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780. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre quatrième. L’aperception et son influence sur la liaison des idées »

Ainsi, dans une de ses expériences, les images suivantes se présentèrent : un arc, une flèche, une personne tirant de l’arc et n’ayant que les mains visibles, un vol de flèches occupant complètement l’œil de la vision (contiguïté), des étoiles tombantes, de gros flocons de neige (ressemblance), une terre couverte d’un linceul de neige (contiguïté), une matinée de printemps avec un brillant soleil (contiguïté et contraste), une corbeille de tulipes, disparition de toutes les tulipes à l’exception d’une seule ; cette tulipe unique, de simple, devient double ; ses pétales tombent rapidement, il ne reste que le pistil, le pistil grossit, etc.

781. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre sixième. »

Borée et le soleil… Voici une des meilleures fables.

782. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre cinquième. La Bible et Homère. — Chapitre II. Qu’il y a trois styles principaux dans l’Écriture. »

Ce peuple, dont tous les pas sont marqués par des phénomènes ; ce peuple, pour qui le soleil s’arrête, le rocher verse des eaux, le ciel prodigue la manne ; ce peuple ne pouvait avoir des fastes ordinaires.

783. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Casanove » pp. 192-197

Quand on a une fois avoué que le soleil du peintre n’est pas celui de l’univers et ne saurait l’être, ne s’est-on pas engagé dans un autre aveu dont il s’ensuit une infinité de conséquences, la première de ne pas demander à l’art au-delà de ses ressources, la seconde de prononcer avec une extrême circonspection de toute scène où tout est d’accord ?

784. (1762) Réflexions sur l’ode

Que le soleil vienne éclairer tout à coup les habitants d’une caverne obscure, qu’il darde impétueusement ses rayons dans leurs yeux non préparés, il ne fera que les aveugler pour jamais ; il fera pis encore ; il leur rendra pour jamais odieux l’éclat du jour, dont ils ne connaîtront que le mal qu’il leur aura causé.

785. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire des ducs de Normandie avant la conquête de l’Angleterre »

De Rollon, le fils mystérieux de la fée des mers, jusqu’à Guillaume, le fils effronté d’Arlette, la sirène de la fontaine de Falaise, on compte quatre ducs, dont le dernier est ce Robert le Magnifique ou le Diable, en qui le Moyen Âge tout entier, sentiments, croyance, vertus et vices, se concentre ardemment et se reflète, comme un soleil dans une cuirasse d’or.

786. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Lettres portugaises » pp. 41-51

Dans ces pages qu’on dirait écrites par quelque plaintive Aïssé du xviiie  siècle, et non par une fille des sanctuaires fermés du Seigneur, on cherche en vain la Portugaise, la femme de ce pays où le soleil et la Dévotion font bouillir ces têtes virginales sous leurs frais et chastes bandeaux de lin, et les préparent aux incendies intérieurs et aux ravissements de l’extase.

787. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre II. Des éloges religieux, ou des hymnes. »

Dans ces premiers temps on loua la divinité au lever du soleil ; c’était une espèce de création nouvelle qui rendait l’univers à l’homme.

788. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVII. De l’éloquence au temps de Dioclétien. Des orateurs des Gaules. Panégyriques en l’honneur de Maximien et de Constance Chlore. »

On le loue de sa piété céleste, et de ce qu’il a bien voulu se rendre aux instances de la patrie ; « Empereur éternel, tu n’as pu résister aux larmes de cette mère auguste. » Après cela on le compare au soleil, qui, en remontant sur son char, et de ses propres mains le guidant dans les cieux, a réparé les désordres du monde, embrasé par l’ignorance de Phaëton.

789. (1824) Épître aux muses sur les romantiques

Que nous fait l’avenir, si nous vivons célèbres ; Si le siècle applaudit nos œuvres des ténèbres ; Si nos contemporains, sur la foi des journaux, Nous prennent bêtement pour des soleils nouveaux ; Si, courbés sous le poids des honneurs littéraires, Nous voyons, l’or en main, accourir les libraires ; Si, grâce à nos patrons, la cassette du roi Nous paie en bons louis nos vers de faux aloi ?

790. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XVII. »

« Heureuse et trop fortunée région, qui vois à la surface de l’Océan les derniers pas du soleil incliné, et entends frémir la roue de son char abaissé dans les flots, toi, Bétique !

791. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

En deux ou trois endroits, il eut la curiosité de descendre quelques minutes de sa chaise, où enfermé il étudiait Boileau, pour se donner le divertissement devoir de près des vaches, des paysans, la mer et un lever de soleil sur la campagne. […] Le soleil couché, il se promène à petits pas, sans regarder l’or et la pourpre du ciel éblouissant, cherchant « une lumière douce pour soulager ses faibles yeux ». […] Qu’on la remette à sa véritable place, qu’on lui rende son soleil, sa terre, qui sait ? […] Il va en Égypte, au bord du Nil, se plonge dans le fleuve, se glisse dans les roseaux, se couche sur le sable au soleil, immobile durant des heures entières, et sent s’éveiller en lui les instincts du crocodile387. […] Il place en Algérie l’antilope, à côté du lion, de la panthère et du chameau ; le cygne sur les étangs de nos parcs, à côté du canard et du poisson rouge ; le crocodile, à côté de l’ibis et de l’hippopotame, dans le limon du Nil et sous un soleil féroce ; et il se réjouit, en voyant tant de bêtes, tant de mœurs, tant de physionomies différentes, de la diversité de la nature388.

792. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

Et avec cela des yeux… tenez, quand il faisait ses Feuilles d’automne, nous montions, tous les soirs, sur les tours Notre-Dame, pour voir les couchers de soleil, — ce qui, entre nous, ne m’amusait pas beaucoup ; — eh bien, il voyait de là-haut, au balcon de l’Arsenal, la couleur de la robe de Mlle Nodier. » Oh ! […] Oui, par moments, ces deux fillettes semblent les filles de la nostalgie des pays de soleil de leur père. […] Je me sens du soleil sous la peau, et dans le verger, à l’abri des pommiers, couché sur la paille des boîtes de laveuses, il se fait en mon être un hébétement doux et heureux ainsi que par un bruit d’eau qu’on entend en barque, à côté de soi, roulant d’une écluse. […] Là-dessus marchent doucement, d’une marche harmonieuse et lente, des masses de petits nuages, balayés, ouateux et déchirés, d’un violet aussi tendre que des fumées dans un soleil qui se couche, et leurs cimes sont roses comme des hauts de glaciers, d’un rose de lumière. Devant moi, sur la rive en face, des lignes d’arbres à la verdure jaune et chaude encore de soleil, s’estompent dans le poudroiement des journées finissantes, en ces tons d’or qui enveloppent la terre avant le crépuscule.

793. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome III pp. 5-336

Le palais du soleil n’a rien de plus éclatant que Jéhovahk dans sa gloire. […] La durée du fait théâtral, selon l’expression d’Aristote, doit peu excéder un tour de soleil ; celle du fait épique n’a point de limite exacte. […] Longin attribue à sa vieillesse, qu’il compare au déclin du soleil couchant, la quantité de récits qui répandent dans ce poème une sorte de refroidissement et de langueur. […] Son art arrête le soleil, soulève l’océan, suspend les fleuves, et tire de la lune, qui descend à sa voix, une écume dont la force mystérieuse ressuscite les morts. […] « Tout passe ; et le soleil, centre de tant d’orbites, « D’un centre plus pesant n’est qu’un des satellites.

794. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

il répondait un jour en riant à quelques personnes qui l’engageaient à venir avec elles jouir d’un soleil de printemps : « Le soleil ! […] Intelligence platonique, vivant au pur soleil des idées, il ne voyait volontiers dans ce flambeau de notre univers qu’une, lanterne de plus, un moment allumée pour la caverne des ombres. […] Sa colère ressemblait tout à fait à celle de l’Écriture : « Mettez-vous en colère et ne péchez pas. » C’était un tonnerre en vue du soleil de vérité et dans les sphères sereines, la colère de l’intelligence pure. […] Nés fort mal à propos, trop tôt ou trop tard, nous avons essuyé toutes les horreurs de la tempête sans pouvoir jouir de ce soleil qui ne se lèvera que sur nos tombes. […] C’est dans le Ve qu’il avait commencé à accoster Bacon, à lui porter tant de piquantes atteintes : « Bacon fut un baromètre qui annonça le beau temps, et, parce qu’il l’annonçait, on crut qu’il l’avait fait. » Et lorsque, ne voulant pas de lui pour soleil, il essaie de se rabattre à une aurore  : « Et même, ajoute-t-il, on pourrait y trouver de l’exagération, car lorsque Bacon se leva, il était au moins dix heures du matin. » Une telle escarmouche aurait paru à tout autre un combat, mais, pour de Maistre, c’était peloter en attendant partie.

795. (1929) Les livres du Temps. Deuxième série pp. 2-509

Il a besoin de liberté, de soleil, d’espace et de carnage. […] Un dieu, je vous le déclare, et non un homme, qui a inventé de faire tenir ensemble dans un verre, Et la chaleur du soleil, et la couleur de la rose, et le goût du sang, et la tentation de l’eau qui est propre à être bue… Ah ! […] Si elle prend l’essor jusqu’au mythe, c’est avec une précision directement pittoresque : « Le soleil est sur la mer, au ras du rivage… Sa splendeur purpurine enflamme, sans les dissiper, les voiles tristes du crépuscule. […] Quant à Kalléméra, elle symbolise la lumière sereine, menacée par le dieu du soleil, dont les ardeurs excessives menacent de tout gâter et d’amener l’orage. […] Mon domaine à moi est celui du soleil, et vous ne détruirez ni l’eau, ni les palmiers, ni la fleur du rosier, ni l’ombre du cyprès.

796. (1853) Propos de ville et propos de théâtre

La semaine passée, encore, comme un rayon de soleil venait de luire, — profitant du moment où l’ingénieur Chevalier, son geôlier, avait le dos tourné, le mercure, — parvenu au plus haut degré de l’exaspération, — a voulu s’échapper du thermomètre, — comme autrefois Latude de la Bastille. […] Aussi n’est-ce point la peine de le désigner, même par son initiale : cela serait aussi inutile que d’allumer le gaz pour montrer le soleil. […] Ce n’est pas cependant qu’il ne possède, comme tous les humains bien organisés, la petite dose d’amour-propre qui est nécessaire à l’homme pour vivre, — comme l’air et le soleil. […] Lumley s’avance sur la scène, — il a le soleil sur son jabot, et l’on voit briller les planètes aux boutonnières de son gilet, — il salue à quatre-vingts degrés, pose la main sur son cœur et se prépare à prononcer un speach ; mais l’émotion, ou sa cravate, étranglent son éloquence, — et alors, — ah ! […] Par un beau soleil d’été, au milieu des champs qui exhalent Cette fraîche senteur des terres retournées, le jeune homme sent sa jeunesse faire irruption subite dans tout son être.

797. (1895) Les mercredis d’un critique, 1894 pp. 3-382

« Son âme transparente réfléchissait Dieu partout, de tous les êtres, de l’oiseau, du brin d’herbe, du soleil, du Loup de Gubbio, de la douleur, de la mort, surtout de la douleur, surtout de la mort. […] Cela se mouvait comme de la poussière de soleil, dans les ténèbres. […] Le premier jour qu’il vit le soleil se lever sur son rocher funèbre de Sainte-Hélène, il sauta de son lit en sifflant un air de romance. […] « Vers l’Occident le soleil incline, et un tressaillement formidable agite le cœur du désespéré. […] « Le soleil est couché.

798. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. BALLANCHE. » pp. 1-51

N’est-ce point parce qu’étant privées d’eau sur les lieux élevés et exposées à l’ardeur du soleil, cette divine Providence, qui donne sa parure aux lis des champs, a voulu que leur calice pût retenir la rosée du matin, et que la fleur épanouie rendît à sa tige le bienfait qu’elle en avait reçu avant d’éclore ?  […] Ainsi, notre terre a son double mouvement, et elle tourne à la fois sur elle-même et autour du soleil. […] L’histoire de sa générosité et de son sacrifice racontée à Mme Récamier, qui avait toujours l’âme ouverte à l’admiration pour tous les nobles sentiments, fit qu’elle se prit à lui avec toute l’affabilité et la tendresse de sa nature, et il s’épanouit lui-même en sa présence comme une plante languissante qui renaît aux rayons du soleil.

799. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre premier. Les caractères généraux et les idées générales. » pp. 249-295

. — Bien plus, beaucoup de nos corps chimiques, l’hydrogène, le fer, le sodium, d’autres encore, se rencontrent dans le soleil, à trente-cinq millions de lieues de notre terre, au-delà encore dans des étoiles si éloignées qu’il faut plusieurs années à leur lumière pour arriver jusqu’à nous, ou que leur distance échappe à toutes nos mesures. — À cette distance prodigieuse, les astres restent pesants comme notre terre ; on s’en est assuré par les mouvements des étoiles doubles. […] En effet, il y a un certain nombre de planètes autour du soleil. […] La rencontre n’est pas moins surprenante ; à notre construction intellectuelle correspond un mouvement réel, composé de la même façon à tous les points de vue, au point de vue de la courbe tracée, au point de vue des vitesses alternativement croissantes et décroissantes, celui des planètes autour du soleil.

800. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1886 » pp. 101-162

Jeudi 1er avril Traversée des Tuileries, par un coucher de soleil tout rose, dans lequel, la Barrière de l’Étoile semble une architecture, sculptée dans une nuée violette. […] Dimanche 16 mai Les grands desiderata de ma vie, ont été : — le Clodion représentant une montgolfière, au filet tendu autour du globe aérostatique, chevauché par une centaine d’Amours, poussé par moi, encore au collège, à 500 francs, et qui était à vendre, il y a une vingtaine d’années, chez Beurdeley : 65 000 francs ; — la grande tapisserie de Boucher, appelée « la Fête de village », manquée par un retard de voiture, à 800 francs chez Mme Saulière, et qui se vend maintenant 100 000 francs ; — une statuette de Saxe, aux chairs d’un rose adorablement pâle, une allégorie de l’Astronomie, représentée par une femme toute nue, regardant le ciel dans un télescope ; — un dessin de Watteau, la première idée de La Conversation, où était représenté M. de Julienne, vendu une soixantaine de francs, à une vente de Vignères ; — un dessin de Boucher représentant Madame de Pompadour, dans un faire miniaturé, au milieu d’un large encadrement composé avec les attributs des Arts, de la facture la plus large ; — une carpe dressée sur sa queue, en cristal de roche, du ton d’un verre de champagne rosé, et le plus joli et le plus doux feu d’artifice sous un coup de soleil, enfin un bibelot des Mille et Une Nuits. […] Tous les chefs-d’œuvre anciens, où les critiques voient du soleil, de la chair illuminée de lumière, m’ont paru bien tristes, bien blafards, bien noirs, et d’un artifice d’art bien surfait.

801. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

Je me souviens aussi du jour et de l’heure où je vis, pour la première fois, au soleil levant d’Athènes, les bas-reliefs de Phidias resplendir et se mouvoir, pour ainsi dire, sous les rayons ambiants de la lumière dorée sur le fronton du Parthénon ! […] X On apporta le déjeuner sur un guéridon, et, tout en déjeunant lentement et frugalement aux rayons du soleil levant sur les arbres et aux roucoulements des tourterelles sur les toits de la maison, Talma me disait : « La nature vous a donné le sentiment et l’harmonie des beaux vers ; vous ferez ce que vous voudrez faire. […] Ils ne s’assurent point en leurs propres mérites, Mais en ton nom sur eux invoqué tant de fois, En tes serments, jurés au plus saint de leurs rois, En ce temple où tu fais ta demeure sacrée, Et qui doit du soleil égaler la durée !

802. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Robert » pp. 222-249

Un jour que je considérais ce tableau, la lumière du soleil couchant venant à l’éclairer subitement par derrière, je vis toute la partie supérieure du grenier à foin teinte de feu, effet très-piquant, que l’artiste aurait certainement essayé d’imiter, s’il en avait été témoin ; c’était comme le reflet d’un grand incendie voisin dont tout l’édifice était menacé. Je dois ajouter que cette lueur rougeâtre se mêlait si parfaitement avec les lumières, les ombres et les objets du tableau, que je demeurai persuadé qu’elle en était, jusqu’à ce que, le soleil venant à descendre sous l’horizon, l’effet disparût. […] On y discerne sans fatigue les objets, même le chat et le cuvier qui placés à l’angle antérieur du mur latéral gauche, sont au lieu le plus opposé à la lumière, le plus éloigné d’elle et le plus sombre, le jour fort qui vient de l’ouverture faite au même mur frappe le chien, le pavé, le dos de la cuisinière, l’enfant qui est debout proche d’elle, et la partie voisine de la cheminée ; mais le soleil étant encore assez élevé sur l’horizon, ce que l’on reconnaît à l’angle de ses rayons avec le pavé, tout en éclairant vivement la sphère d’objets compris dans la masse de sa lumière, laisse le reste dans une obscurité qui s’accroît à proportion de la distance de ce foyer lumineux.

803. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — II. (Fin.) » pp. 98-121

Mais si les paroles sont un peu grosses et « moult félonnesses », si ce sont des paroles peut-être antiques de crudité, le motif est bien délicat et tout moderne : Je vous dirai pourquoi, dit Froissart qui ne perd jamais une occasion de glisser dans l’histoire un coin de galanterie : ces deux chevaliers, qui étoient jeunes et amoureux, ainsi le peut-on et le doit-on entendre, portoient chacun une même devise sur le bras gauche, une figure d’une dame en bleu brodée sous des rayons de soleil, et ils ne la quittoient jamais en aucun moment. […] Le lendemain matin, au soleil levant, le cardinal de Périgord revient encore à la charge ; mais cette fois il est reçu avec impatience du côté des Français, et renvoyé même avec colère.

804. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [IV] »

Mais le soleil avait tourné, le temps des triomphantes journées n’était plus51. […] La bataille de Dresde se livra sous des torrents de pluie, le contraire du soleil d’Austerlitz.

805. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Vie de Rancé »

« D’abord les lettres sont longues, vives, multipliées ; le jour n’y suffît pas : on écrit au coucher du soleil, on trace quelques mots au clair de la lune, chargeant sa lumière chaste, silencieuse, discrète, de couvrir de sa pudeur mille désirs. […] Mille serments couvrent le papier, où se reflètent les roses de l’aurore ; mille baisers sont déposés sur les mots qui semblent naître du premier regard du soleil ; pas une idée, une image, une rêverie, un accident, une inquiétude qui n’ait sa lettre.

806. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SUE (Jean Cavalier). » pp. 87-117

Dès la première scère de l’aveu qu’elle-même lui fait (comme déjà avait fait Hélène), sa méfiance, à lui si poli, éclate presque brutale ; cela pourtant se répare ; il est aimé, il croit, il est heureux : les jours de soleil se succèdent. […] Le réveil de ce camp agreste eût été beau au matin sous l’ardent soleil, au sein de cette végétation rare et forte, aux hautes odeurs.

807. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « M. MIGNET. » pp. 225-256

Cette destinée grave et sereine, toute studieuse, sans écart, me fait l’effet d’une belle et droite avenue dont les arbres sont peut-être plus hauts et mieux fournis en avançant : tout à l’extrémité, j’aime à y revoir ces premières stations plus riantes, sous le soleil. […] Antonio Perez, jeté en prison, retenu captif durant onze années, traité avec des alternatives de ménagement et de rigueur, selon ce qu’on craignit ou qu’on espéra de ses aveux ; puis, quand on le crut dessaisi de tous papiers et de tous gages, livré à la justice secrète de Castille, poursuivi pour un acte dans lequel il n’avait été que l’exécuteur d’un ordre royal, mis à la torture, Perez parvint, à force d’adresse, et par le dévouement de sa femme 81, à s’échapper en Aragon ; et là, devant un libre tribunal, le duel s’engagea à la face du soleil, entre le sujet sacrifié et le monarque.

808. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « UNE RUELLE POÉTIQUE SOUS LOUIS XIV » pp. 358-381

La destinée posthume de Mme Des Houlières ne manqua pas de vicissitudes ; elle semblait d’avance s’y attendre en se disant : Tandis que le soleil se lève encor pour nous, Je conviens que rien n’est plus doux Que de pouvoir sûrement croire Qu’après qu’un froid nuage aura couvert nos yeux, Rien de lâche, rien d’odieux Ne souillera notre mémoire ; Que, regrettés par nos amis, Dans leur cœur nous vivrons encore, Pour un tel avenir tous les soins sont permis ; C’est par cet endroit seul que l’amour-propre honore : Il faut laisser le reste entre les mains du sort. […] En feuilletant au hasard quelques petits in-12 oubliés, un reflet de soleil m’a paru éclairer et comme dessiner exactement cette traînée de parcelles dans la poussière ; si je ne l’avais pas saisie à l’instant, je ne l’aurais sans doute plus revue jamais.

809. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre I »

La Bruyère écrivait juste un siècle avant 1789607 : « L’on voit certains animaux farouches, des mâles et des femelles, répandus par la campagne, noirs, livides et tout brûlés du soleil, attachés à la terre qu’ils fouillent et remuent avec une opiniâtreté invincible. […] Les collecteurs, paysans comme lui et jaloux à titre de voisins, savent ce que son bien au soleil lui a rapporté ; c’est pourquoi on lui prend tout ce qu’on peut lui prendre.

810. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Le fameux passage des « pertes triomphantes à l’envi des victoires », des « quatre victoires sœurs, les plus belles que le soleil aye vu de ses yeux », est au chapitre des Cannibales : et les six ou sept pages les plus exquises que Montaigne ait écrites sur les anciens et sur la langue française, s’accrochent, Dieu sait comme, à une citation de Lucrèce, dans un chapitre intitulé Sur des Vers de Virgile, tout juste au milieu des plus scabreuses réflexions que Montaigne nous ait défilées. […] Il aurait mieux valu ne pas faire la Réforme : puisqu’elle s’est faite, qu’on lui laisse sa place au soleil.

811. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre II. La jeunesse de Voltaire, (1694-1755) »

Un moment Voltaire sent la piqûre d’un mot du roi, qui dans une ode l’a traité de soleil couchant : et le petit Baculard d’Arnaud était le soleil levant !

812. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre II. Des poëtes étrangers. » pp. 94-141

L’unité de lieu n’y est pas exactement observée ; mais l’action est une, & sa durée ne s’étend que depuis le lever du soleil jusqu’au coucher. […] Tantôt ce sont des figures outrées qui font un galimatias des termes pompeux de ciel, de soleil & d’aurore ; tantôt ce sont des saillies du Capitan Matamore, des mouvemens rodomonts qui ne laissent pas véritablement d’avoir de la grandeur & de la force, mais qui sont trop opposés aux usages, pour qu’ils puissent être goûtés des François.

813. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre x »

. — Le jeune Alfred Eschiman (qui va mourir pour la France), sur le point de quitter le dépôt d’Aubagne se promène un dimanche de février 1915 dans les bois de pin et les champs d’olivier sous le soleil, et murmure : « C’est si dur de se résigner à la mort à vingt ans ! […] Tout ce soleil de jeunes gens qui descend dans la mer, c’est une aube qui va se lever.‌

814. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre I. La conscience et la vie »

Dans des conditions déterminées, la matière se comporte de façon déterminée, rien de ce qu’elle fait n’est imprévisible : si notre science était complète et notre puissance de calculer infinie, nous saurions par avance tout ce qui se passera dans l’univers matériel inorganisé, dans sa masse et dans ses éléments, comme nous prévoyons une éclipse de soleil ou de lune. […] Cette énergie a été lentement, graduellement, empruntée au soleil par les plantes ; et l’animal qui se nourrit d’une plante, ou d’un animal qui s’est nourri d’une Plante, ou d’un animal qui s’est nourri d’un animal qui s’est nourri d’une plante, etc., fait simplement passer dans son corps un explosif que la vie a fabriqué en emmagasinant de l’énergie solaire.

815. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — I » pp. 143-149

La Motte qui demeurait rue Guénégaud, près du quai Conti, très froid, comme on sait, et exposé au nord, sentait le besoin de chaleur et de soleil en même temps que de conversation ; le quai d’en face les lui offrait ; il avait à lui sa chaise, c’était alors le luxe des demi-fortunes : « Il se faisait porter, nous dit Voltaire, autre bon témoin, depuis dix heures du matin jusqu’à midi, sur le pavé qui borde la galerie du Louvre, et là il était doucement cuit à un feu de réverbère. » Louvre et café Gradot, cela se touchait.

816. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « EUPHORION ou DE L’INJURE DES TEMPS. » pp. 445-455

Le pire qui nous puisse arriver, c’est que nous serons tous plus ou moins immortels, et bien loin que quelques-uns d’un peu intéressants se perdent tout entiers, dignes et moins dignes nous vivrons tous avec part au soleil et presque ex æquo.

817. (1874) Premiers lundis. Tome II « Loève-Veimars. Le Népenthès, contes, nouvelles et critiques »

La ville où l’on séjourne a beau être embrouillée, inégale, tortueuse, sans ordre et sans plan, pleine de carrefours, de tréteaux de charlatans, de passages et de ruelles, de monuments inachevés dont les pierres encombrent les places, d’arcs de triomphe sans chars ni statues de vainqueurs, de clochers et de coupoles sans croix : quand le soleil est couché, quand, du haut des collines prochaines, le voyageur qui n’est pas entré dans cette ville et qui n’y a pas vécu, l’aperçoit à l’horizon dessinant sa silhouette déjà sombre sur le ciel encore rougi du couchant, il la voit toute différente ; il y distingue des étages naturels, des accidents dominants, des masses imposantes et combinées ; les édifices que la distance et l’obscurité achèvent et idéalisent à ses yeux, lui apparaissent selon des hauteurs bien diverses.

818. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Note sur les éléments et la formation de l’idée du moi » pp. 465-474

Je savais cependant très bien que je n’étais pas éloigné ; je me souvenais très distinctement de tout ce qui m’était arrivé ; mais, entre le moment qui avait précédé et celui qui avait suivi mon attaque, il y avait un intervalle immense en durée, une distance comme celle de la terre au soleil.

819. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Verhaeren, Émile (1855-1916) »

Ils ont des polychromies d’ors et de pourpres, brasiers flambants où furent concassés des vitraux et des pierreries, où rutilent du soleil et du sang.

820. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes maudits » pp. 101-114

Les nostalgiques citronniers, aux feuilles blêmes, S’étiolent et leurs parfums, avec ennui, Meurent dans le Jardin peuplé de Chrysanthèmes : Pour la dernière fois, le soleil tiède a lui.

821. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XV » pp. 175-187

On souriait avec dédain à l’idée qu’on pût se permettre de dire : qu’une poésie est bien châtiée ; qu’un souris est fin, qu’un souris est amer ; qu’un mauvais poète est un bâtard d’Apollon ; que les peintres sont des poètes muets ; que le soleil est l’époux de la nature.

822. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre onzième. »

Peu s’en fallut que le soleil… Il ne restait plus à prendre que le ton de la tragédie ; et voilà La Fontaine qui le prend très-plaisamment, à l’occasion du désastre d’un poulailler.

823. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Notre critique et la leur »

Ils sont plus confus par leurs idées que par leur nombre, qui ne monte guères qu’à une dizaine, en comptant parmi eux deux revues ayant, comme on dit, pignon sur rue, et dont la place se voit au soleil.

824. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Roger de Beauvoir »

Mes fruits et mes vers ont mûri A ce beau soleil des Espagnes.

825. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Victor de Laprade. Idylles héroïques. »

… Le soleil a fixé sur mon docile airain, À fixer des hauts lieux cette image éternelle !

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