je leur portais envie ; oui, j’aurais voulu être oiseau de nuit pour pouvoir déployer mes ailes sur ce gouffre et jeter mes cris en liberté dans ce silence ! […] Cinq ou six couples de jolies colombes bleues roucoulaient tout le jour sur les margelles de l’auge, à côté du puits, offrant ainsi, comme une moquerie du sort, une image d’amour et de liberté, au milieu des victimes de la captivité et de la haine. […] Lucques n’est pas une terre de malfaiteurs ; le peuple des campagnes est trop adonné à la culture des champs qui n’inspire que de bonnes pensées aux hommes, et le gouvernement est trop doux pour qu’on conspire contre sa propre liberté et contre son prince.
D’abord sa liberté ne l’enivra pas : content de se sentir maître de sa volonté et de l’usage de son esprit, il continua de résider dans la maison de la cour du Palais qui avait passé à son frère Jérôme ; ce fut sans doute alors que, selon son expression, il « descendit au grenier », de l’étroite guérite sous le faîte du toit, où il avait logé jusque-là. […] Il a toujours des libertés de pensée et de langage, un penchant à soupçonner le zèle d’hypocrisie, une révolte de la raison contre les sanglants effets des querelles théologiques et de la ferveur religieuse, qui ne sont certes pas d’un dévot. […] Louis XIV, si déclaré contre Port-Royal, ne s’y trompa point, et laissa Boileau manifester ouvertement son attachement au grand Arnauld ; Racine se demandait comment son ami prenait impunément des libertés que lui-même n’eût pu hasarder sans se perdre : c’est que le roi savait bien que Despréaux, quoi qu’il put dire ou faire, n’était pas de la secte.
Aujourd’hui que le Roman s’élargit et grandit, qu’il commence à être la forme sérieuse, passionnée, vivante, de l’étude littéraire et de l’enquête sociale, qu’il devient, par l’analyse et par la recherche psychologique, l’Histoire morale contemporaine ; aujourd’hui que le Roman s’est imposé les études et les devoirs de la science, il peut en revendiquer les libertés et les franchises. […] Préface de la première édition (1877)8 Mon frère et moi, il y a treize ans, nous écrivions en tête de Germinie Lacerteux : Aujourd’hui que le roman s’élargit et grandit, qu’il commence à être la grande forme sérieuse, passionnée, vivante de l’étude littéraire et de l’enquête sociale, qu’il devient par l’analyse et la recherche psychologique l’Histoire morale contemporaine ; aujourd’hui que le roman s’est imposé les études et les devoirs de la science, il peut en revendiquer les libertés et les franchises. En 1877, ces libertés et ces franchises, je viens seul, et une dernière fois peut-être, les réclamer hautement et bravement pour ce nouveau livre, écrit dans le même sentiment de curiosité intellectuelle et de commisération pour les misères humaines.
Mais en même temps que les enfants apprennent dans les prisons scolaires ce que la vie seule leur enseignait autrefois et mieux, ils perdent sous la peur de la grammaire cette liberté d’esprit qui faisait une part si agréable à la fantaisie dans l’évolution verbale. […] L’instruction obligatoire a fait du français, dans les bas-fonds de Paris, une langue morte, une langue de parade que le peuple ne parle jamais et qu’il finira par ne plus comprendre ; il aime l’argot qu’il a appris tout seul, en liberté ; il hait le français qui n’est plus pour lui que la langue de ses maîtres et de ses oppresseurs. […] Les mots anglais ont ainsi acquis une très grande liberté d’allures, peut-être parce qu’ils ont été moins tyrannisés qu’en France.
Il faut se souvenir que le caractère de saint Chrysostome était de parler aux grands et aux puissants, même dans le temps de leur plus grande prospérité, avec une force et une liberté vraiment épiscopales. […] Quelque grand nombre d’amis que vous ayez, nul ne vous laissera vivre avec autant de liberté que je fais. […] Cette république conservera une paix constante, et se soutiendra sans armée… Ils affectent tous une sainte horreur pour la guerre… S’ils haïssent les armées et les généraux qui se rendent célèbres, cela ne les empêche pas de se battre à coups de plume, et de se dire souvent des grossièretés dignes des halles ; et, s’ils avaient des troupes, ils les feraient marcher les unes contre les autres… En leur style, ces beaux propos s’appellent des libertés philosophiques ; il faut penser tout haut, toute vérité est bonne à dire ; et comme, selon leur sens, ils sont seuls les dépositaires des vérités, ils croient pouvoir débiter toutes les extravagances qui leur viennent dans l’esprit, sûrs d’être applaudis.
On les rencontre dans les salons, chez Mme de Lambert, où la liberté de leurs propos amuse l’oisiveté des femmes et l’insouciance des hommes. […] Nous prendrons insensiblement leur noble liberté de penser, et leur profond mépris pour les fadaises de l’école. » C’est Voltaire qui écrivait en ces termes à Helvétius, en oubliant d’ajouter que, pour son compte, et de plus, il avait pris Micromégas à Swift, son Poème de la loi naturelle à Pope, et Zaïre à Shakespeare. […] Mais si nous examinons ce qu’il appelait la « noble liberté de penser » des Anglais, nous trouvons que c’est l’agressive incrédulité des Bolingbroke, des Collins, des Toland. […] Aussi la tradition, en littérature, comme en tout, n’est-elle à leur égard qu’un empêchement superstitieux qui gêne également leur liberté de penser, la « diffusion des lumières », et le progrès de la raison. […] Car, nos sentiments c’est nous-mêmes, ou plutôt, chacun de nous n’est soi qu’autant que ses sentiments s’expriment en toute liberté, et c’est cette liberté même qui est la nature : « Nous naissons tous sensibles… Sitôt que nous avons, pour ainsi dire, conscience de nos sensations, nous sommes disposés à rechercher ou à fuir les objets qui les produisent.
Et tout cela manque de liberté, parce que tout cela manque d’un degré de cette « inconscience » dont M. […] Au lieu donc de tyranniser la liberté de l’imagination et du rêve, ils demandent que la poésie les rende à leur essor. […] Ce sera si vous la retournez, en quelque sorte, et que vous imputiez à la liberté des personnes ce que le roman impute à la fatalité de la loi de nature. […] La névrose n’annulait pas la liberté de ses paroles ou de ses actes. […] On ne démontre ni la liberté, ni l’immortalité, ni même la morale : on les persuade.
C’est la discipline assurée, sans rien ôter à la liberté. […] il n’en est pas une qui n’assure la liberté du poète par la manière même dont elle la règle. Une doctrine littéraire, qui m’impose la raison et le vrai, a plus de souci de ma liberté que celle qui autorise mes caprices. […] Où est la liberté véritable, sinon dans la connaissance de soi-même ? Il est vrai que nous ne le croyons pas d’abord ; nous goûtons plus les doctrines qui flattent cette autre liberté fausse, qui vient de l’humeur et des sens, et qui nous trompe sur ce que nous sommes.
Le privilège de l’âme élevée au mysticisme est la liberté ; son corps même n’est pour elle qu’un voisin auquel elle donne à peine le conseil amical du silence, mais s’il parle elle ne l’entend qu’à travers un mur, et s’il agit elle ne le voit agir qu’à travers un voile. […] Dumur est en train de créer un théâtre philosophique, un théâtre à idées, et, parallèlement, de renouveler le roman à thèses, car Pauline ou la Liberté de l’Amour est une œuvre sérieuse, ordonnée avec talent, originalement pensée, et qui implique une rare valeur intellectuelle. […] Si même un emportement capable de troubler la tête, et d’ôter presque la liberté, a laissé souvent une tache ineffaçable, quel dégoût n’inspirera pas un consentement donné de sang-froid ? […] Aphrodite a signalé par sa vogue le retour possible à des mœurs où il y aurait un peu de liberté : venu à sa date, ce livre a la valeur d’un contrepoison. […] L’architecture de Là-Bas est érigée sur un plan analogue, mais la liberté s’y trouve, non sans profit, restreinte par l’unité du sujet, qui est absolue sous ses faces multiples : ni le Christ de Grunewald, en son extrême violence mystique, son atterrante et consolante hideur, n’est une fugue hors des lignes, ni la démoniaque forêt de Tiffauges, ni la cruelle Messe noire, ni aucun des « morceaux » ne sont déplacés ou inharmoniques ; pourtant, avant la liberté du roman on les eût critiqués, pas en eux-mêmes, mais tels que non rigoureusement nécessaires à la marche du livre.
Sous sa forme la plus rudimentaire, l’animal se présente comme une petite masse de protoplasme enveloppée tout au plus d’une mince pellicule albuminoïde qui lui laisse pleine liberté de se déformer et de se mouvoir. […] Si la conscience s’endort chez l’animal qui a dégénéré en parasite immobile, inversement elle se réveille, sans doute, chez le végétal qui a reconquis la liberté de ses mouvements, et elle se réveille dans l’exacte mesure où le végétal a reconquis cette liberté. […] Formées de molécules très complexes qui renferment, à l’état potentiel, une somme considérable d’énergie chimique, elles constituent des espèces d’explosifs, qui n’attendent qu’une étincelle pour mettre en liberté la force emmagasinée. […] Notre liberté, dans les mouvements mêmes par où elle s’affirme, crée les habitudes naissantes qui l’étoufferont si elle ne se renouvelle par un effort constant — l’automatisme la guette. […] Elle peut tenir en échec d’autres habitudes motrices et, par là, en domptant l’automatisme, mettre en liberté la conscience.
C’était enfin le prince Napoléon, fils aîné du roi de Hollande et de la reine Hortense, frère du prince, alors inconnu, à qui les versatilités du peuple, les inexpériences de la liberté, les impatiences de la multitude et les péripéties du sort préparaient de loin, dans l’ombre, un second empire. […] S’il n’avait été Bonaparte je l’aurais aimé avec plus de liberté. […] À chaque secousse de la liberté en France on sent trembler par sympathie le sol antique de l’Italie indépendante, hélas ! […] Un jeune et héroïque étranger, d’un grand nom, exilé comme elle de sa patrie et errant en Italie, comme elle, après l’ombre de la liberté, avait son amour.
La Raison, que Lorris avait logée au sommet d’une haute tour, et qui parlait avec tant de poids à l’amant, n’est ni moins sensée, ni de moins bon conseil dans Jean de Meung ; mais elle y moralise avec tant de liberté et s’y permet des mots si crus qu’en un endroit elle se fait traiter, par l’amant, de folle ribaude. […] Dans sa confession à son chapelain, Nature explique à sa manière la création du monde, la formation le cours et l’harmonie des planètes, le préjugé qui rejette sur les constellations les fautes des hommes, la prédestination conciliée avec la liberté humaine, le tonnerre et les éclairs, les verres ardents, le télescope les songes les comètes. […] Regardez-y de près : c’est toujours la guerre entre l’esprit de liberté et l’esprit de discipline, dont la réconciliation, à certaines époques, produit les chefs-d’œuvre. […] Il contentait tous les goûts, soit sérieux, soit frivoles, sous une forme qui ne laissait à personne la liberté de s’y intéresser médiocrement.
Rapports de la population avec les gouvernements, les lois et la religion ; constitution économique du commerce ; proportion des peines aux délits ; réduction de toutes les lois françaises en un code unique ; la liberté, pour attirer les étrangers par l’opulence qui la suit toujours ; l’égalité, pour porter l’abondance et la vie dans tout le corps politique ; la tolérance religieuse, pour assurer l’autorité du prince et la stabilité de l’Etat : voilà quelques-unes des nouveautés que Montesquieu proclame avec l’air de n’y penser que par plaisir, répandant à la fois les doutes, les vœux de réforme, les critiques déguisées du temps présent, tout, excepté des craintes sur le prix dont la France devait payer un jour ces conquêtes. […] Est-ce, comme on l’a dit, parce que la vérité historique n’était pas possible à une époque où la liberté manquait à l’historien ? […] S’il est vrai que Louis XIV n’eût pas goûté la liberté de l’histoire, du moins a-t-il prouvé qu’il ne haïssait pas le talent d’en chercher les sources ; témoin Mabillon, qu’il envoyait en Allemagne et en Italie pour y recueillir des documents sur l’histoire de France ; témoin Montfaucon, qui allait plus tard aux frais du roi glaner sur les traces de Mabillon ; témoin enfin du Cange, dont Louis XIV pensionnait les enfants en récompense des travaux de leur illustre père. […] Pendant que le public lettré admirait dans Charles XII l’histoire réformée par le bon esprit philosophique, et, parmi toutes les grâces du récit, un air de liberté, de vérité inconnu jusqu’alors, Buffon composait le premier ouvrage français où la science ait été exposée dans la langue des grands écrivains.
Il reste ce qui n’a pas de nom dans la critique, l’élan, la force, l’enthousiasme du prédicateur ; l’image visible et pourtant indescriptible de son âme ; cette liberté si fière, cette fougue qui s’accommodent du langage le plus exact ; cette abondance qui ne se permet pas plus une expression vague qu’une pensée vulgaire. […] Dans Bourdaloue, ce n’est qu’un peu de scandale généreux qu’autorisait la sainte liberté de la chaire. […] Il ne prend pas plus de liberté avec le Christ, malgré les invitations de l’Homme-Dieu à venir à lui, à le suivre, à le toucher. […] Que penserait-on, en littérature, d’un critique qui s’évertuerait à nous prouver que nous avons le droit de faire du nouveau à tout prix, et qui pousserait à la production des livres, au nom des libertés de l’esprit humain ?
Je meurs dans ses bras. » Dans une scène, on le voyait rentrant de la promenade, des plantes dans une main, et, dans l’autre, un nid de fauvettes, « qu’il confiait aux soins de sa femme, pour les rendre à la liberté sitôt qu’elles auraient des ailes. » Une autre scène le montrait causant avec le menuisier du village de quelques réparations à faire « dans sa modeste demeure. » Dans une troisième, un créancier auquel il devait cent écus le menaçait de saisir ses meubles ; le libraire Rey lui envoyait cent écus avec lesquels il payait le créancier. […] Les peuples que Rousseau y a vus sont des peuples forts ; on n’y connaît que des droits, et dans les conventions qu’ils veulent bien faire, on ne stipule que des libertés et l’on oublie l’obéissance. […] S’il vous plaît est du moins un hommage, ne fut-ce que de forme, rendu à la liberté dans l’homme qui a volontairement engagé la sienne. […] Résolution, patience, persévérance ; beaucoup de petits devoirs et de petites gênes qui sont le prix de notre liberté personnelle et la garantie de celle d’autrui ; point de dépit, si l’on ne réussit pas tout d’abord ; s’imputer courageusement les plus grandes difficultés du succès ; faire respecter ses talents par sa vie : cela n’est pas un petit travail, et je m’explique pourquoi les utopistes trouvent la perfection plus commode.
Sa réponse allait décider de la liberté ou de l’asservissement de l’Hellade. […] Il n’est pas assez d’or sur la terre pour nous faire prendre le parti des Mèdes contre la liberté de la Grèce. […] Ce grand combat a été celui de la vie contre la mort, de la liberté contre l’esclavage, du droit contre la violence, du progrès contre l’inertie. […] L’Éloquence aurait péri avec la liberté qui l’inspire ; l’orateur est bâillonné quand l’agora est fermée.
Elle eut quelque peine à se faire à ce genre de vie nouveau, à cette résidence plus assidue à la ville et au Palais-Royal : « J’aime les Parisiens, disait-elle, mais je n’aime pas à résider dans leur ville. » Elle s’était accoutumée, durant ses longues saisons à Saint-Cloud, à cette mesure de retraite, de compagnie et de liberté qui allait à sa nature et, je dirai, à sa demi-philosophie. […] Combien de fois, a dit un de ses panégyristes que j’aime à citer, combien de fois condamna-t-elle ces négligences hardies d’habillements qui favorisent la corruption, et que je ne sais quel goût de liberté et de caprice, le charme funeste de notre nation, a criminellement inventées !
Sur la liberté de la presse, une ou deux fois peut-être, il introduit des réflexions qui semblent plutôt se rapporter à la France de 1819 qu’au gouvernement vénitien en aucun temps (t. […] Mais dans un pays où la première ambition n’est pas celle d’être libre, où l’on veut d’abord être courtisan, fonctionnaire, riche, décoré de vains honneurs, et puis indépendant, les vanités sont un besoin, la liberté n’est qu’une fantaisie, et il est naturel qu’on éprouve l’incompatibilité de tant d’ambitions contradictoires.
Arrêté et livré enfin, détenu à Tarbes durant plus d’une année, mais oublié heureusement des triumvirs de Paris, il fut rendu à la liberté en novembre 1794, et il reprit à l’instant le cours de ses travaux, de ses explorations à la fois positives et passionnées. […] Faisant allusion à certains termes assez impératifs de la lettre de nomination et qui laissaient peu la liberté du refus, Ramond aurait dit en riant : « Je suis préfet par lettre de cachet. » Cuvier n’a pas dédaigné d’égayer sa Notice de ces traits malins et de quelques autres qu’il faudrait avoir été contemporain pour accueillir et présenter dans leur juste mesure, sans rien exagérer ni forcer en les rapportant. — Cuvier et Ramond n’étaient pas au mieux ensemble ; ils avaient été en compétition pour la place de secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences.
Quelques années après, un novice scrupuleux, le frère Gueston, ayant voulu suivre l’exemple du père Gourdan, s’en vit détourner par l’esprit de liberté et de facilité mondaine qui régnait dans la maison. […] Il s’était levé le matin, et avait même assisté aux harangues qu’on faisait à M. le duc avant son départ, louant les uns et blâmant les autres avec sa liberté ordinaire, et si haut que M. le duc fut, dit-on, obligé de le repousser du bout de sa canne.
Il voit les avantages agréables dont il jouit présentement, « les privilèges de la noblesse en France, sa liberté, la familiarité dont le roi use envers elle, au lieu de la superstitieuse révérence que les Anglais rendent à leur roi », toutes choses qui étaient bien faites pour séduire un esprit même aussi solide que celui du jeune Rohan. […] La France était si heureuse durant sa vie, que depuis douze cents ans elle n’avait joui d’une pareille félicité. » Rohan prévoit tous les maux qui vont recommencer, toutes les ambitions qui s’aiguisent déjà : En sa vie, il (Henri IV) contenait par son autorité les méchants : en sa mort, toute crainte de mal faire est ôtée, et semble que toute liberté soit permise aux méchants.
Enfin, il avisa, pour se divertir, d’aller voir les dames veuves de son temps et de sa connaissance, et tâcha à passer son temps doucement ; et, pour ce que le malheur des guerres lui ôtait la liberté de sortir la ville et s’aller promener à Ormesson, il loua un petit jardin, proche sa maison, où il s’allait promener souvent. […] Laissons donc évaporer en liberté la malice des esprits ignorants ou passionnés, puisque l’opposition ne servirait qu’à l’irriter davantage, et consolons-nous par les sentiments qu’ont de sa vertu les étrangers, qui en jugent sans passion et avec lumière.
Ils m’avaient demandé quinze jours pour se faire instruire, mais c’était pour attendre le retour d’un courrier, qu’ils avaient envoyé à la Cour pour demander la liberté de faire l’exercice de leur religion. […] Foucault y est gêné dans ses allures ; il ne peut procéder avec la même liberté que dans le Béarn ; il y a près de lui un nouveau converti, devenu lui-même ardent convertisseur, le marquis de Vérac, que Louvois a nommé lieutenant de roi du haut Poitou, et qui est en fréquent conflit d’autorité avec l’intendant.
Tout compte fait, toute part faite aux éléments généraux ou particuliers et aux circonstances, il reste encore assez de place et d’espace autour des hommes de talent pour qu’ils aient toute liberté de se mouvoir et de se retourner. […] On jouissait alors, à l’École, d’une grande liberté pour l’ordre et le détail des exercices, à tel point qu’avec son extrême facilité M.
Il s’adressa dans sa haute et froide impartialité à toutes les nuances, à toutes les couleurs d’opinions qui s’étaient dessinées depuis 1789 jusqu’au 18 brumaire, sans en exclure aucune, au côté droit comme au côté gauche des diverses Assemblées qui s’étaient succédé : il convenait pourtant que les Constituants lui donnaient plus de mal que d’autres à réduire et à employer ; les Conventionnels lui en donnèrent moins : ils avaient été amenés à comprendre mieux que les premiers que la liberté n’est pas tout, que le salut public doit passer même avant les principes, et que dans la vie des nations il y a telle chose qu’on ne saurait supprimer, le gouvernement avec ses nécessités à certaines heures. […] Un second discours ou sermon « sur la vocation à la liberté et sur les obligations qu’elle impose », prononcé à Montauban le dimanche 9 octobre 1791, jour où la Constitution y fut proclamée, un vrai sermon encore, commençant par Mes frères, et finissant par Amen, nous le montre également dans l’exercice de son ministère pastoral ; et il serait difficile de deviner, en le lisant, ce qui devait éclater le lendemain, ce qui s’était déjà passé la veille.
La Grèce, après l’Égypte, vérifie entièrement cette manière de voir, le pays de la liberté comme celui des castes et du despotisme. […] Zeller hésite un peu sur ce point ; mais il n’hésite pas quand il attribue à César l’idée de fonder, sous un nom ou sous un autre, une monarchie populaire, universelle et, en quelque sorte, humaine : « Étendre le droit de cité à tous les hommes libres de l’Empire, régner sur le monde pour le monde entier, non pour l’oligarchie ou la démocratie quiritaires ; abaisser les barrières entre les classes comme entre les nations, entre la liberté même et la servitude, en favorisant les affranchissements et en mettant le travail en honneur ; avoir à Rome une représentation non du patriciat romain, mais du patriciat du monde civilisé ; fondre les lois de la cité exclusive dans celles du droit des gens ; créer, répandre un peuple de citoyens qui vivent de leur industrie et qu’on ne soit pas obligé de nourrir et d’amuser : voilà ce qu’on peut encore entrevoir des vastes projets de celui qu’on n’a pas appelé trop ambitieusement l’homme du monde, de l’humanité ; voilà ce dont témoignent déjà les Gaulois, les Espagnols introduits dans Rome, Corinthe et Carthage relevées, et ce qu’indiquent les témoignages de Dion Cassius, de Plutarque, de Suétone, bien qu’ils aient pu prêter peut-être à César quelques-unes des idées de leur temps. » César (s’il est permis d’en parler de la sorte à la veille d’une publication par avance illustre), César, au milieu de tous ses vices impudents ou aimables, de son épicurisme fondamental, de ce mélange de mépris, d’indulgence et d’audace, de son besoin dévorant d’action, et de cet autre besoin inhérent à sa nature d’être partout le premier, César, à travers ses coups de dés réitérés d’ambitieux sans scrupule et de joueur téméraire, avait donc une grande vue, une vue civilisatrice : il n’échoue pas, puisque son idée lui survit et triomphera, mais il périt à la peine, parce qu’il avait devancé l’esprit du temps, tout en le devinant et le servant, parce qu’il vivait au milieu de passions flagrantes et non encore domptées et refoulées.
Insensés, qui croient pouvoir allier la justice et l’arbitraire, le despotisme et la liberté ! […] Je sais tout ce que permet ou ce qu’exige le genre du discours académique, même avec la sorte de liberté honnête qu’il comporte aujourd’hui : aussi n’est-ce point d’avoir trop loué son prédécesseur que je ferai ici un reproche à l’orateur-poëte ; mais je trouve qu’il l’a par endroits loué autrement que de raison, qu’il l’a loué à côté et au-dessus, pour ainsi dire, et qu’il l’a, en un mot, transfiguré.
Tel est d’abord le climat, c’est-à-dire le degré du chaud et du froid, du sec et de l’humide, avec ses conséquences infinies sur le physique et sur le moral de l’homme, par suite sur la servitude ou la liberté politique, civile et domestique. […] Ni la prospérité, ni la décadence, ni le despotisme, ni la liberté ne sont des coups de dés amenés par les vicissitudes de la chance, ou des coups de théâtre improvisés par l’arbitraire d’un homme.
La pensée jouit d’une liberté illimitée dans l’abstrait et dans le général, toutes les intempérances, toutes les aventures lui sont permises : dès qu’elle touche au réel, au concret, à la vie, elle reçoit forme et couleur des préjugés impérieux du siècle. […] Enfin la liberté règne dans l’art : toutes les barrières, tous les freins sont ôtés ; nuls objets ne sont interdits, nuls moyens prescrits à l’artiste, pourvu que le résultat de sa libre activité soit une œuvre vraie et une œuvre d’art.
En somme, les deux livres expriment l’idéal d’un homme né dans le peuple, échappé du cloître, enivré de liberté et de science. […] L’égoïsme qu’il lâche en liberté est à peu près inoffensif, parce qu’il s’offre dans sa simplicité primitive, tout proche de la naturelle volonté d’être, parce qu’il est soustrait aux malignes complications que la société y introduit, parce qu’en un mot il reste égoïsme, et ne devient pas ambition ni intérêt.
Il ne reste pas dans leur système la plus petite place, ni pour la liberté, ni pour un facteur évolutif proprement dit, ni pour n’importe quoi qu’on puisse appeler contingence. […] C’est en ce sens que nous avons le droit de dire que le déterminisme suppose la liberté, puisque c’est librement que nous devenons déterministes.
Mais, dans l’état d’individualisme, la liberté devient ombrageuse ; chacun prétend dire ce qu’il veut et ne voit pas de raison pour soumettre sa volonté et sa pensée à celles des autres. […] Il avait été assez fin pour jouer tous les diplomates de l’Europe, assez hardi pour célébrer la messe de la liberté et se constituer schismatique ; mais, quand il s’agit d’une question théorique, il est un esprit faible et trouve tout simple que Nabuchodonosor ait été changé en bête, que l’âne de Balaam ait conversé avec son maître et que les diplomates du Concile de Trente aient été assistés du Saint-Esprit.
Les émotions résultant de la loi de relativité : tels sont la nouveauté, l’étonnement, les sentiments qui résultent de la liberté ou d’une contrainte de la puissance ou de l’impuissance. […] Le sérieux demande du travail et de l’effort ; l’abandon, la liberté ; le laisser-aller se produisent d’eux-mêmes : aussi ont-ils un air de gaieté qui naît de l’absence de toute contrainte.
Pendant cette captivité de Péronne, avant le dernier jour et dans les premières ouvertures que fit le roi, celui-ci offrait de signer un traité de paix tout à l’avantage de Charles, moyennant qu’il recouvrerait aussitôt sa liberté et qu’il pourrait s’en retourner à Compiègne. […] Il est pour le self-government, ou, du moins pour les taxes consenties, d’où le reste de la liberté moderne et de l’ordre constitutionnel dépend.
Les ambitions trompées, ou celles qui attendaient, se dédommagèrent dans la liberté d’esprit et dans les plaisirs ; et ces plaisirs étaient ce qu’ils sont bien vite toujours, ce qu’ils devaient être surtout à une époque d’immense inégalité, et où le contrôle de la publicité était nul : c’étaient de véritables bacchanales. […] Chaulieu, de bonne heure, par sa liberté de parole, s’était attiré bien des ennemis.
« Je pris, ajoute Dangeau, la liberté de lui demander, comme il rentrait dans sa chambre, s’il était content de la princesse ; il me répondit qu’il l’était trop, et qu’il avait peine à contenir sa joie. » Un quart d’heure après, le roi revient la voir : « Il la fit causer, regarda sa taille, sa gorge, ses mains, et puis ajouta : Je ne voudrais pas la changer en quoi que ce soit au monde pour sa personne. […] « Pendant qu’il fut dans son cabinet avant souper, il fut toujours sur un petit siège et la fit tenir dans un fauteuil, lui disant : “Madame, voilà comme il faut que nous soyons ensemble, et que nous soyons en toute liberté.” » Voilà, en effet, qui sent davantage le grand-papa et le bonhomme, mais ne vous y fiez pas ; ce n’est que le vieillard qui veut se prêter à être distrait et amusé ; on serait bien dupe d’en aller tirer de trop grandes conséquences pour la tendresse.
Les mémoires lui laissent la liberté de se livrer à son génie. […] J’observai que le cardinal parut fort touché de la liberté d’un homme en qui il n’en avait jamais vu.
Ses instincts, d’autres diront peut-être son génie, le conduisaient à sympathiser plutôt avec les idées d’ordre, de stabilité, de gouvernement, qu’avec les principes de liberté, de réforme, de progrès. […] Les choses ont tourné comme cela, et j’use de ma liberté jusqu’au caprice.
La Providence, qui fait aux nations des origines et des destinées diverses, ouvre aussi à la justice et à la liberté plus d’une voie pour entrer dans les gouvernements ; et ce serait réduire follement leurs chances de succès, que les condamner à se produire toujours sous les mêmes traits et par les mêmes moyens. […] Cousin n’avait voulu que rétablir, contrairement aux résultats du xviiie siècle, une philosophie où l’on prouvât, par diverses sortes de raisonnements plus ou moins rigoureux, l’existence de Dieu, la spiritualité de l’âme, son immortalité, la liberté morale de l’homme dans une certaine mesure, il y aurait eu peu à redire ; car une telle philosophie est la seule qui se puisse décemment enseigner, et elle a été généralement d’ailleurs la philosophie des Socrate, des Platon, des Descartes, des Bossuet, des Fénelon, des d’Aguesseau.
amis de la liberté ! […] Cet Être souverain daigne s’abaisser un jour jusqu’à lui et lui dit : Je suis Celui par qui tout est ; sans moi, tu n’existerais point ; je te douai d’un corps sain et robuste, j’y plaçai l’âme la plus active : tu sais avec quelle profusion je versai la sensibilité dans ton cœur, et la gaieté sur ton caractère ; mais, pénétré que je te vois du bonheur de penser, de sentir, tu serais aussi trop heureux si quelques chagrins ne balançaient pas cet état fortuné : ainsi tu vas être accablé sous des calamités sans nombre ; déchiré par mille ennemis, privé de ta liberté, de tes biens ; accusé de rapines, de faux… Et lui, se prosternant devant l’Être des êtres, répond en acceptant toute sa destinée : Être des êtres, je te dois tout, le bonheur d’exister, de penser et de sentir.
Au lieu de cela, dans le roman, Regnard est présenté comme peintre (ce qui est infiniment plus noble), et comme jouissant, à la faveur de cet art, de quelque liberté. […] Il recevait toute la jeunesse des environs, et lui-même a ainsi défini son hospitalité pleine de facilité et de noblesse : Grand chère, vin délicieux, Belle maison, liberté tout entière ; Bals, concerts, enfin tout ce qui peut satisfaire Le goût, les oreilles, les yeux ; Ici, le moindre domestique A du talent pour la musique.
Il a répété maintes fois « qu’il n’y a qu’un peuple vertueux qui soit capable de la liberté, et que les autres ont plutôt besoin d’un maître ; que les révolutions ne peuvent s’opérer sans danger quand les peuples n’ont pas assez de vertu ». […] Mais une telle scène, avec les mots sacramentels qu’y prononça Voltaire : Dieu et liberté !
C’est un art enfin qui trouve dans la réalité et dans la vie, mille fois plus de beauté que dans la fiction et dans le rêve avec leur morale, leurs artifices et leurs évangiles, mille fois plus d’éclat, de variété, d’unité, d’harmonie, de grandeur, de méthode, de liberté, de fantaisie, de noblesse, et pour lequel il n’y a pas de sujets nobles ou ignobles, dignes ou indignes, mais seulement des artistes dignes ou indignes de les créer. […] Stanislas Rzewuski, dans la Liberté du 25 juin 1897.
Je n’ai rien su que ce que j’ai trouvé, et quand il m’est entré dans la tête des opinions qui étaient aussi celles des autres, c’est que mes recherches comme les leurs y avaient abouti. » Un peu plus tard, traitant des signes, il ne voulut ouvrir aucun des ouvrages de ses prédécesseurs, et expliqua son étrange refus comme Descartes : « Notre première raison, c’est que les idées qu’ils nous suggéreraient gêneraient la liberté de notre esprit qui aime à se conduire à sa façon, et dépouilleraient pour lui cette recherche de son plus grand charme, qui est dans la recherche même plutôt que dans le résultat qu’elle peut donner à la science ; la seconde, c’est que les idées d’autrui, quand nous n’avons pas d’abord exploré nous-même la matière à laquelle elles se rapportent, n’ont pour nous qu’un sens vague, et nous troublent plutôt qu’elles ne nous éclairent54. » Cette habitude et ce goût sont le signe du véritable philosophe. […] Avec une modestie très-fière peut-être59, il déclara qu’il n’entendait point la théorie de Spinoza sur la liberté, et qu’après une étude attentive, il ne pouvait expliquer la liaison de sa métaphysique et de sa morale.
C’est là que le sens de l’orientation moderne vers la liberté individuelle est le plus apparent. […] Dès lors, le contraste entre cette liberté et cette barbarie violente nous semble plus sensible, et l’on s’en irrite davantage. […] Quand on lui parle de son bonheur, il se bouche les oreilles et ne veut rien entendre ; de sa liberté, il se jette aussitôt, tête baissée, dans le mensonge et l’asservissement, plus profondément ! […] Qui sait si ce n’est pas pour un avenir de justice meilleur, pour un enfantement de liberté plus belle, qu’elle subit, en ce moment, le désordre de cette fièvre et le bouleversement de cette maladie ? […] … Aujourd’hui, avec la liberté de la presse, il n’y a plus de finesse d’écrire, plus de style, plus rien !
En vertu de ce raisonnement, sur la réclamation du gouvernement français, Beaumarchais fut mis en liberté le 17 septembre. […] « Cette défense du roi, écrit Mme Campan, parut une atteinte à la liberté publique. […] Chacun se sentit menacé, non seulement dans sa liberté, mais dans sa considération. […] Un mot, connu d’elle à Duclos, indique bien spirituellement qu’elle n’est pas prude, mais qu’il y a pourtant une limite que la liberté des propos ne peut franchir. […] Jérusalem reprise, il fit grâce de la vie aux habitants, leur permit de racheter leur liberté à des conditions déterminées, et comme beaucoup d’entre eux étaient hors d’état d’y satisfaire, il paya lui-même la rançon de plusieurs milliers de captifs.