On entrevoyait à peine ce que deviendrait chez le poëte cette inspiration personnelle élevée à la suprême poésie, en lisant la pièce intitulée Promenade, qui est contemporaine des Ballades, et la Pluie d’été, qui est contemporaine des Orientales ; le sentiment en effet, dans ces deux morceaux, est trop léger pour qu’on en juge, et il ne sert que de prétexte à la couleur.
Un intérêt historique plus élevé s’attache à cette peinture fidèle des mœurs d’une province d’alors.
Nous, nous disons : Il n’y a qu’une cause que nous connaissons directement, c’est celle que nous sentons penser et agir, comprendre et pouvoir en nous, sentir, aimer, vivre en un mot ; vivre de la vie complète, profonde et intime, non-seulement de la vie nette et claire de la conscience réfléchie et de l’acte voulu, mais de la vie multiple et convergente qui nous afflue de tous les points de notre être ; que nous sentons parfois de la sensation la plus irrécusable, couler dans notre sang, frissonner dans notre moelle, frémir dans notre chair, se dresser dans nos cheveux, gémir en nos entrailles, sourdre et murmurer au sein des tissus ; de la vie une, insécable, qui dans sa réalité physiologique embrasse en nous depuis le mouvement le plus obscur jusqu’à la volonté la mieux déclarée, qui tient tout l’homme et l’étreint, fonctions et organes, dans le réseau d’une irradiation sympathique ; qui, dans les organes les plus élémentaires et les plus simples, ne peut se concevoir sans esprit, pas plus que, dans les fonctions les plus hautes et les plus perfectionnées, elle ne peut se concevoir sans matière ; de la vie qui ne conçoit et ne connaît qu’elle, mais qui ne se contient pas en elle et qui aspire sans cesse, et par la connaissance et par l’action, par l’amour en un mot ou le désir, à se lier à la vie du non-moi, à la vie de l’humanité et de la nature, et en définitive, à la vie universelle, à Dieu, dont elle se sent faire partie ; car à ce point de vue elle ne conçoit Dieu que comme elle-même élevée aux proportions de l’infini ; elle ne se sent elle-même que comme Dieu fini et localisé en l’homme, et elle tend perpétuellement sous le triple aspect de l’intelligence, de l’activité et de l’amour, à s’éclairer, à produire, à grandir en Dieu par un côté ou par un autre, et à monter du fini à l’infini dans un progrès infatigable et éternel.
Une jeune fille sentimentale, exaltée, élevée dans la pratique chrétienne et d’une nature un peu mystique, Claire, est aimée d’un jeune homme éloquent et enthousiaste qui a embrassé le saint-simonisme, et dont l’amour l’entraîne à sa secte sans la convaincre ; le malheur qui les frappe tous les deux semble à l’auteur provoquer une moralité favorable au christianisme.
J’ai répété néanmoins de diverses manières que la plupart des inventions poétiques nous venaient des Grecs, que la poésie des Grecs n’avait été ni surpassée ni même égalée par les modernes 4 : mais je n’ai pas dit, il est vrai, mais je n’ai pas dit, il est vrai, que depuis près de trois mille ans les hommes n’avaient pas acquis une pensée de plus ; et c’est un grand tort dans l’esprit de ceux qui condamnent l’espèce humaine au supplice de Sisyphe, à retomber toujours après s’être élevée.
L’aspect du ciel et de la terre, à toutes les heures du jour et de la nuit, réveille dans notre esprit diverses pensées ; et l’homme qui se laisse aller à ce que la nature lui inspire, éprouve une suite d’impressions toujours pures, toujours élevées, toujours analogues aux grandes idées morales et religieuses qui unissent l’homme avec l’avenir.
L’isvoschik était charmant avec le col blanc de sa chemise ressortant de son caftan, et serrant son cou vigoureux et rouge ; il avait un traîneau commode, plus élevé que les traîneaux ordinaires (jamais Levine ne retrouva son pareil), attelé d’un bon cheval, qui faisait de son mieux pour courir, mais qui n’avançait pas.
Armand Silvestre, hiérophante dans ses vers, commis voyageur et des plus mal élevés dans sa prose.
Tandis que Prospero s’éteint voluptueusement entre les bras des sœurs Célestine et Euphrasie, les nonnes douces et jolies élevées pour la distraction des cardinaux, Antistius meurt pour ses chimères d’une mort sanglante.
Il se félicite, quant à lui, d’avoir une femme modeste et bien élevée.
Debout dans un baril défoncé, tenant sa lanterne élevée, Arlequin paraît sur les flots, prend terre, fait une culbute, et se trouve sur ses pieds, hors du baril.
Je vous donne à deviner ce qui s’appelait, en ce temps-là, tour à tour, « une bibliothèque vivante où l’on apprend tout sans peine et sans étude ; une salle de musiciens où l’on entend les plus savants concerts ; un théâtre magnifique où tout ce qui frappe les yeux étonne l’esprit et glace la voix ; une école toute céleste où les esprits, de quelque étage qu’ils soient, peuvent, en y arrivant, s’élever à tous moments, et, par l’approche et la communication d’un corps lumineux, acquérir tous les jours des clartés nouvelles ; un parterre orné de fleurs de toutes les couleurs ; un corps qui marche à frais communs et à pas égaux vers l’immortalité ; le sanctuaire et la famille des Muses ; une si haute région d’esprit, que l’on en perd la pensée, comme, quand on est dans un air trop élevé, on perd la respiration. » C’est l’Académie française à qui s’adressaient ces louanges à la fois si énigmatiques et si outrées, dans des discours de réception où les nouveaux élus se donnaient toute cette peine pour ne pas se dire simplement reconnaissants.
Il est naturel que des gens qui restent dans la théorie enseignent une morale austère, élevée, difficile et belle.
Willy, qui a élevé le calembour à la hauteur d’une institution, y réjouissait Emmanuel Signoret aux strophes grandiloquentes ; le mystique Le Cardonnel y supportait les flonflons de Chebroux.
Est-il certain que les Allemands, qui ont élevé si haut le drapeau de l’ethnographie, ne verront pas les Slaves venir analyser, à leur tour, les noms des villages de la Saxe et de la Lusace, rechercher les traces des Wiltzes ou des Obotrites, et demander compte des massacres et des ventes en masse que les Othons firent de leurs aïeux ?
C’est par l’attrait d’une religion dégagée de toute forme extérieure que le christianisme a séduit les âmes élevées.
Avoir fait de la pauvreté un objet d’amour et de désir, avoir élevé le mendiant sur l’autel et sanctifié l’habit de l’homme du peuple, est un coup de maître dont l’économie politique peut n’être pas fort touchée, mais devant lequel le vrai moraliste ne peut rester indifférent.
En lui s’est condensé tout ce qu’il y a de bon et d’élevé dans notre nature.
Mais madame de Maintenon marchera autrement vers un but plus élevé que ceux de la galanterie : elle veut être aimée, préférée, et respectée, tâche impossible à une femme galante.
Des arbres élevés laissent pendre leurs fruits sur sa tête ; des poires, des grenades, des oranges, des figues douces et des olives vertes.
Déjà, en 1818, un écrivain peu populaire, mais élevé (Ballanche), s’était avisé de dire : « Notre littérature du siècle de Louis XIV a cessé d’être l’expression de la société ; elle commence donc à être déjà pour nous en quelque sorte une littérature ancienne, de l’archéologie. » Eh bien !
C’est un but beaucoup plus élevé ; on peut sans doute tomber plus lourdement encore en cherchant à y atteindre, mais on ne peut pas donner cette raison de ne pas poursuivre un but, qu’il est trop haut.
Nisard se compose, selon nous, de deux parties distinctes : l’une solide, élevée, incontestable, susceptible d’une large application ; l’autre sujette à controverse, et qu’on peut, sans trop d’injustice, accuser d’esprit de système.
Tour à tour naïve, tendre, morale, et guerrière, elle fait éclore les idées les plus riantes et les sentiments les plus élevés ; elle inspire l’amour, cimente l’amitié, frappe le ridicule, enflamme le courage ; enfin, est à la fois l’interprète du cœur et l’organe de l’esprit.
S’il y a peu de mérite à tenir son âme au niveau d’une situation élevée (quoique ce mérite même ne soit pas commun), il y en a beaucoup à l’élever au-dessus d’une situation réputée basse ; il y en a surtout à se créer une morale pure et transcendante, quand on se trouve, en naissant, placé comme en contradiction avec les notions de la morale la plus vulgaire.
Je ne pouvais m’empêcher de remarquer ces temples chrétiens élevés sur les débris de temples païens, et atteints, à leur tour, par l’infatigable faux du temps.
Elle a peut-être été bien élevée.
Le mysticisme, cet état si spécialement élevé dans la croyance religieuse et ses surnaturelles illuminations, est tout ce qui doit faire le plus horreur, si ce n’est mépris, à la raison définitive de messieurs les hommes.
Elle saisit alors ces vieux chrétiens du Moyen Âge, élevés dans la forte discipline d’un esprit doublement romain, comme une passion juvénile et contre-nature qui saisirait un vieillard austère et dégraderait sa noble vieillesse.
La famille impériale, qui était réellement la famille romaine, n’était sans doute pas encore suffisamment préparée à sa fonction, c’est-à-dire assez élevée au-dessus des volontés accidentelles de ses chefs, pour être devenue, comme la famille l’est aujourd’hui, une base permanente et stable, une espèce de môle historique dans lequel peut s’enfoncer et tenir le premier anneau de la tradition.
Ainsi enfin, lorsque Gibbon lui-même, Gibbon, plus près des faits déjà, plus soucieux de ce qu’ils peuvent être, moins élevé, moins général que Bossuet et que Montesquieu, roule, comme une espèce de Meschacebé historique aux larges ondes, ce magnifique récit du déclin et de la chute de l’empire romain débordant sous les écroulements de la civilisation antique et sous les alluvions du Christianisme et de la barbarie, Gibbon laisse beaucoup trop aussi la personnalité de sa pensée philosophique jouer sur les faits qu’il brasse et pousse avec tant de vigueur.
Quelle que soit l’Histoire des Pyrénées, l’homme qui a écrit le passage que nous venons de citer a certainement en lui ce qu’il faut pour devenir un historien, dans l’acception la plus élevée et la plus majestueuse.
La madame de Montmorency de Renée, quoique, par la hauteur de son rang, elle pût partager le vertige des femmes élevées de cette époque de belles spirituelles et d’amazones, n’en ressentit jamais l’éblouissement et l’ivresse.
« Villemain — dit-il ailleurs — occupe dans la littérature française une place très élevée », et il s’imagine, et Eckermann aussi, et M.
Ce long et terrible morceau d’histoire que les esprits assez élevés pour se trouver naturellement au-dessus de l’intérêt de curiosité individuelle qui s’attache à Voltaire regarderont comme le morceau capital du livre que nous annonçons, prépare merveilleusement la biographie de cet homme qui domina son temps aussi bien par le genre de ses vices que par le genre de son génie, et qui n’aurait pas exercé une si colossale influence sur ce temps-là et sur le nôtre, s’il n’avait pas surpassé le premier en lui ressemblant et marqué le second à son image.
Elle opposait aux barons, moins faciles à l’enthousiasme que les Hongrois, cet enfant, élevé par elle pour ne jamais commettre un seul péché mortel, et de la suavité duquel s’échappait une mystérieuse influence, plus puissante sur eux que le Saint-Chrême apporté par les anges à Clovis.
Le style et lui ont été élevés ensemble.
Jean Reynaud n’occupera une place élevée dans la hiérarchie des intelligences de son temps.
Resté l’homme des pensées du temps, il ne se serait jamais beaucoup élevé au-dessus de la fonction vulgaire d’un médiocre littérateur.
Seulement, comme tous les livres d’un talent très élevé ou très profond, il a besoin du temps pour son succès.
Une individualité aussi élevée que celle de saint Anselme devait se rattacher à ces faits, et elle s’y rattachait non pas en vertu de son génie qui l’antidatait de plusieurs siècles, mais en vertu de ses vertus.
Du reste, il est aisé de prendre la mesure, en quelques traits, du monument (je ne retirerai pas le mot) qu’a élevé le Père Lacordaire à la gloire et au triomphe de la vérité chrétienne.
Lui, Darwin, a élevé des pigeons, et le xixe siècle, plus bête que Louis XIII, qui ne garda pas Luynes, garde Darwin et s’en pare comme d’un de ses grands hommes !
En effet, depuis que le symbole de nos pères a cessé d’être pour la majorité d’entre nous le vrai et l’unique symbole, et que la Foi, comme un flambeau renversé, s’est éteinte dans la poussière des traditions abandonnées, il s’est élevé une nombreuse race d’hommes qui se disent religieux pourtant, et qui ont remplacé les formes nettes et les dogmes arrêtés du catholicisme par les aspirations maladives d’une vague religiosité.
» Dans le crâne plus élevé d’Engis, il trouve « derrière ce front bosselé un petit monde d’idées déjà hautes, premières lueurs entrevues d’une société durable, — (quoiqu’elle n’ait pas duré, ) — premier instinct de l’art du dessin, pressentiment d’un dieu naissant, crainte et stupeur du fétiche… » Il n’a, lui, crainte ni stupeur de la bêtise. « Physiologie, — dit-il en se résumant, avec une sécurité grave, — physiologie du monde quaternaire.