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698. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — De la langue Françoise. » pp. 159-174

Je n’ai garde cependant de préconiser le Latin, au point de croire ridiculement qu’il faille donner à cette langue les plus belles années de sa vie, y être consommé pour se mettre en état d’écrire en François. […] Celles que M. l’évêque du Puy, écrivain qui, à l’exemple de Bossuet & de Fénélon, joint à l’amour des sciences le goût de la littérature, donne dans son Essai critique sur l’état présent de la république des lettres, méritent de l’attention.

699. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence en général. » pp. 177-192

Ils avoient passé toute leur vie dans l’étude des auteurs Grecs & Latins, dans ce talent si rare d’instruire la jeunesse, dans la composition de plusieurs ouvrages analogues à leur état. […] Un orateur, ajoute-t-il, qui aura étudié les passions en physicien, sera plus en état d’appliquer les préceptes de rhétorique que celui qui n’aura pas les mêmes connoissances.

700. (1799) Jugements sur Rousseau [posth.]

Il n’y a pas grand mal à cela ; mais où j’en trouve davantage, c’est que tant d’esprit, de lumières, de vie et de chaleur, soit dépensé presque en pure perte, pour considérer l’homme dans des états d’abstraction, dans des états métaphysiques où il ne fut et ne sera jamais, et non l’homme tel qu’il est dans la société.

701. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le Christianisme en Chine, en Tartarie et au Thibet »

Dans tout état de cause et de littérature, les voyages préparent merveilleusement à l’histoire, mais dans l’état actuel de nos connaissances, ils sont presque de nécessité. […] Réduit à son état atomique dans la personne de ses derniers prêtres à la Chine, le Christianisme n’en paraîtra que plus auguste, et sur les lèvres de ces derniers prêtres l’éclair de la puissance de Dieu brillera mieux !

702. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Léopold Ranke » pp. 1-14

Mais il paraît que le bœuf aussi a la même horreur pour ce qui brille… Aux yeux de ces sortes d’esprits, Léopold Ranke, passant de l’état d’historien qui sent, se passionne et peint sa pensée, à l’état d’historien systématique et décoloré, est un grand esprit qui s’élève ; et si, à cette suppression de sentiment ou de mouvement, à cette recherche amoureuse sans amour de l’expression abstraite, à cette généralisation vague quand elle n’est pas fausse et fausse dès qu’elle s’avise de préciser, on ajoute la gravité, ce masque des têtes vides qui cache si bien, dans tant de livres contemporains, la platitude de la niaiserie sous l’imposance du sérieux, vous avez un de ces historiens composés de qualités négatives tels que les rationalistes philosophiques et littéraires conçoivent leur historien — leur caput mortuum — et l’ont souvent réalisé.

703. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Μ. Eugène Hatin » pp. 1-14

Il n’y a pas de « torpeur » présentement pour le journalisme, ce qui serait un état maladif et une réaction, comme dit médicalement Μ.  […] Il y a liberté, mais liberté réglementée, ce qui est, au contraire, pour le journalisme, la santé et l’état normal !

704. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Vte Maurice De Bonald »

Quoi qu’il y écrive vers la fin le mot de conclusion, il n’y en a pas pourtant de rigoureusement affirmée par ce royaliste contre la royauté qu’il aime encore malgré ses fautes, et ce sont les événements seuls qu’il laisse conclure… Il est évident cependant que l’état général des rois en proie à l’entrainement révolutionnaire a pu être d’un exemple contagieux pour celui qui devra s’appeler Henri V, et c’est par les expériences et les aveux de la papauté elle-même que Bonald constate cet état lamentable.

705. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre V. Autres preuves tirées des caractères propres aux aristocraties héroïques. — Garde des limites, des ordres politiques, des lois » pp. 321-333

Cet état dura un siècle encore après la loi des douze tables, au rapport du jurisconsulte Pomponius. […] La multitude des lois est, comme le remarquent les politiques, la route la plus prompte qui conduise les états à la monarchie ; aussi Auguste pour l’établir en fit un grand nombre ; et les princes qui suivirent, employèrent surtout le sénat à faire des sénatus-consultes d’intérêt privé.

706. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre VII. Dernières preuves à l’appui de nos principes sur la marche des sociétés » pp. 342-354

Dans l’état de famille les peines furent atroces. […] Dans les guerres barbares des temps héroïques, les cités vaincues étaient ruinées, et leurs habitants, réduits à un état de servage, étaient dispersés par troupeaux dans les campagnes pour les cultiver au profit du peuple vainqueur.

707. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « [Note de l’éditeur] »

C’est un brouillon, écrit ou dicté à la hâte, et qui est resté à l’état de premier jet.

708. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article »

Cinq ou six prix de Poésies remportés dans plusieurs Académies, & deux Discours, l’un sur le Goût, l’autre sur la Frivolité, prouvent qu’il est en état d’écrire également bien en Vers & en Prose.

709. (1763) Salon de 1763 « Peintures — M. Favray, Chevalier de Malte et Académicien » p. 248

Favray pour sa copie de Saint-Jean de Malte ; mais reçu, il eût fallu l’en exclure pour sa Famille maltaise, pour ses Femmes maltaises de différents états, et qui se font visite.

710. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 349

Après avoir professé la Religion Protestante, il l’abjura à l’âge de 25 ans, entra aussi-tôt dans l’état ecclésiastique, & s’appliqua à des Ouvrages d’Astronomie.

711. (1875) Premiers lundis. Tome III « Du point de départ et des origines de la langue et de la littérature française »

— Il est donc indispensable que j’établisse devant vous quelques faits généraux antérieurs, que j’expose l’état des choses, et comment le français d’alors était né, — un français intermédiaire et qui n’est pas encore tout à fait le nôtre, mais qui y mène par une route et une pente désormais ininterrompues. […] Or, maintenant, que peut-on conjecturer de l’état de la langue ou des langues parlées en Gaule à cette époque, et de ce qui dut résulter de la ruine de la prédominance romaine ? […] C’était, comme nous le reconnaîtrons plus expressément par la suite (disait Fauriel), ce même idiome que j’ai distingué plus haut par la dénomination de latin rustique, et qui fut un peu plus tard nommé langue romane, ou roman ; il se divisait en nombreux dialectes, dont les deux plus tranchés, aux deux extrémités du pays, formèrent, l’un le français, ou roman du Nord ; l’autre, le provençal, ou roman du Midi20. » Tel est l’état général des choses au moment où notre étude proprement dite commence. […] « Gustave Fallot, dit ce savant grammairien (et je citerai le passage tout entier, comme exposant bien l’état actuel et dernier de la question), Gustave Fallot fut le premier qui essaya de débrouiller le chaos des formes dialectales de la langue des trouvères ; par malheur pour la science, la mort vint le surprendre au milieu de ses travaux, et son ouvrage resta imparfait. […] Ces fruits de la littérature dumoyen âge, nous y atteindrons le plus tôt possible ; après avoir passé par les rudiments indispensables et nous être rendu compte, seulement pour la bien comprendre, de la question primordiale et de formation, nous arriverons après deux ou trois journées, nous nous arrêterons devant les premiers monuments, et de ceux-ci nous passerons à d’autres, et ainsi de suite sans plus cesser, en quête par-dessus tout de l’excellent : car, encore une fois, nous sommes ici pour professer la langue, la littérature cultivée, perfectionnée, celle qui ne reste pas à l’état acéphalique, anarchique, mais qui a une tête, qui, maîtresse d’elle-même, se gouverne, réagit en tous sens et s’impose, qui enfin, comme la race et comme l’esprit français qu’elle représente, a et gardera longtemps, nous l’espérons, son unité, sa grandeur et son empire.

712. (1890) L’avenir de la science « XV » pp. 296-320

Il y a un extrême danger à donner une valeur historique et chronologique aux évolutions que l’on conçoit comme ayant dû être successives, à supposer, par exemple, que l’homme débute par l’anthropophagie, parce que cet état est conçu comme le plus grossier. […] Les noms généraux par lesquels on désigne les phases diverses de l’esprit ne s’appliquent jamais d’une manière parfaitement univoque, comme disait l’école, à deux états divers. « La ligne de l’humanité, dit Herder, n’est ni droite, ni uniforme ; elle s’égare dans toutes les directions, présente toute les courbures et tous les angles. […] Le Moyen Âge ressemble par certains côtés aux temps homériques, et qui voudrait pourtant appliquer à des états si divers la même dénomination ? […] L’Orient a toujours vécu dans cet état psychologique où naissent les mythes. […] Auguste Comte, par exemple, prétend avoir trouvé la loi définitive de l’esprit humain dans la succession des trois états théologique, métaphysique, scientifique.

713. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1868 » pp. 185-249

Ce bruit nous met dans un état nerveux abominable. […] Il me dit que c’est la plus étonnante créature du monde, un cerveau merveilleux, mais un cerveau qui serait, selon son expression, dans une assiette, n’ayant aucune corrélation avec sa personne, sa conduite, son état et son esprit dans la vie, la laissant « enfantine et dinde au possible ». […] Il avait pris pour thèse que, chez tout le monde, sans exception, tous les sentiments et toutes les impressions dépendent du bon et du mauvais état de l’estomac, et il racontait, à l’appui, l’histoire d’un mari de ses amis qu’il avait emmené dîner chez lui, le soir de la mort de sa femme, une femme qu’il adorait. — Il lui avait servi un morceau de bœuf, lorsque le mari tendit son assiette et avec une douce imploration de la voix, lui demanda : « Un peu de gras ! […] * * * — Ce qui sauve les souverains de devenir fous par la multiplicité des affaires et la contention des préoccupations, c’est que, par une grâce d’état, ils vivent dans une espèce de rêve de tout ce qu’ils font. […] * * * — L’homme ne possède vraiment que dans l’état sauvage.

714. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1869 » pp. 253-317

Pas de distraction pour nous enlever à notre état malingre, au tourment de notre santé, comme ces hautes élévations de la science, ces hypothèses médicales, ces rêves dans l’inconnu de la vie, et qui nous apportent les oublis et les étourdissements que donnent aux autres les enivrements d’une fête du monde, d’un bal, d’un spectacle. […] Nous le trouvons triste de son état, triste de la politique, triste de l’état de la littérature. […] Au sortir du déjeuner, comme je lui faisais mes excuses, en lui témoignant la profonde affection que j’avais pour elle, et que, malgré moi, en le bête d’état nerveux où je suis, des larmes tombaient de mes yeux sur ses mains que je baisais, mon émotion la gagnant, elle me prit dans ses bras, et m’embrassant sur les deux joues me dit : « Mais comment donc ! […] … Moi aussi, depuis quelque temps, avec les choses qui se passent en politique, je me sens dans un état nerveux… » Et la scène finit dans la douceur d’un silence ému, où se retrempe et se resserre l’amitié. […] * * * — Inquiète, malgré deux dépêches reçues hier, et voulant se rendre compte par elle-même de l’état de santé de l’Empereur, la princesse va le voir aujourd’hui à Saint-Cloud.

715. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — I. » pp. 80-97

Enfant, il aimait donc toutes sortes de déduits et d’ébats, et il s’attachait par instinct aux gens riches, à ceux qui tenaient grand état de chasse, faucons et meutes, ce qui lui semblait le signe d’une noble inclination. […] Cette fois messire Jean Froissart se met en route en plus respectable état que jamais, et il n’a pas moins de quatre lévriers en laisse qu’il va offrir au comte Gaston, grand amateur de chasse comme on sait. […] Et puis, il faut se bien rendre compte de l’état de la chevalerie d’alors, de laquelle Froissart est proprement l’historien sans acception de cause et de nation.

716. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

Cet apaisement, cette simplification et ces temps de repos qu’il lui prêche, cet état de tranquillité et de quiétude morale auquel il le voudrait insensiblement amener, — ne pas toujours voir Dieu à travers la grille d’un raisonnement étroit et serré, — c’est de la part de Fénelon un conseil du bon sens le plus clairvoyant, le plus net, et qui dans le cas présent, autant que nous en pouvons juger, allait le mieux à son adresse ; c’est encore du bon quiétisme. […] Dans son exil, et malgré ses restes de relations confidentielles à la Cour, il n’était plus bien informé du fond ; il dit à tout moment qu’il est mal instruit de l’état général des affaires, et il a raison ; il n’en juge que comme le public et, selon qu’il le dit, par les morceaux du gouvernement qu’il entrevoit sur sa frontière. […] Je trouve dans une lettre de lui à Mme de Montberon, alors qu’il approchait de la cinquantaine (1700), une peinture bien fine et bien circonstanciée de cet état insipide, aride, désabusé, où il se trouve : « Pour moi, je suis dans une paix sèche, obscure et languissante, sans ennui, sans plaisir, sans pensée d’en avoir jamais aucun ; sans aucune vue d’avenir en ce monde ; avec un présent insipide et souvent épineux… » Ces instants d’aridité et de dégoût, chez Fénelon, se peignent avec des traits qui font encore que son ennui ne ressemble pas à un ennui vulgaire.

717. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — II » pp. 71-89

Ce n’est pas un état des services de Montluc que j’entreprends de dresser d’après lui. […] Après avoir pourvu aux premiers soins du commandement et s’être assuré de ses forces, vers le commencement de mars 1544, M. d’Enghien dépêcha Montluc au roi François Ier pour l’informer de l’état des choses, de l’armée considérable que levaient les impériaux sous les ordres du marquis du Guast, et pour demander quelques renforts en même temps que la permission de livrer bataille. […] Les Romains pouvaient faire cela, ajoute Montluc, mais non pas les chrétiens. » C’est dans cet état qu’on vint apprendre à M. d’Enghien que cette victoire qu’il tenait pour perdue était à lui et aux siens.

718. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — I » pp. 236-253

Même lorsqu’il traite des dogmes et qu’il se livre à un enseignement théologique, ainsi qu’il l’a fait dans son traité des Trois Vérités (1594), et dans ses Discours chrétiens (1600), Charron est sceptique de méthode, c’est-à-dire qu’il insiste avec un certain plaisir et une assez grande force de logique sur les preuves de la faiblesse et de l’incapacité humaine : douter, balancer, surseoir, tant qu’on n’a pas reçu de lumières suffisantes, est l’état favori qu’il propose à quiconque veut devenir sage ; et néanmoins son avis se distingue, à ce qu’il prétend, de celui des purs pyrrhoniens, « bien qu’il en ait l’air et l’odeur », en ce qu’il admet qu’on se soumette en attendant et que l’on consente à ce qui paraît meilleur et plus vraisemblable. […] Et comment voulez-vous que Charron, dans sa controverse chrétienne et dans les discours religieux qu’on a de lui, ait touché au vif la fibre humaine, lorsqu’au fond il a en tel mépris ceux qu’il appelle dogmatises et qui affirment, c’est-à-dire qui n’osent se maintenir dans cet état de balance parfaite où il place le bonheur et la sagesse ? […] Les trois livres dont se compose l’ouvrage roulent : 1° sur l’homme, sa misère, ses faiblesses, ses passions ; sur la vie humaine, ses fluctuations et sa brièveté ; sur les différents états, conditions et genres de vie qui distinguent les hommes ; 2° sur la manière de s’affranchir des erreurs, de l’opinion ou des passions ; 3° enfin, sur les quatre vertus de prudence, justice, force et tempérance.

719. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — III » pp. 337-355

Richelieu, tout vif qu’il est sur la religion, montre qu’il n’était pas loin de l’entendre ainsi en idée ; mais, de part et d’autre, qu’on était neuf pour ce nouvel état ! […] Les Grisons se plaignaient de la France, de tout temps leur protectrice, qui, par un traité avec l’Espagne, avait paru consentir à cet état tel quel ; la France, de son côté, avait intérêt à ce que les Grisons redevinssent maîtres de la Valteline et reprissent les clefs du passage. […] La peste, la famine sévissent parmi les troupes ; les colonels et capitaines Grisons s’irritent faute de paye et quittent leurs postes, le conseil des ligues pense à de nouvelles alliances : point d’argent, point de Grisons. « Il ne se passe semaine, écrivait Rohan à M. des Noyers dès le mois de juillet, que je ne vous écrive l’état de ce pays, et je n’apprends pas seulement que vous receviez mes lettres, ce qui me fait croire que vous ne prenez pas la peine de les lire. » Les amères doléances de Rohan du fond de sa Valteline arrivaient pendant que les Espagnols prenaient Corbie et menaçaient la capitale ; on conçoit qu’elles aient été médiocrement écoutées.

720. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Une monarchie en décadence, déboires de la cour d’Espagne sous le règne de Charles II, Par le marquis de Villars »

Il était seul de la branché espagnole de la Maison d’Autriche, et tout son royaume avait intérêt qu’il fût en état d’avoir des enfants. […] La pauvre petite reine, qui est fort jolie, n’a d’autre plaisir, quand elle ne voit pas Mme de Villars seule pour lui parler de la France, que de manger beaucoup, ce qui fait qu’elle engraisse à vue d’œil : « La reine d’Espagne, bien loin d’être dans un état pitoyable, comme on le publie en France, est engraissée au point que, pour peu qu’elle augmente, son visage sera rond. […] Il soutenait à la marquise de Villars qu’il n’y avait qu’un ambassadeur de France qui put présentement trouver quelque plaisir dans cette Cour, à voir le méchant état où elle était.

721. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

Quant à Salammbô, à laquelle le lecteur à bout de sensations et d’abominations a moins que jamais le cœur de s’intéresser, dès longtemps fiancée à Narr’Havas, elle meurt en revoyant de ses yeux dans cet état horrible ce Mâtho, ce beau drôle de Lybien pour qui elle s’est sentie allumée dès le premier soir, et à qui elle s’est, de gaieté de cœur, abandonnée. […] Je suis loin de prétendre interdire aux artistes l’entrée et la conquête poétique de cet Orient, dans lequel, dit-on, l’état mental de l’humanité est un peu différent du nôtre. […] L’écrivain pittoresque aurait même pu, dans un ou deux chapitres, nous livrer à l’état de rêve ou d’idéal rétrospectif sa reconstruction architecturale et morale, restitution imaginaire, mais devenue par là même plus plausible, puisqu’il n’aurait rien affirmé.

722. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

— Au moins il faut y tendre et y viser de tous ses moyens, à cet état de moindre antagonisme, de paix européenne universelle et d’harmonie. — Oh ! […] Il y a mieux : ce parfait état de société, cet ordre idéal et simple que M. de Girardin a en vue, je le suppose acquis et obtenu, je l’admets tout formé comme par miracle : on a un pouvoir qui réalise le vœu du théoricien ; qui ne se charge que de ce que l’individu lui laisse et de ce que lui seul peut faire : l’armée n’est plus qu’une force publique pour la bonne police ; l’impôt n’est qu’une assurance consentie, réclamée par l’assuré ; l’individu est libre de se développer en tous sens, d’oser, de tenter, de se réunir par groupes et pelotons, de s’associer sous toutes les formes, de se cotiser, d’imprimer, de se choisir des juges pour le juger (ainsi que cela se pratique pour les tribunaux de commerce), d’élire et d’entretenir des ministres du culte pour l’évangéliser ou le mormoniser… ; enfin, on est plus Américain en Europe que la libre Amérique elle-même, on peut être blanc ou noir impunément. […] Ce nouvel état social, fût-il uniforme dans sa simplicité d’organisation, aurait donc, selon les lieux et les peuples, une physionomie autre et des destinées fort différentes ; il aurait, lui aussi, ses orages, ses luttes, ses accidents imprévus, peut-être ses catastrophes, résultat des passions et du peu de sagesse humaine.

723. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Legkzinska »

On fit une revue des princesses à marier en Europe, et l’on en trouva de prime abord jusqu’à quatre-vingt-dix-neuf : de cette foule le comte de Morville, ministre des Affaires étrangères, avait tiré une élite, une liste de dix-huit princesses réellement en état d’être mariées avec le roi. […] Elle était arrivée en France dans un temps d’affreuse misère, et avait pu voir de ses yeux l’état lamentable des provinces qu’elle traversait. […] Mme de Prie entre à tous moments dans ses appartements pour voir ce qu’elle fait, et elle n’est maîtresse d’aucune grâce. » Or, un matin, la reine trouva sur sa table un papier d’une fort belle écriture, et elle y lut, sous ce titre d’Instruction de Mme de Prie à la reine de France et de Navarre, les mauvais vers suivants qui parodiaient le discours d’Arnolphe à Agnès avec la gaieté de moins : Marie, écoutez-moi : laissez là le rosaire, Et regardez en moi votre ange tutélaire, Moi qui suis de Bourbon l’amante et le conseil, Moi qu’il chérit autant et plus que son bon œil52 : Notre roi vous épouse, et cent fois la journée Vous devez bénir l’heur de votre destinée, Contempler la bassesse où vous avez été, Et du prince qui m’aime admirer la bonté ; Qui de l’état obscur de simple demoiselle, Sur le trône des Lys par mon choix vous appelle.

724. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet »

Et, par exemple, il n’était pas pour l’affranchissement des noirs, à l’exemple des philosophes, et en même temps il demandait assez d’adoucissements à cet odieux état de l’esclavage pour paraître aux yeux des colons un ami des noirs, un négrophile : il ne contentait personne. […] Modèle des hommes en place et des administrateurs, bon et juste autant qu’éclairé, Malouet n’était pas sans se reprocher bien souvent d’assister aux abus, même en les corrigeant de son mieux dans le détail ; mais il se sentait hors d’état d’y remédier à fond et d’y couper court à la racine, et il en souffrait. […] Mes ports de lettres coûtent au roi, indépendamment des paquets contre-signes, de 12 à 15,000 livres, et, en sus de cette immensité d’écritures, les frais d’imprimerie pour les états, bordereaux, etc., s’élèvent annuellement à 16,000 livres.

725. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre IV »

L’état de la bouche, béante comme un trou, des dents “déchaussées et jaunies par un tartre fuligineux”, de la langue, sèche, coupée de crevasses, noirâtre et tremblante ainsi qu’une “langue de perroquet” de même la coloration violette des gencives, sont reproduits d’après l’observation directe, et je n’ai rien enjolivé, ou plutôt… enlaidi. […] Après un tableau complet et très honnête de « fièvre cérébrale » il s’éternise en la description non moins étendue d’une pleurésie ; « nous promène pendant trois ou quatre septénaires, au bout desquels l’affection passe de l’état aigu à l’état chronique, et finit par conduire la malade au tombeau.

726. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre dixième »

En dépit de Voltaire qui les tenait pour dûment esclaves, de la politique qui prescrivait, dans l’intérêt des colonies, « de ne pas affaiblir l’état d’humiliation attaché à leur espèce94 », la France, persuadée par Buffon, y reconnaissait des hommes, et, dès la quatrième séance des états généraux, un La Rochefoucauld invitait l’assemblée à prendre en considération la liberté des noirs. Buffon, traçant un portrait du caractère moral de la race nègre, avait dit : « Je ne puis écrire leur histoire sans m’attendrir sur leur état.

727. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires de Philippe de Commynes, nouvelle édition publiée par Mlle Dupont. (3 vol. in-8º.) » pp. 241-259

Il étoit naturellement ami des gens de moyen état et ennemi de tous grands qui se pouvoient passer de lui. […] Il s’enquiert de ceux qui l’ont retenu par force dans le premier moment, et les chasse tous de sa maison, moins par colère réelle que par feinte, et pour servir d’exemple à ceux qui seraient tentés dans la suite d’user de sa faiblesse pour empiéter en quoi que ce soit : « Car il étoit maître, dit Commynes, avec lequel il falloit charrier droit. » Avant même d’avoir retrouvé toute sa tête, il fait semblant de comprendre les dépêches qu’on lui apporte et qu’on lui lit ; il les prend en main, et fait mine de les lire à son tour, bien qu’il soit encore hors d’état d’y rien voir : c’est le roi qui se réveille en lui avant l’homme. […] On reconnaît là l’homme qui a couché de longues années, comme chambellan, dans leur chambre, qui a assisté à leurs insomnies et à leurs mauvais songes, et qui, depuis la fleur de leur âge jusqu’à leur mort, n’a pas surpris dans ces destinées si enviées un seul bon jour : Ne lui eût-il pas mieux valu, dit-il de Louis XI, à lui et à tous autres princes, et hommes de moyen état qui ont vécu sous ces grands et vivront sous ceux qui règnent, élire le moyen chemin… : c’est à savoir moins se soucier et moins se travailler, et entreprendre moins de choses ; plus craindre à offenser Dieu et à persécuter le peuple et leurs voisins par tant de voies cruelles, et prendre des aises et plaisirs honnêtes ?

728. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Il racontait souvent avec énergie l’impression qu’il reçut de l’état de terreur qui pesait alors sur la grande cité : « Cet état de prostration et de stupeur était tel (c’est lui qui parle), que si l’on avait dit à un condamné : Tu iras dans ta maison et là tu attendras que la charrette passe demain matin pour y monter, il serait allé et il y serait monté. » Ce qui n’est pas moins remarquable chez quelqu’un qui avait senti à ce degré l’horreur des crimes, il ne fut point dégoûté de la liberté ; il n’entra point, au sortir de là, dans la crainte et l’aversion des progrès modérés et des lumières. […] Droz nous le dira d’un mot : « La véritable aristocratie respecte et maintient les lois ; la noblesse se regardait comme au-dessus des lois. » L’esprit de la noblesse de robe est finement distingué de celui de la noblesse d’épée et de la noblesse de cour : « Les magistrats regardaient les militaires comme des machines obéissantes ; ils se jugeaient plus indépendants, plus instruits, plus désintéressés que les gens de cour ; et ils avaient en morgue ce que ceux-ci avaient en vanité. » Toutes les nuances d’inégalité qui composaient l’Ancien Régime, et qui causaient des froissements si sensibles à l’amour-propre, à mesure que l’ambition s’éveillait dans tous les rangs, sont fidèlement analysées par l’historien ; et il n’est pas moins attentif à indiquer les causes de rapprochement entre les classes, les signes précurseurs de l’avènement prochain du tiers état.

729. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — II. » pp. 494-514

Il écrivait au comte de Sainte-Aldegonde, le 27 mars 1796 (M. de Sainte-Aldegonde était l’homme du comte d’Artois) : Toutes les opinions se ramifient à l’infini ; mais le premier qui sera en état de se faire roi et de promettre une tranquillité prochaine les absorbera toutes. L’habitude du malheur et des privations, l’état affreux où ont vécu les Parisiens sous Robespierre, leur fait trouver leur situation actuelle supportable. […] Or, l’impression que produit Rousseau en politique est toute contraire : il fait que chacun, après l’avoir lu, est plus mécontent de son état.

730. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Patru. Éloge d’Olivier Patru, par M. P. Péronne, avocat. (1851.) » pp. 275-293

Il est bon de temps en temps de repasser et de se redire ce que signifient ces gloires consacrées : il n’est jamais sans intérêt de ressaisir et de se représenter au naturel l’homme autrefois célèbre qui n’est plus resté pour nous qu’à l’état de nom et d’image. […] N’oublions pas l’état de la langue sous Richelieu et le travail qui était en train de s’accomplir. […] Le père Bouhours, l’un de ses admirateurs et de ses disciples, et qui l’assista dans ses derniers moments, a dit : Les malheurs d’autrui le touchaient plus que les siens propres, et sa charité envers les pauvres, qu’il ne pouvait voir sans les soulager, lors même qu’il n’était pas trop en état de le faire, lui a peut-être obtenu du ciel la grâce d’une longue maladie, pendant laquelle il s’est tourné tout à fait vers Dieu ; car, après avoir vécu en honnête homme et un peu en philosophe, il est mort en bon chrétien dans la participation des sacrements de l’Église et avec les sentiments d’une sincère pénitence.

731. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « De la retraite de MM. Villemain et Cousin. » pp. 146-164

Dans un tel état politique de défense et de siège, il n’y avait plus de place pour l’espèce de philosophie intermédiaire de M.  […] Ce dernier volume, qui va paraître, contient : 1º un morceau étendu, De l’état de la poésie en France avant Corneille ; 2º une étude développée sur Corneille lui-même ; 3º trois biographies d’auteurs du temps, Rotrou, Chapelain et Scarron. […] Le professorat n’est plus un état ; le journalisme n’est plus une carrière ; pour se faire homme de lettres à l’heure qu’il est, il faut se sentir une dure vocation.

732. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

Il n’est pas douteux pourtant qu’il n’ait, dans son intimité de Passy, agi sur bien des hommes éminents qui prirent part ensuite à ce grand mouvement révolutionnaire, et qu’il n’ait contribué à leur donner plus de confiance et de hardiesse : « Franklin, nous dit Mallet du Pan, répéta plus d’une fois à ses élèves de Paris que celui qui transporterait dans l’état politique les principes du christianisme primitif changerait la face de la société. » Il est un de ceux qui ont le plus mis en avant cette doctrine de séculariser le christianisme, d’en obtenir, s’il se peut, les bons et utiles résultats sur la terre. […] Plus d’une fois il s’élève ; le sentiment de la réalité et la vivacité de son affection humaine lui suggèrent une sorte de poésie : Je dois bientôt quitter celle scène, écrivait-il à Washington (5 mars 1780) ; mais vous pouvez vivre assez pour voir notre pays fleurir, comme il ne manquera pas de le faire d’une manière étonnante et rapide lorsqu’une fois la guerre sera finie : semblable à un champ de jeune blé de Turquie qu’un beau temps trop prolongé et trop de soleil avaient desséché et décoloré, et qui dans ce faible état, assailli d’un ouragan tout chargé de pluie, de grêle et de tonnerre, semblait menacé d’une entière destruction ; cependant, l’orage venant à passer, il recouvre sa fraîche verdure, se relève avec une vigueur nouvelle, et réjouit les yeux, non seulement de son possesseur, mais de tout voyageur qui le regarde en passant. […] Il considérait la mort comme une seconde naissance : « Cette vie est plutôt un état d’embryon, une préparation à la vie.

733. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

Quelques livres de piété que lui prêta un chanoine de Soissons lui firent croire d’abord qu’il avait du goût pour l’état ecclésiastique et pour la retraite : il fut reçu à l’institution de l’Oratoire le 27 avril 1641 et envoyé à Paris au séminaire de Saint-Magloire. […] Au temps de Jean-Jacques Rousseau, la tentative a été reprise par une plume ardente, avec un talent supérieur et une appropriation directe à l’état des âmes. […] C’est alors que Lamartine paraissant trouva en poésie des accents nouveaux qui répondirent à ce vague état moral des imaginations et des cœurs.

734. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre II : Philosophie politique de Tocqueville »

Ils conserveraient volontiers les mœurs domestiques de la démocratie, pourvu qu’ils pussent rejeter son état social et ses lois ; mais ces choses se tiennent, et l’on ne peut jouir des unes sans souffrir les autres. » Un autre effet de la démocratie, c’est de répandre dans le corps social une grande activité, un mouvement extrême. […] Si mes impressions étaient aussi tristes que vous le pensez, vous auriez raison de croire qu’il y a une sorte de contradiction dans mes conclusions, qui tendent, en définitive, à l’organisation progressive de la démocratie, J’ai cherché, il est vrai, à établir quelles étaient les tendances naturelles que donnait à l’esprit et aux institutions de l’homme un état démocratique. […] Il m’a semblé que les démocrates (et je prends ce motdans son bon sens) ne voyaient clairement ni les avantages, ni les périls de l’état vers lequel ils cherchaient à diriger la société, et qu’ils étaient ainsi exposés à se méprendre sur les moyens à employer pour rendre les premiers les plus grands possible et les seconds les plus petits qu’on puisse les faire.

735. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre III : La littérature du xviiie et du xixe  siècle »

Au contraire, tout ce qu’il a écrit sur la monarchie n’est qu’une censure indirecte et amère du gouvernement de Richelieu et de Louis XIV, qui, « ayant détruit tous les pouvoirs intermédiaires », n’ont plus laissé d’issue « que l’état despotique ou l’état populaire ». […] Je ne l’examine pas ; mais j’interroge toutes les écoles politiques de notre temps, et il n’y en a pas une qui, soit pour louer, soit pour blâmer, ne résume l’état actuel de la société parle mot démocratie : c’est le mot du Contrat social.

736. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre II : Variations des espèces à l’état de nature »

Je n’ai pu trouver un seul exemple d’une espèce sauvage présentant des particularités d’organisation analogues aux monstruosités qu’on observe dans les formes alliées vivant à l’état domestique. […] La transition d’un degré de différence à un autre plus élevé peut être attribuée simplement, en quelques cas, à l’action longtemps continuée des conditions physiques en deux différentes régions ; mais je n’ai pas une grande confiance en l’action de tels agents ; et j’attribue plutôt les modifications successives d’une variété, qui passe d’un état très peu différent de celui de l’espèce mère à une forme qui en diffère davantage, à la sélection naturelle agissant de manière à accumuler dans une direction donnée des différences d’organisation presque insensibles, ainsi que je l’expliquerai bientôt plus longuement. […] Elles peuvent s’éteindre à l’état naissant ou peuvent se perpétuer comme variétés pendant de longues périodes, ainsi que M. 

737. (1912) L’art de lire « Chapitre VIII. Les ennemis de la lecture »

Continuons de lire La Bruyère ; il connaît la question ; il est homme qui a fait un livre et qui a désiré très vivement être lu et qui était assez intelligent pour comprendre, mieux encore que tout autre chose, les raisons qu’on pouvait avoir de ne le lire point ou de le lire mal : « Ceux qui par leur condition se trouvent exempts de la jalousie d’auteur ont, ou des passions, ou des besoins qui les distraient ou les rendent froids sur les conceptions d’autrui ; personne presque, par la disposition de son esprit, de son cœur et de sa fortune, n’est en état de se livrer au plaisir que donne la perfection d’un ouvrage. » Et c’est-à-dire qu’un des ennemis de la lecture, c’est la vie même. […] Ce ne sont donc pas les « très belles choses » dont il se prive, ce sont les très belles choses que d’avance il met à part en se mettant en état, quand il les trouvera, de les démêler du premier coup avec un cri d’amour et de gratitude. […] Chacun de ces états possède une optique contraire à l’autre.

738. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Seconde partie. Des mœurs et des opinions » pp. 114-142

Mais, dans cet état d’abstraction, d’abstraction, n’est qu’un système de gouvernement, une simple spéculation politique. […] La couronne, protectrice de tous les ordres d’un état, favorisait cette marche progressive : c’était son devoir. […] Les femmes présentent une série semblable de faits dans l’ensemble de leurs destinées : elles se sont graduellement élevées ; leur condition a subi les mêmes vicissitudes, selon les états différents de la société.

739. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Dans cet état final, qui est celui d’un beau corps bien habillé et bien embaumé, on peut se demander pourquoi il a réussi. […] Tant de religions diverses et tant de philosophies contraires, tant de vérités renversées et tant d’erreurs soutenues, ont montré que l’établissement et la chute des opinions dépendent non de leur absurdité ou de leur évidence, mais de la conformité ou de l’opposition qui se rencontre entre elles et l’état des esprits. […] Si l’on excepte les élèves qui croient sur parole, les professeurs qui croient par état, et les inventeurs qui croient à titre d’inventeurs, on trouve que sur la foule, savants, jeunes gens et gens du monde, cette philosophie n’a plus de prise, Ceux-ci admettent comme l’école Dieu, l’âme, le devoir ; mais l’obligation en est au catéchisme et à l’opinion plus qu’à l’école.

740. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIII : De la méthode »

C’est mon état. […] Par quels états intermédiaires l’aliment a-t-il passé ? […] Vous voyez que ma traduction n’était pas complète ; mon expression indiquait un fait, mais non les parties de ce fait ; elle désignait un passage ou changement d’état, mais en gros, sans détailler tout ce qui le compose.

741. (1714) Discours sur Homère pp. 1-137

On s’est passionné de part et d’autre, comme s’il s’étoit agi du renversement de l’état ou de la religion ; les injures étoient souvent en plus grand nombre et plus fortes que les raisons ; et comme la passion se justifie toujours elle-même, on imputoit au seul zéle du vrai, tous les excès de la vanité et de l’idolatre amour de son opinion. […] Le destin lui avoit proposé par la bouche de Thétis, l’alternative d’une vie longue et heureuse, mais obscure, s’il demeuroit dans ses états ; et d’une vie courte, mais glorieuse, s’il embrassoit la vengeance des grecs. […] Mais pour les sentences que le poëte met dans la bouche de ses personnages, il suffit qu’il y ait une vérité de rélation ; c’est-à-dire, qu’elles soient conformes au caractere et à l’état de celui qui parle ; parce que la vérité de la maxime n’est pas alors l’objet du poëte, mais la vérité du caractere et de la passion. […] Et il faut tout dire : avec de l’esprit et de l’attention, le lecteur est bien plus en état de rendre une justice exacte à un auteur traduit de la sorte, que s’il étoit traduit avec plus de liberté. […] Du moins n’y a-t-il personne en état de faire là-dessus, une estimation juste des langues vivantes et des langues mortes ; et d’ailleurs, en quelque langue que ce soit, quand on exprime une chose de la maniere la plus précise qu’elle se puisse dire, l’esprit ne compte point les mots, et il est également content du plus ou du moins, pourvû qu’il ne sente que le nécessaire.

742. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Galloix, Jacques Imbert (1...-18..) »

Victor Hugo Sa poésie ne se produisait guère qu’à l’état d’ébauche.

743. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 190

Né avec de l’ardeur pour l’étude des Lettres, & formé par l’Abbé Desfontaines, il se seroit fait plus de réputation, si les devoirs de son état (il étoit Cheveau-Léger) lui eussent laissé plus de loisir pour cultiver son esprit & épurer son goût.

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