/ 2192
1328. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Diderot »

La jeune fille qu’il aima était une demoiselle déchue, une ouvrière pauvre, vivant honnêtement avec sa mère du travail de ses mains. […] Il fut à l’intérieur la pierre angulaire et vivante de cette construction collective, et aussi le point de mire de toutes les persécutions, de toutes les menaces du dehors.

1329. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « François Ier, poëte. Poésies et correspondance recueillies et publiées par M. Aimé Champollion-Figeac, 1 vol. in-4°, Paris, 1847. »

Ce manuscrit commence tout simplement par une lettre en prose que le roi prisonnier écrit à une maîtresse dont on ignore le nom : « Ayant perdu, dit-il, l’occasion de plaisante escripture et acquis l’oubliance de tout contentement, n’est demeuré riens vivant en ma mémoire, que la souvenance de vostre heureuse bonne grace, qui en moy a la seulle puissance de tenir vif le reste de mon ingrate fortune. […] 19. » Les Poésies de François Ier, fort louées de son vivant, rentrèrent dans l’obscurité après lui ; elles y restèrent, et personne alors ne songea à les publier.

1330. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (4e partie) » pp. 81-143

« Ce jardin n’était plus un jardin, c’était une broussaille colossale ; c’est-à-dire quelque chose qui est impénétrable comme une forêt, peuplé comme une ville, frissonnant comme un nid, sombre comme une cathédrale, odorant comme un bouquet, solitaire comme une tombe, vivant comme une foule. […] « À midi mille papillons blancs s’y réfugiaient, et c’était un spectacle divin de voir là tourbillonner en flocons dans l’ombre cette neige vivante de l’été.

1331. (1892) Boileau « Chapitre V. La critique de Boileau (Suite). Les théories de l’« Art poétique » (Fin) » pp. 121-155

Il est possible que ce réaliste, qui fut si peu psychologue, n’ait pas senti ce qu’il y a de vérité profonde, d’humanité vivante dans les farces de Molière. […] On a peur que ce naturaliste ne se plaise qu’aux imitations enjolivées de la nature, et que la vérité qu’il aime ne soit pas la vérité toute franche, belle de sa nudité vivante et savoureuse, mais un bénin reflet de vérité, doucement tamisée pour les yeux délicats par les voiles coquets du bel esprit.

1332. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

En seconde D (ceux qui ne font pas de latin) les élèves ont quatre heures de français par semaine, quatre heures d’histoire et vingt-deux heures de sciences ou de langues vivantes. […] Nous, nous lui faisons grand tort en enseignant à outrance les langues vivantes à nos enfants.

1333. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mendès, Catulle (1841-1909) »

Les personnages en sont peut-être mièvres, mais vivants, gais ou douloureux, probables, en place plus sans doute que des personnages de tapisseries au geste lent parce que figé, d’un procédé trop immobile. […] Il aima à la fois la rudesse des temps barbares, la civilisation affinée de l’antique Grèce et la gracieuse décadence de Paris ; son intelligence et ses sens vibrèrent à toutes les beautés, et s’il nous est cher, c’est parce qu’il ne se confina pas en une manière, parce qu’il fut toujours un artiste sincère et bien vivant.

1334. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre premier »

Si l’art est l’expression des vérités générales dans un langage définitif, les vérités de cet ordre et les termes qui ont servi à les exprimer n’étant pas sujets à changer ni à périr, il suit que l’histoire d’une littérature est l’histoire de ce qui n’a pas cessé, dans les œuvres littéraires d’une nation, d’être vrai, vivant, d’agir sur les âmes, de faire partie essentielle et permanente de l’enseignement public. […] Notre littérature est comme l’image vivante de ce gouvernement de toutes les facultés par la raison.

1335. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre deuxième »

Cet enjouement était dans le caractère du jeune Rabelais et son humeur joviale ne lui avait guère moins fait d’amis dès ce temps-là, que sa réputation de savoir et une mémoire immense, capable de recevoir et de garder tout ce que pouvait apprendre homme vivant. […] Car quand, par le plaisir de luy, qui tout régit et modere, si mon ame laissera cette habitation humaine, je ne me reputerai totalement mourir, ains passer d’un lieu en un aultre, attendu, que en toy et par toy je demeure en mon image, visible en ce monde, vivant, voyant, et conversant entre gens d’honneur et mes âmys, comme je souloys… (solebam)… Par quoy, ainsi comme en toi demeure l’image de mon corps, si pareillement ne reluysoient les moeurs de l’ame, l’on ne te jugeroit estreguarde et thresorde l’immortalité de nostre nom ; et le plaisir que prendroys ce voyant seroit petit, Considérant que la moindre partie de moy, qui est le corps, demeureroit, et la meilleure, qui est l’ame, et par laquelle demeure nostre nom en bénédiction entre les hommes, seroit degenerante et abastardie. » Cette lumière dont Rabelais parle à Tiraqueau, ce soleil qu’il oppose aux brouillards plus que cimmeriens du moyen âge, il prit plaisir à s’en éblouir.

1336. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 janvier 1886. »

VIII Ainsi le morne Dieu connaissant la Fin proche, Entrevoyant la fin des grands Ors superflus, S’acheminait vers les achèvements voulus ; — Ainsi Tristan criait au Jour son long reproche, Et son désir au Jour mauvais plus ne s’accroche, Aspiration à des hymens absolus ; — Ainsi le Pur, en qui les Mondes ne sont plus, Planait, extatique Colombe, sur la Roche… Ô mépriseur, nieur serein, ô attesté Blasphémateur de l’Ordinaire, en l’Unité Vivant, ô découvreur des réels récifs, Mage, — À nous, ainsi, l’esprit hautain et le pervers Génie, ainsi le rêve et la non-vaine image Et l’idée où se meut l’autre et l’autre univers ! […] En effet, l’action dramatique tout entière se concentre autour de sa personne, et en dehors d’elle il n’y a qu’Ortrud, sa rivale, qui soit vivante ; Lohengrin n’est guère qu’un spectateur.

1337. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « I »

Peintre excellent de sensations vivantes et personnelles, M.  […] Il a publié Poésie d’un vivant entre 1841 et 1843.

1338. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « II »

Certes, on pourrait citer tel point d’orgue inutile alanguissant une mordante fin de phrase, tel geste appris dans les conservatoires et venant troubler les développements d’une mimique naturelle ; mais l’ensemble est vivant, chaleureux, infiniment au-dessus de tout ce que nos théâtres nous ont depuis longtemps montré. […] seuls — pour la première fois depuis notre rencontre… » Le drame est tout symbolique, je l’avoue, mais la poésie en est assez expressive, assez vivante, pour être immédiatement comprise, et personne n’y demeurera indifférent.

1339. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre IV. Comparaison des variétés vives et de la forme calme de la parole intérieure. — place de la parole intérieure dans la classification des faits psychiques. »

La mémoire sensible fournit comme le premier fonds de cette construction originale, de cette œuvre homogène et distincte ; mais la parole intérieure, une fois créée, une fois mise en train à titre d’écho de la sensation sonore, semble oublier ses origines ; on la dirait vivante par elle-même ou par un autre principe que celui qui l’a fait naître. […] VI], non le phénomène essentiel assurément, mais le plus évident, et comme le tuteur rigide de cette plante fine et délicate ; la pensée s’appuie sur elle, et, l’associant à sa vie, en fait presque une chose vivante, à tel point qu’il faut l’observation la plus attentive pour distinguer dans cette intime association l’élément fondamental, et l’élément emprunté qui lui sert d’auxiliaire, l’âme elle-même, et cette souple armure, à la fois son œuvre et sa force, qui se plie à tous ses mouvements, et, les revêtant de son éclat, les dessine avec netteté sur le champ de la conscience.

1340. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Sainte-Beuve » pp. 43-79

« Virgile n’a voulu faire — nous dit-il — ni une Théséide, ni une Thébaïde, ni une Iliade purement grecque, en beau style latin ; il n’a pas voulu purement et simplement faire un poème à la Pharsale, tout latin, en l’honneur de César, où il célébrerait avec plus d’éloquence que de poésie la victoire d’Actium et ce qui a précédé chronologiquement et suivi ; il est trop poète par l’imagination pour revenir aux chroniques métriques d’Ennius et de Nævius, mais il a fait un poème qui est l’union et la fusion savante et vivante de l’une et de l’autre manière, une Odyssée pour les six premiers livres et une Iliade pour les six autres… une Iliade julienne et romaine… » Ainsi, on le voit, le critique revient sans cesse à cette idée de fusion qui calomnie Virgile et qu’il a eue déjà en voulant caractériser son génie, mais il nous est impossible, à nous, d’admettre un tel procédé dans le poète, il nous est impossible de croire à cette ingénieuse, trop ingénieuse fusion des deux poèmes d’Homère en un seul. […] , n’est plus le même Sainte-Beuve d’esprit et de talent que nous avons connu de son vivant ou dans ses écrits.

1341. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Du docteur Pusey et de son influence en Angleterre »

Nous, venus après lui, moins inspirés, mais vivant plus près des choses qui vont éclore, nous voyons mieux, à cette heure, ce que de Maistre apercevait. […] L’anglo-catholicisme n’est pas une opinion nouvelle, une forme religieuse vivant de son énergie propre : c’est une opinion ancienne infectée d’erreur, mais qui tend à se purifier et à se compléter chaque jour.

1342. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

Mais le talent de Feuillet gît et flotte dans je ne sais quel amnios intellectuel à travers lequel on le voit… possible, organisé, vivant, et ne sortant pas ! […] Octave Feuillet n’a point ce don de mettre debout une personne et de la faire voir, beautés, vices et tout, vivante et flambante !

1343. (1897) Un peintre écrivain : Fromentin pp. 1-37

Évolution heureuse, et qui nous rappelle cette vérité, parfois méconnue, que les hommes ne sont pas seulement des esprits songeurs et des âmes repliées, mais des âmes pensantes dans des corps agissants, enveloppés les uns et les autres par l’humanité vivante et par la nature. […] Quel monde de héros s’est ainsi, d’âge en âge, superposé au monde des vivants et des morts !

1344. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

S’il a voulu ajouter que l’humanité qu’il fallait observer et peindre était l’humanité contemporaine, vivante, et qu’il importait pour cela de s’affranchir aussi complètement que possible de toutes les conventions des écoles et de tous les pastiches du passé, d’être surtout et avant tout naïf et sincère : tout en approuvant fort ce programme, je ne vois pas bien encore où serait la grande innovation. […] Il n’est point exact, ainsi qu’il le prétend, qu’il ait le premier essayé de se mettre en face de l’humanité réelle et vivante ; mais ce qui est exact, et il convient de lui accorder cette originalité, c’est qu’il a sa psychologie et son observation particulières, qu’il voit la vie contemporaine et s’efforce de la représenter à sa manière, avec un parti pris, brutal si l’on veut, mais décidé.

1345. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXI. »

À la poésie grecque, à l’inspiration d’Eschyle et de Pindare il avait appartenu d’être à la fois idéale et vivante, de parer l’intelligence et d’animer le courage, de faire du génie d’un homme la vertu publique d’un peuple. […] Sous l’amas des épithètes et la barbarie d’un néologisme tout grec et tout latin, le poëte perd cette veine française et ces tours nerveux et naïfs que Malherbe plus tard recueillait dans le parler vivant de la foule, en les ennoblissant par le nombre et l’harmonie.

1346. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre III. Du récit des faits. — Antécédents et conséquents. — Causes et effets »

Chacun de ces détails enfonce insensiblement l’émotion dans le cœur du lecteur en déterminant l’image vivante du fait.

1347. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre I. Les origines du dix-huitième siècle — Chapitre I. Vue générale »

Il n’y a personne, pas même Rousseau, qui puisse pressentir la puissance de ces explosifs qu’on s’amuse à fabriquer et à manier ; personne ne se doute du ravage qu’ils feront, lorsqu’on les mettra en contact avec la réalité vivante.

1348. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Édouard Rod »

Le « sens de la vie », il le cherche de la meilleure manière qui soit : en vivant.

1349. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIX. Progression croissante d’enthousiasme et d’exaltation. »

C’est par là, qu’il a été, comme le stoïcisme, mais avec infiniment plus d’ampleur, un argument vivant des forces divines qui sont en l’homme, un monument élevé à la puissance de la volonté.

1350. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre II. Mme Le Normand »

Mais le livre de Mme de Staël et de la Princesse Louise nous apprend aujourd’hui, comme les Souvenirs de Mme Récamier nous l’avaient déjà appris, que ce n’est pas uniquement avec cela qu’on fait des portraits ressemblants et vivants et placés dans des jours nouveaux, qu’on annonce, — dans la perspective, définitive et suprême, où jusqu’ici on ne les avait jamais vus !

1351. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VIII. Mme Edgar Quinet »

Or, si la justesse du mépris de Tacite, après dix-huit cents ans, a été suspectée, que serait-ce donc s’il s’agissait d’un mépris, supérieur au sien peut-être, pour des hommes vivants qui n’ont donné leur démission de rien, et dont nous coudoyons les fautes et les crimes, les lâchetés et les trahisons ?

1352. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIII. Mme Swetchine »

L’expression, qu’elle a parfois très belle, et qu’elle ajoute au piquant ou à la force de l’observation quand l’observation la darde ou la secoue, suffit-elle pour faire croire à un talent littéraire, n’existant plus par petites places, mais organisé, articulé, vivant ?

1353. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Prévost-Paradol » pp. 155-167

» Prévost-Paradol fit l’effet d’un être vivant dans le journal des gnomes et des fantômes, et on y salua son apparition comme celle de la vie.

1354. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La révocation de l’Édit de Nantes »

Tous, au contraire, en supputant sur leurs dix doigts les dommages faits à la France de l’industrie par la politique de Louis XIV, trouveront sérieusement moins grand ce grand homme à la lueur tremblotante de leurs chiffres… Et quoique Weiss n’ait pas dans l’âme cette profondeur de rancune qui attend le moment pour frapper et fait jeter un livre à la foule, comme Ravenswood, dans Walter Scott, jette sur la table la tête coupée de son taureau, l’auteur de l’Histoire des réfugiés aura peut-être, en fin de compte, le mieux vengé le protestantisme en démontrant placidement, et d’un ton très doux, à une société qui ne croit plus guères qu’à des chiffres, qu’économiquement la révocation de l’Édit de Nantes fut une grande faute, — car, en faisant cela, il aura insurgé contre Louis XIV la seule chose qui soit vivante et qui ressemble à une passion dans notre temps !

1355. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Gustave III »

IV Tel fut le Gustave III que j’aurais aimé à revoir vivant, et qui n’est que le fantôme de ce qu’il fut dans l’histoire de Léouzon-Leduc.

1356. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Henri de L’Épinois » pp. 83-97

Si aujourd’hui, par impossible, les atroces Tartuffes qui veulent la mort du Christianisme par l’appauvrissement de la Papauté, et les imbéciles, plus nombreux encore, qui croient que pour la gloire et le renouvellement de la Papauté, avilie, selon eux, dans le pouvoir et les richesses, il faudrait la jeter vivante à la voirie des grands chemins et qu’elle allât tendre sa tiare à l’aumône comme Bélisaire y tendait son casque, avaient une vue juste de la réalité, le sou que la Chrétienté y ferait pleuvoir de toutes parts serait l’atome constitutif d’un pouvoir temporel nouveau, qui — le monde étant différent de ce qu’il était il y a dix-huit siècles — ne se développerait pas comme la première fois, mais trouverait une autre forme de développement.

1357. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « A. Grenier » pp. 263-276

II Il a du talent, et du talent vivant.

1358. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Mademoiselle de Condé »

En fait de productions littéraires, nous n’en sommes ni aux « irrémédiables douleurs, ni aux désolantes préoccupations, ni au funeste délire… », car tout cela avait sa vie et sa poésie encore, et nous ne sommes plus, nous, ni poétiques, ni même vivants !

1359. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Valmiki »

Il faudrait s’indianiser par l’étude, perdre de la netteté de sa pensée, s’émousser et s’abaisser au niveau de l’engourdissement d’un peuple qui s’est peint tout entier dans le cadre de cet axiome : « Il vaut mieux être assis que debout, couché qu’assis, mort que vivant ! 

1360. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Caro. Le Pessimisme au XIXe siècle » pp. 297-311

Caro, l’auteur de l’Idée de Dieu, aurait dû comprendre, si, en vivant avec les philosophes, son spiritualisme ne s’était pas essuyé des dernières lueurs du Christianisme qui l’éclairait encore… Or, entre tous, il a choisi, parmi ceux qui concentrent et qui résument la haine et le mépris d’une vie réputée inexplicablement douloureuse, le poète Leopardi, auquel il donne l’importance exagérée d’un talent qu’il n’eut jamais, et il le dresse à côté de Schopenhauer et de Hartmann comme étant le poète de l’idée dont ils sont les métaphysiciens.

1361. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Henri Cantel »

Pour notre compte, c’est ce que nous avons tenté de faire ici sur les poésies de Cantel, ce jeune arbre qui laisse tomber tant de feuilles mortes sur ses racines qui sont vivantes.

1362. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. J. Autran. Laboureurs et Soldats, — Milianah. »

Joseph Autran est la meilleure réponse vivante à la théorie dont M. 

1363. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Charles Baudelaire. Les Fleurs du mal. »

C’est là en effet l’avancement d’hoirie infernale que tout coupable a de son vivant dans la poitrine.

1364. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Mm. Jules et Edmond de Goncourt. » pp. 189-201

Mais nous avons appris tout à coup que MM. de Goncourt devenaient romanciers, et romanciers contemporains, romanciers du dix-neuvième siècle, et qu’ils quittaient leur vieux vestiaire du dix-huitième siècle pour l’observation présente, la vie vivante, la réalité !

1365. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVII. Des panégyriques ou éloges adressés à Louis XIII, au cardinal de Richelieu, et au cardinal Mazarin. »

C’est un des hommes qui a été le plus loué, et de son vivant et après sa mort.

1366. (1773) Essai sur les éloges « Morceaux retranchés à la censure dans l’Essai sur les éloges. »

Qu’on les adore de leur vivant, cela est juste ; c’est le contrat éternel du faible avec le puissant ; mais la postérité, sans intérêt, doit être sans espérance comme sans crainte.

1367. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XII. »

Sous tes mains invincibles, tu tiens asservi le tonnerre à deux tranchants, tout de feu, toujours vivant.

1368. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

Quand vous dites : le siècle de Louis XIV, vous dites autant de poètes dévoués à Sa Majesté, vivant de sa vie, amoureux de sa gloire, et participant même à ses amours ; quand vous dites : un écrivain de la Restauration, prenez garde, vous avez dix chances contre une de proclamer un ennemi. […] Quelle tâche de rechercher (eux vivant) le vrai mérite et la juste valeur de tous les hommes qui ont encore aujourd’hui l’énergie et le talent de l’écrivain ! […] Ainsi donc, et de gaieté de cœur, tu viens de te séparer d’un seul coup de la littérature facile, c’est-à-dire de la littérature vivante ; ainsi tu viens de dire étourdiment adieu au petit nombre d’intelligences actives qui soient encore en travail ! […] Saint-Marc Girardin expliquera à ces jeunes gens comment l’homme ne s’intéresse qu’à l’homme, comment la mer, toute vivante que Dieu l’a faite, a besoin de la présence de l’homme ; l’agitation de l’Océan nous laisse froids, si nous ne découvrons pas tout au moins une barque de pêcheur dans le lointain. […] Caveyrac était ce qu’on appelle un bon vivant, un plaisant.

1369. (1925) Dissociations

Une femme nue ne danse plus seulement avec ses gestes, mais avec ses muscles, les frissons de son épiderme qui font d’elle comme un vivant miroir de toutes les émotions qui traversent son organisme et viennent aboutir là. […] Un physiologiste, un homme qui sait ce que c’est qu’un tissu vivant, croire qu’une jonglerie peut faire naître des corps organisés, des corps qui respirent ! […] Puisqu’on parle de réformes municipales, je mettrai en avant celle qui m’agréerait : donner au quartier une existence propre, quoique limitée strictement à ses seuls intérêts, et faire en sorte que ses habitants le conçoivent réellement comme une entité vivante. […] Plus loin, ce sont des tableaux vivants d’une nouveauté aussi piquante que leurs titres : le Crépuscule, la Nuit, le Sommeil de Vénus ! […] Mais la psychologie d’une ville est bien plus malaisée encore à établir dans sa continuité vivante, surtout quand il s’agit d’une cité qui a réussi, comme Rouen, à loger la civilisation la plus neuve et la plus active dans le cadre le plus ancien et, en apparence, le moins fait pour la vie d’aujourd’hui.

1370. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Depuis combien de temps, en ce cas, faut-il supposer que le vivant est devenu cadavre ? […] Dans ses ouvrages on devine les bonnes et amoureuses études italiennes, et cette figure de petite fille, qui s’appelle, je crois, Guillemette, a eu l’honneur de faire penser plus d’un critique aux spirituels et vivants portraits de Velasquez. […] Plus d’une fois, en considérant les portraits vivants et lumineux de M.  […] Tous les trois, avec des facultés plus ou moins tendues, ont une visible sympathie pour la sculpture vivante du dix-huitième et du dix-septième siècle. […] Qu’il me soit permis, pour abréger, de citer un lambeau rimé dans lequel j’ai essayé non pas d’illustrer , mais d’expliquer le plaisir subtil contenu dans cette figurine, à peu près comme un lecteur soigneux barbouille de crayon les marges de son livre : Fière, autant qu’un vivant, de sa noble stature, Avec son gros bouquet, son mouchoir et ses gants Elle a la nonchalance et la désinvolture D’une coquette maigre aux airs Vit-on jamais au bal une taille plus mince ?

1371. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Il y a, comme vous savez, « un style de théâtre » ; ces gens-là paraissent l’ignorer profondément, et, chose étrange, ils n’en sont que plus vivants. […] Roussakof, le riche marchand, père d’Avdotia, est un type singulièrement vivant. […] Et l’empereur songe… Au-dessus de rassemblée des chrétiens vivants, il y a l’assemblée de toutes les âmes chrétiennes, dans le paradis. […] Très vivant, ce premier acte, très prenant, et par des moyens d’une simplicité originale. […] pourvu qu’il fût vivant ! 

1372. (1903) Propos de théâtre. Première série

J’ai compris sur la vie plus de secrets que ne m’en avaient révélé tous mes maîtres… Bientôt vivant toujours, je serai tout abstrait [souvenir du Marc-Aurèle de Renan]. […] Pendant ces premiers jours de la lune de miel, Sévère, cru mort, du reste, est bien loin ; et, même s’il était cru vivant, il serait assez loin encore. […] Elle dit à Sévère que quand même il eût été vivant, quand même elle l’aurait vu, quand même elle eût haï Polyeucte, cependant elle eût encore obéi à son père. […] C’est une des plus belles « statues vivantes de la pudeur », pour parler comme Aristophane, que le théâtre ait présentées à nos yeux. […] Soldats du Dieu vivant, défendez votre roi !

/ 2192