlevé prématurément, et qui s’était occupé de ces mêmes études, il a fait dans l’année qui précéda sa fin une œuvre considérable, tout un livre, qui court risque de ne pas rencontrer un seul contradicteur : car il y a à peine des juges. […] Il lui exprima son approbation, en ajoutant ces mots qui résument, ce me semble, à merveille le genre d’égards qui restent dus aux anciens noms historiques, dans la juste et stricte mesure des idées de 89 : « On vous doit, monsieur, les occasions de vous distinguer ; mais souvenez-vous bien toute votre vie qu’on ne vous doit que cela. » M. 

665. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. » pp. 31-51

Que d’autres aillent s’amuser et s’éterniser dans ces vieilles contrées usées de Rome, de la Grèce ou de Byzance, lui il était allé choisir exprès un pays de monstres et de ruines, l’Afrique, — non pas l’Égypte trop décrite déjà, trop civilisée, trop connue, mais une cité dont l’emplacement même a longtemps fait doute parmi les savants, une nation éteinte dont le langage lui-même est aboli, et dans les fastes de cette nation un événement qui ne réveille aucun souvenir illustre, et qui fait partie de la plus ingrate histoire. […] Emportée par les souvenirs de Carthage, elle chantait maintenant les anciennes batailles contre Rome ; ils applaudissaient. […] Et puis, comme le Gaulois est né malin et qu’il y en a dans l’armée des Mercenaires, je ne fais qu’imiter leur exemple en y mêlant, vaille que vaille, le souvenir de cette gaie parodie chantante, Paris à cinq heures du matin : L’ombre s’évapore, Et déjà l’aurore De ses rayons dore, etc.

666. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

Doré est bien celui d’un artiste qui se souvient du Cid de la légende jusque dans la chute et le délire du dernier et du plus lamentable de ses descendants. […] Le capitaine de sa compagnie, quand il combattit à Lépante, était Diego de Urbina, et il s’est plu à le nommer dans Histoire du Captif, qui n’est pas la sienne, mais qui est toute parsemée de ses souvenirs. […] Les blessures que le soldat porte sur le visage et sur la poitrine sont des étoiles qui guident les autres au ciel de l’honneur et au désir des nobles louanges3… » Cervantes garda toujours un cher souvenir de cette vie d’honneur et de misère qui est la vie du soldat, et à certain jour il l’a célébrée d’une façon toute noble et sérieuse par la bouche de son Don Quichotte.

667. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

Souvenirs d’un diplomate. […] Il se loue de lui dans ses Souvenirs ; il se croyait mieux avec ce ministre qu’il ne l’était en réalité, et il suffit pour cela de voir en quels termes peu favorables M. de Senfft s’est exprimé sur son compte. […] Bignon, dans ses Souvenirs, a un avantage sur M. de Senfft dont il ne prévoyait pas les sévérités : il le réfute de la manière la plus propre à faire impression sur des lecteurs impartiaux ; il parle avec justice, et dans une parfaite mesure, de celui qui en a manqué à son égard : « M. de Sentit, dit-il, était en 1811 et est resté jusqu’à la fin de 1812 zélé partisan du système français (on le croyait, et il paraissait tel sans l’être au fond).

668. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « GLANES, PÖESIES PAR MADEMOISELLE LOUISE BERTIN. » pp. 307-327

Ce volume en fait la réponse naturelle, très en harmonie avec les accords qui l’ont provoquée ; il est, après dix ans, l’expression en poésie de ces saisons déjà anciennes, décorées et embellies encore par le souvenir. […] Et souvenez-vous de moi dorénavant, lorsqu’ici viendra, après bien des travers, quelqu’un des hôtes mortels, et qu’il vous démandera : « O jeunes filles, quel est pour vous le plus doux des chantres qui fréquentent ce lieu, et auquel de tous prenez-vous le plus de plaisir ?  […] Mademoiselle Bertin, on le comprend, a serré de moins près les souvenirs classiques, et quelquefois, dans cette plus libre façon, elle ne les a pas moins bien exprimés.

669. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires de madame de Staal-Delaunay publiés par M. Barrière »

Le séjour au château de Silly chez une amie d’enfance, l’arrivée du jeune marquis, son indifférence naturelle, la scène de la charmille entre les deux jeunes filles qu’il entend sans être vu, sa curiosité qui s’éveille bien plus que son désir, l’émotion de celle qui s’en croit l’objet, son empire toutefois sur elle-même, la promenade en tête à tête où l’astronomie vient si à propos, et cette jeune âme qui goûte l’austère douceur de se maîtriser, cette suite légère compose tout un roman touchant et simple, un de ces souvenirs qui ne se rencontrent qu’une fois dans la vie, et où le cœur lassé se repose toujours avec une nouvelle fraîcheur. […] « Le sentiment qui a gravé ces petits faits dans ma mémoire m’en a conservé, dit l’auteur, un souvenir distinct. » Même en les dépeignant, voyez comme sa sobriété se retrouve ! […] Il est un degré d’expérience et de connaissance du fond, passé lequel il n’y a plus d’intérêt à rien, pas même au souvenir ; il faut se hâter, à cet endroit-là, de tirer la barre, et fermer à jamais le rideau.

670. (1890) L’avenir de la science « XII »

Et, quand on pense que des millions de millions d’êtres sont nés et sont morts de la sorte sans qu’il en reste de souvenir, on éprouve le même effroi qu’en présence du néant ou de l’infini. […] Je vais dire le plus ravissant souvenir qui me reste de ma première jeunesse ; je verse presque des larmes en y songeant. Un jour, ma mère et moi, en faisant un petit voyage à travers ces sentiers pierreux des côtes de Bretagne qui laissent à tous ceux qui les ont foulés de si doux souvenirs, nous arrivâmes à une église de hameau, entourée, selon l’usage, du cimetière, et nous nous y reposâmes.

671. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Madame Récamier. » pp. 121-137

Je pourrais ici raconter de souvenir bien des choses, si ma plume savait être assez légère pour passer sur ces fleurs sans les faner. […] Dans ses souvenirs elle choisissait de préférence un trait fin, un mot aimable ou gai, une situation piquante, et négligeait le reste ; elle se souvenait avec goût.

672. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

Qui ne s’en souvient ? […] Mais ses passions s’ajoutèrent à ses facultés et surtout cette « force en gueule », qui la met à part parmi les bas-bleus ; et pour cette raison, aux sots elle parut tonitruante, et on se souvient encore de son bruit. […] il n’y a non plus dans les Derniers Abbés qu’un abbé et encore qui n’est pas un prêtre, et c’est tout simplement l’homme célèbre des Souvenirs d’une Cosaque, dont pour mon compte je n’ai rien à dire ici, parce que les bas-bleus, peut-être méprisés par lui, s’en vengent, en le déshonorant… Mme Colet qui n’a que cet homme, croirait-on, pour sujet de son livre, le peint avec l’envie jaune et la haine verte qu’elle a mise ailleurs à peindre la Princesse Belgiojoso, et c’est alors qu’on reconnaît, dans ce livre, acharné contre un rival en bruit, qui l’a écrasée de sa supériorité, la gargouille inépuisable qui jette son injustice à toute face et dont les livres furent toujours ou les crachoirs de ses colères ou les bassins de ses incontinentes passions !

673. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

Rendre justice aux adversaires, se souvenir qu’ils sont des Français lorsqu’eux-mêmes l’oublient, les admirer pour leur vertu égarée, désespérée, parler de clémence au moment où il ne s’agit que de frapper, ce n’est le fait ni d’un soldat, ni d’un poëte, ni même, je le dirai, d’un contemporain. Souvenons-nous, hélas ! […] Alfred de Musset semble s’être inspiré de cette douceur d’harmonie dans ses beaux vers sur Fontainebleau, et ce Souvenir de lui, si plein de tendresse, est précisément dans le même rhythme que les Stances de Malherbe150. […] Je ne ferai pas grâce du texte le plus célèbre ; mais je le réduirai à sa valeur : « Vous vous souvenez, a dit Balzac, par la bouche, il est vrai, de son Socrate chrétien, vous vous souvenez du vieux pédagogue de la Cour qu’on appelait autrefois le tyran des mots et des syllabes, et qui s’appelait lui-même, lorsqu’il était en belle humeur, le grammairien en lunettes et en cheveux gris. […] Il y a dans cette lettre bien des choses qui méritent qu’on s’en souvienne toujours : « Quant à moi, lui dit-il, qui ne veux rien au-delà de ce qui m’appartient, je tourne les yeux de tous côtés pour trouver sur quoi est fondé l’honnête remercîment que vous me faites… Je vois bien que l’on vous a dit que je défendis votre cause.

674. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

On rendrait mal cet oubli de toutes choses et de soi-même où elle jette un instant celui qui s’y livre, cette rêverie, ce trouble, cet abandon où l’âme, uniquement préoccupée d’une image, d’un sentiment, d’une sensation même, perd un moment le souvenir et la prévoyance, et se berce elle-même du chant qui lui échappe. […] Il n’y eut plus, après ce long et détestable ministère, qu’une courte halte sous M. de Martignac, une halte en apparence triomphante, mais inquiétée au fond et compromise par le souvenir de tout ce qui avait précédé. […] Ce serait une occasion heureuse de résumer et de concentrer autour d’une figure brillante tant de souvenirs personnels devenus sitôt de l’histoire215. […] Elle l’a aussi précédé, si nous nous en souvenons bien, au sein de l’esprit de M. de Rémusat. […] Comme souvenir littéraire du temps de cette éducation, j’ai entre les mains une rare brochure, un petit poëme (Lysis) censé trouvé par un jeune Grec sous les ruines du Parthénon, et dont M. 

675. (1925) La fin de l’art

Je cherchais, un peu honteux de mon ignorance, quand je me souvins que c’est là une des rares villes de Belgique annexées linguistiquement par les Anglais. […] Ce n’était pourtant pas le vulgaire roman, mais des souvenirs contemporains et j’en attendais quelque plaisir. […] Mais on vient de récompenser le recueil choisi de ses œuvres et voici une occasion, plus sensée qu’un anniversaire, de rappeler son souvenir. […] La grande distraction de l’homme enrhumé est d’abord de rechercher dans ses souvenirs, épais comme le brouillard, la cause de son rhume. […] Mais les souvenirs s’épaississent encore, et il ne nous reste de conscience que pour courir après une respiration qui menace de s’échapper tout à fait.

676. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre III. Variétés vives de la parole intérieure »

Chez l’homme passionné, au contraire, elle est rare : la passion se répète souvent, mais à son insu ; elle se croit toujours nouvelle ; c’est qu’en effet, prise en elle-même, indépendamment des faits accessoires qui l’accompagnent et la modifient, elle n’est pas soumise à la loi de l’habitude ; tant qu’elle dure, elle est toujours à l’état naissant ; si elle disparaît, elle peut renaître ; mais ce n’est pas là la répétition qu’on appelle habitude ou souvenir, c’est un recommencement dont le passé ne rend pas compte. […] Séparons avec soin dans les textes ce qui doit être attribué, d’une part à l’imagination de Platon, et d’autre part à ses souvenirs et à ceux de Xénophon. Les souvenirs seuls ont la valeur de documents historiques ; les passages qui nous paraissent présenter ce caractère sont courts ; nous y trouvons d’abord plusieurs définitions générales du phénomène, définitions plus ou moins explicites, mais concordantes ; puis l’indication d’une de ses applications habituelles ; enfin, un seul exemple particulier nous paraît pouvoir être reçu comme authentique. […] Puis la prosopopée prit place dans les rhétoriques parmi les conventions oratoires ; sa vérité psychologique, de plus en plus faible à mesure que les esprits se raffinaient, fut oubliée ; on ne se souvint plus que de sa valeur esthétique et de sa vertu démonstrative. […] A l’instant, j’ai changé de visage et l’esprit tendu, je me suis mis à rechercher si les enfants utilisaient d’habitude dans tel ou tel genre de jeu une ritournelle semblable ; non aucun souvenir ne me revenait d’avoir entendu cela quelque part.

677. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Pourquoi, dans notre âge sceptique, accepte-t-on si mal volontiers de se souvenir qu’ils prirent gloire à servir la messe ? […] Un effet physique, un sombre souvenir, mais surtout une comédie. […] Notre injuste génération devrait se souvenir qu’elle doit à Lamartine la possibilité des Poëtes qui l’ont suivi. — À lui-même elle doit, au prix de négligences qui vont à l’oubli, des vers d’un lyrisme unique et qui sont encore dans tous les bons souvenirs. […] Les étiquettes-mêmes qu’elle a choisies n’ont pas fait fortune : qui se souvient des « Vivants » et des « Brutalistes » ? […] Qu’on se souvienne tout à coup que c’est un lion, et on comprend.

678. (1874) Premiers lundis. Tome I « Ferdinand Denis »

De retour dans sa patrie, il est revenu sur ses souvenirs : dans un temps où quiconque a vu est si empressé de dire, à un âge où l’on résiste si peu à l’épanchement d’une première impression, il a su longtemps contenir sa pensée, et l’a mûrie par de grands et consciencieux travaux. […] Mais ici, autour de l’idée principale, venaient naturellement se grouper une foule de questions accessoires que l’auteur a négligées et que provoquait l’esprit de l’époque : jusqu’à quel point est légitime et approuvé par le goût cet emprunt d’images étrangères ; en quoi il peut réellement consister ; si c’est en bravant l’harmonie par une foule de mots barbares tirés d’idiomes encore grossiers, ou en reproduisant simplement une pensée naïve, une coutume touchante d’un jeune peuple, si c’est en s’emparant sans discernement des êtres créés dans des mythologies étrangères, ou en ne s’enrichissant que des allégories ingénieuses et faites pour plaire en tous lieux, que le poète imitateur méritera dignement de la littérature nationale ; ou encore, s’il n’y a pas l’abus à craindre dans ce recours trop fréquent à des descriptions de phénomènes ; si Delille, Castel, que l’auteur cite souvent, et les écrivains de cette école qu’il paraît affectionner, s’en sont toujours gardés ; si enfin il n’y a pas souvent cet autre danger non moins grave à éviter, de parler à la nation d’une nature qu’elle ne comprend pas, d’en appeler à des souvenirs qui n’existent que pour l’écrivain, et réduire l’homme médiocrement éclairé à consulter Buffon ou Cuvier pour entendre un vers.

679. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre premier. Vue générale des épopées chrétiennes. — Chapitre III. Paradis perdu. »

On ne peint bien que son propre cœur, en l’attribuant à un autre ; et la meilleure partie du génie se compose de souvenirs. […] Ce vieux monarque, dont le seul crime est d’aimer trop un fils coupable ; ce généreux Hector, qui connaît la faute de son frère, et qui cependant défend son frère ; cette Andromaque, cet Astyanax, cette Hécube, attendrissent le cœur, tandis que le camp des Grecs n’offre qu’avarice, perfidie et férocité : peut-être aussi le souvenir de l’Énéide agit-il secrètement sur le lecteur moderne, et l’on se range sans le vouloir du côté des héros chantés par Virgile.

680. (1865) Du sentiment de l’admiration

  Parmi les qualités que je me plais à vous reconnaître, je vous ai trouvé un défaut, un, ce n’est pas beaucoup avancer ; mais ce défaut est assez fâcheux pour que je prenne à cœur de vous le signaler avec force, dussé-je vous laisser de moi le souvenir d’un morose donneur de conseils, Caton malencontreux, Orbilius de la dernière heure ! […] le souvenir de cet héroïsme moral rayonnera toujours devant ses yeux.

681. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIII. Éloges donnés aux empereurs, depuis Auguste jusqu’à Trajan. »

Dans ces temps de crise, où les gouvernements changent, et où les peuples agités passent de la liberté républicaine à une autre constitution, l’homme d’état a besoin de l’homme d’esprit ; Horace, par le genre du sien, était un instrument utile à Octave ; ses chansons voluptueuses adoucissaient des esprits rendus féroces par les guerres de liberté ; ses satires détournaient sur les ridicules, des regards qui auparavant se portaient sur le gouvernement et sur l’État ; sa philosophie, tenant à un esprit moins ardent que sage, prenant le milieu de tout, évitant l’excès de tout, calmait l’impétuosité des caractères et plaçait la sagesse à côté du repos ; enfin ses éloges éternels d’Octave accoutumaient au respect et faisaient illusion sur les crimes ; la génération, qui ne les avait pas vus, était trompée ; celle qui s’en souvenait, doutait presque si elle les avait vus. […] Pour résoudre le problème, il faut se souvenir que Néron ne fut pas toujours un monstre.

682. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIV. Panégyrique de Trajan, par Pline le jeune. »

Il se souvient qu’il est homme, il se souvient qu’il commande à des hommes29… « Les riches ont d’assez grands motifs pour donner des citoyens à l’État, il n’y a qu’un bon gouvernement qui puisse encourager les pauvres à devenir pères.

683. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

Ne devait-il pas être présent à nos pensées, le souvenir de tant d’excès auxquels purent se porter des soldats égarés ? […] « Auguste se rappelle à votre souvenir. » « Ce 15 février (1812 ?). […] Revoil147; mais je n’ai trouvé d’autre charme dans sa conversation que les souvenirs de la patrie lyonnaise. […] Je voudrais bien obtenir de vous et de Julie la journée de mardi. — Je pars incessamment pour les eaux, et je voudrais emporter le souvenir d’une journée de vous. […] Je consulte une intéressante brochure intitulée Souvenirs épistolaires de MmeRécamier et de Mme de Staël, par  M. 

684. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

Les Souvenirs du peuple, de Bérenger, étaient assurément un bel exemple à suivre. […] Le souvenir de Martine nous demeure en mémoire comme une des meilleures figures de la Kermesse, de Rubens. […] C’est à peine si elle se souvient des paroles dures et brutales de son maître. […] Mais le souvenir du passé doit nous consoler et raffermir nos espérances. […] Alors, on s’en souvient, il marchait hardiment à la conquête d’un monde encore inconnu.

685. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

Le fragment que nous avons choisi pour le reproduire ici, contient peut-être les souvenirs d’enfance de Frédéric Mistral ; du moins la préface de ses Îles d’or permet de le croire. […] L’Aimant court par les rues de la ville, on lui demande s’il devient fou, et lui répond qu’il a mis dans, les mains du Seigneur sa volonté et son intelligence, ne se réservant que la mémoire pour se souvenir de lui. […] Maxime du Camp qui, au minimum, a écrit un bon livre, ses Souvenirs, et, ce qui est d’un homme supérieur, l’a écrit depuis qu’il est académicien ! […] On reprend les souvenirs. […] …. — Soudain il se dresse, va à la table, plie dans la nappe les restes du festin…. — Gueuse, ils s’en souviendront de ce jour, tes enfants !

686. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

Il garde à la race de David la fidélité du souvenir. […] » Le souvenir de son enfance abandonnée lui revient : « … Vous m’avez aimée de si loin ! […] Je me souviens cependant que, lorsque M.  […] quand c’est fini, on ne se souvient plus : cela n’arrive pas qu’à Marco. […]Souvenez-vous, souvenez-vous… — Fleurette, frappée : Oui, oui, je me souviens. — Le Comte : Et plus tard, sans transition aucune, une grande sensation de fraîcheur… de l’eau, de l’eau partout… une corbeille qui flotte… dans cette corbeille un enfant… Souvenez-vous, souvenez-vous… — Fleurette : Oui, oui, je me souviens. — Le Comte : Pas un mot de plus, vous êtes la princesse Hermia. » (Notez qu’on blague ici par surcroît Moïse sur le Nil : Mes sœurs, l’onde est plus pure aux premiers feux du jour…) Cinquièmement… ( « Horrible, horrible, très horrible ! 

687. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Peut-être un souvenir. […] Te souviens-tu des beaux jours lointains de tes printemps ? […] Aurait-on gardé mon souvenir ainsi que j’avais traversé mes épreuves ? […] En conséquence d’abord un livre de souvenirs d’enfance. […] Souvenirs de Gustave-Adolphe, de Charles XII et de la Finlande perdue.

688. (1916) Les idées et les hommes. Troisième série pp. 1-315

Il dit à la mémoire de Jenny : « Tu vois qu’on se souvient !  […] Peu à peu, l’amollissant souvenir de la journée trop délicieuse se dissipe. […] Souvenons-nous des jeunes morts. […] L’œuvre de Rémy de Gourmont, littérature d’hier, est digne de souvenir. […] Surtout, il avait à sa disposition ses souvenirs, et d’une acuité singulière.

689. (1891) Esquisses contemporaines

Rien, pas même le souvenir pour nous consoler. […] … Je suis bien jeune encore et je ne me souviens plus10. » Autrefois le souvenir était éternel, et l’on eut dit que jamais les hommes ne sauraient oublier. Maintenant il apparaît borné, incertain de lui-même, et, comme si les douleurs de la vie ne suffisaient point, on y ajoute, non pas les tourments du souvenir qui persiste, mais les angoisses du souvenir qui s’éteint. […] C’est l’état dominical, peut-être l’état d’outre-tombe… Les choses se résorbent dans leur principe ; les souvenirs multipliés redeviennent le souvenir ; l’âme n’est plus qu’âme et ne se sent plus dans sa séparation… Elle ne s’approprie plus rien, elle ne se sent point de vide. […] Ils sortent violemment de l’Église qui les a formés, mais non toutefois sans garder le souvenir de ses enseignements.

690. (1892) Portraits d’écrivains. Première série pp. -328

Dumas ne se souvient pas sans étonnement des difficultés qu’il rencontra alors. […] C’est étrangement abuser du souvenir d’un vers malencontreux. […] Elle ne se souvient de son nom que pour s’en servir, de son mari que pour l’exploiter ; se souvient-elle qu’elle ait une fille ? […] Inventer, pour lui, c’est se souvenir. […] L’art de la composition s’est perdu, et la pièce « bien faite » n’est plus qu’un souvenir.

691. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Il me souvient qu’on parlait de Kant et de l’impératif catégorique. […] Il parle brièvement, dans ses Souvenirs, de ces visites à Corinne. […] Les Souvenirs ne nous fournissent sur ce point aucun éclaircissement. […] Son âme se montra à découvert, soutenue par les souvenirs de la vie la plus noble et la plus pure. […] Il n’a pas perdu tout souvenir des animaux fabuleux qui peuplaient l’Ardenne légendaire.

692. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Toute notre imagination est faite de souvenirs. […] Pour tous les souvenirs tu tiens une merveille. […] Je menais une vie contemplative et solitaire dont le souvenir m’est encore infiniment doux. […] Nous ne pouvons pas, comme Tirésias, être homme et nous souvenir d’avoir été femme. […] Zola se trompe fort s’il croit que la religion d’aujourd’hui en a gardé le moindre souvenir.

693. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Pierre Loti a choisie pour conter ce qu’il lui souvient du matin de sa vie. […] Quoi qu’il en soit, il semble avoir châtié ses souvenirs. […] Jérôme repoussait avec une égale horreur votre souvenir et votre présence. […] C’est sa bonne humeur, qui rend son souvenir encore plaisant. […] Ce sont là des souvenirs qui ne s’oublient pas.

694. (1890) Causeries littéraires (1872-1888)

Mais ce n’était pas assez de réveiller pour lui-même ces chers souvenirs, M.  […] Renan ne parle que peu, comme s’il craignait de profaner ce souvenir sacré. […] Une révélation, ce souvenir se réveillant brusquement ! […] Alphonse Daudet vient dire, sans en avoir été chargé, aux quarante immortels : « Souvenez-vous que vous êtes mortels !  […] Daudet a conservé un mauvais souvenir du collège.

695. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

Le Vieux Drapeau, Le Cinq mai, Les Souvenirs du peuple]. — Mais, d’une manière générale, il a manqué de force [Cf.  […] Alexandre, Souvenirs sur Lamartine, Paris, 1884 ; — F.  […] Troubat, Souvenirs du dernier secrétaire de Sainte-Beuve, 1890. […] Flaubert, 4 volumes, 1887-1893, Paris, et, en tête du premier volume : « Souvenirs intimes » [par Mme Commanville, sa nièce] ; — Guy de Maupassant, « Étude sur Gustave Flaubert », 1885, en tête de l’édition des Œuvres complètes de Flaubert ; — Maxime du Camp, Souvenirs littéraires, Paris, 1882-1883. […] Asselineau, Baudelaire, sa vie et son œuvre, Paris, 1869 ; — Charles Baudelaire, souvenirs, correspondance, bibliographie [par Charles Cousin et Spoelberch de Lovenjoul], Paris, 1872 ; — Maxime du Camp, Souvenirs littéraires, Paris, 1882 ; — Charles Baudelaire, Œuvres posthumes et correspondance inédite, publiées par M. 

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