On peut citer de Baudelaire d’étranges exemples de ce culte, ainsi l’emploi d’une terminologie liturgique pour s’adresser à une maîtresse et célébrer une volupté : Je veux bâtir pour toi, Madone, ma maîtresse, Un autel souterrain au fond de ma détresse… Ou encore cette « prose » curieusement travaillée en style de la décadence latine qu’il a intitulée : Francisco meæ laudes et dédiée « à une modiste érudite et dévote ». […] Une nausée universelle devant les insuffisances de ce monde soulève le cœur des Slaves, des Germains et des Latins. […] De là cette charmante pudeur, ce quelque chose de voilé, de sobre, d’exquis, à égale distance de la rhétorique du sentiment trop familière aux races latines, et de la naïveté réfléchie de l’Allemand… La réserve apparente des peuples celtiques, qu’on prend pour de la froideur, tient à cette timidité intérieure qui leur fait croire qu’un sentiment perd la moitié de sa valeur quand il est exprimé et que le cœur ne doit avoir de spectateur que lui-même. » Faut-il attribuer ces prédispositions de l’âme celtique à l’héréditaire influence d’un climat mélancolique et qui multiplie autour de l’homme les impressions vagues et ensorcelantes ? […] Il paraît avoir désigné d’abord l’impression des paysages vaporeux et de la poésie songeuse du Nord, par contraste avec les paysages à vives arêtes et la poésie à lignes précises de nos contrées latines. […] Cette prose, c’était jadis la prose latine ; aujourd’hui c’est la nôtre.
Des six premiers livres que contiennent ces deux volumes, il n’en est pas un dont la fable ne soit plus ou moins directement imitée d’un original espagnol italien ou latin, que ce soit le Marcos d’Obregon d’Espinel, ou l’Âne d’or d’Apulée.
Ils choisissent les mots d’après leur racine et leur usage, n’emploient que les plus simples, imitent partout le style latin et antique, poursuivent sans cesse l’exactitude et la clarté. […] Il aime tant les beaux-arts qu’il a songé à les réunir tous en paquet dans sa maison : temple gothique, temple grec à toit chinois, harpe éolienne, grotte et cascade artificielle, nymphe endormie, pyramide de rochers, bois sacré orné de fontaines latines ; les petits princes allemands, imitateurs de Versailles, se complaisaient aussi dans ces accumulations grotesques ; un marchand de bric-à-brac n’eût pas fait mieux. […] Les chroniqueurs latins du moyen âge ont un mot pour désigner les barons : Miles, armiger ; en effet, ce mot est le seul qui donne à ces mœurs leur vrai caractère. […] Il a l’esprit meublé de beaux passages grecs, latins, italiens, espagnols, et il en cite sans cesse ; il raille et badine agréablement, mais sans pointe perçante et avec un peu de longueur.
Je serais moins sévère pour des néologismes qui ne font que compléter une famille de mots, ou qui vont, dans le tombeau de la langue latine, chercher des frères vivants. Infliction ne me déplaît pas ; nitescent et turgescent plairont-ils aussi bien à ceux des lecteurs qui n’entendent pas le latin ? […] À quelle forme consacrée de la langue latine répond le sunt lacrymæ rerum de Virgile ? […] Et pourtant des Latins la Muse modérée De plain-pied dans nos mœurs a tout d’abord l’entrée. […] La Muse des Latins, c’est de la Grèce encore ; Son miel est pris des fleurs que l’autre fit éclore.
Sous prétexte qu’on est « artiste », faut-il prendre sa belle-mère en haine parce qu’elle ne vous a pas donné chambre à part, — les reines et les bergers se marient, après tout, comme disait le latin, liberorum quærendorum causa, — ou même parce qu’elle aura meublé le vestibule d’acajou garni de velours d’Utrecht ? […] C’est comme le latin de nos collèges : une brusque métaphore de Tacite y rencontre une belle, limpide, et souvent verbeuse expression de Cicéron ; Salluste y heurte Tite-Live ; et c’est du Tite-Live, et du Salluste, et du Cicéron, et du Tacite ; et toutefois ce n’est pas du latin ! […] Car, non seulement il faut convenir qu’il y a des arts protestants, et qu’en général ils sont naturalistes ; mais, en Hollande comme en Angleterre, on pourrait presque dire que c’est pour avoir poussé le naturalisme jusqu’à ses dernières conséquences, ou parfois même au-delà, qu’ayant rencontré des chefs-d’œuvre, un peintre comme Jean Steen, par exemple, ou Frans Hals, un romancier comme Fielding ou Dickens, font hésiter la critique, et suspendent la condamnation que nous nous sentirions autrement portés d’instinct à prononcer — Latins et catholiques au fond que nous sommes — contre les prétentions du naturalisme dans l’art. […] La théorie de l’art pour l’art est essentiellement latine.
Dans le latin, dans le grec, et jusque dans l’allemand tolérer c’est porter, supporter, élever, soutenir, soulever un fardeau de peine. […] Ou encore c’est ce qui est le plus près de la création ; ce qui est le plus récent, au sens latin du mot recens. […] Dans le latin, dans le français. […] Et les quelques mots qu’elle porte, généralement du latin, évoquent un bien autre voyage.
Et de fait, en lisant dernièrement dans un article la phrase suivante : « Ces riches bourgeois saginatés qui passent la vespertine à lustrer de sombres compites », je ne pus m’empêcher de constater que cette langue, si elle n’est déjà plus latine, n’est vraiment et heureusement pas encore devenue française. […] … Je crois qu’il nous forge ici quelque langage diabolique ; il ne fait qu’écorcher le latin et croit ainsi pindariser et il lui semble être quelque grand orateur en français ! […] Lucien Muhlfeld, que le théâtre soit si près de sa fin et je pense qu’il vivra tant que la race latine prédominera en France ; nous tenons de nos ancêtres de Rome le goût des spectacles et un fait mis à la scène et bien raconté, une thèse éloquemment soutenue, nous captiveront toujours plus que toutes les spéculations philosophiques ou les déclamations poétiques ; le théâtre changera, c’est indubitable, car tout change, mais sa fin n’est pas, je crois, si prochaine.
L’auteur de l’Ethique apprenait alors la langue latine à Amsterdam, d’un fameux médecin, François Van den Ende, qui lui avait offert ses soins et sa maison. « Van den Ende avait une fille unique qui possédait elle-même la langue latine si parfaitement, aussi bien que la musique, qu’elle était capable d’instruire les écoliers de son père en son absence, et de leur donner leçon.
Certes il est marqué par l’accent, et non par la quantité, et bien qu’il lui manque cet élément de force soutenue que constitue la terminaison dissyllabique du vers latin, et qu’il ait, dès lors, une tendance à former des couplets, la facilité à rimer qui résulte de ce changement n’est pas un mince avantage. […] Le latin, ainsi qu’il le fit remarquer, gagnait plus que l’anglais, à l’impression, parce que les queues des caractères ne tombaient pas aussi souvent au-dessous de la ligne. […] Appréciations dans le beau sens latin du mot, tel est le titre donné par M.
Pour moi, si je fais mon métier de gagner de l’argent, je tâcherai de n’entretenir personne du vif désir que j’aurais d’y réussir ; car c’est un dégoûtant entretien. » Henri Meyer, tout bon commis qu’il est au comptoir, a donc le cœur libéral, les goûts nobles ; il a pris, à ses moments perdus, un maître de violon ; il songe aux agréments permis, ne veut pas renoncer aux fruits de sa bonne éducation, et se soucie même d’entretenir un peu son latin.
Elle n’avait que dix-huit ans quand elle périt, et déjà son nom était célèbre par sa profonde connaissance des langues anciennes et modernes ; on a des lettres d’elle en Latin et en Grec qui supposent des facultés bien rares à son âge.
Il faut encore remarquer que les idées du Tasse ne sont pas d’une aussi belle famille que celles du poète latin.
Ce jeune homme n’était connu de personne, était ordinairement mal vêtu, et sortait peu de sa maison, s’appliquant continuellement à l’étude du latin.
Le même jour, plus de vingt sonnets19 furent attachés autour de mon Persée ; et, les jours suivants, il y en eut une grande quantité de faits en grec et en latin, par les professeurs et les écoliers de l’université de Pise, qui étaient venus en vacances.
De bonne heure il conçut l’idée de naturaliser dans la littérature et la poésie romaine certaines grâces et beautés de la poésie grecque, qui n’avaient pas encore reçu en latin tout leur agrément et tout leur poli, même après Catulle et après Lucrèce.
On put croire d’abord que le jeune poète parnassien n’avait vu dans ces récits qu’un exercice amusant et difficile de versification, quelque chose comme le plaisir d’écrire en français des vers latins (si j’ose cette catachrèse) sur des sujets réfractaires à la poésie.
Préface Ce court Essai sur la vie et les œuvres de Jonathan Swift a été traduit du français en latin pour répondre aux exigences du doctorat ès-lettres.
Encore vaut-il mieux chercher nos pères dans Le Cabinet satyrique 37, que dans l’histoire de France écrite en très beau latin, par M. le président de Thou.
Il semblait que le génie catholique, qui est le génie latin, eût tué le génie français.
Bossuet et ses émules symbolisent à merveille l’éternelle rhétorique catholique et latine, se payant des mots et d’attitudes, l’erreur battue en brèche, qui appelle à son secours la violence et la mauvaise foi, le faux esprit de Rome s’efforçant d’étouffer le sentiment national.
Bergeret est cet homme pâle, à la poitrine étroite, aux cheveux très fins et un peu rares, à l’œil très intelligent et au sourire triste, qui professe la littérature latine à la Faculté des Lettres. […] Il se développera à travers tout le moyen âge, l’idée des deux cités devenant un dogme ; il se renouvellera et se revivifiera avec ce retour aux sentiments et aux idées du Christianisme primitif qui s’appelle la Réforme ; enfin, il prendra l’apparence d’un « droit », et se donnera pour un « droit » dans les pays d’origine latine, dans les pays de droit romain où l’influence de l’esprit légiste est demeurée forte et où toute idée prend comme naturellement la forme d’une idée juridique ; et c’est sous cette forme qu’il éclatera dans la Révolution française. […] Il faudrait dire : « Il y a », en latin « Est ». […] Il lut du français, de l’allemand, du latin, du grec et de l’hébreu. […] Zola, qui aime à se dire « latin », d’être ultramontain le moins du monde.
Ce sont des lignes qui ne tombèrent pas dans les oreilles sourdes, et, quoique le mot fût surtout applicable à ce qu’on dit de la décadence latine, on arriva à l’appliquer à notre époque, par dérivation plutôt politique, l’Empire, le Bas-Empire, Paris, Byzance et autres sornettes. […] Il y avait certainement une curiosité vers des époques qu’on disait faisandées, encore que leur logique d’être eut été depuis longtemps démontrée par Amédée Thierry ; les recherches de Fustel n’étant pas sans écho, la petite pièce latine des Fleurs du Mal portait ses fruits ; de divers côtés on préparait des anthologies des pièces de basse latinité ; ce fut plus tard M. de Gourmont qui réalisa, pour sa part, ces projets antérieurs que sans doute il ignora. […] Cette pochade dut être faite dans des conditions extraordinaires de rapidité ; l’ironie des auteurs s’attaquait à quelques manières très extérieures de Verlaine, de Mallarmé, de Tailhade, de Laforgue ; je noterai, ce qui est important, qu’aucune espèce d’allusion n’y est faite au vers libre alors non divulgué ; je confesse sans la moindre honte que je n’y suis pas visé, d’autres non plus n’apparurent pas devant la rétine de Vicaire et de Bauclair qui, en somme, dans leurs jeux d’esprit, n’usèrent guère d’autre document que Lutèce, petit journal d’art très amusant que rédigeaient, en donnant surtout des vers de Verlaine, de Moréas, et de Morice, Léo Trèzenick, l’ancien hydropathe Pierre Infernal, dessinateur au chapeau breton, devenu imprimeur et directeur de journal, au Quartier Latin, simultanément comme en province. […] Jules Grévy inconnu, farci de latin et ami de poètes. […] Quelle ne devait pas être la séduction de l’œuvre de Baudelaire sur un esprit de cette vigueur ; le vers mentalisé, spiritualisé, d’une matière presque minéralisée à l’exécution, des strophes où, comme sur un fond de Vinci, des cieux étranges apparaissent : Adonaï, dans les terminaisons latines, Des Cieux moirés de vert baignent les Fronts vermeils.
Dieu nous garde de remuer le bric-à-brac enfermé dans les casiers de notre mémoire, et de jamais parler latin ! […] Le pays latin en est assotté.
Tandis que la tradition latine change Attila en spectre ou en monstre, les poèmes germaniques font de lui un roi débonnaire et neutre, qui préside aux événements sans trop s’y mêler, comme l’Agamemnon de l’Iliade et le Charlemagne de la Table-Ronde. […] C’est à ce point que Rome entière tremble à cause de ce duc, chacun craignant pour sa vie. » — Don Juan de Cerviglione ne voulant pas lui céder sa femme, il le fit décapiter en pleine rue, à la turque : le pavé servit de billot. — Un homme masqué lui ayant lancé, pendant les courses de carnaval, une épigramme offensante, César le fit arrêter et conduire à la prison Savella : on lui coupa la main et la langue, qui fut attachée au petit doigt de la main coupée. — Pour avoir traduit en latin un pamphlet grec contre les Borgia, le Vénitien Lorenzo, malgré les réclamations de la république, fut jeté au fleuve. — Astorre Manfredi, seigneur de Faenza, ayant refusé de livrer sa ville au duc de Valentinois, fut pris avec elle, après une défense héroïque qui dura six mois. […] La « force superbe de la forme », Vis superba formae, comme dit un poète latin de son temps, le transporte d’admiration. […] D’un côté Brantôme s’écrie : « J’ai veu madame la duchesse de Valentinois, en l’aage de soixante-dix ans, aussi belle de face aussi fraische et aussi aimable, comme en l’aage de trente ans. » D’une autre part dès 1538, des épigrammes latines lui reprochent, avec une rudesse cynique, « ses rides, sa peau flasque, ses fausses dents et ses cheveux gris. » La vérité doit être entre l’adulation et l’injure.
Je me permettrai cette remarque : oui, l’essence de la poésie lamartinienne est homérique, mais l’exécution rejoint, trop souvent peut-être, la manière des descriptifs de la décadence grecque et latine. […] Hugo, écrit-il, loin d’avoir en rien l’organisation grecque, est plutôt comme un Franc énergique et subtil, devenu vite habile et passé maître aux richesses latines de la décadence, un Goth revenu d’Espagne, qui s’est fait Romain, très raffiné même en grammaire, savant en style du Bas-Empire et à toute l’ornementation byzantine1. » Sainte-Beuve a dit encore de Victor Hugo : « Par manque de ce tact que j’appellerai grec ou attique, et qui n’est pas moins français, il ne recule jamais devant le choquant de l’expression, quand il doit en résulter quelque similitude matérielle plus rigoureuse qu’il pousse à outrance. » Enfin, après un éloge pompeux de la Cloche, une des plus belles œuvres de Victor Hugo, le maître critique conclut : « Ce beffroi altier, écrasant, où il a placé la cloche à laquelle il se compare, représente lui-même à merveille l’aspect principal et central de son œuvre : de toutes parts le vaste horizon, un riche paysage, des chaumières et des toits bizarres entassés. » J’aime la substance d’une pareille critique, mais non le ton aigre qu’elle prend, ni les circonstances où elle se produisit. […] Artémis sans voiles l’offusque seulement, mais les divinités grecques sous des noms latins le font souffrir tout à fait.
», lui loue une chambre chez son imprimeur, et lui procure des traductions du latin et de l’anglais. […] Puis il avait lu prodigieusement : toute la bibliothèque grecque et latine, je pense, et tous les livres importants du dix-huitième siècle et surtout les encyclopédistes. […] Il ne restait que celui d’Érope et de Thyeste, ou de Canace et Macareus, ou de Canne et Bybis chez les Grecs et les Latins, ou d’Amnon et de Thamar chez les Hébreux. » Ainsi, pour punir le crime intellectuel de René, il paraît qu’il n’y a pas de châtiment plus convenable, plus congruent, plus nécessaire que de le faire aimer par sa sœur et de lui faire entendre, chuchoté par cette sœur sous le drap mortuaire de ses vœux, l’aveu de cet incestueux amour. […] Mais c’est ce qu’il se permet de plus fort contre la modestie, et encore est-ce en latin.
Dans les rares intervalles de ses leçons de grammaire anglaise et latine, il avait composé une tragédie, Bertram ; les succès récents de Sheilq l’encouragèrent à présenter sa tragédie au théâtre de Dublin. […] Un jour, c’est un membre de l’Institut qui dépèce Aristophane, et qui, dans la lecture naïve d’un latin mal imprimé, prend un manteau pour une courtisane. Le lendemain, c’est un interprète qui met son esprit à la place du texte, qui oublie le dauphin de la fable, et donne l’étymologie anglaise d’un mot qui n’a jamais existé que dans le latin universitaire. […] Le colonel Caustic et Umfraville sont encore cités aujourd’hui comme des types exquis du caractère baptisé par le poète latin, laudator temporis acti .
Il faut bien connaître aussi cette race de critiques d’autrefois dont l’abbé Des Fontaines était le père ou l’oncle, et que nous avons vue finir : lui, Des Fontaines ; — Fréron, qu’on a voulu réhabiliter de nos jours et regalonner sur toutes les coutures (une courageuse entreprise), — Geoffroy, — Duviquet ; voilà la filiation, le gros de l’arbre ; il y en avait, à droite et à gauche, quelques rameaux perdus ; tous plus ou moins gens de collège, ayant du cuistre et de l’abbé, du gâcheux et du corsaire, du censeur et du parasite ; instruits d’ailleurs, bons humanistes, sachant leurs auteurs, aimant les Lettres, certaines Lettres, aimant à égal degré la table, le vin, les cadeaux, les femmes ou même autre chose ; — Etienne Béquet, le dernier, n’aimait que le vin ; — tout cela se passant gaîment, rondement, sans vergogne, et se pratiquant à la mode classique, au nom d’Horace et des Anciens, et en crachant force latin ; — critiques qu’on amadouait avec un déjeuner et qu’on ne tenait pas même avec des tabatières ; — professeurs et de la vieille boutique universitaire avant tout ; — et j’en ai connu de cette sorte qui étaient réellement restés professeurs, faisant la classe : ceux-là, les jours de composition, ils donnaient régulièrement les bonnes places aux élèves dont les parents ou les maîtres de pension les invitaient le plus souvent à dîner : Planche, l’auteur du Dictionnaire grec, en était et bien d’autres ; race ignoble au fond, des moins estimables, utile peut-être ; car enûn, au milieu de toute cette goinfrerie, de cette ivrognerie, de cette crasse, de cette routine, ça desservait, tant bien que mal, ce qu’on appelait le Temple du Goût ; ça vous avait du goût ou du moins du bon sens.
Quoiqu’on écrive communément Nantia ouNanthia, on a adopté ici l’orthographe Nantiac, comme se rapprochant davantage du mot latin de Nantiaco.
Son goût semblait ne le porter d’abord que vers la littérature proprement dite, vers l’érudition grecque et latine ; l’histoire en particulier l’attirait peu.
« — Il y a longtemps aussi, lui dis-je, que j’attends cet ouvrage, et cependant je n’ose pas vous presser, car j’ai appris de notre ami Libon, dont vous connaissez la passion pour les lettres, que vous n’interrompez pas un seul instant ce travail, que vous y employez tous vos soins et que jamais il ne sort de vos mains ; mais il est une demande que je n’avais jamais songé à vous faire et que je vous ferai, maintenant que j’ai entrepris moi-même d’élever quelque monument à ces études qui me furent communes avec vous, et d’introduire dans notre littérature latine cette ancienne philosophie de Socrate.
Il n’apprit le latin qu’à vingt-cinq ans mais il était nourri de la moelle de nos classiques.
On nous introduit dans un salon à papier grenat, aux meubles en velours rouge, aux formes Louis XV d’un tapissier du quartier Latin.
» L’année suivante (avril 1823), Schlegel chargeait encore celui qu’il vient d’honorer de tant de titres magnifiques, de collationner pour lui, à la Bibliothèque du roi, les manuscrits du Bhagavad-Gîta dont il allait publier une version latine ; il en a consigné sa reconnaissance dans la préface. […] Plusieurs historiens modernes ont attribué quelques avantages à ces invasions de races franchement barbares à travers les races latines corrompues ; ils en ont déduit des théories de renouvellement et comme de rajeunissement social moyennant cette espèce de brusque infusion d’un sang vierge dans un corps usé.
Souvent, il parle de sa jeunesse et nous conte sa lointaine arrivée de petit créole dans la bonne cité de Senlis, où il devait apprendre le latin, l’histoire, les mathématiques — et la France, puis il se retire et va dormir, car, demain, il sera levé le premier. […] Un roman et un romancier Si, comme l’affirme le vieux proverbe, les livres ont leur « destin », il semble bien qu’ils aient aussi leur saison, et le temps de l’année où nous sommes est singulièrement favorable à la végétation des couvertures jaunes, vertes, rouges ou blanches qui à l’étalage des libraires, offrent, au vent de la fortune, leurs feuilles renaissantes et multicolores, A ces moments où se manifeste la poussée annuelle de la sève littéraire contemporaine, l’antique sentence latine : Habent sua fata libelli me revient chaque fois à la pensée.
Mais si l’inspiration chrétienne est si belle, l’antiquité grecque et latine vont déchoir dans l’esprit de notre critique ? […] Il y lut un peu de latin et de Jean-Baptiste Rousseau, y prit l’horreur de la philosophie toute en formules qu’on enseignait alors, y fit des vers, et revint chez lui.
Notre dernier accès de septentriomanie touche à son terme, et nous allons pour voir redevenir des Latins, de bons Latins. […] Et ça continue ; et je vous réponds que c’est une belle ruée d’alexandrins ; et c’est de l’éloquence, mon Dieu, oui, de l’éloquence latine, chose décriée, mais, si j’en crois les acclamations de l’autre jour, toujours puissante… Non pourtant sur le vieux traître, sourd d’ambition et aveugle de luxure et tout possédé par l’idée fixe.
. — Plus tard, et surtout aux Charmettes, en même temps qu’il apprend le latin, il lit Le Sage, l’abbé Prévost, les Lettres philosophiques de Voltaire, mais aussi (avec Locke et Leibnitz) les ouvrages de Messieurs de Port-Royal, Descartes Malebranche, etc… En somme, peu de livres contemporains, mais à peu près tout le xviie siècle dévoré dans la solitude, loin de Paris. […] — Monsieur, dit Duclos au précepteur, peu de latin, très peu de latin ; point de grec, surtout… De quoi cela l’avancerait-il, votre grec ?
L’Odéon « a eu l’honneur », car c’en est un, de nous donner jeudi une tragédie d’Euripide, Iphigénie à Aulis, non pas adaptée, et l’on sait que les adaptations ne sont presque toujours que des altérations déplorables, non pas traduite non plus, mais librement tournée en français, comme Plaute disait que ses comédies étaient tournées du grec en latin, par le bon et fin ouvrier en vers M. […] Il est de la première promotion de l’École normale, et il y fut reçu à quinze ans, et il est aussi le premier normalien qui ait fait banqueroute au grec et au latin pour faire de la littérature, exemple détestable et trop imité ; mais enfin c’est lui qui l’a donné. […] Sa mère ne put jamais lui acheter un autre livre que sa grammaire latine. […] En latin comme en grec, comme en métaphysique, Mon nom fut sans rival et mon succès unique !
Il y avait dedans cent ducats, avec une carte sur laquelle étaient écrites ces paroles en latin : Sois mon héritier, toi qui as eu assez d’esprit pour démêler le sens de l’inscription, et fais un meilleur usage que moi de mon argent. […] Vincent marmotta une longue phrase latine dans laquelle il se perdit. […] Cela devrait être écrit en vieux français, mais n’a pas besoin d’être traduit en latin. […] Il aspire seulement à divertir ses semblables dans le sens latin du mot, c’est-à-dire à les arracher pendant quelques heures à eux-mêmes et à les intéresser exclusivement aux aventures qu’il raconte.
Schopenhauer, nous l’avons vu, en a trouvé un, que même il a mis en latin pour lui donner plus d’autorité : Neminem laede, imo omnes, quantum potes juva. […] La sienne est cependant une des plus légitimes : celle qui se réclame avant tout de la tradition ; car notre auteur, malgré qu’il ait la tête farcie de métaphysique allemande, de romans anglais, d’histoire universelle, sans parler de là quantité prodigieuse de latin classique et de bas latin, de grec, d’italien et d’espagnol qu’il a réussi à emmagasiner encore, notre auteur est ou se croit dans la pure tradition française.
Le premier est latin, le second grec ancien.
Nous mettions, jour par jour, les rôles en latin pour nous les communiquer ; et quand nous vîmes nos docteurs épuisés, nous nous mîmes à examiner leurs mémoires sur les lieux, et à en composer une relation, chacun en particulier.
C’est cette communauté de sujet dont on n’a pas manqué de faire une critique au poète français, accusé d’avoir par dénûment d’invention imité le poète latin.
Et nous étions à la recherche, tout en le voulant très moderne, à la recherche d’un style mâle, concret, concis, à la carcasse latine, se rapprochant de la langue de Tacite, que nous lisions alors beaucoup.