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1226. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Je cherche cette fraternité de cœur, cette tendresse dans l’œuvre naturaliste, et je trouve un parti pris de dénigrement, voisin de l’orgueil, une manière dure de parler de la misère, une brutalité de touche dans le portrait des pauvres gens, toujours représentés comme des êtres d’impulsion, esclaves des instincts, des hérédités et des passions, une tendance à considérer l’ouvrier comme une machine à boire et à faire des révolutions, qui dérivent d’un mépris foncier de l’espèce humaine, à moins qu’ils ne révèlent la plus certaine des incompréhensions. […] Cette race, toute portée à l’action, se représente le roman comme une biographie.

1227. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre III. »

D’une part, on a le langage de ce prophète illuminé de Dieu, que le ciseau de Michel-Ange nous représente avec des cornes de feu : d’une autre part, les premières expressions mêmes du poëte vous annoncent un messager du dieu Mercure, un adroit orateur pour l’intelligente et indocile Athènes. […] Ils représentaient, avec le rayon de feu sur le front, ce même combat de l’intelligence et de la vertu contre l’invasion homicide du dehors et la tyrannie homicide du dedans.

1228. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — V » pp. 123-131

M. de Valincour, avec son tact fin, fut le premier à le sentir ; il démêla à travers l’effusion de Villars une certaine adresse peut-être et une intention de gloire, l’ambittion « d’être le seul académicien que la postérité vît représenter à côté de Richelieu et de Louis XIV. » M. de Valincour se réserva donc, le jour où l’Académie reçut le portrait du maréchal, d’offrir pour sa part à la compagnie ceux de Despréaux et de Racine, et, sans faire tort au héros, l’égalité académique, la dignité des Lettres fut maintenue15.

1229. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — I » pp. 143-149

Et puisque nous en sommes à ces petites scènes et à ces historiettes vivantes du passé, représentons-nous bien les lieux et les gens comme ils étaient.

1230. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. A. Thiers : Histoire de la Révolution française — II. La Convention après le 1er prairal. — Le commencement du Directoire. »

Le sculpteur Phidias, nous dit-on, s’était représenté lui-même sur le bouclier de Minerve, et, par un ingénieux mécanisme, sa figure tenait tellement à l’ensemble qu’on ne pouvait l’enlever sans décomposer et détruire toute la statue : c’est là un symbole qui s’applique à l’historien.

1231. (1875) Premiers lundis. Tome III « Profession de foi »

Par des extraits de voyages, par des traductions et des analyses d’ouvrages étrangers, par des études de toute espèce sur le passé, le Globe cherchait à mettre sous la main de ses lecteurs les principaux éléments des questions ; à leur représenter les travaux antérieurs et l’état de la science contemporaine sur chaque point de controverse ; à leur apporter et à leur distribuer en ordre les matériaux les plus complets pour les solutions les plus larges et les plus conciliantes.

1232. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre VI. Du raisonnement. — Nécessité de remonter aux questions générales. — Raisonnement par analogie. — Exemple. — Argument personnel »

Car une liaison existe dans leur esprit entre ces circonstances et le fait : la réalité se représente en bloc dans leur imagination, et il leur semble impossible qu’elle ne soit pas tout ce qu’elle est.

1233. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre IV. La comédie »

Dans ces livrets d’une bouffonnerie énorme et pourtant fine898, dont la fantaisiste irréalité semble se rapprocher parfois de la comédie de Musset, dans cette « blague » enragée qui démolit tous les objets de respect traditionnel, en politique, en morale, en art, et qui ne reconnaît rien de sérieux que la chasse au plaisir, revit ce monde du second empire que les romans et les comédies, plus brutalement ou plus sévèrement, s’efforceront de représenter : monde effrénément matérialiste, si vide de conviction qu’il ne croyait même pas à lui-même, se moquant du pouvoir et de l’argent qu’il détenait, et se hâtant, avant de les perdre, d’en acheter le plus possible de plaisir.

1234. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XI. Trois bons médanistes : Henry Céard, Joris-Karl Huysmans, Lucien Descaves » pp. 145-156

L’un et l’autre représentent éminemment un réalisme appliqué ou émotionnel.

1235. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes maudits » pp. 101-114

Des chroniques insérées çà et là, dans les feuilles publiques, des pièces représentées dans différents théâtres, ont soulevé autour de son nom une certaine agitation.

1236. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre II. Enfance et jeunesse de Jésus. Ses premières impressions. »

Ce cercle enchanté, berceau du royaume de Dieu, lui représenta le monde durant des années.

1237. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIV. Rapports de Jésus avec les païens et les samaritains. »

Mais l’anecdote du chapitre IV de Jean représente certainement une des pensées les plus intimes de Jésus, et la plupart des circonstances du récit ont un cachet frappant de vérité.

1238. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Première partie. Plan général de l’histoire d’une littérature — Chapitre IV. Moyens de déterminer les limites d’une période littéraire » pp. 19-25

Sans doute, un siècle est un ensemble trop complexe pour être représenté par un seul individu.

1239. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XV » pp. 175-187

Quatre objets, qui se représentaient sans cesse aux yeux ou à la pensée sous la monarchie ancienne, et surtout dans la littérature, avaient fait contracter ces habitudes de respect : les femmes, les prêtres, les grands, les rois.

1240. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre III. Soubrettes et bonnes à tout faire »

Sans doute, il sait se déguiser de toutes les ambitions et il lui arrive de représenter le poète ou le critique comme un cabotin, aux lumières, est le roi ou l’honnête conseiller.

1241. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — L’orthographe, et la prononciation. » pp. 110-124

Appel sur le champ de la part de l’abbé au parlement : l’affaire alloit devenir sérieuse ; mais les professeurs royaux, engagés d’honneur à ne pas laisser condamner le plus zèlé défenseur de leur opinion, allèrent en corps à l’audience, représentèrent avec éloquence à la cour l’injustice des procédés de la Sorbonne.

1242. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Madame Therbouche » pp. 250-254

N’en déplaise à Boucher, qui n’avait pas rougi de prostituer lui-même sa femme d’après laquelle il avait peint cette figure voluptueuse, je dis que si j’avais eu voix dans ce chapitre-là, je n’aurais pas balancé à lui représenter que si, grâce à ma caducité et à la sienne, ce tableau était innocent pour nous, il était très-propre à envoyer mon fils, au sortir de l’académie, dans la rue Fromenteau qui n’en est pas loin et de là chez Louis ou chez Keyser ; ce qui ne me convenait nullement.

1243. (1767) Salon de 1767 « Les deux académies » pp. 340-345

Van Loo, chef de l’école, représenta qu’ils étaient tous innocens ou coupables ; que leur code n’était pas militaire ; et qu’il ne répondait pas des suites.

1244. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 8, des plagiaires. En quoi ils different de ceux qui mettent leurs études à profit » pp. 78-92

Le Poussin a pu se servir de l’idée du peintre grec qui avoit représenté Agamemnon la tête voilée au sacrifice d’Iphigenie, pour mieux donner à comprendre l’excès de la douleur du pere de la victime.

1245. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 9, de la difference qui étoit entre la déclamation des tragedies et la déclamation des comedies. Des compositeurs de déclamation, reflexions concernant l’art de l’écrire en notes » pp. 136-153

" voilà pourquoi dans les pieces faites pour être représentées sur le théatre, les artisans en prononciation etc. " je rapporterai le passage entier en parlant des masques dont les comédiens de l’antiquité se servoient.

1246. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Philippiques de la Grange-Chancel »

Engoulevent de vanité comme tout poète et pris à la pipée des éloges de salon, il s’était donné à la duchesse du Maine et faisait l’espoir de cette coterie de Sceaux, puissante non par elle-même, car elle ne fut jamais qu’une conspiration de Trissotins, ayant pour chef une Philaminte, mais parce qu’elle représentait, dans les hautes classes, l’opposition au misérable gouvernement du duc d’Orléans.

1247. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIII. P. Enfantin »

Enfantin représente la foi, la volonté, le consentement de plusieurs, en faisant la déclaration scandaleuse qu’il vient d’opposer tout à coup à l’enseignement d’un prêtre catholique, orthodoxe et respecté, nous dirons qu’il nous importe, à nous chrétiens, de savoir le danger qui nous menace, et si tout cela, comme nous le pensons bien plutôt, n’est que rêverie de visionnaire attardé qui ne peut guérir de son mal de jeunesse, il importe qu’on le sache aussi, afin que justice soit faite encore une fois de cette folie qui repousse, après vingt-trois ans, comme un polype indestructible, dans les têtes dont on le croyait arraché, et qu’enfin on n’y revienne plus !

1248. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Th. Gautier. Émaux et Camées »

Théophile Gautier représentait glorieusement l’école volontaire de la poésie travailleuse et, qu’on nous permette le mot, rageuse au travail, qui pose assez insolemment pour soi-même et pour le génie, que la Poésie est le résultat d’une poétique, la langue touchée, de telle ou telle façon, comme un piano, et qui croit simplifier et réaliser tout par des règles.

1249. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Paul Bourget »

L’Enfant sublime n’était qu’un enfant· Celui qui, dans l’ordre de la Poésie, représente le mieux la jeunesse interrompue d’Achille, Byron lui-même, Byron dont je viens de tant parler, n’a pas été poète du soir au matin.

1250. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre IV. De la méthode » pp. 81-92

Comment descendre d’une nature cultivée par la civilisation à cette nature inculte et sauvage ; c’est à grand’peine que nous pouvons la comprendre, loin de pouvoir nous la représenter ?

1251. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

La revanche ne se fit pas attendre : au mois de mai de l’année suivante, le même théâtre représenta, sous le titre d’Échec et Mat, un drame en cinq actes, où se révélaient, d’une manière évidente, assez de dons heureux, d’instincts de la scène et de brillantes promesses pour justifier un succès. […] Il représentait pour nous ce mariage de raison qui vient après les années de profusion et de folie, ce bon sens que l’on achète souvent si cher, et à qui l’on ne sait pas toujours gré des illusions qu’il corrige et des leçons qu’il donne. […] Mais la société est-elle aussi mauvaise, aussi ingrate envers le bien qu’on nous la représente, surtout dans une de ces circonstances solennelles, éclatantes, où l’homme qui pousse la loyauté jusqu’à l’héroïsme appelle nécessairement l’attention publique ? […] contre le mouvement religieux de ces dernières années, contre le publiciste éminent qui en représente le mieux le côté incisif et militant ? […] Il représente, il retrace tout ce que la société spirituelle et polie mêla de sécurités trompeuses, d’entraînements dangereux, de coupables tolérances aux événements qui précédèrent et suivirent 1830.

1252. (1885) Les étapes d’un naturaliste : impressions et critiques pp. -302

Si le roman est bien représenté en 1880, dans le mouvement de l’esprit espagnol, la poésie est encore plus féconde et plus riche en résultats. […] Et d’ailleurs, Victor Hugo excepté, qui représente la poésie à l’Académie ? […] Cette tolérance, l’École que représente momentanément M.  […] Le comité organisateur des fêtes latines de Montpellier en 1878, désirant faire représenter au grand théâtre une pièce félibrenque, eut le choix entre deux œuvres importantes. […] En vain, on lui représente que ses enfants sont son vivant portrait.

1253. (1888) Impressions de théâtre. Première série

Elle représente un portique derrière lequel s’ouvre la place du Palais-Royal. […] Pour cela il se blanchira de plâtre, et ses doigts écarquillés représenteront les trous du mur. […] Tous ensemble représentent ceux dont on ne sait pas pourquoi ils vivent, l’humanité superflue, c’est-à-dire les neuf cent quatre-vingt-dix-neuf millièmes de l’humanité. […] Mais, au reste, on aurait tort de croire que Marcel, Schaunard et Colline représentent la jeunesse des Écoles d’il y a quarante ans. […] Comme Baudry personnifie la bonté, Olivier nous représente la suprême lutte du bien et du mal dans une conscience.

1254. (1902) Le chemin de velours. Nouvelles dissociations d’idées

Qu’il s’agisse de poésie ou de géographie, la méthode est la même : une dissertation qui résume le sujet et qui a la prétention de le représenter. […] Cependant, comparé à ces petits morceaux de bois, le plus formidable métier mécanique n’est plus rien ; il représente une civilisation particulière : les aiguilles de bois ou de fer représentent la civilisation absolue. […] Dans la civilisation, la part des femmes représente l’essentiel. […] Si cela est vrai, et si les Jésuites, au contraire, représentaient moins de christianisme, ce sont les Jésuites dont un esprit sain devrait se faire le champion. […] Tous les hommes, par cela seul que leur cerveau fonctionne, se représentent un monde ; mais peu d’hommes se représentent un monde original.

1255. (1864) Le roman contemporain

Sera-ce le général Cavaignac, qui représente un service récent rendu à la société, sera-ce l’héritier du nom le plus grand des temps modernes, éclatant souvenir qui devient une espérance ? […] Seule, la Zinovèze, cette Génoise violente, orgueilleuse, implacable, attachée comme une furie, aux pas du volage La Florade, représente le mal dans ce roman, l’un des plus honnêtes qui soient nés sous la plume de George Sand. […] Comme Alfred de Musset, Gérard de Nerval appartenait à l’aristocratie de la bohème, dont Henry Mürger et Champfleury représentent la démocratie. […] Jules Janin, qui recommande vivement la lecture de ce volume aux jeunes femmes représentées par madame Armande Bernard, personnage supposé, il imagine, qui a devancé son conseil. […] Il leur faut une Proserpine dans leur écurie, une voiture bien attelée pour les conduire au bois et dans le monde, et ce mot de monde implique, dans le budget d’un jeune ménage, un chapitre représenté par un chiffre formidable, la toilette !

1256. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

À présent, quand on parle de justice, ce n’est plus une phrase morte qu’on récite, c’est une conception vivante qu’on produit ; l’homme aperçoit l’objet qu’elle représente, et ressent l’ébranlement qui la soulève ; il ne la reçoit plus, il la fait ; elle est son œuvre et sa maîtresse ; il la crée et la subit. « Ces mots justus et justitia Dei, dit Luther, étaient un tonnerre dans ma conscience. […] Représentez-vous cette figure pâlie, angoisseuse, et qui porte sous sa roideur et sous son flegme une ardeur secrète ; on la retrouve encore en Angleterre dans ces pauvres sectaires râpés qui, une Bible à la main, se mettent tout d’un coup à prêcher au milieu d’un carrefour, dans ces longues faces qui, après le service, n’ayant point eu assez de prières, entonnent un psaume dans la rue. […] Tâchez, pour comprendre ce grand changement, de vous représenter ces yeomen, ces boutiquiers qui, le soir, étalent cette Bible sur leur table, et la tête nue, avec vénération, écoutent ou lisent un de ses chapitres. […] Ils s’accommodent dans tous leurs détails à tous les détails du précepte qu’ils représentent, comme un voile souple se modèle sur le corps qu’il revêt. […] Voir le théâtre de Beaumont et Fletcher, les personnages de Bawder, Protalyce et Brunehaut dans Thierry et Théodoret. —  Dans The custom of the country, plusieurs scènes représentent l’intérieur d’une maison de prostitution, chose fréquente du reste dans ce théâtre (Massinger, Shakspeare).

1257. (1888) Poètes et romanciers

Faut-il rappeler cette  étrange description où il nous représente la bruyère violette mettant un camail au vieux mont, afin qu’il puisse dire sa messe sublime sous sa mitre de granit ? […] On voit par là quelle étrange erreur commettent ces critiquer qui déchaînent toutes les colères de leur vertu et les indignations de leur style contre cette vie, qu’ils représentent comme une orgie perpétuelle. […] N’est-ce pas là une bien touchante aumône de la part de ce chansonnier, que tant de plumes emportées nous représentent comme l’ennemi juré des prêtres et de l’Église ? […] Le Chercheur représente la science ; il est décidé à s’armer pour savoir , à se rendre fort contre toutes les illusions et tous les prestiges qui pourraient amollir son cœur. […] Le caprice du public représente dans la littérature ce que le hasard représente dans la science : l’ignorance des causes.

1258. (1908) Après le naturalisme

Le classicisme, l’encyclopédisme, le romantisme, le naturalisme commirent chacun à leur tour la réalisation d’une âme commune dont le moindre servant s’appliquait à représenter les différents aspects. […] Il représente une aberration momentanée de certains esprits. […] Il est dans l’essence des vérités de se représenter en impératif catégorique, de contraindre l’homme à leur obéir, à s’y soumettre et nous ne voyons aucune chimère à penser qu’une société d’individus possédant tous, consciemment, la vérité, s’organiserait en perfection et fonctionnerait merveilleusement, du seul fait de la croyance des hommes en la vérité. […] Elle ne représente pas une fonction qui s’accomplit pour son propre bénéfice. […] Surtout, il émerveille à montrer les rapports des idées entre elles, à représenter les multiples combinaisons du monde idéologique.

1259. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

Donc, puisque les temps employés sont les mêmes et que les espaces parcourus sont différents, la vitesse du mouvement composé ne sera pas la même que celles des mouvements composants ; elle sera représentée par la diagonale, et celles-ci seront représentées par les deux côtés de l’angle, ces trois lignes étant la mesure des espaces parcourus pendant l’unité de temps. […] Par rapport à un point donné, l’espace est infini, selon trois aspects : d’abord en longueur, ce que l’on figure en supposant un point qui, se déplaçant en ligne droite, engendre des deux côtés une droite infinie ; ensuite en largeur, ce que l’on figure en supposant que cette droite infinie, se déplaçant perpendiculairement à elle-même, engendre des deux côtés une surface infinie ; enfin en profondeur, ce que l’on figure en supposant que cette surface infinie, se déplaçant perpendiculairement à elle-même, engendre des deux côtés un solide géométrique infini. — Voilà des propositions que nous ne pouvons nous empêcher de tenir pour vraies, et là-dessus notre imagination se donne carrière ; nous nous représentons la durée et l’espace comme deux réceptacles infinis, uniformes, indestructibles. […] Si la supposition contraire est inconcevable, c’est que notre imagination répète exactement notre vision en lui donnant plus de portée ; l’œil interne ne fait qu’ajouter un télescope à l’œil externe ; partant, nous ne pouvons imaginer les deux perpendiculaires autrement que nous les voyons ; donc nous ne pouvons les prolonger mentalement, sans nous les représenter comme encore également distantes. — Il suit de là que les vérités dites nécessaires, ayant la même origine que les vérités d’expérience, sont sujettes aux mêmes restrictions et aux mêmes doutes. […] On peut se représenter les deux perpendiculaires sur une droite par l’imagination, et on peut les concevoir aussi par la raison.

1260. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

Et puis, Restif représente l’introduction dans notre littérature, d’une classe jusqu’à lui négligée ; c’est lui, le premier, qui a cherché à peindre le peuple. […] On veut voir l’homme, étudier sa physionomie, chercher les traces de ses passions ; on veut entrer dans sa vie, on l’anime, on se représente ses gestes, sa démarche, le son de sa voix. […] * *   * Cette réflexion me vient à l’idée à propos du Diogène, petit journal qui ne signifie rien, mais qui représente dans la jeune littérature la vantardise, l’aplomb et le ridicule qui ont le bonheur de s’ignorer. […] « C’est vous, monsieur Bonde, s’écria-t-elle, qui faites un tel tapage… Mme Le Camus s’est presque trouvée mal… Comment oserez-vous vous représenter à ses yeux ? […] * *   * Madame Bovary, roman par Gustave Flaubert, représente l’obstination de la description.

1261. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

Une nombreuse école, autour de lui, pense ou sent comme lui, qui n’est pas proprement une école, en ce sens qu’elle ne procède ni de lui, ni de personne qu’on en puisse appeler le chef, mais qui représente avec lui cet esprit ou plutôt cet instinct de résistance : épicuriens vulgaires, comme les Motin, les Sigogne et les Berthelot ; irréguliers et libertins, comme ce Théophile, contre qui le père Garasse écrira sa Doctrine curieuse des beaux esprits ; libres-penseurs hardis et cyniques, tels qu’on en trouve de portraiturés par douzaines dans les Historiettes de Tallemant des Réaux. […] Non seulement il peint d’après nature ; mais c’est véritablement de « l’actualité » qu’il s’inspire, et toute son ambition n’est que de représenter au vif « les mœurs de son temps ». […] « Nous avons ajouté beaucoup de mots », écrit en 1718 le rédacteur de la Préface de la seconde édition du Dictionnaire de l’Académie ; et en un autre endroit, il fait cette observation, qui n’intéresse pas uniquement la langue : « L’Académie n’a pas cru devoir exclure certains mots, à qui la bizarrerie de l’usage, ou peut-être celle de nos mœurs… a donné cours depuis quelques années… Il semble qu’il y ait en effet entre les mots d’une langue, une espèce d’égalité comme entre les citoyens d’une république ; ils jouissent des mêmes privilèges et sont gouvernés par les mêmes lois ; et comme le général d’armée et le magistrat ne sont pas plus citoyens que le simple soldat, ou le plus vil artisan… de même les mots de Justice et de Valeur ne sont pas plus des mots français, ni plus français, quoiqu’ils représentent les premières de toutes les vertus, que ceux qui sont destinés à représenter les choses les plus abjectes et les plus méprisables. » Veut-on connaître quelques-uns de ces mots ? […] Bossuet, Maximes sur la comédie, et Rousseau, Lettre sur les spectacles] ; — et que là même est la raison de son insuccès dans le combat qu’il a livré contre la préciosité ; — parce qu’il a enveloppé dans ses railleries ce que l’esprit précieux représente de légitime résistance à la grossièreté naturelle. — Si l’on peut dire que cette haine de la préciosité ferait le fond de l’esprit gaulois [Cf.  […] Paul de Rémusat, La Fontaine naturaliste] ; — et qu’on peut même se demander s’il les a observés de très près. — De la vérité scientifique et de la vérité poétique. — Qu’il suffit en tout cas que les animaux de La Fontaine soient quelque chose de plus pour lui que les masques des hommes ; — et ils le sont effectivement. — Ils ont pour lui leur physionomie très individuelle et nettement caractérisée ; — ils ont leur pelage ; — et ils ont surtout leurs mœurs. — Mais en le qualifiant de naturaliste, on veut dire : Que sa curiosité de la nature et la liberté de l’imitation qu’il en fait n’ont jamais été retenues ou modérées chez lui ; — ni par la nécessité de « faire sa cour » ; — ni par des obligations comme celles que les exigences du théâtre imposaient à Molière et à Racine ; — ni enfin par aucune considération de morale. — Il a pris ainsi l’habitude de s’intéresser à plus de choses que beaucoup de ses contemporains ; — et, de là, cette conséquence qu’il y a dans son œuvre une plus grande part de nature enclose et représentée que dans l’œuvre de pas un de ses contemporains. — Eux n’ont représenté que l’homme, et encore pas l’homme tout entier ; — La Fontaine, au contraire ; — et jusqu’à nous le montrer dans des attitudes qu’il eût mieux fait de ne pas représenter. — Il a aussi peint les animaux ; — et c’est en quoi la vie de sa Fable diffère de la sécheresse de la fable ésopique [Cf. 

1262. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

La Fontaine est moraliste, et non pamphlétaire ; il a représenté les rois, et non le roi. […] Ce sont de nobles vers que ceux où il représente « le malheureux lion, languissant, triste et morne, estropié par l’âge, pouvant à peine rugir, et cependant attendant son destin sans faire une seule plainte. »41 Ce lion « chargé d’ans » et qui pleure « son antique prouesse », mais qui souffre et meurt sans rien dire, et à qui l’insulte seule arrache un gémissement, est héroïque comme un personnage de Corneille. […] 58 Il fait « son petit compliment » au saltimbanque qui est devenu monarque, lui représente ses droit royaux en bon sujet et en légiste exact, l’attire dans un piège, et, à l’instant, changeant de ton, le tutoie, le ravale jusqu’à la place infime d’où le pauvre hère n’eût jamais dû sortir. […] Ils nous ont représenté qu’ils n’ont pas manqué, depuis notre avènement à la couronne, de se trouver à notre lever ; que nous les avons vus toujours sur notre passage, immobiles comme des bornes, et qu’ils se sont extrêmement élevés pour regarder sur les épaules les plus hautes Notre Sérénité.

1263. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxvie entretien. L’ami Fritz »

Un autre portrait représentait Frantz-Sépel Kobus, enseigne dans le régiment de dragons de Leiningen, avec l’uniforme bleu de ciel à brandebourgs d’argent, l’écharpe blanche au bras gauche, les cheveux poudrés et le tricorne penché sur l’oreille ; il avait alors vingt ans au plus, et paraissait frais comme un bouton d’églantine. Un troisième portrait représentait Zacharias Kobus, le juge de paix, en habit noir carré ; il tenait à la main sa tabatière et portait la perruque à queue de rat. […] Et maintenant, représentez-vous les cercles amoureux de la valse qui s’enlacent, les pieds qui voltigent, les robes qui flottent et s’arrondissent en éventail ; Fritz, qui tient la petite Sûzel dans ses bras, qui lui lève la main avec grâce, qui la regarde enivré, tourbillonnant tantôt comme le vent et tantôt se balançant en cadence, souriant, rêvant, la contemplant, puis encore s’élançant avec une nouvelle ardeur ; tandis qu’à son tour, les reins cambrés, ses deux longues tresses flottant comme des ailes, et sa charmante petite tête rejetée en arrière, elle le regarde en extase, et que ses petits pieds effleurent à peine le sol. […] Je représente le père de Kobus, dont j’ai été le meilleur ami… Eh bien !

1264. (1899) Préfaces. — Les poètes contemporains. — Discours sur Victor Hugo pp. 215-309

Depuis Homère, Eschyle et Sophocle, qui représentent la poésie dans sa vitalité, dans sa plénitude et dans son unité harmonique, la décadence et la barbarie ont envahi l’esprit humain. […] En dehors de cette recrudescence finale de la poésie intime et lyrique, une École récente s’est élevée, restauratrice un peu niaise du bon sens public, mais qui n’est pas née viable, qui ne répond à rien et ne représente rien qu’une atonie peu inquiétante. […] Ranimer les ossuaires est un prodige qui ne s’était point représenté depuis Ézéchiel. […] L’éclectisme actuel, représenté par la critique, n’est dû qu’à l’indifférence publique et à l’énervement des caractères.

1265. (1895) La science et la religion. Réponse à quelques objections

C’est ainsi, ou à peu près, que l’on peut essayer de se représenter les intentions du pape Léon XIII, et il semble que, depuis dix-sept ans, tous ses actes comme toutes ses paroles aient tendu à ce grand dessein. […] Je crains bien que Renan ne voulût dire plus élégamment, et moins franchement, la même chose, quand il nous avertissait de ne pas nous représenter les voyages de Paul et de Barnabé comme ceux « d’un Livingstone… ou d’un François-Xavier, mais plutôt comme ceux d’ouvriers socialistes répandant leurs idées de cabaret en cabaret ». […] Représentez-vous une armée, dont les soldats refuseraient l’obéissance à leurs officiers, comme différant avec eux d’opinion sur une question de discipline ou de service : telle est l’image du protestantisme. […] Mais je crois d’autre part les avoir assez loués ; « Intolérants et orgueilleux, — disais-je encore, il n’y a pas trois ans, — difficiles à manier, chagrins et moroses, méprisants et austères, affectant la religion jusque dans leur costume, les protestants, en revanche, possédaient la vertu dont ces défauts étaient comme l’enveloppe, et grâce à elle on peut dire qu’en 1685 et depuis plus d’un siècle, ils représentaient la substance morale de la France… Écartés des tentations par les mesures mêmes qui les éloignaient des emplois, ils se dressaient, dans la société du temps de Louis XIV, comme un enseignement vivant par l’ardeur de leur foi, par leur constante préoccupation du salut, parleuréloignement des plaisirs faciles, par la dignité de leurs mœurs, par la raideur même enfin et la fierté de leur attitude. » Ne pouvant pas abuser ici du droit de me citer moi-même, je renvoie le lecteur à l’étude, Sur la formation de l’idée de progrès dont je tire ces lignes.

1266. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Lélia (1833) »

Ce Trenmor, qui représente la vertu et l’impassibilité finale après l’expiation, n’est pas un être à l’usage des hommes ; il ne console ni ne dirige personne.

1267. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « en tête de quelque bulletin littéraire .  » pp. 525-535

Des individus remarquables, des talents nouveaux se sont produits, mais sans appartenir à aucun groupe existant, sans représenter aucune opinion, aucune doctrine fixe et saisissable.

1268. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — George Sand. Cosima. »

pour lui dire qu’elle ne l’aime pas, rien de plus scabreux, on le comprend, qu’une telle scène ; Geffroy, qui représente Alvise, l’entame très bien ; le gentilhomme impatient, relancé dans ses ruses, est obligé d’entendre au long la doléance, la sentence de l’honneur outragé.

1269. (1875) Premiers lundis. Tome III « L’Ouvrier littéraire : Extrait des Papiers et Correspondance de la famille impériale »

Cette littérature est assez fidèlement représentée par la Société dite des Gens de Lettres.

1270. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la religion. »

Les passions se disputaient son existence ; il représentait à lui seul toutes les idées contre lesquelles on était armé.

1271. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre V. Des personnages dans les récits et dans les dialogues : invention et développement des caractères »

Il faut donc se représenter : 1º le caractère ; 2º les circonstances ; 3º l’impulsion que les circonstances doivent donner au caractère.

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