Mais laisse-moi du moins regarder dans ton âme, Comme un enfant plaintif se penche vers les eaux ; Toi, si plein, front pâli sous des baisers de femme, Moi, si jeune, enviant ta blessure et tes maux.
le Beau, peut même être regardée comme supérieure, à quelques égards, à celle de son Prédécesseur.
CUJAS, [Jacques] Professeur en Droit, né à Toulouse en 1520, mort à Bourges en 1590, peut être regardé comme le Restaurateur de la Jurisprudence parmi nous.
Il y a si long-temps qu’on regarde le naturel & la naïveté comme les attributs essentiels de ce genre, qu’il est étonnant que nos Fabulistes modernes aient pu se flatter de réussir, en cherchant à les remplacer par des qualités qui les excluent.
Saint-Pavin poussa la liberté d'esprit jusque sur les matieres de Religion ; ce qui faisoit regarder à Boileau sa conversion comme impossible.
Ne manquez pas d’y regarder une Piété qui s’attendrit et se console à la vue d’un Christ qu’elle tient entre ses mains.
La mère leur jette de l’argent sans les regarder ; elle tourne la tête vers son mari et cette tête ne dit mot non plus que celle du père ; de plus, ces deux figures muettes sans caractère, sans expression, sont encore lourdes, courtes et grises ; si le balcon était percé en dessous et qu’elles fussent achevées, leurs jambes passeraient de beaucoup à travers.
Quoique la littérature française tienne pour nous, Français, la plus large place dans la littérature de notre temps, et que cet ouvrage soit plus particulièrement consacré à la littérature française, cependant, quand, dans les autres littératures contemporaines, marquera, à tort ou à raison, une œuvre ou un homme, nous les regarderons par-dessus leur frontière… À quoi bon, d’ailleurs, parler de frontière ?
Regardez-vous, mais ne vous touchez pas, surtout avec les lèvres. […] Les Américains ne regardent pas si loin. […] Ils n’ont rien vu, parce qu’ils ne savent pas regarder. Regarder demande un effort et une intelligence qu’ils n’ont pas. […] Ils hantent les passages et les auvents d’où ils regardent pleuvoir.
L’un rêve, l’autre regarde. […] Flaubert ne regarde rien qu’à travers un stéréoscope grossissant. […] Flaubert n’a pas le don, la fée du style français n’a pas regardé son berceau ! […] Regardez-y, mais n’y touchez pas ! […] » Ils ne regardent point au-delà.
Stendhal ne regarde que par les yeux de Fabrice : son Waterloo est fait d’une série d’épisodes animés par les impressions tout individuelles d’un témoin pris dans la foule. […] Peut-être a-t-il manqué à Voltaire, à Molière de savoir parfois regarder les nuages et écouter les oiseaux. […] À les regarder tous du haut du clocher, on n’a plus sous les yeux une scène et des spectateurs, mais un double spectacle. […] Tout son temps peut se consumer rien qu’à regarder la nature immobile, muette, inanimée, « morte » enfin. […] « Ils se regardaient entre eux, regardaient le public et laissaient voir tout simplement sur leur physionomie qu’ils avaient terriblement chaud. » À la sortie, les exclamations se confondent : « Moscou sera notre libérateur !
S’il n’eût fait que des Romans, tels que ceux de Catherine de France, de Germaine de Foix, &c. on pourroit le regarder comme un Ecrivain très-médiocre ; mais il s’est attaché à des Ouvrages plus solides.
Si ce qu’il appelle ses Idylles, renfermoit autant de sentiment qu’on y remarque d’esprit & de délicatesse, on pourroit regarder ces petits Poëmes comme des chef-d’œuvres.
Son Essai sur l’éloquence de la Chaire, malgré quelques idées singulieres que le vrai goût n’adoptera jamais, peut être regardé comme un des morceaux de Littérature les plus instructifs qui aient paru sur cet objet.
Nous ajouterons donc, par un principe d’équité, que ce Prélat doit être regardé, sinon comme un des premiers Ecrivains de l’Eglise, du moins comme un Ministre laborieux, dont les talens sont plus dignes d’éloge que de critique.
Peut-être a-t-il regardé leurs talens comme une insulte faite aux siens : en ce cas, il a eu raison.
On peut donc le regarder comme une espece de prodige.
Ce moqueur, qui nous fait ainsi les honneurs de son père, a dit d’ailleurs, en rendant plus de justice à ses hautes qualités : « Il avait une grande élévation, et était aussi fier en dedans qu’en dehors. » La dernière fois qu’il le vit, après quelques détails d’affaires dont son père, déjà malade, le chargea, en ajoutant : « Au reste, cela vous regarde plus que moi, puisque… » ; ce puisque, confesse-t-il, qui exprimait la certitude d’une fin prochaine, le fit fondre en larmes. […] Je voulais échauffer l’imagination de mes parents et de mes maîtres ; je voulais qu’ils me lâchassent au service : je m’y regardais déjà un peu, puisque de vieux dragons du brave régiment de mon oncle me portaient sur leurs bras et qu’ils me racontaient Clausen, Dettingen et Bonef. […] Je la jurai dans mon cœur aux Français, que l’on me faisait regarder comme nos ennemis nécessaires : j’en suis bien revenu ; et même alors, tant mon goût pour la guerre était violent, je m’étais arrangé avec un capitaine (français) de Royal-Vaisseaux, de garnison à deux lieues de là.
. — La Sœur de charité ; un soldat blessé est reconnu par une sœur de charité jeune ; une plus vieille est au seuil de la maison et regarde. […] Par suite de je ne sais quel préjugé scolastique, nous sommes toujours tentés de faire plus de cas d’un peintre qui, pour peindre, s’enferme, regarde moins la nature, étudie les vieilles toiles et peut-être même les livres, que d’un peintre vif, avisé, extérieur, tourné à l’action, avide de mouvement, doué de toutes les adresses corporelles, excellent tireur, excellent lutteur, parfait cavalier, habile à tous les exercices qui eussent honoré un Grec du temps de Xénophon. […] Horace Vernet, qui garda plus longtemps qu’aucun le sentiment vif et actif de la jeunesse, put n’avoir pas de ces regrets qui supposent un peu de rêverie ; mais comment, nous qui faisions en 1822 le pèlerinage à son atelier de la rue de la Tour-des-Dames, comment, nous dont la vie, en présence de ces batailles de l’Art, s’est passée à regarder, à espérer, à faire des vœux ou à regretter, comment ne dirions-nous pas pour lui et presque en son nom ce que ce retour sur le passé nous inspire ?
« La casquette sur le coin de l’œil, Satan regarda donc les piétons d’une manière attentive. […] que j’aurais aimé à souffler sur ton front, entre deux baisers, cette puissance de tout voir sans éblouissement ; j’aurais voulu te faire regarder tout en face ; j’aurais surtout aimé à te voir sourire dédaigneusement au nez de tous ces valets de l’intelligence qui vont, la livrée au cerveau, servant chacun quelque chose à tout le monde, — Pierre une philosophie, — Paul un scepticisme, — celui-ci une croyance, celui-là un blason ; un autre ne portant rien, ou seulement portant des gants jaunes… Je t’aurais montré : Ceci est un maçon, ceci est un marquis, mais ceci est un homme… * « Nous aurions eu ensemble l’esprit de tout prendre et de laisser tout, même l’esprit, quand il serait devenu de trop entre nous. […] L’amour sans l’estime est un amour qui ne songe pas à vous et qui ne vous regarde pas.
Ces vieux vêtements de l’épouvantail lui paraissent, au prix des siens, toute une garde-robe de prince, et il les regarde, bouche béante, d’un air inexprimable d’envie et de convoitise. […] Mais, dans la première des séries, la manie est vue du côté jeune et sous un jour riant : dans l’autre elle est regardée sinon par un misanthrope, du moins par un observateur indifférent et un peu ironique, qui n’y met rien de flatteur. […] Il observe en rêvant et en ruminant, sans chercher bien loin et sans regarder toujours autour de lui.
Voltaire, au chant VII de la Henriade, introduisant le fantôme divin de saint Louis et lui faisant révéler en songe à Henri IV le cours des choses futures et les destinées de sa race, a dit : Regardez dans Denain l’audacieux Villars, Disputant le tonnerre à l’aigle des Césars. Quand on y regarde de près et en prose, Denain, avec les circonstances qui l’accompagnèrent, nous apparaît dans un éclair moins rapide et sous un jour un peu différent. […] A y regarder de plus près, l’honneur de Montesquiou est, certes, d’avoir eu la visée sur Denain (qu’elle soit venue primitivement de Louis XIV ou de lui), de l’avoir proposée à Villars avec insistance sous la forme d’un plan militaire aussi hardi que praticable, et d’avoir été en première ligne dans l’exécution.
Vivant dans un pays de grande nature, elle a su regarder et elle a osé rendre : elle est paysagiste d’abord, et, selon moi, c’est ce qu’elle est le mieux. […] » Et comme la religieuse nous regarde, un peu surprise : — « Nous croyons en Christ le Sauveur ; nous espérons en lui de toutes nos forces. » La religieuse fait un signe de croix. — « Ah bien ! […] Affre) les a regardées comme nous.
Ces résultats dorénavant sont admis de ceux même qui ne s’en rendent pas bien compte : l’homme du peuple qui regarde une éclipse admet volontiers l’explication que lui donne le demi-savant qui la regarde en même temps que lui, et qui lui-même tient pour démontrée la conclusion du profond et vrai savant. […] Séduit par les illusions des sens et de l’amour-propre, l’homme s’est regardé longtemps comme le centre du mouvement des astres, et son vain orgueil a été puni par les frayeurs qu’ils lui ont inspirées.
Les affaires se tiennent par des liaisons qui les mettent dans une dépendance nécessaire les unes des autres, et ce n’est que par la combinaison de toutes les parties qu’on doit se décider sur ce qu’il est le plus avantageux de faire pour chacune d’elles en particulier. » Le maréchal de Noailles est âgé de soixante-quatre ans à cette date ; il représente une longue expérience acquise, il est un des rares demeurants du dernier règne ; il peut dire au roi avec autorité sur presque chaque sujet : « Le feu roi, votre auguste bisaïeul, pensait… le feu roi, votre auguste bisaïeul, disait… » Il s’offre pour ce genre de conseil avec un dévouement passionné, qui n’est pas sans dignité jusque dans son expansion : « Jusqu’à ce qu’il plaise à Votre Majesté de me faire connaître ses intentions et sa volonté, me bornant uniquement à ce qui regarde la frontière dont elle m’a donné le commandement, je parlerai avec franchise et liberté sur l’objet qui est confié à mes soins, et je me tairai sur tout le reste, toujours prêt, cependant, à vous exposer, Sire, lorsque vous le voudrez, etc., etc. […] On aura remarqué comme il parle de toutes ces intrigues et cabales, moins en roi qu’il est et qui d’un seul mot peut tout réduire à néant, que comme un homme qui se croise les bras et n’est aux premières loges que pour regarder. — La vérité, sur ce point historique, c’est que la pénitence du maréchal de Broglie ne fut que bien peu de chose ; on peut dire qu’elle ne compta pas et ne fut prise au sérieux ni à la Cour ni dans une partie du public : on vient d’entendre Mme de Tencin ; Barbier, dans son Journal, dit positivement : « On croit que la disgrâce n’est qu’une feinte. » De là l’erreur de Frédéric, très excusable. […] Noailles a le mérite de pousser le comte de Saxe contre lequel Louis XV faisait d’abord quelques objections, se méfiant de lui à cause de sa qualité d’étranger : « Les officiers, Sire, qui se portent vers le grand sont aujourd’hui si rares que, dans l’opinion que j’ai du comte de Saxe, je le regarde aujourd’hui comme un homme précieux pour votre État, qui mériterait des distinctions particulières s’il était né votre sujet ; qui, étant étranger, en mérite encore de plus grandes, afin de l’attacher plus étroitement à Votre Majesté.
A la question de l’adresse, elle répondit oui vivement, sans avoir besoin de regarder au bureau, et avant d’y songer ; puis, s’apercevant peut-être de sa promptitude, elle remit les trois lettres en rougissant. […] Hervé passa bientôt sur la chaussée devant elles au petit trot ; il les regarda d’une façon assez marquée ; mais, ne les ayant jamais vues au dehors, ne s’étant jamais demandé apparemment ce que pouvait être Christel avec sa souple et fine taille en plein air, il ne les reconnut pas à temps et ne les salua pas. […] ni muraille, ni cloison, ni grille de fer, mais une simple grille de bois comme ici, et entr’ouverte encore, et on regarde à travers, et on ne devine pas, et on meurt ou on laisse mourir !
Je n’ai qu’à regarder si tout le monde a du plaisir, pour contrôler mon sentiment, et savoir si j’ai bien jugé. […] Mais si l’on songe que jusque-là, dans l’Art poétique et ailleurs, Boileau n’avait jamais regardé les œuvres littéraires que dans leur relation au genre, sorte de type analogue aux idées platoniciennes, seul élément d’estimation, et seul principe de classification, dont chaque ouvrage tirait et sa raison d’être et sa valeur, selon qu’il le réalisait plus ou moins complètement : si l’on songe qu’il n’avait jamais demandé que la connaissance des règles et le génie pour la création des chefs-d’œuvre poétiques, et ne croyait pas avoir besoin d’une autre considération pour expliquer que la Pucelle n’égale pas l’Iliade, on comprendra tout le chemin que Perrault fit faire à Boileau. […] Boileau ne le fit pas, et n’alla point au-delà des idées littéraires proprement dites : il ne regarda point les réalités psychologiques qui se cachent derrière ces abstractions, une langue, un genre : il n’y vit point les expressions de ces consciences collectives qu’on appelle des peuples, et ne se rendit pas compte que chaque nation façonne sa langue à son image, et que l’apparition et la disparition, la perfection et la décadence de ces formes organiques qui sont les genres, représentent la succession des états d’âme, la diversité des aptitudes intellectuelles et des aspirations morales des divers groupes de l’humanité.
On sent que le conteur a longuement regardé les femmes, et de près. […] Mais presque toujours, au moment décisif, au moment où d’autres ne s’appartiennent plus, tout à coup il s’aperçoit qu’il se regarde faire, qu’il est moins acteur que spectateur. […] Cependant regardez comme elle est bonne personne !
Aussi regarde-les, ceux qui ont passé par ses mains, à part quelques révoltés comme Herscher qui, dans sa haine du convenu, tombe à l’excessif et à l’ignoble, comme moi qui dois à cette vieille bête mon goût du contourné, de l’exaspéré, ma sculpture en sacs de noix, comme ils disent… tous les autres, abrutis, rasés, vidés… » Bien candide, ce bon Védrine… J’ai eu l’honneur d’être professeur de rhétorique, ce qui est un métier fort amusant ; et je jure devant Dieu que je n’ai jamais étouffé le génie et que je n’ai jamais vu personne l’étouffer autour de moi… Tous les autres personnages sont, à des degrés divers, vivants et vrais ; mais quelques-uns avec un peu d’inattendu et comme des trous, des solutions de continuité dans leur psychologie, Voici l’historien Astier-Réhu, Oh ! […] Quoiqu’il ne soit qu’un imbécile, il connaît certainement les méthodes de vérification des manuscrits ; il n’est point nécessaire d’être un aigle pour les savoir et les appliquer… L’Académie peut bien faire encadrer l’autographe de Rotrou, parce qu’elle n’y regarde pas de très près, parce qu’elle est un corps et que les corps sont toujours bêtes. […] A côté d’elle, Paul Astier, Monsieur le comte, souriant et froid, toujours joli… On se regarde, personne ne trouve un mot, excepté l’employé, qui, après avoir dévisagé les deux vieilles dames, éprouve le besoin de dire en s’inclinant, la mine gracieuse : — Nous n’attendons plus que la mariée… — Elle est là, la mariée, répond la duchesse s’avançant la tête haute.
Je n’ai regardé jusqu’ici que le Tailhade déjà ancien qui soignait sa tenue. […] Il regarde de haut dans les juges qui le condamnèrent des « bourreaux mal appointés ». […] Te dirai-je ma pensée entière, séducteur que quelques-uns proclament divin parce que tu es féminin, toi dont la langue lumineuse fait rêver de loin aux splendeurs de Platon et qui, regardé de près, n’es plus que madame Renan ?
Les politiques qui avaient le mieux observé le génie du peuple d’Égypte, regardaient la religion comme le principal obstacle à rétablissement de l’autorité française. […] Je ne saurais dire combien me paraît intéressant tout ce chapitre par le jour qu’il jette sur le procédé politique de Napoléon, sur le point fixe de sa croyance supérieure (croyance en Dieu), sur son indifférence profonde pour les articles secondaires et sur l’importance extrême qu’il affectait pourtant d’y attacher, en un mot, sur la règle de conduite qu’il regardait évidemment comme la seule loi des chefs d’empire, puisqu’il nous l’expose en termes si nets et si peu voilés. […] Mahomet ou Cromwell y auraient regardé à deux fois avant de livrer ainsi leurs motifs.
Il faut y regarder à deux fois avant de lui refuser une qualité ; car, avec cette volonté tenace et ardente qui est en lui, il peut bien ne pas tarder à conquérir cette qualité qu’on lui refuse et à dire : La voilà ! […] En un mot, vous croyez que la Providence y regarde à deux fois avant de les faire choir. Pour moi, je crois que, du moment qu’elle y regarde, il lui suffit d’un seul regard et d’une seule mesure pour tous.
Il fallait effort pour cesser de le regarder… Quand on a une fois peint un homme de cette sorte et qu’on l’a montré doué de cette puissance d’attrait, on ne saurait jamais être accusé ensuite de l’avoir calomnié, même lorsqu’on l’aurait méconnu par quelques endroits. […] Ce jeune prince, que Saint-Simon nous montre si hautain, si fougueux, si terriblement passionné à l’origine, si méprisant pour tous, et de qui il a pu dire : « De la hauteur des cieux il ne regardait les hommes que comme des atomes avec qui il n’avait aucune ressemblance, quels qu’ils fussent ; à peine Messieurs ses frères lui paraissaient-ils intermédiaires entre lui et le genre humain » ; ce même prince, à une certaine heure, se modifie, se transforme, devient un tout autre homme, pieux, humain, charitable autant qu’éclairé, attentif à ses devoirs, tout entier à sa responsabilité de roi futur ; et cet héritier de Louis XIV ose proférer, jusque dans le salon de Marly, ce mot capable d’en faire crouler les voûtes, « qu’un roi est fait pour les sujets et non les sujets pour lui ». […] Mais, à y regarder de près, quelle différence de soins et de sollicitude !
Si cette grande entreprise avait manqué, le roi aurait passé pour un prince inconsidéré, qui avait entrepris au-delà de ses forces : le succès le fit regarder comme habile autant qu’heureux. […] Henry, pasteur de l’Église française à Berlin, a écrit une dissertation où il traite de l’irréligion de Frédéric ; sans prétendre l’absoudre sur ce point, le digne écrivain croit qu’on a fort exagéré ce côté français de Frédéric, par lequel il regardait et flattait les philosophes du xviiie siècle ; il cherche à démontrer que Frédéric, avec une sorte de fanfaronnade, s’est plu à l’exagérer lui-même. […] [NdA] Ce trait rappelle le portrait que Xénophon, en sa Retraite des Dix Mille, a tracé de Ménon, qui en était venu, dans la voie du mensonge, jusqu’à regarder les gens vrais comme des gens mal élevés et sans éducation.
On est au mercredi 22 mai 1585 ; il est nuit, Montaigne veille, et il écrit au gouverneur de la province. » La lettre, qui est d’un intérêt trop particulier et trop local pour être insérée ici, peut se résumer en ces mots : Montaigne regrette l’absence du maréchal de Matignon et craint qu’elle ne se prolonge ; il le tient et le tiendra au courant de tout, et il le supplie de revenir aussitôt que les affaires le lui permettront : « Nous sommes après nos portes et gardes, et y regardons un peu plus attentivement en votre absence… S’il survient aucune nouvelle occasion et importante, je vous dépêcherai soudain homme exprès, et devez estimer que rien ne bouge si vous n’avez de mes nouvelles. » Il prie M. de Matignon de songer pourtant qu’il pourrait bien aussi n’avoir pas le temps de l’avertir, « vous suppliant de considérer que telle sorte de mouvements ont accoutumé d’être si impourvus que, s’ils devoient avenir, on me tiendra à la gorge sans me dire gare ». […] Atteint en détail de mille offenses et de mille maux qui viennent « à la file », et qu’il eût plus gaillardement soufferts « à la foule », c’est-à-dire tout à la fois ; chassé par la guerre, par la contagion, par tous les fléaux (juillet 1585), il se demande déjà, du train dont vont les choses, à qui il aura recours, lui et les siens, à qui il ira demander asile et subsistance dans sa vieillesse, et, après avoir bien cherché et regardé tout alentour, il se trouve en définitive tout nu et « en pourpoint ». […] Regardons à terre : les pauvres gens que nous y voyons épandus, la tête penchante après leur besogne, qui ne savent ni Aristote ni Caton, ni exemple ni précepte, de ceux-là tire nature tous les jours des effets de constance et de patience plus purs et plus roides que ne sont ceux que nous étudions si curieusement en l’école.
Tout occupée des autres, sans les aimer, elle tiendra bon avec sourire et bonne grâce à son esclavage de toutes les heures : « J’ai été vingt-six ans, dit-elle, sans dire un mot qui marquât le moindre chagrin. » Vers la fin, par une de ces illusions de l’amour-propre qui sont si naturelles, elle se figurait qu’elle avait reçu des grâces singulières pour ce rôle nouveau, qui n’était que la suite, le perfectionnement et le couronnement de tous les autres rôles qu’elle avait tenus dès sa jeunesse ; elle regardait sa vie comme un miracle. […] Il me regardait comme un bel esprit à qui il fallait des choses sublimes, et qui était très difficile à tous égards. » Il y eut un temps où Mme de Montespan dut faire quelque effort pour rompre la glace et pour initier cette personne de son choix auprès du roi ; on peut juger plus tard des fureurs et des amertumes. […] Femme, elle avait des mots énergiques pour peindre cette satiété de tourments et d’angoisses qu’elle s’était donnés et qu’il lui fallait dissimuler par le sourire : « J’en ai quelquefois, comme l’on dit, jusqu’à la gorge. » On sait son mot, un jour qu’elle regardait de petits poissons bien malheureux et bien agités dans leur bassin propre et dans leur eau claire : « Ils sont comme moi, ils regrettent leur bourbe. » Mais c’est à Saint-Cyr que Mme de Maintenon aimait surtout à se réfugier dès qu’elle avait un moment, à se cacher, à s’épancher, à se plaindre, à se faire plaindre, à rêver sur son incompréhensible élévation, à se montrer en victime portant en elle seule tous les chagrins du royaume : « Oh !
Puis, quand on regarde au-delà du premier plan, et qu’on entre dans le détail des productions poétiques qui continuent s’imprimer, on est frappé de la quantité de directions qui s’entrecroisent sans paraître se contrarier et sans se détruire. […] Tout en restant dans les conditions de sa belle nature, ce qu’on peut souhaiter à M. de Laprade, c’est qu’il fasse intervenir plus distinctement dans ses compositions la personne humaine : Regarde dans ton cœur, c’est là que sont les dieux, a-t-il dit lui-même, et il n’a qu’à suivre son précepte. […] ne regardez pas trop au fond de la littérature, vous tous qui l’aimez d’un amour virginal, honnête et simple !
VI Je ne connais personne, en effet, quand j’y regarde avec attention, qui soit plus fort que Lord Macaulay en critique littéraire, dans un temps que les critiques, assez intéressés à la chose, vantent plus pour sa critique que pour ses inventions. […] Avant que madame de Staël, comme fécondée par je ne sais quel mystérieux pollen littéraire, écrivît son livre De l’Allemagne, qui se doutait que la Critique, avec ses œillères, pût relever son front, laborieusement abaissé vers les œuvres dont elle avait à rendre compte, et regarder autour d’un livre, — au-dessus, — à côté, — pour mieux le comprendre et le voir ? […] Doué de l’imagination la plus opulente, qui saisit et reproduit avec éclat toutes les analogies et toutes les différences, puissant par la vaste étendue de l’esprit et par une étendue non moins vaste de connaissances, Macaulay pourrait être regardé comme un critique complet s’il avait le jugement souverain, qui est le coup de hache définitif et mérité par lequel le critique ressemble à l’homme d’État, et dont l’un ne peut pas plus se passer que l’autre.
Une planche sur deux caisses de munitions forme l’autel, dissimulé de branchages et décoré d’une grande croix de bois ; les cires brûlent dans deux lanternes d’écurie ; les assistants regardent, écoutent, chantent, prient, masqués aux avions par ce qui subsiste du taillis. […] Dans les minutes de silence, regardez-les : ils sont bien loin de cette église lorraine, champenoise ; ils sont dans l’église de chez eux. […] Regarde et choisis !
La mort d’une femme et d’une reine sur l’échafaud, tant de beauté jointe à tant d’infortune, la pitié si naturelle pour le malheur, l’attachement des Français pour une princesse élevée parmi eux, et qui avait été l’épouse d’un de leurs rois ; l’intérêt qu’on prend peut-être malgré soi à des malheurs causés par l’amour ; le nom même de la religion, car elle fut mêlée à ce grand événement ; et l’Europe, agitée alors de fanatisme, regardait presque la querelle de deux reines rivales, comme la querelle des catholiques contre les protestants : tout contribua au grand succès de cet éloge funèbre. […] En effet, qu’on suppose un orateur doué par la nature de cette magie puissante de la parole, qui a tant d’empire sur les âmes et les remue à son gré ; qu’il paraisse aux yeux de la nation assemblée pour rendre les derniers devoirs à Henri IV ; qu’il ait sous ses yeux le corps de ce malheureux prince ; que peut-être, le poignard, instrument du parricide, soit sur le cercueil et exposé à tous les regards ; que l’orateur alors élève sa voix, pour rappeler aux Français tous les malheurs que depuis cent ans leur ont causés leurs divisions et tous les crimes du fanatisme et de la politique mêlés ensemble ; qu’en commençant par la proscription des Vaudois et les arrêts qui firent consumer dans les flammes vingt-deux villages, et égorger ou brûler des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, il leur rappelle ensuite la conspiration d’Amboise, les batailles de Dreux, de Saint-Denis, de Jarnac, de Montcontour, de Coutras ; la nuit de la Saint-Barthélemi, l’assassinat du prince de Condé, l’assassinat de François de Guise, l’assassinat de Henri de Guise et de son frère, l’assassinat de Henri III ; plus de mille combats ou sièges, où toujours le sang français avait coulé par la main des Français ; le fanatisme et la vengeance faisant périr sur les échafauds ou dans les flammes, ceux qui avaient eu le malheur d’échapper à la guerre ; les meurtres, les empoisonnements, les incendies, les massacres de sang-froid, regardés comme des actions permises ou vertueuses ; les enfants qui n’avaient pas encore vu le jour, arrachés des entrailles palpitantes des mères, pour être écrasés ; qu’il termine enfin cet horrible tableau par l’assassinat de Henri IV, dont le corps sanglant est dans ce moment sous leurs yeux ; qu’alors attestant la religion et l’humanité, il conjure les Français de se réunir, de se regarder comme des concitoyens et des frères ; qu’à la vue de tant de malheurs et de crimes, à la vue de tant de sang versé, il les invite à renoncer à cet esprit de rage, à cette horrible démence qui, pendant un siècle, les a dénaturés, et a fait du peuple le plus doux un peuple de tigres ; que lui-même prononçant un serment à haute voix, il appelle tous les Français pour jurer avec lui sur le corps de Henri IV, sur ses blessures et le reste de son sang, que désormais ils seront unis et oublieront les affreuses querelles qui les divisent ; qu’ensuite, s’adressant à Henri IV même, il fasse, pour ainsi dire, amende honorable à son ombre, au nom de toute la France et de son siècle, et même au nom des siècles suivants, pour cet assassinat, prix si différent de celui que méritaient ses vertus ; qu’il lui annonce les hommages de tous les Français qui naîtront un jour ; qu’en finissant il se prosterne sur sa tombe et la baigne de ses larmes : quelle impression croit-on qu’un pareil discours aurait pu faire sur des milliers d’hommes assemblés, et dans un moment où le spectacle seul du corps de ce prince, sans être aidé de l’éloquence de l’orateur, suffisait pour émouvoir et attendrir ?
Oui, pendant que debout je regardais ébloui, la tête nue, et que je lançais au loin mon âme sur la terre, l’Océan, les airs, maître de toutes choses par la puissance du plus ardent amour, là je t’ai sentie, ô liberté ! […] Regarde maintenant sous les rameaux du bambou courbés en arc, là où, semant d’étincelles cette obscurité sainte, la fleur écarlate du géranium resplendit aux yeux, et notre sentier s’égare entre maints berceaux d’arbres odorants et de fleurs gigantesques, tandis que l’éclat rougissant du ceiba se déploie au-dessus de l’ombrage plus modeste du plantain aux larges feuilles et sur les rangées de l’ananas rugueux. […] Regarde cependant : à mesure que s’efface l’éclat des astres d’en haut, chaque bouquet de bois ouvre sur nous des milliers de regards, en face, à nos côtés, sur nos têtes ; la mouche de feu promène sa flamme d’amour, et, dans sa fuite, sa poursuite, son vol en bas, en haut, explore l’obscurité du bois, tandis que, sous un souffle plus frais, le datura, se dévoilant, ouvre son large sein d’une senteur embaumée et d’une virginale blancheur, tel qu’une perle suspendue autour des boucles de la nuit….
Le puissant outillage d’un tissage nous subjugue ; qui a jamais regardé avec émotion le simple jeu de deux aiguilles à tricoter ? […] L’homme est un animal qui a le privilège de se regarder agir ; et plus il est ancien dans la civilisation, plus il est cultivé, plus il se regarde avec complaisance. […] Voilà le double point de vue, avec ses nuances et combinaisons, comme à une rose des vents, pour regarder les actes humains et en juger. […] Ô Paraclétistes, regardez donc autour de vous, parmi vous : il est peut-être là ; il est toujours là. […] Cela regarde le baromètre.
On peut néanmoins le regarder comme un Savant, dont les travaux ont leur mérite, par les connoissances qu’ils supposent & par celles qu’ils sont capables de procurer aux autres.
Nous ne connoissons, de M. l’Abbé Mangenot, aucun Ouvrage en prose, à moins qu’on ne veuille regarder comme un Ouvrage son Histoire abrégée de la Poésie Françoise, plaisanterie aussi juste qu’agréable, où il seroit difficile de trouver beaucoup de fautes, car elle se réduit à une demi-page.
Il en est souvent de l’imitation, comme de certaines adoptions qui regardent la figure.