Mais, hier, une circonstance heureuse et imprévue nous a, pour ainsi dire, contraint à nous souvenir que nous avions été poète aussi, et de répondre par un bien faible écho à la voix qui nous vient de l’Océan.
Elle sera seule dans les ténèbres ; elle entendra autour d’elle les soupirs de cent amans heureux, son cœur et ses sens s’enflammeront des plus ardens désirs, elle appellera les malheureux à qui elle a fait concevoir tant de fausses espérances ; aucun d’eux ne viendra, et elle aura les mains liées sur le dos.
Heureux aussi qui peut laisser une belle ode ! Heureux qui toute avec succès un concours dont le prix est toujours la gloire ! […] — Charmant recueil ; de l’imagination, de la grâce, une heureuse nature de poète ! […] Heureux, un amoureux ! […] C’est que j’ai le bonheur ou le malheur d’être un homme de lettres qu’on rend plus heureux par une marque d’estime que par un compliment.
Il avait l’œil bon déjà et des qualités d’observateur ; car il se rappelle quand il écrit ses Mémoires que la Bourgogne était heureuse, à cette époque, et un peu trop heureuse, amollie, voluptueuse, fastueuse, trop riche. […] Les petits, du reste, sont les amis de Commynes, et sinon ceux qu’il envie, du moins ceux ; qu’il tient pour heureux. […] Ô nuit heureuse ! […] Certaines habitudes rythmiques de Marot sont au contraire très heureuses. […] L’effet ne me semble pas très heureux.
Seulement, dans cet écrit si étroit et si simple d’idées, il y a de fortes pages, des mouvements vigoureux et suivis, d’éloquentes poussées d’indignation, un très beau talent de style : on y sent quelque chose du poète dans un grand nombre de comparaisons heureuses. […] Heureux qui, dès sa jeunesse, trouve dans un compagnon et dans un ami une seconde et quelquefois une première conscience, un témoin perpétuel qui l’encourage, qui l’enhardit, qui le maintient, et que partout ensuite, absent ou présent, il s’habitue à respecter ! […] Tout ce qu’on fait l’un pour l’autre porte plus constamment le caractère d’une heureuse inspiration, d’un mouvement involontaire, indépendant de toute espèce de calcul ou de réflexion.
Un compliment adressé à ce ministre et d’un heureux tour avait singulièrement réussi : « Tous les dépôts, disait Duclos, m’ont été ouverts par les ordres de M. le comte de Maurepas, à qui le roi a confié le département des lettres, des sciences et des arts, comme s’il eût consulté ceux qui les cultivent. » Ces jolis mots ont toujours faveur en France, et, mis en tête même d’un livre grave, ils contribuent à sa fortune. […] On devina mieux pour le reste : on dit qu’il aimerait la chasse passionnément ; que les princes, ses parents et ses voisins, auraient beaucoup d’envie et de jalousie contre lui, qu’ils lui susciteraient de fâcheuses affaires, qu’ils lui feraient la guerre ; qu’il serait plus heureux dans sa vieillesse que dans sa jeunesse, etc. […] Il trouve pourtant moyen d’omettre encore des traits : « Elle aimait passionnément les lettres », dit-il tout court. — « Elle aimait les lettres, dit l’abbé Le Grand, et elle avait une si grande passion pour la poésie, qu’elle passait les nuits à faire des vers. » La conclusion de l’Histoire de Duclos est piquante et elle a couru comme un de ces mots heureux qu’il lançait en causant.
Mais à ce tableau plein d’inventions heureuses Je préfère pourtant ses petites Baigneuses… Voilà bien le genre à sa date, la poésie pédestre et familière, telle qu’on l’essayait alors. […] D’autres seront épris de la beauté du monde Et du rayonnement de la lumière blonde ; Ils resteront des mois assis devant des fleurs, Tâchant de s’imprégner de leurs vives couleurs ; Un air de tête heureux, une forme de jambe, Un reflet qui miroite, une flamme qui flambe, Il ne leur faut pas plus pour les faire contents. […] Et à ce propos on remarquera combien l’idée du Diable revient souvent dans l’imagination du poète, comme pour piquer la somnolence heureuse et stimuler l’ennui.
Méléagre vivait cent ans environ avant Jésus-Christ ; charmant poète lui-même, auteur d’idylles et d’épigrammes amoureuses remplies de grâce ou de flamme, il réunissait toutes les conditions pour réussir à un travail qui demandait une main heureuse. […] Egger, son gendre, — a eu l’idée d’ouvrir tous ce parc réservé et, moyennant quelques précautions indispensables, de faire jouir tout le monde du parterre où jusqu’ici (selon une expression heureuse) « quelques-uns seulement allaient discrètement cueillir quelques charmants boutons. » Ah ! […] et à quatre-vingts ans elle a vu l’onde de l’Achéron, l’ouvrière Platthis qui avait fait de si beaux tissus et si bien. » Heureux, dans toutes les professions qui demandent l’intelligence et qui n’excluent pas l’agrément, celui qui peut, au terme de sa carrière, se rendre ce témoignage, comme on l’a dit de la bonne Platthis, qu’il a accompli et « parcouru en compagnie des Grâces le stade de Minerve !
Il y a dans les discours de Mirabeau des allusions, des citations heureuses de l’Antiquité, mais ce ne sont que des mots rapides ; je n’en rappellerai qu’un, entre autres, des plus retentissants, et dont l’écho remplit encore notre oreille. […] Elle perdrait tout à une tentative d’évasion manquée ; que gagnerait-elle à une fuite heureuse ? […] Elle jouit d’une rare éclaircie et d’un rayon de soleil à travers ses barreaux ; elle est heureuse, elle le dit du moins ; elle tâche de se persuader qu’elle l’est.
M. de Schulenburg était appuyé sur la pierre qu’on a mise à l’endroit où Gustave-Adolphe fut tué, et il me dit en m’embrassant, après que j’eus fait serment : « Monsieur, je souhaite que ce lieu vous soit aussi propice que j’en tire un heureux augure, et que le génie du grand homme qui a expiré ici passe sur vous ; que sa douceur, sa sévérité et sa justice vous guident dans toutes vos actions ; soyez aussi soumis à obéir ou sévère à commander ; ne pardonnez jamais par amitié ou par considération ; dans les moindres fautes, que l’exemple du sévère Magnus (Gustave-Adolphe) vous soit toujours présent ; ayez des mœurs irréprochables, et vous commanderez aux hommes : voilà la base et les fondements inébranlables de notre métier. […] Voltaire, dont chaque mot compte quand il s’agit de peindre les hommes qu’il a connus et qu’il définit avec son heureuse précision, a dit de lui dans son Siècle de Louis XIV, en le rencontrant pour la première fois sous sa plume à l’assaut de Prague (1741) : « Le comte Maurice de Saxe, frère naturel du roi de Pologne, attaqua la ville. […] Lui, qui sera si heureux, il aime peu à s’en remettre aux faveurs de la fortune « qui quelquefois est bien inconstante. » Vainqueur à Fontenoy, au moment le plus désespéré, non par son flegme seulement, mais par un de « ces traits de lumière qui caractérisent les grands capitaines », il dira à Louis XV dont il vient d’illustrer les armes, et à travers toutes les effusions du dévouement : « Vous voyez, Sire, à quoi tiennent les batailles !
Dans ce concours heureux brillaient de toutes parts Le sentiment, le charme et l’amour des beaux-arts. […] Veillez, veillez, jeunes gens ; recueillez vos forces, vous en aurez besoin le jour de la bataille : les faibles oiseaux prennent leur vol tout d’un trait ; les aigles rampent avant de s’élever sur leurs ailes. » Et pourtant son hardi et heureux frère ne rampait déjà plus. […] Si l’on se reporte par la pensée vers l’année 1823, à cette brillante ivresse du parti royaliste, dont les gens d’honneur ne s’étaient pas encore séparés, au triomphe récent de la guerre d’Espagne, au désarmement du carbonarisme à l’intérieur, à l’union décevante des habiles et des éloquents, de M. de Chateaubriand et de M. de Villèle ; si, faisant la part des passions, des fanatismes et des prestiges, oubliant le sang généreux, qui, sept ans trop tôt, coulait déjà des veines populaires ; — si on consent à voir dans cette année, qu’on pourrait à meilleur droit appeler néfaste, le moment éblouissant, pindarique, de la Restauration, comme les dix-huit mois de M. de Martignac en furent le moment tolérable et sensé ; on comprendra alors que des jeunes hommes, la plupart d’éducation distinguée ou d’habitudes choisies, aimant l’art, la poésie, les tableaux flatteurs, la grâce ingénieuse des loisirs, nés royalistes, chrétiens par convenance et vague sentiment, aient cru le temps propice pour se créer un petit monde heureux, abrité et recueilli.
Au reste, ce que les recueils qui se publient sans relâche (quatre ou cinq peut-être chaque mois) contiennent d’agréables vers, de jets brillants, de broderies heureuses, est incalculable : autant vaudrait rechercher ce qui se joue chaque soir de gracieux et de charmant sur tous les pianos de Paris. […] La plus remarquable de ces pièces est (tome II, page 51) l’élégie imitée de l’allemand de Grillpanzer, l’Enfant heureux, dont l’idée refleurie avec grâce a fait depuis le plus frais bouton d’or de la couronne poétique de Reboul. […] Et il finissait par ce vers que tous ceux qui l’ont su alors ont retenu : Sois heureux, lui dit-il, — et l’enfant était mort.
Là, avec la piété, la nature et l’étude, heureuse, etc., etc… Voilà, mon cher ami, ce que je vous demande pour elle, et je vous expliquerai pourquoi. » Cependant les vers arrivent ; elle en est enchantée, mais non satisfaite encore ; elle veut plus et mieux. […] « Lézay prétend (dit Chênedollé) que Mme de Krüdner, dans les moments les plus décisifs avec son amant, fait une prière à Dieu en disant : Mon Dieu, que je suis heureuse ! […] « La dévotion, a dit Montesquieu, est une croyance qu’on vaut mieux qu’un autre ; — ou du moins qu’on possède ce qui vaut mieux, qu’on est plus heureux, qu’on peut indiquer aux autres le chemin du plus gras pâturage.
L’ironie impitoyable de l’auteur s’abat seulement sur ceux que la vie ne châtie pas, qui fleurissent en leur sottise et leur bassesse, sur l’heureux, hilare et décoré Homais. […] Par un heureux accord de ces sujets vulgaires et de son talent brutal, M. […] Le roman a été, depuis une trentaine d’années, le plus heureux et le plus fécond des genres : c’est celui aussi où les tempéraments ont été le moins comprimés par les traditions ou les théories.
J’étais heureux. […] Jamais présent ne me rendit plus heureux. […] Il fut, cet enfant, le plus heureux et, j’ose le dire, le meilleur de tes amis.
Ils viennent tous en riant et en complimentant Tebaldo de l’heureuse issue qu’il a donnée à l’événement. […] Un acteur vient dire aux spectateurs que tous les personnages sont heureux ; que Fabio, en voyant madonna Lelia dans son costume féminin, en a été charmé ; que Flaminio épouse Virginia, et que l’on va célébrer les deux noces. […] La pièce italienne intitulée Le Gelosie fortunate del prencipe Rodrigo (les heureuses jalousies du prince Rodrigue) est du poète florentin Giacinto-Andrea Cicognini ; celui-ci aurait lui-même, pour cette pièce comme pour la plupart de ses nombreux ouvrages, suivi un original espagnol.
Cette morale, que l’esprit chrétien a d’ailleurs élevée et épurée, ne prétend donner qu’un fonds de préceptes applicables à tous les temps comme à tous les pays, qui fassent faire à l’homme le meilleur usage de sa raison et rendent plus heureuse la vie présente. […] Plus heureux encore que l’auteur des Maximes, qui n’avait eu affaire qu’à de grandes passions et à de grands vices, La Bruyère avait surtout affaire aux travers qui sont ou le commencement ou la fin des vices ; et, le plaisir du ridicule tempérant chez lui l’indignation du mal, il devait être plus modéré et plus agréable, en même temps qu’il était plus varié. […] A égale distance de la colère du satirique et de l’austérité du prédicateur, il se tient dans une sorte de sérénité aimable ; plus heureux d’avoir trouvé le trait vif, saisi le ridicule et créé l’expression qui le peint, qu’affecté de la tristesse de sa matière et du peu d’efficacité probable de la leçon.
Elle se raille du rêve de la jeune fille, qui le lui rend de reste en lutineries, et, tout en la raillant de ce rêve, elle en profite, car il n’est pas de jour où, dans sa solitude, cette mère heureuse ne pense à son fils, « et ces pensées, dit-elle, sont de l’or pour moi ». […] Puis, un incident heureux les ayant rapprochés, la fusion se fit, il prit insensiblement en main ce génie qui cherchait encore sa vraie voie. […] Cette aimable et joueuse enfant lui remet en pensée le temps où il était meilleur, plus vraiment heureux, où il n’avait pas encore détourné et en partie sacrifié à la contemplation et à la réflexion du dehors son âme primitive, intérieure et plus délicate.
C’est bien lui encore qui, même revenu à une sorte de résipiscence dans son Vieux Cordelier, dira : « Je mourrai avec cette opinion, que pour rendre la France républicaine, heureuse et florissante, il eût suffi d’un peu d’encre et d’une seule guillotine ? […] Cette descente ne nous offrira aucuns paysages inconnus, aucuns sites qui ne se soient offerts mille fois plus délicieux à ce Salomon qui · disait, au milieu de ses 700 femmes, et en foulant aux pieds tout ce mobilier de bonheur : J’ai trouvé que les morts sont plus heureuses que les vivants, et que le plus heureux de tous est celui qui n’est pas né.
Partie du Luxembourg, elle ne put pénétrer une première fois au-delà de l’Hôtel-Dieu ; elle fut plus heureuse à une seconde tentative, et put arriver à l’Hôtel de ville bien tard, beaucoup trop tard, assez tôt pourtant pour faire encore quelque acte de protection et d’humanité. […] Un jour qu’elle était à Saint-Jean-de-Luz dans la chambre du cardinal Mazarin, et que d’une fenêtre, avec Mme de Motteville, elle considérait la beauté du paysage, Mademoiselle se mit à imaginer un projet de retraite et de solitude, et à moraliser sur la vie heureuse qu’on y pourrait mener. […] » À Saint-Germain, où était la Cour, comme elle était pour la centième fois sur le point de nommer à Lauzun cette personne qu’elle avait choisie pour la rendre heureuse, et sur laquelle elle le consultait sans cesse, elle n’avait pourtant pas la force de lui articuler le nom : « Si j’avais une écritoire et du papier, je vous l’écrirais », lui disait-elle ; et montrant une glace qui était à côté : « J’ai envie de souffler dessus, et j’y écrirai le nom en grosses lettres, afin que vous le puissiez bien lire. » Ce qui est remarquable et ce qui fait le cachet du temps, c’est que l’idée du roi, le culte et l’idolâtrie officielle qu’on lui vouait, étaient en tiers dans tout cela.
Mais la fin de l’Épître est surtout heureuse ; le jeune compositeur s’y montre dévoré souvent du désir d’écrire, de composer pour son propre compte, tandis qu’il est obligé d’imprimer les autres : Hélas ! […] On y voit à nu le fond de son âme et de son imagination aux heures riantes et aux saisons heureuses. […] On devine, en lisant ces jolis récits et celui des Petits Souliers, et celui même de Thérèse Sureau, à voir cette imagination, cette gaieté, cette invention de détail, combien il devait être charmant quand il osait être familier, et qu’il consentait à être heureux.
Je passai là quelques jours heureux dans les montagnes de Franche-Comté ; et ses parents encourageaient honorablement la liaison… Gibbon, qui n’avait point encore acquis cette laideur grotesque qui s’est développée depuis, et qui joignait déjà « l’esprit le plus brillant et le plus varié au plus doux et au plus égal de tous les caractères », prétend que Mlle Curchod se laissa sincèrement toucher ; il s’avança lui-même jusqu’à parler de mariage, et ce ne fut qu’après son retour en Angleterre qu’ayant vu un obstacle à cette union dans la volonté de son père, il y renonça. […] Ne croirait-on pas qu’elle songeait à Mme de Lambert et qu’elle se ressouvenait de l’avoir lue, quand elle a dit : « Heureux qui n’a jamais trouvé de plaisir que dans des mouvements sensibles et raisonnables ! […] Tout en sentant d’abord ce qui lui manquait à Paris, elle en jugeait pourtant très bien le séjour en ce qu’il a bientôt d’indispensable pour ceux qui en ont une fois goûté : « Il est certain, écrit-elle, qu’on peut et qu’on doit être plus heureux ailleurs, mais il faut pour cela ne pas connaître un enchantement qui, sans faire le bonheur, empoisonne à jamais tous les autres genres de vie. » En écrivant ces paroles, elle était encore à demi sous le charme (1773).
» * * * — Tous ces jours-ci, je suis heureux à la façon d’un enfant, qu’on a légèrement grisé. […] Il fait heureux dans la maison. […] Et cet anéantissement heureux est mêlé d’une inquiétude nerveuse, qui vous pousse à vous en aller de chez vous, pour éloigner, d’une douzaine d’heures, l’embêtement qui peut vous tomber sur les reins.
Cependant, à travers l’amour de ce culte, où les prières finissent par des baisers lancés au ciel, la théologie sémitique continuait à le préoccuper ; le « petit Juif Jésus-Christ » jetait sur ses conceptions d’homme heureux l’ombre noire de son gibet. […] L’impertinence de sa jeunesse, l’aptitude à jouir, la liberté de toute souffrance, cette vie heureuse et libre dont son paganisme était le symbole, lui échappaient. […] C’est en mai 1848, le jour où je suis sorti pour la dernière fois, que j’ai pris congé des charmantes idoles que j’ai adorées pendant mes temps heureux.
Ô trop heureux Maurice ! […] Quoique la correction soit une qualité si essentielle qu’il est inutile de la recommander, l’orateur ne doit pas néanmoins s’en rendre tellement esclave qu’elle nuise à la vivacité nécessaire du discours ; de légères fautes sont alors une licence heureuse ; c’est un défaut d’être incorrect ; mais c’est un vice d’être froid. […] Le caractère de l’éloquence de Cicéron est, ce me semble, la réunion toujours heureuse de la facilité et de l’harmonie.
L’harmonie n’était point encore née ; l’harmonie, qui est la musique du langage, qui, par le mélange heureux des nombres et des sons, exprime le caractère du sentiment et de la pensée, et sait peindre à l’oreille comme les couleurs peignent aux yeux ; l’harmonie qui établit une espèce de balancement et d’équilibre entre les différentes parties du discours, qui les lie ou les enchaîne, les suspend ou les précipite, et flatte continuellement l’oreille, qu’elle entraîne comme un fleuve qui coule sans s’arrêter jamais. […] Lingendes fit le premier des efforts heureux pour la chercher ; et dans son oraison funèbre de Louis XIII, d’ailleurs assez médiocre, on en rencontre assez souvent des traces. […] Dans les monarchies heureuses et tempérées par les lois, quoique la nation jouisse de la liberté que les lois donnent, on sent bien cependant que cette liberté n’est pas aussi favorable à l’orateur que celle des républiques.
Albalat s’est engagé à nous donner d’heureux exemples d’imitation stylistique entre écrivains de même langue. […] Quant à ses tentatives de stylisation provisoires, elles sont rares, et rarement heureuses ; c’est qu’il y faut peut-être la collaboration des générations et des siècles. […] Les femmes pourraient dire, si l’opinion acquiesçait à ces réformes : Nous en sommes toutes heureuses, pour Nous en sommes tout heureuses ; et Je suis toute à vous, pour tout à vous, etc. […] S’imagine que tout heureuses, c’est-à-dire « très heureuses » est identique à toutes heureuses, c’est-à-dire « nous toutes, sommes heureuses », cela va loin. […] On n’a pas relevé dans les journaux le toutes heureuses et le toute à vous.
De beaux vers doux et tristes y passent enlacés, comme des ombres heureuses.
Il est bien plus noble d’imiter ces Fondeurs habiles, qui, sachant conserver l’attitude & les principaux traits d’une Statue, forment un nouveau moule pour la rendre avec les beautés qu’elle avoit déjà, lui donner celles qui lui manquoient, & la corriger des défauts qui en rendoient l’exécution moins heureuse.
Et, dans un autre endroit, il prétend prouver, par l'exemple des Quakers, que les hommes seroient plus heureux sans Prêtres & sans Maîtres. « La Pensilvanie, ajoute-t-il, dément l'imposture & la flatterie, qui disent impudemment, dans les Cours & dans les Temples, que l'homme a besoin des Dieux & des Rois.
Au moyen du dôme, inconnu des anciens, la religion a fait un heureux mélange de ce que l’ordre gothique a de hardi, et de ce que les ordres grecs ont de simple et de gracieux.
Ces actions, dit tout le monde, sont des sujets heureux.
Robert Browning a été le plus intelligent des poètes anglais ; heureux qui a le courage de le lire ! […] Toujours depuis lors j’ai courageusement lutté contre l’ennemi : je suis maintenant parfaitement tranquille et heureux. […] Serons-nous plus heureux à Richmond ou à Lowell ? […] Assurez-vous que ceux dont vous vous approchez sont rendus plus heureux par votre présence. » La présence de l’empereur avait rendu le jeune homme plus heureux : comment donc expliquer qu’il ait trouvé bien autrement curieux son nouvel ami Cornélius ? […] Pareillement Pascal a dit : « Abêtissez-vous », et Jésus-Christ : « Heureux les pauvres d’esprit !
L’honnête homme heureux, le père de famille rattaché à la vie par des liens prudents et sacrés, pour ne pas les trouver odieuses, a besoin de ne les accepter qu’en les interprétant. […] La fortune, en même temps que l’amitié, semblait sourire enfin à M. de La Rochefoucauld ; il avait la gloire ; la faveur de son heureux fils le relevait à la cour et même l’y ramenait : il y avait des moments où il ne bougeait de Versailles, retenu par cé roi dont il avait si peu ménagé l’enfance. […] — Mais quelques-uns, après la jeunesse, continuent d’admirer et d’aimer. — Heureuses natures ! c’est leur jeunesse d’âme prolongée, c’est leur belle humeur heureuse et leur vive source de joie naturelle qu’ils continuent d’aimer autour d’eux.
Quand sa colère s’allume, heureux seulement ceux qui se confient en lui ! […] Heureux ceux qui habitent ta demeure ! […] Heureux l’homme à qui il a été donné de devenir ainsi l’hymne éternellement vivant, la prière ou le gémissement personnifié du genre humain ! […] C’est le musicien convié à toutes les fêtes et à tous les deuils du foyer, et, plus heureux que ces musiciens de nos sens, ce n’est pas à l’oreille qu’il chante, il chante au cœur.
Quelques semaines avant la naissance de cet enfant ardemment désiré par sa mère, Bernardo Tasso écrivait de Sorrente à sa sœur Afra, religieuse cloîtrée dans un couvent à Bergame : « Ma petite fille est très belle et me donne l’espérance qu’elle aura une vie aussi heureuse et aussi honorable que nous pouvons le désirer ; mon premier fils nous a été enlevé par la mort, il est maintenant devant Dieu notre Créateur, où il prie pour notre salut. […] Elle aimait tant notre fils Torquato et moi que, forcée de vivre loin de nous, sans espoir d’être jamais tranquille et heureux ensemble, son cœur était torturé de mille angoisses comme celui de Tityus, dévoré par les vautours ; elle désirait vivre avec moi, fût-ce même en enfer », ajoute-t-il. « Résignons-nous donc à ce qui finit ses peines ! […] « Les cœurs comprimés par de longues et précoces infortunes ne déposent jamais complètement les soucis qui ont pesé sur leur jeunesse ; c’est le propre des malheureux de ne jamais croire aux choses heureuses, même quand la fortune souriante revient à eux. » On voit dans une lettre du jeune Torquato écrite de Rome, à cette époque, à la belle et puissante protectrice de tous les génies et de toutes les adversités, la célèbre Vittoria Colonna, combien ce jeune homme sentait prématurément les malheurs de son père et de sa sœur. […] Nous sommes heureux de rencontrer dans l’esprit si juste et si infaillible de Voltaire notre propre opinion de l’immense supériorité de l’Arioste sur son copiste naïf mais négligé, la Fontaine.
L’effort est plus marqué et parfois plus heureux dans les œuvres d’Alain Chartier116 dont le nom surnageant presque seul au xvie siècle dans le naufrage de tout le passé, a usurpé longtemps une estime trop glorieuse : il n’est pas si au-dessus de son temps qu’on l’imaginait jadis. […] La littérature suit sa courbe descendante, à peine de loin en loin relevée par l’accident heureux de quelque talent individuel. […] Son imagination, où fleurissent tous les lieux communs, est d’autant plus heureuse et sereine en son expansion spontanée, que le jeu n’est pas troublé chez lui par d’inquiétantes dépenses du cœur ou de l’intelligence. […] Combien serait-il plus heureux s’il avait suivi sa droite carrière dans l’Université ou l’Église.
Je retrouve la lettre que je lui écrivis à ce sujet le 29 mars 1844, dans un moment où mes doutes sur la foi me laissaient un calme relatif : J’ai été heureux, mais non surpris, en apprenant que tu avais fait le pas décisif. […] Heureux qui peut ne les sonder qu’en spéculation ! […] Heureux les enfants qui ne font que dormir et rêver et ne songent pas à s’engager dans cette lutte avec Dieu même ! Je vois autour de moi des hommes purs et simples, auxquels le christianisme suffit pour être vertueux et heureux.
Eugène Bazin, de Versailles, auteur d’un recueil intitulé Rayons 34, poëte religieux, harmonieux, sincère, compatissant, qui ne maudit pas, qui joint à d’heureux échos de la poésie anglaise des accents qui sont bien à lui ; je recommande à la page 101 de son recueil les stances qui ont pour titre Twice blessed, la Seconde Bénédiction. […] Plus d’un de ces sentiers lui a offert d’heureuses rencontres.
On voit d’abord combien le nouveau cadre peut devenir heureux, naturel, et conforme à la pente des ans et des choses. […] Hugo, viennent du même principe violent qui méconnaît le prix d’une convenance heureuse et d’une harmonie ménagée.
On le croirait guéri, heureux, fixé. […] La résistance de Mme Pierson, la tristesse résignée d’Octave, les sons de la voix aimée qui n’éveillent plus en lui ces transports de joie pareils à des sanglots pleins d’espérance, sa pâleur, qui réveille au contraire en elle cet instinct compatissant de sœur de charité ; puis, au premier baiser, l’évanouissement, suivi d’un si bel effroi, cette chère maîtresse éplorée, les mains irritées et tremblantes, les joues couvertes de rougeur et toutes brillantes de pourpre et de perles ; ce sont là des traits de naturelle peinture qui permettraient sans doute de trouver en cet épisode la matière d’une comparaison, souvent heureuse, avec Manon Lescaut ou Adolphe, si une idée simple et un goût harmonieux avaient ici ménagé l’ensemble, comme dans ces deux chefs-d’œuvre.
Marmontel, La Harpe pourtant eurent des éclairs heureux ; ce dernier particulièrement, au début de son Cours de Littérature, institua avec noblesse, avec éloquence, la majestueuse figure d’Homère ; il disserta de l’Iliade surtout et de son ordonnance, de son effet d’ensemble, en des termes judicieux et sentis qu’il est bon de rappeler aujourd’hui qu’on est si aisément ingrat pour ce critique plus qu’à demi détrôné. […] Depuis l’amateur qui l’a saluée d’un coup d’œil et qui s’en souvient avec grâce, jusqu’à celui qui s’initie lentement à ses mystères ; depuis l’heureuse nature qui en a été allaitée et pétrie dès l’enfance, jusqu’à l’esprit fait qui tard y revient et tâche, comme Alfieri, comme Marie-Joseph Chénier, de se l’inoculer par réflexion, qui en épelle et qui en reconquiert chaque beauté, tous y gagnent et trouvent de ce côté seulement la patrie première, le point fixe et lumineux pour s’orienter dans les écarts comme dans les retours.
Mais comme il n’existe point de hardiesses heureuses dont la raison ne puisse indiquer les motifs, examinons quelles sont les règles qui peuvent servir à juger si l’on doit se permettre un mot nouveau. […] Lorsqu’on se sert d’un mot nouveau, il faut qu’il soit bien prouvé, pour tous ceux qui savent lire, qu’il n’existait pas dans la langue un autre terme qui rendit précisément la même nuance de pensée, ni une tournure heureuse qui dût produire une égale impression.
Ce fut, malgré la maladie et les privations, un stage heureux de la vie du poète. […] C’était Forain, non pas le Forain amer et désenchanté qui s’est révélé depuis, mais un Forain jeune, frais, alerte, désinvolte et comme heureux de vivre.
La poésie lyrique, cette branche heureuse qui fait le plus d’honneur aux grands talents de notre âge, l’a très peu occupé. […] Il fait dans son sujet des coupes heureuses ; il l’entame par des biais hardis et neufs, qui en montrent les veines prolongées.