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1357. (1895) Les confessions littéraires : le vers libre et les poètes. Figaro pp. 101-162

Voilà, monsieur, tout ce que je puis répondre pour le moment à votre interrogation. […] Un moment, Villiers de l’Isle-Adam put nous donner vertigineusement la nette perception du génie, mais… pft ! […] Je fais très peu de vers en dehors des œuvres dramatiques, et, en ce moment, je suis absorbé par la répétition de mon drame, le Fils de l’Arétin, au Théâtre-Français. […] Il n’est qu’une sorte de compromis entre le vers et la prose, et voici, je crois, le moment de nous méfier de ces bâtardises. […] Henri de Régnier, Adolphe Retté, Stuart Merrill, Ferdinand Hérold, qui sont des poètes de race et de vrais artistes, mais dont cette prosodie boiteuse entrave à tout moment la marche et brise le vol. 

1358. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre VI. La parole intérieure et la pensée. — Second problème leurs différences aux points de vue de l’essence et de l’intensité »

Toutes sont vagues, car elles sont dénuées de particularité : ce n’est pas un certain bruit d’un certain fouet, par exemple, qui figure dans le mélange analysé, mais le bruit du fouet en général, appauvri de toutes les circonstances particulières qui caractérisent le bruit ordinaire d’un certain fouet, et surtout un bruit déterminé de ce fouet, dans telles conditions, à tel moment. […] nullement ; il nous semble que nous venons de le découvrir et qu’un moment auparavant nous ne le voyions aucunement. […] Si alors le suscité, par sa nature propre ou grâce à l’attention qui lui est accordée, n’est pas atteint par l’habitude négative, il viendra un moment où la cause ne pourra plus être révélée que par son effet, où la connaissance de la loi qui réunit les deux phénomènes, jointe à la conscience distincte du second, pourra seule nous conduire à supposer l’existence du premier, puis à en retrouver quelques traces dans le souvenir. […] Les esprits les mieux faits sont ceux chez lesquels les actions opposées de l’habitude et de l’attention sont dans une corrélation rigoureuse, chez lesquels la rareté des extinctions partielles dispense d’ordinaire l’attention d’efforts passagers et pénibles, fatalement suivis d’un certain sommeil de cette faculté, et lui permet de répandre avec mesure son action bienfaisante sur tous les moments de la pensée. […] — En résumé, durant le sommeil, les mots et les idées sont dissociés ; le moment du réveil marque le rétablissement des associations formées pendant la veille.

1359. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

J’édifiais alors d’importants ouvrages qui me tenaient attentive de longs moments. […] À un moment, on trouva qu’on sentait un peu le froid et qu’il fallait fermer la fenêtre. […] Ce n’était pas le moment d’essayer de se sauver. […] la sœur Saint-Claire, sortant de sa classe, me surprit au moment du plus bel effet ! […] Quand le moment fut venu, on m’envoya me coucher.

1360. (1882) Essais de critique et d’histoire (4e éd.)

En ce moment survenait Cyrus, qui apprit l’affaire. […] En ce moment, Cléarque revint et demanda s’ils avaient répondu. […] Banni dès ce moment, il va trouver Cyrus. […] Il était fort affligé, et s’endormit pourtant un moment. […] En ce moment arrive Archagoras l’Argien qui fuyait.

1361. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Le Roy, Grégoire (1862-1941) »

Le Roy, par exemple, c’est une fenêtre où deux mains apparaissent en un geste d’énigme ; mais au lieu de donner à penser qu’il évoque ainsi un moment du cœur humain, ce poète a cru devoir en avertir dès les premiers mots, et en spécifiant qu’il s’agit des mains de la Mort.

1362. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1866 » pp. 3-95

— n’est-ce pas le style du moyen âge, le sentiment de cet art, qu’on croirait par moments n’avoir eu pour modèle qu’un peuple de figures à demi formées et comme une race de vivants embryonnaires ? […] Un souper froid, une causerie où l’on ne parlerait d’aucune des choses du moment ni de l’année présente. […] Le génie qui, dans ce moment-ci, déteint sur tout et sur tous : Il y a de La Mer de Michelet dans Les Travailleurs d’Hugo. […] Il est servi dans le moment par une bonne auvergnate, une de ces horribles femmes qui sont, à Paris, les bonnes malheureuses de la misère. […] Sur la comparaison, la table part d’un énorme éclat de rire, auquel, après un moment de stupéfaction de ce qu’il a été amené à dire, Renan s’associe gentiment au rire général.

1363. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » p. 503

Ses Poëmes, ses Comédies, ses Poésies diverses, ses Observations, ses Mémoires, ses Histoires, ses Testamens politiques, ses Dialogues, ses Lettres, ses Romans, ses Nouvelles, ses Contes, ses Calendriers, Ouvrages presque tous infectés de l’esprit de satire & du poison de la haine, peuvent être comparés à ces nuées d’infectes éphémères, qui piquent un moment & ne vivent qu’un jour.

1364. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Molière, en ce moment, était dans toute la joie et dans tout le bonheur du triomphe. […] En ce moment le siècle de Louis XIV s’agrandit de moitié ; la comédie a son temple et son dieu, la tragédie a son temple et ses dieux. […] En ce moment déjà, il comprenait qu’il serait le maître absolu des esprits et des intelligences de son temps. […] C’est à ce moment que se montre Philinte dans tout son horrible égoïsme. […] En ce moment, sa misanthropie est à son comble à force d’indécision, d’étonnement et de douleur.

1365. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

Je parle en ce moment de Lamartine, Victor Hugo, Alfred de Vigny etc. […] Dans l’histoire du développement social et philosophique de la France, le dix-huitième siècle a été ce mauvais moment. […] Au premier moment, je ne m’en préoccupais guère, car ma situation n’avait rien d’extraordinaire. […] « Depuis ce moment jusqu’à la chute du rideau, ce ne fut plus qu’un roulement. […] C’est de lui qu’on pouvait dire à tout moment : « du sublime au ridicule, il n’y a qu’un pas ! 

1366. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « [Note de l’auteur] » p. 388

[Note de l’auteur] Ce tome onzième de la première édition contenait une « Table analytique générale » pour les onze premiers volumes, car j’avais lieu de croire le recueil des Causeries terminé à ce moment.

1367. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — C — Cavalier, Stanislas »

Ces sortes d’impressions, à un certain moment, sont communes à toutes les âmes ; le poète les a rendues pour son compte avec simplicité et mélodie.

1368. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome xviii » pp. 84-92

Non, — il les désavouait pour leurs crimes, pour leur inhumanité, mais il sentit en même temps ce qu’il y avait dans quelques-uns des plus fameux d’essentiellement patriotique, d’héroïque et d’invincible. « Et, après tout, comme il le disait un jour, parlant à Chateaubriand lui-même, ç’a été une bataille où chaque parti a eu ses morts. » Et le plus affreux de la crise passé, aux différentes phases du décours, comme il touche à point les moments essentiels, les occasions irréparables et fugitives ! […] Thiers, au contraire, semble par moments s’être méfié davantage de sa plume, et il a redoublé, à l’égard des personnes, de précautions et de ménagements qui sont chez lui du meilleur, goût ; il y a mis proprement de la courtoisie ; mais le résultat, le fin mot est le même : l’impossibilité d’une durée pour ce premier essai de Restauration si mal conduit est également évidente.

1369. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Pensées »

Dans toutes ces traversées, je n’ai jamais aliéné ma volonté et mon jugement (hormis un moment dans le monde de Hugo et par l’effet d’un charme), je n’ai jamais engagé ma croyance, mais je comprenais si bien les choses et les gens que je donnais les plus grandes espérances aux sincères qui voulaient me convertir et qui me croyaient déjà à eux. […] La Nécessité, cette grande muse, m’a forcé brusquement d’en changer : cette Nécessité qui, dans les grands moments, fait que le muet parle et que le bègue articule, m’a forcé, en un instant, d’en venir à une expression nette, claire, rapide, de parler à tout le monde et la langue de tout le monde : je l’en remercie.

1370. (1874) Premiers lundis. Tome I « J. Fiévée : Causes et conséquences des événements du mois de Juillet 1830 »

Fiévée fidèle à son rôle d’infatigable observateur politique ; le voilà après ces brusques événements qui ont ébranlé bien des esprits réputés solides, et déconcerté quelques rares intelligences ; le voilà avec la même netteté de vue, la même finesse pénétrante que devant ; toujours oblique, prenant les questions de côté avec des solutions détournées, imprévues, mais vraies ; d’une ironie mordante quoique un peu froide ; paradoxal et positif ; logique au fond et décousu dans la forme ; faisant volontiers aboutir une idée générale à une anecdote qu’il aiguise ; visant au bon sens, aux chiffres, et malgré cela, spirituel par moments jusqu’à la subtilité. […] Comment aurait-il pu croire que le moyen de sauver la royauté était de renfoncer dans la Charte, de l’enchaîner à toutes ses conséquences, et surtout de la séparer de toutes les questions administratives, lorsque la plupart des politiques du moment où nous sommes sont encore persuadés que celui qui gouverne est nécessairement le chef de l’administration ?

1371. (1875) Premiers lundis. Tome III « L’Ouvrier littéraire : Extrait des Papiers et Correspondance de la famille impériale »

Et le moment est propice entre tous, l’à-propos est unique. […] On vit dans un temps où les journaux sont tout et où seuls, presque seuls, ils rétribuent convenablement leur homme : on est journaliste ; on l’est, fût-on romancier, car c’est en feuilletons que paraissent vos livres même, et l’on s’en aperçoit ; ils se ressentent à tout moment des coupures, des attentes et des suspensions d’intérêt du feuilleton ; ils en portent la marque et le pli.

1372. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre V. Des personnages dans les récits et dans les dialogues : invention et développement des caractères »

Aussi quand venait le moment pour lui d’entrer en scène, il se présentait à l’auteur avec la netteté d’un personnage réel dont tout un ensemble de faits moraux antérieurs nécessite la conduite et le langage. […] S’il vous est arrivé jamais de concevoir l’idée d’un enfantillage, d’une équipée, d’une folie, pure fantaisie de l’esprit inquiet et désœuvré, et de passer à l’exécution sans autre raison que l’idée conçue, sans entraînement, sans plaisir, mais fatalement, sans pouvoir résister ; — si vous avez repoussé parfois de toutes les forces de votre volonté une tentation vive, si vous en avez triomphé, et si vous avez succombé à l’instant précis où la tentation semblait s’évanouir de l’âme, où l’apaisement des désirs tumultueux se faisait, où la volonté, sans ennemi, désarmait ; — si vous avez cru, après une émotion vive, ou un acte important, être transformé, régénéré, naître à une vie nouvelle, et si vous vous êtes attristé bientôt de vous sentir le même et de continuer l’ancienne vie ; — si par un mouvement de générosité spontanée ou d’affection vous avez pardonné une offense, et si vous avez par orgueil persisté dans le pardon en vous efforçant de l’exercer comme une vengeance ; — si vous avez pu remarquer que les bonnes actions dont on vous louait n’avaient pas toujours de très louables motifs, que la médiocrité continue dans le bien est moins aisée que la perfection d’un moment, et qu’un grand sacrifice s’accomplit mieux par orgueil qu’un petit devoir par conscience, qu’il coûte moins de donner que de rendre, qu’on aime mieux ses obligés que ses bienfaiteurs, et ses protégés que ses protecteurs ; — si vous avez trouvé que dans toute amitié il y a celle qui aime et celle qui est aimée, et que la réciprocité parfaite est rare, que beaucoup d’amitiés ont de tout autres causes que l’amitié, et sont des ligues d’intérêts, de vanité, d’antipathie, de coquetterie ; que les ressemblances d’humeur facilitent la camaraderie, et les différences l’intimité ; — si vous avez senti qu’un grand désir n’est guère satisfait sans désenchantement, et que le plaisir possédé n’atteint jamais le plaisir rêvé ; — si vous avez parfois, dans les plus vives émotions, au milieu des plus sincères douleurs, senti le plaisir d’être un personnage et de soutenir tous les regards du public ; — si vous avez parfois brouillé votre existence pour la conformer à un rêve, si vous avez souffert d’avoir voulu jouer dans la réalité le personnage que vous désiriez être, si vous avez voulu dramatiser vos affections, et mettre dans la paisible égalité de votre cœur les agitations des livres, si vous avez agrandi votre geste, mouillé votre voix, concerté vos attitudes, débité des phrases livresques, faussé votre sentiment, votre volonté, vos actes par l’imitation d’un idéal étranger et déraisonnable ; — si enfin vous avez pu noter que vous étiez parfois content de vous, indulgent aux autres, affectueux, gai, ou rude, sévère, jaloux, colère, mélancolique, sans savoir pourquoi, sans autre cause que l’état du temps et la hauteur du baromètre ; — si tout cela, et que d’autres choses encore !

1373. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Réponse à M. Dubout. » pp. 305-316

Vous dites : « À quel moment Prétextat saurait-il que la confession de Frédégonde n’est pas sacramentelle ?  […] Vous alléguez que Prétextat est trop troublé, à ce moment-là, « pour débrouiller un problème de casuistique ».

1374. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XV. La commedia dell’arte au temps de Molière et après lui (à partir de 1668) » pp. 293-309

De ce moment, le théâtre italien prend aux yeux de l’histoire un intérêt d’une autre sorte ; mais il perd celui qu’il offrait pour le sujet qui nous occupe principalement ; ou plutôt la thèse se retourne pour ainsi dire : les Italiens nous imitèrent à leur tour. […] Un moment après, Santeul s’avisa de le poursuivre à coups d’aumusse, et Arlequin le faisait sauter à coups de sangle.

1375. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Japonisme » pp. 261-283

À ce moment, il entendit la voix de ses enfants, et sa femme qui leur disait très bas : — « Ne faites pas de bruit, mes petits ; votre papa n’est pas bien, vous le dérangeriez. […] À ce moment Kuranosuké se met à genoux devant le blessé, et après les démonstrations de respect dues au rang élevé du vieillard, lui dit : « Seigneur, nous sommes des hommes de Takumi-no-Kami.

1376. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Ruy Blas » (1839) »

Si le double tableau que nous venons de tracer s’offre dans l’histoire de toutes les monarchies à un moment donné, il se présente particulièrement en Espagne d’une façon frappante à la fin du dix-septième siècle. […] Ces grandes apparitions de dynasties qui illuminent par moments l’histoire sont pour l’auteur un beau et mélancolique spectacle sur lequel ses yeux se fixent souvent.

1377. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Abailard, et saint Bernard. » pp. 79-94

Dès ce moment, l’abbé de Clairvaux se crut dispensé de garder aucun ménagement. […] Qui, plaisir, lieu, moment, tout est présent pour moi.

1378. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence en général. » pp. 177-192

Quelque jaloux que fût Rollin de sa réputation & de celle de ses ouvrages, il ne fut point éffrayé d’une critique ; il n’interrompit pas même un moment, pour la réfuter, le cours de ses occupations ordinaires. […] Cette seconde querelle mérite qu’on s’y arrête un moment, à cause de sa singularité.

1379. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Baudouin » pp. 198-202

Ce moment est faux ; il serait vrai, qu’il serait d’un mauvais choix. […] Croit-il que le moment où tout le monde s’est retiré, où la jeune épouse est seule avec son époux n’eût pas fourni une scène plus intéressante que la sienne ?

1380. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jacques Demogeot » pp. 273-285

Car, s’il est un délicieux enfant comme l’Amour, c’est un enfant que le Caprice, et il vient toujours un moment où il faut emporter les enfants pour que l’on s’entende. Or, ce moment était venu et durait depuis trop longtemps : depuis les Valois.

1381. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution d’Angleterre »

La vie de Washington date de ce moment glorieux dans le développement suprême de Guizot. […] Il s’y agit de la Révolution d’Angleterre, il est vrai, mais la Révolution d’Angleterre, c’est toujours de la révolution, c’est toujours, sous une forme particulière et avec une date, l’amour ou l’effroi des nations modernes, la grande idée qui, comme un glaive, coupe pour un moment le monde en deux !

1382. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIV. Vaublanc. Mémoires et Souvenirs » pp. 311-322

I Dans cette poussière que font les événements qui passent et les choses qui tombent, il est de ces visages rayonnants qu’on voit distinctement toujours, — qui, à tout moment, percent la nuée ou sont plus hauts qu’elle. […] Il y a dans ce terrible livre de Rouge et Noir un moment qui revient sans cesse, à propos de tout, dans le récit de Vaublanc, quand il nous raconte les dangers de sa proscription, en 1793.

1383. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Camille Desmoulins » pp. 31-44

Camille Desmoulins, cet homme du talent le plus vif peut-être qu’on ait vu depuis Beaumarchais et Voltaire, ne pouvait pas plus échapper qu’un autre à la loi qui régit ces écrits d’un jour, qui nous donnent, sans monter plus haut pour les juger, la passion du moment et ses illusions, son enthousiasme et ses badauderies. […] , était de ces êtres à sentiment qui, dans un moment donné, peuvent devenir atroces.

1384. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Silvio Pellico »

Attiré par ce nom de Silvio Pellico, — astre de popularité, un moment, sur lequel un nuage avait passé, il nous en souvenait, — attiré surtout par ce nuage que nous aimions plus que l’astre lui-même, nous avons ouvert ces lettres posthumes et nous y avons trouvé ce que tout d’abord nous n’espérions guères y rencontrer. […] Ils n’ont pas de Plombs, ils n’ont pas de Spielberg, du moins en ce moment… et d’ailleurs Pellico n’est plus ; mais ils sauront bien déterrer sa mémoire, pour la frapper et l’insulter.

1385. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXV. Le Père Ventura »

Il a mis sa main, sa main libre de prêtre, sur les questions du moment, et il a été tout à la fois sacerdotal et politique. […] Assurément, ce moment du livre est imposant, et nous attendions à cette place, dans ce discours final, quelque chose de péremptoire sur lequel le prédicateur nous aurait laissés.

1386. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVII. Silvio Pellico »

Attiré par ce nom de Silvio Pellico, astre de popularité, un moment, sur lequel un nuage avait passé, il nous en souvenait, attiré surtout par ce nuage que nous aimions plus que l’astre lui-même, nous avons ouvert ces lettres posthumes et nous y avons trouvé ce que tout d’abord nous n’espérions guères y rencontrer. […] Ils n’ont pas de Plombs, ils n’ont pas de Spielberg, du moins en ce moment… Et d’ailleurs Pellico n’est plus ; mais ils sauront bien déterrer sa mémoire, pour la frapper et l’insulter.

1387. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Francis Lacombe »

Fragment détaché d’un travail à l’étude encore, la brochure de Francis Lacombe, qui a le mérite que lord Bolingbroke estimait le plus dans les livres, c’est-à-dire d’être substantielle et courte, a été pensée en dehors des circonstances du moment et il faut savoir gré à l’auteur de les avoir devancées. […] Enveloppé dans la grande parole de Leibnitz : le passé est gros de l’avenir , comme dans un talisman de vérité, il a cherché dans le passé la clef du difficile problème qu’on pose en ce moment, comme un sphinx qui le garderait au seuil d’une société à reconstruire.

1388. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Armand Hayem »

 » Et, ailleurs encore, avec la conscience de la petitesse des temps présents, l’auteur de l’Être social affirme que la micrographie (logomachie moderne), qui nous perd dans les infiniment petits de la science totale, n’est que la nécessité du moment. […] Sur la question à feu, en ce moment, de l’égalité entre les deux sexes, — ce ridicule préjugé physiologique et psychologique des femmes-hommes et des hommes-femmes de ce temps, — l’auteur de l’Être social (page 162) reconnaît que le jour n’est pas venu où le droit des femmes à la virilité triomphera.

1389. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Mistral. Mirèio »

Il n’y a pas de sujets épiques, il n’y a que des facultés… L’épique existe ou peut exister à toutes les périodes de l’histoire, à toutes les marches des civilisations, en haut ou en bas, à tous les moments d’ascension ou de déclin des littératures. […] Ainsi, on peut se demander si c’est là de la poésie naïve ou de la poésie raffinée, sous couleur de naïveté… si le poète qui s’est traduit lui-même dans une de ces traductions interlinéaires, lesquelles plaquent brutalement le mot sur le mot et sont le plâtre sur le visage vivant, ne serait pas, après tout, un de ces profonds et savants comédiens intellectuels, comme ce faux moine de Chatterton, par exemple, qui se composa à froid une inspiration à laquelle se prit, un moment, l’Angleterre ?

1390. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Auguste de Chatillon. À la Grand’Pinte ! »

à ce cruel moment, s’il naît dans le sang versé de son cœur, car c’est là toujours que les poètes naissent, une fragilité comme un poète élégiaque, une créature de bonté, de simplicité, de tendresse, doit-on s’étonner que son talent s’altère dans ce milieu qui pèse de toutes parts sur son inspiration première, et peut-on croire que cette fragilité inouïe puisse un jour, grâce aux conseils de la Critique, s’arracher à ce joug de l’Idéal abaissé ? […] Lui, le déshérité, le souffrant par les plus nobles causes, se grime souvent en Mathurin Régnier, sans canonicat, et de sa voix fraîche d’amoureux, et de sa lèvre de framboise qui chantait, il n’y a qu’un moment : La bouche rose, Grenade mi-close Où mon amour est resté !

1391. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Henri Heine »

— dans lesquelles il laisse voir les muscles de sa face irrités et crispés par la vie, par la vie cruelle et bête (elle est ainsi toujours pour les êtres supérieurs), et à laquelle, en certains moments, il veut à tout prix, et même à vil prix, s’arracher ! […] Je n’hésite point à l’affirmer, Henri Heine est certainement le plus grand poète que l’Europe ait vu depuis la mort de lord Byron, Lamartine excepté, et à sa gloire acquise, consentie, s’ajoute encore cette autre gloire de n’avoir pas pour le moment de successeur.

1392. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Vernet  »

Cela tient au moment du jour qu’il a choisi.

1393. (1860) Ceci n’est pas un livre « Les arrière-petits-fils. Sotie parisienne — set » pp. 178-179

Remplissant — par moments — les fonctions du chœur dans la tragédie antique.

1394. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 471

Les premieres tendent vraiment à instruire le Lecteur ; les secondes ne l’amusent tout au plus qu’un moment, sans sauver l’Ouvrage de la proscription.

1395. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article »

Ce n’est point l’éducation des enfans qui en est l’objet ; il se borne aux précautions que la Mere doit prendre dès le moment de leur formation, & entre dans tous les détails nécessaires pour les nourrir & les soigner.

1396. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

Il y a eu à divers moments en France de tels princes des poètes, et il serait curieux d’en noter la dynastie assez irrégulière, assez capricieuse. […] Voiture, vrai prince des beaux esprits, et galamment chaperonné de la sorte, n’eut qu’un moment. […] Il pourra s’y essayer par moments ; il pourra dans sa jeunesse, un jour de loisir, détacher et agiter ce bouclier suspendu, bander cet arc impossible, manier ce glaive de Roland. […] La première moitié florissante de l’existence de Delille, il ne faut pas l’oublier, est de 1770 à 89 ; il eut là près d’une vingtaine d’années de succès, de faveur, de délices ; c’est au goût de ce moment du xviiie  siècle qu’il se rapporte directement. […] A partir de ce moment, les ouvrages amassés en portefeuille par Delille se succédèrent rapidement et dans un flot de vogue ininterrompu : l’Enéide, 1804 ; le Paradis perdu, 1805 ; l’Imagination, 1806 ; les Trois Règnes, 1809 ; la Conversation, 1812.

1397. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

« Et le repentir est la tardive et claire connaissance que ce qui plaît uniquement à ce monde n’est que le songe d’un moment !  […] Lélio et Socrate, deux de ces commensaux des Colonne, y charmèrent les heures de Pétrarque : « Ce sont les moments les plus heureux de ma vie », écrit-il à cette époque. […] Ce séjour fut charmant, mais court ; l’image de Laure, un moment oubliée, le rappelait comme à son insu à Avignon ; il y revint ; en la retrouvant, il retrouva son délire. […] Ainsi devait finir cet empire fantastique, s’écria Pétrarque, revenu lui-même de son illusion d’un moment. […] « C’est pour mon malheur que se lève chaque jour qui retarde ce moment.

1398. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

— « La comtesse d’Albany, écrivait Horace Walpole à mademoiselle Berry, non seulement est à Londres, mais il est probable qu’en ce moment même elle est au palais de Saint-James (résidence de la cour à Londres). […] Au moment du procès de Louis XVI, et touché de loin par sa mort, il avait écrit, dans son cabinet, une défense de ce roi. […] Pour sauver cet ouvrage qui m’était cher et auquel je tenais beaucoup, j’en fis faire jusqu’à dix copies, et je veillai à ce que, déposées en différents lieux, elles ne pussent ni s’anéantir ni se perdre, mais reparaître, quand le moment serait venu. […] J’entrais dans ma cinquantième année ; c’était le moment de mettre un dernier frein au débordement de mes poésies. […] Néanmoins, s’étant levé de sa chaise, il eut encore la force de s’approcher du lit et de s’y appuyer ; un moment après sa vue s’obscurcit, ses yeux se fermèrent, et il expira.

1399. (1922) Enquête : Le XIXe siècle est-il un grand siècle ? (Les Marges)

Le moment est-il bien choisi pour combattre, au nom de l’intelligence, un siècle qui, jusqu’ici, n’était maltraité que dans les manuels scolaires, et que les élites étrangères se représentent comme un des plus riches et des plus glorieux de notre histoire littéraire ? […] Du moment que ces critiques sont violentes et ces attaques passionnées, il y a bien des chances pour qu’elles ne comptent guère… Laissons-les se calmer. […] Un moment vient cependant où la plupart des Manuellistes prennent leur courage à deux mains : c’est lorsqu’ils ont affaire au xixe  siècle. […] La période littéraire qu’on a réunie sous le nom de romantisme commence en plein xviiie  siècle ; Rousseau, Diderot, Coleridge, Goethe et Schiller appartiennent à un mouvement qui se continue au xixe  siècle sans interruption, sans qu’on puisse se mettre d’accord sur le moment où il s’est terminé (si même il ne dure pas encore) ; de même en musique le mouvement commencé avec Gluck, peut-être même avec Bach se prolonge par Haydn, Mozart, Beethoven, Schubert et Weber jusqu’à Wagner. […] À certains moments, le génie littéraire de notre race absorbe l’Europe.

1400. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre II. Les génies »

Par moments passe un puissant vers spondaïque presque monstrueux et plein d’ombre : Circum sefoliis acfrondibus involventes. […] Il tâte sa tête par moments, comme s’il la cherchait. […] Dans tous les autres poètes, on devine cette communication ; dans Jean, on la voit, par moments on la touche, et l’on a le frisson de poser, pour ainsi dire, la main sur cette porte sombre. […] La troisième grande crise humaine est la Révolution française ; c’est la troisième porte énorme de la barbarie, la porte monarchique, qui se ferme en ce moment. […] Si l’âme allemande avait autant de densité que d’étendue, c’est-à-dire autant de volonté que de faculté, elle pourrait, à un moment donné, soulever et sauver le genre humain.

1401. (1885) La légende de Victor Hugo pp. 1-58

La langue que Victor Hugo avait cependant enrichie de si nombreuses expressions laudatives, semblait pauvre aux journalistes, du moment qu’elle était appelée à traduire leur admiration pour « le plus gigantesque penseur de l’univers », on recourut à l’image. […] On utilisait, à l’époque, la mère de toutes les façons ; elle était déjà la grande ficelle dramatique : c’était le souvenir de la mère qui au théâtre paralysait le bras de l’assassin prêt à frapper ; c’était la croix de la mère, qui exhibée au moment psychologique, prévenait le viol, l’inceste et sauvait l’héroïne ; c’était la mort de sa mère, qui du Chateaubriand sceptique et disciple de Jean-Jacques de 1797, tira le Chateaubriand mystagogique d’Atala et du Génie du Christianisme de 1800. […] Et pendant dix ans, sans éprouver un moment de lassitude, il fit « tonner dans ses vers la malédiction des morts, comme un écho de sa fatale gloire13 ». […] Il trouva que l’Empire avait du bon : « Napoléon a fait ma fortune », avouait-il dans un de ces rares moments, où il déposait sa couronne d’épines. […] Déjà on commence à revenir de cette exubérance d’admiration forcée ; et l’on arrivera bientôt à considérer ces jours d’enthousiasme et d’apothéose, comme un moment de folie inexplicable.

1402. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIe entretien » pp. 5-85

Quand le soleil se lève et quand son disque, suspendu un moment au-dessus des Alpes, éblouit le premier regard du voyageur matinal, le soleil paraît un million de fois plus étincelant qu’à midi, quand sa pluie de lumière s’infiltre jusqu’au fond des gorges les plus ténébreuses et noie tout un hémisphère dans un océan uniforme de clarté. […] On comprend que les hommes qui vivaient dans ces années stériles de l’Europe aient cru un moment à la stérilité finale et à la caducité irrémédiable des littératures. […] XVI Premièrement, il faut bien m’apprécier moi-même, et bien entrer dans ma nature personnelle et dans l’esprit de mon rôle au moment à la fois terrible et grandiose où la république sortit du nuage avec la promptitude et l’éblouissement de l’éclair. […] Mais il n’était pas même nécessaire de combattre dans ce moment : la révolution combattait pour nous en Hongrie, en Prusse, à Francfort, à Rome, à Naples, en Toscane, à Vienne, et l’Autriche, qui n’existait plus que dans son unique armée d’Italie, ne songeait pas à se jouer elle-même dans une seule bataille ; elle ne songeait qu’à se ménager des conditions honorables de retraite. […] Je donnais un souvenir, un moment, une commémoration, une pitié, un enthousiasme de jeune homme studieux à chacune de ces ombres, plus vivantes peut-être dans la pensée des siècles qui foulent leurs cendres que dans la pensée de leurs contemporains et de leurs compatriotes.

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