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936. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 41, de la simple récitation et de la déclamation » pp. 406-416

La récitation des vers est donc un plaisir pour nos oreilles, au lieu que leur lecture est un travail pour nos yeux.

937. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 42, de notre maniere de réciter la tragédie et la comedie » pp. 417-428

Qu’on demande à l’actrice qui joüe le rolle d’Andromaque, si la scéne dans laquelle Andromaque prête à se donner la mort, recommande Astianax, le fils d’Hector et le sien à sa confidente, ne deviendroit pas encore plus touchante en y faisant paroître cet enfant infortuné, et en donnant lieu par sa présence aux démonstrations les plus empressées de la tendresse maternelle qui ne sçauroient paroître froides en une pareille situation.

938. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 46, quelques refléxions sur la musique des italiens, que les italiens n’ont cultivé cet art qu’après les françois et les flamands » pp. 464-478

Je pourrois alléguer en preuve, Commine et plusieurs autres écrivains, mais je me contenterai de citer un témoin sans reproche et dont la déposition est tellement circonstanciée, qu’elle ne laisse plus aucun lieu au doute.

939. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Conclusion »

Si les phénomènes sociologiques ne sont que des systèmes d’idées objectivées, les expliquer, c’est les repenser dans leur ordre logique et cette explication est à elle-même sa propre preuve ; tout au plus peut-il y avoir lieu de la confirmer par quelques exemples.

940. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Armand Baschet »

II Figurez-vous donc qu’au lieu du précieux, compendieux et sérieux Armand Baschet, qui ne rirait pas pour un empire, nous eussions ici affaire à quelque génie plein d’abandon et de sincérité, à quelque grand caricaturiste historique, — car un caricaturiste peut être un historien, puisque la caricature n’est qu’une certaine manière de regarder la vérité, — figurez-vous donc, par exemple, un esprit comme Thomas Carlyle, que je regarde comme l’Hogarth de l’Histoire, tombant sur l’histoire de Baschet, le Dangeau posthume de Louis XIII, et demandez-vous quels effets grotesques et charmants et quelle conclusion de savoureuse moralité humaine il aurait tirés de ce conte de La Fontaine historique, qui fut une réalité, et, pour les gens intéressés à l’achèvement de ce mariage resté en l’air, la plus plaisante des mélancolies !

941. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXII. Des éloges des hommes illustres du dix-septième siècle, par Charles Perrault. »

Il aurait pu ajouter que parmi les grands talents même, ou politiques, ou militaires, il y en a beaucoup qui, après eux, ne laissent point de traces ; au lieu que les monuments des arts restent.

942. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

De sa difficulté à écrire, ou plutôt à se satisfaire, est né un peu le problème qui l’inquiéta, sur lequel il parla délicieusement, et dont son influence communiqua de façon exagérée la hantise : S’il y a lieu d’écrire. […] Ainsi celles qu’il y a lieu de suivre du Toast Funèbre dans la Prose, celles du Tombeau de Baudelaire, la plume de la toque dans Un Coup de Dés. […] Feuillets de hollande ancien, ou en japon, ornement de consoles, en l’ombre ; ni quoi que ce soit, décidant l’essor extraordinaire en l’abstention d’aucune annonce, le fait à lieu, ou le miracle52 ». […] « L’absence d’aucun souffle unie à l’espace, dans quel lieu absolu vivais-je ? […] Victor Hugo, peut-être, avait choisi le lieu de son exil du même fonds romantique qui à Chateaubriand pour sa sépulture avait désigné le rocher du Grand-Bé, comme Chateaubriand déjà en fixant là son tombeau restait hanté par la Sainte-Hélène du Rival.

943. (1939) Réflexions sur la critique (2e éd.) pp. 7-263

Il appela jadis Marie Bashkirtseff Notre-Dame du Sleeping, et dans le même lieu son icone à lui se montre maintenant en bonne place. […] Style d’artiste, style qui est l’art pur plus que l’homme même et dans lequel l’homme cherche, au lieu et au contraire d’une expansion et d’une confidence, un départ, un alibi. […] Bertrand : « Toute pénétrée qu’elle est d’émotion lyrique, elle (la description de Flaubert) plane au-dessus des lieux et du temps. […] Enfin, il a tiré de ses notes une troisième mouture, l’inévitable roman, auquel il n’y a évidemment pas lieu d’attacher d’importance. […] La fin, très nourrie, du livre de Curtius peut provisoirement en tenir lieu.

944. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Et le moyen de ne pas regretter les romans qu’il eût composés en leur lieu et place, s’il eût été libre ! […] Il y a lieu d’insister sur ce caractère de réalisation, propre à la poésie de Gautier. […] Des tableaux, çà et là, brossés par les habitués du lieu, dénonçaient la libre fougue de la vingt-cinquième année. […] Il y a lieu, semble-t-il, de l’étendre aux grands artistes littéraires. […] Si l’interlocutrice avait visité le Capitole au lieu du Vatican, le Gladiateur mourant servait d’introduction.

945. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Mais il n’a pas le moindre doute sur les unités de temps et de lieu, et il donne dans une « noblesse » de plus en plus étroite et fausse. […] Il faut qu’il soit éloquent : mais c’est difficile d’être éloquent, surtout en pareil lieu. […] Renan, dans ce lieu, devant cette foule et par l’organe de ces histrions. […] C’est peut-être le lieu le plus noble et le plus glorieux du monde. […] On n’a rien trouvé de mieux pour nous donner l’idée d’un lieu de volupté et de délices.

946. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Les lieux de plaisir de l’Angleterre partagent cet aspect hideux et sont faits pour inspirer tout autre chose que le plaisir. […] Dans cette perplexité, il biaise, il équivoque, il insinue des « peut-être » ou des « il y aurait lieu » : « Peut-être ce jugement de Boileau ou de Johnson est-il trop sévère ? […] Sellière aura voulu sans doute se rendre propice ce revenant aimable et l’engager à élire domicile dans son château, comme le génie familier du lieu. […] Lord Herbert, monté selon ses souhaits, se rend au lieu du rendez-vous ; pas de lord de Walden. […] quel lieu sauvage, inhospitalier, que ce théâtre anglais primitif, où la sorcière Sycorax, c’est-à-dire la barbarie, exerçait tout à l’heure ses sortilèges abominables !

947. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

C’est une question, et il y aurait lieu de l’examiner. […] Ce n’est pas ici le lieu d’examiner la question. […] À tant d’emprunts j’ajouterais donc, si c’en était ici le lieu, le détail de tous ceux que Le Sage a faits à la Vie d’Estevanille Gonzalez et aux Aventures de Guzman d’Alfarache. […] J’ai quelque lieu de croire qu’il revit une partie de la traduction des Mille et une Nuits, de l’orientaliste Galland. […] Outre qu’en effet la vie de Prévost n’est pas le moins curieux de ses romans — ni le moins tragiquement dénoué, s’il en faut croire la légende — il y a lieu d’y rectifier, comme on le verra, plus d’un détail trop légèrement admis.

948. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Or, voici, d’autre part, un texte qui semble trancher la question : « Il ne faut pas, dit l’auteur anonyme du Traité de la disposition du poème dramatique, il ne faut pas introduire ni approuver la règle qui ne représente qu’un lieu dans la scène. […] Quoi qu’il y puisse manquer — et y manque beaucoup de choses, que ce n’est pas le lieu d’énumérer ici, — un grand pas n’en est pas moins accompli. […] Tout porte à croire qu’il est antérieur d’un ou deux ans aux Provinciales : « Autrefois il fallait sortir du monde pour être reçu dans l’Église, au lieu qu’on entre aujourd’hui dans l’Église en même temps que dans le monde. […] Mais ce n’est qu’un peu plus tard, sous la Régence et vers le milieu du siècle suivant, que cette littérature de tripots ou de mauvais lieux atteindra son épanouissement. […] Et elle n’a de raison et de lieu d’être qu’autant qu’elle conduit à des satisfactions solides : à la fortune, aux honneurs, à la réputation.

949. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome II

Un jour qu’il voulut s’en servir pour faire un paiement, au lieu des belles pièces d’or, il ne trouva que des feuilles de chêne : c’est ce qui serait arrivé à Pyrrhus, si Andromaque eût exécuté son stratagème. […] Elle n’a que vous seul ; vous êtes en ces lieux Son père, son époux, son asile, ses dieux. […] La fin de la tirade a surtout beaucoup plus d’élégance, d’éclat et d’énergie chez Racine : Elle n’a que vous seul : vous êtes en ces lieux Son père, son époux, son asile, ses dieux. […] Achille s’exprime partout avec une éloquence presque divine ; mais ses pensées et ses raisonnements ne répondent pas toujours à son style : quelquefois, au lieu du vrai sublime, au lieu de la véritable grandeur d’âme et de la noble intrépidité qui fait les héros, on trouve la jactance, la présomption, la témérité, les bravades, les chevaliers errants. […] il y a même lieu de s’étonner qu’il se soit conservé pendant plus d’un siècle au théâtre.

950. (1894) Études littéraires : seizième siècle

Maison de ville y construit belle et bonne, Les lieux publics devise tout nouveaux, Entre lesquels au milieu de Sorbonne, Doit, ce dit-on, faire la place aux veaux. […] Tels rustres, étant déjà si décriés qu’ils ne peuvent trouver lieu aux églises de Dieu, pour user de leurs ruses, prenant leur vol d’un autre côté, babillent contre nous impudemment, disant tout ce qui vient en leur bouche. […] Le bonheur est choix, la longévité est élection, la vie au lieu du néant est prédestination déjà. […] Boileau, Molière) ; de chercher, selon la saison ou l’humeur, des lieux différents pour le travail, mais toujours la solitude, cette épouse du génie. […] La nouvelle école y recommande d’adopter les grands genres par opposition aux petits, c’est-à-dire les genres cultivés par l’antiquité par opposition à ceux que les quatorzième et quinzième siècles ont honorés, épopée au lieu du roman, ode au lieu de la ballade ou du chant royal, épître au lieu de la lettre familière, satire dans le goût d’Horace au lieu du coq-à-l’âne, trop aimé de Marot.

951. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre III. — Du drame comique. Méditation d’un philosophe hégélien ou Voyage pittoresque à travers l’Esthétique de Hegel » pp. 111-177

Leurs personnages se replient sur eux-mêmes, se drapent dans leur propre individualité, et ont tous je ne sais quel accent lyrique178, au lieu que dans le théâtre grec les héros dramatiques, pleins d’une passion solide et généreuse, telle que l’intérêt d’une cité ou d’une armée, le devoir d’ensevelir un frère, de venger un père assassiné, étaient tout entiers à l’action extérieure. […] La terre ne fut plus qu’un lieu d’exil, la vie que le rêve d’une ombre, et la mort, anéantissant ce qui n’était point, prit la force d’une double négation ; elle délivra l’esprit de son élément fini, et lui ouvrit les portes de la vraie et réelle existence179. […] Le cœur de l’homme peut être aussi le lieu de leur bonne harmonie. […] C’est ici le lieu de citer une belle phrase de Schelling (Discours sur les arts du dessin).

952. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

En descendant le coteau par l’autre allée sinueuse, je trouvai, entourée d’un bosquet, une pierre sur laquelle étaient gravés les vers connus : Ici, dans le silence, l’amant pensait à son amante19… Et je me sentis dans un lieu classique. […] « En quatrième lieu, je nommerai mes adversaires raisonnés. […] Quand sa crue s’arrêtera, ce sera un chêne élevé, fort, élancé, mais il n’aura pas entre sa tige et sa couronne les proportions nécessaires pour être vraiment beau. — Si au contraire un chêne pousse dans un lieu humide, marécageux, et si le sol est trop nourrissant, de bonne heure, s’il a assez d’espace, il poussera dans tous les sens beaucoup de branches et de rameaux ; mais ce qui manquera, ce seront des forces qui puissent l’arrêter et le retarder, aussi ce sera bientôt un arbre sans nœuds, sans ténacité, qui n’aura rien d’abrupte, et, vu de loin, il aura l’aspect débile du tilleul ; il n’aura pas de beauté, du moins la beauté du chêne. — S’il croît sur la pente d’une montagne, dans un terrain pauvre et pierreux, il aura cette fois trop de nœuds et de coudes, c’est la liberté du développement qui manquera ; il sera étiolé, sa crue s’arrêtera de bonne heure, et devant lui on ne dira jamais : « Là vit une force qui sait nous en imposer. » — J’ai pu voir de très beaux chênes, dis-je, il y a quelques années, lorsque de Gœttingue je fis quelques excursions dans la vallée du Weser. […] Il y a aussi une autre alouette que l’on trouve dans les lieux solitaires, au midi des clairières ; elle a un chant très tendre, qui rappelle le son de la flûte, mais plus mélancolique.

953. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVe entretien. Ossian fils de Fingal »

Cuchullin donne le festin solennel ; viens partager sa fête. » « Swaran, d’une voix lugubre comme le murmure du Cromla avant la tempête, répondit : « Quand toutes les jeunes filles, odieuse Inisfail, étendraient vers moi leurs bras de neige, offriraient à ma vue leurs seins palpitants et rouleraient avec douceur des yeux pleins d’amour, immobile comme les montagnes de Loclin, Swaran restera dans ce lieu jusqu’à ce que l’aurore, se levant sur mes États, couronnée de jeunes rayons, vienne m’éclairer pour donner la mort à Cuchullin. […] Je pourrais bien, fille de la mer, te cacher dans quelque grotte solitaire et profonde ; mais jamais Fingal n’a fui des lieux où le danger menace. […] si tu es près de ces lieux, parmi les enfants de ta patrie, ou si tu es assise sur un nuage au-dessus des mâts et des voiles de Loclin, viens me visiter dans mes songes. […] « De quel lieu, dit-il, viennent ces armes étrangères ?

954. (1899) Les industriels du roman populaire, suivi de : L’état actuel du roman populaire (enquête) [articles de la Revue des Revues] pp. 1-403

Et si l’on poussait l’enquête, en dehors de l’Europe, jusqu’à l’extrême Orient, on verrait qu’au Japon tous les romans regorgent de crimes épouvantables et de scènes de mauvais lieux ; on aurait même à constater, en bonne justice, que, dans ladite spécialité, ce sont encore les conteurs japonais qui tiennent la corde. […] Ce sont de vieux romans au complet qu’ils rebaptisent d’une étiquette toute fraîche et dont ils ne traînent pas à toucher les revenus, en lieu et place des auteurs défunts. […] Il rassemble son équipe, découpe la besogne, distribue à chacun le lambeau qui lui convient, et se réserve pour lui-même de soigner les raccords en temps et lieu. […] Lorsqu’un beau crime se commet, c’est jour de liesse : on l’annonce en gros caractères, on multiplie les détails, on donne le plan des lieux, on conte les habiletés et les ruses de l’assassin, on avertit ceux qui seraient tentés de l’imiter des négligences qui l’ont fait prendre.

955. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1890 » pp. 115-193

» Dimanche 26 janvier Tissot nous contait ce soir, chez Daudet, qu’il avait été au moment d’acheter 7 000 francs, une petite montagne près de Jérusalem, et d’y bâtir un atelier, où il aurait imprimé et gravé son livre : un atelier, qui, disait-il, serait devenu un atelier d’art religieux, en même temps qu’une colonie française, faisant revivre l’influence de notre pays dans les lieux saints. […] Il peint l’enrôlement, où on demande à l’enrôlé d’où il est, et où on écrit son lieu de naissance, sans y croire, où on lui demande son nom, et où il donne dix fois sur cent, le nom de Weber ou de Meyer, et où on lui dit : « Non, il y en a trop, tu t’appelleras Martin ou Lafeuille » : enrôlement où l’on n’écoute pas ce que l’enrôlé raconte de sa vie antérieure. […] Samedi 3 mai Je ne connais rien de bête, comme ces reconstitutions d’un monument historique dans un lieu autre, que celui où il a été élevé jadis, et cette Tour du Temple, refaite au bas de Passy, pour la grande Exposition de l’année dernière, jette un complet désarroi dans ma cervelle d’historien de la Révolution, quand un peu somnolent, je l’aperçois à travers la buée de la vitre du fiacre qui me ramène, le soir, chez moi. […] Ç’a été d’abord les romans naturistes que j’ai écrits, puis les pièces révolutionnaires que j’ai fait représenter, enfin en dernier lieu le Journal.

956. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIVe entretien. Épopée. Homère. — L’Odyssée » pp. 445-524

Le poète, avec la rapidité du vol de la pensée, qui ne connaît point de distance, plane tantôt sur un lieu, tantôt sur un autre ; maintenant avec Ulysse, tout à l’heure avec Pénélope ; aujourd’hui à Troie ou à Argos, demain à Ithaque. […] Non, mais c’est qu’il a vécu par son cœur sensible et par son génie observateur dans toutes les familles ; c’est que tous les lieux et tous les temps se ressemblent par ces intimités de la maison et par ces mystères d’intérieur qui sont les mêmes pour tous les hommes pétris de la même chair et du même sang par la même nature !  […] XVI Le lendemain, à la même heure et au même lieu, notre mère rouvrit le vieux livre. […] la nature n’a pas changé en trois mille ans ; l’amour du lieu natal et du toit de son père est toujours la passion et la vertu même du cœur des enfants ! 

957. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VII : Instinct »

Alors je les chatouillai en les frappant légèrement avec un cheveu, autant que je pus, de la même manière que les Fourmis avec leurs antennes, l’excrétion n’eut pas encore lieu. […] Quand le nid n’est qu’un peu dérangé, les esclaves sortent parfois ; de même que leurs maîtres, elles paraissent très agitées pour défendre la cité ; et lorsque le trouble survenu est plus important, et que les larves et les œufs sont en danger, elles travaillent avec ardeur pour les transporter en lieu de sûreté. […] Un autre jour, mon attention fut attirée par une vingtaine de Fourmis sanguines qui se rassemblaient en troupe vers un même lieu. […] Alors, je déterrai dans une autre fourmilière de Fourmis noir-cendré un petit nombre de nymphes et les semai sur un terrain nu auprès du lieu du combat.

958. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

Tout le monde sçait bien que les chinois n’imprimoient qu’avec des planches gravées, et qui ne pouvoient servir que pour imprimer une seule chose, au lieu que les caracteres séparez, sans compter les autres commoditez qu’ils donnent aux imprimeurs, ont celle de pouvoir servir à l’impression de plusieurs feüilles differentes. […] Depuis le renouvellement des arts, on n’a jamais vû en quelque lieu que ce soit, le grand nombre de sculpteurs excellens, et de bons graveurs en tout genre et en toute espece, qu’on a vû en France sous le regne du feu roi. […] Les ouvrages de ces anciens poëtes qui furent un des premiers liens de la societé, et qui donnerent lieu à la fable d’Amphion, ne contenoient pas des maximes plus sages que les odes de l’auteur dont je parle, à qui la nature ne sembloit avoir donné du génie que pour parer la morale et pour rendre aimable la vertu. […] On peut croire cependant que les sculpteurs les plus habiles y furent employez, quand ce n’auroit été que par égard pour le lieu où l’on l’élevoit.

959. (1753) Essai sur la société des gens de lettres et des grands

Un poète, ce me semble, ne serait guère vain dans une île déserte, au lieu qu’un géomètre pourrait encore l’être. […] On a beau se flatter que les étrangers sont une espèce de postérité vivante dont le suffrage impartial en imposera à des compatriotes aveugles ou de mauvaise foi ; on ne pense pas que plus on se rapproche des étrangers, plus ils perdent ce caractère de postérité, pour lequel la distance des lieux est du moins nécessaire, au défaut de la distance des temps. […] Un homme de lettres, plein de probité et de talents, est sans comparaison plus estimé qu’un ministre incapable de sa place, ou qu’un grand seigneur déshonoré : cependant qu’ils se trouvent ensemble dans le même lieu, toutes les attentions seront pour le rang, et l’homme de lettres oublié pourrait dire alors comme Philopœmen, je paie l’intérêt de ma mauvaise mine . […] Mais ce que les grands ne doivent point oublier quand ils veulent faire du bien aux lettres, c’est que la considération personnelle est la récompense la plus réelle des talents, celle qui met le prix à toutes les autres ou même qui en tient lieu.

960. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

Pendant la paix, au retour des chasses, il vient souvent trouver Mme de Maintenon en ce lieu de retraite, mais toujours après s’être donné le temps de mettre, par respect pour les Dames, un habit décent. […] malgré ses défauts, on y est mieux qu’en aucun lieu du monde. » Elle avait goûté de tout ; elle était rassasiée de tout.

961. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

On y distingue pourtant une Visite chez un grand homme, c’est-à-dire chez le poète Le Brun-Pindare qui habitait alors au Louvre un de ces logements si peu dignes du lieu, et qu’on accordait aux peintres, aux gens de lettres. […] [NdA] Voici la fin du morceau : Quel contraste de voir sur ce lit fortuné, Au lieu du blond Phœbus, digne amant de Daphné, Un étique Apollon, à l’œil terne, au teint pâle, Étalant deux grands bras sur un linge assez sale, Et coiffé d’un velours aux mites échappé, Que ceint en auréole un vieux galon fripé !

962. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie de Maupertuis, par La Beaumelle. Ouvrage posthume » pp. 86-106

Maupertuis, président perpétuel de l’Académie de Berlin, a rendu de vrais services qui ont été appréciés par des juges compétents, et, en dernier lieu, par le regrettable M.  […] De plus, le lieu qui vous rappelle sans cesse l’objet de votre affliction n’est pas propre à l’affaiblir, et le séjour de Berlin l’effacera.

963. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.). Guerre des Barbets. — Horreurs. — Iniquités. — Impuissance. »

Catinat écrivait au roi au mois d’octobre 1694, en insistant sur la nécessité d’assurer ses communications : « Il ne faut plus regarder les Barbets comme les simples Vaudois retirés dans les montagnes : c’est un grand nombre de sujets de Sa Majesté, des vagabonds de toute nation, des déserteurs de ses troupes, qui n’ont ni feu ni lieu, ni établissement, bien armés, bien vêtus, qui pendant douze lieues peuvent entreprendre sur vos convois, sur vos entrepôts. » Il écrivait encore au roi le 25 mars 1695 : « On peut détruire les habitations des Barbets, on ne réduira jamais les Barbets ». […] C’est pourtant là une affreuse conséquence de la guerre, qu’il y ait un lieu au monde où le nom de Catinat soit en exécration, comme celui de Mélac dans le Palatinat.

964. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite et fin.) »

Il ne semble pas qu’on doive en faire aucun reproche à Catinat : il exposa et fit goûter toutes ses raisons à Chamlay, qui vint sur les lieux pour en juger par lui-même. […] À cette date, l’on ouvrit le cercueil pour enlever le plomb ; mais les gens du lieu, toujours pleins de vénération pour les restes illustres, les remirent religieusement dans la tombe.

965. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

C’était pour lui l’enluminure et, par conséquent, l’altération de la vérité ; c’était la pompe et la vanité, substituées à la raison et à la logique ; c’était le succès de la cause, sacrifié au succès de l’orateur ; enfin, la déplorable phrase, au lieu du mouvement du cœur et de l’esprit. […] Coulmann s’étaient querellés en promenade, s’étaient arraché les cheveux, « mais qu’on avait peine, tant la couleur était la même, à savoir à qui appartenaient les uns et les autres. » Voilà donc un jeune homme de très bon air, fort bien accueilli ; fort goûté en tout lieu, et qui dut être, en effet, parfaitement aimable.

966. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Sa vie est sans doute exprimée dans ses vers ; elle s’y reflète en éclairs lumineux et brûlants ; elle y éclate en cris d’amour ou de douleur ; mais il m’a semblé, après un premier coup d’œil sur ces autres témoignages manuscrits, qu’il y avait lieu à faire connaître plus en détail non plus le poète, mais la femme, et qu’elle ne perdrait pas à être suivie de près dans ses traverses, dans ses labeurs de chaque jour, et jusque dans les plus touchantes misères de la réalité. […] Tel était alors le suffrage des bons esprits classiques, et je n’en fais pas fi quand il est à sa place et en son lieu.

967. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

Note C’est ici le lieu tout naturel de parler de mes premières relations avec George Sand. […] Déjà l’on a pu voir, dans les précédents morceaux de critique, à quel point, même après m’être engagé d’abord par une admiration sincère, je ne craignais pas de revenir et de poser mes réserves quand il y avait lieu.

968. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

Au moment où ce navire Argo qui portait les poëtes, après maint effort, maint combat durant la traversée contre les prames et pataches classiques qui encombraient les mers et en gardaient le monopole, — au moment où ce beau navire fut en vue de terre, l’équipage avait cessé d’être parfaitement d’accord ; l’expédition semblait sur le point de réussir, mais on n’apercevait guère en face de lieu de débarquement ; les principaux ouvraient des avis différents, ou couvaient des arrière-pensées contraires. […] Y a-t-il lieu, en ces temps plus graves, de songer à reconstituer quelque école artificiellement paisible et rêveuse, de tenter encore à l’horizon cette petite colonie qui nous apparut dans un mirage du matin ?

969. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

Pour qui se complaît à ces ingénieuses et tendres lectures ; pour qui a jeté quelquefois un coup d’œil de regret, comme le nocher vers le rivage, vers la société dès longtemps fabuleuse des La Fayette et des Sévigné ; pour qui a pardonné beaucoup à Mme de Maintenon, en tenant ses lettres attachantes, si sensées et si unies ; pour qui aurait volontiers partagé en idée avec Mlle de Montpensier cette retraite chimérique et divertissante dont elle propose le tableau à Mme de Motteville, et dans laquelle il y aurait eu toutes sortes de solitaires honnêtes et toutes sortes de conversations permises, des bergers, des moutons, point d’amour, un jeu de mail, et à portée du lieu, en quelque forêt voisine, un couvent de carmélites selon la réforme de sainte Thérèse d’Avila ; pour qui, plus tard, accompagne d’un regard attendri Mlle de Launay, toute jeune fille et pauvre pensionnaire du couvent, au château antique et un peu triste de Silly, aimant le jeune comte, fils de la maison, et s’entretenant de ses dédains avec Mlle de Silly dans une allée du bois, le long d’une charmille, derrière laquelle il les entend ; pour qui s’est fait à la société plus grave de Mme de Lambert, et aux discours nourris de christianisme et d’antiquité qu’elle tient avec Sacy ; pour qui, tour à tour, a suivi Mlle Aïssé à Ablon, où elle sort dès le matin pour tirer aux oiseaux, puis Diderot chez d’Holbach au Granval, ou Jean-Jacques aux pieds de Mme d’Houdetot dans le bosquet ; pour quiconque enfin cherche contre le fracas et la pesanteur de nos jours un rafraîchissement, un refuge passager auprès de ces âmes aimantes et polies des anciennes générations dont le simple langage est déjà loin de nous, comme le genre de vie et de loisir ; pour celui-là, Mlle de Liron n’a qu’à se montrer ; elle est la bienvenue : on la comprendra, on l’aimera ; tout inattendu qu’est son caractère, tout irrégulières que sont ses démarches, tout provincial qu’est parfois son accent, et malgré l’impropriété de quelques locutions que la cour n’a pu polir (puisqu’il n’y a plus de cour), on sentira ce qu’elle vaut, on lui trouvera des sœurs. […] Mais c’est ici le lieu de dire que Mlle de Liron était belle, et comment elle l’était ; car sa beauté va s’altérer avec sa santé jusque-là si parfaite, et quand Ernest la reverra après le terme prescrit, malgré l’amour d’Ernest et ses soins de plus en plus tendres, elle lira involontairement dans ses yeux qu’elle n’est plus tout à fait la même.

970. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre II. De l’expression »

Junon chez lui, à l’occasion, parle en marchande et compare la queue du paon « à la boutique d’un lapidaire. » Il tourne volontiers au style trivial que sa trivialité rend narquois ; son amoureux est tiraillé entre deux veuves, « l’une encore verte, et l’autre un peu bien mûre » ; il est de moyen âge et « tire sur le grison », mais « il a du comptant, et partant de quoi choisir. » Ailleurs la goutte plante le piquet sur l’orteil d’un pauvre homme, pendant que l’araignée « se campe sur un lambris, comme si de ces lieux elle eût fait bail à vie. » Tout son style est composé ainsi de familiarités gaies ; rien n’est plus efficace pour mettre en notre cerveau l’image des objets ; car en tout esprit les images familières se réveillent plus aisément que les autres, et les images gaies naissent plus promptement que toutes les autres dans l’esprit des Français. […] Les premières, dit-on, s’en allèrent loger          Au mont Hymette et se gorger Des trésors qu’en ces lieux les zéphyrs entretiennent.

971. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

Au lieu que, sans être économiste, on sera charmé de Montchrétien244: son traité d’Économie politique, remis en lumière dans ces dernières années, est une des belles œuvres du temps. […] Il ne put tenir Sancerre contre le prince de Condé, puis essaya de soulever la Normandie, et fut tué au bourg des Tourailles (7 oct. 1621) par le seigneur du lieu, Claude Turgot.Éditions :les Tragédies, Rouen, in-8, s. d. (1601) ; Rouen, 1604 ; réimprimées par M. 

972. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre IX, les mythes de Prométhée »

L’un entre et l’autre sort, et jamais ce lieu ne les renferme tous deux à la fois. […] Médée, la sorcière tragique, herborisant dans les lieux sauvages, venait cueillir, au pied de son gibet, une plante qui germait de la terre rougie par son sang, pour en extraire des philtres terribles.

973. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. Tome IXe. » pp. 138-158

Mais autre temps, autres lieux, autre esprit ! […] Le soldat anglais, bien nourri, bien dressé, tirant avec une remarquable justesse, cheminant lentement parce qu’il est peu formé à la marche et qu’il manque d’ardeur propre, est solide, presque invincible dans certaines positions où la nature des lieux seconde son caractère résistant, mais devient faible si on le force à marcher, à attaquer, à vaincre de ces difficultés qu’on ne surmonte qu’avec de la vivacité, de l’audace et de l’enthousiasme.

974. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Diderot. (Étude sur Diderot, par M. Bersot, 1851. — Œuvres choisies de Diderot, avec Notice, par M. Génin, 1847.) » pp. 293-313

J’avais en une journée cent physionomies diverses, selon la chose dont j’étais affecté : j’étais serein, triste, rêveur, tendre, violent, passionné, enthousiaste ; mais je ne fus jamais tel que vous me voyez là… » Et il ajoute, car il nous importe dès l’abord de le bien voir : « J’avais un grand front, des yeux très vifs, d’assez grands traits, la tête tout à fait d’un ancien orateur, une bonhomie qui touchait de bien près à la bêtise, à la rusticité des anciens temps. » Représentons-nous donc Diderot tel qu’il était en effet, selon le témoignage unanime de tous ses contemporains, et non tel que l’ont fait les artistes ses amis, Michel Van Loo et Greuze, qui l’ont plus ou moins manqué, à ce point que la gravure d’après ce dernier le faisait ressembler à Marmontel : « Son front large, découvert et mollement arrondi, portait, nous dit Meister, l’empreinte imposante d’un esprit vaste, lumineux et fécond. » On ajoute que Lavater crut y reconnaître des traces d’un caractère timide, peu entreprenant ; et il y a lieu de remarquer en effet qu’avec l’esprit hardi, Diderot avait le ressort de conduite et d’action un peu faible. […] La tête de Psyché devrait être penchée vers l’Amour, le reste de son corps porté en arrière, comme il est lorsqu’on s’avance vers un lieu où l’on craint d’entrer, et dont on est prêt à s’enfuir ; un pied posé, et l’autre effleurant la terre.

975. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Mémoires du cardinal de Retz. (Collection Michaud et Poujoulat, édition Champollion.) 1837 » pp. 40-61

Bazin, en lisant cela, n’ait pas à l’instant reconnu et salué Retz comme un maître, sauf ensuite à le contredire en bien des cas, s’il y avait lieu ; mais l’historien qui rencontre, dès les premiers pas, dans le sujet qu’il traite, un tel observateur et peintre pour devancier, et qui n’en tire sujet que de s’efforcer à tout amoindrir et à tout éteindre après lui, me paraît faire preuve d’un esprit de taquinerie et de chicane qui l’exclut à l’instant de la large voie dans la carrière. […] Il est même à croire, comme il nous l’a très bien expliqué, que, dans un temps paisible, sa réputation d’archevêque aurait eu beaucoup plus à souffrir, car il aurait eu peine à dissimuler longtemps ses vices et ses désordres, au lieu qu’ils se perdaient dans la confusion inévitable d’une guerre civile.

976. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le Brun-Pindare. » pp. 145-167

Or, chez les modernes, à part de très rares circonstances, une telle réunion de sentiments, un tel accord sympathique n’a guère lieu que dans le genre de la chanson, à table et au dessert. […] Il sentait, du reste, tout ce qu’il y avait de discordant dans un tel lieu rapproché des circonstances où il le proférait : « Comment parler d’avenir, disait-il, à des gens que le présent dévore ? 

977. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Michaud, de l’Académie française. » pp. 20-40

C’est alors qu’il conçut l’idée de faire le voyage d’Orient et de Jérusalem pour vérifier quelques points restés douteux de son histoire, et pour visiter les lieux témoins des grandes scènes qu’il avait racontées. […] L’objet de mon voyage lointain pourrait bien ne pas trouver grâce devant une piété sévère, et, si j’avais la dévotion et les scrupules de nos vieux pèlerins, peut-être me faudrait-il revenir une seconde fois aux saints lieux et faire un nouveau pèlerinage pour expier ce qu’il y a de mondain et de profane dans celui que j’achève maintenant.

978. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — I. » pp. 41-62

Ceci devait mourir dans le même lieu qui l’a fait naître ; mais ceux qui vivent dans une société ont des devoirs à remplir ; nous devons compte à la nôtre de nos moindres amusements. » Il semble même qu’en terminant ce mémoire, Montesquieu s’attache trop à diminuer le mérite de l’observateur, lequel a souvent besoin de toute sa subtilité d’esprit et de son invention ingénieuse pour amener le fait sous son regard : Il ne faut pas avoir beaucoup d’esprit, disait Montesquieu, pour avoir vu le Panthéon, le Colisée, des Pyramides ; il n’en faut pas davantage pour voir un ciron dans le microscope ou une étoile par le moyen des grandes lunettes ; et c’est en cela que la physique est si admirable : grands génies, esprits étroits, gens médiocres, tout y joue son personnage. […] que la louange est fade, s’écrie-t-il, lorsqu’elle réfléchit vers le lieu d’où elle part ! 

979. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

De ce que Romulus prit, dit-on, le bouclier des Sabins, qui était large, au lieu du petit bouclier argien dont il s’était servi jusqu’alors, Montesquieu en conclut déjà à un certain usage et à une certaine politique des Romains, qui consistait à emprunter successivement des vaincus ce que ceux-ci avaient de meilleur. […] Il avait passé en dernier lieu presque trois années de suite dans ses terres (1743-1746), travaillant sans relâche.

980. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — I. » pp. 127-148

Je m’habillais simplement, et on ne me voyait dans aucun des lieux de réunion oisive. […] Dans les premiers articles qu’il donnait une fois par semaine dans les gazettes du lieu, il s’efforçait de polir les mœurs, les usages, de corriger les mauvaises et inciviles habitudes, la grosse plaisanterie, les visités trop longues et importunes, les préjugés populaires superstitieux et contraires aux bonnes pratiques.

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