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545. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre V. Swift. » pp. 2-82

» — « C’est pourquoi, quand vous trouvez que les années viennent sans espérance d’une place, je vous conseille d’aller sur la grande route, seul poste d’honneur qui vous soit laissé ; vous y rencontrerez beaucoup de vos vieux camarades, et vous y ferez une vie courte et bonne. » Suivent des avis sur la conduite qu’ils devront tenir lorsqu’on les mènera à la potence. […] Il ne peut rencontrer ni le sublime ni l’agréable ; il n’a ni les entraînements de l’artiste, ni les divertissements de l’homme du monde. […] Cependant le frère aux distinctions, maintenant qu’il avait mis la main à l’ouvrage, prouva par un très-bon argument que K était une lettre moderne, illégitime, inconnue aux âges savants, et qu’on ne rencontrait dans aucun ancien manuscrit. […] S’ils rencontrent une vache morte, quoiqu’ils ne soient que cinq, et qu’il y en ait pour cinquante, ils s’étranglent ou s’ensanglantent ; voilà l’image de notre avidité et de nos guerres. […] Je vais donc humblement proposer mon idée, qui, je l’espère, ne saurait rencontrer la moindre objection1019.

546. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLe entretien. L’homme de lettres »

Un Genevois, nommé Duval, joaillier de la couronne, qu’il avait eu occasion de rencontrer plusieurs fois chez son hôtesse, n’avait pu voir son malheur sans en être ému, ni son courage sans l’admirer. […] Lorsque je vous menais à l’école, vous n’étiez encore qu’en jaquette, si nous rencontrions un malheureux, vous me disiez: Marie, donne-lui mon déjeuner ; et quand je ne le voulais pas, vous vous fâchiez contre moi. […] Le même isolement devait les rapprocher ; ils se rencontrèrent et se lièrent, s’aimèrent et se brouillèrent fréquemment. […] Elle fut charmée de rencontrer une femme dans une position qu’elle jugea semblable à la sienne. […] Quand on en rencontrait un quelque part, on était sûr que l’autre n’était pas loin.

547. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

Mais où le rencontrer ? […] Mais rencontrait-il l’occasion de rappeler un passage d’un de ses auteurs préférés, sa voix se faisait presque chantante. […] Il suppose des âmes violentes, et ces âmes ne se rencontrent guère dans le petit monde bourgeois. […] Ses voyages autour du grand lac intérieur lui ont appris que la France a, tout au long de son histoire, rencontré cette obligation de la lutte armée contre les possesseurs de tous ces rivages. […] Toutes les chances d’une parfaite union se rencontraient dans ce choix, depuis la plus délicate et la plus passionnée tendresse jusqu’à la conformité la plus entière de pensée.

548. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

J’ai peu de temps pour courir les ateliers, mais j’ai rencontré des toiles refusées qui, en d’autres temps, auraient obtenu certainement de légitimes succès. […] Le nom me fait horreur par sa terminaison pédantesque ; je crains les écoles comme le choléra, et ma plus grande joie est de rencontrer des individualités nettement tranchées. […] Je ne sais s’il existe des nymphes, je n’en ai jamais rencontré pour ma part, et c’est ce dont je me plains tous les jours. Mais, si j’en devais rencontrer de semblables, je me voilerais la face, je vous jure. […] Une sorte d’humour à la Charles Dickens et un sentiment du comique ou plutôt d’un certain comique que vous ne sauriez rencontrer autre part, ajoute un entrain particulier à ces peintures d’un ton cru, qui, loin de craindre la pleine lumière, la recherchent.

549. (1922) Le stupide XIXe siècle, exposé des insanités meurtrières qui se sont abattues sur la France depuis 130 ans, 1789-1919

L’aristocratie vraie et la paysannerie ignorent le snobisme ou, quand elles le rencontrent, s’amusent royalement de lui. […] Je n’aurais jamais pu me résoudre à rencontrer, même une seule fois par mois, un vieux raseur carabiné comme F. […] Je ne l’ai guère rencontré, pour ma part, que chez le professeur Potain, qui souriait doucement du progrès indéfini. […] Ça y était : le scalpel avait rencontré l’âme. […] Le pastorianisme a rencontré moins d’obstacles encore que le darwinisme.

550. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Je voulais seulement indiquer un des appoints les plus inattendus que la légende de la Révolution ait rencontré. […] Pour la première fois nous rencontrons un vrai roman, au sens où nous prenons aujourd’hui ce mot. […] Dans les deux premiers tiers du dix-neuvième siècle, une famille extraordinaire s’est rencontrée en Lorraine, celle des Baillard. […] J’ignore si vous vous êtes jamais rencontré avec lui. […] C’est un petit village à cinq kilomètres de Sedan, où Napoléon III et M. de Bismarck se rencontrèrent après la bataille.

551. (1887) George Sand

C’est dans la famille Duplessis qu’elle rencontra le fils naturel d’un colonel en retraite, M.  […] Nous ne la suivrons pas longuement dans cette voie nouvelle, dans laquelle l’auteur ne rencontrera jamais un succès égal à son mérite, à son effort, à son visible désir de bien faire. […] Ni l’esprit dramatique ni la vis comica ne se rencontrent chez elle. […] Du jour où il a rencontré Valentine, sa vie extérieure s’arrête. […] Il n’y avait pas eu, à l’origine, de dissentiment absolu entre Mme Sand et Balzac, qu’elle rencontra plusieurs fois dans les années de son noviciat littéraire à Paris.

552. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. de Falloux » pp. 311-316

Je me rappelle avoir eu l’occasion de rencontrer alors, et dans la première semaine qui suivit, deux hommes d’État, très inégaux par l’âge, mais qui avaient pris grande part l’un et l’autre à ce qui n’était plus, et jetés tous deux de côté par la tempête ; je fus frappé de voir que si l’un, le plus jeune, était sombre, estimant tout perdu, la société s’écroulant dans l’anarchie et le monde penchant à sa ruine, l’autre (c’était M. 

553. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXVII » pp. 306-312

Thiers oublie trop qu’il a pu y avoir de ces âmes et qu’il s’en est rencontré en effet dans l’opposition d’alors.

554. (1875) Premiers lundis. Tome III «  Chateaubriand »

Toutes les contradictions qui se rencontrent dans le caractère de René se retrouvaient également, à quelques variantes près, dans celui de bien des jeunes gens d’alors, surtout quand la lecture de René les en eut avertis.

555. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre I »

Mais cette école présente ceci de particulier que, si elle existe, je n’ai jamais rencontré de maîtres ou d’élèves qui aient vraiment mérité de lui appartenir !

556. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre VII. De la propriété des termes. — Répétition des mots. — Synonymes. — Du langage noble »

Ceux de ces mots qui ont survécu n’ont pas été gardés comme nobles, mais comme propres à certains objets : on parle de guerriers germains ou de guerriers indiens, faute d’autre terme et parce que le nom de soldat implique une organisation et une hiérarchie militaires qui ne se rencontrent pas chez les tribus barbares ou sauvages.

557. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « La Solidarité »

Vous réfléchirez que pousser les malheureux à une révolte d’où ne peut sortir pour eux qu’une aggravation de souffrance  et cela, pour arriver, vous, à la notoriété ou au pouvoir et, finalement, pour « jouir »  c’est vivre de leur substance, c’est s’engraisser de leur misère, sans rien risquer et en feignant de les servir, et qu’ainsi les exploiteurs peuvent se rencontrer ailleurs que dans les rangs des capitalistes.

558. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Delavigne, Casimir (1793-1843) »

Il est impossible de rencontrer deux natures plus semblables ; chez tous deux, le satin, la paille, la hache seront toujours rendus scrupuleusement avec une minutie hollandaise ; il ne manquera à l’œuvre, pour être parfaite, que des éclairs dans les yeux et du souffle dans les bouches.

559. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Desbordes-Valmore, Marceline (1786-1859) »

Alexandre Vinet Dans aucun recueil de vers modernes, nous n’avons si souvent rencontré des mots sacrés ; mais jamais aussi nous ne les avons vus profaner d’une manière aussi affligeante.

560. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VII. Le théâtre français contemporain des Gelosi » pp. 119-127

Ces deux arts, qui se rencontraient dans une période si opposée de leur existence, n’exercèrent pas l’un sur l’autre une influence aussi soudaine qu’on le pourrait croire.

561. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre V. Harmonies de la religion chrétienne avec les scènes de la nature et les passions du cœur humain. — Chapitre VI. Harmonies morales. — Dévotions populaires. »

Si l’on rencontrait au coin d’une forêt le corps d’un homme assassiné, on plantait une croix dans ce lieu, en signe de miséricorde.

562. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Elle est la première femme élégante et belle, et riche (à ses yeux) qu’il ait rencontrée. […] Que cherchait Rousseau quand il la rencontra ? […] Ils s’étaient ensuite rencontrés dans quelques salons de Paris ; et il est bien clair qu’ils n’avaient pas dû « s’accrocher ». […] Et Rousseau se rencontre ici avec Bossuet, comme il s’était rencontré avec Pascal à propos des effets de la représentation dramatique des « passions de l’amour ». […] Au reste Jean-Jacques, de son propre aveu, n’en a guère rencontré que de tels.

563. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Chez nous, depuis des milliers d’années le flot des envahisseurs d’outre-Rhin n’a cessé de se rencontrer avec le flot d’émigrants d’outre-montagnes. […] Si haut que nous remontions dans l’histoire des peuples, nous ne rencontrons point de littérature féconde, indépendante d’une prospérité matérielle parfaite, d’une autonomie politique absolue. […] Il avait eu soin d’écarter les vêtements du malheureux au-dessus de la ceinture pour que la lame ne rencontrât pas de résistance. […] * * * Edmond Picard (nous le rencontrons pour la première fois, mais le retrouverons bientôt), examine dans son théâtre d’idée quelques-uns des secrets les plus troublants de la vie et de la mort. […] J’ignore si les bonnes œuvres font les bons critiques… Toujours est-il qu’avant 1880, on ne rencontrait en Belgique que des journalistes fades et de courte vue.

564. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre III. La Révolution. »

D’instinct et sans effort, ils ont rencontré le geste aisé, la parole facile, l’élégance soutenue, le trait piquant, la clarté parfaite. […] L’esprit puritain attiédi couve encore sous terre et se jette du seul côté où se rencontrent l’aliment, l’air, la flamme et l’action. […] Les professeurs d’irréligion, Toland, Tindal, Mandeville, Bolingbroke, rencontrent des adversaires plus forts qu’eux. […] Cherchons des génies moins âpres, et tâchons de rencontrer un accent plus doux. […] Les deux énormes machines, lancées de tout leur poids et de toute leur vitesse, s’étaient rencontrées face à face, non par hasard, mais par fatalité.

565. (1896) Psychologie de l’attention (3e éd.)

Nous avons à déterminer les éléments moteurs qui se rencontrent dans ces trois cas. […] a) La première catégorie comprend les idées générales de l’espèce la plus grossière, celles qui se rencontrent chez les animaux supérieurs, les enfants et les sourds-muets avant l’emploi du lan- gage analytique. […] Tous les degrés de cette marche ascendante se rencontrent dans l’histoire de l’humanité : les Fuégiens n’ont aucun terme abstrait. […] Il est agréable de manger de la terre, de la paille, du tabac, de la suie  Les mêmes tendances se rencontrent chez certains sujets, hystériques, chlorotiques, névropathes  Le commencement de la folie est quelquefois marqué par un régime alimentaire excentrique et désordonné. […] Starr, sur 23 cas de lésion des lobes frontaux, a rencontré chez la moitié des malades le trouble mental suivant : perte de la faculté de contrôle, changement de caractère, impossibilité de fixer l’attention.

566. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vernet » pp. 130-167

Mes regards rasant la crête de cette langue de rocaille, rencontraient le sommet des maisons du village, et allaient s’enfoncer et se perdre dans une campagne qui confinait avec le ciel. […] — Oui. — Avez-vous jamais rencontré dans la nature des figures aussi belles, aussi parfaites que celles-là ? […] Mon imagination échauffée place à l’entrée de cette caverne une jeune fille qui en sort avec un jeune homme ; elle a couvert ses yeux de sa main libre, comme si elle craignait de revoir la lumière, et de rencontrer les regards du jeune homme. […] C’est pour moi et mes amis que je lis, que je réfléchis, que j’écris, que je médite, que j’entends, que je regarde, que je sens ; dans leur absence, ma dévotion rapporte tout à eux, je songe sans cesse à leur bonheur ; une belle ligne me frappe-t-elle, ils la sauront ; ai-je rencontré un beau trait, je me promets de leur en faire part ; ai-je sous les yeux quelque spectacle enchanteur, sans m’en appercevoir j’en médite le récit pour eux. […] Ce sont ces idées accessoires nécessairement liées à la nuit et aux ténèbres qui empêchent de porter la terreur dans le cœur d’une jeune fille qui s’achemine vers le bosquet obscur où elle est attendue ; son cœur palpite, elle s’arrête, la frayeur se joint au trouble de sa passion, elle succombe, ses genoux se dérobent sous elle ; elle est trop heureuse de rencontrer les bras de son amant, pour la recevoir et la soutenir, et ses premiers mots sont : est-ce vous ?

567. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

Pour moi, sans généraliser autant que M. de Vigny mes espérances, je me contente de dire : Jamais une société ne sera si désespérée pour la morale, si ingrate pour l’art, que cela ne vaille encore la peine d’y vivre, d’y souffrir, d’y tenter ou d’y mépriser la gloire, quand on peut rencontrer en dédommagement sur sa route des hommes d’exception comme le capitaine Renaud, des poëtes d’élite comme celui qui nous l’a retracé. […]  — On peut dire encore de la manière et du ton du poëte ce que Reynolds a écrit de certains peintres : « J’ai rencontré une fois N… depuis votre départ ; j’ai bien reconnu cette conversation que vous m’indiquiez, toute fine et pointillée ; tout parle en lui quand il vous décrit quelque objet : son geste, son ongle élégant, sa paupière soyeuse qui se plisse, sa lèvre discrète qui sourit en s’amincissant. […] Quel autre plaisir que de se rencontrer ainsi, jetant en même temps la même exclamation prononcée à la fois avec l’ensemble des sorcières de Macbeth !

568. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

On ne rencontrait dans les rues que des soldats français du général Miollis, gouverneur de Rome, et des bandes de pauvres moines affamés portant la pioche ou roulant la brouette pour gagner quelques baïoques (monnaie romaine) en déblayant les monuments de l’antiquité de leur propre ville, à la solde des barbares étrangers. […] Je restai si longtemps agenouillé sur cette pierre et absorbé dans mon culte de jeune homme, pour le chantre de l’ingrate Léonora, que le frère fut contraint à me rappeler l’heure, et qu’au moment où je sortis de l’église pour cueillir une feuille de l’oranger de Saint-Onufrio, la dernière lueur du soleil s’était éteinte sur les cimes les plus élevées des monts de la Sabine ; en rentrant lentement à mon logement par les rues ténébreuses de Rome, je songeai que le plus touchant poème du Tasse serait le poème de sa propre vie, s’il se rencontrait un poète égal à lui pour l’écrire. […] Nous sommes heureux de rencontrer dans l’esprit si juste et si infaillible de Voltaire notre propre opinion de l’immense supériorité de l’Arioste sur son copiste naïf mais négligé, la Fontaine.

569. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXIXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 129-192

Je lui ai raconté alors le hasard qui fit rencontrer la belle Fior d’Aliza par le sbire en société de son ami Nicolas del Calamayo : la demande, le refus, l’entêtement du sbire, l’obstination de la jeune fille, puis la dépossession, pièce à pièce, par les soins du procureur Nicolas del Calamayo, au moyen d’actes présentés par lui à la justice, actes revendiquant pour des parents, au nom d’anciens parents inconnus dont le sbire avait acheté les titres, tout le petit héritage de vos pères et de vos enfants. […] Le père Hilario les avait conduits tous les deux, comme des mendiants sans asile qu’il avait rencontrés sur les chemins ; il avait obtenu pour eux un coin obscur sous le porche du couvent de Lucques qu’il habitait lui-même ; ils y recevaient la soupe qu’on distribuait deux fois par jour aux habitués de la communauté ; sur leurs deux parts, ils en avaient prélevé une pour le petit chien à trois pattes de l’aveugle, le pauvre Zampogna. […] Ici la voix s’interrompit longtemps comme quelqu’un qui cherche ; puis elle reprit : — Oui, une fois que vous serez mariés, il faut le tromper lui-même et lui faire croire qu’il doit partir le premier, t’attendre ensuite au rendez-vous sous l’arche du pont, au pied de la montagne où tu as rencontré la noce de la fille du bargello, jusqu’à ce que tu viennes le rejoindre par un autre chemin un peu avant la nuit, et que vous partiez ensemble par des chemins détournés au bas de la montagne pour sortir des États de Lucques et pour atteindre avant le jour les frontières des États de Toscane, dans les Maremmes de Pise.

570. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Paul Verlaine et les poètes « symbolistes » & « décadents ». »

Ces bigarrures fâcheuses, ces dissonances baroques, vous les rencontrez à chaque instant chez M.  […] Mais déjà dans les Poèmes saturniens se rencontrent des poésies d’une bizarrerie malaisée à définir, qui sont d’un poète un peu fou ou qui peut-être sont d’un poète mal réveillé, le cerveau troublé par la fumée des rêves ou par celle des boissons, en sorte que les objets extérieurs ne lui arrivent qu’à travers un voile et que les mois ne lui viennent qu’à travers des paresses de mémoire. […] Avez-vous rencontré, fût-ce chez sainte Catherine de Sienne ou chez sainte Thérèse, plus belle effusion mystique ?

571. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

Les plus sérieux se rencontrent ainsi, en quelque façon, avec les plus frivoles, avec les affranchis du chauvinisme du linge ou des bottes, avec ceux qui, suivant une expression désormais symbolique, « se font blanchir à Londres ». […] C’est au bagne, où il était pour un crime de passion, que, forcément seul avec lui-même, il a connu la vérité. « Le secret de la destinée humaine, sans cet enfer, je ne l’aurais jamais goûté… Cette surabondance d’énergie, qui s’allait cramponnant aux dangers et aux fatigues vulgaires de la vie sociale, s’assouvit enfin quand elle fut aux prises avec les angoisses de la vie expiatoire… » Et enfin, la nouvelle religion, le christianisme naturel, celui qu’Ibsen prophétise sans l’expliquer clairement nulle part, ce qu’il appelle le « troisième état humain », qui sera fondé « sur la connaissance et sur la croix » (le second étant fondé seulement sur la croix et le premier seulement sur la connaissance), ai-je besoin de vous avertir que vous en rencontrerez du moins, dans George Sand et ses contemporains, de vastes et vagues esquisses ? […] Et, de rencontrer chez eux des choses qui sont belles exactement de la même manière que les belles choses de chez nous, j’éprouve un plaisir que double la surprise et qu’attendrit la reconnaissance.

572. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Gustave Flaubert »

Ensuite, parce que ce style ne s’applique plus à un sujet comme celui de Madame Bovary, qui, tout odieux qu’il fût, était vrai, brutalement vrai, rencontré dans le plain-pied et les hasards de la vie ; car, s’il ne l’eût pas rencontré, Flaubert n’était pas de force à le trouver par la seule conception de son esprit. […] Dans ce récit, écrasant vraiment de vulgarité et de bassesse, dans cette histoire de deux idiots qui se sont rencontrés un jour sur un banc de promenade et se sont raccrochés par vide de tête, badauderie, flânerie, bavardage et nostalgie d’imbécillité, et dont les deux niaiseries, en se fondant voluptueusement l’une dans l’autre, sont devenues la plus incroyable et la plus infatigable des curiosités, — comme, en grammaire latine, deux négations valent une affirmation, — il n’y a pas un mot, pas un sous-entendu qui puisse faire croire que l’auteur se moque de ces deux benêts qui sont les héros de son livre, et qu’il n’est pas la dupe de ce récit prodigieux de bêtise voulue et réalisée… Et il n’est pas que bête, ce récit, qui est un phénomène de bêtise !

573. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — II. (Fin.) » pp. 322-341

L’auteur ou le traducteur se plaît à trouver dans l’amour d’Hélène pour Jules Branciforte un de ces amours passionnés qui n’existent plus, selon lui, en 1838, et qu’on trouverait fort ridicules si on les rencontrait ; amours « qui se nourrissent de grands sacrifices, ne peuvent subsister qu’environnés de mystère, et se trouvent toujours voisins des plus affreux malheurs ». […] Toutes les fois que j’arrivais à une louange un peu forte, et j’en rencontrais à chaque pas, je voyais la mine que feraient mes amis en le lisant80.

574. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

L’Huillier était un autre lui-même, s’attacha à donner à son fils la meilleure éducation ; Chapelle étudia au collège des jésuites de la rue Saint-Jacques, où il rencontra Bernier et Molière, et il introduisit auprès de Gassendi ces deux condisciples : tous trois profitèrent diversement des leçons particulières du philosophe, mais ils en restèrent marqués. […] Il y rencontra Chaulieu à qui il apprit l’art de faire non difficilement des vers faciles, ainsi que lui-même l’avait appris de Blot et des chansonniers de la Fronde, et comme on l’apprendrait bien tout seul sans tant de mystère.

575. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — III — Toujours Vauvenargues et Mirabeau — De l’ambition. — De la rigidité » pp. 38-55

À l’égard de Paris, vous savez comme je pense ; si je pouvais m’y tenir, je n’aurais point d’autre patrie… Et il expose quelques-uns des motifs et des obstacles trop réels (sans pourtant articuler le principal de ces obstacles) qui l’empêchent de se livrer à ses goûts et d’aller se fixer à Paris pour y étudier, y cultiver les gens de mérite qu’il y rencontrerait, et y devenir lui-même peut-être un écrivain. […] C’est pour n’avoir pas eu présents alors les détails que je donne ici, que je me suis demandé si ce nom de Mirabeau que je rencontrais était bien exact.

576. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Quant à l’air, il remerciait Dieu de l’avoir trouvé si doux, car il inclinait plutôt sur trop de chaud que de froid, et en tout ce voyage, jusques lors, n’avions eu que trois jours de froid et de pluie environ une heure ; mais que du demeurant, s’il avait à promener sa fille, qui n’a que huit ans, il l’aimerait autant en ce chemin qu’en une allée de son jardin ; et quant aux logis, il ne vit jamais contrée où ils fussent si dru semés et si beaux, ayant toujours logé dans belles villes bien fournies de vivres, devin, et à meilleure raison qu’ailleurs. » Montaigne, à la veille de quitter l’Allemagne et le Tyrol autrichien, écrit une lettre à François Hotman, ce célèbre jurisconsulte qu’il avait rencontré à Bâle, pour lui exprimer sa satisfaction de tout ce qu’il a vu dans le pays et le regret qu’il avait d’en partir si tôt, quoique ce fût en Italie qu’il allât ; ajoutant qu’excepté quelques exactions à peu près inévitables des hôteliers guides et truchements, « tout le demeurant lui semblait plein de commodité et de courtoisie, et surtout de justice et de sûreté. » Cette première partie de son voyage, dont il se montrait si enchanté, n’avait fait que le mettre en goût et en appétit de découverte. […] Je ne le vis jamais moins las ni moins se plaignant de ses douleurs, ayant l’esprit, et par chemin et en logis, si tendu à ce qu’il rencontrait, et recherchant toutes occasions d’entretenir les étrangers, que je crois que cela amusait son mal.

577. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Étienne-Jean Delécluze, (suite et fin) »

Puisque j’ai rencontré le souvenir d’un aimable érudit, il est impossible de ne pas remarquer, à l’honneur de M.  […] Ce souvenir d’Étienne remonte à un voyage d’Italie qu’il fit en 1824, et pendant lequel il rencontra à Rome Mme Récamier entourée de ses amis, parmi lesquels, dit-il, le bon et aimable Ballanche.

578. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

A la manière dont il en parle d’abord et dont il les envisage, il est évident qu’il a vu en eux, qu’il a rencontré ou transporté en leur image et sous leurs traits comme un idéal de ses qualités et de ses défauts : tant il est vrai que l’idéal est aussi un produit de nature, et que ceux même qui s’en passent le mieux dans la pratique journalière le mettent quelque part en dehors et au-dessus d’eux ! […] C’est bien assez de te rencontrer à chaque pas dans la vie ; on veut du moins dans l’Art, en te retrouvant et en te sentant présente ou voisine toujours, avoir affaire encore à autre chose que toi.

579. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

Je ne demande que la faveur de lui parler un instant ; pour l’obtenir, je m’adresserais à sa femme elle-même. » Noirmont n’insiste plus : il comprend qu’il vaut mieux pour Herman, puisqu’il faut tôt ou tard la rencontrer, revoir cette fois Pompéa, et à l’instant même, et livrer résolument le grand combat ; car c’est bien de ce côté que se présente la bataille rangée et que va être le fort du péril ; le reste n’est rien ou servira plutôt de diversion et de secours ; la coquetterie avec la future belle-sœur n’est qu’une escarmouche plus vive qu’effrayante, entamée à peine ; mais revoir Pompéa belle, jeune, ayant les droits du passé, dans la plénitude de la vie, à l’âge de vingt-six ans, avec ce je ne sais quoi d’impérieux et de puissant qu’une première douleur ajoute à la passion et à la beauté… le danger est là, danger d’une reprise fatale ; et, en pareil cas, mieux vaut affronter une bonne fois, qu’éluder. […] Depuis que je t’ai rencontré dans le parc, cette contrainte me pesait comme un manteau de plomb !

580. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

Il a cependant parlé de la poésie en toute occasion avec bien du charme, mais nulle part avec plus de délicatesse que par la bouche de Don Quichotte, lorsque celui-ci, dans sa dernière sortie, vient à rencontrer l’homme au gaban vert, le vertueux hidalgo, qui se plaint à lui de son fils unique, trop adonné à la poésie. […] Or, c’est un peu ce que prétendait faire Cervantes dans le genre du roman, tant il y avait de hasard et de bien trouvé dans son génie, lors même qu’il rencontrait le mieux !

581. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite) »

Chateaubriand a dit de lui « qu’il avait du prêtre, du tyran, du grand homme » : il ajoute « qu’il ruina les institutions qu’il rencontra ou qu’il voulut donner, comme Michel-Ange brisait le marbre sous son ciseau ». […] Il persista et il vint à bout de son projet ; il apprit presque tout ainsi de lui-même, allant à son gré à travers les auteurs, se faisant tout seul sa grammaire, et son plaisir était de traduire en vers les plus beaux passages qu’il rencontrait chez les poètes grecs ou latins.

582. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Pour me confirmer dans cette idée et dans cette bonne opinion, j’ai consulté dès longtemps et j’invoquerai le témoignage de tous ceux qui l’ont connue ou rencontrée. […] Les conditions qu’elle eût désiré trouver associées et réunies, elle ne les rencontrait que séparées.

583. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

J’avais cherché un moyen qui m’a longtemps échappé ; il me fallait une personne sûre et bien posée68, qu’il ne pût pas déjouer… Enfin, la personne la plus propre à une pareille négociation, le comte de La Marck, s’est rencontré sous ma main et je l’ai employé sur-le-champ. […] Je suis aussi un peu étonné de rencontrer sous cette plume de reine le mot annihiler (citation précédente), un mot qui est difficile à prononcer et à écrire. — (On voit que, sans soupçonner encore précisément l’authenticité de certaines lettres, je n’étais pas sans quelque vague inquiétude : malgré ma bonne volonté à croire à tout ce qui nous était donné, il y avait un instinct qui ne me faisait pas complètement défaut ; j’avais comme une démangeaison de doute.)

584. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Exploration du Sahara. Les Touareg du Nord, par M. Henri Duveyrier. »

Ce fut à Rhât, l’ancienne Rapsa, un centre plus avancé, une autre ville berbère, indépendante encore des Touâreg, quoique sise au milieu de leurs campements et relevant de leur protectorat amical, ce fut là que le voyageur rencontra des difficultés presque menaçantes ; il ne put y pénétrer. […] Ces membres de la confrérie des Senoûsi, ces janissaires de l’Islamisme, se dessinent nettement à nos yeux sous la plume du jeune voyageur qui les a rencontrés partout sur son chemin comme ennemis.

585. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. »

Ayant rencontré, dit-il, dans les hasards de ses recherches, des lettres inédites, les plus intimes, les plus familières, qui trahissaient les mœurs et les habitudes du prince, il les a données, et il y a joint tout ce qu’il a pu recueillir d’imprimé ou d’inédit concernant sa personne, sa fortune, ses résidences, ses divertissements, les propos tenus sur son compte, les éloges et les médisances dont il a été l’objet : tout s’y trouve ; les photogravures, comme on les aime aujourd’hui, n’y manquent pas. […] Il tomba tout d’abord assez mal et ne rencontra jamais d’honorables ni de délicates liaisons : il ne parut pas les chercher.

586. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DISCOURS DE RÉCEPTION A L’ACADÉMIE FRANÇAISE, Prononcé le 27 février 1845, en venant prendre séance à la place de M. Casimir Delavigne. » pp. 169-192

L’opinion de quelques bons juges est que nulle part peut-être Casimir Delavigne n’a si bien rencontré pour l’entrain natif de son talent et pour le courant direct de sa veine. […] Nous ne craignons pas ici de soulever avec respect un voile pieux qui est désormais celui du deuil : le voyage d’Italie réalisa tout son rêve, il y vit tout ce qu’il attendait du passé, il trouva plus ; son cœur rencontra celle qui lui était destinée, et son avenir s’enchaîna.

587. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 193-236

Je promenais, du fond de mon capuchon, mes yeux sur cette foule, ne craignant qu’une chose, d’y rencontrer mon père aveugle et ma tante, et de me trahir en tombant d’émotion devant eux, avant d’être arrivée à la place de l’exécution. […] …………………………………………………………………………………………………………… J’aurais voulu assister à cette scène de retour et de l’amour dans cette solitude ; puis, je réfléchis que le bonheur suprême a ses mystères comme les extrêmes douleurs que rien ne doit profaner à de tels moments et à de tels retours que l’œil de Dieu ; que je gênerais involontairement, malgré moi, l’échange de sentiments et de pensées qui allaient précipiter ce beau jeune homme des bras de sa sposa aux bras de son oncle et de sa mère dans des paroles et dans des silences que ma présence intimiderait et qui ne retrouveraient plus jamais l’occasion de se rencontrer dans la vie.

588. (1892) Boileau « Chapitre VI. La critique de Boileau (Fin). La querelle des anciens et des modernes » pp. 156-181

Bertaut, Malherbe, Lingendes et Racan rencontrèrent « dans le genre sérieux le vrai génie de la langue française, qui, bien loin d’être en son point de maturité du temps de Ronsard, n’était même pas sortie de sa première enfance ». […] Ils tirent leur valeur à notre égard des pensées qui nous sont devenues familières, des doctrines où notre siècle a enfermé ses croyances et son génie : tandis que Boileau, en les écrivant, croyait seulement défendre ses chers anciens, et avec eux tout son Art poétique, aussi éloigné de soupçonner qu’il était « évolutionniste » que saint Augustin se doutait peu d’être cartésien le jour où il rencontrait la fameuse formule : Je pense, donc je suis.

589. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Le père Monsabré »

Et s’il s’agit de la révélation considérée comme un fait historique, j’ai rencontré des ecclésiastiques qui reconnaissaient que pour un esprit muni de critique et non prévenu par la grâce, il peut y avoir, à la rigueur, autant de raisons de rejeter ce fait que de l’admettre. […] Mais, dans les deux cas « une nouveauté si oppressive, si humiliante pour l’orgueil humain », aurait rencontré des résistances, et l’on pourrait, par suite, en fixer la date précise.

/ 1957