/ 3046
1749. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes d’Amérique » pp. 95-110

Disons-le à l’honneur de tout le monde, de ce côté-ci de l’hémisphère personne, même parmi ceux que l’or qu’ils remuent dans leurs mains puissantes devrait fasciner, n’aurait voulu penser tout haut que l’amour de l’argent et sa production fussent le dernier mot de la moralité humaine, l’idéal enfin de la perfection absolue pour les individus et pour les peuples. […] Le peintre des Femmes d’Amérique est tout simplement un homme qui a lu Rousseau, qui traduit l’Émile dans un français… américain… qui, la main sur le cœur, l’honnête homme !

1750. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Papesse Jeanne » pp. 325-340

Malgré cette discussion terrassante, trop vaste pour qu’on puisse rapporter ici les opinions qu’elle fît valoir et triompher, le xviiie  siècle, qui se souciait bien d’être faux et même imbécile quand il s’agissait de jeter le sophisme le plus abject ou l’opinion la plus bête à la figure du catholicisme, pour peu qu’il y jetât quelque chose, allait reprendre l’immonde légende de la Papesse Jeanne quand la Révolution éclatant mit son bruit par-dessus le petit sifflement du reptile, et, de sa main d’Hercule, étouffa la légende rampante qui voulait encore resiffler… Mais vous voyez ce qui arrive ! […] C’est toujours, pour preuve que la légende de la Papesse Jeanne est une histoire, c’est toujours les mêmes interpolations des copistes à la marge des manuscrits originaux, écrites, après coup, d’une autre main que celle qui a écrit le texte, et, la première fois, à quelques siècles de distance.

1751. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le comte de Gobineau » pp. 67-82

Dans l’indigence de la pensée publique qui se rue si badaudement aux Expositions, et le néant des œuvres qu’on publie, la Critique est heureuse de pouvoir, en se retournant, mettre la main sur un livre resté dans l’obscurité de son mérite, — le destin, d’ailleurs, de tout ce qui est élevé en littérature. […] Son petit consulat fut comme une stalle de chanoine où ses facultés de diplomate purent dormir… Et Gobineau, l’esprit le plus chaud que j’aie connu, l’homme qui avait le plus de verve, de profusion intellectuelle, d’expression en dehors, — poète, même en vers, — artiste, même de main, — toute sa vie, en a été un.

1752. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 201-216

Mais ce qui est plus étonnant encore, c’est que la duchesse de Châteauroux et ses sœurs, qui sont le sujet même du livre, n’aient pas fait trembler une minute le pinceau dans la main qui le tenait. […] Pauvre peinture de la Force, qui se faisait peindre le casque en tête, l’épée à la main, un lion à ses pieds, et qui n’était que la Faiblesse !

1753. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « II. Jean Reynaud »

Jean Reynaud est un coup porté, par une main philosophique de plus, au christianisme et à l’Église. […] Nous savons bien, — et lui aussi, probablement — ce qui resterait du christianisme, après cet élargissement à la Diderot ; mais pour les simples de cœur et d’esprit qui se laissent pétrir par la main de toutes les propagandes, un tel langage a sa séduction.

1754. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « III. Donoso Cortès »

Il n’a pas le monosyllabe, la paillette qui fait du fleuve un Pactole, la pointe acérée et étincelante, ce clou d’or, quand il n’est pas de diamant, qu’avait Joseph de Maistre, et qu’il fichait si bien, de sa main spirituelle, entre les blocs carrés et lisses de son style au ciment romain. […] On les lira encore quelque temps, puis ils tomberont des mains, ne laissant dans les esprits d’autre impression que l’impression du bruit qu’ils firent, et ce sera bientôt effacé !

1755. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVI. Buffon »

Il avait beau être un homme de génie, c’était aussi un grand seigneur de sentiment, toujours prêt à l’hospitalité, vous tendant sa belle main du fond de ses manchettes ; qui se levait de son bureau pour vous faire accueil, « mis plutôt comme un maréchal de France que comme un homme de lettres », disait Hume étonné, car il avait cette faiblesse d’aimer la parure, qui fut la faiblesse de tant de grands hommes. […] Seulement, comme après l’avoir abaissé d’une main, M. 

1756. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVII. Saint-Bonnet »

Conséquent à la manière des grands observateurs, qui généralisent quand ils concluent, anatomiste de la pensée comme Bichat et Cuvier l’étaient des organes, il a pris la tête humaine dans sa main et il a dit : Cette tête étant conformée comme elle est, il est évident que telles idées ou tels sentiments qu’on y infiltre quand elle est vierge encore doivent produire tel effet funeste, — absolument comme le chimiste dit : Tel liquide versé dans un autre liquide doit produire tel précipité à coup sûr ; — et par là il a donné à une argumentation épuisée le degré de solidité qui devait la rendre invincible. […] Certes, s’il fut jamais des hommes dignes de porter dans leurs saintes mains le cœur et le cerveau de l’enfant, ces délicats et purs calices que la vérité doit remplir et qui restent fêlés ou ternis pour toujours, dès qu’un peu de poison de l’erreur y coule, ne sont-ce pas les Jésuites, les pères de la foi, les pères aussi de la pensée, ces premiers éducateurs du monde ?

1757. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVIII. Lacordaire »

Pour ma part, il m’est impossible d’admettre comme un livre, dans le sens véritablement littéraire du mot, les Conférences de Notre-Dame, improvisées, on nous l’a dit assez, en insistant sur ce mérite, et si remaniées depuis, à main et à tête reposées, en vue de la publication. […] La Critique qui n’a point, elle, la main sacerdotale du Père Lacordaire, tremble quand il s’agit de toucher à cette chose immense et divine, l’âme de N.

1758. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXXI. Sainte Térèse »

et qui va nous montrer, dans la Sainte Térèse entrevue, une autre Sainte Térèse inconnue : c’est le livre des Fondations… Sainte Térèse est toujours pour l’imagination ou l’ignorance française le fameux portrait de Gérard ; la belle Sainte à genoux, avec sa blancheur de rose macérée, son œil espagnol qui garde, sous la neige du calme bandeau, un peu trop de cette mélancolie, qui ne vient pas de Dieu, car il n’en vient nulle mélancolie, et ces mains de fille noble qui, jointes très correctement sur le sein, disent aussi un peu trop à la bure sur laquelle elles tranchent, qu’elles étaient faites pour la pourpre. […] À certaines places de ce récit merveilleux où le surnaturel a complètement remplacé la nature, on voit surgir du fond de cette Contemplative, éperdue et perdue dans son Dieu, une raison plus forte que toutes ces flammes, qui met la main sur le cœur qui palpite et dit à ce cœur : « N’es-tu pas ta proie à toi-même ?

1759. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Dargaud »

Il faut la main d’un poète ou d’un artiste pour l’en tirer. […] Enfin, dans les dernières années de la Restauration, ils écrivirent, avec la main tremblante et sceptique de Jouffroy, « comment les dogmes finissent », et si, à partir de Jouffroy, ils n’ont plus eu d’illustre interprète, ils n’en vivent pas moins parmi nous et il est aisé de les reconnaître à certaines formes surannées de langage.

1760. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Gratry »

L’abbé Gratry, en sa qualité de métaphysicien, a mis la main sur la grande blessure de la métaphysique moderne, qui perd son sang, son âme et sa vie, dans des abstractions qu’on prend pour elle. […] Tels sont, indiqués d’une main bien rapide, les points culminants d’un travail qui rétablit la tradition philosophique interrompue et jette la première arche du pont qui doit unir, par-dessus les eaux troubles du xviiie  siècle, la philosophie du xviie  siècle et la philosophie de notre temps.

1761. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Edgar Quinet »

Un jour Michelet, pour se défatiguer de ses quarante volumes d’histoire, fit, de sa main la plus légère et la plus fine, l’Insecte et l’Oiseau, deux petits culs-de-lampe assez gentillets d’histoire naturelle. […] Ils n’ont, comme tous les savants dans les sciences matérielles, que des causes secondes sous la main.

1762. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Roger de Beauvoir. Colombes et Couleuvres. »

Ma main qui se rouvre a pour vous des graines ; Mon cœur, qui tressaille, a pour vous des chants ; Pour vous j’ai des pleurs, pour vous j’ai des haines ! […] Roger de Beauvoir, ce qui nous a toujours empêché de le confondre, malgré ses erreurs d’homme et de poète, avec les Gentils de notre temps, avec les Idolâtres de la Forme qui n’ont d’autre dieu que le fétiche qu’ils ont eux-mêmes sculpté, c’est le parfum des croyances premières et flétries, mais qu’on retrouve toujours à certaines places de ses écrits ; c’est ce christianisme ressouvenu qu’il tient peut-être de sa mère et qui revient de temps en temps et comme malgré lui, dans sa voix : D’où vient, qu’après avoir dormi sous les platanes, Après avoir sur l’herbe épanché les flacons, Puis être revenus, Ô brunes courtisanes, En rapportant chez nous les fleurs de vos balcons, La tristesse nous prend comme fait la duègne Qui de la jeune Inès s’en vient prendre la main, Et que nous n’arrivons jamais au lendemain Sans qu’aux pensers d’hier tout notre cœur ne saigne ?

1763. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Madame Ackermann »

I Ce n’était pas même un livre qui me tombait sous la main, c’était ce qu’en jargon de librairie on appelle une plaquette. […] Ils sont taillés dans un marbre radieux de blancheur idéale, avec une vigueur et une sûreté de main qui indique que l’artiste, ici, est son propre maître, et sans excuse, — comme Lucifer, qui ne tomba que parce qu’il voulut tomber.

1764. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Paul Féval » pp. 145-158

j’allais presque dire prostitué), il a parfois touché avec une main moderne, et qui n’est pas la gourde main de ce chiragre de Le Sage, à la passion, au sentiment, à l’idée, à toutes ces choses qu’on ne peut pas plus rejeter entièrement du roman que de l’âme humaine.

1765. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Prosper Mérimée. » pp. 323-336

Metteur en œuvre d’une très-remarquable vigueur de main, il n’en était pas moins un esprit privé de toute grande puissance spontanée. […] Il imite, mais un sécateur à la main.

1766. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IV. »

Sur le sommet des mâts un nuage s’est arrêté tout droit, signe de la tempête ; puis vient la terreur qui suit un danger subit. » Quelquefois encore, ces restes brisés de la couronne du poëte grec ne sont que des traits rapides et simples, une parole délicate et passionnée, un coup de pinceau qui ne s’oublie pas52 : La jeune fille triomphait, tenant à la main une branche de myrte et une fleur de rosier ; et ses cheveux épars lui couvraient le visage et le col » ; ou bien encore, avec moins de simplicité, cette autre peinture qui rappelle celle de Sapho : « Semblable passion d’amour, pénétrant au cœur, répandit un nuage épais sur les yeux et déroba l’âme attendrie. » Horace, dans sa vive étude des Grecs, avait sans doute gardé bien d’autres souvenirs d’Archiloque ; et quelques-unes de ses odes, son dithyrambe à Bacchus et d’autres, ne doivent être qu’une étude d’art et de goût substituée au tumulte des anciennes orgies, où le poëte de Paros se mêlait, en chantant : « Le cerveau foudroyé par le vin, je sais combien il est beau d’entonner le dithyrambe, mélodie du roi Bacchus. » Archiloque, s’il faisait des hymnes, devait être, ce semble, le poëte lyrique des Furies et non des Dieux. […] Cet homme haï de ses concitoyens, mais admiré, ayant péri dans un combat par la main de Callondas, surnommé le Corbeau, lorsque celui-ci voulut faire une offrande à Delphes, la Pythie le rejeta comme un sacrilège qui avait tué le serviteur des Muses et le sien.

1767. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Quelle est la main secourable qui nous retiendra ? […] Oscar Wilde se promenait souvent, dans Regent Street, un lys à la main, et un tournesol brodé sur son veston. […] Ses prunelles, d’un gris bleuissant, riaient ; et quand elle parlait, l’éclair de ses dents avait une douceur ardente… Elle tenait son ombrelle de la main gauche, l’autre main jouait nue avec des violettes. Dechartre avait le goût, l’amour, la folie des belles mains… Celles-là le ravissaient. […] Il mit résolument la main à la pâte.

1768. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Préface de la première édition du quatrième volume »

Quand j’ai commencé à mettre la main à ce volume, la révolution de 1848 venait d’élever à la dignité de maximes d’État les plus dangereuses des doctrines du dix-huitième siècle.

1769. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 245-247

Son Commentaire sur la Henriade, qui n’a paru qu’après sa mort, est le meilleur Livre de critique littéraire qu’on puisse mettre entre les mains des jeunes gens, pour leur former le jugement & le goût.

1770. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » pp. 531-533

Avertir des défauts qui lui échappent un Peintre habile, entre les mains de qui on voit un pinceau capable de tout, c’est se montrer jaloux de sa gloire & non de son merite ; c’est lui indiquer les routes de la perfection, & concourir foiblement à la vérité, mais toujours concourir aux chef-d’œuvres que le Public a droit d’attendre de ses talens.

1771. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Mystères. » pp. 35-37

Ces pèlerins, allant par troupes et s’arrêtant dans les places publiques, où ils chantaient, le bourdon à la main, le chapeau et le mantelet chargés de coquilles et d’images peintes de différentes couleurs, faisaient une espèce de spectacle qui plut, et qui excita quelques bourgeois de Paris à former des fonds pour élever un théâtre où l’on représenterait ces moralités les jours de fêtes, autant pour l’instruction du peuple que pour son divertissement.

1772. (1903) Propos de théâtre. Première série

Je ne sais pas ce qu’il paraîtrait à nos yeux si nous avions entre nos mains ses cent tragédies. […] — Vois-tu ma main sur mon épée ? […] Pauline un peu plus bas que Polyeucte, et celui-ci lui tendant la main pour l’aider à gravir. […] Ariste, frère de Chrysale, demande formellement à Chrysale la main d’Henriette pour Clitandre. […] Agrippine s’écrie : « Burrhus ose sur moi porter ses mains hardies ! 

1773. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

Oui, le sentiment religieux est une force morale et par conséquent une matière aux mains de l’artiste. […] Elle lui a même prêté les mains en cette démarche. […] Il était temps de lui mettre un sabre dans la main. […] Le heurt des mots entrechoqués d’une main vive et très habituée au vocabulaire en fait presque tous les frais. […] …………………………………………………………………………… Il voletait devant ma main épouvantable.

1774. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LII » pp. 203-205

M. de Montalembert continue par ses excès oratoires de compromettre une cause qui avait été habilement et vertement reprise en main par le comte Arthur Beugnot dans un discours plein de talent et tout politique.

1775. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 484-486

Il prit le parti de répondre, la plume à la main, aux objections qu’on lui faisoit dans la société, & ce fut dans cette intention qu’il composa son Traité de la Sagesse, dans lequel il expose, avec bonne foi & sans déguisement, les sentimens de tous les Sceptiques qu’il vouloit réfuter.

1776. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 179-181

J’aime mieux une main un peu ardente, que celle qui est engourdie, & qui paroît toujours avoir la crampe aux doigts.

1777. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » pp. 544-546

Il s’habilloit en Berger, & dans cet équipage, la houlette à la main, la pannetiere au côté, le chapeau de paille sur la tête, accompagné d’une Chanteuse des rues, érigée en Bergere, il se promenoit dans un jardin, & s’imaginoit mener paître ses troupeaux.

1778. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — N. — article » pp. 412-415

Après avoir analysé le génie du Poëte d’Auguste, M. le Duc de Niv** prend sa lyre, & en tire des sons qu’Horace lui-même n’eût point désavoués ; on ne s’apperçoit pas que cet instrument ait changé de main, en passant dans les siennes.

1779. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre VI. Des Esprits de ténèbres. »

Il faut qu’avec un goût exquis, le poète sache faire distinguer le tonnerre du Très-Haut, du vain bruit que fait éclater un esprit perfide ; que le foudre ne s’allume que dans la main de Dieu ; qu’il ne brille jamais dans une tempête excitée par l’enfer ; que celle-ci soit toujours sombre et sinistre ; que les nuages n’en soient point rougis, par la colère, et poussés par le vent de la justice, mais que leurs teintes soient blafardes et livides, comme celles du désespoir, et qu’ils ne se meuvent qu’au souffle impur de la haine.

1780. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Sur les exercices, des. Cadets russes. » pp. 549-546

«  Voici les réflexions qu’a faites à ce sujet un homme de bien, justement célèbre, que la reconnaissance a amené de huit cents lieues au 60e degré à l’âge de soixante ans, au pied du trône de sa bienfaitrice » : « Jugez, disait-il, combien cela doit plaire à un homme dont la première éducation a été aussi dissipée, aussi violente et peut-être plus périlleuse, et qui a le front cicatrisé de plusieurs coups de fronde reçus de la main de ses camarades.

1781. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Bachelier  » pp. 147-148

Mais le Laocoon a saisi avec ce bras un des serpents dont il cherche à se débarrasser, et le Milon de Bachelier se laisse bêtement dévorer une jambe par un loup qu’il étranglerait avec sa main libre, s’il songeait à s’en servir.

1782. (1763) Salon de 1763 « [À mon ami Monsieur Grimm. » pp. 171-182

Encore si l’on avait devant soi le tableau dont on écrit ; mais il est loin, et tandis que la tête appuyée sur les mains, ou les yeux égarés dans l’air, on en recherche la composition, l’esprit se fatigue, et l’on ne trace plus que des lignes insipides et froides.

1783. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

Destinée peut-être dans l’origine aux stéréotypes d’Herhan, et n’y ayant pu être employée à cause de son étendue, elle passa, dans tous les cas, aux mains du savant libraire M. […] Voici un passage dans lequel il exprime l’impression vive qu’il ressentit lorsque la belle Vierge lui fut présentée par son second guide, par ce cher Fauriel, qui la lui amenait par la main. […] Le troisième cahier de ma Bibliothèque indienne doit être entre vos mains, et je souhaite qu’il vous satisfasse. […] Ce ne fut qu’en 1836 qu’il publia le second des trois grands ouvrages qu’il avait de longue main préparés sur l’histoire du midi de la France. […] Ses manuscrits, transmis en des mains fidèles, seront publiés avec un choix éclairé95.

1784. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

Le baconien, qui n’a pas de si beaux mots à sa disposition, se contente de fabriquer une lampe de sûreté. —  Ils rencontrent sur le rivage un marchand naufragé qui se tord les mains. […] Entre les mains de Cicéron les dogmes des stoïciens et la dialectique des académiciens perdent leurs épines. […] Ils ont en main des développements tout faits, sorte d’échelles portatives qui s’appliquent également bien sur les deux faces contraires de la même question et de toute question. […] Macaulay a la main rude ; quand il frappe, il assomme. […] Les mathématiques deviennent, entre les mains des Anglais, un excellent moyen de raillerie, et l’on se rappelle comment le spirituel doyen, comparant par des chiffres la générosité romaine et la générosité anglaise, accablait Marlborough sous une addition.

1785. (1904) Zangwill pp. 7-90

« Ainsi, tantôt crayonnant une feuille blanche, devant lui, sur le buvard, et tantôt se frottant les mains l’une dans l’autre avec vivacité, ou roulant dans les doigts, et tordant, et meurtrissant je ne sais quel méchant bristol, le regard riant à travers le double verre du lorgnon bien posé sur le nez fort, le front large, la barbe cascadante grisonnante au menton, et les pieds chaudement fourrés dans les pantoufles, M.  […] Le ciel et le paysage lui tiennent lieu de conversation ; il n’a point d’autres poëmes ; ce ne sont point les lectures et les entretiens qui remplissent son esprit, mais les formes et les couleurs qui l’entourent ; il y rêve, la main appuyée sur le manche de la charrue ; il en sent la sérénité ou la tristesse quand le soir il rentre assis sur son cheval, les jambes pendantes, et que ses yeux suivent sans réflexion les bandes rouges du couchant. […] La botanique fait vivre artificiellement des produits végétaux qui disparaîtraient si la main de l’homme ne les soutenait incessamment. […] Quand Dieu sera en même temps parfait et tout-puissant, c’est-à-dire quand l’omnipotence scientifique sera concentrée entre les mains d’un être bon et droit, cet être voudra ressusciter le passé, pour en réparer les innombrables iniquités. […] Charles Péguy   Nous n’avons pas coutume ici de remercier nos collaborateurs, puisque nous travaillons tous d’un même cœur à la croissance et à la prospérité de ces cahiers ; on me permettra de faire une exception, pour ce cahier exceptionnel, et de dire combien nous sommes obligés au traducteur qui, ayant en mains, ayant traduit d’enthousiasme ce beau poëme, totalement inconnu de nous, d’enthousiasme nous l’apporta.

1786. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

On assure que le jour de cette exécution le Réalisme battra des mains et paraîtra encadré de vert. […] Nous avons les mains pleines de démonstrations et d’explications, nous combattrons jusqu’à ce que la cause soit gagnée, et nous la gagnerons. […] C’est justement la cause de ce petit, de ce prosaïque que nous prenons, et nous en ferons le bon et le grand, bon sens en main. […] Ulbach ont battu chaleureusement des mains à un pastiche tranquillede Victor Hugo. Il eût été bien plus étrange qu’ils eussent battu chaleureusement des mains à une œuvre originale.Ils n’ont pas encore d’habitudes contre nature.

1787. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

À chaque instant le tout de ce que nous sommes, j’entends la masse confuse et grouillante de nos appétits, est prise en main et attifée par lui. […] Mais tout-à-coup ce fut comme si elle était entrée, et cette apparition lui fut une si déchirante souffrance qu’il dut porter la main à son cœur. […] Et il fallait une Ariane aussi qui lui tînt la main et le guidât. […] Du premier coup, Proust posa la main sur la peinture et en enduisit complètement son gant. […] Et ce fut Swann, qui, avant qu’elle le laissât tomber, comme malgré elle, sur ses lèvres, le retint un instant, à quelque distance, entre ses deux mains.

1788. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 5482-9849

Quand plusieurs Beaux-Arts manquent, les autres ont rarement dequoi se soûtenir, parce que tous se tiennent par la main, & dépendent les uns des autres. […] On les peignoit dansantes, & se tenant par la main ; on n’entroit dans leurs temples que couronné de fleurs. […] Cet art ne fut commun que chez un très-petit nombre de nations policées, & encore étoit-il en très-peu de mains. […] Le Seigneur étend sa main & touche la bouche de Jérémie au chap. […] Vous calculez ; mais il faut que vous vous représentiez des unités redoublées, sans quoi il n’y a que votre main qui opere.

1789. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

— Alors, coupable, tu seras châtié par la main d’un juste. » Et le prince facétieux se met à battre le pauvre diable. […] … (Avec une âpre ironie)… J’ai peur de souiller ma main pure… Quelle pitié ! […] Car enfin, par-delà ce que se permet ce « bon diable d’homme », il n’y a guère que le cambriolage ou le vol à main armée ; et encore sont-ce des procédés moins lâches. […] Sois sage. » Or, dans un palais moresque, Mélissinde, esthète irréprochable, rêve, coiffée de lis, et des lis à la main, tel M.  […] Mais il se trouve que la paix et la guerre sont entre les mains de l’Anglais Humphry, et voici comment.

1790. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Depuis quelque temps, il était tourmenté du besoin de répandre au dehors ses chagrins, la plume à la main. […] Il se saisit d’un fusil de chasse qu’il trouva sous sa main ; heureusement l’arrivée d’un témoin déjoua cette tentative. […] Ne s’est-il pas amusé à nous donner de sa propre main la parodie des Werther et des d’Olban ? […] On dirait qu’il se sent atteint déjà par sa main glacée. […] Arrière la raison humaine, instrument trop imparfait ; selon lui, et qui se brise entre nos mains débiles !

1791. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

Ce tems-là passé, on n’est plus le même homme à cet égard ; et je crains fort qu’on ne sentît deux mains dans un ouvrage retouché ainsi après de longues années ; j’entens néanmoins, par retouché, des changemens considérables ; car j’avoüe que de petites corrections ne seroient pas sensibles. […] Cette coupe suspecte qui fait naître tant de divers mouvemens dans les personnages, et qui, passant d’une main à l’autre, cause de si grandes révolutions, est seule un spectacle considérable, et la présence des peuples le rend encore plus intéressant. […] Dans ma piece, par exemple, Inés refuse de fuïr avec dom Pedre qui entre dans le palais les armes à la main, et qui a laissé son pere aux prises avec les révoltés. […] Le second n’est que l’opposition du prince à ce mariage, et la découverte de son amour pour Inés, ce qui oblige le roi de s’en assurer, en la remettant entre les mains de la reine. […] Mais vous, monsieur, au lieu de rendre justice à ma franchise, vous abusez de ma pensée ; et elle devient fausse entre vos mains.

1792. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre IX. Du rapport des mots et des choses. — Ses conséquences pour l’invention »

Ils ne conçoivent pas que ces mots-là ne représentent rien de sensible, et ils manient les abstractions à pleines mains comme le maçon ses moellons.

1793. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — Z — Zola, Émile (1840-1902) »

Ils sont bien faibles et de seconde main, pas plus mauvais pourtant que les vers des hommes de mon âge qui s’obstinent à rimer.

/ 3046