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558. (1889) La critique scientifique. Revue philosophique pp. 83-89

Il importe de savoir comment un peintre travaille, pour juger si l’attention chez lui est forte ou faible, etc. […] Indiquer un ordre de travail, et avoir donné l’exemple d’une méthode, c’est la marque d’un vigoureux et solide esprit : on en jugera déjà par l’application faite à Victor Hugo dans l’appendice du livre même.

559. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Femme au XVIIIe siècle » pp. 309-323

Et cependant, malgré leur enthousiasme pour ce siècle, ils s’efforçaient de le juger. […] Est-ce assez analysé, assez approfondi, assez jugé ?

560. (1880) Goethe et Diderot « Introduction »

Il était expédient de placer Gœthe et Diderot dans le cadre étroit d’un même volume, pour, rapprochés ainsi l’un de l’autre, les faire mieux juger et donner une idée plus exacte et plus nette de leur identité ; car, malgré les différences de pays et d’époque, de langue et d’idée, d’influence et de destin, Goethe et Diderot— pour qui creuse et pénètre au-delà — sont des esprits de nature identique… Gœthe — le dernier venu des deux — est certainement le plus grand dans l’opinion des hommes, comme Charlemagne est plus grand que Pépin ; mais c’est Diderot qui est le prédécesseur et le père, — et encore est-ce un père qui n’a pas donné tout son tempérament à son fils. […] Chateaubriand a dit, en parlant d’un homme plus grand que Gœthe, qu’il a jugé : « Je ne veux pas être une sotte grue et tomber du haut mal de l’admiration. » Eh bien, ni moi non plus !

561. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Charles d’Héricault » pp. 291-304

Carlyle, l’Anglais, du pays de Pitt, si bien placé pour juger la Révolution française, y alluma son mysticisme halluciné de puritain. […] Les plus belles, les plus nobles imaginations de ce siècle furent ébranlées et éblouies par le sang, — cette pourpre qui éblouit quand il s’agit de juger celui qui le verse, — et qui fut versé par ce lâche et ce sot.

562. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame de Créqui »

De là elle contempla son temps plus que pâle et elle en jugea les hommes plus que petits. […] Si cette femme d’aperçu, et qui savait si nettement styler sa pensée, avait cru jamais que juger les hommes c’était donner le sacre de la confiance à ces grands enfants qui se permettent la fatuité ou se prendre pour eux de compassion intellectuelle, nous n’aurions jamais retrouvé ce volume de lettres, savoureux et sain, où la rigueur de la raison et la brusquerie de la vérité se mêlent délicieusement la svelte légèreté du tour et au charme calmant d’une religieuse tristesse.

563. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIII. Pascal »

Pascal, en effet, a été plus retrouvé, plus restauré, plus raconté que jugé de ce jugement définitif et suprême qui donne la raison suffisante d’un homme ; il a produit plus d’étonnement que d’admiration encore, et presque plus de frayeur que d’étonnement. […] Là, dans le désert, le saint désert, comme disaient ces anachorètes, la terrible lionne l’a foulé aux pieds, déchiré, déchiqueté, et elle a répandu autour d’elle ses lambeaux saignants avec une fureur de mépris dont vous pouvez juger encore, car ces lambeaux, ce sont les Pensées de Pascal.

564. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

Esprit médiocre, n’ayant pour tout talent que la gravité de son état, âme de rhéteur, doctrine trop souvent erronée, le cardinal de Bausset pouvait nous raconter Bossuet, mais le montrer vivant ou le juger, cela lui était impossible. […] Sous peine de retomber dans les redites de la vulgarité, un grand homme est presque nécessaire pour juger un grand homme… Du moins, un certain plain-pied doit-il exister entre l’historien et son héros, pour que l’histoire soit entendue.

565. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Victor Cousin »

Jusqu’ici nous n’avions à juger que les écoliers de l’École, les Saisset et les Simon, les minces qui bégaient et zézaient, comme ils peuvent, dans le silence du maître, la philosophie qu’il a parlée, lui, avec cette grande voix de Fontanarose dont nos oreilles sourient encore… Eh bien, c’est cette voix qu’il nous fait entendre à nouveau, en réimprimant ses anciennes œuvres ! […] Si ces livres, comme nous le pensons, du reste, ne se distinguent que par des qualités inférieures à celles du livre actuel de Cousin, ne les aura-t-on pas jugés implicitement déjà, eux et leur auteur, en jugeant l’auteur (et son livre) de cette Introduction à la Philosophie de l’histoire !

566. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Le Marquis Eudes de M*** »

Avant de juger cet étrange ouvrage et ce qu’il renferme, il faut commencer par le raconter. […] À l’excentricité de sa tenue, à l’étonnement de sa physionomie, il était facile de le juger : ce n’était pas un habitué de la paroisse, pas davantage un habitué d’autres églises, et certainement c’était le hasard seul qui l’avait fait entrer dans celle-ci.

567. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Mme de Girardin. Œuvres complètes, — Les Poésies. »

Selon nous, Mme de Girardin, dans ces lettres charmantes, est beaucoup plus femme d’esprit qu’elle n’avait été poète du temps de Mlle Delphine Gay ; mais être femme d’esprit, c’est plus et c’est moins que d’avoir du talent, et nous n’avons à juger aujourd’hui que le talent de Mme de Girardin et ses poésies. […] On trouvera Mme de Girardin, jugée comme écrivain, dans notre volume intitulé : Les Bas-bleus du xixe  siècle.

568. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (3e partie) » pp. 5-79

« Il commença par se juger lui-même. […] « Ces questions faites et résolues, il jugea la société et la condamna. […] « Cela est triste à dire : après avoir jugé la société qui avait fait son malheur, il jugea la providence qui avait fait la société, et il la condamna aussi. […] On va le juger le surlendemain.

569. (1892) Sur Goethe : études critiques de littérature allemande

Un Allemand, qui le voudrait juger comme nous le jugeons, dirait qu’aucun poète n’a plus approché de cet idéal qu’Herder appelait « l’humanitæt ». […] Ce qui est plus grave, il a à peine ébauché le tableau de la révolution accomplie par lui, et il n’en a point jugé les résultats. […] Il ne se révolte point, il ne commet pas le sacrilège de juger celui que la nature, la reconnaissance et son devoir lui ordonnent de respecter. […] Mais, à en juger par le livre de M.  […] On la peut juger sur le titre ainsi travesti : Les Passions du jeune Werther.

570. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Des Rieux, Lionel (1870-1915) »

Il s’y affirme poète délicat, et j’estime que les Amours de Lyristès brillent d’un éclat assez limpide pour laisser juger de la conscience et de la fantaisie de celui qui les enchâssa dans un écrin de rimes futiles.

571. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 274-275

Ségrais écrivoit assez bien en Prose, comme on peut en juger par ses Nouvelles Françoises, aussi bien que par Zaïde & la Princesse de Clèves, Romans auxquels il a eu plus de part que Madame de la Fayette.

572. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 362-363

Cette Traduction, à laquelle il a, dit-on, la principale part, lui a attiré les anathêmes du Patriarche que les Lettres & la Philosophie viennent de perdre : M. de Voltaire, offensé de ce qu’on n’a pas parlé de ses Tragédies dans le Discours qui précede celles du Poëte Anglois, ne put retenir son ressentiment, comme il est aisé d’en juger par plusieurs de ses Lettres, & entre autres, par celle qui est imprimée dans la seconde édition du Bureau d’Esprit, où il traite M.

573. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Fragonard » p. 280

Comme ces enfans sont très-petits, ils ne sont pas faits pour être vus à grande distance ; mais comme le tout ressemble à un projet de plafond ou de coupole, il faudrait le suspendre horizontalement au-dessus de sa tête et le juger de bas en haut.

574. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Aurier, Georges-Albert (1865-1892) »

Il ne fut jamais un chercheur de pierres précieuses ; il sertissait celles qu’il avait sous la main, plus soucieux de leur mise en valeur que de leur rareté ; mais, pêcheur de perles, il le fut aussi trop peu, et, trop confiant en sa force improvisatrice, il laissa, même en des morceaux jugés par lui définitifs, échapper des à peu près et des erreurs.

575. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Valade, Léon (1841-1884) »

Camille Pelletan Léon Valade n’a été, de son vivant, jugé à toute sa valeur que par un groupe restreint d’amis et de lettrés.

576. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 401-402

Les progrès rapides de sa Muse font juger combien il eût pu ajouter à sa réputation, si des jours plus longs & plus heureux lui eussent permis de cultiver son génie poétique.

577. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 433-434

La finesse de ce mot consistoit à faire entendre au Ministre qu’elle conservoit les jours de son Eminence en l’égayant, genre de flatterie plus fait pour plaire à celui qui en étoit l’objet, qu’au Lecteur, qui n’en jugera pas de même.

578. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 131-133

Faites de ma Lettre l’usage que vous jugerez à propos.

579. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 214-216

Aujourd’hui ses Poésies sont oubliées, & ne le méritent pas, à en juger par celles qui sont contenues dans un Recueil imprimé en 1660 chez Charles de Sercy, & dont le cinquieme volume commence par une Ballade de ce Poëte, qui feroit honneur à nos Anacréons modernes.

580. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 183-184

Plusieurs morceaux de ses Poésies font juger qu’il étoit né Poëte, & qu’il auroit pu laisser d’excellens Ouvrages, si, se livrant moins à sa facilité, il l’eût assujettie aux regles du goût.

581. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Note préliminaire » pp. 5-6

Il s’agit d’avoir du bon sens, mais de l’avoir sans fadeur, sans ennui, de se mêler à toutes les idées pour les juger, ou du moins pour en causer avec liberté et décence.

582. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « La Esmeralda » (1836) »

L’auteur suppose donc, si par aventure on s’occupe de ce libretto, qu’un opuscule aussi spécial ne saurait en aucun cas être jugé en lui-même et abstraction faite des nécessités musicales que le poëte a dû subir, et qui, à l’Opéra, ont toujours droit de prévaloir.

583. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Amand » p. 279

Si vous ne m’en croyez pas sur les dessins d’Amand, celui où au bas d’une fabrique à droite il y a un groupe de gens qui concertent ; à gauche une statue de Flore sur son piédestal ; à droite un escalier ; au-dessus de l’escalier une fabrique ; plus vers la gauche, sur une partie du massif commun de la fabrique, une cuvette soutenue par des figures, et au-dessous de la cuvette, un bassin qui reçoit les eaux ; revoyez cela, et jugez si j’ai tort de dire que rien n’est plus bizarre, plus dur et plus mauvais.

584. (1889) La bataille littéraire. Première série (1875-1878) pp. -312

La commune veut juger. […] La commune veut vous juger, elle est sur vos talons. […] — Nous juger, nous ? […] Les lecteurs jugeront. […] Le bonhomme Liébard jugea convenable de se retirer.

585. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

« Je ne dirai rien à ces aristarques-là de leur rhétorique sur le mot de rhéteur : j’ignore quels sont leurs talents pour juger des mots, leurs titres pour juger des choses, leurs droits pour juger des personnes, s’ils se connaissent en style et en génie ; mais je crois qu’il serait encore plus facile de se faire couper les veines, que de rassembler dans un ouvrage, toute la morale et tout l’esprit qu’on trouve dans celui de Sénèque. […] XXIV)  : « Ne vous permettez pas de juger ceux qui valent mieux que vous ; nous possédons déjà un des premiers avantages de la vertu, c’est de déplaire aux méchants. […] D’après son ouvrage posthume, cet homme n’est-il pas jugé ? […] Il voit toujours l’homme dans le sage, et invite ceux qui n’y voudront voir que le héros de se mettre à sa place avant que de prononcer, précaution sans laquelle on sera souvent injuste, on ne sera jamais indulgent, et l’on jugera les autres comme on ne voudrait pas en être jugé. […] D’où naît cette légèreté à juger des choses qu’on ignore, et à parler des hommes qu’on ne connaît pas ?

586. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » pp. 222-224

On peut juger cependant de leur tolérance pratique, par les manœuvres qu’ils mettent en usage contre ceux qui les attaquent ou ne les estiment pas.

587. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 475-476

On auroit trouvé que François Habert, contemporain de Marot, est le premier de nos Poëtes qui ait employé les rimes redoublées, comme on peut en juger par le morceau que nous avons cité à son article.

588. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 334-336

Qu’on les lise donc, si l’on veut juger sainement du véritable esprit du Christianisme, & des devoirs de la tendre & solide piété.

589. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 361-363

On peut en juger par ceux-ci : Ne me demandez pas, Silvie, Quel est le mal que je ressens ; C’est un mal que j’aurai tout le temps de ma vie ; Mais je ne l’aurai pas long-temps.

590. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 171-172

Une lecture plus réfléchie nous a mis depuis à portée de juger que l'Auteur n'a presque jamais puisé dans les sources, & qu'il ne les cite que parce qu'elles se trouvent citées dans les Ouvrages qu'il copie servilement.

591. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — T. — article » pp. 319-320

On lui demandoit un jour ce qu'il pensoit d'une Harangue qu'il devoit prononcer : Elle est bonne , dit-il avec plus d'ingénuité que d'orgueil ; je dis très-bonne, tout le monde ne la jugera pas ainsi, mais je m'en inquiete peu.

592. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 406-407

Son frere même ne pouvoit lui pardonner ce travers, comme on peut en juger par ce qu'il dit de lui dans l'Histoire de sa vie.

593. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 424-425

Il faut sur-tout renvoyer nos ingénieux Mécréans à celle d'un prétendu Militaire à un jeune Impie, placée à la fin de l'Ouvrage, pour les mettre à portée de juger sainement du cas qu'on doit faire de la déplorable gloire attachée à la Philosophie.

594. (1767) Salon de 1767 « Dessin. Gravure — Demarteau » p. 335

Mais quand je pense que j’ai moins employé de temps à examiner deux cents morceaux, qu’il n’en faudrait accorder à trois ou quatre pour en bien juger ; quand j’apprécie scrupuleusement la petite dose de mon expérience et de mes lumières avec la témérité dont je prononce, et surtout lorsque je vois que moins ignorant d’un sallon à un autre, je suis plus réservé, plus timide, et que je présume avec raison qu’il ne me manque peut-être que d’avoir vu davantage pour être plus juste, je me frappe la poitrine, et je demande pardon à Dieu, aux hommes et à vous, mon père, et de mes critiques hasardées et de mes éloges inconsidérés.

595. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre III. La Révolution. »

Ainsi jugea Gay dans son Opéra du Gueux, et la société polie applaudit avec fureur au portrait qu’il traçait d’elle. […] L’esprit y trouve une sorte de bal ; jugez de quel empressement il s’y porte ! […] Chacun a par nature et primitivement le droit d’acquérir, de juger, de punir, de faire la guerre, de gouverner sa famille et ses gens. […] Chaque matin, les journaux et les pamphlets viennent discuter les affaires, juger les caractères, invectiver par leur nom les lords, les orateurs, les ministres, le roi lui-même. […] Voilà les explosions d’un naturel par excellence doux et aimable ; jugez des autres.

596. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « LEOPARDI. » pp. 363-422

J’ai sous les yeux tous les manuscrits de Leopardi qui datent de cette époque, manuscrits confiés par lui-même à M. de Sinner, si capable d’en bien juger, et qui en a publié des extraits132. […] On me fait remarquer que ceux de Leopardi, en se rattachant à cette dernière école pour la netteté, paraissent avoir gardé de la facilité de l’autre : les connaisseurs diront le degré exact et à quel point ils les jugent bien frappés. […] Quels que soient mes malheurs, qu’on a jugé à propos d’étaler et que peut-être on a un peu exagérés dans ce journal, j’ai eu assez de courage pour ne pas chercher à en diminuer le poids ni par de frivoles espérances d’une prétendue félicité future et inconnue, ni par une lâche résignation. […] Respectons, sans les juger, toute conviction sincère et courageuse, tout martyre noblement subi. […] A les juger dans l’ensemble, les Romains n’ont point usurpé cette admiration traditionnelle qui s’attache à leur nom.

597. (1813) Réflexions sur le suicide

Il y a une cause de Suicide, qui intéresse presque tous les cœurs de femme : c’est l’amour ; le charme de cette passion est sûrement le principal motif des erreurs qu’on commet dans la manière de juger l’homicide de soi-même. […] Les guerriers appellent ce sentiment la confiance dans son bonheur, les hommes religieux l’espoir dans le secours de la Providence : mais les uns et les autres trouvent dans cette disposition intérieure de l’âme un genre d’appui qui fait juger plus clairement les circonstances mêmes de cette vie, tout en donnant des ailes pour y échapper. […] Nous laisserons de côté, comme tout à fait étrangers à notre sujet, ceux dont l’ambition a seulement pour but le pouvoir et la fortune : mais nous examinerons avec attention en quoi consiste la dignité morale de l’homme ; et cet examen nous conduira nécessairement à juger l’action d’immoler sa vie sous deux points de vue absolument contraires : le sacrifice inspiré par la vertu, ou le dégoût qui résulte des passions trompées. […] On prétend aussi que le climat d’Angleterre porte singulièrement à la mélancolie : je n’en puis juger, car le ciel de la liberté m’a toujours paru le plus pur de tous ; mais je ne crois pas que ce soit à cette cause physique qu’on doive surtout attribuer les fréquents exemples de Suicide. […] Comment juger moi-même la place que mon souvenir doit occuper dans la chaîne des événements de l’histoire ?

598. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VII. Les poëtes. » pp. 172-231

Dire des galanteries, badiner avec les dames, parler élégamment de leur chocolat ou de leur éventail, railler les sots, juger la dernière tragédie, manier la fadeur ou l’épigramme, c’est là, ce semble, l’emploi naturel d’un esprit comme celui-ci, peu passionné, très-vaniteux, passé maître en fait de style, et qui soigne ses vers comme un petit-maître soigne son habit. Pope à écrit la Boucle de cheveux enlevée et la Sottisiade ; ses contemporains s’extasièrent sur la grâce de son badinage comme sur la justesse de sa moquerie, et jugèrent qu’il avait surpassé le Lutrin et les Satires de Boileau. […] Il y montre que Dieu a fait tout pour le mieux, que l’homme est borné et ne doit pas juger Dieu, que nos passions et nos imperfections servent au bien général et aux desseins de la Providence, que le bonheur est dans la vertu et dans la soumission aux volontés divines. […] Rappelons-nous, quand nous voulons la juger équitablement, le temps où nous faisions des vers français qui ressemblaient à nos vers latins. […] Un plébéien génevois, protestant et solitaire, que sa religion, son éducation, sa pauvreté et son génie avaient mené plus vite et plus avant que les autres, vint dire tout haut le secret du public, et l’on jugea qu’il avait découvert ou retrouvé la campagne, la conscience, la religion, les droits de l’homme et les sentiments naturels.

599. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

Dans les dialogues, Socrate ne juge guère de la poésie que comme en jugent, dans les entretiens de chaque jour, les sociétés même les plus polies et les plus délicates. […] Quoiqu’on ne puisse juger d’une langue morte aussi sûrement que de la sienne, le style d’Horace paraît non-seulement plus élégant, mais aussi plus propre au sujet qu’il traite. […] Mais est-il équitable de juger Aristote par Descartes, et de mesurer ces antiques théories à des théories venues deux mille ans plus tard ? […] Ne jugeons donc pas Aristote par Descartes ; et puisqu’un heureux hasard nous permet de comparer les théories du disciple à celles de son maître, jugeons Aristote par Platon ; Aristote a vingt ans étudié à cette école. […] La plupart des ouvrages aristotéliques ne nous sont arrivés que dans un état de désordre et de mutilation qui permet rarement d’en juger l’ensemble.

600. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Or quelle est, l’artistique valeur d’Une Capitulation : si, celui que la nécessité de connaître à fond cette œuvre contraignit à une étude d’elle attentive et prolongée, estime qu’une Capitulation, farce digne des Maîtres Chanteurs, digne en son genre de la Tétralogie, en son genre aussi pleinement belle que Tristan et Isolde, comptera plus tard parmi les plus hauts chefs-d’œuvre du Maître vénéré, — juger Une Capitulation est encore, oui, une périlleuse question qui réclame des juges moins troublés, une époque plus sereine. […] Il en avait jugé ainsi, et bien jugé. […] Avant de juger les théories énoncées, recréons-les entièrement, de notre création personnelle, mettant les pensées au point de notre spéciale intelligence. […] Alors nous recréerons ces œuvres ; alors nous les pourrons juger. […] Saint-Saëns ayant cité et jugé Wagner, la bibliographie Wagnérienne doit nommer son livre.

601. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome I « Bibliotheque d’un homme de goût. — Chapitre I. Des poëtes anciens. » pp. 2-93

Nous ne pouvons juger que très-difficilement de la beauté des Odes de Pindare ; elles étoient faites pour être chantées sur la Lyre, & toute Poésie qui est faite pour le chant, & qui ne s’y peut plus mettre, a déjà perdu la moitié de son prix. […] & cette version ne réconciliera pas avec l’Original ceux qui n’en jugeront que par elle. […] On peut juger du soin avec lequel elle est faite, & du style de l’auteur, par la description de la peste, tirée du sixiéme Livre, que l’Abbé des Fontaines a insérée dans ses remarques sur le troisiéme Livre des Georgiques de Virgile. […] C’est d’après elle que les gens du monde ont jugé Juvenal ; mais que le Satyrique roman est lâche dans cette version ! […] M. du Jardin, peu content de cette version, où il y a des retranchemens que les hommes vertueux jugeront nécessaires, en donna une nouvelle en 1742. en deux vol.

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