/ 1667
1564. (1909) De la poésie scientifique

Mais, plus avant encore, nous dirons maintenant que l’énergie, de plus en plus tendue et motrice, de notre pensée consciente, a pénétré en cette énorme partie d’ombre prolongeant notre Moi réalisé, qu’est le Sub-conscient.

1565. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1857 » pp. 163-222

Le bon Soulié, qui nous guide, nous dit combien cette Marie-Antoinette, cette ombre charmante et dramatique de l’histoire, est l’occupation de la pensée de l’étranger.

1566. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1887 » pp. 165-228

Il remémore les curieux spectacles de nature qu’ils ont vus, les duels de crapauds, les ruts des chevreuils, et tout le surnaturel, que la nuit met dans l’ombre des grands arbres.

1567. (1885) La légende de Victor Hugo pp. 1-58

Il se fait l’apôtre du libéralisme, cette religion bourgeoise qui amuse le peuple avec des principes, lui inculque des devoirs, et le détourne de ses intérêts et de ses droits ; qui lui fait abandonner la proie pour l’ombre.

1568. (1884) Articles. Revue des deux mondes

Mais si l’on considère la crédulité presque sans mesure de Pline, l’un des plus grands naturalistes de l’antiquité, et la puérilité des récits d’Elien ; si l’on se rappelle Roger Bacon (celui qui eut peut-être, au moyen âge, l’intuition la plus nette de la méthode scientifique), croyant encore que le regard du basilic est mortel, que le loup peut enrouer un homme s’il le voit le premier, que l’ombre de l’hyène empêche les chiens d’aboyer, que l’oie bernache riait des glands d’une espèce de chêne ; quand, en 1680, Pierre Rommel affirme avoir vu à Fribourg un chat qui avait été conçu dans l’estomac d’une femme et avoir connu une autre femme qui avait donné naissance à une oie vivante ; quand, enfin, jusqu’au XVIIIe siècle, on a cru voir dans les fossiles l’effet d’une fécondation des roches par un certaine souffle séminal s’infiltrant sous terre avec les eaux, — il est difficile de ne pas éprouver quelque admiration pour le sens critique dont fait preuve Aristote.

1569. (1767) Salon de 1767 « Peintures — La Grenée » pp. 90-121

Il n’y a ni grouppes déterminés ni repos marqués, ni clair-obscur, ni magie de lumière, ni intelligence d’ombres, ni teintes, ni demies-teintes, ni perspective, ni plans.

1570. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre IV. De la délimitation, et de la fixation des images. Perception et matière. Âme et corps. »

On établira par là qu’une surface, où les jeux d’ombre et de lumière de l’objet en relief sont plus ou moins bien imités, suffit à nous rappeler le relief ; mais encore faut-il, pour que le relief soit rappelé, qu’il ait été d’abord pour tout de bon perçu.

1571. (1891) Essais sur l’histoire de la littérature française pp. -384

Nisard, couvre comme d’une ombre les éminentes parties d’invention philosophique du xviiie  siècle, ne laisse pas que d’être grave. […] Je sais bien qu’en relevant ses omissions, en faisant voir qu’il a laissé de parti pris dans l’ombre une portion considérable de notre littérature, je ne l’ai point attaqué dans sa citadelle. […] Quelles bonnes après-midi, seuls, à l’ombre, dans le fond du jardin ! […] Qu’il se rencontre de suite beaucoup de traits semblables, avec les apparences de l’observation exacte, l’homme se trouve calomnié, parce qu’on le prend uniquement par des côtés défectueux qui ne sont pas tout l’homme, qui même, la plupart du temps, ne sont en lui qu’une ombre, un rien, quelque chose de rapide et de fugitif, aussi vite évanoui que né, une misère à quoi il ne ferait pas attention lui-même, si le romancier n’était là qui la lui tourne longuement et amoureusement à outrage. […] Plusieurs semblaient soupçonner vaguement qu’il y avait désormais en France deux rois : l’un qui tenait en main le gouvernement réel, l’autre attaché au premier comme une ombre incommode qui épiait son règne, et, en esprit, le refaisait.

1572. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

Dans lotit ceci, je ne vois pas ombre de tricherie. […] Si la liberté du théâtre existait, nous ne verrions pas un Rouvrière obligé de jouer Hamlet devant des paysans, dans une grange, faisant sourire l’ombre du vieux Shakespeare, qui se croirait, au dix-neuvième siècle, à Londres, représentant ses pièces dans un bouge de la Cité.

1573. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

Nous apparaîtrons nous aussi, à nos arrière-neveux, comme de vieilles petites ombres effacées par la distance, avec des tons de pastel pâlis par la fuite des jours. […] Mais que son ombre se console : nous ne cessons d’être les dupes d’un homme si fort que pour devenir ses admirateurs. […] Il y a tant de chances pour qu’il soit tout proche de la mort qu’on peut dire qu’il vit dans son ombre, qu’il y est entré déjà et qu’il est, avant son jour suprême, retranché du nombre des vivants. […] Je dirais plutôt : « La princesse Georges est un corps vivant et vibrant qui s’agite au milieu d’ombres vaines. » Vivant, ah ! […] Le messager, qui apporte à la reine Atossa la nouvelle de Sala-mine, le dit à plusieurs reprises : « C’est une divinité… c’est un dieu vengeur… c’est la jalousie des dieux qui a tout conduit. » L’ombre de Darius exprime la même pensée : « Dans trois générations, des monceaux de morts diront encore aux yeux des hommes, silencieusement, qu’il ne faut pas qu’un mortel conçoive de trop hautes pensées. » Toute la tragédie des Perses a moins été écrite pour célébrer le triomphe des Grecs que pour leur conseiller d’être modestes dans la victoire et de ne point provoquer la « jalousie » des dieux.

1574. (1866) Nouveaux essais de critique et d’histoire (2e éd.)

La minutieuse explication de Balzac nous laisse dans le repos et dans les ténèbres : il a beau décrire copieusement les croisillons de l’hôtel du Guénic ou le nez du chevalier de Valois, ces croisillons et ce nez restent dans l’ombre ; un physionomiste ou un archéologue y devinent seuls quelque chose ; le commun des lecteurs demeure respectueusement la bouche béante, implorant tout bas le secours d’une vignette ou d’un portrait. […] Même elle deviendra une vertu de premier ordre, si elle sert un intérêt public de premier ordre ; la vertu étant le sacrifice de soi-même au bien général ne peut manquer de se déplacer en même temps que ce bien pour le suivre ; elle s’attache à lui comme l’ombre au corps. […] Quel climat renfermait un si rare trésor… De l’aimable vertu doux et puissants attraits, Tout respire en Esther l’innocence et la paix ; Du chagrin le plus noir elle écarte les ombres Et fait des jours sereins de mes jours les plus sombres. […] C’est la Foudre victorieuse, le Tonnerre bienfaisant qui fend les nuages et délivre de leur prison les pluies fertilisantes : ce sont les deux Rayons jumeaux qui s’élancent du bord du ciel pour annoncer le retour de la lumière ; ce sont les Rougeurs du matin, « les Aurores blanchissantes qui sortent de l’ombre avant le soleil, et, comme une jeune fiancée devant son époux, découvrent en souriant leur sein en sa présence ». […] Par sa propre nature le bonheur s’attache à la vertu et le malheur, au vice, comme l’ombre au corps.

1575. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Il y avait, dans l’état intérieur de l’Europe, quelque chose de plus grand encore que ce prodigieux épisode ; c’était la cause même de ce mouvement ; c’était la religion, le pouvoir pontifical ; c’était la liberté naissant en Italie, à l’ombre sanglante des luttes du sacerdoce et de l’Empire.

1576. (1769) Les deux âges du goût et du génie français sous Louis XIV et sous Louis XV pp. -532

Je crus apercevoir dans l’ombre un homme à robe noire & à bonnet triangulaire qui lui glissait tacitement l’Andrienne. […] Geoffroi portait le flambeau dans les ombres que Lémery n’avait pas dissipées. […] Elle n’est ici que pour servir d’ombre à Jeanne d’Arc. […] Elle avouera que Crébillon & Voltaire ont marché dignement sur leurs traces, & le plus souvent marché sans guide ; que l’un & l’autre sont plus tragiques, & que l’un & l’autre ont jetté les premiers dans la Tragédie ces traits d’ombre & de lumiere, ces grands effets non moins nécessaires dans un Drame que dans un Tableau.

1577. (1862) Notices des œuvres de Shakespeare

C’est, comme le dit Antoine, l’ombre de César « promenant sa vengeance » ; et pour ne pas laisser méconnaître son empire, c’est encore cette ombre qui, aux plaines de Sardes et de Philippes, apparaît à Brutus comme son mauvais génie. […] Lépide, le troisième triumvir, est l’ombre au tableau à côté d’Antoine et de César ; son caractère faible, indécis et sans couleur, est tracé d’une manière très-comique dans la scène où Énobarbus et Agrippa s’amusent à singer son ton et ses discours.

1578. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

Il trouve une monotonie insupportable dans les compositions de Lully, & pire que le maussade chant des églises d’Allemagne ; une absurdité dans ces fêtes & ces danses amenées à tout propos & contre toute raison ; dans cet assemblage d’ombres, de fées & de génies, tous monstres sortis du cerveau des poëtes modernes ; dans ces représentations puériles de tonnerres, d’éclairs & d’orages ; enfin une succession non interrompue d’extravagances depuis quatre vingt ans. […] On travailla d’après l’idée d’une jeune Grecque, qui, frappée de voir la figure de son amant tracée sur le mur par l’ombre que faisoit une lampe, en suivit exactement les contours. […] Il fallut toute l’autorité du cardinal Mazarin, pour donner un passeport à la bulle du pape : ce ministre redoutoit l’ombre de faction ; il vouloit prévenir des divisions naissantes.

1579. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE CHARRIÈRE » pp. 411-457

Le bien, c’est qu’il n’y a pas eu ici ombre de système, rien qui sente l’auteur ; rien même qui sente le peintre : ce délicieux Terburg est venu sans qu’il y ait eu de pinceau.

1580. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Gabriel Naudé »

Naudé rentra vite, pour n’en plus sortir, dans l’ombre de ces bibliothèques qu’il avait tant aimées et qui allaient être son tombeau.

1581. (1813) Réflexions sur le suicide

Si c’était dans le néant qu’elle nous entraînât, vaudrait-il la peine de disputer avec cette ombre ?

1582. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre I. Principe des mœurs sous l’Ancien Régime. »

 » Le vrai courtisan suivait le prince comme l’ombre suit le corps ; tel fut sous Louis XIV le duc de La Rochefoucauld, grand veneur. « Le lever, le coucher, les deux autres changements d’habit tous les jours, les chasses et les promenades du roi tous les jours aussi, il n’en manquait jamais, quelquefois dix ans de suite sans découcher d’où était le roi, et sur pied de demander un congé, non pour découcher, car en plus de quarante ans il n’a jamais couché vingt fois hors de Paris, mais pour aller dîner hors de la cour et ne pas être de la promenade. » — Si plus tard, sous des maîtres moins exigeants et dans le relâchement général du dix-huitième siècle, cette discipline se détend, l’institution subsiste170, à défaut de l’obéissance, la tradition, l’intérêt et l’amour-propre suffiraient pour peupler la cour.

1583. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIIIe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (1re partie) » pp. 5-96

La voici, réduite en peu de mots : mais ces mots sont clairs, positifs, précis, et ne laissent ni ombre pour les obscurcir, ni fables pour les dénaturer.

1584. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

Goethe s’enferme pendant des années entières dans l’ombre de ses méditations pour y trouver le mot de Dieu que les hommes ne comprennent pas tout entier encore, parce qu’il n’en dit que la moitié ; l’autre moitié, mystique et réparatrice, il passe vingt-cinq années de son âge mûr et de sa vieillesse à la trouver, et il n’en donne qu’une partie avant de mourir.

1585. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Elle met déjà son ombre sur les tristesses et les haines.

1586. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

Dans l’évolution de la faculté visuelle, par exemple, il se produit une aptitude toujours croissante à distinguer les diverses intensités des couleurs, les teintes intermédiaires, les teintes de lumière et d’ombre.

1587. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre quatrième. Éléments sensitifs et appétitifs des opérations intellectuelles — Chapitre deuxième. Les opérations intellectuelles. — Leur rapport à l’appétition et à la motion. »

Je vois sur ma cheminée un disque couleur orangé ayant des rugosités ; d’après la disposition des ombres j’induis que c’est une sphère, que cette sphère a un coté que je ne vois pas, qu’elle est une orange, que cette orange a une écorce amère, un intérieur d’une acidité agréable, etc.

1588. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre V : Lois de la variabilité »

Comme on trouve en abondance une espèce aveugle de Bathyscia à l’ombre des rochers qui environnent l’entrée des cavernes, on peut croire que la perte de la vue chez l’espèce qui en habite l’intérieur n’a point pour cause l’obscurité de sa demeure, et il semble tout naturel qu’un insecte déjà aveugle se soit accoutumé aisément à vivre dans une caverne82.

1589. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VII : Instinct »

Souvent, parce qu’on s’obstine à ne pas vouloir reconnaître à un animal l’ombre d’une ressemblance mentale avec nous, il faut, pour en expliquer les actes, recourir à des montagnes d’hypothèses, supposer au dehors de lui le moteur qui est en lui, et demander la cause de faits constants aux contingences les plus hasardeuses, les plus compliquées, et par conséquent les moins probables.

1590. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

C’est ainsi qu’ils appellent les ombres.

1591. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

Écoutez le peintre : « Mais c’est lui surtout, — nous dit-il, — créature brillante et incomplète, poème auquel il manquait des feuillets, c’est Jean lui-même qui vit en moi avec tout ce que Dieu lui avait donné, défaillances et vigueur, lumières et ombres.

1592. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Lorsque, maintenue par l’énergie du pouvoir laïque, l’autorité religieuse n’exerçait plus une action directe sur la politique intérieure, sa haine contre les nouveaux émancipés redoublait dans l’ombre, grosse de vengeances futures.

1593. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Un seul caractère s’y dessine à peu près, celui de l’auteur lui-même ; Andrea Sperelli, Tullio Hermil, et les autres « héros », c’est toujours D’Annunzio, un D’Annunzio grandi et déformé par une vanité sans bornes ; les autres personnages, et surtout les femmes, ne sont plus que des ombres, ou des esclaves torturés par leur vainqueur.

1594. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

En 1923, René Ghilbert n’a plus que deux années à vivre ; depuis le début du siècle, l’auteur du Traité du Verbe est pour ainsi dire passé dans l’ombre : certes les volumes successifs de L’Œuvre, équivalent ghilien du fameux Livre mallarméen, ont vu peu à peu le jour, certes Ghil a consolidé les fondements de sa théorie (De la Poésie scientifique (1909), La Tradition de poésie scientifique (1920)), il a même eu la satisfaction de voir naître les premiers travaux universitaires issus de sa conception de la poésie (C-A.  […] » Bonhomme, Francisque Sarcey parle de « l’Ecole philosophique instrumentif » en produisant également quelques vers : « Du diable si l’on voit ombre de philosophie dans ces vers ! […] En ce qui me concerne, le «.Mercure » avait pris position dès son n° d’Avril, par quelques lignes de Vallette à propos du Meilleur Deveniret du Geste ingénu : « Où l’ombre d’une poésie à extraire de là (la Matière en perpétuel devenir) ? […] Moréas), ou qu’évoquer la légende à l’instar de Wagner, brosser les mêmes somptueux décors et hanter l’ombre des silhouettes châtelaines (tel le vouloir de M. de Régnier). » Ils commençaient : « Le rêve cosmogonique de M. 

1595. (1903) Légendes du Moyen Âge pp. -291

Il y avait cependant à cette félicité une petite ombre. […] Il n’y a pas l’ombre d’un doute sur l’authenticité du document, non plus que sur la complète bonne foi de l’auteur. […] Li vergiers fu et beaus et lons, Tos fu fais a compas reons ; En mi avoit une fontaine, Qui bêle estoit et clére et saine, Et sordoit de si grant randon Com s’ele bolist a bandon221, Et s’estoit froide corne marbres ; Ombre li faisoit uns beaus arbres, Dont les branches loins s’estendoient, Qui sagement duites estoient222 ; Fueilles i avoit a plenté223 : En tôt le plus lonc jor d’esté, Quant ce venoit el mois de mai, N’i peùssiés choisir le rai224 Dou soleil, tant par ert ramus ; Moût par doit estre chiers tenus, Quar il est de tele nature Que tos tens sa fueille lui dure : Vens ne ores, tant ait de force225, N’en abat fueille ne escorce.

1596. (1914) L’évolution des genres dans l’histoire de la littérature. Leçons professées à l’École normale supérieure

En voici quelques exemples : Mais je me sens jaloux de tout ce qui te touche, dit l’amoureux Pyrame à son amie Thisbé, dans la tragi-comédie du poète Théophile, Les fleurs que sous tes pas tous les chemins produisent Dans l’honneur qu’elles ont de te plaire me nuisent ; Si je pouvais complaire à mon jaloux dessein, J’empêcherais tes yeux de regarder ton sein ; Ton ombre suit ton corps de trop près, ce me semble… et Balzac, à son tour, dans la lettre au cardinal de la Valette, si souvent citée : « Présentement, au mois où nous sommes, je cherche tous les remèdes imaginables .contre la violence de la chaleur. […] Il s’ensuivit, selon l’usage du temps, une guerre d’épigrammes, qui peut-être en fût restée là, sans l’intervention de Fontenelle, dont les Poésies pastorales — c’est l’un de ses plus médiocres ouvrages, — avec un Discours sur l’églogue et une Digression sur les anciens et les modernes, en renouvelant le débat, le ranimèrent ; et de l’ombre de l’Académie, le portèrent en quelque sorte sur la place publique. […] Vous ferez sans doute plaisir à son ombre ; vous y apprendrez beaucoup de choses ; et vous connaîtrez enfin les commencements d’une question que nous aurons à traiter prochainement nous-mêmes. […] Si Racine n’avait pas été l’élève de Port-Royal, un chef-d’œuvre de plus n’aurait-il pas fait rentrer dans l’ombre la cabale de Pradon ?

1597. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

Ces vers et les suivants, récités à haute voix, n’auraient eu besoin, pour émouvoir et enlever tous les cœurs, pour renouveler, à leur manière, les anciens triomphes dus à la veine lyrique, et faire éclater les larmes avec les applaudissements, que de rencontrer réunis dans une salle du Louvre ou du Palais les bons citoyens du Parlement, de l’Université, de la bourgeoisie sauvée par Henri IV et encore reconnaissante : Il n’a point son espoir au nombre des armées, Étant bien assuré que ces vaines fumées N’ajoutent que de l’ombre à nos obscurités L’aide qu’il veut avoir, c’est que tu le conseilles ; Si tu le fais, Seigneur, il fera des merveilles, Et vaincra nos souhaits par nos prospérités.

1598. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mademoiselle Aïssé »

Elle n’a point manqué jusqu’ici à l’ombre aimable d’Aïssé, et chaque jour elle se perpétue en silence.

1599. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Il y entendait parler de bien des choses, surtout de littérature, de Corneille et de Racine, de Geoffroy et de Voltaire, des Grecs et des Romains, de tout ce dont on causait volontiers alors, après les excès de la Révolution, avant le réveil de 1814, à l’ombre du soleil de l’Empire, « à cette époque, nous dit-il, où l’on avait de l’esprit, mais où l’on ne pensait pas. » Penser, en effet, c’est n’être jamais las, c’est recommencer toujours, et l’on avait horreur de rien recommencer.

1600. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre IV. Addison. »

Telle est cette vision de Mirza qu’il faut traduire presque en entier944 : « Le cinquième jour de la lune, étant monté sur les hautes collines de Bagdad, pour passer le reste du jour dans la méditation et dans la prière, je tombai en une profonde méditation sur la vanité de la vie humaine, et passant d’une pensée à l’autre : Sûrement, me dis-je, l’homme n’est qu’une ombre et la vie un songe. —  Pendant que je rêvais ainsi, je jetai les yeux sur le sommet d’un roc qui n’était pas loin de moi, et j’y aperçus une figure en habit de berger, avec un instrument de musique à la main.

1601. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

Thiers affecte de prendre trop au sérieux Cambacérès, homme en qui le ridicule du caractère s’associait par égale portion avec la sagacité de l’esprit, excellent à un rang secondaire, dans l’ombre, mais qui n’aurait jamais existé s’il n’avait été le second d’un grand homme.

1602. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIIe entretien. Cicéron (2e partie) » pp. 161-256

Le livre, que nous ne possédons que par débris, comme les marbres de Phidias au Parthénon, finit familièrement, ainsi qu’il a commencé, par une gracieuse détente des esprits et par un retour sur les douceurs de pareils entretiens : « Mais le matelot nous appelle (le batelier qui avait attaché son bateau au môle de Baïa, près du cap Misène, et qui voyait l’ombre descendre sur la mer), le matelot nous appelle, Lucullus !

1603. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

Poiret, vieillard plus semblable à une ombre, dont la canne à pomme d’ivoire jauni dans sa main soutenait mal les jambes grêles chaussées de bas bleus.

1604. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la société des visiteurs des pauvres. » pp. 230-304

Des choses que Dumas fils, il y a trente ans, n’aurait hasardées qu’avec un luxe de préparations, et qu’il eût tour à tour insinuées avec des finesses de diplomate ou imposées avec des airs de dompteur, passent maintenant le plus aisément du monde et sans l’ombre de scandale.

1605. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1875 » pp. 172-248

Sur la cheminée, préparée comme un théâtre pour la lecture, et où quatorze bougies, reflétées dans la glace et dans les appliques, font derrière lui, un brasier de lumière, sa figure, une figure d’ombre, comme il dirait, se détache cerclée d’une auréole, d’un rayonnement courant dans le ras rêche de ses cheveux, de son collier blanc, et transperçant de clarté rose ses oreilles fourchues de satyre.

1606. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Cherchez-y les yeux du grand poète : soit les profonds de Beethoven, ce sourd qui écoute son âme ; soit les rêveurs de lord Byron ; soit les trous d’ombre de Milton, l’aveugle, plus beaux que des yeux, et par lesquels passait sa pensée !

1607. (1864) Études sur Shakespeare

Ce n’est point cette puissance, c’est son ombre, c’est l’image de nos traits répétés et frappants dans un miroir, quoique sans vie. […] Que Hamlet soit le premier mis en relation avec l’ombre de son père ; que de préparations, que d’explications seront indispensables pour nous placer dans l’état d’esprit où doit être un prince, un homme des classes élevées, pour croire à une apparition !

1608. (1904) Propos littéraires. Deuxième série

Le lyrisme est bien autre chose, et il y faut un homme autrement possédé et démoniaque que vous tous, oui, que vous tous, que Malherbe lui-même, que j’adore du reste ; mais tant pis pour lui, et pour mon affection pour lui : il est glacé. » Le fameux vers, un peu ridicule en sa forme, mais très juste au fond : « Un beau désordre est un effet de l’art », ne veut pas dire autre chose ; et ; qui le prouve, ce sont les vers suivants qui l’expliquent, sans qu’il puisse rester ombre d’un doute : Loin ces rimeurs craintifs dont l’esprit flegmatique Garde dans ses fureurs un ordre didactique ; Qui, chantant d’un héros les progrès éclatants, Maigres historiens, suivent l’ordre des temps. […] Par exemple, il est très manifeste que, dans ces deux ouvrages, le Victor Hugo qui est le plus oublié ou laissé dans l’ombre, pour ne pas dire plus, c’est le romantique. […] On ne contestera guère que le Victor Hugo pseudoclassique, le Victor Hugo à la Jean-Baptiste, ne soit celui des Odes, ni que le Victor Hugo romantique ne soit celui du théâtre, et aussi celui des recueils de 1830 à 1815, Feuilles d’automne, Rayons et Ombres, Chants du crépuscule, Voix intérieures. […] Il avait de très grands dons et une nature, en somme, généreuse, avec des coins d’ombre qu’il ne faut pas trop fouiller.

/ 1667