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846. (1913) La Fontaine « I. sa vie. »

La Fontaine, à son tour, se laissa appeler « écuyer » je ne sais dans quel acte public, et eut à ce propos un procès de revendication de l’État qui lui fut très pénible et que, du reste, il perdit. […] Il n’y avait rien à répliquer à cela, d’autant plus que c’était parfaitement constitutionnel : le chef de l’Etat a toujours eu le droit de ne pas accepter un académicien.

847. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Taine » pp. 305-350

Alors, en fait, il n’y eut plus d’Assemblée constituante, plus d’unité, plus de pouvoir central et dirigeant, mais quarante mille corps souverains dans l’État ! […] Autre part, il écrit cet axiome : « Toute Constitution est illégitime qui dissout l’État, et légitime quand elle le maintient. » C’est la théorie de de Maistre.

848. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — II. (Fin.) » pp. 330-342

Le président Jeannin avait une force de prudence et de patience qui manqua tout à fait à l’autre pour être un homme d’État et un homme politique, bien que d’Aubigné eût d’excellents instants et de vifs éclairs de conseil.

849. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. Louis de Viel-Castel » pp. 355-368

Notez que c’était bien affaire d’État chez lui, non pas récréation ni divertissement pur ; et cette marque de favori, inscrite au front, frappera de discrédit, d’odieux ou de ridicule aux yeux de plusieurs, l’homme de son choix, même quand plus tard cet homme sera un ministre bienveillant et habile.

850. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — I » pp. 93-106

Avec cela, préoccupé de la condition des classes pauvres et laborieuses plus qu’on ne l’était d’ordinaire dans les rangs des hommes d’État et des politiques constitutionnels, il a des pressentiments sociaux qui le mènent à prévoir des transformations radicales comme possibles et peut-être comme légitimes.

851. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Appendice. »

Elle se plaisait à réunir les hommes d’État les plus distingués qui s’étaient d’abord tous ralliés pour le maintien et l’honneur du nouveau régime ; elle s’affligea quand elle les vit se diviser et se déchirer.

852. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « I. Leçon d’ouverture du Cours d’éloquence française »

Il y avait à la Faculté des Lettres cinq étudiants — dont quatre répétiteurs payés par l’État — et cinq professeurs.

853. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « II  L’esprit scientifique et la méthode de l’histoire littéraire »

Du moins, des deux puissances capables de tyrannie, l’État et l’Église, l’une, chez nous, n’a plus la volonté, et l’autre n’a plus la force d’exercer la censure des idées littéraires.

854. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre IV. L’antinomie dans l’activité volontaire » pp. 89-108

L’individualisme stirnérien est l’individualisme de la différenciation pure et simple ; de la différenciation quelle qu’elle soit et à tout prix, C’est l’individualisme de l’aventurier, du condottiere, de l’apache aussi bien que l’individualisme du grand homme d’État ou de guerre, du conducteur d’hommes, du créateur de valeurs.

855. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Montalembert orateur. » pp. 79-91

Le 22 juin 1848, il débuta devant l’Assemblée nationale en venant parler sur la propriété (à propos d’un projet de décret sur la reprise de possession des chemins de fer par l’État) ; il exprima des considérations justes, élevées, opportunes, dans un loyal et courageux langage.

856. (1860) Ceci n’est pas un livre « Décentralisation et décentralisateurs » pp. 77-106

Regardons : L’Allemagne est une portion de l’Europe où vivotent — d’une vie très contestable — trente petits États différents, sans lien aucun, tous parfaitement séparés et distincts.

857. (1912) L’art de lire « Chapitre II. Les livres d’idées »

Que la religion est une des meilleures choses d’un État bien réglé.

858. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’empire russe depuis le congrès de vienne »

On disait, en prenant des airs de discrétion charmée, que l’empereur actuel de Russie avait fait défendre l’introduction de ce livre dans ses États.

859. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le comte Gaston de Raousset-Boulbon »

À elle, comme aux États, dont elle est l’expression oublieuse ou reconnaissante, il faut que l’on remplisse les mains avec de l’or ou de la terre pour qu’elle se souvienne qu’on est mort pour lui en donner.

860. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Sainte Térèse » pp. 53-71

La Térèse des Fondations est une des plus majestueuses femmes d’État qui se soient assises par terre ou sur un escabeau au lieu de s’asseoir sur un trône !

861. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le comte de Gasparin » pp. 100-116

Je vais dire un mot qui peut-être aurait révolté le comte de Gasparin, lequel fut un homme politique et qui put se croire un homme d’État.

862. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Goethe »

En 1772, Goethe, âgé de vingt-trois ans, habitait Wetzlar, dans les États prussiens, et il y était devenu l’ami d’un jeune homme comme lui, nommé Kestner, secrétaire de l’ambassade hanovrienne, lequel était, sinon fiancé, au moins lié de cœur avec mademoiselle Charlotte Buff, de la famille de M. 

863. (1893) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Cinquième série

Il aimait à dire qu’un bon poète n’est pas plus utile à l’État qu’un bon joueur de quilles. […] Qui donc a cru dire autrefois quelque chose de spirituellement malicieux, en appelant Bossuet « un conseiller d’État » ? […] Et il s’ensuit enfin des mêmes principes que ni la religion, ni la philosophie n’étant choses communes, mais individuelles, toutes les fois qu’elles entrent, pour ainsi parler, dans la pratique, elles rencontrent, pour les limiter ou les restreindre dans leurs applications, le droit de l’individu, ce qui mène à poser que l’État est fait pour l’individu et non pas l’individu pour l’État. […] Pour que l’énormité de cette maxime d’État commence d’être comprise, il va falloir maintenant attendre près de cent ans, jusqu’à Voltaire ; et, aujourd’hui même, l’horreur en est-elle bien connue ? […] S’il y a toutefois une responsabilité plus générale que toutes les autres, plus étendue et plus lourde, c’est sans doute celle des maîtres des affaires, la responsabilité de l’Église, par exemple, ou celle de l’État.

864. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Il y eut jadis une Europe de petits États, et dont le morcellement rendait plus difficile un choc monstrueux d’énormes masses humaines, tel que celui auquel nous assistons aujourd’hui. […] La Belgique est un des rares petits États qui aient survécu. Si nous voulons, la tempête finie, établir une paix durable, c’est cette politique de petits États qu’il nous faut reprendre. […] Il importe à l’avenir du monde civilisé qu’il n’y ait plus une Allemagne, mais des Allemagnes, une mosaïque de petits États et non plus le bloc amalgamé par la main puissante du chancelier de fer. Mais pour qu’une pareille Europe soit viable, la condition sine qua non est que le respect de l’indépendance des petits États soit le premier article de son code.

865. (1898) Essai sur Goethe

Si l’on se demande de quelle façon Goethe se jugeait lui-même, on verra que, du moins pendant plusieurs années, il se complut dans son existence de poète-courtisan et d’homme d’État en diminutif. […] Par le fait des circonstances qui, en le poussant à Weimar, le transformèrent en secrétaire d’État, mais plus encore par l’œuvre même de sa nature si diverse, où se réunissaient tant de contrastes, Goethe appartenait à ces deux catégories d’hommes, et simultanément il était poète et ministre. […] Si quelque souverain plus moderne ou plus près de Goethe eût eu certains traits de ressemblance avec lui, c’eût été, peut-être, un des Hohenzollern, prédécesseurs de Frédéric II, souverains d’un État modique, ambitieux de s’accroître, bien plus en tout cas que l’honnête Charles-Auguste. […] C’est à lui qu’on demandait conseil dans les occasions graves : occasions fréquentes dans l’existence d’un État tel que le duché de Saxe-Weimar-Eisenach ; de sorte que, peu à peu, son rôle fut presque le même qu’avant le voyage entrepris pour s’en décharger. […] Puis, des soucis et des dérangements l’absorbent : la campagne de Prusse, l’entrée des Français à Weimar, son mariage, les embarras de Charles-Auguste, les affaires confuses de l’État.

866. (1923) Au service de la déesse

Que de vieux hommes d’État, lassés du pouvoir ou lâchés par lui, accusent la littérature de tous les crimes et la rendent responsable de tous les malheurs arrivés à l’État, c’est bien : ces gens, vaille que vaille, cherchent un alibi ; et n’ayant pas su gouverner, ils feraient volontiers tomber la faute sur le prochain. […] La critique des institutions met le trouble dans l’État. […] Pour le savoir, il tente son examen de conscience, en quelque sorte, ou présente — c’est le titre du volume — son État civil. […] État civil est un livre pathétique et charmant. […] L’auteur d’État civil a beau s’écrier : « Soleil d’aujourd’hui, je ne connais que toi ! 

867. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Taine, ils écartaient les considérations politiques les vues d’ensemble, les raisons d’État, et ne faisaient figurer leurs personnages que dans des scènes intime et secrètes. […] Victorien Sardou le droit de juger Robespierre et que des radicaux, qui ne veulent point de religion d’État, prétendent nous imposer une histoire d’État, ce qui serait une grande nouveauté. […] Transférée ensuite à la Salpêtrière, elle y était encore quand la Révolution ouvrit les portes des prisons d’État et des hôpitaux. […] En instituant un déisme d’État, il n’avait fait que s’inspirer des doctrines de Jean-Jacques. […] « Il avait, dit un homme d’État qui l’approcha, le cœur plus libéral que les idées. » N’a-t-il pas répondu très joliment à ses amis, qui lui reprochaient d’avoir nommé un protestant, M. 

868. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

C’est Pascal qui sait « que l’art de fonder et de bouleverser les États est d’ébranler les coutumes établies, en sondant jusque dans leur source pour marquer leur défaut de justice », ou encore « que recourir aux lois fondamentales et primitives de l’État qu’une coutume injuste a abolies, c’est un jeu sûr pour tout perdre » ; mais c’est le citoyen de Genève qui ne se doute pas de ces profondes et lamentables vérités. […] De Narbonne, pour une troisième tenue des États, on se rendit à Béziers. […] La Grange, dans son Registre, n’a précisé ni le mois ni le jour ; mais nous savons que les États n’ouvrirent que le 17 novembre. Cette fois, les États montrèrent moins de générosité qu’ils n’avaient fait à Pézenas et à Montpellier. […] Le prince de Conti n’était plus là : les États se vengeaient sur ses créatures de la dureté militaire avec laquelle il avait accoutumé de les traiter.

869. (1891) Essais sur l’histoire de la littérature française pp. -384

Jean Savaron et les États de 1614 ne laissaient pas que d’avoir un instant occupé leur jeunesse. […] Il eut des qualités d’homme d’État avec la passion furieuse du pouvoir. […] Dussé-je paraître lui prodiguer trop facilement les qualités de toute espèce, il avait des parties de diplomate aussi bien que de général et d’homme d’État. […] L’historien, avec sa clairvoyance, tantôt servie, tantôt combattue par ses passions, est chez lui la reproduction exacte de l’homme d’État. […] La chute d’une classe entière, accompagnée d’un fracas épouvantable, est le terme de ce coup d’État financier.

870. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLIXe Entretien. L’histoire, ou Hérodote »

Plus tard, la Grèce attaque, sans motif autre que son ambition, les États voisins de l’Ionie ; il en raconte les guerres presque fabuleuses ; il s’attache surtout à Crésus le roi de Lydie, dont Sardes était la capitale. […] « Au récit de cette nouvelle ruse, le roi, frappé d’admiration pour les ressources de l’esprit et l’audace d’un tel homme, fit publier dans toutes les villes de ses États qu’il lui accordait l’impunité, et qu’il lui destinait même de grandes récompenses s’il voulait se montrer. […] Ils s’emparèrent donc de celui que la mère distinguait ainsi, et le firent élever aux frais de l’État.

871. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre huitième »

L’intérêt de l’Etat est de n’avoir qu’un roi, Qui, d’un ordre constant gouvernant ses provinces, Accoutume à ses lois et le peuple et les princes. […] Plus d’États, plus de rois : ses sacrilèges mains Dessous un même joug rangent tous les humains. […] Je sais bien que, dans la pièce de Racine, les rêves d’Athalie se réalisent, et que Dieu ajoute à son châtiment l’horreur de voir en songe l’abîme où il la pousse ; mais il l’y pousse par ces passions qui ôtent le sens aux femmes, dans les pays où la loi de l’État leur donne la souveraine puissance sans leur donner la force d’en user.

872. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

Si le roi, dit Fénelon, a des prétentions personnelles sur quelque succession dans les Etats voisins, il doit faire la guerre sur son épargne, et tout au plus avec les secours donnés par les peuples par pure affection. […] je reconnais là le chrétien, l’évêque, qui ne veut pas qu’on se serve du vice, même pour les besoins de l’État. […] Quoique doué d’un grand sens, comme tous les hommes supérieurs, il en manqua pour se conduire sur ce point, et il s’agita toute sa vie entre l’ambition de gouverner l’Etat, sans en désespérer un seul jour, dit Saint-Simon, et les empêchements de sa robe et de sa vertu.

873. (1888) Poètes et romanciers

. — Comme nous écrivions les dernières lignes de cet article, nous recevions une brochure de M. de Laprade qui, sous un titre légèrement hyperbolique : L’Éducation homicide, pose avec éclat la question des réformes à introduire dans le régime de l’éducation imposé indistinctement à l’enfance et à la première jeunesse dans les établissements publics ou privés, dans les collèges de l’État aussi bien que dans les maisons ecclésiastiques. […] Assez d’autres sauveront l’État sans qu’il s’en mêle. […] Les États se comportent comme les espèces entre elles. […] La guerre, l’horrible guerre est le privilège de l’espèce humaine : la sentence du meurtre est la seule que l’on respecte, et ce qu’on appelle dans les palais et dans les cathédrales la justice de Dieu n’est que la loi de la force. — Dans l’intérieur de l’État, c’est la même chose : la loi du besoin y règne seule ; c’est l’intérêt de la réciprocité qui fonde l’apparence de ce qu’on nomme la justice.

874. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

D’ailleurs ils parlent au lieu d’agir. « Cinna, Pompée ne sont point des tragédies, mais de longs discours sur la raison d’État, et Polyeucte, en matière de religion, est aussi solennel qu’un long point d’orgue dans un motet. […] Il est mieux dans sa nature et plus à son aise quand il fait le polichinelle que quand il singe l’homme d’État. […] Dryden n’est pas plus délicat que les hommes d’État et les législateurs. […] … Zimri769, —  homme si divers qu’il semblait ne point être — un seul homme, mais l’abrégé de tout le genre humain. —  Roide dans ses opinions, et toujours du mauvais côté, —  étant toute chose par écarts, et jamais rien longtemps ; —  vous le trouviez, dans le cours d’une lune révolue, —  chimiste, ménétrier, homme d’État et bouffon, —  puis tout aux femmes, à la peinture, aux vers, à la bouteille, —  outre dix mille boutades qui mouraient en lui en naissant. —  Heureux fou, qui pouvait employer toutes ses heures — à désirer ou à goûter quelque chose de nouveau !

875. (1925) Feux tournants. Nouveaux portraits contemporains

Il défend, lui aussi, la Constitution, et, mieux qu’un autre, l’État. » 14 juin 1924 Un essayiste. […] En conclusion, l’auteur exprimait le vœu que les hommes d’État cherchassent beaucoup plus qu’ils n’avaient fait jusque-là, « une harmonisation de l’intérêt particulier et de l’intérêt général ». […] Et il ajoute pour le lecteur allemand « On verra combien sévèrement j’ai condamné la politique nationaliste de quelques hommes d’État français, mais je ne vois pas comment elle pourrait servir de justification aux fautes du gouvernement impérial. […] Ce jeune Normand ne se soucie pas de sa terre puisqu’il ne la possède plus, c’est sur l’État qu’il porte tout son intérêt, le sentiment barrésien de la grandeur et les ressources d’un art paresseux, fait de phrases à cran d’arrêt, de raccourcis, d’images soudain somptueuses. […] Si jamais la République s’aperçoit qu’il existe des esprits préoccupés de l’État, et non pas des bénéfices assez grossiers qu’ils seraient pourtant en droit d’attendre de lui, M. 

876. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

Et, en attendant qu’ils forment une espèce de « corps », ou presque d’État dans l’État, la fortune et la naissance s’étonnent un peu d’abord, font mine de s’irriter, mais au fond ne s’effarouchent pas, et finalement s’arrangent d’être traitées par eux avec autant de désinvolture et d’agréable impertinence qu’elles se permettaient de les traiter autrefois. […] Au milieu de ce déclassement universel, ou plutôt à la faveur de ce déclassement même, l’influence des femmes continue de grandir, et pour la première fois depuis cent ans, voici qu’avec la marquise de Prie, sous le ministère du duc de Bourbon — 1723-1726 — leur pouvoir s’exerce jusque dans l’État. […] C’est aux applaudissements de la littérature qu’en 1771 le chancelier Maupeou opère son coup d’État contre les parlements. […] Les voilà maîtres des affaires ; et il faut maintenant les entendre se moquer des jeunes gens « qui se croient en sortant du collège obligés d’apprendre aux puissances à diriger leurs États » ! […] Jurieu, dans ses Lettres pastorales ; et Bossuet, Avertissements aux protestants] ; — et, à ce propos, de l’erreur fondamentale de Calvin en matière politique ; — laquelle est d’avoir confondu les droits de la religion avec ceux du gouvernement ; — et mêlé l’objet du gouvernement avec celui de la morale. — La part du plébéien dans le Contrat social ; — et qu’elle y consiste surtout dans l’incapacité de comprendre la fonction sociale de l’inégalité. — Les trois dogmes de Rousseau : — l’universelle égalité ; — la souveraineté du peuple ; — le droit absolu de l’État. — Individualisme et Socialisme ; — et comment il se fait que, tandis que les uns voient dans Rousseau l’ancêtre du « socialisme révolutionnaire », — les autres le louent « d’avoir pris comme base solide l’indépendance du moi » [Cf., pour l’abondance des contradictions à ce sujet, le livre cité de Lichtenberger, p. 129 et 130]. — C’est d’abord qu’on a méconnu le caractère de sa dialectique ; — ou de sa rhétorique ; — lequel est d’exprimer éloquemment des paradoxes agressifs ; — pour en atténuer aussitôt les conséquences. — C’est encore que son socialisme n’est que le moyen de son individualisme ; — et nous voyons, de nos jours, pour la même raison, la même contradiction subsister au sein du socialisme ; — où les anarchistes ont l’air de s’entendre avec les collectivistes ; — quoique leur idéal s’oppose en tous les points. — Et c’est enfin que Rousseau ne s’embarrasse pas de se contredire ; — si même on peut dire qu’il se soit jamais aperçu de ses contradictions.

877. (1930) Le roman français pp. 1-197

Il y a ainsi, en littérature, beaucoup de phénomènes — et importants — qui ne s’expliquent point par la connaissance de la littérature, mais par l’histoire, l’histoire seule des États et des sociétés, que le regretté Paul Souday faisait profession de négliger volontiers : ce qui est une des rares erreurs de ce grand critique intellectualiste. […] Mais il y a pis : dissertations sur le jardinage, sur la botanique, sur l’éducation des enfants, sur l’économie politique et la conduite des États ! […] Les chemins de fer furent la seule invention pratique de quelque importance, et pouvaient causer une modification des mœurs en facilitant les communications de province à province, d’État à État, en favorisant le développement de la population des grandes villes : encore y avait-il bien des régions campagnardes que les voies ferrées n’atteignaient pas, et qui demeuraient, à peu de choses près, ce qu’elles étaient auparavant. […] Un marin breton navigue « à l’État ». […] Des femmes ont dit : « Je ne puis lire Colette Baudoche sans trembler de tout mon corps. » Et je pourrais citer un homme d’État du parlement français, relativement jeune, et qui m’avouait, il y a vingt ans, que Les Déracinés avaient été pour quelque chose dans la « couleur » que prenaient ses ambitions et ses conceptions sur la vie politique.

878. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXIXe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe (2e partie) » pp. 161-232

Le duc de Weimar lui avait donné, indépendamment du ministère de l’instruction publique dans ses États, la direction absolue des théâtres et des nobles plaisirs de sa cour. Il lui avait donné de plus une place innomée, mais qui l’élevait au-dessus de toute rivalité dans la confiance du prince et dans les affaires d’État, la place de favori avoué et immuable dans son cœur.

879. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

La nature avait fait en lui un poète de décadence dans une prose qui était le récitatif de la poésie, un orateur d’académie ; elle en avait fait, au contraire, un homme d’État de premier rang et de première influence, nié par les partis et perverti par ses propres rancunes. […] XXXIV « Lady Stanhope me demanda mon nom : je vis que les journaux qu’on lui envoyait de temps en temps, malgré ses ordres, ajouta-t-elle, le lui avaient déjà prononcé ; j’ajoutai que des fonctions m’attachaient à la résidence de Constantinople, d’où je venais ; et elle me parla de quelques hommes d’État anglais que j’avais dû y voir.

880. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

Quant à ces salons où la royale comtesse était si impatiente d’avoir sa cour et que la sauvagerie d’Alfieri tenait si obstinément fermés, ils vont enfin s’ouvrir : grands seigneurs et grandes dames, hommes de guerre et hommes d’État, écrivains et artistes, y affluent bientôt de toutes parts ; c’est le foyer littéraire de l’Italie du nord, c’est un des rendez-vous de la haute société européenne. […] Quel ne fut pas son étonnement quand ce même Sismondi, si implacable quelques mois auparavant contre le tyran du monde, semblable à Benjamin Constant, son compatriote et son modèle, passa soudainement aux pieds de l’exilé vaincu de l’île d’Elbe, se fit nommer au conseil d’État pour que son ami Benjamin Constant ne fût pas seul dans l’apostasie de sa haine, et écrivit à la comtesse des lettres embarrassées et inexplicables pour expliquer cette politique sans convenance et sans transition !

881. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIe Entretien. Marie Stuart, (Reine d’Écosse). (Suite et fin.) »

Burleigh, Leicester, Walsingham, ses hommes d’État, furent unanimes à lui conseiller ce sacrifice. […] XXXII Les dangers que courrait la succession protestante en Angleterre si Élisabeth, qui avançait en âge et qui n’avait jamais voulu partager le trône avec un époux, venait à mourir avant Marie Stuart, paraissent avoir décidé son conseil au crime d’État que cette reine s’était refusée jusque-là à accomplir.

882. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre III. Pascal »

L’année 1638 commença la gloire et les malheurs de Port-Royal et du jansénisme : cette année-là, Antoine Le Maître335, avocat, conseiller d’État, quitta l’espoir d’une haute fortune pour se retirer à Port-Royal. […] Ces vigoureux pamphlets firent une impression profonde : le Parlement de Provence les condamna, Rome les condamna (sept. 1657) : à Paris, en 1660, sur le rapport d’une commission ecclésiastique, le Conseil d’État fit brûler la traduction latine que Nicole, sous le pseudonyme de Wendrocke, avait donnée des Provinciales : il est vrai que l’arrêt visait surtout une note du traducteur, où l’on vit une offense à Louis XIII.

883. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre premier »

Jamais roi ni parlement avaient-ils fait de l’admiration pour Homère une loi d’État ? […] C’est ce qui se vit au commencement du dix-huitième siècle, quand les derniers jours de Louis XIV mourant furent agités de projets de coups d’État contre les opposants à la bulle Unigenitus.

884. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

Jean-Jacques Olier, issu d’une famille qui a donné à l’État un grand nombre de serviteurs capables, fut le contemporain et le coopérateur de Vincent de Paul, de Bérulle, d’Adrien de Bourdoise, du père Eudes, de Charles de Gondren, de ces fondateurs de congrégations ayant pour objet la réforme de l’éducation ecclésiastique, qui ont eu un rôle si considérable dans la préparation du xviie  siècle. […] Une circonstance rendait de telles créations faciles et sans danger pour l’État, c’est qu’elles n’avaient pas de professorat intérieur.

885. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Lettres de m. l’Abbé Sabatier de Castres ; relatives aux trois siecles de la littérature françoise.ABCD » pp. -641

La sagesse du feu Roi, votre Pere, a su préserver vos Etats de cette contagion : la vôtre ne sera pas moins attentive, parce que ses lumieres savent également en discerner le vice & en prévoir les dangers. […] de Charrin, Commissaire Ordonnateur des Guerres, Auteur du Tableau du Ministere de Colbert, Ouvrage où presque tous les principes de l’administration d’un grand Etat sont discutés & approfondis avec autant de sagacité que d’élégance & de précision.

886. (1908) Dix années de roman français. Revue des deux mondes pp. 159-190

Qui pourrait ne pas trouver qu’il est beau d’étudier une intelligence aux prises avec les problèmes les plus vivants qui soient : la dépense prodigieuse d’énergie que suppose une affaire prospère ; la lutte contre la concurrence, et les angoisses, et l’orgueil des triomphes rapides ; l’obéissance d’un personnel nombreux aux ordres d’un seul homme : ces milliers d’industries qui sont autant de petits États dans l’État, ayant chacun sa politique extérieure et intérieure, sa dynastie, ses drames ?

887. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Variétés littéraires, morales et historiques, par M. S. de Sacy, de l’Académie française. » pp. 179-194

Ce sont ceux où il traite de quelque thèse favorite, gallicane, universitaire, des États généraux, etc.

888. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Or, c’est non seulement ce que l’État en France n’a jamais admis, c’est aussi ce que notre esprit public semble ne pas comporter.

889. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

Ce n’est point à cette révolution même que je l’impute, mais au manque absolu de direction morale qui a suivi, et auquel les hommes d’État les mieux intentionnés n’ont pas eu l’idée, ou le temps et le pouvoir, de porter remède.

890. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Le Brun »

Partout, à la cour, à l’armée, Règne un dédain de renommée Qui fait la chute des États ; soit qu’il prélude à ses hymnes républicains dans les soirées du ministère Calonne ; soit même qu’en des temps horribles, auxquels ses chants furent trop mêlés38, et dont il n’eut pas le courage de se séparer hautement, il exhale dans le silence cette ode touchante, dont le début, imité d’un psaume, ressemble à quelque chanson de Béranger : Prends les ailes de la colombe, Prends, disais-je à mon âme, et fuis dans les déserts39.

891. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « L’abbé Prevost et les bénédictins. »

Il travaille à l’État des Sciences en Europe.

892. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Troisième partie. Disposition — Chapitre V. Subordination et proportion des parties. — Choix et succession des idées »

Voltaire, imitant Shakespeare, a tout réduit, sous prétexte de régularité et de correction, à une précaution oratoire d’Antoine prend une fois pour toutes : Contre ses meurtriers je n’ai rien à vous dire ; C’est à servir l’État que leur grand cœur aspire…… Sans doute il fallait bien que César fût coupable.

893. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens II) Henry Fouquier »

Sur le divorce et sur les questions qui s’y rattachent, il a des vues d’excellent moraliste et d’homme d’État.

894. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Deux tragédies chrétiennes : Blandine, drame en cinq actes, en vers, de M. Jules Barbier ; l’Incendie de Rome, drame en cinq actes et huit tableaux, de M. Armand Éphraïm et Jean La Rode. » pp. 317-337

L’État et le peuple romain se trompaient en attribuant aux chrétiens des crimes et des pratiques infâmes ; ils ne se trompaient point en les considérant comme des ennemis irréductibles.

895. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VI. Jean-Baptiste  Voyage de Jésus vers Jean et son séjour au désert de Judée  Il adopte le baptême de Jean. »

Un grief tout personnel vint, d’ailleurs, s’ajouter à ces motifs d’État et rendit inévitable la perte de l’austère censeur.

896. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Les Confidences, par M. de Lamartine. (1 vol. in-8º.) » pp. 20-34

C’est lui qui, dans la fable du berger devenu ministre, a dit, pour nous expliquer comment le pauvre homme, brusquement jeté du milieu de son troupeau au gouvernail d’un État, s’en tire beaucoup mieux qu’on n’aurait pu croire : Il avait du bon sens, le reste vient ensuite.

897. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XV. M. Dargaud » pp. 323-339

Il y a bien partout en elle, il est vrai, et il devait y avoir, la négation de ce pouvoir religieux qui, au xvie  siècle, était la base de la constitution de l’État, mais est-ce que l’honneur et l’obligation n’étaient pas alors de le défendre contre l’irruption des idées nouvelles qui l’attaquaient, le fer aux mains ?

898. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XX. De Libanius, et de tous les autres orateurs qui ont fait l’éloge de Julien. Jugement sur ce prince. »

« Après avoir réglé, dit l’orateur, les objets les plus importants de l’administration et de l’empire, il jeta les yeux sur l’intérieur du palais ; il aperçut une multitude innombrable de gens inutiles, esclaves et instruments du luxe, cuisiniers, échansons, eunuques, entassés par milliers, semblables aux essaims dévorants de frelons, ou à ces mouches innombrables que la chaleur du printemps rassemble sous les toits des pasteurs ; cette classe d’hommes dont l’oisiveté s’engraissait aux dépens du prince, ne lui parut qu’onéreuse sans être utile, et fut aussitôt chassée du palais ; il chassa en même temps une foule énorme de gens de plume, tyrans domestiques qui, abusant du crédit de leur place, prétendaient s’asservir les premières dignités de l’État : on ne pouvait plus ni habiter près d’eux, ni leur parler impunément.

899. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VI. »

Telle était la vie puissante, l’émulation féconde de ces petits États, homogènes et rivaux, qui se multipliaient des côtes maritimes de l’Asie mineure aux campagnes de la Sicile, semblables à ces signaux de flamme que le poëte Eschyle nous montre se succédant et se répétant, des hauteurs du mont Ida au promontoire de Sunium, pour annoncer partout la victoire des Hellènes.

900. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Il eut la passion de l’État. […] Alors tout est perdu ; on croit que l’État va périr. […] Le globe du monde est sa tête de mort, les papiers d’État sont sa Bible. […] Il ne connaissait pas ses propres États. […] On imagine la rage de cette superbe douairière, qui avait des États en Espagne et un royaume au Mexique.

901. (1895) Hommes et livres

Il ne voit que Dieu et l’État : Dieu, qui veut des cœurs charitables ; l’État, qui a besoin de bras laborieux. […] Il ne se fait pas de coups d’État, au théâtre, contre le suffrage universel, et les révolutions n’y précèdent pas, elles y suivent le goût des spectateurs. […] Il semble qu’il ait plutôt cumulé les gros traitements que volé l’État espagnol. […] Il a devancé de près d’un demi-siècle le mouvement d’où est sorti l’État contemporain. […] Mais savait-on plus où on allait, en 1789, quand on ouvrait les États généraux avec cet éclat de joie universelle ?

902. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

Démétrius, pour se conformer l’usage, fut obligé de puiser largement dans les coffres de l’État et même dans le trésor du Kremlin, qui passait pour sacré. […] Des académiciens, des pairs de France, des hommes d’État, tous ceux qui avaient gémi de nos équipées littéraires, battirent des mains et poussèrent des cris d’allégresse. […] Cet anonyme homme d’État qui, dans la pièce de M.  […] » disaient les hommes d’État et les généraux de son temps. […] vous rentrez dans votre sphère ; vous revenez à ce qui fait nos délices et votre gloire : au lieu d’être des ministres contestés, des hommes d’État contestables, vous redevenez d’admirables écrivains : tout le monde y gagne, le public, l’État, et vous-mêmes. » — C’est très bien dit ; mais chaque fois que ces exilés de la politique, se consolant avec les Lettres de leurs regrets et de leurs mécomptes, publient un ouvrage, cet ouvrage est attaqué comme un manque de respect, comme une récidive, comme la secrète revanche d’esprits malades transportant dans la littérature les illusions et les rancunes de leur vie publique.

903. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Il doit avoir les qualités d’un homme d’État. […] M. de Barante a beaucoup écrit, et même fort bien, sans que ses œuvres historiques et littéraires soient beaucoup autre chose que les distractions d’un homme d’État et les plaisirs d’un sage. […] État d’âme merveilleux et rare dans lequel, par un singulier privilège, M. de Banville demeura sans effort durant un demi-siècle. […] C’est la condition de la plupart des États modernes ; elle ne nuit pas à leur prospérité et il n’y avait pas de raison pour que l’empire romain s’en trouvât plus mal qu’eux. […] Persuadé que le bonheur des peuples est la fin unique de tout gouvernement équitable, j’ai détesté le pouvoir arbitraire, source fatale de la corruption des mœurs et des États.

904. (1905) Propos littéraires. Troisième série

grand musicien en strophes ; et encore quoique, à tant de points de vue, très clairvoyant sur les destinées futures de la poésie française, il était resté un homme du xvie  siècle, un homme qui dans la poésie voit surtout les choses de forme et ne pénètre point jusqu’au fond solide ; et quand il disait qu’un poète a dans l’État juste l’utilité d’un joueur de boules, c’était boutade, sans doute, c’était modestie, très inaccoutumée du reste chez lui, c’était malicieux désir de réprimer quelques vanités littéraires un peu intempérantes ; mais c’était aussi conception de la poésie telle que devait l’avoir assez naturellement un homme, de bon sens du reste, qui ne voit pas sous le poète brillant le moraliste capable, sinon de corriger l’humanité, du moins de l’éclairer sur elle-même. […] Les hommes d’État en ont comme cela, que leurs habitudes d’esprit transposent de la langue politique à la langue littéraire et qui prennent dans celle-ci physionomie piquante. Guizot dans Corneille et son temps écrivait : « Les Révolutions littéraires, comme les autres, sont reniées surtout par ceux qui en profitent. » Rémusat disait de Bossuet : « Mon Dieu, Bossuet c’est un conseiller d’État. » Tout de même M. de Broglie commence par dire à peu près ceci : « Malherbe, c’est un conservateur. […] Il voit très bien que l’homme digne de ce nom n’est pas fait pour cela, et il se remet à la science, autrement et mieux comprise, à la science, moderne, entremêlée d’un peu de littérature, d’une visite à Hélène et à l’art antique, comme il sied. — Et alors… alors il devient un homme très considérable, l’appui d’un État penchant, l’officier d’artillerie qui s’improvise général, gagne des batailles, rétablit l’empereur sur le trône. — Mais il ne sort pas seulement des militaires de l’École polytechnique ; n’oubliez pas que les premiers rangs sont pépinière d’ingénieurs. […] Mais quand lui-même analysait un personnage, homme d’État, guerrier, poète, il faisait précisément ce qu’il reprochait aux Français de faire.

905. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Notes et pensées » pp. 441-535

Royer-Collard disait : « Guizot un homme d’État ! c’est une surface d’homme d’État !  […] en politique Guizot est bête. » Cela veut dire que comme homme d’État, comme ministre, Guizot manque d’idées, et c’est juste. […] C’est un grand orateur politique, ce n’est pas un homme d’État.

906. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre sixième »

Les auteurs sont au roi, en qui se personnifie l’Etat, et qui leur décerne des pensions à titre de récompenses publiques. […] La république des lettres en France pouvait alors se comparer à un État où deux partis, à peu près d’égale force, se disputent le gouvernement. Qu’un caractère, un talent s’y produise, voilà l’un des partis qui devient le maître, et l’État est assuré. […] En recevant les dons du roi, depuis que le roi était devenu l’État, il n’aliéna pas son droit de dire la vérité, même au roi111.

907. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

La préface du Disciple est une exhortation aux vertus civiques sur qui se fonde la prospérité des États. […] Cette personne distinguée dont Casal a fait l’éducation, et qui a pris l’amour des grandeurs dans ses relations successives avec plusieurs têtes couronnées, se demanda longtemps si elle ferait de son mari un secrétaire d’ambassade, un maître des requêtes au Conseil d’État, un consul ou un trésorier-payeur général. […] Foggia, où il a trouvé des « hôtels infâmes et des voitures sordides », a cependant évoqué, à ses yeux, toute une féerie : la royauté fantastique de ce Frédéric de Souabe, qui, maître de l’Allemagne, de la Sicile, de Jérusalem, essaya de refaire, avec cette mosaïque de royaumes, « l’empire du monde, l’orbis romanus qui, depuis la chute de la civilisation antique jusqu’aux jours récents de Napoléon, a hanté le cerveau de tous les grands dévorateurs d’État ». […] Retirez-vous ; je vous donne trois jours pour sortir de mes États. » Après ce coup de théâtre, le duc de Savoie signa une ordonnance qui défendait à tous ceux qui possédaient des biens ou des revenus ecclésiastiques dans les bailliages, de les louer à des hérétiques, sous peine de confiscation. […] Pendant une séance de nuit, comme le ministre de la guerre s’était endormi et que les autres secrétaires d’État penchaient le nez sur leurs portefeuilles : « Allons !

908. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

Le dernier habitant de village a aujourd’hui un horizon géographique plus large, des intérêts intellectuels plus nombreux et plus compliqués, que le premier ministre d’un petit État et même d’un État moyen il y a un siècle ; en lisant seulement son journal, fût-ce la plus innocente feuille de chou locale, il prend part, non pas en intervenant et en décidant, sans doute, mais avec un intérêt de curiosité et de réceptivité, à mille événements qui se passent sur tous les points du globe, et il se préoccupe simultanément de l’issue d’une révolution au Chili, d’une guerre de brousse au Dahomey, d’un massacre dans la Chine du Nord, d’une famine en Russie, d’une échauffourée en Espagne, et d’une exposition universelle dans l’Amérique du Nord. […] Les petits-fils des serfs ruraux qui pillèrent et détruisirent les châteaux seigneuriaux, en égorgèrent lâchement les habitants et s’emparèrent de leurs terres ; les descendants des boutiquiers et des savetiers des villes qui s’enrichirent par la politique des rues et des clubs, la spéculation sur les biens nationaux et les assignats, ainsi que par des fraudes dans les fournitures militaires, ne veulent pas être confondus avec la foule ; ils veulent former un État privilégié ; ils veulent être reconnus comme caste supérieure.

909. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

Il y avait dans Bernardin de Saint-Pierre plus du rêveur que de l’homme d’État. […] Ils se défiaient de l’ambition de l’homme d’État, ils préféraient leur innocente indépendance d’hommes de lettres aux engagements sans retour avec le héros du temps. […] Enfin l’athéisme, accroissant son audace par ses succès, faisait des prosélytes jusque parmi les gens de bien, effrayés de leur ruine future, et bannissait de toutes les grandes places de l’État ceux des académiciens qui osaient croire publiquement en Dieu. » Ici commence une des scènes les plus scandaleuses de la révolution.

910. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

Les uns ont embrassé cette créance pour obtenir des emplois à la cour, et des pensions de l’État ; les autres, pour avoir l’honneur de marier leurs filles au roi, ou seulement de les faire entrer au service de ses femmes. […] Mais, hors de là, il le considérait infiniment pour le parfait dévouement qu’il avait aux intérêts de l’État, pour sa vertu et ses grandes qualités. […] Il passa le temps à voir les jeux, les combats et les exercices qui se faisaient dans la place, à entendre la symphonie qu’il y avait dans le salon, composée des meilleures voix et des plus excellents joueurs d’instruments qui soient à ses gages, à discourir avec les grands de son État, qui étaient dans l’assemblée, et à boire et manger.

911. (1895) La science et la religion. Réponse à quelques objections

Dans l’Encyclique du 29 juin 1881, après avoir défini l’inquiétude qui travaille les sociétés modernes, il poursuivait en ces termes hardis : Ce qu’il y a de plus grave, c’est que, au milieu de tant de périls, les chefs des États ne semblent disposer d’aucun remède propre à rétablir la paix dans les esprits et l’ordre dans la société. […] Car on voit la conséquence, et qu’au lieu d’en chercher la solution dans les analogies de l’histoire naturelle, comme font nos sociologues ; ou dans l’extension tyrannique des pouvoirs de l’État, comme font les socialistes ; ou dans la destruction de toute société, comme les anarchistes, on ne la trouvera pas non plus, cette solution chimérique, mais on n’en approchera qu’en la demandant à la morale de l’effort individuel ! […] Professeur au Collège de France ; directeur et président de section à l’École des hautes études ; secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences ; grand officier de la Légion d’honneur, sénateur ; ancien ministre ; membre d’une foule de Conseils plus supérieurs les uns que les autres ; logé par l’État, à la ville, et à la campagne, du côté de Meudon, où l’on conte qu’il étudie « la fixation de l’oxygène de l’air par le vert des plantes » en mangeant des fraises exquises, — on ne peut évidemment pas dire que la science ait fait « banqueroute » à mon très cher et très éminent confrère M. 

912. (1902) Le chemin de velours. Nouvelles dissociations d’idées

État de dégradation intellectuelle vers lequel marche aussi l’humanité européenne, où les végétariens mystiques furent les précurseurs des socialistes sentimentaux. […] Quand les maîtres sont au pouvoir, les coups retombent sur les esclaves ; si l’Etat est gouverné par la coalition des esclaves, c’est contre les maîtres que l’injustice est déchaînée. […] Paul Bert voulait que l’on appelât les lois : commandements de l’Etat, en pendant aux commandements de l’Eglise. […] Si, au lieu d’être des états, les sociétés étaient ce que dit le mot, des associations, on pourrait espérer beaucoup et tenter beaucoup ; l’Etat est la faux qui fauche, sitôt sortie de terre, l’herbe des bonnes volontés. […] Si pourtant je vous envoie cette note, c’est par sympathie pour votre œuvre et parce que vous défendez, comme j’ai quelquefois essayé de le faire, l’individualisme et la liberté contre la tyrannie et les vilaines entreprises de l’Etat et des Lois.

913. (1900) Molière pp. -283

Dans les années qui avaient suivi le coup d’État, M.  […] Il y a toujours eu, chez les hommes, une tendance à imiter dans leur maison le gouvernement de l’État. Et, comme dans l’État le roi seul était tout, cette cause latente suffisait pour faire que, dans la famille, à certains moments — les plus graves, — il n’y eût qu’un personnage qui comptât : le père, le mari. […] Suivant au théâtre la trace et le contrecoup de la révolution qui se prépare dans l’État, nous verrons la bourgeoisie et le simple peuple s’y élever peu à peu à des rôles plus hauts et y faire chaque jour plus honnête figure ; et, à mesure que leur considération s’accroîtra dans ce monde fictif, nous verrons s’y introduire plus de retenue, le sentiment de la dignité morale devenir plus vif et plus net. Le privilège est un arbre qui porte deux fruits amers : la violence et la fraude ; et, s’il est bon, pour beaucoup de causes, qu’il y ait dans l’État une hiérarchie sagement mesurée, mais une hiérarchie sans dureté et sans morgue, trop d’intervalles infranchissables entre les différentes portions d’un même peuple sont rarement utiles au bonheur de tous et à la sécurité de chacun.

914. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIe entretien. Phidias, par Louis de Ronchaud (2e partie) » pp. 241-331

Ces deux hommes se ressemblaient étonnamment de figure et de caractère ; tous les deux portaient sur une taille haute et mince une tête noble, pâle, gracieuse, pensive, loyale et fine, beaucoup plus grecque de contours et de traits que romaine ou vénitienne ; ils étaient du même âge à l’œil, de cet âge heureux pour les hommes d’État et pour les artistes, où le soleil de la vie n’éclaire plus que le sommet (le front) comme à cette heure de la soirée où le soleil du jour n’éclaire plus que les cimes. […] Ces édifices gigantesques, dont la grandeur imposante étonne l’esprit et le refoule sur lui-même, plein d’une crainte mystérieuse, ressemblent aux nations endormies sous l’oppression des religions d’État et du despotisme oriental.

915. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre III. Molière »

En 1653, Molière joue à Pézenas devant le prince de Conti, son ancien condisciple, gouverneur du Languedoc ; en 1634, à Montpellier ; en 1655-1656, à Pézenas, devant les Etats ; en 1656, à Narbonne, devant le Prince ; à la fin de 1656, à Béziers, devant les États : là, il donne le Dépit amoureux.

916. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre II. Le rôle de la morale » pp. 28-80

Et jusque-là, le mot de liberté ne peut avoir aucun autre sens que celui de « liberté du bien », de ce que l’on considère comme le bien, impliquant forcément la répression de ce que l’on considère comme le mal, ou encore le mot de liberté ne prendra de valeur que par rapport à l’état constitué, c’est-à-dire qu’il signifierait le droit pour chacun de faire respecter sa liberté par l’État, mais non par les autres individus. […] Et nous, en tant qu’êtres sociaux, nous avons un ensemble d’opinions sur les hommes, sur l’État, sur les lois, sur les fonctionnaires, sur la famille et sur le véritable bien, mais en tant qu’individus égoïstes, nous avons d’autres impressions et d’autres vues.

917. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1882 » pp. 174-231

Est-ce que je suis condamné à demeurer, toute ma vie, l’homme qui a publié son premier livre, le jour du Coup d’État ? […] Je trouve que la manière d’être la plus utile à sa patrie : c’est de passer toute sa vie, sans toucher un sou du budget de l’État.

918. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse sociologique »

Il n’existe pas de race ayant ces caractères de pureté et d’homogénéité, ou du moins il n’en existe pas qui soit devenue une nation, qui ait fondé un Etat civilisé, produit un art et une littérature. […] Que l’on considère que les sociétés primitives, en vertu des lois du progrès, tendront à devenir plus hétérogènes, à s’agréger à d’autres pour former une confédération supérieure d’États, à se diviser et à s’assembler en nations, en vastes empires.

919. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

Il célébrait avec effusion en Louis XVI « le chef d’une nation éclairée, régnant sur un peuple de citoyens ; roi par la naissance, mais de plus, par la bonté de son cœur et par sa sagesse, le bienfaiteur de ses peuples et le restaurateur de ses États ».

920. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — II. (Suite.) » pp. 463-478

Celui-ci, conseiller privé de la régence de Saverne, chef du conseil et secrétaire du cardinal (on lui donne alternativement tous ces titres), appliquait en effet ses connaissances précises à l’administration de ce petit État, en même temps qu’il charmait par son esprit l’intérieur du palais.

921. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — I » pp. 56-70

Dès le premier instant qu’il eut à commander à d’autres, dès qu’il eut à porter enseigne, dit-il, il voulut savoir ce qui est du devoir de celui qui commande, et se faire sage par l’exemple des fautes d’autrui : « Premièrement j’appris à me chasser du jeu, du vin et de l’avarice, connaissant bien que tous capitaines qui seraient de cette complexion n’étaient pas pour parvenir à être grands hommes. » Il développe ces trois chefs, et particulièrement, et avec une verve singulière, les inconvénients de l’avarice en un capitaine : « Car si vous vous laissez dominer à l’avarice, vous n’aurez jamais auprès de vous soldat qui vaille, car tous les bons hommes vous fuiront, disant que vous aimez plus un écu qu’un vaillant homme… » Il ne veut pas qu’un homme de guerre, pareil à un citadin ménager, songe toujours à l’avenir et à ce qu’il deviendra en cas de malheur ; le guerrier est enfant de l’État et du prince, et il pose en maxime « qu’à un homme de bien et vaillant, jamais rien ne manque. » — Après ces trois vices qui sont à éviter à tout prix, car ils sont ennemis de l’honneur, il en touche plus rapidement un quatrième dans lequel, sans raffiner sur les sentiments, il conseille du moins toute modération et sobriété : C’est l’amour des femmes : ne vous y engagez pas, cela est du tout contraire à un bon cœur.

922. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Lettres sur l’éducation des filles, par Mme de Maintenon » pp. 105-120

Une fois Saint-Cyr établi, Mme de Maintenon s’y adonne tout entière ; se considérant comme chargée d’une mission par le roi et par l’État, elle y consacre les moindres parcelles de son temps et y dirige toute la lumière et tout l’effort de son esprit.

923. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal de Dangeau. tomes III, IV et V » pp. 316-332

On a connu, depuis, les inconvénients du sans-gêne dans les hommes publics et dans les choses d’État.

924. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

Il y a bien des années, et avant qu’une critique investigatrice eût rassemblé autour de cette figure de Bossuet tous les éclaircissements et toutes les lumières, un écrivain de beaucoup d’esprit, s’essayant à définir le grand évêque gallican, disait : « Bossuet, après tout, était un conseiller d’État. » Si par là on ne voulait dire autre chose, sinon qu’il y avait en Bossuet un homme politique, un homme capable d’entrer dans le ménagement des personnes et la considération des circonstances, on avait raison ; mais si l’on prétendait aller plus loin, toucher au fond de sa nature et infirmer l’idée fondamentale du prêtre, on se tromperait : car au fond de cette nature, telle qu’elle ressort aujourd’hui de tous les témoignages et qu’elle nous apparaît dans une continuité manifeste, il y a avant tout et après tout un croyant.

925. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Souvenirs et correspondance tirés des papiers de Mme Récamier » pp. 303-319

Au fond, trop poète toujours pour la politique, il est désormais trop homme d’État et trop politique pour la retraite, pour l’innocent et studieux loisir du poète : il porte en lui l’inconciliable. — Lorsqu’il est renvoyé du ministère, en cette crise violente et décisive qui déchira en deux sa vie de royaliste, ses lettres à Mme Récamier manquent et font défaut ; elles n’ont pas été retrouvées, nous dit-on, avec les autres papiers ; elles devaient renfermer trop d’éclats de colère et de haine vengeresse, ce qui sans doute les aura fait dès longtemps supprimer.

926. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Mémoires du duc de Luynes sur la Cour de Louis XV, publiés par MM. L. Dussieux et E. Soulié. » pp. 369-384

Mme de Vintimille, liguée avec Mme de Mailly, ne s’était jamais senti de force à faire ce coup d’État dans l’âme du roi, et un jour qu’en une circonstance critique Mme de Mailly et elle avaient essayé de lutter directement contre l’influence du cardinal, au moment même de réussir sur l’objet en question, elles virent en définitive qu’il fallait céder, et Mme de Vintimille dit fort sensément à sa sœur : « Nous pourrions peut-être l’emporter aujourd’hui sur le cardinal, mais il est absolument nécessaire au roi, et nous serions renvoyées dans trois jours. » Mme de La Tournelle tenta hardiment l’aventure : l’eût-elle emporté si le cardinal eût vécu ?

927. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

— Élevons-nous d’un degré : Combien faut-il de Vauvenargues, d’André Chénier, de Barnave, pour arriver au philosophe, au poète puissant et complet, à l’orateur homme d’État, qui domine son temps, qui fait époque et qui règne ?

928. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Questions d’art et de morale, par M. Victor de Laprade » pp. 3-21

M. de Laprade est beau-frère de M. de Parieu, vice-président du Conseil d’État.

929. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Contes de Perrault »

Il est excellent dans son ordre et d’un singulier à propos ; il vient heureusement en aide à ce sentiment de justesse et de perfection qui caractérise la belle heure de Louis XIV ; il en est le plus puissant organe, le plus direct et le plus accrédité en son genre ; il est, on peut le dire, conseiller d’État dans l’ordre poétique, tant il contribue efficacement et avec suite à la beauté solide et sensée du grand siècle.

930. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

Dès le commencement, avec les Bardes anglais et les Critiques écossais ; il blessa les meilleurs écrivains… Loin de reculer, dans son ouvrage suivant il continue son opposition et ses blâmes, il touche l’État et l’Église.

931. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Mais, quand on est à cet endroit du récit où l’action commence, deux dissertations surviennent qui interrompent et font vraiment hors-d’œuvre, l’une sur la cuisine classique et romantique, l’autre sur la noblesse et son rôle dans l’État.

932. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

Les villes, les États, les plus grands noms, Montmorency, La Rochefoucauld, nous avons tous fait le sacrifice de nos privilèges sur l’autel de la patrie !”

933. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les cinq derniers mois de la vie de Racine »

devinrent par la suite un crime d’État.

934. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite et fin.) »

Trois ou quatre jours auparavant, le maréchal de Belle-Isle, ministre de la guerre, ayant reçu un courrier du comte de Clermont, qui n’apportait que des détails sur la position de l’armée, jugea pourtant devoir en rendre compte immédiatement au roi ; il le trouva dans la cour du château, déjà en carrosse, prêt à partir pour le pavillon de Saint-Hubert, et il n’hésita pas à faire arrêter le carrosse pour donner les lettres à lire : « Cela dura un demi-quart d’heure, nous dit M. de Luynes, et fit un spectacle, car il n’est pas ordinaire de voir un secrétaire d’État, ni qui que ce soit, faire arrêter les carrosses du roi, et c’est peut-être la première fois que cela est arrivé, au moins depuis longtemps. » Une victoire, en effet, eût été un grand soulagement après une aussi triste campagne, et, sans réparer les fautes, elle les eût couvertes ; l’honneur du comte de Clermont eût été sauvé.

935. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand »

Envisagé à ce point de vue, l’Essai de sir Henry Bulwer, sans être complet, est tout à fait digne de l’homme d’État distingué qui l’a écrit, et il est piquant, pour nous Français, autant qu’instructif de voir des événements et des hommes avec lesquels nous sommes familiers, jugés dans un esprit élevé et indépendant par un étranger, qui d’ailleurs connaît si bien la France et qui, de tout temps, en a beaucoup aimé le séjour et la société, sinon les gouvernements et la politique.

936. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

« Il ne faut pas dire : « Il n’y a pas eu d’hommes d’État dans tel pays, car s’il s’y en était trouvé, ils se seraient élevés comme Cromwell, lequel a prouvé, ainsi que d’autres, qu’il n’était pas nécessaire d’être né sur le trône. » Cela n’était pas nécessaire pour lui, mais l’était pour d’autres qui, moins en état de s’élever comme lui, ou plus scrupuleux sur le choix des moyens, sont restés simples particuliers.

937. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « GLANES, PÖESIES PAR MADEMOISELLE LOUISE BERTIN. » pp. 307-327

Et puis l’humble poésie est à bord, après tout, du grand vaisseau de l’État, et telles seront les destinées de l’ensemble, telles aussi un peu les siennes en particulier.

938. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires de madame de Staal-Delaunay publiés par M. Barrière »

Sa première éducation avait été solide, recherchée, brillante ; ce couvent de Saint-Louis à Rouen, où elle passa ses plus belles années, était « comme un petit État où elle régnoit souverainement. » Elle aussi, elle avait eu sa cour, sa petite cour de Sceaux dans ce couvent de Saint-Louis où M. 

939. (1900) L’état actuel de la critique littéraire française (article de La Nouvelle Revue) pp. 349-362

Il considère le fait d’écrire comme une carrière d’État, qui doit être utile à la nation, et le rôle du critique comme celui d’un fonctionnaire ; il est convaincu au même point que les professeurs de l’Académie des Beaux-Arts perpétuant l’enseignement de la peinture sans même admettre l’hypothèse que l’art ne s’enseigne pas.

940. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

C’est un siècle calme, ordonné, conservateur, où la pensée et la société se reposent sous le joug multiple de l’Etat, de l’Eglise, des Académies, des traditions, des convenances et des règles de toute espèce.

941. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Madame Récamier. » pp. 121-137

Après le dîner, Mme Récamier sortit et voulut voir Fouché, qui refusa de la recevoir, « de peur d’être touché, disait-il, et dans une affaire d’État ».

942. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Le poète Callimaque a fait une épigramme où il dit à peu près : « Ce lièvre que le chasseur poursuit par monts et par vaux avec toutes sortes de fatigues et par toutes les intempéries de l’air, donnez-le-lui tout tué, il n’en voudra pas. » Anselme, pour le résumer dans sa double carrière, reste mémorable à deux titres : historiquement, il a été l’un des patrons, des défenseurs, des militants et des patients pour la liberté de l’Église en face de l’État, scientifiquement, il est l’inventeur d’un argument métaphysique pour l’existence de Dieu, ce qui, joint à ses autres écrits, fait de lui l’un des rares successeurs de saint Augustin et de Platon, l’un des prédécesseurs de Descartes et de Malebranche.

943. (1899) Psychologie des titres (article de la Revue des Revues) pp. 595-606

Seul un poète comme Hugo pourra se permettre d’appeler d’un terme aussi vague que l’Histoire d’un crime, le récit du Coup d’État du 2 décembre 1851.

944. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

et qu’on ait mis jusqu’aux Vapeurs de l’État, aux ordres de cette pèlerine de la Révolution, en tournée.

945. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIV. »

Pour nous, studieux collecteurs des reliques de l’antiquité, réduits souvent à la deviner sur de bien faibles indices, nous croyons, avec un de ses plus beaux génies, que chez les Grecs, innover dans la musique, c’était bouleverser l’État ; nous voyons la constitution de Sparte garantie par ce magistrat qui coupe deux cordes nouvelles ajoutées à la lyre d’Alcman ; et nous supposons, en revanche, sur le théâtre et dans les fêtes d’Athènes une musique aussi hardie, aussi diverse que les orages de la démocratie.

946. (1898) Impressions de théâtre. Dixième série

Mais une crise ministérielle fait Chambard sous-secrétaire d’État. […] Quand on est à même de faire un coup d’État que l’on croit nécessaire et juste, on le fait soi-même (c’est plus sûr) et pour soi. […] À première vue, État paraît une entité ; et le tort fait à l’État semble donc moins grave que le tort fait à une personne. Sans compter qu’à l’heure qu’il est, il n’est vraiment pas prouvé que l’État rende à chacun de nous l’équivalent de ce qu’il lui demande ou lui prend. […] Que Denis Roger aille devoir de ne léser ni Mlle Manon, ni même l’État, voilà qui est incontestable.

947. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Qui sait s’il n’est pas réservé à une âme obscure, à une intelligence inférieure, à un poète, à un orateur, à un homme d’État, simplement à un brave homme, de prononcer la parole douce et puissante qui réveillera nos espoirs évanouis ? […] Partout les mêmes symptômes, les mêmes phénomènes : écrasement des corps faibles par l’État, tendance croissante de celui-ci à l’ingérence, à l’absorption de tous les services, descente du pouvoir aux mains de la majorité numérique, menace permanente du socialisme. Ces déclarations ne risquent pas de devenir des axiomes, l’ambition de tous les Français étant de monter, comme cochers, serre-freins, valets de pied ou simples mouches de coche, sur le char de l’État. […] Les gendarmes, sous-préfets, préfets, sous-chefs, chefs-adjoints et chefs de bureau, huissiers de cabinet, secrétaires particuliers, sous-secrétaires d’État, ministres, aspirants ministres (et Dieu sait s’il y en a dans notre pays !) […] À chaque pas, on se récite mentalement cette maxime si juste, que Taine a répétée lui-même à propos de Guizot : « Pour écrire l’histoire politique, il faut avoir manié les affaires d’État.

948. (1896) Études et portraits littéraires

Mais si l’on impute à cette « forme fixe d’intelligence » la Révolution et tout dans la Révolution, erreurs et crimes, anarchie, dictature, jusques et y compris l’Empire et l’actuelle omnipotence de l’État, je pense qu’on élimine ou qu’on oublie ou qu’on fausse quelque chose. […] Le discours du chevalier Roze sur la culture de l’esprit ou de la science de l’État, nous n’avons garde d’en refaire la critique. […] Il l’a traitée durant une année de cours, devant un auditoire de jeunes gens, de ceux à qui l’État donne mission professionnelle de former l’âme française. […] D’abord le Conseil d’État, où Regnault de Saint-Jean-d’Angély et Cambacérès, — tous deux obligés de son père, — s’engageaient à le faire entrer. […] Avocat, il défend l’honneur d’un homme d’État, son ami, ou l’économie domestique de M. 

949. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

Les œuvres inédites de Victor Hugo contiennent des pages dignes de Montesquieu sur les effets sociaux du luxe et sur le peuple : « Le luxe est un besoin des grands Etats et des grandes civilisations ; cependant il y a des heures où il ne faut pas que le peuple le voie… Quand on montre le luxe au peuple dans des jours de disette et de détresse, son esprit, qui est un esprit d’enfant, franchit tout de suite une foule de degrés ; il ne se dit pas que ce luxe le fait vivre, que ce luxe lui est utile, que ce luxe lui est nécessaire ; il se dit qu’il souffre et que voilà des gens qui jouissent ; il se demande pourquoi tout cela n’est pas à lui, il examine toutes ces choses, non avec sa pauvreté qui a besoin de travail et par conséquent besoin des riches, mais avec son envie. […] lumière… Ces pieds nus, ces bras nus, ces haillons, ces ignorances, ces abjections, ces ténèbres peuvent être employés à la conquête de l’idéal… Ce vil sable que vous foulez aux pieds, qu’on le jette dans la fournaise, qu’il y fonde et qu’il y bouillonne, il deviendra cristal splendide ; et c’est grâce à lui que Galilée et Newton découvriront les astres. » Hugo conclut que « les deux premiers fonctionnaires de l’Etat, c’est la nourrice et le maître d’école221. » Il se persuade que « l’éducation sociale bien faite peut toujours tirer d’une âme, quelle qu’elle soit, l’utilité contient qu’elle222 ». […] Dumas aboutit à ce jugement, naïf à force de subtilité malveillante : « Il a aimé la liberté, parce qu’il a compris que la liberté seule pouvait lui donner la gloire telle qu’il la voulait, et qu’un simple poète ne pouvait aspirer à être au-dessus de tous que dans une société démocratique… Il a répudié la monarchie et le catholicisme, parce que, dans ces deux formes sociale et religieuse de l’Etat, il aurait toujours eu inévitablement quelqu’un au-dessus de lui. » Ainsi Hugo n’a pas d’autre raison à opposer au catholicisme que les intérêts de son orgueil personnel !

950. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

. — L’Église, en tant que théocratie, est également finie dès le xvie  siècle ; la critique historique de la Renaissance l’a ruinée irrémédiablement ; elle subsiste comme religion, et même comme religion d’État, et, malgré toutes les crises, elle s’accommode plus ou moins aux temps nouveaux ; mais à elle aussi le xviiie  siècle porte un coup dont les conséquences se manifestent lentement aujourd’hui. […] On a déjà relevé la ressemblance qu’il y a entre le Romain de Balzac et celui de Corneille, la quasi-identité des notions raison et volonté chez Descartes et chez Corneille ; on pourrait faire bien d’autres rapprochements encore, et en particulier avec Mlle de Scudéry. — Tout ce qu’il y a de violent, de chevaleresque, de romanesque dans l’esprit du temps, on le trouve chez Corneille, ainsi que cette raison d’État que Madeleine de Scudéry proclame hautement malgré ses sympathies pour Condé et Mlle de Longueville. La raison d’État, qui s’impose avec une évidence aussi absolue, mène à l’héroïsme, qu’il ne faut pas confondre avec le tragique ; elle est aussi peu « dramatique » que la volonté de Dieu dans l’Abraham de Bèze.

951. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « M. Ampère »

Les contrastes qui frappent chez Laplace, Lagrange, Monge et Cuvier, ce sont, par exemple, leurs prétentions ou leurs qualités d’hommes d’État, d’hommes politiques influents, ce sont les titres et les dignités dont ils recouvrent et quelquefois affublent leur vrai génie. […] Or, tout style (la vérité de l’idée étant donnée) est un choix entre plusieurs expressions ; c’est une décision prompte et nette, un coup d’État dans l’exécution.

952. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIe entretien. L’Arioste (2e partie) » pp. 81-160

Je partis en pleine nuit, une nuit d’été en Italie, accompagné par un vieux paysan de la ferme ; il portait ma valise et il devait me servir de guide jusqu’à la mer, pour aller m’embarquer sur une felouque d’Ancône qui faisait le cabotage sur le littoral des États romains. […] « Signé : Jules Bastide. » * * * De ce que vous venez de lire, il résulte que le gouvernement du général Cavaignac n’a point voulu intervenir, et n’est intervenu en aucune façon dans les affaires intérieures, non pas de la république romaine, qui n’exista que deux mois plus tard, mais dans les affaires de l’État romain.

953. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1860 » pp. 303-358

L’État surtout, depuis 1789, a été diantrement absorbant, a joliment entamé au profit de tous, les droits d’un chacun, et je me demande si l’avenir ne nous réserve pas, sous le nom du gouvernement absolu de l’État, servi par le despotisme d’une bureaucratie française, une tyrannie bien autre que celle d’un Louis XIV.

954. (1856) Cours familier de littérature. I « IVe entretien. [Philosophie et littérature de l’Inde primitive (suite)]. I » pp. 241-320

Elle feint de vouloir choisir un nouvel époux, et fait proclamer dans tous les États voisins que les prétendants à sa main peuvent se présenter à la cour du roi son père. […] « La femme aux joues vermeilles attire sur son sein la tête de son bien-aimé ; elle soupire et sourit à la fois ; ils passent la nuit à se redire comment ils avaient erré sans guide, sans vêtement et sans nourriture, dans la forêt. » XXXVIII Nala, purifié de ses fautes par le pardon de l’amour, rentre, suivi de Damayanti, de ses enfants et de ses serviteurs, dans ses États.

955. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

Joram, par un mariage politique qui rétablissait la paix entre les deux États, avait épousé Athalie, fille d’Achab et de Jézabel. […] Huit ans déjà passés, une impie étrangère Du sceptre de David usurpe tous les droits, Se baigne impunément dans le sang de nos rois, Des enfants de son fils détestable homicide, Et même contre Dieu lève son bras perfide ; Et vous, l’un des soutiens de ce tremblant État, Vous, nourri dans les camps du saint roi Josaphat, Qui sous son fils Joram commandiez nos armées, Qui rassurâtes seul nos villes alarmées Lorsque d’Ochosias le trépas imprévu Dispersa tout son camp à l’aspect de Jéhu : « Je crains Dieu, dites-vous, sa vérité me touche ! 

956. (1739) Vie de Molière

Le théâtre commençait à fleurir alors : cette partie des belles-lettres, si méprisée quand elle est médiocre, contribue à la gloire d’un État, quand elle est perfectionnée. […] Il y a de la cruauté à vouloir avilir des hommes nécessaires à un État bien policé, qui exercent, sous les yeux des magistrats, un talent très difficile et très estimable.

957. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire littéraire de la France. Ouvrage commencé par les Bénédictins et continué par des membres de l’Institut. (Tome XII, 1853.) » pp. 273-290

Mais, du milieu des bornes que certaines doctrines imposaient à sa vue, et du fond de sa solitude, cet homme de labeur et de vérité fut saisi d’une noble ardeur, du désir de faire quelque chose « pour l’utilité de l’Église et de l’État », et d’unir le devoir d’un chrétien et celui d’un bon citoyen : Nous nous proposons, disait-il, de ménager aux Français l’agrément d’avoir un recueil complet des écrivains qu’eux et les Gaulois leurs prédécesseurs, avec qui ils n’ont fait dans la suite qu’un même peuple, ont donnés à la république des lettres.

958. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — I. » pp. 279-295

Dans une unité plus parfaite de l’État, les grandes institutions publiques succéderont.

959. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — II. (Fin.) » pp. 427-443

Je trouve que la terre de Naples est tout à fait poétique, et ses habitants rappellent incontestablement les Grecs, leurs fêtes et leurs usages : l’État pontifical me paraît avoir un aspect différent ; les Romains ont quelque chose de plus sérieux et qui est en rapport avec l’idée que, généralement, on se fait de leurs ancêtres.

960. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — III » pp. 476-491

Cette correspondance, qui n’est qu’une indication de ce qui a fui et de ce qui ne s’écrivait pas, se termine assez naturellement, dans les premiers mois de 89 et avec l’ouverture des États généraux, d’abord parce que M. de Meilhan revint à Paris, et aussi parce qu’un commerce de lettres intimes sur les intérêts de société devenait insignifiant en présence des grands événements publics.

961. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Guillaume Favre de Genève ou l’étude pour l’étude » pp. 231-248

Ce que l’homme d’État hollandais rendu à la retraite se plaisait à se dire dans une promenade aux environs de Leyde ou de La Haye, Guillaume Favre le sentait à plus forte raison, lui possesseur et connaisseur plus fin, en vue de son Léman et dans l’exercice délicieux de sa faculté curieuse à travers les domaines de l’histoire.

962. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance de Buffon, publiée par M. Nadault de Buffon » pp. 320-337

Le noble vieillard était flatté de se voir si compris et si adoré par une femme d’esprit et de vertu, qui avait encore des restes de beauté, et dont le mari, ne l’oublions point (car Buffon était sensible à ces choses), tenait une si grande place dans l’État : « Mon âme, lui écrivait-il galamment, prend des forces par la lecture de vos lettres sublimes, charmantes, et toutes les fois que je me rappelle votre image, mon adorable amie, le noir sombre se change en un bel incarnat. » Il a le cœur en presse, dit-il, la veille du jour où il doit l’aller voir ; mais s’il l’attend chez lui, elle, en visite, à Montbard, que sera-ce ?

963. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

Son ambition, quand il en avait une, eût été de jouer dans un État aristocratique le rôle de magistrat populaire ; mais la vie publique dans une démocratie effective lui aurait été plus désagréable que dans une cour, même absolue.

964. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’Impératrice Catherine II. Écrits par elle-même. »

Mais la nature humaine est moins simple, l’histoire des nations est d’une formation plus dure et plus rebelle, le bien et le mal y sont moins aisés à démêler, à produire ou à corriger, que cette théorie ne le suppose ; et si fâcheux souvent qu’ils soient, si à charge ; qu’on les trouve pour les inconvénients dont ils font payer leurs qualités, on n’est pas, encore arrivé, dans notre Europe du moins, à rendre inutiles pour le gouvernement des États les grands caractères et les grands hommes.

965. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Hamilcar, le grand homme d’État, le père d’Hannibal, ne gagne pas à cette visite où il est présenté comme un violent et un cupide, ne se possédant pas, à tout moment hors de lui-même.

966. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Richelieu l’avait fait conseiller d’État et historiographe de France, sans peut-être se montrer disposé à utiliser les talents de Balzac dans les grands emplois auxquels celui-ci se serait estimé propre.

967. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre III. Madame de Staël »

Elle juge les événements du point de vue de son amour-propre : le régime où elle pourrait parler librement, qui enverrait ses hommes d’État chez elle, qui ferait de son salon un Conseil officieux, n’aurait sans doute pas trop de mal à la gagner.

968. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

Quand on vient de parcourir, comme j’ai fait, dans la Revue bleue 76 et dans le Journal des Débats les trois années de critique dramatique de cet ancien professeur qui a été journaliste, conseiller d’État, directeur des affaires étrangères, et qui est resté un fantaisiste, sinon un bohème, un « inclassable », sinon un déclassé, on est charmé, ravi, ébloui : mais on est aussi déconcerté, ahuri, abasourdi.

969. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVI. Les derniers temps de la comédie italienne en France » pp. 311-338

Croiriez-vous que dans mes États il n’y a point de bourreaux ?

970. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre onzième. »

Malgré le désintéressement qui lui fit retrancher toutes les maximes trop particulières, et toutes les généralités hasardées, le malaise de sa vie à cette époque, ses froissements personnels, ses luttes, sa passion pour Mme de Longueville, à laquelle il eût sacrifié l’Etat, lui avaient fait un fond d’humeur qui s’épancha dans ses pensées et attrista sa raison d’une manière irréparable.

971. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

Elles sont autres chez le marchand occupé d’achat et de ventes que chez le légiste occupé de juges, de clients, de témoins ; autres chez le médecin que chez l’homme d’État ; autres chez le soldat que chez le métaphysicien.

972. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mme de Graffigny, ou Voltaire à Cirey. » pp. 208-225

Je vous l’ai toujours dit : si mon père, mon frère ou mon fils était Premier ministre dans un État despotique, j’en sortirais demain ; jugez ce que je dois éprouver de répugnance en m’y trouvant aujourd’hui.

973. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame, duchesse d’Orléans. (D’après les Mémoires de Cosnac.) » pp. 305-321

Celui-ci « s’acquitta si bien de sa commission, dit Cosnac, qu’il fit faire par les États des défenses de l’imprimer, retira dix-huit cents exemplaires déjà tirés, et me les apporta à Paris ; et je les remis, par ordre de Monsieur, entre les mains de Mérille (le premier valet de chambre).

974. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Les regrets. » pp. 397-413

Je suis bien aise de voir l’État respirer un moment, et je souhaite que le remplacement de nos ministres fasse un bon effet dans les affaires, que ceux qui leur succéderont soient meilleurs et ne deviennent pas pires.

975. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — II. (Suite.) » pp. 149-166

Il sent bien que c’est là le côté faible de la démocratie et de la forme de gouvernement qui en découle ; il le redira à la fin de sa vie et quand l’Amérique se sera donné sa Constitution définitive (1789) : « Nous nous sommes mis en garde contre un mal auquel les vieux États sont très sujets, l’excès de pouvoir dans les gouvernants ; mais notre danger présent semble être le défaut d’obéissance dans les gouvernés. » Enfin, au milieu des luttes politiques déjà très vives que Franklin a à soutenir dans la Chambre et dans les élections de Philadelphie, survient la nouvelle du fameux acte du Timbre (1764).

976. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre III. Le Bovarysme des individus »

Chateaubriand, qui ne restera dans la mémoire des hommes que pour avoir écrit quelques phrases d’une sonorité, d’une construction et d’un rythme parfaits, adéquates aux sentiments de mélancolie passionnée qu’il y exprima, Chateaubriand estimait en lui le politique et l’homme d’État qui portait ombrage au premier consul.

977. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Préface de la seconde édition »

Dans l’état actuel de la science, nous ne savons véritablement pas ce que sont même les principales institutions sociales, comme l’État ou la famille, le droit de propriété ou le contrat, la peine et la responsabilité ; nous ignorons presque complètement les causes dont elles dépendent, les fonctions qu’elles remplissent, les lois de leur évolution ; c’est à peine si, sur certains points, nous commençons à entrevoir quelques lueurs.

978. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VIII : M. Cousin érudit et philologue »

Celui-ci, homme d’État, est passionné pour le jardinage ; il donne six heures par jour aux affaires, et six heures à la culture des dahlias.

979. (1929) La société des grands esprits

Les hommes d’État les plus utiles à leur pays ne sont pas toujours les plus éloquents, ni ceux qui possèdent les plus hautes qualités intellectuelles. […] Et l’État doit assurer l’ordre matériel, mais respecter la pensée, qui est le moyen de cet affranchissement. […] Les droits de l’État et ceux du peuple ne viennent qu’ensuite. L’État n’est qu’un moyen. […] Ne professait-il pas qu’aucune religion nouvelle ne peut s’introduire dans un Etat sans la permission du souverain, et que par conséquent les rois de France avaient été dans leur droit en persécutant les huguenots ?

980. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

Dans l’Esther de ce même Du Ryer, il y a encore ces beaux vers : Car enfin quelle flamme et quels malheurs éclatent Quand deux religions dans un État combattent ! […] C’est ainsi que le cardinal de Richelieu, l’habile et illustre ministre qui a tant fait pour l’unité et la grandeur de la France, se souciait assez peu qu’on vantât ses talents administratifs, sa haute capacité d’homme d’État, le génie avec lequel il gouvernait le royaume ; mais il ne pardonnait pas la plus légère critique des tragédies médiocres dont il avait ou donné le sujet ou barbouillé quelques scènes. […] le grand homme d’État ne put, malgré tous ses efforts, que sauver Mirame d’un éternel oubli, eu rendant cette tragi-comédie et celle d’Europe, célèbres, non par les beaux vers qu’elles renferment, mais par le souvenir qui se rattache à leur mise en scène. […] Richelieu ne pouvait se passer de Bois-Robert, dont il fit un conseiller d’État et un membre de l’Académie. […] Le poëte, ne se trouvant plus assez grand seigneur, imagina d’être quelque chose dans l’État.

981. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

Une fois à Naples, on fut embarrassé de savoir comment on s’y prendrait pour obtenir un meilleur éclairage de nuit, sans qu’il en coûtât plus cher à l’État. […] Les de Wied, princes tolérants et éclairés, firent au dernier siècle de leur petite principauté l’asile de toutes les sectes persécutées dans les États voisins par la tyrannie du culte officiel et le fanatisme de princes trop partisans de la religion d’État. […] En ouvrant un refuge à tous les persécutés, eux aussi déclarèrent que dans leur État chacun de leurs sujets se sauverait comme il l’entendrait. […] Dans plusieurs États, elle arracha aux princes des ordonnances vexatoires. […] >Cet État est la Hesse électorale, si j’ai bien retenu les renseignements que nous donna le directeur de l’école des garçons, M. 

982. (1855) Louis David, son école et son temps. Souvenirs pp. -447

Une partie des pensionnaires et des artistes français furent sur le point d’éprouver le même sort, et ceux qui parvinrent à s’échapper de Rome, après avoir erré longtemps dans les Etats du pape, ne furent en sécurité que quand ils touchèrent le territoire de la Toscane. […] Cette disposition des esprits dura en France jusqu’au 18 brumaire an VIII, lorsque Bonaparte, après s’être emparé des rênes de l’État, s’empara également de l’activité de toutes les imaginations, pour la fixer sur la gloire militaire et la faire profiter à ses vues. […] Outre les invitations qui lui furent faites par l’ancienne aristocratie, par les banquiers, par les personnes à la mode, et même par les fonctionnaires de l’État, tous les théâtres lui offrirent ses entrées gratuites, et Guérin ne paraissait jamais dans un de ces lieux publics sans être couvert d’applaudissements à son entrée et pendant les entr’actes. […] Vers cette même époque, lorsque le premier consul organisait le nouveau gouvernement, il fit venir le peintre pour le consulter sur le costume que porteraient les grands fonctionnaires de l’État. […] « Hors des États du pape, nous fûmes véritablement traités en amis, le roi de Naples ayant donné les ordres les plus positifs de protéger tous les Français qui se réfugieraient dans ses États.

983. (1910) Victor-Marie, comte Hugo pp. 4-265

Ils se rendent parfaitement compte en effet instinctivement qu’ils sont dans un autre langage, dans un autre royaume, dans un autre État que le royaume ordinaire du travail et de la maison, que le royaume de la semaine. […] Sentaient trembler sous eux les États centenaires, Et regardaient le Louvre entouré de tonnerres,                    Comme un mont Sinaï ! […] Ce monopole (d’État) lui a fait faire plus de facilités que de grands vers. […] Grèce, Sparte, Hélène, Troie, Ulysse, Achille, Épire, Pyrrhus, Hermione, et même États. […] Elle est même elle aussi une tragédie à quatre, si l’on compte, comme on le doit, la raison d’État, personnage assurément plus important, personnage moins pâle, personnage plus personnage que ce pauvre Antiochus.

984. (1929) Dialogues critiques

Au contraire en Alsace et en Lorraine, comme dans tous les départements français, il y a aussi des libres-penseurs, qui désirent l’école laïque, la séparation de l’Eglise et de l’Etat, et qui espéraient que la France les débarrasserait en même temps du cléricalisme et de l’Allemagne. […] Mais ils ne peuvent nier que la neutralité de l’Etat respecte les cultes et les consciences.

985. (1858) Cours familier de littérature. V « XXXe entretien. La musique de Mozart (2e partie) » pp. 361-440

D’Aponte, né dans la petite ville de Céneda, dans l’État vénitien, est chassé de la maison paternelle par le second mariage de son père avec une jeune Vénitienne de dix-huit ans, que son père épouse en secondes noces. […] Des vers satiriques contre le conseil des Dix le font arrêter par l’inquisition d’État : on le juge ; le professorat public lui est interdit pour toute peine.

986. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

L’énergie des caractères et la puissance des intelligences qu’elle produit sont en perpétuel contraste avec la petitesse des États et avec la servitude des institutions pour lesquels ces natures romaines devaient vivre ; en sorte que cette noble et belle terre souffre doublement de rêver ce que fut l’Italie jadis, et de subir ce que l’Italie est aujourd’hui. […] Clément VII, homme de plaisir et de mollesse, préférait les délices d’Avignon aux luttes qu’il aurait à soutenir à Rome contre les princes, presque tous armés et fortifiés, des États romains.

987. (1859) Cours familier de littérature. VII « XLIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre » pp. 393-472

« C’est, dit-il, qu’en qualité d’ambassadeur du roi et de ministre d’État je ne voulais pas inscrire mon nom au-dessous du nom d’un gouverneur de Savoie. […] Il comprend l’existence importante, mais nécessairement secondaire, de cet État.

988. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (3e partie) » pp. 193-271

Servir à tout prix, même au prix de la justice et du bien, la nation qu’on commande, c’est-à-dire accroître sa force, sa puissance, sa richesse, sa sécurité, son honneur, tel est le but habituel des hommes d’État. […] La science morale ne peut guère aujourd’hui, comme au temps de Platon, qu’en détourner les yeux, tout en plaignant les hommes d’État plus encore qu’elle ne les blâme.

989. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Les traditions de son père mort, la vocation de famille, les soins de sa mère Bella, femme éminente autant que tendre, enfin le courant des affaires et des passions d’une république, qui entraîne tous les citoyens notables dans les fonctions de l’État, lancèrent le jeune Alighieri dans les emplois et dans les dissensions de sa patrie. […] « Tout ce qu’on peut comprendre, c’est que le poème, exclusivement toscan, du Dante était une espèce de satire vengeresse du poète et de l’homme d’État contre les partis auxquels il avait voué sa haine.

990. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — II. (Fin.) » pp. 62-79

Il n’en est pas de même des Françaises ; la moindre servante se croit très propre à diriger l’État : je trouve cela tellement ridicule que j’ai été guérie de toute manie de ce genre.

991. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — II. (Fin.) » pp. 495-513

La jeunesse du temps fut pour lui presque à l’unanimité : Les jeunes gens, s’écriait Mme Dacier dès les premières pages de son livre sur la Corruption du goût, sont ce qu’il y a de plus sacré dans les États, ils en sont la base et le fondement ; ce sont eux qui doivent nous succéder et composer après nous un nouveau peuple.

992. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — I » pp. 236-253

Ils venaient dans les premières années du règne de Henri IV pour rattacher à la religion de l’État et à celle du prince nombre d’esprits raisonneurs, sérieux, assez philosophiques, et surtout politiques.

993. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — I » pp. 57-75

Guizot, parlant de Ronsard dans un morceau sur L’État de la poésie en France avant Corneille, et lui tenant compte des services qu’il avait rendus ou voulu rendre, a dit à peu près dans le même sens, et sous forme d’aphorisme politique : « Les hommes qui font les révolutions sont toujours méprisés par ceux qui en profitent. » Maintenant je viens exprès de relire, de parcourir encore une fois tout Ronsard en me demandant si je l’ai bien compris dans mon ancienne lecture, si je ne l’ai pas surfait, et aussi (car Monsieur Gandar m’en avertit, et c’est un avertissement bien agréable et flatteur puisqu’il implique un succès) si je n’ai pas été trop timide, et si je ne suis pas resté en deçà du vrai dans ma réclamation en sa faveur.

994. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Voiture. Lettres et poésies, nouvelle édition revue, augmentée et annotée par M. Ubicini. 2 vol. in-18 (Paris, Charpentier). » pp. 192-209

Mais si l’on doit regarder les États comme immortels, y considérer les commodités à venir comme présentes, comptons combien cet homme, que l’on a dit qui a ruiné la France, lui a épargné de millions par la seule prise de La Rochelle, laquelle d’ici à deux mille ans, dans toutes les minorités des rois, dans tous les mécontentements des grands et toutes les occasions de révoltes, n’eut pas manqué de se rebeller et nous eût obligés à une éternelle dépense.

995. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Sénecé ou un poète agréable. » pp. 280-297

Lorsque celui-ci arriva au timon de l’État, c’eût été le cas pour Sénecé de reparaître à la Cour ; l’exemple était encourageant pour tous ceux qui avaient quatre-vingts ans ; mais il se sentit décidément trop vieux, et se dit qu’il était trop tard pour recommencer.

996. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Lammenais » pp. 22-43

Lamennais était un apôtre et un prophète égaré, dépaysé : un apôtre, après tout, n’est pas un homme politique ; un prophète n’est pas un conseiller d’État de salon ou de canapé.

997. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Caractères de La Bruyère. Par M. Adrien Destailleur. »

» Il s’était rêvé ainsi tour à tour ministre, conseiller d’État, diplomate et ambassadeur, bien des choses enfin.

998. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

Il n’est pas si aisé qu’on le croirait de prouver à des académiciens politiques et hommes d’État comme quoi il y a, dans les Fleurs du Mal, des pièces très remarquables vraiment pour le talent et pour l’art ; de leur expliquer que, dans les petits poèmes en prose de l’auteur, le Vieux Saltimbanque et les Veuves sont deux bijoux, et qu’en somme M. 

999. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poëme des champs par M. Calemard de Lafayette. »

Or, il n’y a pas encore eu de décret de M. le ministre d’État pour abaisser le diapason dans la poésie comme pour la musique.

1000. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Journal de la santé du roi Louis XIV »

En 1653, atteint d’un assez grave dérangement d’estomac et d’intestins, il remet la plupart des remèdes après la campagne, pour le moment où il sera de retour à Paris : « … Sa Majesté m’ayant dit plusieurs fois (c’est Vallot qui parle), après la remontrance que je lui faisais de la conséquence de son mal, qu’elle aimait mieux mourir que de manquer la moindre occasion où il y allait de sa gloire et du rétablissement de son État.

1001. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid. »

Il n’est pas nécessaire d’être poète pour la juger ; il suffit de connaître les hommes et les choses, d’avoir de l’élévation et d’être homme d’État. » Et s’animant par degrés : « La tragédie, disait-il, échauffe l’âme, élève le cœur, peut et doit créer des héros.

1002. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Méditations sur l’essence de la religion chrétienne, par M. Guizot. »

Dans ce qu’il nous offre comme une solution générale, je reconnais et j’étudie avant tout l’empreinte personnelle distincte : là où il prétend me donner une philosophie, une théologie, je vois un homme, l’homme d’État, l’historien encore, et son portrait, en achevant de se graver dans mon esprit, n’obtient et n’entraîne rien de plus sûr ni de plus sincère que mon respect 21.

1003. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Affaires de Rome »

Au reste, ces pages de M. de La Mennais sont merveilleuses de jeunesse d’imagination, de transparence de couleur et, par moments, de philosophique tristesse : « D’Antibes à Gênes, la route côtoie presque toujours la mer, au sein de laquelle ses bords charmants découpent leurs formes sinueuses et variées, comme nos vies d’un instant dessinent leurs fragiles contours dans la durée immense, éternelle. » Et plus loin, en Toscane, il nous montre çà et là, « à demi caché sous des ronces et des herbes sèches, le squelette de quelque village, semblable à un mort que ses compagnons, dans leur fuite, n’auraient pu achever d’ensevelir. » Mais à peine avons-nous le pied dans les États romains, quelques prisonniers conduits par les sbires du pape, comme il dit, font contraste avec cette simplicité naïve de foi que l’auteur s’attribue encore par oubli, ou qui du moins ne devait pas tarder à s’évanouir.

1004. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Recueillements poétiques (1839) »

Pascal pensait qu’un bon poëte n’est pas plus nécessaire à l’État qu’un bon brodeur : il venait de lire un sonnet de Voiture.

1005. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre IV »

État actuel. — Attaque de delirium : « Il buttait contre la fenêtre, s’en retournait à reculons, les bras marquant la mesure, secouant les mains, comme s’il avait voulu se les casser et les envoyer à la figure du monde » (p. 549).

1006. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre I. Composition de l’esprit révolutionnaire, premier élément, l’acquis scientifique. »

. — Sans doute l’opération n’est fructueuse que si la gangue est abondante et si l’on possède les procédés d’extraction ; pour avoir une notion juste de l’État, de la religion, du droit, de la richesse, il faut être au préalable historien, jurisconsulte, économiste, avoir recueilli des myriades de faits et posséder, outre une vaste érudition, une finesse très exercée et toute spéciale.

1007. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

Pasquier (1767-1852), maître des requêtes, puis conseiller d’État, et préfet de police sous l’Empire ; ministre et pair de France sous la Restauration ; président de la Chambre des pairs, chancelier et duc sous Louis-Philippe : Souvenirs, Plon, 1893-95, 6 vol. in-8 (en cours de public.).

1008. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

Elle avait fait à peine quelques pas au-delà du point où nous sommes arrivés, que Charles-Quint la qualifiait de langue d’État.

1009. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre III : Les Émotions »

Le sentiment de la ‘puissance, de la supériorité, du pouvoir proprement dit : le plaisir du riche propriétaire, du chef d’une manufacture, de l’homme d’Etat, du millionnaire, du savant qui découvre, de l’artiste qui réussit.

1010. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Nous passons en revue les divers ordres de l’État, les diverses classes de la société, aux approches du règne de Louis XVI.

1011. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Patru. Éloge d’Olivier Patru, par M. P. Péronne, avocat. (1851.) » pp. 275-293

Tous les corps de l’État lui vinrent offrir leurs compliments, et l’Académie française, à laquelle, peu avant son abdication, elle avait envoyé son portrait, lui adressa une magnifique harangue par l’organe de Patru.

1012. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — III. (Suite et fin.) » pp. 128-145

C’est par cette figure qu’un grand homme d’État anglais a donné l’idée la plus frappante de ce que doit être le gouvernement chez une nation forte, une nation qui a de grandes facultés et de grandes passions : car il n’y a point de grandes facultés sans grandes passions ; et malheur aux nations qui ne sont point passionnées !

1013. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — I. » pp. 201-219

Peu après, pour sauver une position plus brillante que sûre, et malgré tout périlleuse, Beaumarchais passa en Angleterre avec une mission secrète du roi, relativement au chevalier d’Éon, des mains de qui il s’agissait de retirer des papiers d’État.

1014. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Étienne, ou une émeute littéraire sous l’Empire. » pp. 474-493

L’auteur avait à peine vingt ans. » Il m’est impossible, à moi qui n’y suis pas obligé, de voir tant de choses dans Le Rêve, et il serait aussi facile et plus certain d’y relever dans le dialogue des choses communes et peu délicates, de même que dans Le Pacha de Surêne ou dans Le Chaudronnier homme d’État.

1015. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre III. Zoïle aussi éternel qu’Homère »

Les génies, les esprits, ce nommé Eschyle, ce nommé Isaïe, ce nommé Juvénal, ce nommé Dante, ce nommé Shakespeare, ce sont des êtres impérieux, tumultueux, violents, emportés, extrêmes, chevaucheurs des galops ailés, franchisseurs de limites, « passant les bornes », ayant un but à eux, lequel « dépasse le but », volant brusquement d’une idée à l’autre, et du pôle nord au pôle sud, parcourant le ciel en trois pas, peu cléments aux haleines courtes, secoués par tous les souffles de l’espace et en même temps pleins d’on ne sait quelle certitude équestre dans leurs bonds à travers l’abîme, indociles aux « aristarques », réfractaires à la rhétorique de l’État, pas gentils pour les lettrés asthmatiques, insoumis à l’hygiène académique, préférant l’écume de Pégase au lait d’ânesse.

1016. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

On n’appartient pas pour rien à une époque personnelle et poseuse, où toutes les vanités se mettent à la fenêtre de cinq à six volumes pour, de là, se raconter à ceux qui passent ; et, cela, depuis le ministre d’État jusqu’à l’apothicaire, depuis Chateaubriand jusqu’à Véron.

1017. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre premier. Le problème des genres littéraires et la loi de leur évolution » pp. 1-33

Il est incontestable que toutes les grandes époques sont animées d’un certain esprit, dirigées par un certain principe (différent selon les époques), qui pénètre la masse entière et qui oriente les efforts de tous vers un même but ; pour ne citer qu’un seul grand exemple : Louis XIV disant « l’État, c’est moi » ne fait que résumer l’esprit de son époque, et, dans la littérature, Malherbe, Chapelain, Balzac et Corneille l’ont préparé, aussi bien que Descartes dans la philosophie et Richelieu dans la politique.

1018. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Ailleurs il déduisait de ses théories morales le gouvernement constitutionnel et la charte : tactique excellente, qui faisait du système un parti, reportait sur lui la faveur et l’intérêt mérités par les opinions libérales, et devait au jour du triomphe le changer en philosophie de l’État.

1019. (1900) La culture des idées

En attendant il nous annonce son prochain livre : « La formation du style par l’assimilation des auteurs », et je suppose que, la série achevée, tout le monde écrira très bien et qu’il y aura dorénavant un bon style moyen en littérature, comme il y en a un en peinture et dans les différents beaux-arts que l’État protège si heureusement. […] Ozanam a parfaitement démontré qu’au moment où, par un coup d’État, le christianisme devint la religion officielle de l’Empire, le paganisme était encore plein de force et de vie ; de là son influence sur la religion nouvelle qui, ne pouvant le détruire, l’absorba sans même le transformer. […] Un État insulaire n’a jamais d’armée, quelle que soit sa volonté de se créer cet organe de défense ; au centre de la partie mobile de la population, il y a une masse d’hommes plus ignorants, plus orgueilleux et plus timorés que chez n’importe quelle nation continentale. […] La contradiction étant impossible, toute puissance appartenant à l’État, seuls pourront parler ceux qui penseront comme l’État ; mais personne n’aura l’inutile courage d’écrire, sinon les scribes officiels appointés pour cette besogne. […] Mais l’impertinence diplomatique n’est pas un joujou que puissent manier sans danger ou sans ridicule les humbles hommes d’État, les contremaîtres d’usine, qui ont usurpé en France le rôle de pasteurs de peuples.

1020. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Dans un pays où la première question que l’on fait sur un homme d’État, sur un grand capitaine, c’est : Est-il aimable ? […] Dans un siècle où le souverain disait : L’État, c’est moi ; où, sans la crainte du diable que Dieu lui laissa jusque dans ses plus grands désordres, ce roi qui pouvait tout se serait fait adorer422 ; où quelqu’un423 l’adora et mit un luminaire dans la niche de sa statue transformée en chapelle, il est clair tout d’abord qu’une arme aussi terrible que celle que Molière maniait n’aurait jamais pu frapper un seul coup, si elle n’avait été mise au service de ce demi-dieu 424. […] Diminuer la considération des sociétés graves, railler l’amour platonique, c’était flatter agréablement l’oreille du roi, et l’on ne peut douter de l’intention qu’eut Molière d’être bon courtisan, quand on considère l’insultant mépris avec lequel Clitandre, homme de cour, traite les gens de lettres, ces « gredins qui, pour être imprimés et reliés en veau, se croient d’importantes personnes dans l’État ».

1021. (1841) Discours aux philosophes. De la situation actuelle de l’esprit humain pp. 6-57

Elles deviendront les instruments funestes d’une corruption universelle, qui atteindra en peu de temps les parties vitales de l’État. […] Est-il étrange qu’étant ainsi devenues les instruments funestes d’une corruption universelle qui a atteint les parties vitales de l’État, cet État tombe en pourriture, et que sa gangreneuse décrépitude fasse à la fois honte et horreur !

1022. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Harrison, il y a dans toutes ses théories sociales cet élément de l’ascendance de l’Etat ou de la Société sur l’individu, de la prééminence des buts moraux sur les buts matériels et pratiques, de la nécessité d’une organisation du travail et d’un contrôle moral et spirituel sur l’étroit intérêt individuel, toutes choses qui sont le fondement et même l’essence du socialisme. » Je laisse cette opinion à M.  […] Tant de machines en mouvement, tant de mines creusées jusqu’aux abîmes, tant d’appareils de destruction imaginés et essayés par tous les Etats, assurent à l’accident un avenir incomparable. […] L’Etat ne devrait être qu’une providence visible, une police souveraine qui protégerait l’exercice de toutes les activités humaines, en s’opposant seulement aux gestes qui pourraient entraver la plénitude de toutes les libertés, dans tous les genres. […] La politique dépend des hommes d’Etat, à peu près comme le temps dépend des astronomes. […] C’est beau, un coup d’Etat, cette grande main qui descend dans la nuit.

1023. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

On rapporte que Zimmermann, né dans les États helvétiques, aimait, dès sa jeunesse, les bois et les montagnes au sein desquels il grandissait. […] Les affaires publiques qui ont pris une part considérable de la vie de Maine de Biran, ne l’ont pas, en effet, occupée toute entière, et même dans les fonctions de l’État, et sur la scène politique, il eut toujours un regard tourné en dedans de lui-même. […] Il fut heureux de le retrouver en 1797, lorsque le coup d’État du 18 fructidor l’eut éloigné des assemblées politiques, où son opposition royaliste l’avait fait remarquer. […] Le nombre des prisonniers d’État n’a pas laissé d’être assez considérable. […] Revenu en France après d’amères déceptions, il avait dû se contenter d’une place de professeur de philosophie, non pas, comme Jouffroy, dans les premières chaires de l’État, mais dans une modeste institution de Fontenay-aux-Roses.

1024. (1905) Propos de théâtre. Deuxième série

Faut-il dans nos États retourner sans honneur Et qu’Hélène demeure avec son ravisseur ? […] Voilà un grand bourgeois de Paris, en grande situation, qui a maison de ville et maison des champs, qui a été mazariniste et royaliste pendant la Fronde avec assez d’éclat pour se faire remarquer, qui est détenteur presque de papiers d’État. […] Et, en même temps, on annonce qu’il y a coup d’État au château, comme il y a émeute dans la rue ; que la reine mère, par ordre du roi, est prisonnière chez elle. […] Elle est amusante et elle dénonce un travers bien national qui, bien entendu, n’a fait que croître depuis 1829 : c’est le fonctionnarisme, « l’étatisme », la manie de demander tout à l’État, le fait, universel chez nous, de naître en rêvant une place du gouvernement. […] Sur quoi, généralisant, un autre personnage fait le « Premier Paris » en vers, qui est la pièce essentielle de l’ouvrage dans ce genre de comédie : Tout le monde veut vivre aux dépens de l’État.

1025. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

La sœur de Bourdaloue, mariée à un Chamillart, fut tante de M. de Chamillart, ministre d’État.

1026. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « De la poésie de la nature. De la poésie du foyer et de la famille » pp. 121-138

De quelle manière le poète y envisageait-il ce besoin de retraite, de solitude et de campagne qui, à un certain moment, est le vœu de tous, de l’homme d’État, de l’homme de loi, du marchand comme du poète ?

1027. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Une Réception Académique en 1694, d’après Dangeau (tome V) » pp. 333-350

Telles sont les grâces de Louis le Grand, grâces semblables aux influences du plus beau des astres, et qui me donnent droit de dire avec plus de justice, à l’honneur du roi, que Tertullien n’écrit pour flatter les princes de l’Afrique : l’État et le ciel ont le même sort, et doivent leur bonheur à deux soleils… À ces mots, le voisin de Racine dut se pencher vers lui et lui rappeler à l’oreille la harangue de maître Petit-Jean : Quand je vois le soleil, et quand je vois la lune… Et le voisin de La Bruyère reçu l’année d’auparavant et avec un si éloquent discours, put lui dire : « Ah !

1028. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « II » pp. 21-38

Quant aux notes, je ferai observer que le curé Meslier (tome i, page 349) était curé d’Étrépigni et de But, et qu’il ne s’agit point là de lord Bute ; que, si le Pollion de Thieriot (tome i, page 65) est en effet M. de la Popelinière, ce Pollion, à deux pages de là (p. 63), n’est probablement pas le duc de Richelieu ; que, si le marquis d’Argenson perdit le portefeuille des affaires étrangères, ce ne fut point purement et simplement, comme on l’affirme (tome i, page 263), parce qu’il avait des sentiments généreux et de la probité, mais aussi parce qu’il était utopiste et secrétaire d’État de la république de Platon ; qu’il est douteux que l’ami qui servait de lien entre Diderot et Voltaire (tome ii, page 519) fût Thieriot, et qu’il est bien plus vraisemblable que c’était Damilaville ; que, si l’on prodigue le contre-seing Belle-lsle (tome ii, page 370) pour faire arriver les lettres franc de port, ce ne sont pas messieurs de Laporte qui en seront mécontents, mais plutôt messieurs de la Poste, etc., etc.

1029. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

[NdA] Ce mot de Henri IV, de ce roi vraiment tutélaire et qui sentait à quel point il l’était, rappelle les belles paroles de Richelieu, en son testament politique, sur la vigilance nécessaire au chef d’un État et sur la gravité de la charge dont il porte le poids à toute heure, la ressentant d’autant plus qu’il est plus habile : « Il faut dormir comme le lion, sans fermer les yeux… Une administration publique occupe tellement les meilleurs esprits, que les perpétuelles méditations qu’ils sont contraints de faire pour prévoir et prévenir les maux qui peuvent arriver les privent de repos et de contentement, hors de celui qu’ils peuvent recevoir voyant beaucoup de gens dormir sans crainte à l’ombre de leurs veilles et vivre heureux par leur misère. »

1030. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

La liberté d’enseignement tant réclamée fut conquise ; cette liberté s’ajoutant à la protection et au privilège acquis d’une religion d’État, s’appuyant à un point fixe inattaquable, devint un levier puissant dont les effets sont encore à calculer.

1031. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Le maréchal de Villars. »

Elles sont, comme vous savez, dans la main de Dieu, et de celle-ci dépend le salut ou la perte de l’État, et je serais un mauvais Français et un mauvais serviteur du roi si je ne faisais les réflexions convenables. » Nous lisons à nu dans les perplexités de l’âme de Villars. — Mais ce projet annoncé sur Denain s’évanouit presque aussitôt par suite d’un avis défavorable donné par le prince de Tingry, commandant à Valenciennes, qui devait y contribuer.

1032. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite et fin.) »

Mêlé aux hommes de parti, aux tories, aux whigs, très lié avec les premiers, il n’épousa vivement aucune querelle ; il a exprimé sa doctrine dans des vers célèbres : « Laisse les fous se disputer pour les formes de gouvernement : l’État le mieux administré est le meilleur. » C’est ainsi que, plus tard, Hume le sceptique dira en appliquant des vers de Claudien : … Nunquam libertas gratior exstat Quam sub rege pio…………… « La meilleure des républiques, c’est encore un bon prince. » — Pope a parlé de Cromwell comme d’un criminel illustre condamne a l’immortalité.

1033. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat. »

Catinat dut arriver à Pignerol sous un nom supposé, y rester caché comme un prisonnier d’État et attendre l’effet des engagements contractés par Mattioli.

1034. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SÉVIGNÉ » pp. 2-21

Tant qu’elle se borne à rire des Etats, des gentilshommes campagnards et de leurs galas étourdissants, et de leur enthousiasme à tout voter entre midi et une heure, et de toutes les autres folies du prochain de Bretagne après dîner, cela est bien, cela est d’une solide et légitime plaisanterie, cela rappelle en certains endroits la touche de Molière : mais, du moment qu’il y a eu de petites tranchées en Bretagne, et à Rennes une colique pierreuse, c’est-à-dire que le gouverneur, M. de Chaulnes, voulant dissiper le peuple par sa présence, a été repoussé chez lui a coups de pierres ; du moment que M. de Forbin arrive avec six mille hommes de troupes contre les mutins, et que ces pauvres diables, du plus loin qu’ils aperçoivent les troupes royales, se débandent par les champs, se jettent à genoux, en criant Meà culpà (car c’est le seul mot de français qu’ils sachent) ; quand, pour châtier Rennes, on transfère son parlement à Vannes, qu’on prend à l’aventure vingt-cinq ou trente hommes pour les pendre, qu’on chasse et qu’on bannit toute une grande rue, femmes accouchées, vieillards, enfants, avec défense de les recueillir, sous peine de mort ; quand on roue, qu’on écartèle, et qu’à force d’avoir écartelé et roué l’on se relâche, et qu’on pend : au milieu de ces horreurs exercées contre des innocents ou pauvres égarés, on souffre de voir Mme de Sévigné se jouer presque comme à l’ordinaire ; on lui voudrait une indignation brûlante, amère, généreuse ; surtout on voudrait effacer de ses lettres des lignes comme celles-ci : « Les mutins de Rennes se sont sauvés il y a longtemps : ainsi les bons pâtiront pour les méchants : mais je trouve tout fort bon, pourvu que les quatre mille hommes de guerre qui sont à Rennes, sous MM. de Forbin et de Vins, ne m’empêchent point de me promener dans mes bois, qui sont d’une hauteur et d’une beauté merveilleuses ; » et ailleurs : « On a pris soixante bourgeois ; on commence demain à pendre.

1035. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE DURAS » pp. 62-80

Benoist, fils du conseiller d’État, jeune homme aimable, plein de qualités sérieuses, et de la plus agréable figure : mais avec tout cela, et bien qu’accueilli sur le pied de la plus parfaite amitié, il ne pouvait dans ce monde-là faire un mari.

1036. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVe entretien. Littérature grecque. L’Iliade et l’Odyssée d’Homère » pp. 31-64

Puis vint Solon, ce fondateur de la démocratie d’Athènes, qui, plus homme d’État que Platon, sentit ce qu’il y avait de civilisation dans le génie, et qui fit recueillir ces chants épars, comme les Romains recueillirent plus tard les pages divines de la Sibylle.

1037. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre IV. Des figures : métaphores, métonymies, périphrases »

On blâme l’incohérence des métaphores : tout le monde connaît la fameuse phrase : « Le char de l’État navigue sur un volcan. » Corneille a été censuré par l’Académie pour avoir écrit : Malgré des feux si beaux qui rompent ma colère.

1038. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre III. La poésie : V. Hugo et le Parnasse »

Grandi par l’exil, déifié par la passion politique, il gagne bien sa gloire, qu’il sait administrer : c’est un robuste ouvrier aux forces intactes, et dans les huit années qui suivent le coup d’État, il donne trois grands recueils de poèmes, définitive expression de son talent.

1039. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IV. Ordre d’idées au sein duquel se développa Jésus. »

Complètement étrangère à l’idée de l’État, la théocratie juive ne faisait en cela que tirer sa dernière conséquence, la négation de la société civile et de tout gouvernement.

1040. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre V »

Le bourgeois, furieux de sa destitution de grand homme, déserte, en effet, l’Église et la Noblesse ; il rentre dans le Tiers Etat, roturier et libéral, comme devant.

1041. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Campagnes d’Égypte et de Syrie, mémoires dictés par Napoléon. (2 vol. in-8º avec Atlas. — 1847.) » pp. 179-198

Mais, dans l’application, la raison d’État, en Égypte, le fait incliner sans scrupule du côté de Mahomet.

1042. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

En 1807, il eut à subir une révolution intérieure, un vrai coup d’État.

1043. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits de Fénelon. (1850.) » pp. 1-21

Il pensait qu’en ces matières qui n’intéressent point le salut de l’État, on peut être plus coulant que dans d’autres, et incliner vers la politesse.

1044. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mme du Châtelet. Suite de Voltaire à Cirey. » pp. 266-285

c’était une affaire d’État alors, et l’avenir d’un homme en dépendait.) — « Il faut à tout moment, s’écrie-t-elle, le sauver de lui-même, et j’emploie plus de politique pour le conduire que tout le Vatican n’en emploie pour retenir la chrétienté dans ses fers. » Ce dernier trait est au moins solennel et peut sembler disproportionné, mais c’est ainsi que raisonne la passion.

1045. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Histoire du chancelier d’Aguesseau, par M. Boullée. (1848.) » pp. 407-427

N’y cherchez point l’homme d’État qui souffre ou qui regrette tout au moins le bien qu’il aurait pu faire.

1046. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

Et, loin de s’abattre et de maudire le sort de l’avoir fait naître en un âge si orageux, il s’en félicite tout à coup : « Sachons gré au sort de nous avoir fait vivre en un siècle non mol, languissant ni oisif. » Puisque la curiosité des sages va chercher dans le passé les confusions des États pour y étudier les secrets de l’histoire et, comme nous dirions, la physiologie du corps social à nu : « Ainsi fait ma curiosité, nous déclare-t-il, que je m’agrée aucunement de voir de mes yeux ce notable spectacle de notre mort publique, ses symptômes et sa forme ; et, puisque je ne la puis retarder, je suis content d’être destiné à y assister et m’en instruire. » Je ne me permettrai pas de proposer à beaucoup de personnes une consolation de ce genre ; la plupart des hommes n’ont pas de ces curiosités héroïques et acharnées, telles qu’en eurent Empédocle et Pline l’Ancien, ces deux curieux intrépides qui allaient droit aux volcans et aux bouleversements de la nature pour les examiner de plus près, au risque de s’y abîmer et d’y périr.

1047. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Rulhière. » pp. 567-586

En un mot, Rulhière conçoit et exécute son histoire bien plus en homme de lettres et en peintre qu’en homme d’État et en homme politique.

1048. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

Énonçant les motifs, réels ou non, qu’il avait eus pour entrer dans la discussion, il alla droit, avant tout, à l’adversaire, et le frappant de l’épée au visage, selon le conseil de César, il le raillait sur cette prétention au patriotisme, au désintéressement et au bien public, de laquelle Beaumarchais aimait (et assez sincèrement, je le crois) à recouvrir ses propres affaires et ses spéculations d’intérêt : Tels furent mes motifs, s’écriait-il déjà en orateur, en maître puissant dans la réplique et dans l’invective ; et peut-être ne sont-ils pas dignes du siècle où tout se fait pour l’honneur, pour la gloire, et rien pour l’argent ; où les chevaliers d’industrie, les charlatans, les baladins, les proxénètes n’eurent jamais d’autre ambition que la gloire sans la moindre considération de profit ; où le trafic à la ville, l’agiotage à la Cour, l’intrigue qui vit d’exactions et de prodigalités, n’ont d’autre but que l’honneur sans aucune vue d’intérêt ; où l’on arme pour l’Amérique trente vaisseaux chargés de fournitures avariées, de munitions éventées, de vieux fusils que l’on revend pour neufs, le tout pour la gloire de contribuer à rendre libre un des mondes, et nullement pour les retours de cette expédition désintéressée… ; où l’on profane les chefs-d’œuvre d’un grand homme (allusion à l’édition de Voltaire par Beaumarchais), en leur associant tous les juvenilia, tous les senilia, toutes les rêveries qui, dans sa longue carrière, lui sont échappées ; le tout pour la gloire et nullement pour le profit d’être l’éditeur de cette collection monstrueuse ; où pour faire un peu de bruit, et, par conséquent, par amour de la gloire et haine du profit, on change le Théâtre-Français en tréteaux, et la scène comique en école de mauvaises mœurs ; on déchire, on insulte, on outrage tous les ordres de l’État, toutes les classes de citoyens, toutes les lois, toutes les règles, toutes les bienséances… Voilà donc Mirabeau devenu le vengeur des bienséances et des bonnes mœurs contre Beaumarchais, et Figaro passant mal son temps entre les mains du puissant athlète, qui le retourne et l’enlève de terre au premier choc.

1049. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Croyez-vous que la curiosité des étrangers qui trouveraient ici réunies les principales choses qu’ils vont chercher de côté et d’autre à grands frais, ne rendrait pas au triple à l’État la dépense que lui auraient coûtée de tels monuments ?

1050. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Lorsque, arrivé à l’âge de soixante-dix ans, on lui conseilla de ne plus différer de publier son Jeune Anacharsis, l’ouvrage de toute sa vie, il hésita longtemps, et, lorsqu’il se décida enfin à le laisser paraître, en décembre 1788, c’est-à-dire à la veille des États généraux, son espoir était que l’attention publique, occupée ailleurs, ne se porterait que peu à peu et insensiblement sur le livre, et qu’il n’y aurait lieu ainsi ni à un succès ni à une chute : « Je voulais, dit-il, qu’il se glissât en silence dans le monde. » En tout ce qui précède, je n’ai voulu présenter l’abbé Barthélemy que dans l’ensemble de son existence et dans la distinction tempérée de son caractère : il nous en sera plus facile de parler de l’ouvrage même.

1051. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — II. (Fin.) » pp. 476-495

Tu apprendras par les nouvelles publiques que les affaires de l’État prospèrent. — Adieu ; aime-moi un peu, et guéris-toi, s’il y a moyen, pour ma consolation.

1052. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Macaulay »

Doué de l’imagination la plus opulente, qui saisit et reproduit avec éclat toutes les analogies et toutes les différences, puissant par la vaste étendue de l’esprit et par une étendue non moins vaste de connaissances, Macaulay pourrait être regardé comme un critique complet s’il avait le jugement souverain, qui est le coup de hache définitif et mérité par lequel le critique ressemble à l’homme d’État, et dont l’un ne peut pas plus se passer que l’autre.

1053. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Saint-Bonnet » pp. 1-28

Joseph de Maistre, qui était avant tout historien, malgré les plus hautes aptitudes à la métaphysique, est entré nettement dans cette question de l’Infaillibilité par la porte des faits et de l’histoire, conduit par un sens pratique de premier ordre, et écartant volontiers tous les arguments qui n’étaient pas historiques avec ce grand geste d’homme d’État qu’il avait, tandis que Saint-Bonnet, au contraire, bien plus métaphysicien que politique, a pénétré dans la même question par l’étude de l’essence même et des principes, allant dans l’essence jusqu’au point où elle est vraiment impénétrable.

1054. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

Relégué dans la théorie, il y porta les instincts du moraliste et les préoccupations de l’homme d’État ; tel on devait le revoir à la tribune, tel on le vit dans sa chaire ; dans l’une comme dans l’autre sa pensée dominante fut celle de la règle, et son ton ordinaire fut celui du commandement.

1055. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre X : M. Jouffroy psychologue »

Ceci nous révèle que l’homme ressemble soit à un État où il y a un gouvernement et des sujets, soit à une machine en exercice où l’on distingue l’instrument qui est remué et la main qui remue.

1056. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

Du point de vue de Chénier, le citoyen juge l’homme d’État et n’est qu’un pied plat si son jugement dépend de la fortune. […] Benda les félicite de n’en avoir exprimé que l’ordre privé, ne concernant aucunement l’État. […] Ce pragmatisme, ce catholicisme d’État, qui a brillamment fleuri par la suite, et qui s’accommode d’un parfait scepticisme ou d’un athéisme radical, mais ésotérique, reconnaît en Balzac un de ses premiers maîtres. […] La prise de la Bastille répondit au renvoi de Necker et au rassemblement des troupes qui semblait annoncer un coup d’État, etc. […] Mais faut-il rompre l’unité de législation dans un grand pays, y prodiguer les corporations égoïstes, les autonomies locales, le babélisme patoisant, les tyranneaux de village, les États dans l’État ?

1057. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

Auguste Vacquerie n’avait qu’à commander ; toutes les puissances de l’État lui étaient acquises. […] Je serais ravi, par exemple, d’échapper à la tyrannie de l’État, cette chose organisée, incommode et même hostile aux individus : qui s’immisce partout : ici des entrées interdites, là des examens ! Qu’on supprime l’État ! […] Il l’emmène à Brest, l’installe dans une petite chambre et part comme matelot sur un vaisseau de l’État. […] Mérimée, grâce à ses innombrables relations et à l’amitié de l’impératrice, devint un gros personnage de l’État.

1058. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre II. Les Normands. » pp. 72-164

Solidarité et lutte : voilà les deux effets de ce grand établissement réglementé qui forme et maintient en corps, d’un côté l’aristocratie conquérante, de l’autre la nation conquise ; de même qu’à Rome l’importation systématique des vaincus dans la plèbe, et l’organisation forcée des patriciens en face de la plèbe, enrégimenta les particuliers en deux ordres dont l’opposition et l’union formèrent l’État. […] Le second ne peut pas gouverner ses peuples par d’autres lois que par celles qu’ils ont consenties ; et ainsi ne peut mettre sur eux des impositions sans leur consentement154. » Dans un État comme celui-ci, c’est la volonté du peuple qui est « la première chose vivante, et qui envoie le sang dans la tête et dans tous les membres du corps politique… Et de même que la tête du corps physique ne peut changer ses nerfs, ni refuser à ses membres les forces et le sang qui doit les alimenter, de même le roi qui est la tête du corps politique ne peut changer les lois de ce corps, ni enlever à son peuple sa substance lorsque celui-ci réclame et refuse… Un roi de cette sorte n’a été élevé à sa dignité que pour protéger les sujets de la loi, leurs corps et leurs biens, et le peuple ne lui a délégué de pouvoir que pour cet objet ; il ne lui est pas permis d’en exercer un autre155. » Voici donc, dès le quinzième siècle, toutes les idées de Locke ; tant la pratique est puissante à suggérer la théorie ! […] XI Quand des hommes sont, comme ceux-ci, doués d’un naturel sérieux, munis d’un esprit décidé, et pourvus d’habitudes indépendantes, ils s’occupent de leur conscience comme de leurs affaires, et finissent par mettre la main dans l’Église comme dans l’État.

1059. (1924) Critiques et romanciers

Si l’on demande ce que fait la littérature, en telle occurrence, et comment elle supplée ou seconde l’homme d’État, le législateur ou les divers meneurs de foule, eh ! […] Mais si le littérateur ne recherche pas du tout la place du politicien, son œuvre peut et, le pouvant, doit seconder l’homme d’État. […] Mais, de nos jours, l’on ne s’adresse plus aux philosophes pour régler le gouvernement des États : si l’on fait bien ou mal, c’est l’avenir qui le dira. […] Ce n’est pas à dénigrer l’éducation des Jésuites et puis l’éducation de l’État que sont dédiés les deux romans de M.  […] Réduite aux opérations militaires, à la signature des traités, à l’effort des gouvernements et à la polémique des États, l’histoire n’est plus qu’un jeu savant.

1060. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

Alphonse, à qui ces outrages furent rapportés, fit emprisonner le Tasse, soit comme malade, soit comme criminel d’État, dans l’hôpital Sainte-Anne de Ferrare, maison qui servait à la fois d’hospice aux infirmes, de prison aux coupables, de refuge aux insensés. […] Nous emprunterons, pour ces citations, la seule traduction peut-être qui ait égalé jamais et quelquefois surpassé en goût le modèle ; c’est celle du consul Lebrun, homme de lettres studieux et exquis, avant d’être homme d’État et collègue de Bonaparte à la première magistrature de la république.

1061. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (3e partie) » pp. 5-96

Il me semblait singulier que lui, qui dans un âge si avancé occupait encore un poste important, plaidât avec tant de force la cause de la jeunesse et voulût que les premières places de l’État fussent données, sinon à des adolescents, du moins à des hommes encore jeunes. […] Elle a tout vu et tout reproduit très fidèlement ; après un si long espace de temps, cela se lit encore très bien, parce qu’on est replacé directement dans une situation qui a disparu, avec tant d’autres grandes choses, mais qui a été saisie avec toute sa vie et heureusement fixée à jamais dans ce récit. — Là, comme toujours, Schiller paraît en pleine possession de sa haute nature ; il est aussi grand à la table à thé qu’il l’aurait été dans un conseil d’État.

1062. (1899) Les industriels du roman populaire, suivi de : L’état actuel du roman populaire (enquête) [articles de la Revue des Revues] pp. 1-403

Et certainement ces avantages, ou du moins le dernier, seraient assurés, si l’État qui, dans quelque mesure, a charge d’âme, imposait un frein à la licence de la presse et ne tolérait pas la libre circulation, à bas prix, de récits et de romans orduriers qui sont de nature à dépraver la jeunesse. […] On obtiendrait facilement pour cette œuvre le concours soit de l’État, soit des sociétés d’éducation et de moralisation existantes, soit même de particuliers généreux.

1063. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

Le traité Etat et Religion (1864) pose nettement le rôle nouveau que Richard Wagner, avec son maître Schopenhauer, assigne à la civilisation. […] Les efforts sociaux sont vains ; il faut dans ce monde que les volontés particulières soient pliées à la volonté unique et despotique de l’Etat.

1064. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

Il a résumé d’ailleurs, dans le tableau suivant, cette opposition du sujet et de l’objet ramenés à des états de conscience151 : États de la première classe. […]   États de la seconde classe.

1065. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — I. » pp. 301-321

Daru, occupé des grandes affaires et portant le dur poids de l’administration des provinces conquises ou de l’approvisionnement des armées, trouvait encore le temps d’entretenir avec ses amis littérateurs de Paris, les Picard et les Andrieux, une correspondance charmante d’attention, pleine d’aménité et de conseils, il y avait là tout à côté le plus lettré des commissaires des guerres, le moins classique des auditeurs du Conseil d’État, Beyle, qui faisait provision d’observations et de malices, qui amassait toute cette jolie érudition piquante, imprévue, sans méthode, mais assez forte et abondante, avec laquelle il devait attaquer bientôt et battre en brèche le système littéraire régnant.

1066. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Nous le trouvons successivement membre du Tribunat, inspecteur aux revues ayant part dans les fonctions de commissaire général à l’époque du camp de Boulogne, puis conseiller d’État, intendant général de la maison de l’Empereur (1805), et bientôt, et à la fois, intendant général de la Grande Armée (1806).

1067. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

Ce prélat, en effet, « qui se faisait un plaisir d’être le pacificateur de tous les différends d’État » eut, dans le principe, quelque envie de s’entremettre pour réconcilier Furetière avec l’Académie.

1068. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

L’aristocratie est aussi une partie de ce gouvernement, car c’est un certain nombre de familles qui compose la Chambre haute ; mais elle ne blesse pas, parce que la Chambre des communes est remplie des frères de ces lords, et qu’il n’y a pas un des membres de la Chambre basse qui ne puisse aspirer à devenir lord, si les services qu’il a rendus à l’État le méritent.

1069. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin (suite et fin.) »

Et quelquefois, à la fin de juin, par un jour brûlant, dans la robuste épaisseur d’un arbre en pleines feuilles, je voyais un petit oiseau muet et de couleur douteuse, peureux, dépaysé, qui errait tout seul et prenait son vol : c’était l’oiseau du printemps qui nous quittait. » Augustin, le précepteur de Dominique, est un très jeune homme, d’une nature tout opposée à celle de son élève : c’est un homme de livres, de logique, de science, un cerveau ; après bien des labeurs, après des âpretés et des difficultés sans nombre de carrière et de destinée, il arrivera un jour à se faire un nom parmi les écrivains sérieux de son pays, à se faire une haute situation même ; ce sera un politique, un économiste, un conseiller d’État, un ministre, que sais-je ?

1070. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette »

En quittant la terre natale et au moment de franchir la frontière de l’empire, probablement à Augsbourg, la jeune princesse écrit à son auguste mère une lettre remplie des meilleurs et des plus naturels sentiments : « Madame ma chère mère, « Je ne quitte pas sans une vive émotion et un serrement de cœur la dernière ville frontière de votre empire ; avant de traverser les derniers États qui me séparent de ma nouvelle patrie, je demande à couvrir vos mains de mes baisers et vous remercier comme je le sens pour toutes les bontés maternelles dont vous m’avez entourée.

1071. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Coulmann est constitutionnel, et en même temps il a bien soin de nous avertir par une note qu’il ne blâme pas absolument un coup d’État qui était encore récent.

1072. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « QUELQUES VÉRITÉS SUR LA SITUATION EN LITTÉRATURE. » pp. 415-441

Des Préaux s’y connaît en vers mieux que moi. » Aujourd’hui que ce genre de déférence et de patronage va peu à nos idées, que dans les conditions actuelles il courrait risque d’être peu accepté des hommes de talent, que tout poëte dirait volontiers tout d’abord au maître, s’il y en avait un : « Je m’y connais en matière d’État mieux que toi ; » et que, de leur côté, des gouvernants illustres, et en général capables sur tout sujet, vaquent à beaucoup de choses qu’ils croient plus essentielles que le soin des phrases, lesquelles ils manient eux-mêmes à merveille, qu’arrive-t-il et que voit-on ?

1073. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « GRESSET (Essai biographique sur sa Vie et ses Ouvrages, par M. de Cayrol.) » pp. 79-103

Je ne sais qui disait de la situation de l’Autriche par rapport aux autres États plus remuants : Que voulez-vous ?

1074. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

On y sentait l’homme d’État futur sous les teintes du coloriste.

1075. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

Un grand besoin d’ordre et de paix s’est à la longue éveillé, surtout dans le peuple et dans la bourgeoisie : on se réfugie dans la monarchie absolue, à qui l’on demande le salut de l’État et la protection des intérêts privés.

1076. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre I : La loi d’évolution »

Maintenant, si l’on remarque que chez les modernes européens non-seulement l’État et l’Église se séparent de plus en plus, mais que l’organisation politique est très complexe, qu’elle suppose des subdivisions dans la justice, les finances, etc., on ne pourra point douter que le progrès se fait ici de l’homogène à l’hétérogène.

1077. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame Geoffrin. » pp. 309-329

Dès l’année 1743, cette femme d’intrigue a des éclairs de coup d’œil qui percent l’horizon : « À moins que Dieu n’y mette visiblement la main, écrit-elle, il est physiquement impossible que l’État ne culbute. » C’est cette maîtresse habile que Mme Geoffrin consulta et de qui elle reçut de bons conseils, notamment celui de ne refuser jamais aucune relation, aucune avance d’amitié ; car si neuf sur dix ne rapportent rien, une seule peut tout compenser ; et puis, comme cette femme de ressource disait encore, « tout sert en ménage, quand on a en soi de quoi mettre les outils en œuvre ».

1078. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Théodore Leclercq. » pp. 526-547

Fiévée était un des esprits les plus distingués de son temps, sensé jusque dans la passion, ferme jusque dans les versatilités, romancier fin, spirituel et presque délicat, publiciste clairvoyant, habile, et presque homme d’État : il touchait par son esprit à bien des choses élevées ; il avait fait de bonne heure le tour de toutes les opinions.

1079. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Essai sur Amyot, par M. A. de Blignières. (1 vol. — 1851.) » pp. 450-470

Ce n’était à aucun degré un homme d’État qu’Amyot, c’était un homme d’étude, plein de diligence, de curiosité, de patience, et admirable par la façon étendue, agréable et ingénue avec laquelle il présentait les fruits de son labeur.

1080. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « M. Fiévée. Correspondance et relations avec Bonaparte. (3 vol. in-8º. — 1837.) » pp. 217-237

Les États en révolution ne se sauvent point par des constitutions, mais par des hommes. » On voit assez le sens de cette brochure.

1081. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — I. » pp. 1-22

Revenu d’Égypte en France avec Bonaparte, Marmont, après le 18 Brumaire, devint conseiller d’État pour la section de la guerre et présida à une nouvelle organisation de l’artillerie.

1082. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — I. » pp. 127-148

Il y avait tel État où les quakers faisaient à peu près le tiers de la population ; les diverses sectes presbytériennes ou chrétiennes dissidentes avaient la majorité.

1083. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — II. (Fin.) » pp. 308-328

Le duc de Saxe-Gotha le nomma son ministre à la cour de France ; la cour de Vienne lui conféra le diplôme de baron du Saint-Empire, et celle de Pétersbourg le fit colonel, puis conseiller d’État, grand cordon de la seconde classe de l’ordre de Saint-Vladimir.

1084. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Innocent III et ses contemporains »

Une modération mal calculée n’énerva-t-elle jamais les décisions de l’homme d’État dans Innocent ?

1085. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « X. Ernest Renan »

Taine, dont nous parlerons plus loin, a donnée de la Science et qui permettrait à toutes les deux de faire leur travail de destruction dans la plus complète sécurité et sans s’inquiéter de savoir s’il y a une morale, une société, des gouvernements, un foyer domestique, tout un ensemble de choses organisées autour de soi, à respecter, cette définition, qu’il est si important de faire admettre à tout le monde, est la grande affaire et le coup d’État actuel des philosophes.

1086. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Ce qu’elles font, l’une et l’autre, c’est une sorte de coup d’État du cœur sur la loi officielle. […] Et Corneille écrit : « La dignité de la tragédie demande quelque grand intérêt d’État, ou quelque passion plus noble et plus mâle que l’amour, telles que sont l’ambition ou la vengeance… Il faut que l’amour se contente du second rang dans le poème et leur laisse le premier. » Je vous ai déjà cité cette opinion singulière du vieux Corneille. […] Il doit livrer à l’État des travaux considérables qui ont été exécutés « de la façon la plus défectueuse, on peut même dire la plus malhonnête » (c’est lui-même qui l’avoue).

1087. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

Le Cardinal se promit de châtier un gouverneur aussi faible et lança ces paroles sévères : « Les gouverneurs des places fortes sont les sentinelles de l’État. […] Ceux qui rendent les places mal à propos manquent à la fidélité qu’ils doivent au Roi et à l’État : ils ouvrent à l’ennemi la porte du royaume ; ils lui mettent le royaume en main. » Puis, il fit revenir le Roi de Saint-Germain et se mit avec lui à la tête de cinquante mille hommes. […] Mais, en admettant que l’homme d’État ait pu trouver la pièce de Corneille inopportune et périlleuse par ce côté comme par l’autre, ce n’est là qu’une explication subsidiaire, qui ne détruit ni n’atténue le fait trop prouvé de la jalousie de l’auleur de Mirame. […] — elle leur a donné pour but de lui plaire et de la divertir ; « et qu’ainsi nous ne rendons pas un petit service à l’État, puisque, contribuant à Vos divertissements, nous contribuons à l’entretien d’une santé qui lui est si précieuse et si nécessaire. — Vous nous en avez facilité les connaissances, puisque nous n’avons plus besoin d’autre étude pour les acquérir que d’attacher nos yeux sur Votre Éminence quand elle honore de sa présence et de son attention le récit (la récitation) de nos poèmes. […] Les États, sur sa demande, lui ont désigné trois seigneurs, trois comtes, qui paraissent les plus dignes d’être distingués par elle ; mais elle s’est réservé le droit de choisir, soit un des trois, soit n’importe qui.

1088. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre II. La Nationalisation de la Littérature (1610-1722) » pp. 107-277

Comme il voulait faire de la monarchie française le type en quelque manière de l’État moderne, vraiment un, vraiment vivant, vraiment organisé, la littérature, elle aussi, semblait tendre vers le même idéal d’organisation et de vie commune. Et, de même enfin qu’au dehors il voulait faire de l’État français le régulateur de la politique européenne, ainsi l’ambition qui couvait jusque dans le cœur des grammairiens et des critiques, — de Vaugelas, par exemple, ou de Chapelain, — c’était de faire succéder la langue française à la dignité de la latine ou de la grecque. […] Il a des vues d’homme d’État, et elles peuvent bien être « chimériques », mais le rapport en est étroit avec l’état de la France de son temps. […] Tous ces crimes d’État qu’on fait pour la couronne, Le ciel nous en absout alors qu’il nous la donne. […] Du Bellay, Défense et illustration, etc.]. — Elle a ainsi relevé la condition de l’homme de lettres ; — dans l’État ; — et à ses propres yeux. — Enfin, en se proposant de « fixer » la langue, il a semblé d’abord qu’elle y dût réussir ; — et en tout cas, en en maintenant le respect, elle en a préparé ce que cent cinquante ans plus tard les étrangers appelleront eux-mêmes l’universalité [Cf. 

1089. (1929) Amiel ou la part du rêve

Il ne pouvait, comme le sujet d’un grand État administré, se retrancher dans la vie intellectuelle ou contemplative. […] Un parlementaire français du Midi, à qui on disait que les États suisses confédérés étaient des cantons, s’exclamait : « Des cantons ! […] Amiel a éprouvé mieux que personne les inconvénients qu’il y a à être le citoyen d’un si petit État. […] Aussi tout son cœur, le dernier été de sa vie, en juillet 1880, s’ouvre-t-il à oie qui vibre dans la Passerine, quand le peuple genevois rejette la loi portant séparation de l’Église de Calvin et de l’État.

1090. (1893) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Première série

Il ne faut point confondre avec les conquérants, effrénés et insatiables par définition, les grands capitaines, encore moins les grands hommes d’État qui ont borné sagement leur activité au service utile de la patrie. […] Un État où la majorité des esprits d’élite serait composée de philosophes et de savants, d’artistes et de littérateurs, au lieu d’offrir l’aspect d’un organisme vivant et puissant, ressemblerait à un mandarinat sans, relation avec la marche du monde et voué par son inactivité pratique à la décadence et à la ruine. […] Très logiquement, le soin de leur propre salut a toujours dû être pour les croyants leur principale affaire, quelque fonction qu’ils eussent dans l’État, et le service du grand Roi lui-même était, avec raison, aux yeux de Racine et de Boileau, moins important que cette question personnelle. […] mon individualisme incurable garde au cœur je ne sais quel regret des temps de somnolence et d’anarchie, où le professeur du haut enseignement littéraire, rouage peu utile de la machine sociale, bénédictin laïque pensionné par l’État, pouvait, à l’ombre de son cloître, dans la profonde paix d’une douce sinécure pédagogique, recueillir pour lui seul le fruit de ses chères et libres études. […] Aucun État ne fut jamais assez tranquille et assez pacifique pour laisser longtemps sans emploi les braves qui ne demandent qu’à donner des coups au voisin et à risquer leur peau ; à défaut d’une guerre en Europe ou dans les colonies, les grands voyages de découvertes présentent aujourd’hui à leur ardeur entreprenante et belliqueuse une satisfaction analogue.

1091. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

— L’intérêt de l’Etat leur servira de loi. — L’intérêt de l’Etat est de n’avoir qu’un roi Qui, d’un ordre constant gouvernant ses provinces, Accoutume à ses lois et le peuple et les princes. […] Vous les verriez toujours former quelque attentat Et changer tous les ans la face de l’Etat. […] De l’Etat et de toi, je sens que je suis père ; Donne ton sang à Rome et n’en exige rien. […] Thiers, ce sont les pièces du boulevard qui raniment dans le peuple les souvenirs d’où sortira le coup d’Etat du 2 décembre.

1092. (1930) Physiologie de la critique pp. 7-243

Le libéralisme politique est la conscience d’un pluralisme dans l’État, conscience de plusieurs partis irréductibles, que le libéral ordinaire tolérera de bonne foi, mais dont le libéral raffiné, intégral, verra la pluralité, la coexistence, comme un bien à maintenir. […] Pour que la première racine soit coupée, il suffit que le professeur et le journaliste deviennent des instruments de l’État. […] Cela se passe comme aux États généraux de l’Ancien Régime, qui n’ont jamais abouti, parce que les trois ordres ne se sont jamais entendus. […] Ils ont relégué dans les écoles mille disputes puériles, qui étaient autrefois dangereuses et qu’ils ont rendues méprisables ; par là ils ont en effet servi l’État. […] Un ménage ou un État où l’on croasserait du matin au soir : j’ai droit !

1093. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

C’est le devoir complet des cochons1411. » Voilà la fange où il plonge la vie moderne, et par-dessous toutes les autres la vie anglaise, noyant du même coup et dans la même bourbe l’esprit positif, le goût du confortable, la science industrielle, l’Église, l’État, la philosophie et la loi. […] » Le langage, la poésie, les arts, l’Église, l’État ne sont que des symboles. « Ainsi, c’est par des symboles1428 que l’homme est guidé et commandé, heureux ou misérable ; il se trouve de toutes parts enveloppé des symboles reconnus comme tels ou non reconnus. […] Et il y a telle histoire qu’on peut lui demander mieux qu’à tout autre, celle de la Révolution qui eut pour source la conscience, qui mit Dieu dans les conseils d’État, qui imposa le devoir strict, qui provoqua l’héroïsme austère.

1094. (1805) Mélanges littéraires [posth.]

Cependant on dit également bien conjurer la perte de l’État, et conspirer contre l’État : on dit aussi la conspiration et non la conjuration des poudres. […] C’est au plus le style de quelques académies de province, dont la multiplication excessive et ridicule est aussi funeste aux progrès du bon goût, que préjudiciable aux vrais intérêts de l’État : depuis Pau jusqu’à Dunkerque, tout sera bientôt académie en France.

1095. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

Montaigne était sur le point de le publier innocemment dans ses Essais, pour donner une idée du talent précoce de son ami, lorsqu’il s’aperçut qu’il avait été devancé par les violents et les irrités du temps, qui, dans un recueil imprimé au lendemain de la Saint-Barthélemy, avaient mis le traité de La Boétie avec d’autres discours du même genre, à cette fin de remuer et renverser l’État.

1096. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — II. Duclos historien » pp. 224-245

Dans l’intervalle des phrases de Duclos que j’ai rapprochées, celui-ci a eu soin d’introduire un brillant éloge d’Agnès Sorel et un mot sur Jeanne d’Arc, qu’il appelle d’ailleurs une généreuse fille ; mais Agnès Sorel a tous les honneurs : Ce fut la maîtresse pour qui Charles eut la plus forte passion et qui fut la plus digne de son attachement : sa beauté singulière la fit nommer la belle Agnès… Rare exemple pour celles qui jouissent de la même faveur, elle aima Charles uniquement pour lui-même, et n’eut jamais d’autre objet dans sa conduite que la gloire de son amant et le bonheur de l’État.

1097. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — III » pp. 81-102

mais d’autres n’eussent point mis la leur en tel lieu, et si on l’eût pris au mot, la sienne était utile à l’État.

1098. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Souvenirs militaires et intimes du général vicomte de Pelleport, publiés par son fils. » pp. 324-345

Dans les différents régimes qu’il a traversés et sous lesquels il a servi la France, n’étant pas de ceux qui se croient appelés à gouverner ou à corriger l’État, Pelleport s’est constamment appuyé à la partie honnête et sensée de chaque régime.

1099. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Il lui défend d’aborder les salles du Conseil d’État ; il lui interdit d’agrandir ses toiles.

1100. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Mais les besoins de l’État sont tels, que du jour où la plus petite industrie ne lui rapportera rien, la culbute sera inévitable.

1101. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc (suite et fin.) »

Cet édifice, bâti sous Saint Louis, est admirable de bon sens, aussi bien approprié à sa destination que la salle des États au Louvre l’est peu.

1102. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid (suite.) »

Le roi le blâme, le réfute et donne les raisons d’État contre un préjugé si funeste : « Vous parlez en soldat, je dois agir en roi. » Puis, tournant court sans transition, le bon roi se met à deviser du danger dont les Maures, dit-on, menacent le royaume.

1103. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. (suite et fin.) »

C’est le devoir de quiconque touche sur quelque point à l’histoire de s’appliquer à dégager des mauvais actes, des mauvaises paroles, des emportements et des égarements de passion ou des erreurs de système, les services rendus à cette chose durable et sacrée qui s’appelle la Patrie ou l’État.

1104. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Essai de critique naturelle, par M. Émile Deschanel. »

Cela est vrai, depuis le souverain qui, lorsqu’il est fait pour l’être, parle des matières d’État avec élévation, avec dignité et simplicité, jusqu’à l’homme spécial et plein de son sujet qui, pour peu qu’il soit à la fois homme d’esprit, se trouve être son meilleur truchement à lui-même.

1105. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. » p. 232

Il fut tué lors du massacre du coup d’État, en décembre 1851, sur la voie publique, à Paris, pendant qu’il se rendait, inoffensif et sans armes, au palais de justice.

1106. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [II] »

Je mettrai ici cette dernière demande qui résumait les précédentes, et qui établit les services de Jomini dans sa première carrière d’officier suisse avec toute la précision désirable : « État de services de Henri Jomini, chef de bataillon, né à Payerne, en Suisse, le 6 mars 1779. — Lieutenant dans les troupes helvétiques en 1798. — Capitaine, le 17 juin 1799 — Chef de bataillon, le 26 avril 1800.

1107. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. J. J. AMPÈRE. » pp. 358-386

Vous chantez si hautement les triomphes de l’Église et les fêtes de l’État, la mort des martyrs et la naissance des princes, qu’il semble que vos vers ajoutent de la gloire à celle du ciel et des ornements à ceux du Louvre ; les saints semblent recevoir de vous une nouvelle félicité, et M. le Dauphin une seconde noblesse. » Une étude particulière sur Balzac démontrerait à fond cette identité de nature qu’il a avec les rhéteurs des siècles inférieurs retracés par M.

1108. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIe Entretien. Chateaubriand »

Lainé, homme d’État de l’école de Cicéron ; M. de Bonald, écrivain remarqué et remarquable, plus par la raison et la piété que par l’imagination et par le cœur ; M. le baron Monnier, fils du président de l’Assemblée constituante, M. de Rayneval, son ami, les plus spirituels et les plus aimables des hommes ; leurs deux femmes, Polonaises charmantes, qu’ils avaient épousées d’amour, à Varsovie, pendant la campagne de Pologne, et qui les aimaient comme elles en étaient aimées.

1109. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

Jean, Sire de Joinville64, Champenois comme Villehardouin, n’est ni un capitaine ni un homme d’État.

1110. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre I. Renaissance et Réforme avant 1535 — Chapitre II. Clément Marot »

Auprès d’elle, dans ses apanages et ses États, Marot, Despériers, Farel, Sainte-Marthe, Le Fèvre d’Étaples, Roussel, Calvin, on pourrait dire toute la Renaissance et toute la Réforme, trouvent sécurité et liberté : les offices de sa maison, les charges de ses domaines abritent ceux à qui Réda ou Lizet rendent la France intenable.

1111. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Et c’est pourquoi il a si bien réussi ses personnages de magistrats et d’hommes d’État, ses théoriciens du gouvernement, de la conquête et de la sédition.

1112. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

Et le nouveau secrétaire d’État, Michel Le Tellier, écrivit à Gassion cette lettre que M. le duc d’Aumale ne cite pas et n’avait pas à citer, et dont les termes me paraissent très significatifs : Monsieur, la bonne part que vous avez eue en la gloire de la bataille de Rocroy a été publiée si hautement et est si connue de tout le monde, qu’il n’a pas été besoin que vos amis se soient mis en peine de faire savoir à la reine de combien de valeur et de prudence a été accompagnée la conduite que vous avez tenue en cette occasion si importante, etc.

1113. (1890) L’avenir de la science « II »

Avec autant de raison on eût pu dire en 1780 : l’État a toujours renfermé jusqu’ici trois classes d’hommes : les gouvernants, l’aristocratie limitant le pouvoir, la roture ; donc cela est de la nature humaine ; donc vous qui voulez changer cet ordre, vous êtes des fous dangereux, des utopistes.

1114. (1887) Discours et conférences « Rapport sur les prix de vertu lu dans la séance publique annuelle de l’Académie française »

Il s’est défié des sceaux de l’État, et il a pensé qu’il ne fallait mettre en mouvement l’autorité préfectorale que pour des vertus qui ne supposent pas un petit cercle d’initiés.

1115. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Huet, évêque d’Avranches, par M. Christian Bartholmèss. (1850.) » pp. 163-186

[NdA] On cite quelquefois une phrase de Huet comme ayant un air de prophétie ; elle est dans son Histoire du commerce et de la navigation des anciens, qu’il écrivait sous le ministère de Colbert ; il parle des Russes, qu’on appelait encore Moscovites : « Que s’il s’élevait parmi eux quelque jour, dit-il, un prince avisé qui, reconnaissant les défauts de cette basse et barbare politique de son État, prît soin d’y remédier en façonnant l’esprit féroce et les mœurs âpres et insociables des Moscovites, et qu’il se servît, aussi utilement qu’il le pourrait faire, de la multitude infinie de sujets qui sont dans la vaste étendue de cette Domination qui approche des frontières de la Chine, et dont il pourrait former des armées nombreuses ; et des richesses qu’il pourrait amasser par le commerce, cette nation deviendrait formidable à tous ses voisins. » Je ne donne pas la phrase comme bien faite, mais elle est curieuse et prouve que Huet, avec un tour très latin en français, est capable, plus qu’on ne croirait, d’un sens très moderne.

1116. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « L’abbé de Choisy. » pp. 428-450

., naquit à Paris, en 1644, d’une de ces hautes familles bourgeoises qui avaient le privilège de fournir à l’ancienne monarchie ses meilleurs secrétaires d’État, ses conseillers et ministres les plus laborieux et les plus fidèles.

1117. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — II. (Suite.) » pp. 23-46

Ce serait aujourd’hui la matière d’un chapitre assez piquant par le contraste, et qu’on pourrait intituler : « Comment il faut s’y prendre quand on veut mai faire un coup d’État.

1118. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1881 » pp. 132-169

Mercredi 2 novembre État particulier, où l’on ne sait pas ce qu’on mange, où l’on se surprend à parler tout haut, où l’on se sent dans la cervelle un vide et un plein absurdes, et avec cela une espèce de bonheur vague dans la poitrine et de la faiblesse dans les jambes.

1119. (1899) Esthétique de la langue française « Le cliché  »

« Le char de l’Etat est entravé dans les flots d’une mer orageuse », cela fut dit à la tribune, tandis que la phrase où ce même char « navigue sur un volcan » est une invention d’Henry Monnier  : on voit combien elle était inutile. « C’est en vain, crie un orateur, que nous ferons une bonne constitution, si la clef de la voie sociale nous manque. » Cormenin, qui avait de la verve et aucun sens littéraire, écrivait ainsi : « Par la trempe étendue et souple de son esprit, il jette de vives lumières sur toutes les questions », ou bien : « J’ai modéré le feu de mes pinceaux. » Il fit un tel abus des « lambris dorés » qu’on lui attribua cette petite création ridicule225.

1120. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre I. Shakespeare — Son génie »

Une critique d’État, dûment assermentée et accréditée, peut rendre des services.

1121. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

                 « Le ministre secrétaire d’État au département de l’intérieur, La Bourdonnaye. » (Tome XI.

1122. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Introduction »

Il se trouve encore des esprits qui, même dans l’ordre de la foi, voudraient que l’État intervînt pour fixer ce qu’il faut croire et ce qu’il est permis de ne pas croire.

1123. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre I. La critique » pp. 45-80

L’État présent de la Littérature, par M. 

1124. (1860) Ceci n’est pas un livre « Hors barrières » pp. 241-298

Détachons pourtant cette pensée, jetée, en manière de conclusion, à la suite de considérations sur les finances de l’État, par un ex-caissier qui a perdu ses illusions : « En général, ceux qui prennent le sac sont ceux qui ne l’ont pas. » Mon Dieu !

1125. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « V. M. Amédée Thierry » pp. 111-139

Probablement et d’après ce qui se pratiquait par une sorte d’échange entre la Barbarie et la Civilisation, tandis que Aétius faisait ses premières armes chez les Huns, Attila faisait les siennes chez les Romains, étudiant les vices de cette société comme le chasseur étudie les allures d’une proie : faiblesse de l’élément romain et force de l’élément barbare dans les armées, incapacité des empereurs, corruption des hommes d’État, absence de ressort moral sur les sujets, en un mot, tout ce qu’il sut si bien exploiter plus tard et qui servit de levier à son audace et à son génie. » La phraséologie moderne à part, il y a l’éclair du vrai dans ces paroles.

1126. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « X. M. Nettement » pp. 239-265

Écoutez-le plutôt dans sa préface, quand il nous rapporte avec l’accent d’un homme flatté l’impertinent éloge qu’un homme d’État du gouvernement de juillet fit un jour tomber sur son livre.

1127. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIV. »

L’histoire explique assez ce qui manquait à cette œuvre, inaugurée par la suppression arbitraire d’un État libre, et par la création factice de démocraties nominales, puis promptement réduite à ce pouvoir absolu qui exploite les bras d’un peuple, mais ne le ranime pas.

1128. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

Vous avez ennobli le but de l’art, puisqu’au lieu de celui de plaire au peuple que nous prescrivent nos maîtres, et dont les plus honnêtes gens de leur siècle, Scipion et Lélie, ont autrefois protesté de se contenter, vous nous avez donné celui de vous plaire et de vous divertir, et qu’ainsi nous ne rendons pas un petit service à l’État, puisque, contribuant à vos divertissements, nous contribuons à l’entretien d’une santé qui lui est si précieuse et si nécessaire. » Corneille oubliait que le Cid n’avait point du tout diverti son éminence, et qu’il dégradait de noblesse son chef-d’œuvre, en ne lui laissant que l’avantage d’avoir diverti le peuple.

1129. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

C’est pour eux autant que pour moi que j’étudie ; car je suis pénétré d’une vive reconnaissance envers ceux qui m’ont permis de compléter ainsi mes premières études, et je n’oublierai jamais qu’en acceptant cette mission, j’ai contracté envers l’État une de ces dettes que l’on n’acquitte qu’avec les efforts de toute une vie. » Il avait fait, en septembre-octobre 1848, un petit voyage en Arcadie et en Élide, dont il envoya un récit détaillé à son frère. […] Cuvier : « Bossuet après tout était un conseiller d’État. » Mais cette question, quand on aborde uniquement Bossuet par le côté de sa parole et par les productions de son éloquence, n’est que secondaire ; l’idée ne vient même pas de se la poser.

1130. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mademoiselle Aïssé »

Signé : De Ferriol de Pont-de-Veyle, De Ferriol d’Argental, Blondel de Gagny. » (Extrait des Archives de l’État civil.) […] Parlant du relâchement et de l’anarchie croissante au sein du pouvoir, elle prédit la ruine aussi nettement qu’Aïssé l’a fait tout à l’heure : «  À moins que Dieu n’y mette visiblement la main, il est physiquement impossible que l’État ne culbute. » (Lettre de Mme de Tencin au duc de Richelieu, du 18 novembre 1743.)

1131. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Voltaire, — Mirabeau — Danton ; le premier des Bonaparte, comme homme de guerre ; Louis XVIII, quoique détestable écrivain ; Rossini, quoique exclusivement dieu de la musique ; Thiers, quoique plus orateur et historien qu’homme d’État ; le second des Bonaparte, quoiqu’il soit l’homme où l’esprit de parti aveugle ait eu la main heureuse en le choisissant pour dictateur ; — ces hommes, nés d’eux-mêmes, et vraiment remarquables, rapetissent tout ce qui est faussement grand autour d’eux. […] Tout marche à un renversement de l’État, provisoirement tranquille, où nous étions depuis quelques années.

1132. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Elle fume toujours des imprécations de Joseph de Maistre, cet inquisiteur d’Etat qui l’a brûlée et qui pourrait recommencer. […] Et là, comme partout, dans le conseiller d’État solennel comme dans le poète qui posait dans son auréole, je retrouve, de même qu’un rat dans une grande armoire, mon éternel petit bourgeois.

1133. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

J’ai dit que la santé de Fauriel, un peu altérée par la fatigue de la vie administrative et par l’excès du travail, l’avait décidé à un voyage dans le Midi pendant l’été de 1801 ; il y accompagna son protecteur Français de Nantes, qui allait en tournée de conseiller d’État. […] Il m’a cru très-amie de ce conseiller d’État ; j’ai pourtant eu soin de lui dire que son jeune compagnon, sans crédit et sans dignité, était l’objet de mes questions. […] Il n’a pas ce coup d’État du talent qui dispose d’autorité les choses pour le lecteur et les impose à quelque degré, ou qui du moins les ordonne et les ménage dans un jour approprié à la scène. […] Celui-ci pourtant éprouvait des regrets pénibles au milieu de ses espérances : en même temps qu’il sentait que la poésie n’est réellement conforme à ses origines et à son but que lorsqu’elle se rattache à la vie vraie d’une société et d’un peuple, il comprenait que, pour toutes sortes de causes, l’Italie restait un peu en dehors de cette destinée naturelle ; l’extrême division des États, l’absence d’un grand centre, la paresse et l’ignorance, ou les prétentions locales, avaient établi de profondes différences entre la langue ou plutôt les langues parlées, et la langue écrite.

1134. (1890) Le massacre des amazones pp. 2-265

La patrie, — quand on comprend sous ce vocable un grand État aggloméré par le hasard des conquêtes et des maquerellages royaux, limité par le hasard des défaites, — est une idée artificielle, à la fois trop étroite et trop large. […] Oserai-je pourtant reprocher à l’une et à l’autre la double naïveté de croire à l’influence heureuse d’un enseignement moral abstrait et de le demander à l’État. […] Je n’ai pas trouvé chez elle le fameux « char de l’Etat qui navigue sur un volcan » ; il s’en faut même de beaucoup, il s’en faut du volcan tout entier, car la tête de Mme de Witt, assurément, n’a rien de volcanique. Lorsque Casimir Perier, premier de la dynastie, « avait pris les rênes de l’Etat, il avait été soutenu à la Chambre par M.  […] Il lui faut un enseignement d’Etat seul et tout-puissant, une orthodoxie scientifique.

1135. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Il n’y a donc pas lieu d’espérer que le titre du présent article sera beaucoup compris des ingénieurs de l’État ou des ingénieurs civils, des entrepreneurs de travaux publics, des fabricants de guano pour l’exportation et des tanneurs de peau humaine par procédés rapides, qui forment la portion aride des innombrables lecteurs de ce journal. […] Ces deux hommes d’État ont, comme vous encore, raté leur vocation, mais ils se sont résignés, l’un à être premier ministre et l’autre quasi empereur, tandis que vous manquez totalement de résignation. […] Dans la première, datée du 27 avril 1738, le Pape, « réfléchissant sur les grands maux que la société clandestine, dite des Francs-Maçons, lui donnait lieu de craindre, soit pour la tranquillité des États, soit pour le salut des âmes, défendait à tout chrétien, sous peine d’excommunication, de la favoriser, de s’y agréger et d’assister à ses réunions ». […] Mais voici : l’Église et l’État ayant été séparés par le simple fait d’une législation athée, l’Église a été privée du concours des lois civiles de répression et le pauvre têtard politique appelé bourgeois, sollicité à la fois, comme Hercule adolescent, par le vice et par la vertu, s’en est allé du côté où on avait l’air de s’amuser davantage et il est devenu franc-maçon. […] Il ne s’agit pas seulement de sauver les âmes et de sauver les États, il faut encore sauver l’intelligence humaine qui est en perdition sur un océan de bêtise et qui va tout à l’heure être engloutie.

1136. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

Nés avec le siècle majeur, ils ont trente ans l’année du coup d’État, l’année où le siècle se met en marche vers la soixantaine, où il devient vieux, désabusé, expérimenté, un peu cynique. […] Mais le mari de sa mère personnifia pour Baudelaire, en même temps qu’un victorieux rival de tendresse, la famille, l’État, la société, la discipline, toutes les valeurs « hénaurmes » qu’il était beau d’immoler à l’Art. […] Les obstacles d’argent qui l’arrêtent sont aplanis par Du Mesnil, qui lui obtient une commande de l’État, avec tous ses avantages. […] En se multipliant parmi nous, ils feront crouler toutes nos petites patries, car les petits États ne vivent que de foi et de volonté. » À partir de 1868, le Journal marque un redoublement d’amertume contre Genève, contre la famille d’Amiel, contre la vie qui lui a été imposée, contre ce qui, de sa destinée manquée, est la faute des autres, contre son éducation protestante, contre ce fantôme de la pureté sexuelle, « cette folie à laquelle j’ai sacrifié ma santé, ma force et mon existence, cette folie de la continence, prise pour une vertu ». […] État d’outre-tombe… Si l’on définit, avec Platon la philosophie comme la préparation à la mort, peu d’hommes ont été plus philosophes que lui.

1137. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Je sais bien mon devoir, et ce qu’on doit à Rome Pour avoir dans ses murs élevé ce grand homme Dont le génie heureux par un secret ressort Fait mouvoir tout l’État encore après sa mort. […] Tant d’États, tant de mers qui vont nous désunir M’effaceront bientôt de votre souvenir. […] La suppression d’une vie humaine par intérêt dynastique ou raison d’État, est-ce que cela n’est point pratiqué dans des civilisations très avancées ? […] Laissons le jeune et fier Britannicus ; la mélancolique et comprimée Junie, plus sérieuse que son âge, et qui semble, pour Britannicus, une grande sœur autant qu’une amante ; et Burrhus, l’honnête homme circonspect, qui a bien du mal à maintenir son honnêteté parmi les concessions exigées par les nécessités d’État, mais qui la maintient tout de même ; laissons aussi Narcisse, le tentateur de Néron, aussi bon psychologue, vraiment, que Iago. […] La grandeur de la maison d’où elle était sortie n’était pour elle qu’un engagement plus étroit dans le schisme de ses ancêtres… Mais, si les lois de l’État s’opposent à son salut éternel, Dieu ébranlera tout l’État pour l’affranchir de ces lois.

1138. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

elle y est bien habituée : nous avions une ferme depuis quatorze ans dans l’Arkansas ; mais cet État-là devient trop peuplé, et puis le pays est entre les mains des politiciens qui ruinent le peuple. […] Pour nos yeux, non désaccoutumés des spectacles historiques, un ministre, un secrétaire d’État est encore autre chose qu’un simple gérant de cercle, ou qu’un courtier marron. […] Un quart d’heure après, il était en plein travail. » Heureux les hommes d’État que la politique ne saisit pas tout entiers et qui, en se séparant des huissiers du ministère, se consolent en songeant à la tâche interrompue qu’ils vont reprendre ! […] Ce sont de bons travailleurs qui, descendus ou précipités du char de l’État, retombent sur leurs pieds et reprennent tranquillement leur outil. […] Le voilà, comme s’il ressuscitait, comme s’il parlait, l’implacable et infatigable secrétaire d’État qui, jusqu’à son dernier souffle, s’efforça de travailler à la prospérité du royaume et qui mourut en jurant qu’il n’avait jamais tenu pour ennemis personnels que les ennemis du bien public.

1139. (1903) Propos de théâtre. Première série

Lanson croit être celui du seizième siècle, il faudrait que Marie Stuart mourût au troisième acte et qu’on la pleurât et qu’Élisabeth eût des remords et reprochât sa mort aux « États du royaume », depuis le milieu du troisième acte jusqu’à la fin de la pièce. […] Que lui importent la vie, la puissance, les honneurs, les devoirs même envers le Prince et envers l’État ? […] Raisonneur avec cela, oui, un instant, devant un cas curieux qui l’intéresse parce qu’il est intelligent, et surtout parce que c’est un grand fait historique dont il sent qu’il aura à s’occuper quand il sera l’homme d’État qu’il veut devenir. […] C’est un homme d’État. […] Joad conspire en prophète, et conspire en homme d’État, avec un ton d’oracle et avec autorité, très avisé en même temps que très ardent et très fort, intelligence froide au service d’une passion ardente.

1140. (1939) Réflexions sur la critique (2e éd.) pp. 7-263

(“L’État devait s’emparer de la Bourse. […] Racine a fait tenir dans Athalie toute la lutte de l’Église et de l’État : le schème moteur qu’il a monté dans sa tragédie, et qui en dépasse l’aventure particulière, prend corps pour nous aussi bien dans la querelle des Investitures que dans la politique de M.  […] Attitude césariste plus que royaliste, dit Curtius, cri vers l’homme fort, « voix qui en 1851 met le prince Louis-Napoléon à la tête de l’État, et qui, une génération après, suscite le général Boulanger. » Son amour pour le catholicisme se relie à la même énergétique, car il y voit une force sociale.

1141. (1859) Critique. Portraits et caractères contemporains

La société française est en péril, sauvons-la d’abord, les poètes chanteront ensuite ; à moi les hommes d’État, les soldats et les travailleurs ; les poètes viendront plus tard. […] Villemain ajoute — et, dans ces sortes de reprises, il est d’un goût inimitable : « Cette assistance de M. de Talleyrand étonne et choque beaucoup ; on ne reconnaît point là, même à part la morale, le coup d’œil de cet homme d’État. […] Villemain. — Son style. — État présent de la langue française. — Invasion des barbares. — Conclusion. […] Cet homme était pourtant le contemporain de ces poètes, de ces philosophes, de ces hommes d’État, de ces capitaines qui, à la fin de l’Empire et dans les premiers jours de la Restauration, s’abandonnaient sans remords et sans peur à toutes les passions, à tous les hasards de ces gloires et de ces fortunes passagères. […] C’est ainsi que dans cette effroyable nuit des journalistes qui s’égorgent les uns les autres, dignes enfants du même monstre, le journal sera sauvé, peut-être, par cinq ou six hommes dont la bonne renommée restera debout aussi bien que le talent, comme pour al tester qu’en effet la presse de ce pays, le troisième pouvoir dans l’État, n’était pas uniquement une puissance de calomnie et de ténèbres ; qu’elle se servait de l’épée aussi bien que du poignard, de la vérité aussi bien que du mensonge, de la justice aussi bien que de la calomnie.

1142. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

Mais toutes ces raisons de nullité disparaîtraient à la première volonté qu’il aurait d’être quelque chose ; car cet État porte en lui-même tous les éléments de prospérité.

1143. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid, (suite.) »

Alphonse, qui en voulait à Rodrigue et lui gardait rancune de cette ancienne perfidie qui lui avait coûté deux royaumes, et du serment humiliant qu’il lui avait imposé au moment de sa restauration sur le trône, prêta l’oreille à l’accusation et bannit Rodrigue de ses États.

1144. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Appendice. Discours sur les prix de vertu »

Le cardinal archevêque de Besançon, en nous attestant de sa main la vérité des faits qui concernent ce digne prêtre de son diocèse, ajoutait : « Je sens couler mes larmes en écrivant ces lignes, comme elles ont souvent coulé pendant que je bénissais le bon abbé Brandelet pour ses œuvres toutes de détachement, de zèle, et d’une persévérance vraiment admirable. » L’abbé Brandelet s’est surpassé en dernier lieu par l’achat qu’il fit, à ses risques et périls, de l’ancien château fort de Blamont mis en vente par l’État en 1859.

1145. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville (suite et fin.) »

Il se disait non et oui à la fois ; il avait présentes à l’esprit toutes les idées et les raisons pour et contre : ce qui fait la force du penseur, mais qui est souvent l’embarras de l’homme d’État.

1146. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres de Virgile »

Ce sont les Anglais qui en fourniraient la meilleure partie : leurs hommes d’État osent montrer en toute rencontre qu’ils ont été nourris dans le commerce des grands auteurs de l’Antiquité.

1147. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

En supposant même que rien de tout cela n’arrive, que les ennemis se retirent, que la tranquillité intérieure se rétablisse et que le pouvoir se raffermisse, entre les faibles mains où on l’a replacé, que pouvons-nous raisonnablement attendre d’une administration effarée, incertaine, enivrée de tous les principes qui tourmentent la société depuis vingt-cinq ans ; d’un chef bon, mais aveuglé au point de méconnaître également, et les hommes et les choses, et de placer sa personne sous la protection du poignard des assassins, et l’État sous la sauvegarde des institutions auxquelles la France a été redevable, pour tout bienfait, du règne de la terreur et de celui de Napoléon ?

1148. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. EUGÈNE SUE (Jean Cavalier). » pp. 87-117

Il savait la mer, du moins il l’avait tenue à bord d’un vaisseau de l’État durant six mois51 ; il avait rangé bien des côtes.

1149. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. NISARD. » pp. 328-357

Nous dirons, pour ceux qui l’ignorent, que ce qu’on appelle le premier Paris dans les journaux politiques est l’article du commencement non signé, et dans lequel, quand le journal est au pouvoir, l’écrivain anonyme parle tout naturellement au nom de la pensée d’Etat. — Ce ne serait que justice d’ajouter, pourtant, que, parmi ceux qui ont écrit ou qui écrivent le premier Paris aux Débats, une exception est à faire, depuis déjà longtemps, pour un publiciste modeste des plus consommés et des plus sensés dans sa cause : n’est-ce pas nommer M. de Sacy ?

1150. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « PENSÉES FRAGMENTS ET LETTRES DE BLAISE PASCAL, Publiés pour la première fois conformément aux manuscrits, par M. Prosper Faugère. (1844). » pp. 193-224

Sainte-Beuve aimait à opposer, par contraste avec la morgue pédante de certains hommes d’État du jour, ministres ou présidents du Sénat, la lettre suivante qu’il avait reçue de M e chancelier Pasquier.

1151. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Cet idéal de tolérance universelle, d’anarchie paisible et en quelque sorte harmonieuse, dans un État divisé en dix religions comme dans une cité partagée en diverses classes d’artisans, cette belle page de son Commentaire philosophique, il la réalise dans sa république des livres, et, quoiqu’il soit plus aisé de faire s’entre-supporter mutuellement les livres que les hommes, c’est une belle gloire pour lui, comme critique, d’en avoir su tant concilier et tant goûter.

1152. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre II. Deuxième élément, l’esprit classique. »

Descartes déprime « les simples connaissances qui s’acquièrent sans le secours du raisonnement, telles que les langues, l’histoire, la géographie, et en général tout ce qui ne dépend que de l’expérience… Il n’est pas plus du devoir d’un honnête homme de savoir le grec et le latin que le langage suisse et le bas-breton, ni l’histoire de l’empire romano-germanique que celle du plus petit État qui se trouve en Europe ».

1153. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIIe entretien. Poésie sacrée. David, berger et roi » pp. 225-279

Ce coup d’État sanglant de Saül contre ceux qui l’ont élevé à la souveraineté ne fait qu’exaspérer la situation.

1154. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre III. Montaigne »

Il prend la peine de mettre la morale au-dessus de la politique, et de réduire les hommes d’État aux strictes règles de la vie privée : il rejette absolument la loi du salut public, par laquelle on autorise tout ; et dans le service des princes, il défend qu’on se donne jusqu’à donner son innocence et sa vertu.

1155. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre I. Les mondains : La Rochefoucauld, Retz, Madame de Sévigné »

Elle livra ainsi l’État, dans des circonstances terribles, à des gens qui n’étaient bons que pour suivre une procession.

1156. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Victor Hugo, Toute la Lyre. »

8 L’autre jour, la Comédie-Française célébrait officiellement — quoique clandestinement (la presse n’était point conviée) — l’anniversaire de la naissance de Victor Hugo par une matinée gratuite où elle représentait Ruy Blas, cette histoire saugrenue d’un domestique amant d’une reine et grand homme d’Etat.

1157. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’expression de l’amour chez les poètes symbolistes » pp. 57-90

C’est qu’alors son expression est libre, à travers les secousses et le désordre de l’État et l’indifférence de l’opinion, embesognée ailleurs.

1158. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Discours préliminaire, au lecteur citoyen. » pp. 55-106

On pourroit dire cependant au Philosophe, qu’autant les gens sages sont prêts à condamner les guerres d’ambition, autant il est nécessaire de soutenir quelquefois des guerres justes, soit pour la défense de l’Etat, soit pour le maintien de sa gloire.

1159. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XIV, l’Orestie. — Agamemnon. »

Au coucher des Pléiades, il s’est élancé ; le lion affamé a sauté par-dessus les murs, et il s’est abreuvé dans le sang royal. » Ce n’est point seulement un vainqueur, c’est aussi un maître qui rentre, prêt à remédier aux maux de l’État, s’il a souffert pendant son absence.

1160. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XV »

Elle a déshonoré un diplomate, en lui volant des secrets d’État.

1161. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — I. (Dialogues inédits.) » pp. 1-28

Vous êtes prisonnier d’État, vous vous perdriez si vous alliez chercher une affaire loin des lieux où vous êtes relégué ; vous me perdriez moi-même ; on croirait que vous avez reçu le prix de ce service dangereux, et que j’ai été assez vire pour l’exiger.

1162. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre VI. Le Bovarysme essentiel de l’humanité »

Cet intérêt de la foule, en déterminant des concours pécuniaires, on contraignant l’État à s’ingérer, mettent la science en possession de l’outillage dont elle a besoin.

1163. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre II. Des poëtes étrangers. » pp. 94-141

Le Poëte italien, très-ignorant en Géographie, rapprochoit les Etats les plus éloignés & commettoit les bevues les plus singulieres.

1164. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Et nous-mêmes, pouvons-nous penser le contraire, lorsque nous nous intéressons à tout ce qui peut relever la condition matérielle et morale du peuple, lorsque nous multiplions les écoles, les bibliothèques, les cours d’adultes, les conférences, lorsque nous préparons l’avènement d’un quatrième État, aussi bien par nos défauts et nos négligences, que par nos efforts directs ?

1165. (1864) Le roman contemporain

État de la société et des esprits après la révolution de 1848. — Point de place pour le roman. […] Cet événement, c’est le coup d’État du 2 décembre. […] Pendant quelque temps, les circonstances qui ont accompagné le coup d’État laissent les esprits dans une sorte de stupeur. […] Après le coup d’État du 2 décembre, chacun comprit qu’on était sur la pente d’un nouvel empire. […] Peu de mois après les journées de Juin, on annonçait dans le cabinet du directeur d’un des grands journaux de cette époque, supprimé depuis comme plusieurs autres par le coup d’État du 2 décembre, un jeune homme portant le nom de Ponson du Terrail.

1166. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Le suffrage universel était la seule base du droit politique en France ; lui résister, c’était faire un acte insurrectionnel, un coup d’État. […] La question se réduit donc à savoir si l’on peut établir des rapports précis non mesurables entre les groupes moraux, c’est-à-dire entre la religion, la philosophie, l’État social, etc., d’un siècle ou d’une nation. […] La notion qu’elles donneront de l’État sera neuve… — Insensiblement, l’opinion changera ; elle changera à propos de la Révolution française, de l’Empire, du suffrage universel direct, du rôle de l’aristocratie et des corps dans les sociétés humaines. […] Or, appliquées à l’organisation sociale, ces formules, en 1789, signifiaient une conception courte, grossière et pernicieuse de l’État. […] À l’aurore de concorde et de liberté du printemps de 1848, succédèrent les journées de Juin, l’expédition de Rome de 1849, la réaction de 1850, le coup d’État de 1851.

1167. (1897) Aspects pp. -215

On pourra d’ailleurs les rectifier, quant à leurs appréciations, en consultant la notice placée par Reclus et Cafiero en tête de Dieu et l’État, celle qui précède l’édition des Œuvres complètes (i vol. chez Stock) et les Souvenirs de Débagori Mokriévitch. […] À cette époque il est panslaviste mais d’un panslavisme spécial tendant à unir tous les Slaves pour le renversement des États qui se les partagent et pour l’organisation d’un système fédéral basé sur la propriété collective et l’égalité politique. […] Il va de club en club préconisant la destruction des États et le communisme. […] Cela est regrettable jusqu’à un certain point car l’âpre dialecticien de Dieu et l’État et des Lettres contre le Patriotisme s’est prouvé en mesure de donner une œuvre philosophique de premier ordre. […] Tels chapitres du Grand Pan : le Cinquième État, le Préfet et le Forgeron, Jacques Fagot, beaucoup d’autres sont des chefs-d’œuvre… J’affirme que le mot n’est pas trop fort.

1168. (1774) Correspondance générale

Falconet ne sera pas plus tôt arrivé, qu’il sera son enfant. » Il ne me reste plus qu’un mot à dire à Votre Excellence : le projet de Sa Majesté serait-il d’appeler dans ses États des Français ? […] Celui qui oserait intituler son drame Jacques Clément, Henri IV, Richelieu, Damiens, Coligny, risquerait d’obtenir un logement aux dépens de l’État, à la Bastille ou à Bicêtre, et la fantaisie de mon jeune ami serait de mériter cette faveur et de ne pas l’obtenir. […] Cet événement a produit une grande émotion parmi tous les ordres de l’État. […] Dans les hommes d’État ? […] Cette lettre et la suivante ont été récemment retrouvées aux Archives de l’État, à Moscou.

1169. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1867 » pp. 99-182

* * * — Les fautes que les hommes d’État font sur le théâtre de la politique, ils les feraient comme hommes, en famille ou dans la société, qu’on les enfermerait. […] Le soir, au fumoir, il s’est étendu, en se vautrant sur un divan, avec cette habitude des hommes d’État actuels, auvergnats et marseillais, de décrotter les talons de leurs bottes à la soie des meubles, et à la fois dédaigneux, et contempteur du monde qui était là, et tout ahuri à la question ébouriffamment intime que lui adresse, sous un air parfaitement bête, Théophile Gautier, sur ses rapports conjugaux avec son épouse.

1170. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Formée dans un établissement de l’État, vous allez être engagée à l’Odéon, qui est un théâtre de l’État. […] Quand vous commencerez à avoir du talent, vous entrerez à la Comédie-Française, qui est le premier théâtre de l’État. […] La Russie n’était alors qu’un État naissant.

1171. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

Par un coup d’État de la raison sur un instinct longtemps irrésistible, et de la charité (qui est la justice supérieure, la justice envers toute l’humanité) sur l’aveugle besoin d’une étroite et fausse justice individuelle. […] Au moment du coup d’Etat, Abner a laissé faire et a gardé son commandement. […] elle est arrivée à la période critique où se perdent presque toujours les auteurs de coups d’Etat. […] Ils n’ont pas l’air de croire qu’il s’échange nécessairement des pensées profondes dans les conseils des potentats, et, en faisant de leur roi Bobèche un idiot, ils nous insinuent que, neuf fois sur dix et par la force des choses, les hommes qui gouvernent les autres (et on ne sait jamais bien pourquoi c’est eux) les gouvernent avec des facultés de joueurs de dominos de force moyenne… « Bobèche : Et, maintenant, occupons-nous des affaires de l’Etat. […] Lorsque cet homme d’Etat, la tête éternellement renversée pour qu’elle soit mieux vue des étoiles, s’avance sur Vénus, et, d’une voix forte, lui jette : « Vive Monsieur Vulcain, Madame ! 

1172. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

Dans ce temps d’intrigues, de conjurations et de coups d’État, d’émeutes et de révoltes, de galanterie passionnée et d’aventures romanesques, dans ce temps où les affaires d’État se compliquaient d’affaires de cœur, où tout ne respirait, ne parlait qu’amour et politique, les sujets tragiques n’étaient pas froids : ce n’étaient pas des fictions de poètes, c’était la vie de tous les jours, le théâtre était l’écho de la rue, des salons, et du cabinet des princes. […] Mais si sa mère n’est point folle, il faut donc que Carlos lui rende la Castille, c’est-à-dire la plus belle partie de ses États ! […] Mais le parti vaincu reste un danger pour l’État. […] Et alors, subissant de nouveau la raison d’État, et de nouveau sacrifiant sa conscience d’homme à l’intérêt public et à son devoir de roi, il proclame sa mère régente ; et, en route pour Pavie ! […] Vos reproches me toucheraient néanmoins, si je croyais fermement à la bonté et à l’efficacité spéciale d’un Conservatoire qui soit institution d’État.

1173. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Roussel s’indigne éloquemment qu’on ait pu prêter à Lamennais la double intention « de démocratiser l’Église, et, par elle, de démonarchiser l’État ». […] « Le mouvement du monde, nous dit-il, est la résultante du parallélogramme de deux forces : le libéralisme d’une part, le socialisme de l’autre, — le libéralisme d’origine grecque, le socialisme d’origine hébraïque, — le libéralisme poussant au plus grand développement humain, le socialisme tenant compte, avant tout, de la justice entendue d’une façon stricte, et du bonheur du grand nombre, souvent sacrifié dans la réalité aux besoins de la civilisation et de l’État. Le socialiste de notre temps, qui déclame contre les abus inévitables d’un grand État organisé, ressemble fort à Amos présentant comme des monstruosités les nécessités les plus évidentes de la société, le paiement des dettes, le prêt sur gage, l’impôt. » Et, grâce à l’ordinaire lucidité du style de M.  […] « L’histoire et le présent, dit-il, nous offrent l’image de guerres presque ininterrompues entre les tribus, entre les peuples, entre les États, entre les nations » ; et il ajoute : « Le but de toutes ces guerres est toujours le même, quelles que soient les formes différentes sous lesquelles ce but est visé ou atteint, et ce but, c’est de se servir de l’ennemi comme d’un moyen de satisfaire ses propres besoins ».

1174. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Sa maison est parfaitement tenue, et un galant homme, au courant des convenances et qui ne saurait rien des dessous de l’existence parisienne, se tromperait, sans nul doute, à la correction de cette attitude La dame du logis a des rentes sur l’Etat, une comptabilité irréprochable, et, si elle se pique de quelque chose, c’est de considération. […] Si là-dessus vous voulez reprendre les notes de Rœderer sur les séances du Conseil d’Etat et les propos de Bonaparte lors de la rédaction du Code civil, vous serez confondu de retrouver la même forme de pensées, qui, égalisant la plus humble réglementation à la plus haute, révèle le législateur. […] L’Empereur disait : « Quand on me parle d’un projet au Conseil d’Etat, je vois le paysan, le bourgeois, le noble auquel le décret va s’appliquer. » Et il voyait en effet un paysan, un bourgeois, un noble, avec leur caractère d’individu, vivant et respirant, voulant et sentant. […] Pourtant, j’imagine qu’il a dû connaître à maintes reprises le regret de ne pas travailler à même la nature humaine, comme ont fait ces grands pétrisseurs de peuples qui sont les vrais hommes d’Etat.

1175. (1898) La poésie lyrique en France au XIXe siècle

Elsbeth épouse par résignation, pour la raison d’État, le prince de Mantoue, qui est ridicule et sot. […] Une perruque qui s’élève et se balance dans les airs, quelle que soit la tête qu’elle découvre, c’est toujours amusant, c’est en soi une bonne farce ; mais, dans les circonstances où opère Fantasio, son espièglerie prend des proportions tout à fait particulières ; elle dépasse les bornes d’une simple plaisanterie, elle devient un grand événement, car le prince de Mantoue est furieux, il va rentrer dans ses États, se mettre à la tête de ses troupes. […] Elle sait très bien que les petites princesses ne sont pas sur la terre pour être heureuses, — et les petites bourgeoises non plus… Pour les princesses, il y a la raison d’État, et pour les petites bourgeoises, il y a le mariage de raison.

1176. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « L’Académie française »

Et d’abord, la somme allouée annuellement par l’État pour l’Académie et qui s’élève en tout à 85,500 francs, cette somme affectée en grande partie aux indemnités, droits de présence, etc., contient une réserve de 4,000 francs pour un prix d’Éloquence et un prix de Poésie.

1177. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

Ceux-ci à leur tour, aisément restrictifs et négatifs dans leur prudence, n’hésitant pas au besoin, dans leur système complexe, à limiter, à entamer le droit par la raison d’État, le rendent bien en inimitié aux esprits de nature girondine, que tantôt ils ont l’air de mépriser comme de pauvres politiques, et que tantôt ils confondent en une commune injure avec la secte jacobine pour les montrer dangereux.

1178. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (4e partie) » pp. 81-143

Situation fausse et dangereuse qui assoit la puissance publique sur la misère privée, qui enracine la grandeur de l’État dans les souffrances de l’individu.

1179. (1824) Observations sur la tragédie romantique pp. 5-40

Il se garde bien surtout de recourir aux périphrases : il eût dit crûment un espion, plutôt Qu’un mortel dont l’État solde la vigilance 10 ; et nommé peut-être la poule au pot, s’il n’y avait eu moyen de s’en abstenir qu’en écrivant : Je veux enfin qu’au jour marqué pour le repos L’hôte laborieux des modestes hameaux, Sur sa table moins humble ait, par ma bienfaisance, Quelques-uns de ces mets réservés à l’aisance11.

1180. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

Donnez aux provinces leurs libertés entières, faites-en des états fédérés dans l’État, et vous verrez aussitôt surgir une France nouvelle débarrassée à tout jamais des parasites qui la rongent, une France consciente d’elle-même, de sa valeur propre, des différentes faces de son génie, dans laquelle tous les éléments qui la composent auront la même fierté, et non ce lâche désir, cette attitude de chien battu qu’ils prennent en face de Paris, en face de la centralisation la plus monstrueuse que l’on ait jamais vue.

1181. (1889) Les premières armes du symbolisme pp. 5-50

Ce Philippe de Comynes était un homme d’État.

1182. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre premier »

Nous vivons à une époque et sous une forme de gouvernement où la réputation dans les lettres, comme la réputation au barreau chez les Romains, est une sorte de candidature universelle pour tous les emplois de l’État.

1183. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

Malherbe voulut l’unité de langue dans un pays qui avait conquis l’unité politique ; plus conséquent que Ronsard, il ne songeait pas à conserver la féodalité dans le langage, quand il se félicitait de la voir disparaître dans l’État.

1184. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre septième. »

Il convenait à celui par qui l’ordre et l’unité s’établissaient dans l’État, de les prescrire dans les ouvrages de l’esprit.

1185. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

La politique contemporaine en France m’en fournirait, je crois des exemples, et j’en trouverais parmi les hommes d’État les plus en vue et non les moins actifs de ces dix dernières années.

1186. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Août 1886. »

Mais, dans cette même brochure de 1864, État et Religion, Wagner indique aussi la note caractéristique de l’œuvre qui l’occupait, de Parsifal ; plus tard, en 1882, il revint à ce sujet et rendit son intention indubitable.

1187. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 457-512

entre les sentences, les maximes, les tours fins & délicats, les expressions ingénieuses, les beaux sentimens qu’il exprime si énergiquement dans plusieurs endroits de ses Ouvrages, & ce débordement de fiel & de malignité, ce tissu d’indécences, de mensonges, de calomnies, répandues sur tant d’Ecrivains de mérite, Etrangers, Nationaux, Prélats, Militaires, de tous les Ordres & de tous les Etats, qui n’ont eu d’autre tort, à son égard, que de n’avoir pas pensé comme lui, & d’avoir osé l’écrire !

1188. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

Quand le roi de Danemark vint en voyage à Paris (décembre 1768), Chamfort en tirait occasion de faire une épigramme bien connue contre le duc de Duras qu’on avait chargé d’amuser le monarque ; mais il savait très bien louer ce dernier, et c’est de lui que sont ces vers qu’on récitait en plein théâtre, et dont voici le trait final : Un roi qu’on aime et qu’on révère A des sujets en tous climats : Il a beau parcourir la terre, Il est toujours dans ses États.

1189. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1858 » pp. 225-262

* * * — Personne n’a remarqué, et cependant cela saute aux yeux et aux oreilles, combien la langue de Napoléon Ier, cette langue par petites phrases de commandement, la langue conservée par Las Cases dans le Mémorial de Sainte-Hélène, et encore mieux dans les Entretiens de Roederer, a été prise et mise par Balzac dans la bouche de ses types militaires, gouvernementaux, humanitaires, depuis les tirades de ses hommes d’Etat jusqu’aux tirades de Vautrin.

1190. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1877 » pp. 308-348

Jeudi 24 mai Ce coup d’État a la faiblesse des choses qui ne sont pas franches, pas carrées, pas décisives.

1191. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre deuxième. Le génie, comme puissance de sociabilité et création d’un nouveau milieu social »

Spencer a montré que les sociétés primitives, en vertu des lois du progrès sociologique, ne tardent pas à devenir plus hétérogènes, à s’agréger à d’autres pour former une intégration supérieure d’Etats, à se diversifier pour se rassembler en nations, en vastes empires.

1192. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Μ. Ε. Renan » pp. 109-147

Renan, pour obéir à ses devoirs d’empereur et d’homme d’État, charge d’âmes qu’il devait préférer aux corps et lutte de vertus !!!

1193. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

Ce ne serait pas le diable chez Balzac, le peintre des de Marsay, des  Palférine et des de Trailles, ces vicieux étoffés qui conduisaient la vie à grandes guides et ne regardaient pas aux pourboires, mais c’est le diable, à ce qu’il paraît, pour Octave Feuillet et les auditeurs au Conseil d’État qui sont ses héros !

1194. (1929) Les livres du Temps. Deuxième série pp. 2-509

Pour tout homme d’esprit libéral, il semble que deux cas se présentent et comportent chacun une solution facile : il y a les églises offrant un intérêt artistique et historique, dont l’État doit assurer la conservation, et il y a les autres, dont l’entretien dépendra naturellement de la générosité des fidèles. […] Il y a des détails désolants sur les razzias opérées dans les églises de France par la brocante. « On peut dire, en face de tout objet d’art, sous un toit ecclésial, que son destin est d’être bazardé ou par le curé ou par les fidèles, ou par la commune ou par l’État. […] Faute d’avoir pénétré la valeur des symboles, Vigny s’imagine que Julien, en toute bonne foi, certes, et pour le bien de l’État, a voulu rétablir ce paganisme sans y croire positivement, par une simple sympathie intellectuelle et politique pour la tradition hellénique que représentait l’ancienne religion. […] Philoctète ou le Traité des trois morales est un drame philosophique, qui met en présence Ulysse, ou la raison d’État, Néoptolème, ou la pitié, Philoctète, ou la vertu esthétique et nietzschéenne, qui nous invite à nous dépasser nous-mêmes, sans souci d’utilité, sans considération du prochain, pour la beauté du fait et par amour de l’art, si l’on ose s’exprimer ainsi.

1195. (1858) Du vrai, du beau et du bien (7e éd.) pp. -492

Mais il n’en est pas moins vrai que l’art, l’État, la religion, sont des puissances qui ont chacune leur monde à part et leurs effets propres ; elles se prêtent un concours mutuel ; elles ne doivent point se mettre au service l’une de l’autre. […] On cite sans cesse la Grèce antique et l’Italie moderne comme des exemples triomphants de ce que peut l’alliance de l’art, de la religion et de l’État. […] De son côté l’État n’encourageait pas les arts en détail, et en petit pour ainsi dire ; il leur donnait une impulsion puissante en leur demandant des travaux considérables, en leur confiant de vastes entreprises. […] Il y a une morale publique comme une morale privée, et la morale publique embrasse, avec les relations des hommes entre eux en tant qu’hommes, leurs relations comme citoyens et comme membres d’un État. […] Y a-t-il rien d’ailleurs qui ait une influence plus décisive sur les mœurs, même des individus, que les institutions des peuples et la constitution des États ?

1196. (1890) Dramaturges et romanciers

Je me trompe cependant, il y a quelqu’un sur qui retombe en plein et entièrement la responsabilité des désordres mondains, et ce quelqu’un c’est le chef même de l’État, lorsque la démocratie a revêtu par hasard la forme monarchique. […] Nous nous rappelons tous le moment où l’empire, sorti victorieux de la longue épreuve d’isolement que lui avait créée le coup d’État et assis dans une sécurité qu’il croyait définitive, essayait de vaincre les dernières résistances des anciens partis et les conviait à se rapprocher du trône par un mélange de railleurs reproches et de flatteuses avances ; les Ganaches, pour qui les relit aujourd’hui, font revivre encore avec vivacité le sentiment politique de cette heure passagère. […] En vérité, nous serions presque tenté de dire de la jeunesse au xixe  siècle ce que disait de l’Église et de l’État un illustre penseur anglais contemporain un jour qu’on parlait devant lui de je ne sais quelle mesure politique qui pourrait les mettre en péril : « Bah ! depuis que j’existe, j’ai vu l’État en danger je ne sais combien de fois, et, quant à l’Église, je ne l’ai jamais vue une seule minute hors de danger. » Nous aussi, depuis que nous existons, nous entendons dire que la jeunesse n’existe plus. […] Le grand mouvement d’affaires lancé par le coup d’État de décembre avait atteint alors son apogée ; il était à la veille de baisser, il est vrai, avec la guerre d’Italie et ses conséquences, mais nul ne s’en doutait encore, et les préoccupations des intérêts matériels absorbaient seules les esprits.

1197. (1911) Visages d’hier et d’aujourd’hui

Mais ensuite, à la veille des États généraux, Louis XVI entamait avec la tsarine des négociations tendant à une alliance. […] … C’est ainsi que Bonaparte fut chargé de faire le coup d’État. […] Ensuite, il a vu, sur les édifices de l’État, ces mots superbes de liberté, égalité, fraternité ; alors, il s’étonna d’observer qu’il y avait toujours trois classes dans les wagons de chemins de fer. […] Nous sentons que notre doute, charmant si l’État est fort, se transforme en une menace dans l’État faible.

1198. (1825) Racine et Shaskpeare, n° II pp. -103

Or, je vous le demande, messieurs, chez une nation qui depuis peu se livre à la funeste manie de tout mettre en discussion, non seulement les lois de l’État, mais encore, ce qui est bien plus grave, la gloire de ses Académies, quels immenses progrès l’erreur et le faux goût ne peuvent-ils pas faire pendant quatre années ? […] Auger qui n’a jamais rien fait, et moi soussigné qui n’ai jamais rien fait non plus, d’une discussion frivole et assurément sans importance pour la sûreté de l’État, sur cette question difficile : Quelle route faut-il suivre pour faire aujourd’hui une tragédie qui ne fasse point bâiller dès la quatrième représentation ?

1199. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre I. La Renaissance païenne. » pp. 239-403

Enfin l’invention recommence ; elle recommence par l’effort de la société laïque qui a rejeté la théocratie, maintenu l’État libre, et qui à présent retrouve ou trouve une à une les industries, les sciences et les arts. […] Ce sont des « gentilshommes », des hommes d’État, les plus polis et les mieux élevés du monde, qui savent parler, qui ont tiré leurs idées non des livres, mais des choses, idées vivantes, et qui d’elles-mêmes entrent dans les âmes vivantes. […] La poésie pastorale. —  Abondance des poëtes. —  Naturel et force de la poésie. —  État d’esprit qui la suscite. —  Sentiment de la campagne. —  Renaissance des dieux antiques. —  Enthousiasme pour la beauté. —  Peinture de l’amour ingénu et heureux. —  Shakspeare, Jonson, Flechter, Drayton, Marlowe, Warner, Breton, Lodge, Greene. —  Comment la transformation du public a transformé l’art. […] Sidney, Wilson, Asham et Puttenham ont cherché les règles du style ; Hackluit et Purchas ont rassemblé l’encyclopédie des voyages et la description de tous les pays ; Holinshed, Speed, Raleigh, Stowe, Knolles, Daniel, Thomas More, lord Herbert fondent l’histoire ; Camden, Spelman, Cotton, Usher et Selden instituent l’érudition ; une légion de travailleurs patients, de collectionneurs obscurs, de pionniers littéraires amassent, rangent et trient les documents que sir Robert Cotton et sir Thomas Bodley emmagasinent dans leurs bibliothèques, tandis que des utopistes, des moralistes, des peintres de mœurs, Thomas More, Joseph Hall, John Earle, Owen Felltham, Burton, décrivent et jugent les caractères de la vie, poussent leur file par Fuller, sir Thomas Browne et Isaac Walton, jusqu’au milieu du siècle suivant, et s’accroissent encore des controversistes et des politiques qui, avec Hooker, Taylor, Chillingworth, Algernon Sidney, Harrington, étudient la religion, la société, l’Église et l’État.

1200. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

Lorsque Clotaire couronna son fils Dagobert roi d’une partie de ses États, il choisit Pépin comme le plus digne de guider sa jeunesse et son inexpérience. […] Il disait volontiers : « Lorsqu’un Roi juge les pauvres avec équité, son trône s’affermit pour jamais. » Ce fut par les conseils de Pépin que Dagobert régna heureusement, d’abord sur une partie du royaume de son père, puis après la mort de celui-ci sur tous ses États. […] On en faisait d’excellente dans les hôpitaux où l’État élevait les filles bâtardes ou orphelines. […] RICHELIEU Oui, comme en vos États j’en ruine le schisme.

1201. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

… » À mesure que l’huissier, en grande tenue, culotte courte, épée au côté, annonçait de sa voix morue dans la solennité des pièces de réception, des files d’habits noirs traversaient l’immense salon rouge et or et venaient se ranger en demi-cercle devant le ministre adossé à la cheminée, ayant près de lui son sous-secrétaire d’État. […] Une prétendue, une fausse raison d’État frappa d’impuissance l’homme de sentiment qui déplorait, dans le principe, les moyens dont on s’était servi pour lui donner le pouvoir, qui paraissait en ignorer les excès, être prêt à les désavouer. […] Molière reprendrait aujourd’hui son moule pour y fourrer le vrai Tartuffe, vivant de popularité escamotée : non pas du tout ces petits Tartuffiaux qui font des livres en pâte de guimauve juive, mais le grand Tartuffe de notre époque, l’hypocrite social et politique qui attaque à la fois l’Église, la magistrature, l’armée et l’État, l’homme-poison, violent ou douceâtre, il importe peu, travaillant le suffrage universel comme on foule le raisin dans la cuvée, pour en exprimer quoi ? […] On ne peut s’empêcher d’avoir pitié de ces deux pauvres enfants, l’un de dix-sept ans, l’autre de quinze, qui étaient ainsi l’un et l’autre victimes du bien de l’État. […] Du reste, son opinion sur la créature en général n’a rien de flatteur pour notre espèce : je trouve sur l’homme ces quelques lignes significatives : L’État n’est que la muselière dont le but est de rendre inoffensive cette bête carnassière, l’homme, et de faire en sorte qu’il ait l’aspect d’un herbivore.

1202. (1894) La bataille littéraire. Cinquième série (1889-1890) pp. 1-349

Vasili qui, avec ce beau livre : La Sainte Russie, paru chez Firmin-Didot, nous servira de guide ; un guide sérieux prenant l’histoire depuis les Varègues jusqu’à nos jours, nous montrant d’abord la Russie à vol d’oiseau, puis la Cour, l’armée, la marine, les grandes institutions d’État, la noblesse, le clergé, la bourgeoisie, le peuple, Saint-Pétersbourg et ses environs, Moscou, le Caucase ; nous conduisant par toutes les voies de communication dans les profondeurs des provinces les plus reculées ; nous faisant admirer, par plus de 200 gravures et chromolithographies, les monuments, les villes, les rues, les grandes cérémonies, les scènes populaires, les costumes si variés d’une immense armée, les portraits de la famille impériale, des grands personnages, nous expliquant, par des cartes politiques et ethnographiques, la Russie tout entière. […] Les partis, soi-disant libéraux, qui se plaisent à montrer la Russie comme un Empire au moins aussi despotique que celui de l’Allemagne, savent-ils seulement que Nicolas Ier, le monarque russe qui a le plus majestueusement représenté le principe autocratique, ait pu dire, dans une lettre autographe adressée à Napoléon III la veille du Coup d’État : — « En principe, je suis d’autant moins contre le suffrage universel, que je ne saurais oublier que ma dynastie est, par deux fois, issue de l’acclamation populaire. » Et enfin, que ce farouche tyran a écrit aussi : « Si je n’étais pas l’Empereur autocrate de toutes les Russies, je serais le premier des républicains. » Ces paroles étranges ici sont très naturelles pour ceux qui connaissent la Russie. […] Quand je rapproche de cette première victoire les 7 439 216 suffrages sur 8 080 053 qui ratifiant le coup d’État du 2 Décembre 1851, lui déléguèrent le droit appartenant au peuple, au vrai souverain de donner une Constitution à la France ; quand je me rappelle cette entrée splendide à Bordeaux, en octobre 1852, au terme du voyage triomphal où fut fait l’Empire, consacré quelques mois après par un nouveau plébiscite réunissant 7 824 189 suffrages sur 8 077 334, je me figure que l’empereur Napoléon, dès avant son avènement au trône, avait épuisé toutes les jouissances personnelles dont l’exercice du pouvoir suprême peut être la source et les satisfactions d’une immense, d’une incomparable popularité ! […] Il m’expliqua, — sans me voir sourciller même, — le coup d’État résolu de suite après la réception de l’Élysée ; me fit lire la proclamation du Prince qu’on affichait dans Paris, et résuma les mesures déjà prises.

1203. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

  Fouillant partout, en France comme en Italie, comme en Piémont, comme à Metz, les papiers d’État, les archives municipales, les correspondances diplomatiques et littéraires, consultant les poésies, les monuments, les estampes, l’auteur a suivi Rabelais dans toutes ses pérégrinations, depuis ses voyages à Rome jusqu’à sa fuite à Metz, quand la Sorbonne menaçante songeait, peut-être à lui faire partager le bûcher d’Étienne Dolet. […] Les pasteurs et les rabbins français reçoivent un salaire de l’État « persécuteur » ; le gouvernement anglais ne donne rien aux cultes dissidents. […] Ils ont rendu ainsi un éclatant hommage à ses qualités d’homme d’État qui furent avant toutes autres, la clairvoyance, le sang-froid, le sens aiguisé des choses pratiques. […] Ce qui est du moins certain, c’est que, de tout temps, avant d’être une règle de conduite intérieure pour lui, la religion a été pour Louis XIV une affaire d’État. […] Vrais ou faux, les « dévots » lui étaient suspects de vouloir lui imposer une autre volonté que la sienne, peut-être même, comme les protestants jadis, de prétendre former un parti, un État dans l’État.

1204. (1892) Portraits d’écrivains. Première série pp. -328

Il reste qu’il prenait intérêt à étudier ce jeu des forces dans l’État. […] C’est le 2 décembre 1851 que parut le premier livre des Goncourt : En 18… Ce jour-là se trouva être la date d’un coup d’État. […] Dans la Fortune des Rougon, les détails sur l’insurrection en Provence sont pris dans l’Histoire du coup d’État par M.  […] Elle est froidement vicieuse, et naturellement fausse, fausse jusque dans sa gentillesse, dans sa grâce frelatée, dans son élégance factice et fragile de perle fausse. — Christian d’Illyrie, fin profil de Slave ardent et mou, roi tombé au surnom de Rigolo, homme enfant. — Mora, l’homme du monde, « qui s’est improvisé homme d’État de premier ordre, rien qu’avec des qualités de mondain, l’art d’écouter et de sourire, la pratique des hommes, le scepticisme et le sang-froid ; habile à donner du sérieux aux choses futiles, à traiter légèrement les choses graves ». […] À qui fera-t-il croire que du coup d’État du 2 Décembre une littérature soit sortie tout armée ?

1205. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

Ils ont beau écrire des niaiseries niaisement, ce public, qui trouverait de l’esprit à Midas si on ne l’avertissait pas, murmure « qu’ils écrivent bien » ; et les Insignifiants finissent par ajouter, sans protestations, à leurs palmes d’auditeurs au conseil d’État le laurier littéraire. […] Bernard Derosne, il n’oserait jamais ce coup d’État. […] J’y ai bien réfléchi ; j’ai lu attentivement l’histoire, l’état de tutelle est normal à l’esprit humain, et la vue fausse des esprits modernes, c’est d’admettre que cet état de tutelle est transitoire et que la gloire de la civilisation est de le finir. » Joseph de Maistre, ce génie de l’impertinence, avait écrit déjà : « Il appartient aux prélats, aux nobles, aux grands officiers de l’État, d’apprendre aux nations ce qui est mal et ce qui est bien, ce qui est vrai et ce qui est faux dans l’ordre moral et spirituel : les autres n’ont pas le droit de raisonner sur ces sortes de matières. […] Tel est, en gros, ce livre des Prophètes du passé, livre politique et religieux à la fois, où sont glorifiées les mémoires de M. de Maistre et de M. de Bonald ; — d’où il sort, en résumé, que la séparation de l’Église et de l’État est mortelle… pour l’État, et qui conclut énergiquement à la théocratie. […] Je vous ai vu soutenir avec tant de calme et de fermeté la chose que vous saviez n’être pas ; je vous ai vu retenir, sous des prétextes si adroits, des actes qu’un autre eût délivrés ; accueillir des titres suspects, en rejeter d’excellents avec des formes si honnêtes ; augmenter ou diminuer si à propos des cotes de contribution ; prodiguer ou refuser des cartes d’électeur avec tant de choix et de discernement ; altérer des noms et des dates par une méprise si opportune ; faire des additions et des omissions si utilement involontaires ; commettre des erreurs si ingénieuses, interpréter les lois avec tant de sagacité, et vos instructions avec tant de latitude ; je vous ai vu enlever un succès douteux avec tant d’audace et d’intelligence, et parvenir à la fin proposée par des voies si diverses et si certaines, que je vous ai jugé trop évidemment appelé aux affaires d’État pour vous confier plus longtemps les miennes.

1206. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Il ne met pas en scène un financier, un homme d’État, un négociant, un journaliste, sans vous exposer, à cette occasion, sa théorie du crédit et du gouvernement, du commerce et de la presse. […] Si je ne puis gouverner un État, au moins je gouvernerai un ordre. […] Elle est aussi vivante pour nous que pour les Florentins, chez qui l’État ressemblait si peu à notre État. […] Il se refusait à lui-même le don de la décision immédiate, la faculté maîtresse de l’homme d’État, d’après lui. […] C’est qu’il est un homme d’État et un homme du monde… » Le marquis Costa fut lui-même tout cela, et il fut surtout une haute et belle âme, avec des façons de sentir qui n’étaient jamais médiocres.

1207. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DÉSAUGIERS. » pp. 39-77

Sa politique et sa charte, à lui, étaient courtes : s’en remettre à la Providence et au pilote pour le gouvernail de l’État, et se contenter d’être le plus aimable, le plus égayant des passagers.

1208. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

André a pris de la Grèce le côté poétique, idéal, rêveur, le culte chaste de la muse au sein des doctes vallées : mais n’y aurait-il rien, dans celui que nous connaissons, de la vivacité, des hardiesses et des ressources quelque peu versatiles d’un de ces hommes d’État qui parurent vers la fin de la guerre du Péloponèse, et, pour tout dire en bon langage, n’est-ce donc pas quelqu’un des plus spirituels princes de la parole athénienne ?

1209. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

Il ne voulait pas davantage se mettre à la suite des grands, et s’en faire le « domestique » : il ne reçut de grâces que du roi, c’est-à-dire de l’État.

1210. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série «  Leconte de Lisle  »

Voilà longtemps qu’on nous annonce les États du diable et les Croisades et Jacqueries et quelques morceaux en ont paru, qui font regretter son peu de hâte à nous livrer les autres.

1211. (1839) Considérations sur Werther et en général sur la poésie de notre époque pp. 430-451

Il s’est trouvé un homme qui, sentant, lui aussi, au fond du cœur la misère du présent, a eu la force de renoncer d’abord au lyrisme et de tourner la poésie à l’action, faisant à la fois œuvre de poète, de philosophe et d’homme d’État.

1212. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Un pair, du Luxembourg immobile ornement, Avec un député discutait humblement, Cherchant à lui prouver, dans la France légale, Que des pouvoirs égaux la puissance est égale… Un conseiller d’État, un président de cour Parlaient sans s’écouter, mais chacun à son tour Le Clergé, le Barreau, l’Institut et l’Armée Avaient envoyé là plus d’une renommée ; On y comptait encor trois femmes, beaux esprits… C’était à la campagne un salon de Paris.

1213. (1902) Le culte des idoles pp. 9-94

C’est pourquoi les hommes d’État lisent des romans d’aventures.

1214. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1883 » pp. 236-282

Vendredi 16 février Ce soir, au milieu de paroles vides et baveuses, un homme politique dit, que les seules salles à manger à Paris, où mangeaient des hommes d’État de l’étranger, et dont les maîtres de maison avaient tiré une force et une puissance extraordinaires : c’étaient les salles à manger de Girardin et de Gambetta.

1215. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

Les protestants, qui ont quitté ses États, ont porté chez vous-même une industrie qui faisait la richesse de la France.

1216. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Villemain » pp. 1-41

XII Et si, moi, j’ai parlé de Fox avec cette insistance, c’est que de toutes les notices isolées que Villemain, à la vue courte et à la plume courte, prend pour de l’histoire, la sienne est la plus importante, la plus intéressante, — parce qu’après tout, Fox, qui ne fut point un homme d’État, est une des gloires incontestables de la tribune anglaise, quoique ce n’en soit pas non plus la plus grande gloire… Si ce que les rhéteurs comme l’était Villemain appellent l’art oratoire n’existe qu’appliqué à de grands sujets, on peut se demander ce qu’était Fox, l’homme le plus naturellement éloquent, quand dans toute sa vie d’orateur, sur les sujets qui l’inspirèrent, il n’a jamais vu juste et s’est toujours brillamment, mais déplorablement trompé… L’homme d’entrailles chez lui n’avait que des entrailles, et ce n’est pas avec cela qu’on mène les nations, Il est mort à temps, comme Mirabeau, pour l’honneur de sa renommée.

1217. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Seulement, il ne faut pas me presser, cela ne sert à rien… » Outre sa femme Gina, une bonne créature toute simple, et sa fille Edwige, une charmante enfant de quatorze ans, très douce, très tendre, d’un tour d’esprit rêveur et un peu bizarre, le photographe Hialmar a auprès de lui son père, le vieil Ekdal, ancien lieutenant, qui a eu un malheur : il a fait jadis de la prison pour avoir pratiqué frauduleusement des coupes dans les forêts de l’Etat. […] Mais l’effort que nous faisons pour absoudre cet ange équivoque parce qu’il nous plaît de l’absoudre, ce petit coup d’État du cœur sur l’esprit critique, a pour effet de rendre notre amour d’autant plus jaloux que la pureté de notre idole semblait plus douteuse, et d’autant plus ardent que cette pureté est en somme une création de notre volonté. […] Il reste ceci, qu’il n’est pas permis, à l’heure qu’il est, à un auteur dramatique de dire du mal de la Terreur, du Comité de Salut public, du tribunal révolutionnaire, et qu’on, offense je ne sais quelle religion d’Etat en protestant contre l’abus que Robespierre et ses complices firent, il y a cent ans, de la guillotine. […] Et si on le laisse, l’Etat a le devoir de sévir. » Et il a ajouté que la Révolution dure encore, que ce sont toujours les mêmes hommes qui sont en face des mêmes ennemis. […] Un grand savant, un grand ingénieur, un grand homme d’Etat me semblaient, dans le secret de mon âme, fort peu de chose.

1218. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Le vent souffla de la terre, chassant le vaisseau qui fuyait, en répandant des jets de flammes, entre les îles, au milieu de l’Océan, et ce fut là la digne fin du roi Hake. » Vous ne reconnaissez point là, n’est-il pas vrai, l’Angleterre moderne, avec sa légalité, ses libertés constitutionnelles, ses universités, son Église épiscopale, ses hommes d’État et ses poètes ? […] À le bien regarder, on s’aperçoit que c’est une espèce de cosmopolite, toujours comme Froissart, qui décrit les mœurs et les sentiments de cette société chevaleresque issue de la féodalité dont les trois centres étaient alors l’Angleterre normande, les États du duc de Bourgogne et la cour de France, et dont les divers membres unis par les mariages, les habitudes communes, les voyages et les plaisirs, avaient fini par former une franc-maçonnerie distincte des diverses nations que nous venons de nommer. […] C’était un esprit de vieille roche comme il ne s’en voit plus guère dans nos jours de lumières et de dilettantisme, pratique et poétique à la fois, conservateur et populaire, hargneux et cordial, plein de respect pour l’Église et l’État et d’affection pour les petits, qui lui permettaient mieux que les grands de vivre à sa guise. […] Et pendant tout ce temps il lui faut encore s’occuper des affaires courantes de ses États, convoquer ses conseils, édicter ses jugements.

1219. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Jean-Jacques Ampère »

Comment un écrivain qui n’avait cessé depuis le commencement de ce régime de remplir des fonctions au nom de l’État, soit comme suppléant à la Faculté, soit comme maître de conférences à l’École normale, qui était professeur en titre au Collège de France, qui avait eu du ministre de l’instruction publique une mission pour son voyage d’Égypte, comment un tel académicien se serait-il dérobé à la visite d’usage et de pure forme, la présentation au roi ? […] J’admire qu’Ampère, connaisseur de tout temps assez incertain en matière de beaux-arts, se trouve ainsi avoir aiguisé ses sens au point d’être subitement doué de seconde vue et de dépasser Lavater, et en général je ne saurais me faire à cette méthode qui me paraît bien hasardeuse et qu’il affectionne avant tout, de prétendre juger du caractère des hommes d’État par des portraits et des bustes plus ou moins ressemblants et quelquefois douteux ; mais, cela dit, ce voyage à travers l’histoire romaine qu’on refait avec Ampère est plein d’agrément et d’instruction ; la contradiction même y est profitable : on y remue, on y ravive, bon gré, mal gré, ses notions et ses jugements.

1220. (1927) André Gide pp. 8-126

Philoctète ou le Traité des trois morales est un drame philosophique, qui met en présence Ulysse, ou la raison d’Etat, Néoptolème, ou la pitié, Philoctète, ou la vertu esthétique et nietzschéenne, qui nous invite à nous dépasser nous-mêmes, sans souci d’utilité, sans considération du prochain, pour la beauté du fait et par amour de l’art, si l’on ose s’exprimer ainsi. […] Jean Giraudoux et Paul Morand, diplomates affectés à la propagande, d’abuser de leur situation pour favoriser exclusivement leur chapelle ou leur coterie aux frais de l’Etat.

1221. (1880) Goethe et Diderot « Diderot »

ni son séjour à la cour de Russie quand Catherine II, affolée de philosophes, malgré son bon sens d’homme d’État, l’y fit venir, le roulant, ce bourgeois dépaysé, dans les mêmes flatteries et les mêmes fourrures que Voltaire, qui, du moins, savait les porter. […] Le xviiie  siècle, en effet, fut essentiellement polémiste, et tous les travaux de ses écrivains furent marqués de ce caractère horriblement pratique : le bouleversement de l’État social tel qu’il avait été constitué jusqu’alors.

1222. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

Il s’est cru homme d’État, mais quoique poète. […] Quand l’émeute de 1848 se répandit dans la ville, Lamartine put dire : « Voilà mon histoire des Girondins qui passe. » Elle le mit à la tête de l’État. […] Il a été grand poète, grand orateur, homme d’Etat, romancier, historien, toujours en passant ; il a improvisé les Méditations, Jocelyn, ses Discours, les Girondins et la Révolution de 1848. […] Nous sommes bien loin de cette opinion du bon Malherbe que les poètes ne sont non plus utiles à l’État que les joueurs de quilles. […] Si nous sommes vulgaires, nous prenons comme traduction une de ces images usées qui traînent dans la langue, et nous disons « le char du progrès, le timon de l’État » ; si nous sommes distingués, nous inventons une figure nouvelle, et nous disons comme Montesquieu : « Le trésor public devient la ressource des particuliers.

1223. (1901) Figures et caractères

Pour solidifier toute cette vapeur humaine et l’animer de couleurs mouvantes, il fallut qu’on vît, pendant trente années, errer partout à la Cour ce petit homme hargneux et attentif, hautain en son importance, maniaque et probe, se faufilant à travers les vanités où la sienne se blessait par toutes ses pointes, écoutant les propos, étudiant les visages, à l’affût des intrigues, moins pour s’y mêler que pour les démêler, une oreille à toute porte, au courant des anecdotes d’alcôve comme des projets d’État, sachant tout et chacun, non point simple témoin, mais critique subtil, terrible aux personnes, dur aux faits, mécontent et content de l’être, raisonneur et perspicace, mêlé en coin à de grandes choses, s’usant tout entier à un seul souci, à une passion exclusive qui le répand et le concentre, fait de lui un courtisan assidu et un scribe secret, le courbe au travail de peindre le seul tableau qui lui semblât représenter un spectacle digne d’intérêt, la Cour. […]   Cette histoire de la Révolution, commencée à Paris en 1843, Michelet l’acheva en 1855, près de Nantes, où il s’était retiré après le coup d’État. […] L’œuvre ecclésiastique lui paraît mauvaise et dangereuse, dangereuse par son absorption de la volonté, dangereuse aux individus comme aux États. […] Ils y admirent un État solidement organisé, avec un grand sens de la liberté et de la dignité humaines. […] Pendant deux cents ans elle eut part, largement et activement, au service de l’État.

1224. (1896) Écrivains étrangers. Première série

Pendant quatre ans il voyagea, parcourant tour à tour tous les États et les pays voisins. […] Chacun de ses livres, en tout cas, est un paradoxe : depuis l’histoire d’Henri VIII où il exalte sans restriction ce Barbe-Bleue anglais, jusqu’à sa biographie de Disraeli, où il a hautement félicité cet homme d’État d’avoir été un fourbe, et d’avoir fait servir la politique à son intérêt personnel. […] Seul de tous les hommes d’État, lord Beaconsfield me paraît avoir compris ce qui se passait ; et c’est là ce qui m’intéresse à lui. » À mesure qu’il avançait dans son travail, d’ailleurs, la figure de Disraeli le séduisait davantage. […] Il lui a semblé en effet que la guerre, et l’entretien des armées, qui en est la conséquence, comptaient parmi les sources principales du malheur des hommes : et il s’est dit qu’en prenant personnellement l’initiative de ce congrès de la paix, il aurait chance d’entraîner l’adhésion des autres États. […] Elle a aimé autrefois un prince qui l’aimait ; et c’est contre son gré, pour obéir à la raison d’État, qu’elle est devenue la femme d’Ottomar.

1225. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. » pp. 124-157

Langlais, représentant de la Sarthe, qui fut ensuite conseiller d’État, et qui est mort chargé d’une mission près de l’empereur Maximilien au Mexique.

1226. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

Joignez à cela un double sens perpétuel, l’auteur caché derrière ses personnages, la vérité mise dans la bouche d’un grotesque, des malices enveloppées dans des naïvetés, le maître dupé, mais sauvé du ridicule par ses belles façons, le valet révolté, mais préservé de l’aigreur par sa gaieté, et vous comprendrez comment Beaumarchais a pu jouer l’ancien régime devant les chefs de l’ancien régime, mettre sur la scène la satire politique et sociale, attacher publiquement sous chaque abus un mot qui devient proverbe et qui fait pétard491, ramasser en quelques traits toute la polémique des philosophes contre les prisons d’État, contre la censure des écrits, contre la vénalité des charges, contre les privilèges de naissance, contre l’arbitraire des ministres, contre l’incapacité des gens en place, bien mieux, résumer en un seul personnage toutes les réclamations publiques, donner le premier rôle à un plébéien, bâtard, bohème et valet, qui, à force de dextérité, de courage et de bonne humeur, se soutient, surnage, remonte le courant, file en avant sur sa petite barque, esquive le choc des gros vaisseaux, et devance même celui de son maître en lançant à chaque coup de rames une pluie de bons mots sur tous ses rivaux  Après tout, en France du moins, l’esprit est la première puissance.

1227. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre II. Les bêtes »

D’ailleurs il a le front vaste du monarque qui porte tout l’Etat dans sa tête, et sa crinière l’élargit encore.

1228. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIe entretien. Vie du Tasse (1re partie) » pp. 5-63

Heureusement pour lui, le duc d’Urbin, qui estimait son caractère et son talent, apprit par hasard son passage à travers ses États ; il l’arrêta à Pesaro et lui donna l’hospitalité dans une maison de campagne située sur les collines qui entourent la ville, où les prairies, les bois, les eaux et la vue de la mer Adriatique, formaient un horizon inspirateur pour le poète fatigué des vicissitudes du sort.

1229. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXVe entretien. La Science ou Le Cosmos, par M. de Humboldt (4e partie) » pp. 429-500

Pichot, qui a traduit Shakespeare avec un homme d’État de nos jours, est digne de nous traduire Humboldt.

1230. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXIXe entretien. Fior d’Aliza (suite) » pp. 129-192

Hyeronimo me dit à son aise que le moine ne m’avait pas blâmée de ma ruse, qu’il ne la trahirait pas jusqu’après sa mort ; qu’il avait un faible espoir d’obtenir, non sa liberté, mais sa vie de monseigneur le duc, si ce prince, qui était à Vienne en Autriche, revenait à Lucques avant le jour marqué dans le jugement pour l’exécution ; mais que si, malheureusement, retardait son retour dans ses États, personne autre que le souverain ne possédait le droit de grâce, et qu’il n’y avait qu’à accepter la mort de Dieu, comme il en avait accepté la vie ; que, dans cette éventualité terrible, le père Hilario le confesserait au dernier moment, lui donnerait le sacrement et ne le quitterait pas même sur l’échafaud, jusqu’à ce qu’il l’eût remis pardonné, sanctifié et sans tache entre les mains de Dieu.

1231. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Bien que très-sensible à l’harmonie des vers, cette généreuse déclamation de M. de Fontanes ne m’émut pas, le poëte ressemblait trop à un homme d’État.

1232. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

On n’applaudit plus s’il crie « l’État, c’est moi ! 

1233. (1890) L’avenir de la science « XXIII »

Ces religions ne sont, au fond, que l’État, la famille, l’art, la morale, élevés à une haute et poétique expression.

1234. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VIII, les Perses d’Eschyle. »

Le souci de l’État assombrit encore l’angoisse des Fidèles, la politique élève sa voix grave par-dessus leur chant pathétique.

1235. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE IX »

On peut discuter et contester en tous sens ce coup d’État tragique de l’honneur offensé.

1236. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1878 » pp. 4-51

… J’étais auprès de lui, lors de l’envahissement de l’État romain.

1237. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre V : Règles relatives à l’explication des faits sociaux »

C’est ce qui arrive aux hommes d’État et, plus généralement, aux hommes de génie.

1238. (1913) Les livres du Temps. Première série pp. -406

Il était dominé par la vieille conception monarchique de la raison d’État. […] En fait, rien n’eût empêché Chateaubriand de se contenter d’écrire : il aurait très bien pu n’avoir point la fantaisie d’être un homme d’État. […] Dans le Révélateur du globe, plaidoyer pour la béatification de Christophe Colomb, il qualifie la critique historique de « pythonisse sans trépied qui accommode ses oracles au goût du jour » : il condamne « le Document, ce monstre aux mille langues nourri dans la poussière des archives de l’État et des chancelleries », et préconise dès 1884, bien avant M.  […] Le pape, l’empereur, le roi de France, la République de Venise et les nombreux petits États italiens se battent et se réconcilient, forment des ligues en sens divers, renversent continuellement leurs alliances, s’agitent comme dans une fourmilière et déconcertent l’attention de l’observateur. […] Mais enfin il accomplit le coup d’État contre le cœur, contre les puissances de faiblesse et de vassalité.

1239. (1848) Études critiques (1844-1848) pp. 8-146

Hambourg, assure le poète, n’a jamais été en tant que république un État aussi considérable que Venise ou que Florence ; cependant Hambourg a sur ces glorieuses villes un avantage, c’est de posséder de meilleures huîtres. […] Je ne me permettrai pas de m’immiscer dans cette querelle délicate ; n’ayant pas l’honneur d’être critique, je n’ai pas à décider si l’État de ces Messieurs est républicain ou monarchique ; tout ce que je puis dire, c’est que le sceptre de M. 

1240. (1886) Le naturalisme

Homme d’existence active, de fortunes diverses, peintre, militaire, employé, commerçant, auditeur au Conseil d’État, diplomate, il dut, peut-être, à la diversité même de ses professions, l’acuité d’observation et la connaissance de la vie qui distinguent les voyageurs littéraires comme Cervantès et Lesage, investigateurs curieux qui préfèrent aux livres poudreux des bibliothèques la grande Bible de la société. […] Là-bas, on parle de maux qui, ici, grâce à Dieu, ne nous affligent pas encore, et le cens des habitants y fournit des chiffres et y indique une décroissance de population qui doit suggérer de profondes réflexions aux hommes d’État de la nation voisine. […] On ne considère pas le roman comme un simple passe-temps, comme un simple plaisir esthétique, c’est une institution, le cinquième pouvoir de l’État, et comme l’a dit en public le romancier Trollope, les romans sont les sermons de l’époque actuelle.

1241. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

. — Un peu plus loin, M. le duc de Saint-Simon, complétant le dénombrement des hommes considérables du siècle de Louis XIV, ajoute que rien ne manquait à ce beau siècle : « Pas même cette espèce d’hommes qui ne sont bons que pour le plaisir. » Il voulait parler des poètes et des artistes en tout genre ; il aurait eu honte de les confondre avec les hommes de robe, avec les hommes d’épée, avec les hommes d’État, et surtout avec les grands seigneurs, qu’il considérait comme l’ornement le plus précieux de la cour de Versailles ! […] Mais au plus bel instant du xviie  siècle, quand l’autorité était partout, comme le devoir, un comédien du roi Louis XIV s’attaquer ainsi, et tout d’un coup, au pouvoir le plus respecté de l’État, le traîner sur son théâtre, l’immoler à la risée publique, le charger, non seulement de sarcasmes, mais encore d’humiliations, de haine et d’outrages…, avouez que l’entreprise était étrange, inouïe, incroyable, et qu’il fallait bien du génie et bien du courage pour la tenter. […] Cette parole jetée à son valet par un homme en fureur, à ce moment de l’histoire de France, est plus dramatique, selon moi, que le coup de canon dans le Vendôme de Voltaire. — Alors arrive l’avocat, on est allé le chercher au hasard, comme on les cherchait tous alors, pour en faire des hommes d’État, des orateurs, des déclamateurs, des furieux, des représentants, des puissances6 !

1242. (1888) Études sur le XIXe siècle

Et l’opinion publique aurait raison, car Garibaldi a rendu à l’Italie les plus grands services qu’un homme pût lui rendre, il a donné aux Italiens confiance en eux-mêmes ; il a prouvé à l’Europe que les Italiens savaient se battre et mourir sur le champ de bataille pour reconquérir une patrie. » Et le mouvement s’étendait, Garibaldi passait le détroit de Messine, faisait à Naples une véritable entrée triomphale, gagnait la bataille du Volturne, et ses proclamations et ses menaces d’attaquer les Français dans les États du pape inquiétaient de nouveau le gouvernement. […] La jeunesse de Cavour58 Le sixième et dernier volume de l’énorme Correspondance de Cavour vient enfin de paraître, complétant la riche collection des documents publiés ces dernières années sur l’illustre homme d’État. […] Le comte de Sellon avait épousé toutes les idées généreuses, et les défendait en philanthrope ; son jeune neveu lui répondait en homme d’État qui s’occupe moins d’un principe que de l’opportunité de sa mise en pratique. […] Au fond, les conditions religieuses de la société moderne l’occupent plus que la religion même, et il devait finir par s’inquiéter assez peu des dogmes et beaucoup des rapports entre l’Église et l’État.

1243. (1862) Notices des œuvres de Shakespeare

C’est un de ces caractères éminemment poétiques qui plaisent à notre imagination qu’ils élèvent, un de ces personnages dans le genre de l’Achille d’Homère qui font le sort d’un État, et semblent mener avec eux la fortune et la gloire ; une de ces âmes nobles et ardentes qui ne peuvent pardonner à l’injustice, parce qu’elles ne la conçoivent pas, et qui se plaisent à punir les ingrats et les méchants, comme on aime à écraser les bêtes rampantes et venimeuses. […] Parvenu à une grande vieillesse, et l’âge ayant affaibli sa raison, Leir voulut s’enquérir de l’affection de ses filles, dans l’intention de laisser son royaume à celle qui mériterait le mieux la sienne. « Sur quoi il demanda d’abord à Gonerille, l’aînée, comment bien elle l’aimait ; laquelle appelant ses dieux en témoignage, protesta qu’elle l’aimait plus que sa propre vie, qui, par droit et raison, lui devait être très-chère ; de laquelle réponse le père, étant bien satisfait, se tourna à la seconde, et s’informa d’elle combien elle l’aimait ; laquelle répondit (confirmant ses dires avec de grands serments) qu’elle l’aimait plus que la langue ne pouvait l’exprimer, et bien loin au-dessus de toutes les autres créatures du monde. » Lorsqu’il fit la même question à Cordélia, celle-ci répondit : « Connaissant le grand amour et les soins paternels que vous avez toujours portés en mon endroit (pour laquelle raison je ne puis vous répondre autrement que je ne pense et que ma conscience me conduit), je proteste par-devant vous que je vous ai toujours aimé et continuerai, tant que je vivrai, à vous aimer comme mon père par nature ; et si vous voulez mieux connaître l’amour que je vous porte, assurez-vous qu’autant vous avez en vous, autant vous méritez, autant je vous aime, et pas davantage. » Le père, mécontent de cette réponse, maria ses deux filles aînées, l’une à Henninus, duc de Cornouailles, et l’autre à Magtanus, duc d’Albanie, les faisant héritières de ses États, après sa mort, et leur en remettant dès lors la moitié entre les mains. […] Mais il arriva qu’Aganippus, un des douze rois qui gouvernaient alors la Gaule, ayant entendu parler de la beauté et du mérite de cette princesse, la demanda en mariage ; à quoi l’on répondit qu’elle était sans dot, tout ayant été assuré à ses deux sœurs ; Aganippus insista, obtint Cordélia et l’emmena dans ses États. Cependant les deux gendres de Leir, commençant à trouver qu’il régnait trop longtemps, s’emparèrent à main armée de ce qu’il s’était réservé, lui assignant seulement un revenu pour vivre et soutenir son rang ; ce revenu fut encore graduellement diminué, et ce qui causa à Leir le plus de douleur, cela se fit avec une extrême dureté de la part de ses filles, qui semblaient penser que tout « ce qu’avait leur père était de trop, si petit que cela fût jamais ; si bien qu’allant de l’une à l’autre, Leir arriva à cette misère qu’elles lui accordaient à peine un serviteur pour être à ses ordres. » Le vieux roi, désespéré, s’enfuit du pays et se réfugia dans la Gaule, où Cordélia et son mari le reçurent avec de grands honneurs ; ils levèrent une armée et équipèrent une flotte pour le reconduire dans ses États, dont il promit la succession à Cordélia, qui accompagnait son père et son mari dans cette expédition.

1244. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre troisième »

La reine, invitée par ses Etats à choisir un époux entre trois seigneurs de sa cour, le fait juge du plus digne.

1245. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1876 » pp. 252-303

Mardi 29 février En parlant du papier usé, effiloqué, qui est toute la monnaie de certains pays de l’Europe, de l’Italie surtout, Saint-Victor dit assez joliment que ce papier lui apparaît, comme la charpie d’un État blessé.

1246. (1856) La critique et les critiques en France au XIXe siècle pp. 1-54

Tout citoyen était un législateur, tout homme qui pouvait parler était un ministre d’État.

1247. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « H. Forneron » pp. 149-199

Son fils Henri, dont Forneron, souvent très artiste (voir son portrait d’Élisabeth et surtout sa mort de Marie Stuart), écrit qu’il avait le charme et la témérité de Borgia, — un Borgia blond, « plus Italien que Lorrain, malgré ses cheveux d’or, plus paladin que général, plus conspirateur qu’homme d’État, et qui mourut d’une conspiration », — eut, par un hasard inouï de guerre, le bonheur de prendre à son père, par une blessure reçue à la même place, son fier surnom de Balafré.

1248. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Proudhon » pp. 29-79

Essentiellement, la femme est, depuis la chute d’Ève, plus spirituelle qu’Adam, disent les Américaines, roulé par elle si joliment (en langue américaine), — preuve que les femmes sont nées pour l’empire et doivent nous rouler ; depuis la chute d’Ève, la femme a passé à l’État de révolte, et c’est même pour cela que les Sociétés anciennes furent si dures pour elle, et que l’Asie, encore tout à l’heure, continue cette dureté.

1249. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Victor Hugo »

Et ce n’est pas seulement un héros dans le sens le plus fier et le plus idéal du mot, mais c’est de plus l’homme d’État qui voit le mieux dans les nécessités du temps, et qui a raison — absolument raison !

1250. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

Ensuite j’en enverrais des exemplaires aux ministres d’État sur la protection et la prudence de qui je puis compter, à madame la marquise de Pompadour et à quelques amis discrets qui pensent comme vous et moi ; j’accompagnerais l’envoi d’une lettre circulaire par laquelle je les supplierais de ne laisser lire l’ouvrage qu’à des personnes sages… Le reste demeurerait enfermé sous clef en attendant le moment favorable de le rendre public… » On le voit, de là au dévouement intrépide qui brave tout pour secourir des innocents, il y a loin. […] On conçoit aisément qu’un esprit supérieur, habitué à ne se contenter ni des vulgarités ni des surfaces, épris de ce travail attrayant et difficile qui consiste à extraire d’une masse de faits une essence d’idées, se soit passionné pour cette analyse et l’ait poursuivie, pendant vingt années, avec une patience infatigable, dans les cahiers des États, dans les archives des administrations publiques, dans les Mémoires inédits des intendances de province, dans les pièces originales, partout où il retrouvait ces mille fils plus ou moins visibles qui lient la Révolution à l’ancien régime. […] Tandis que, dans les pays d’États, elle était sans cesse en contact et en communauté d’intérêts et d’affaires avec la classe supérieure et la classe populaire, elle ne possédait plus ailleurs d’autre usage de ses lumières, d’autre avantage de sa position ou d’autre satisfaction de vanité, que la faculté d’obtenir des places : ces places, qui se multipliaient à l’infini et qu’elle demandait à l’administration centrale, faisaient d’elle un nouveau rouage de cette machine, et achevaient de la séparer de son centre véritable d’action et d’influence. […] L’orgueil, cet hérétique en permanence, secondant ces dispositions naturelles d’intelligences surexcitées, l’hérésie se respirait dans l’air, gagnant de proche en proche ses volontaires ou ses dupes, impalpable et insaisissable comme ces vapeurs dont on absorbe à son insu les délétères influences ; et ses déguisements habiles, ses rétractations décevantes, ses alternatives de soumission factice et de révolte aggravée, transformaient à la longue l’erreur ou le sophisme d’un cerveau vaniteux en guerre théologique ou en affaire d’État. […] Les hommes d’un esprit éminent, La Rochefoucauld et de Retz, par exemple, qui prirent part à la Fronde ou à ses préludes, manquèrent sciemment de patriotisme et de sagesse : ils sacrifiaient l’intérêt de l’État à leur intérêt personnel ; le sentiment, chez les hommes, est toujours regardé comme trop secondaire pour servir d’apologie à leurs fautes : on les accuserait plutôt d’en avoir fait un moyen de plus, un échelon de pouvoir et de fortune.

1251. (1915) Les idées et les hommes. Deuxième série pp. -341

Un homme, parmi les grands aînés de cette jeunesse malheureuse, a compris ce terrible désarroi, un homme d’État dont il est possible qu’on veuille critiquer la politique (je ne sais), mais à qui n’échappait nulle contagion de mélancolie et de désir, Chateaubriand. […] Mais, chez Musset, il y a des lésions internes, quelque chose de cassé, il ne remontera plus. » À l’époque du romantisme, on a dessiné de ces caricatures où le char de l’État, le chariot de Thespis, diverses calèches et guimbardes portent triomphalement et, parfois, laissent dégringoler leur charge illustre… Un beau vers : et M. 

1252. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Mais, à défaut des secrets de leur cœur, nous connaissons au moins les principes que nos libertins affichaient, et en voici quelques-uns : « Les beaux esprits, disaient-ils, ne croient point en Dieu que par bienséance, et par maxime d’État. » Ils disaient encore : « Toutes choses sont conduites et gouvernées par le Destin, lequel est irrévocable, infaillible, nécessaire et inévitable à tous les hommes, quoi qu’ils puissent faire. » Et ils disaient enfin : « Il n’y a point d’autre divinité ni puissance souveraine au monde que la Nature, laquelle il faut contenter en toutes choses, sans rien refuser à notre corps ou à nos sens de ce qu’ils désirent de nous en l’exercice de leurs puissances ou facultés naturelles. » Qu’on les désigne donc eux-mêmes du nom que l’on voudra, si c’est autour de ces principes que se sont groupés les « libertins » du xviiie  siècle, leurs doctrines, nous pouvons le dire, étaient déjà celles de nos modernes déterministes, naturalistes, ou matérialistes. […] Ce qui est du moins certain, c’est que, de tout temps, avant d’être une règle de conduite intérieure pour lui, la religion a été pour Louis XIV une affaire d’État. […] Vrais ou faux, les « dévots » lui étaient suspects de vouloir lui imposer une autre volonté que la sienne, peut-être même, comme les protestants jadis, de prétendre former un parti, un État dans l’État. […] Mais ce style haché et heurté, sentencieux et épigrammatique, qui procède par addition successive de traits également forts, ces antithèses qui expliquent les lois des choses en fixant le sens des mois, ces remarques de grammairien, qui sont en même temps les observations d’un moraliste et d’un homme d’État, une certaine fierté stoïque — je ne sais si je ne devrais dire une certaine tristesse, — qui recouvre et enveloppe tout le reste, voilà ce qui était sans modèles dans a langue française et dont nous n’avons revu depuis lors que de faibles imitations. […] Dans une monarchie, s’il ne dépend que de nous de pratiquer les vertus républicaines, quelles sont en effet ces connexions que l’on veut établir, et à quoi bon tant d’esprit pour démontrer que tout doit nécessairement différer dans l’État, selon que la puissance publique est aux mains de plusieurs ou d’un seul ?

1253. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

La vertu des femmes est une vertu d’État. […] Maréchal, employé de l’État. […] Enfermé à la Tour de Londres, cet homme d’État s’occupait à écrire la seconde partie de son Histoire du monde. […] C’est enfin une pièce politique, une étude sociale qui laisse bien loin, pour la justesse, l’étendue et la profondeur des vues, ces tragédies d’État dont on faisait grand cas dans notre xviie  siècle français. […] Il est aussi persuadé qu’aucun de nos hommes d’État

1254. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre II. Le théâtre. » pp. 2-96

Nul souci de la vraisemblance : « Vous avez l’Afrique d’un côté, dit sir Philip Sidney, et l’Asie de l’autre, avec une si grande quantité d’États secondaires, que l’acteur, quand il entre, est toujours obligé de vous dire d’abord où il est ; autrement on n’entendrait rien à son histoire. […] Dans un État qui ressemble à une armée, il faut que les châtiments, comme dans une armée, soient terribles, et, pour les aggraver, la hideuse guerre des deux Roses qui, à chaque incertitude de la succession, peut reparaître, est encore présente dans tous les souvenirs.

1255. (1933) De mon temps…

Élémir Bourges Léon Amé, ancien directeur général des Douanes, conseiller d’Etat, était un beau vieillard de haute prestance qui en imposait fort à ma jeunesse. […] Chassé de ses Etats, Charles d’Esté, duc souverain de Blankenbourg, emmenait avec lui, en exil, ses bouffons et ses conseillers, sa maîtresse et ses trésors et promenait à travers le monde ses extravagances et ses somptuosités.

1256. (1835) Critique littéraire pp. 3-118

D’autres fois, au déclin des États, quand la liberté est morte, quand les religions croulent, quand les peuples dégénérés tremblent au bruit d’invasions redoutables et prochaines, alors le sensualisme a des temples ; une sorte d’ivresse y précipite les générations qui vont périr ; alors, comme l’a dit un écrivain spirituel, les peuples dansent éperdus sur le cratère des volcans. […] J’ai manqué d’être la lumière du monde, ou la sagesse de l’État, ou l’ornement du pays ; mais heureusement que j’en ai été quitte pour la peur.

1257. (1853) Portraits littéraires. Tome I (3e éd.) pp. 1-363

Or il n’y a pas une page dans les Orientales qui émeuve ou qui instruise, pas une page qui témoigne que l’auteur ait senti ou pensé, qu’il ait vécu de la vie commune, qu’il fasse partie d’une famille, d’un État, qu’il soit capable de joie ou de tristesse, qu’il ait pleuré sur l’isolement ou l’abandon, ou qu’il connaisse le bonheur des intimes épanchements. […] Hugo ne comprend pas l’État mieux que la famille. […] Quand il aura vécu de la vie commune, quand il se sera mêlé aux mouvements qui entraînent la société, aux luttes qui divisent les familles et les États, il reparaîtra dans la poésie lyrique, dans le roman, dans le drame, avec des forces nouvelles, et nous ne serons plus obligé de le gourmander sur sa puérilité.

1258. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

Cucheval veut prouver que sa propre vie de Cucheval-Clarigny ne l’intéresse pas ; qu’il ne se soucie pas d’écrire au Constitutionnel, de boire, de manger, de dormir, de faire des enfants ; qu’il se moque de désirer ou porter la croix, d’aspirer au conseil d’État, d’être mari heureux ou malheureux, de dire de bonnes plaisanteries avec ses amis, de détester ses confrères du journal, et qu’il ne lirait pas l’histoire d’un autre Cucheval. […] Les encouragements de l’État n’en seraient pas moins efficaces, le Musée du Luxembourg pourrait toujours s’approvisionner comme auparavant, et les commandes pour les églises et les monuments publics avoir cours ; l’État pourrait se décharger des frais inutiles que lui occasionnent les Écoles des Beaux-Arts et de Rome, qui lui coûtent peut être 4ou 500 000 fr. pour produire unpeintre par an, si ce sont là des peintres.

1259. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIe entretien. Le Lépreux de la cité d’Aoste, par M. Xavier de Maistre » pp. 5-79

Il ne visait point à la gloire : il laissait la prophétie à son frère, la politique aux hommes d’État.

1260. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre VI. Bossuet et Bourdaloue »

Bossuet crut devoir expliquer plus amplement la matière, et composer l’instruction sur les États d’oraison, dont le manuscrit fut communiqué à Fénelon.

1261. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre III. La poésie romantique »

Il fut poète, comme plus tard orateur et homme d’État, par inspiration, par besoin du cœur : ce fut une fonction de sa vie morale, d’ennoblir par le vers ses émotions intimes ; jamais il ne voulut en faire un exercice professionnel, jamais même un pur jeu d’artiste.

1262. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Ce sont toutes les vérités sans lesquelles un Etat chrétien ne peut subsister, le devoir de l’aumône, l’ignominie attachée à la simonie, l’union de la spéculation et de la pratique dans les choses de la morale, l’horreur de la calomnie, le respect de la vie humaine.

1263. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre cinquième. De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. »

dans le même temps que l’ordre et l’administration s’introduisaient dans l’Etat.

1264. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Introduction »

Bailey, l’être intelligent, comme un monarque constitutionnel, gouverne régulièrement par le moyen de ses ministres : l’Entendement étant le Secrétaire d’État au Département de l’intérieur, la Faculté de Juger étant le Chief Justice of the Commonpleas, et la Raison le First Lord of the Treasury (ou premier ministre). » Est-il possible d’éviter toujours ces expressions ?

1265. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

, notre premier roman qui paraissait le jour du coup d’État, et dont les affiches étaient interdites, comme pouvant être prises par le public pour une allusion au 18 brumaire.

1266. (1914) Boulevard et coulisses

Les artistes qui méprisent le Conservatoire et les subventions de l’État ont peut-être raison artistiquement, ?

1267. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre V. Des orateurs anciens et Modernes. » pp. 223-293

Il n’est pas question d’examiner si cet objet est rempli & s’il est vrai que ces Compagnies fassent perdre des hommes à l’Etat sans en acquérir aux Lettres, comme le dit M. d’Alembert.

1268. (1855) Préface des Chants modernes pp. 1-39

Un jour, dans quelque cent ans d’ici, un poëte sera peut-être appelé à gouverner un grand État.

1269. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

Il s’arrête, en remettant, dit-il, un plus ample examen à un temps où les questions les plus innocentes ne seront pas traitées comme des affaires d’État : mais il semble que c’était plutôt à Mme de Staël de se plaindre qu’on traduisît ses doctrines philosophiques en opinions factieuses. […] , devant qui plus tard elle repoussait avec horreur le soupçon d’avoir participé à ces violences, lui aurait dit : « Je sais, madame, que vous ne vous êtes pas mêlée des détails du voyage, mais vous avez donné le signal du départ. » Enfin M. de Talleyrand, qui avait pris part à ce coup d’État comme ministre, aurait dit, par une de ces courtes formules à lui familières : « Mme de Staël a fait le 18, mais non pas le 19. » 43.

1270. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre VI. Milton. » pp. 411-519

Rien de semblable chez lui aux habiletés, ni aux atermoiements de l’homme d’État, calculateur avisé, qui s’arrête à mi-chemin, qui tâtonne, les yeux appliqués sur les événements, qui mesure le possible et use de la logique pour la pratique. […] Pour faire écouter de telles tirades, il doit donner de gros traitements à ses conseillers d’État.

1271. (1842) Discours sur l’esprit positif

La tendance correspondante des hommes d’État à empêcher aujourd’hui, autant que possible, tout grand mouvement politique, se trouve d’ailleurs spontanément conforme aux exigences fondamentales d’une situation qui ne comportera réellement que des institutions provisoires, tant qu’une vraie philosophie générale n’aura pas suffisamment rallié les intelligences. […] Or, il n’est plus à craindre que désormais les hommes d’État s’écartent gravement, à cet égard, de l’impartiale modération de plus en plus inhérente à leur propre indifférence spéculative : l’école positive a même lieu de compter, sous ce rapport, sur la bienveillance habituelle des plus intelligents d’entre eux, non seulement en France, mais aussi dans tout notre Occident.

1272. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

Et Port-Royal, accablé par l’Église et l’État, donne, si l’on veut, à l’âme française séculaire, ce point central de religion que fait pour un temps, et pour un groupe de paysans lorrains, la colline foudroyée des Baillard. […] Autant Spencer paraît un mécaniste pur, mécaniste de la pensée et de la matière, sorte d’ingénieur philosophique et moral, portant de la nébuleuse primitive à l’État et à l’individu de demain un point de vue, une méthode, des manies d’ingénieur civil (les polytechniciens venus à la philosophie et à la littérature sont peut-être en France ses analogues les plus ressemblants), — autant Eliot paraît douée uniquement et exclusivement du génie de sentir et de créer la vie : l’un et l’autre se connaissaient, se fréquentaient, s’estimaient beaucoup, et la nature de Spencer était pour Eliot un sujet d’étonnements et d’épigrammes sans fiel qu’elle ne lui ménageait pas. […] Famille, Église, État, ce problème du conformisme est au fond le problème qui se pose à chaque conscience anglaise et qu’elle résout fréquemment par des partis pris énergiques et totaux. […] Cette illusion c’est, d’une façon générale, celle de la facilité, cette facilité que Lamartine appelait la grâce du génie et qui en paraît la tentation et le danger : danger de l’art, danger de l’État, danger de la vie intérieure.

1273. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

Pasquier sans l’opposer à la morgue pédante de certains hommes d’État parvenus du jour.

1274. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier »

Il s’agissait d’un complot contre la sûreté de l’État.

1275. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

Là quatre États divers arrêtent ma pensée : Je vois de ma terrasse, à l’équerre tracée, L’indigent Savoyard, utile en ses travaux, Qui vient couper mes blés pour payer ses impôts, Et du bord de mon lac à tes rives du Tibre Je te dis, mais tout bas : Heureux un peuple libre !

1276. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque (1re partie) » pp. 145-224

» Euthyphron lui fait cette réponse vulgaire et sacerdotale : « Le bien, ou le saint, est ce qui est agréable aux dieux. » Socrate relève cette réponse, et demande à Euthyphron comment, les dieux de l’Olympe et de l’État étant multiples, et souvent opposés de nature et de volonté les uns aux autres, ce qui est agréable à l’un, désagréable à l’autre, peut être agréable à tous.

1277. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIe entretien. Balzac et ses œuvres (2e partie) » pp. 353-431

Puis, la rente sur l’État étant à 90 alors, il place un million sur la rente, revenu net sans impôts, et le confie le matin à son fondé de pouvoirs.

1278. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juin 1885. »

C’est la démocratie envahissant l’Art, après l’Etat ; la pure Raison perd son pouvoir, devant ce flot montant des images et des sensations ; à peine, par instants, de l’intime émotion, de la spéculation contemplative, un reflet : tout se traduit en figures, en couleurs, en sonorités.

1279. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIIe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset » pp. 409-488

Mais un badinage épistolaire un peu trop hardi contre le cardinal, à propos de la paix des Pyrénées, fut envenimé aux yeux du roi par Colbert, infiniment moins spirituel et par conséquent infiniment moins tolérant que le cardinal italien ; ce badinage fut travesti en crime d’État.

1280. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre I : Variations des espèces à l’état domestique »

. ; mais qu’en revanche chacun de ces États possède plusieurs races particulières de Bœufs, de Moutons, etc., il nous faut admettre que de nombreuses races domestiques se sont produites en Europe ; car, d’où pourrions-nous les croire descendues, puisque les diverses contrées qu’elle renferme ne possèdent pas un nombre égal d’espèces sauvages particulières qu’on puisse considérer comme leurs types originels ?

1281. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — I. Faculté des arts. Premier cours d’études. » pp. 453-488

Cicéron, orateur, politique ou homme d’État et philosophe, qu’il suffit de nommer.

1282. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

« Il a quarante vaisseaux à lui sur les mers ; il fait combattre sa marine avec les vaisseaux de l’État à la bataille de la Grenade ; il fait décorer ses officiers, discute avec le roi les frais de la guerre et traite de puissance à puissance avec le congrès des États-Unis2. » À quelque temps de là, le voilà réduit au dernier degré de la misère et, après avoir possédé 150, 000 livres de rente, il est devenu économe au point de ménager une allumette pour la faire servir deux fois. […] Au monologue de Figaro, « dans lequel, écrit Mme Campan, l’auteur attaque diverses parties d’administration, mais particulièrement à la tirade des prisons d’État », le roi se leva avec vivacité : « C’est détestable ! […] Dans les écrits spécialement consacrés par lui à la défense ou à l’exposition de la foi, il était facile de découvrir sous le chrétien, à première vue et, pour ainsi dire, à fleur de croyance, l’homme d’État, le leader influent et dominateur des conseils de l’Église réformée, tellement qu’on a osé prétendre qu’au fond la religion n’était pour lui qu’une grande mesure d’ordre public et d’utilité sociale. […] Toute faute porte son expiation plus ou moins longue ; mais le lendemain d’un coup d’État ou d’une révolution tentée et manquée, on ne peut pas (c’est antilogique, antihumain), on ne peut pas se retrouver dans les conditions de la veille. » Lamartine posa sa candidature comme député, échoua d’abord, mais ne fut pas sans recueillir les fruits de son activité politique.

1283. (1864) Corneille, Shakespeare et Goethe : étude sur l’influence anglo-germanique en France au XIXe siècle pp. -311

L’ordre, la discipline, l’autorité, tel était en effet le génie de la France à l’époque où son souverain osait dire « l’État c’est moi ». — Parole imprudente !

1284. (1895) Le mal d’écrire et le roman contemporain

Du jour où l’Etat a imposé à chacun le devoir d’être un homme instruit, on a songé à mettre cette instruction à profit ; on a cherché à l’augmenter pour mieux s’en servir ; on ne l’a ambitionnée que pour l’exploiter ; on a appliqué à des besoins sociaux ce qui n’était qu’un besoin de l’esprit et, au lieu d’en jouir, on a voulu vivre. […] Les uns ont demandé à l’Etat une position rémunératrice comme récompense de la nouvelle obligation qu’il leur imposait. L’augmentation du savoir élevant les prétentions sociales, n’était-il pas juste que l’Etat fournît une place à ceux qu’il déclassait et consacrât par cette sanction l’effort qu’il exigeait d’eux ? […] La majorité des Français n’a qu’un rêve : être nourri par l’État, c’est-à-dire par l’argent public. […] L’Etat promettait le repos, la moralité, la sécurité par l’instruction, et dans chaque ville des milliers de femmes se trouvent sans espoir, à la merci de la lutte, incertaines de vivre, tentées par la galanterie, exclusive ressource d’une époque qui marche à la prostitution universelle, comme l’a osé dire M. 

1285. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Comme l’État belge est peu considérable, ces divergences ne nuisent pas à son unité, et elles lui assurent l’immense bénéfice de cités qui se complètent, qui s’entraident, pleines d’émulation, de groupes associés auxquels aucun ne commande et qui tous travaillent pour tous. […] Et lorsque, en 1830, ce pays conquiert enfin la vie paisible, il reste nécessairement, assez longtemps, un État fragile comme tous les États jeunes ; il doit consolider ses institutions, affermir son influence, surveiller avec une sollicitude minutieuse le jeu d’un organisme encore délicat.

1286. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

Ce sera au prix du sacrifice de toute leur organisation, propriété, tribunaux, État, armée ; mais ces institutions que nous avons fondées par la force n’ont d’autre effet que de maintenir parmi nous l’ordre de guerre, auquel, pour nous mettre d’accord avec le christianisme, nous devons substituer l’ordre de paix. […] En même temps, l’État, ruiné par le succès prolongé des partis extrêmes, retrouvait, grâce aux excès mêmes de ces partis, son équilibre menacé. L’Église et l’État, les deux forces conservatrices par excellence, s’étaient méconnues et combattues pendant la crise : à mesure qu’elles se raffermissent, elles se réconcilient, et voici qu’en ce moment même elles tentent de s’emparer des éléments qui leur avaient été le plus nuisibles. On ne peut encore rien préjuger des tentatives de socialisme d’État et de socialisme religieux qui se poursuivent dans tous les pays de l’Europe, quels que soient leur régime ou leur étendue ; on ne peut savoir si ces tentatives réussiront à établir une paix durable entre les diverses forces qui s’entrecombattent dans le cœur même de l’organisme social ; ou si, au contraire, elles avorteront et hâteront peut-être la conflagration sociale dont le danger est toujours imminent : mais, en tout cas, ces tentatives auxquelles se consacrent avec ardeur un jeune empereur et un pontife octogénaire, ces tentatives qui rallient les hommes de bonne volonté de toutes les confessions et de toutes les opinions, ces tentatives montrent avec éclat que les éléments défenseurs de l’ordre social établi ont vu le péril, l’ont compris, et se recueillent pour le combattre en faisant une part aux réclamations qui l’aggravaient et le justifiaient.

1287. (1905) Promenades philosophiques. Première série

Cet effet est fort visible dans les différents Etats, mais surtout en France, lors des grandes crises politiques ou morales. […] Satisfait d’avoir quelques libertés nouvelles, et surtout apparentes, le peuple a permis à l’Etat de mettre la main sur quelques libertés anciennes, très utiles et même primordiales. […] De quel droit l’Etat fera-t-il enseigner une orthographe particulière ? […] C’est dans ce désarroi que les réformistes se sont adressés à l’Etat.

1288. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Madame de Verdelin  »

Il eut, dit-il, deux grands plaisirs en ce temps au milieu de tous ses ennuis ; et après avoir parlé d’un service qu’il put rendre à un ami, en contribuant par le canal de Milord Maréchal à le faire conseiller d’État et en acquittant ainsi envers lui une dette de reconnaissance, il ajoute : « Mon autre grand plaisir fut une visite que vint me faire Mme de Verdelin avec sa fille, qu’elle avait menée aux bains de Bourbonne, d’où elle poussa jusqu’à Motiers, et logea chez moi deux ou trois jours (probablement le 4ème et le 2 septembre 1765).

1289. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

L’anonyme, qui paraît avoir connu depuis longtemps Delille, s’attache, en ennemi intime, à flétrir toute sa vie ; il fait d’ailleurs de la publication de la Pitié un crime d’État, et le dénonce au Gouvernement consulaire.

1290. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (1re partie) » pp. 397-476

Elle retourna dans les montagnes avec ses parents ; elle fut donnée par eux pour épouse à un de ces héroïques brigands du même métier ; elle partagea ses aventures, ses expatriations, ses captivités dans les États romains, dans le royaume de Naples, et elle mourut, jeune encore, à la suite du bandit, laissant la tête de son mari clouée, dans une niche de fer, sur un poteau de la route de Terracine, et son enfant orphelin sur la paille d’une cour de prison.

1291. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (2e partie) » pp. 5-80

Les États romains s’agitaient : les populations les plus vivaces habitent ces montagnes.

1292. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (3e partie) et Adolphe Dumas » pp. 65-144

Le mortel n’est pas encore né et ne naîtra pas qui oserait venir dans les États des Phéaciens pour y apporter la guerre, car ils sont chéris des dieux, et nous habitons à l’écart, les derniers, au sein des ondes écumeuses et immenses.

1293. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre troisième »

L’admiration pour Jean de Meung était presque une religion d’État.

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