Notre voix, au contraire, a un pouvoir d’imitation très borné ; le larynx et la bouche ne possèdent qu’une puissance productrice de certains sons déterminés ; leur constitution physique en établit la liste et la ferme. […] Cardaillac lui-même ne parle que d’un « frémissement presque imperceptible »153 ; il ajoute que « l’habitude tend à le diminuer et finit par le faire disparaître entièrement », et il ne pense pas que « les hommes studieux, habitués à la méditation », puissent réussir à l’apercevoir, à moins de suivre le conseil qu’il leur donne de « s’écouter avec attention » ; alors, dit-il, « ils le retrouveront quelquefois, surtout lorsqu’ils s’occuperont d’objets qui leur sont moins familiers, ou bien lorsqu’ils sentiront le besoin de se rendre plus vivement sensibles leurs idées et les expressions dont ils les revêtent », c’est-à-dire lorsqu’une difficulté dans le problème étudié excitant les puissances de l’âme et donnant plus d’énergie à la parole intérieure, celle-ci se trouvera ressembler davantage à la parole extérieure.
Ils ont été arrachés aux rives et se perdent dans la puissance muette et contenue du cours poétique : Cheveux bleus, pavillon de ténèbres tendues, Vous me rendez l’azur du ciel immense et rond ; Sur les bords duvetés de vos mèches tordues Je m’enivre ardemment des senteurs confondues De l’huile de coco, du musc et du goudron4. […] Mais pour la subir, pour éprouver sa puissance, il faut avoir gardé sa spontanéité et sa simplicité primitives, ou savoir les restaurer en soi ; il faut posséder encore le merveilleux don puéril de comprendre par images, de saisir les idées par l’illustration, de ne pas séparer l’idée de ses formes sensibles. […] À ce sacrilège il joint celui d’usurper la place de Dieu ; il prétend se faire la seule fin du peuple ; il lui demande exactement ce qu’exige Dieu, de se consumer pour lui, et sa volonté de puissance est telle, qu’il réalise un instant l’accord profond qu’organise entre les hommes la vision de Dieu. […] Sans doute il n’y a pas ici, comme chez Franck, une force centrale, une puissance qui s’épanouisse peu à peu, un développement par expansion. […] Un acte est quelque chose qui vient se mettre à la place d’une partie de l’âme ; il éteint un peu de notre belle énergie ; il crée de l’immobile, du définitif là où il y avait d’exquises puissances ; il nous arrête un peu, il met un terme à notre douce ambiguïté intime.
Cette inexprimable architecture de monts et de vallées sans mesure donne une impression bien vive de la puissance divine. […] Ce ne fut point, pourtant, vers la peinture des mœurs madrilènes, que Valera tourna sa puissance d’observation25. […] Quatre œuvres notables, la Vision de Fray Martin, de Nuñez de Arce, l’Inondation et la Niña de Gomez Arias, le Fray Juan de Velarde, prouvent chez les poètes espagnols une activité et une puissance, que n’a plus la littérature italienne, par exemple38. […] L’Angleterre, qui continue à régner sur le monde par sa puissance maritime et sa merveilleuse industrie, ne manquera jamais de ces forgerons de la phrase qui font leur choix dans la fonte nouvelle, avant de la jeter dans leur moule. […] La jeunesse artistique serait prise au premier coup d’œil, empoignée par ce faire magistral, par la hardiesse, la puissance de ce Zola du pinceau, comme notre jeunesse littéraire est tout entière dans le respect, le respect qui discute et blâme parfois, devant l’œuvre du Maître prosateur.
La doctrine de l’évolution s’est répandue avec tant de puissance qu’elle a pénétré partout, jusqu’aux endroits où elle n’avait rien à faire. […] Le jeune homme songe, et ses paroles sont des actes qui se préparent : « La totale puissance des hommes, il me la faut. […] Le corps est restauré dans la puissance et la majesté. […] John Ruskin les a détestées : il n’a pas vu ce qu’elles doivent être, une puissance capable d’abolir « l’esclavage physique de l’humanité ». […] J’en aime plusieurs passages relatifs à l’industrie des parfums, à la cueillette des fleurs et au supplice des roses qui endurent la « puissance mécanicienne ».
» C’est que ni la gloire, ni même le travail ou l’invention, ne suffisent à ces âmes véhémentes ; l’amour seul peut les combler, parce qu’avec leurs sens et leur cœur il contente aussi leur cerveau, et que toutes les puissances de l’homme, l’imagination comme le reste, trouvent en lui leur concentration et leur emploi. « L’amour est mon péché204 », disait-il, comme Musset et comme Heine, et dans les Sonnets on démêle encore les traces d’autres passions aussi abandonnées, une surtout qui semble pour une grande dame. […] Cette puissance créatrice est le grand don de Shakspeare, et communique aux mots une vertu extraordinaire. […] Parcourez ces groupes, et vous n’y trouverez que des formes diverses et des états divers d’une puissance unique.
Si le réalisme aborde les sujets élevés et élégants, sa puissance sera prodigieuse et il dépassera de beaucoup le scepticisme byronien, parce qu’il s’appuie sur une base solide, le vrai. […] Champfleury, — car c’est de lui seul que nous voulons nous occuper ici, — a incontestablement du talent et une certaine puissance d’observation. […] Triste beauté que celle qui n’a que la puissance de faire oublier la toilette.
En effet, il est difficile de ne pas se laisser emporter par ce torrent de mots, de métaphores, il est difficile de ne pas rester coi devant la puissance, la créativité, la liberté du langage de Crevel. […] C’est dans la pratique que l’homme doit démontrer la véracité c’est-à-dire la réalité, la puissance, l’en-deçà de sa pensée. […] Avant qu’il en soit ainsi, sans doute, faudra-t-il, du sceptique léger au religieux obtus, imposer silence à tous ces agnosticismes, qui, d’une souriante soumission au fait ou d’un rauque impitoyable renoncement, espèrent payer, fléchir les puissances, dont, ils se croient menacés.
Il n’y a pas de dictateur qui tienne : ni le grand Malherbe, ni le grand Balzac, ni la grande Arthénice elle-même (Mme de Rambouillet), n’ont puissance et qualité à cet égard qu’avec l’aide et l’assentiment de tous.
On en est moins loin dans le sonnet qui suit, et où l’on retrouve le ton élevé, digne du sujet : Ni la fureur de la flamme enragée, Ni le tranchant du fer victorieux, Ni le dégât du soldat furieux, Qui tant de fois, Rome, t’a saccagée ; Ni coup sur coup ta fortune changée, Ni le ronger des siècles envieux, Ni le dépit des hommes et des dieux, Ni contre toi ta puissance rangée ; Ni l’ébranler des vents impétueux, Ni le débord de ce dieu tortueux, Qui tant de fois t’a couvert de son onde, Ont tellement ton orgueil abaissé, Que la grandeur du rien qu’ils t’ont laissé Ne fasse encore émerveiller le monde.
Le type girondin, qui se reproduit dans la jeunesse à chaque génération survenante, est ardent, aventureux, ouvert à la sympathie populaire, confiant sans mesure aux réformes rapides, à la puissance de la seule liberté et à la simplicité des moyens, ombrageux pour ses adversaires, jamais pour ses alliés, prompt et franc à s’irriter contre ce qui sent la marche couverte et le tortillage, déniant vite aux habiles qui entravent sa route le sentiment et le cœur.
Ledru-Rollin, chef des journalistes radicaux, et ayant, malgré ses amis, reconnu en lui des facultés de parole et des puissances de conception très-grandes avec des intentions non déguisées contre le socialisme subversif, notre ennemi commun, j’avais conçu pour lui une secrète estime, et je n’étais pas loin d’espérer que le concours d’un homme aussi bien doué ne pût être, sous une forme ou sous une autre, très-utile à la république ; depuis, il suivit légèrement une émeute sans portée qu’il devait répudier courageusement ou conduire ; il se réfugia en Angleterre par une fausse porte, mais il parut de ce jour-là se retirer de la politique, et il vécut en mort de ses souvenirs, de ses regrets et peut-être de son mépris pour les vivants.
« Ce dernier cri est presque un écho fidèlement répété : « Levez-vous vite, orages désirés, qui devez emporter René dans les espaces d’une autre vie… » Mais René a plus d’énergie que Lamartine et que tous les Jocelyns du monde quand il continue en ces immortels accents : « La nuit, lorsque l’aquilon ébranlait ma chaumière, que les pluies tombaient en torrent sur mon toit, qu’à travers ma fenêtre je voyais la lune sillonner les nuages amoncelés, comme un pâle vaisseau qui laboure les vagues, il me semblait que la vie redoublait au fond de mon cœur, que j’aurais eu la puissance de créer des mondes.
Le naturalisme, par l’importance même qu’il attribue à l’objet, pousse facilement à diminuer la part de l’ouvrier ; et d’autre part les artistes qui ne savent pas très bien leur métier, ou les gens d’esprit qui ne sont pas artistes, oublient facilement que la faculté de sentir n’implique pas toujours une puissance égale d’expression, jet que l’image qu’on a dans l’esprit ne s’objective pas toute seule, sans grand labeur et contention d’esprit.
Les autres genres nous tendent plus ou moins l’esprit ; c’est même là leur propriété et leur puissance.
Il ne sait pas s’adresser aux puissances suprêmes.
Il faut le lui dire pourtant : la puissance qu’il déploie est stérile.
Il avait le sentiment du brillant de ces anneaux et de je ne sais quelle puissance interne qui les animait : sa colère était de ne pouvoir les rejoindre et en faire un seul corps.
* * * Un mystère, un mystère incompréhensible, insondable, que dans cet atrophiement du cerveau, la résistance, la survie de certaines facultés, de certaines puissances de l’entendement, un mystère que cette échappée de mots, de réflexions, de choses vives ou profondes, jaillissant à travers cette léthargie qu’on penserait universelle, un mystère qui vous retire à tout moment de votre désespérance et vous fait dire : « Mais cependant ?
— Il faut donc, se dit-on, que cet art dramatique ait en lui-même une puissance énorme, pour agiter à ce point les philosophes, les moralistes, les législateurs, les spectateurs et la critique ?
Il assure que le nom d’Ignace étoit redoutable aux puissances de l’enfer, & qu’on a entendu quelquefois les possédés s’écrier au milieu des exorcismes à la vue d’une image du serviteur de Dieu : Où est ton pouvoir, Lucifer, puisqu’un peu de papier avec la figure d’un Prêtre nous fait fuir sans que nous puissions résister ?
Les qualités des animaux, pour y venir décidément, il les a vues ou cru les voir, et, en tout cas, il a agi comme un observateur poète, et les observateurs poètes ont cela de dangereux qu’ils ajoutent beaucoup à la réalité, mais ils ont cela de charmant tout au moins qu’une partie de la réalité, ils la voient, quand nous ne savons pas la voir, avec une puissance de vision, avec une force de perspicacité extraordinaires.
Par quel charme inconnu, nous l’avons dit, cette femme mesquine, corrompue, à moitié folle, a-t-elle agi de cette puissance sur la tête de M.
Celui qui a vécu largement une part quelconque de la vie peut en faire revivre, par sa seule puissance individuelle, une autre partie, et c’est là le propre du génie.
L’amitié avec la nature peut vivre autant que nous, mais elle n’a qu’une saison pour commencer : celle de la première jeunesse, l’heure matinale, où le cœur, doué d’une puissance de désir et d’émotion qui ne sera jamais plus grande, n’est encore pris à rien et peut se prendre à tout, parce que les tendresses qui l’occuperont ne sont pas encore nées.
On continuera cependant de le lire, non à cause de ses théories, mais en dépit d’elles, pour la vigueur de ses peintures, pour la puissance de ses conceptions, pour la façon magistrale dont il a souvent manié la langue française.
A certains jours de l’année & à la naissance de leurs enfants, ils avoient grande attention de dresser une table dans une chambre écartée & de la couvrir de mets & de bouteilles, avec trois couverts & de petits présents, afin d’engager les Meres (c’est ainsi qu’ils appelloient ces Puissances subalternes) à les honorer de leur visite & à leur être favorables.
L’égalité républicaine se maintenait par la violence de cette censure ironique, et le chef ou le corps qui échappait aux lois par sa puissance ou par son crédit, par ses clients, ou par ses richesses, n’évitait pas les pointes déchirantes du ridicule qui le flétrissait, et qui livrait sa splendeur empruntée aux éclats du rire populaire. […] Ne s’appliquerait-elle pas assez bien à la coopération des puissances qui ont travaillé, bon gré, malgré, dans les congrès de Vienne, au grand œuvre de ce qu’elles nommaient la pacification générale de l’Europe ? […] Les hommes en crédit, qu’on n’avait plus le droit de nommer, se crurent indirectement signalés ; la liberté de la muse comique se restreignit de plus en plus afin de se soustraire aux coups de la puissance. […] L’emploi qu’en fit Molière fut un emprunt détourné de l’esprit d’Aristophane : trop avisé pour ne pas bien mesurer la portée de ses censures et la force de son sel attique, il ne donna pas moins de valeur et de puissance à l’usage réglé qu’il fit de ce grand ridicule. […] « Votre sexe n’est là que pour la dépendance : « Du côté de la barbe est la toute puissance.
À l’aspect d’Œdipe, criminel malgré lui, tous les Grecs tremblaient autrefois sous la main d’une puissance injuste et capricieuse qui se jouait de leur destinée : aujourd’hui, les spectateurs, quoiqu’ils ne soient pas imbus de la même doctrine, sont touchés du sort d’Œdipe, et le développement de ses malheurs se fait avec tant d’art, qu’il attache et qu’il intéresse vivement ceux mêmes qui ne croient pas à la prédestination. […] Montesquieu, dont le génie n’a point été affranchi du tribut que tout écrivain paie à la mode, a parlé d’une manière louche et vague de l’assassinat de Brutus ; il n’a pas osé le blâmer, pour ne pas contredire trop ouvertement l’enthousiasme d’une fausse liberté, qui dominait alors dans les écrits philosophiques ; son cœur, qui le conduisait alors mieux que son esprit, ne lui a pas permis de faire l’éloge : d’un meurtre dont la raison et l’humanité s’indignent également ; il rappelle un ancien préjugé des petites républiques grecques, admis à Rome comme une loi, et qui faisait à chaque citoyen un devoir d’assassiner l’usurpateur de la souveraine puissance ; mais il ne dit pas que les véritables usurpateurs de la souveraine puissance étaient les sénateurs eux-mêmes ; qu’eux seuls accréditaient ce préjugé, pour s’en servir contre les bons citoyens qui, comme les Gracques, entreprirent de rétablir les lois et la liberté ; il ne dit pas que Sylla, tyran bien plus cruel que César, a été loué et honoré par le sénat, parce qu’il était chef de la faction patricienne ; et que César, le plus humain et le plus généreux des mortels, a péri victime de l’orgueil du sénat, parce qu’il était à la tête du parti populaire, et qu’il détruisait la tyrannie patricienne, qui depuis longtemps accablait l’empire ; enfin, Montesquieu ne dit pas que, dans l’affreux chaos d’un état où l’on ne connaissait plus que la loi du plus fort, le chef qui rétablit l’ordre sous un titre légitime déféré par le peuple, n’est point l’usurpateur, de l’autorité souveraine, mais le bienfaiteur de la patrie et le restaurateur de la république : Montesquieu connaissait assez l’histoire romaine pour penser ainsi, mais il connaissait trop l’esprit du moment pour le dire. […] Il y avait, dit-il, un certain droit des gens, une opinion établie dans toutes les républiques de Grèce et d’Italie, qui faisait regarder comme un homme vertueux l’assassin de celui qui avait usurpé la souveraine puissance.
Paul Hervieu vaut surtout par la multiplicité, la variété des détails ingénieux et forts, la puissance de l’observation, l’analyse redoutable, l’enchaînement des causes qui mènent au drame, à la catastrophe, la façon dont il précise, avec la haute impersonnalité d’un homme de science, le fonctionnement des organes sociaux et du mécanisme humain qui y correspond et s’y emboîte. […] Et n’est-ce point un signe du temps que les traducteurs de ce très remarquable ouvrage qu’est Le Portrait de Dorian Gray, pour éviter des interprétations désobligeantes, aient craint de mettre leur nom à côté du nom de celui qui eut la puissance de le créer, et que moi-même, je m’expose, en le louant, à des réprobations caractérisées, non moins qu’à de sages et vertueuses invectives, peut-être. […] Voilà un homme d’une rare puissance verbale, le plus somptueux écrivain de notre temps, dont les livres atteignent, parfois, à la beauté de la Bible. […] Pas une seule fois je n’avais remarqué, en lui, ce ton tranchant, cette morgue, cette insolence combative qu’il avait à la Chambre, au temps de sa puissance ; pas une seule fois, non plus, il ne nous avait parlé de tuer ou d’emprisonner, ou de reléguer ses adversaires. […] … Je suis convaincu que les bons livres ont une puissance indestructible… De si loin qu’ils arrivent, ou si enfouis qu’ils soient dans les misères ignorées d’une maison d’ouvrier, ils se révèlent toujours… Certes, on les déteste… On les nie et on les insulte… Qu’est-ce que cela fait ?
Avec la séduction, qu’une femme supérieure met dans de l’éducation élevée, on ne sait pas combien grande peut être sa puissance sur une intelligence d’enfant. […] Chez lui, en le quart d’heure, que dure la fumée d’une pipe, c’est un plan de colonisation du Tonkin, c’est l’organisation d’une armée coloniale, c’est… c’est… et au milieu d’une espèce d’émerveillement pour la puissance de ses facultés, sous cette excitation.
Jour sur jour, en dépit d’embarras matériels effroyables, il a entassé poèmes en proses, poèmes en vers, dialogues coupés, gloses sarcastiques ; il les as entassés par la puissance de germination et de style qui ne tarissait pas en lui, mais sans savoir ce qu’il en ferait. […] Guy Lavaud est un poète, un pur et exquis poète, la puissance et le souffle qui lui font peut-être défaut sont remplacés ici par une délicatesse de touche et un sens affiné des symboles, peut-être unique dans notre littérature.
Dans l’air, ce parfum exquis de gardénias et d’orangers qui se condense le soir sous le feuillage épais ; un grand silence, mêlé de bruissements d’insectes sous les herbes ; et celle sonorité particulière aux nuits tahitiennes, qui prédispose à subir la puissance enchanteresse de la musique. […] Molière, rendu à la vie et promenant sur notre monde la clairvoyance de son regard, reconnaîtrait Tartuffe et chercherait en vain sur ses épaules l’habit de fantaisie dont sa « fronderie » gauloise l’affubla aux jours où cet habit revêtait la puissance, le crédit, l’autorité. […] J’approchai du berceau près duquel la mère se tenait immobile, attachée par toutes les puissances de son âme. […] Il faut déclarer que jamais Victor Hugo n’a été plus en puissance de son talent qu’aujourd’hui, et que si les taches de son soleil sont visibles comme autrefois, l’éclat de ses rayons n’a rien perdu de sa puissance ni de sa splendeur.
C’est que dans notre monde moderne où les classes sont définitivement mêlées, où l’argent est la seule puissance reconnue, rien absolument n’empêche la prostituée d’entrer ni dans une société dont les portes sont toutes grandes ouvertes, ni dans une famille dont les portes sont pour le moins entre-bâillées. […] Cette maladie, pour le moins en puissance chez tous les hommes de ce temps, se développait chez eux et s’exaspérait. […] Pour ne prendre qu’un exemple, s’il veut représenter un homme qui ait le goût de la puissance et de la domination, il lui donnera nécessairement une haute taille, une forte carrure, une allure puissante. […] L’originalité et la puissance viennent justement de ce que l’équilibre étant rompu entre toutes les facultés de l’esprit, l’une d’elles se développe jusqu’à la difformité et jusqu’à la monstruosité. — De même on a félicité M. […] N’admirez-vous pas, rien qu’en ces quelques lignes, la puissance de mirage qui fait qu’on oublie les misères d’une révolution pour ne songer qu’à l’effet de la mise en scène et de l’orchestration ?
Le grand poète lyrique, à cet âge de calme et de mélancolique puissance, s’il se dérobe un instant aux obsessions des affaires et du monde pour remettre le pied dans ses solitudes, sent donc aussitôt et à chaque pas déborder en lui des chants involontaires ; il les livre comme la nature fait ses germes, il ne les compte plus.
En son bel article sur Byron, déjà cité, il offense, il évince presque en deux mots du rang des vrais poëtes le tendre et profond Cowper, le sublime Wordsworth ; il les rejette négligemment parmi les esprits singuliers et maladifs, êtres sans puissance sur l’imagination des autres hommes.
Qu’ai-je à gagner ou à perdre à la puissance de l’Empereur ?
II L’attitude de cet adolescent était conforme à cette stature et à ce visage ; un silence attentif, qui se laissait arracher des réponses justes et brèves, silence presque toujours révélateur de sérieuses puissances d’esprit : les amphores les plus hermétiquement fermées ne sont-elles pas celles qui contiennent les plus précieux parfums ?
Relisons-le pour en contempler la puissance souvent colossale, pour en admirer la verve plus bouillante encore que dans la jeunesse, dans cette nature qui a déjà bouillonné soixante ans, tant il y a d’eau dans ce vase et de combustible dans ce foyer.
Des fleuves, tes esgaulx, coulent en assurance Parmy des champs flouris, des plaines et des bois : Toy, qu’un gouffre profond absorbe à ta nayssance, Mille obstacles divers combattent ta puissance : Tu triomphes de tous.
Werther sent la Nature, et par là il se sent artiste, il se sent puissant : mais où tourner cette puissance, que faire de son art, que créer ?
Par la puissance du même don, tout ce qu’il voit le regarde à son tour.
Cet invincible attachement à un vœu, qui est à sa manière un hommage à leur puissance, les enhardit, les attire, les flatte.
Il ressemble maintenant à un défi ; on dirait que celui qui appelle provoque au combat toutes les puissances du gouffre.
Il ne cherche pas à retrouver la puissance wagnérienne dans ses textes mais plutôt une musicalité dont il fixe lui-même les formes dans L’art poétique en 1874.