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551. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » pp. 433-434

Un seul trait lui suffisoit pour peindre une action ; cette belle Strophe, sur le passage du Rhin, en est la preuve.

552. (1879) À propos de « l’Assommoir »

On dirait même que, plus tard, entièrement dominé par sa pensée philosophique, obéissant sans réserves à son désir de peindre les mœurs dans toute leur crudité, M.  […] Zola, en grandeur naturelle, peint par Manet, il y a dix ans. […] Et comment voulez-vous le peindre et le flétrir sans le montrer dans toute sa laideur ? […] nous nous garderons bien de trouver infâmes des actions qu’on nous peint toutes roses, de trouver sales les crimes poétiques que vous nous représentez ! […] Mais, de même qu’au lieu du mal poétique et du vice doré il peint le mal tel qu’il est et le vice hideux, au lieu du bien factice, il dépeint la vertu vraie, le bien réel.

553. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1875 » pp. 172-248

Puis de Béhaine me peint la délivrance joyeuse, qu’avait éprouvée le maréchal, quand, après quelques mots sur la politique intérieure, il lui a demandé où en était l’armée. […] Sur un gris verdâtre, sont peints en gris demi-deuil, des muses, des aigles, des enroulements de lauriers, pour lesquels le peintre a obtenu à peu près le trompe-l’œil d’une planche découpée. […] Le fameux vase alhambresque, je l’avoue à ma honte, me fait l’effet d’un vase en carton peint, pour un drame littéraire et assyrien de l’Odéon. […] Il nous peint Audiffret-Pasquier, comme un hurluberlu, répétant à tout propos : « Qui osera nous arrêter, quand nous formerons un bataillon carré, avec le drapeau tricolore planté au milieu de nous !  […] Il nous le peint avec des trous, des vides, des côtés bêtes, mais avec des grandeurs et des générosités d’un homme du passé, d’un homme antique.

554. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Mercredi 5 avril Rochegrosse vient m’emprunter le portrait, qu’il a fait sur la couverture du livre de son père adoptif, pour de ce portrait, qui est bien certainement le portrait le plus ressemblant qui ait été peint du poète, faire un Banville dans son intérieur, du format d’un petit tableau de chevalet. […] Mais son admiration enthousiaste est surtout pour le désert, le soir, et il le peint tout à fait en peintre-poète. […] Et la réponse de Whistler est vraiment belle, quand on lui demande, combien il a mis de temps à peindre sa toile, et qu’il jette dédaigneusement : « Une ou deux séances », et que sur les oh ! qui s’élèvent, il ajoute : « Oui, je n’ai mis à peindre qu’une ou deux matinées mais la toile a été peinte avec l’expérience de toute ma vie !  […] Il nous les peint, comme des juifs-errants, n’ayant que le repos des dortoirs de refuge, et sentant bien qu’ils ont contre eux, gens de passage, la localité des gares, mais au fond se considérant comme une aristocratie, et ne consentant pas à être assimilés aux lampistes, au bas personnel de la compagnie.

555. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « III — I » pp. 12-13

Cela peint nos mœurs littéraires.

556. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 563-564

Prétendre égayer un Lecteur, en faisant dire par un Sultan à son premier Ministre : Taisez-vous, Visir, vous raisonnez comme un Abbé ; & en faisant répondre au Visir : Votre Hautesse me fait trop d’honneur ; peindre une Reine, en lui donnant des yeux qui ne finissoient pas, des yeux chargés de tendresse, des éternels bras dont elle ne savoit que faire;  ajouter à cela des gentillesses que la plume d’une femme ne devroit jamais laisser échapper ; c’est manquer tout à la fois au costume, à la Langue, & à la décence.

557. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 299-300

Sans se répandre sur tous les objets, comme font ces Ecrivains qui ne se proposent d'autre but que d'écrire, il ne peint jamais que les défauts & les vices dont il désire de guérir les hommes ; sa maniere de les présenter est très-capable de produire cet effet.

558. (1763) Salon de 1763 « Sculptures et gravures — Vassé »

Je vous ai invité d’aller voir les deux tableaux du Martyre de saint Gervais et de saint Protais peints par Le Sueur.

559. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Jollain »

Jollain l’amour enchaîné par les grâces. imaginez l’amour assis sur une petite éminence au milieu des trois grâces accroupies ; et ces grâces n’en ayant ni dans leurs attitudes, ni dans leurs caractères, maussadement groupées, maussadement peintes ; la tête de l’amour si féminisée qu’on s’y tromperait, même à jeûn ; ni finesse, ni mouvement, ni esprit.

560. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Deschamps, Antony (1800-1869) »

Théophile Gautier Antony Deschamps imita avec bonheur l’austère allure du style dantesque et peignit dans ses Italiennes le pays des chênes verts et des rouges terrains avec le contour net de Léopold Robert et la solide couleur de Schnetz.

561. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 221-222

A cela près, il étoit difficile de réunir dans cet Ouvrage plus de sagacité pour démêler les passions & les caprices des hommes, plus d’adresse à les développer, plus d’énergie & de vivacité pour les peindre.

562. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — II. (Fin.) » pp. 213-233

Catherine de Médicis y est peinte dans sa dissimulation et ses entrecroisements d’artifices où souvent elle se prend elle-même, ambitieuse du souverain pouvoir sans en avoir la force ni le génie, et tâchant d’y atteindre par ruse ; usant à cet effet, comme nous dirions aujourd’hui, d’un système continuel de bascule, « réveillant et élevant tantôt cette faction, et tantôt endormant ou rabaissant celle-là ; s’unissant quelquefois avec la plus faible par prudence, de peur que la plus forte ne l’accable, quelquefois avec la plus forte par nécessité, et parfois se tenant neutre quand elle se sent assez puissante pour leur commander à toutes deux, mais n’ayant jamais intention de les éteindre tout à fait ». […] Il en est qui sont peints, en passant, d’un seul trait qu’on remarquerait dans Tacite et qui échappe ici tout simplement. […] C’est trop nous arrêter à des faiblesses et à des travers : Mézeray s’est mieux peint, par le meilleur côté de lui-même, dans ses Histoires.

563. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — I. » pp. 234-253

Quand un homme se peint dans ses ouvrages, surtout du côté de la volupté, il intéresse toujours, surtout les jeunes gens ; on voudrait avoir vécu avec ces aimables débauchés d’Anet et du Temple, et ces messieurs à Roissy. […] Il a peint en quelques pages légères et d’une touche inimitable ces promenades, ces cavalcades matinales et familières, où la reine Marie-Antoinette ravissait et effleurait les cœurs, et ne cessait de mériter les respects : il nous a rendu cette reine aimable et calomniée sous ses vraies couleurs, comme il fera également de tous les illustres souverains qu’il a connus, de l’impératrice Catherine, de Frédéric le Grand, de Joseph II, de Gustave III. […] Parmi les ouvrages décousus échappés au prince de Ligne dans la première moitié de sa vie, et qui le peignent le mieux à cette date, je distingue ce qu’il a écrit sur les jardins à l’occasion de ceux de Belœil.

564. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — I. » pp. 204-223

L’Histoire de Mme de Luz, petit roman du temps de Henri IV, sous prétexte de peindre une femme noble et touchante, victime de machinations ou de malheurs, n’offre que des situations odieuses et dont l’image offense sans que rien de pathétique attendrisse ou console. […] Quant aux Confessions du comte de…, ce sont les mémoires d’un roué, d’un jeune colonel du commencement du xviiie  siècle, et qui présente une première ébauche de ces autres héros fictifs ou réels, les Valmont et les Lauzun : on y parcourt une liste de bonnes fortunes, à travers lesquelles l’auteur a la prétention de peindre une collection de caractères de femmes, la femme de qualité, l’Anglaise, l’Espagnole, la coquette, la dévote, la caillette, la marchande, la financière ; mais les esquisses sont si rapides et si peu gracieuses, les teintes si monotones, qu’on fait bientôt comme le héros qui les confond et qui les oublie. […] Duclos, dans ses écrits, a beaucoup de ces petits tableaux plus exacts encore que satiriques, qui peignent un travers de la société de son temps et quelques-unes de ces sottises qui furent contagieuses un jour.

565. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

Pour aller droit à la réformation des mœurs, il commençait toujours par établir sur des principes bien liés et bien déduits une proposition morale, et après, de peur que l’auditeur ne se fît point l’application de ces principes, il la faisait lui-même par un détail merveilleux où la vie des hommes était peinte au naturel. […] C’est s’en faire une idée trop contrite et trop recueillie : pour se représenter avec vérité Bourdaloue vivant et éloquent, et pour corriger une impression trop monotone, il faut y joindre le portrait peint par Mlle Chéron et gravé par Rochefort : Bourdaloue y a les yeux ouverts, vifs, le nez assez aquilin, la figure maigre et un peu longue, la bouche fine, la physionomie animée, spirituelle et pénétrante ; enfin il n’a pas les yeux fermés, la lèvre close et la physionomie morte (ou au repos) du portrait peint par Jouvenet et gravé par Simonneau.

566. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — II. (Suite.) » pp. 434-453

Daru était au camp de Boulogne, et cette lettre peint assez bien le mouvement de la petite société littéraire dans son temps de parfaite union : Nos déjeuners ont recommencé le dimanche 14 (brumaire). […] D’abord, vous vous êtes débarrassé en maître de la plus pénible des corvées, celle de parler de soi… Ensuite, digne ami d’Horace, vous avez décomposé l’art dramatique avec une profondeur qui m’a fait frémir pour l’intéressant Collin ; mais bientôt le peintre habile, en ne ménageant aux curieux que le jour favorable à son modèle, a glissé adroitement sur la sévérité de l’ancienne école pour ne nous peindre que le brillant de la nouvelle. […] Tandis que vous faites capituler les villes, moi je médite une comédie que j’appelle jusqu’ici Les Capitulations de conscience : ce titre est un peu long ; mais, comme il exprime bien ce que je veux peindre, je vous le livre.

567. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — I » pp. 395-413

Mais en écrivant ce qui lui est arrivé, elle raconte ce qu’ont fait les autres, ce qu’ils ont dit et machiné ; elle les peint et elle les montre à nu dans leurs intriguesah, dans leurs vices, dans leur nature fantasque ou brutale, dans leur fonds de grossièreté épaisse et encore mal civilisée. À côté des ministres pervers et corrompusai, dont elle eut à souffrir, elle peint également ses parents, qu'elle se pique de vénérer, le roi son père, la reine sa mère, quelques-unes de ses sœurs, le roi son frère qu’elle aime tendrement, et dont, à certains endroits elle parle avec beaucoup d’aigreur, parce que la dernière partie des mémoires fut écrite dans un temps où elle était brouillée avec lui. […] [1re éd.] elle les peint, elle les montre à nu dans leurs intrigues ai.

568. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVe entretien. Littérature grecque. L’Iliade et l’Odyssée d’Homère » pp. 31-64

C’est une seconde création que Dieu a permis à l’homme de feindre en reflétant l’autre dans sa pensée et dans sa parole ; un verbe inférieur, mais un verbe véritable, qui crée, bien qu’il ne crée qu’avec les éléments, avec les images et avec les souvenirs des choses que la nature a créées avant lui : jeu d’enfant, mais jeu divin de notre âme avec les impressions qu’elle reçoit de la nature ; jeu par lequel nous reconstruisons sans cesse cette figure passagère du monde extérieur et du monde intérieur, qui se peint, qui s’efface et qui se renouvelle sans cesse devant nous. […] Le cinquième élément nécessaire de cette création ou de cette poésie, c’est le don d’exprimer par la parole ce que nous voyons et ce que nous sentons en nous-mêmes, de produire en dehors ce qui nous remue en dedans, de peindre avec les mots, de donner pour ainsi dire aux paroles la couleur, l’impression, le mouvement, la palpitation, la vie, la jouissance ou la douleur qu’éprouvent les fibres de notre propre cœur à la vue des objets que nous imaginons. […] On appelait le chant, alors, tout ce qui parle, tout ce qui exprime, tout ce qui peint à l’imagination, au cœur, aux sens, tout ce qui chante en nous, la grammaire, la lecture, l’écriture, les lettres, l’éloquence, les vers, la musique ; car ce que les anciens entendaient par musique s’appliquait à l’âme autant qu’aux oreilles.

569. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIIe entretien. Tacite (1re partie) » pp. 57-103

Les peuples mûrs et touchant à la décadence veulent des portraits peints en traits de sang, des retours vers la vertu antique, des larmes amères sur la corruption présente, des sentences brèves, mais succulentes, jaillissant de l’événement comme le cri des choses, enfin une philosophie à la fois plaintive et amère, qui consterne et qui relève l’âme par l’honnête et douloureux contraste entre l’image de la vertu antique et le désespoir de la liberté perdue ! […] Il a tout vu, tout senti, tout sondé, tout pesé, tout aimé, tout haï, tout peint, tout conclu. […] XXII Tacite peint en satiriste consommé les jactances et le faux enthousiasme des hommes intéressés que la peur avait dissipés, que la peur ramène.

570. (1829) De la poésie de style pp. 324-338

On y retrouve pour ainsi dire l’homme aux goûts simples qui, dans sa jeunesse, étudiait et écrivait au milieu des forêts et des prairies, qu’on ne voyait jamais dans les rues de Bayreuth sans une fleur sur sa poitrine, et que ses biographes nous peignent travaillant et méditant dans un coin de la même chambre où sa mère, sa pauvre et humble mère, se livrait activement aux travaux du ménage, soignant le feu de son poêle et faisant sa cuisine, sans que le bruit des occupations domestiques parût troubler son fils, pas plus que le roucoulement des pigeons qui voltigeaient dans cette chambre. […] Rousseau veut peindre cette espèce d’obsession de l’artiste à l’approche du génie, ces longs travaux qui précèdent la création, ces fureurs, ces transports pour arriver aux traits de vive flamme : M.  […] Il s’élance avec Mazeppa ; il peint au long son supplice et son triomphe : on dirait même qu’il n’a pas voulu faire autre chose ; on le dirait, car il est déjà aux trois quarts de son œuvre.

571. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Vauvenargues. (Collection Lefèvre.) » pp. 123-143

Un moment il entre avec eux, il les suit dans leurs subtilités pour mieux les réduire : Mais peut-être que les vertus que j’ai peintes comme un sacrifice de notre intérêt propre à l’intérêt public, ne sont qu’un pur effet de l’amour de nous-même. […] En l’écrivant, Vauvenargues ne songeait certes pas à faire son portrait ; mais il se retraçait et se proposait son plein idéal à lui-même : Quand je trouve dans un ouvrage une grande imagination avec une grande sagesse, un jugement net et profond, des passions très hautes, mais vraies, nul effort pour paraître grand, une extrême sincérité, beaucoup d’éloquence, et point d’art que celui qui vient du génie, alors je respecte l’auteur : je l’estime autant que les sages ou que les héros qu’il a peints. […] Les esprits pesants, les sophistes ne reconnaissent pas la philosophie lorsque l’éloquence la rend populaire, et qu’elle ose peindre le vrai avec des traits fiers et hardis.

572. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

Lacretelle, l’un des hommes qui ont le mieux connu et le mieux peint Florian par tous ses aspects, nous raconte cette anecdote, avec beaucoup d’autres traits dont nous profitons. […] Dans Le Laboureur de Castille, qui est comme son Paysan du Danube, Florian a trouvé quelques accents énergiques et fermes pour peindre le costume et l’air de ce rustique et loyal sujet. […] Dans sa fable d’Hercule au ciel, Florian commence par ces lignes prosaïques : Lorsque le fils d’Alcmène, après ses longs travaux, Fut reçu dans le ciel, tous les dieux s’empressèrent De venir au-devant de ce fameux héros… Certes, La Fontaine, ayant à peindre Hercule enlevé de son bûcher dans l’Olympe, et s’asseyant tout en feu entre les dieux, s’y serait pris autrement.

573. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

D’Aubigné, calviniste opiniâtre ; Montluc, catholique cruel, nous peignent les deux camps ; la reine Marguerite nous peint la Cour. […] Une lettre admirable de lui, et qui le peint dans la sérénité de son rajeunissement final, est celle qu’il adresse à Achille de Harlay, retiré également des charges publiques, sur les douceurs de la retraite, sur les charmes d’une étude paisible et variée, désormais toute confinée à l’intérieur du cabinet, et dont on se dit qu’on ne sortira plus : « J’ai d’un côté mes livres, ma plume et mes pensées ; d’un autre, un bon feu tel que pouvoit souhaiter Martial quand, entre les félicités humaines, il y mettoit ces deux mots : focus perennis.

574. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

Cela peint l’esprit de Paris, où le mépris et l’opinion sont impuissants ; où il suffit d’amuser pour couvrir tout. […] Il est mis en prison à l’Abbaye ; quelques heures avant les massacres du 2 septembre, il en est tiré par la générosité de Manuel, qui vient lui dire : « Sortez à l’instant de ce lieu. » — Je lui jetai mes bras au corps, s’écrie dramatiquement Beaumarchais, sans pouvoir lui dire un seul mot : mes yeux seuls lui peignaient mon âme ; je crois qu’ils étaient énergiques s’ils lui peignaient tout ce que je pensais !

575. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Paul-Louis Courier. — I. » pp. 322-340

Quoi qu’il en soit du procédé, on a cette suite de lettres, auquel il s’en est ajouté depuis beaucoup d’autres, et plus anciennes, et plus récentes ; de telle sorte que la vie de Courier se retrouve peinte en entier dans sa correspondance. […] Mais, pour peindre, il en revient encore aux anciens ; il voudrait, comme André Chénier, traiter un sujet moderne dans le goût antique ; et pour cela il ne faut pas que le sujet soit trop considérable ni très compliqué. […] qui saura la raconter et la peindre ?

576. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Qui a su mieux peindre les situations, enchaîner les événements, perdre et retrouver d’une façon plus naturelle un si grand nombre de personnages, et, par une transition de deux vers, remettre son lecteur au fait de la suite d’une longue histoire racontée dans les chants précédents ? […] Les contemporains nous l’ont peint tel qu’il était dans la société et dans l’habitude ordinaire, très vif, extrêmement aimable, plein de saillies originales, plaisant, mais sans causticité, « facilement ému par la résistance et par la contradiction » ; ayant « de petites colères qui faisaient rire ceux qui en étaient témoins, et dont il ne tardait pas aussi à rire lui-même » ; il avouait qu’il lui était plus facile de se contenir sur de grands objets que sur de petits. […] Dans cette course rapide et ce séjour de dix mois à travers l’Italie, il y a certes des côtés qu’il n’a fait qu’entrevoir en courant, et où d’autres talents trouveront matière à conquête ; la Campagne romaine, par exemple, les collines d’alentour, Tibur, la Villa Adriana, sont des lieux dont Chateaubriand un jour évoquera le génie attristé et nous peindra les mélancoliques splendeurs : de Brosses reste le premier critique pénétrant, fin, gai et de grand coup d’œil, qui a bien vu dans ses contradictions et ses merveilles ce monde d’Italie.

577. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Un contemporain, en le voyant à l’époque de sa gloire, et en ayant présent son buste par Houdon, nous l’a peint comme il suit : Il était, dit le duc de Nivernais, de la taille la plus haute et la mieux proportionnée. […] Barthélemy avait songé d’abord à faire voyager un étranger, un Français, en Italie, vers le temps de Léon X, et à peindre par ce moyen la pleine et riche Renaissance ; mais, à la réflexion, il se trouva moins propre à un tel sujet, qui le tirait de son domaine favori et le jetait dans un monde d’art, de poésie moderne et de peinture, dans tout un ordre de sujets qui lui étaient médiocrement familiers, et il transporta alors cette idée en Grèce, en supposant un Scythe qui la visiterait vers le temps de Philippe. […] Elle réfléchissait dans un âge où l’on commence à peine à penser… L’abbé Barthélemy a peint en mainte occasion Mme de Choiseul ; il l’a placée, elle et son mari, sous les noms de Phédime et d’Arsame dans le Voyage du jeune Anacharsis : « Phédime discerne d’un coup d’œil les différents rapports d’un objet ; d’un seul mot, elle sait les exprimer.

578. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Saint François de Sales. Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M. Sayous. 1853. » pp. 266-286

Ce petit peuple pauvre, intelligent, « éminemment sociable, porté aux mœurs douces, gai et spirituel, fin jusqu’à la subtilité, plein de bonhomie pourtant », est très bien peint par M.  […] De là, cet agréable adolescent, dit un de ses biographes qui l’a peint avec complaisance dans cette première beauté de sa jeunesse, retourna en Savoie et fut envoyé en Italie pour y étudier le droit à Padoue, toujours sous la conduite du même précepteur. […] On n’a jamais mieux fait le portrait d’un esprit, ni rendu aussi sensiblement des choses qui semblent inexprimables : lumière, suavité, netteté, vigueur, discernement et dextérité céleste, ordonnance et économie des vertus dans une âme, tout s’y représente et s’y peint d’un trait ferme et définitif.

579. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Puis sans maître, sans guide, sans conseil, il s’est mis à peindre avec amour et rage. […] * * * — Peindre quelque part la nervosité d’une héritière d’une grande famille, donnant des leçons de piano à une jeune fille de la bourgeoisie, pendant qu’elle a sous les yeux, de l’autre côté de la rue, l’ancien hôtel de sa famille. […] * * * — Un terrible mot pour peindre la marche des gens, attaqués d’une maladie de la moelle épinière : « Oui il commence à stepper ! 

580. (1767) Salon de 1767 « Adressé à mon ami Mr Grimm » pp. 52-65

Il y a donc une chose qui n’est pas celle que vous avez peinte, et une chose que vous avez peinte qui est entre le modèle premier et votre copie… mais où est le modèle premier… un moment, de grâce, et nous y viendrons peut-être. […] Dites que les préjugés nationaux n’étant pas plus respectés dans mes lignes que les mauvaises manières de peindre, les vices des grands que les défauts des artistes, les extravagances de la société que celles de l’académie, il y a de quoi perdre cent hommes mieux épaulés que moi.

581. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

Désormais, au lieu de ces poëmes flottants, rattachés les uns aux autres sous l’agrafe d’un même nom et d’une même pensée, paysages bretons, peints à la sépia, un peu tremblés par la main du peintre, mais qui nous pénètrent pourtant de leur touchante couleur brune, Brizeux publiera des vers ouvragés et creux, sous des titres tout à la fois ambitieux et vulgaires. […] Wordsworth qui, moins local que Brizeux, a peint comme lui des paysans, des colporteurs, des charretiers, des mendiants, des fileuses, des femmes qui vont au lavoir, tous ces êtres de réalité naturelle, pittoresque et charmante, plus près que nous de la poésie des choses, Wordsworth a des manières de les regarder très-nouvelles, et nous nous permettrons de dire : très-inventées, car on invente pour arriver au vrai. […] Homère, quand il peint Nausicaa au bord de la fontaine, est toujours Homère.

582. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Jean Richepin »

car Victor Hugo nous a donné une cour des Miracles, dans sa Notre-Dame de Paris, de manière à prouver qu’il pourrait peindre, s’il voulait, ressemblant et puissant tout à la fois. […] Le poète de La Chanson des Gueux ne les peint pas que de par dehors, pour le seul plaisir de faire du pittoresque. […] Il sait s’incarner dans les gueux qu’il peint.

583. (1868) Rapport sur le progrès des lettres pp. 1-184

on vous peindra comme chrétien. […] À force de peindre on finirait par perdre l’habitude de juger, et qu’est-ce que la critique sans jugement ? […] X. qu’il nomme Grandet ou Séchard, Walter Scott peint en pied Louis XI, Cromwell ou Charles Ier. […] L’Inde, l’Égypte, la Chine, peintes avec quelques traits caractéristiques, y figurent tour à tour dans tout l’éclat de leur bizarrerie. […] Et ce tableau qui semble peint avec la palette de Vélasquez, la Rose de l’infante !

584. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Avertissement. » pp. -

J’ai donc peint ce que j’éprouvois, & je crois que plusieurs Ecrivains sentent comme moi.

585. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 479-480

Scarron, pour peindre la délicatesse de l’esprit & du goût de Charleval, disoit que les Muses ne le nourrissoient que de blanc-manger & d’eau de poulet.

586. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 203-204

Quinault en fit une courtisanne, pour la rendre digne d’épouser Lully, & la peignit si bien sous le masque, que le sévere Boileau s’y trompa, & condamna Quinault à l’Enfer, & sa Muse aux prisons de St.

587. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Perroneau » p. 172

L’épaule est prise si juste qu’on la voit toute nue à travers le vêtement, et ce vêtement est à tromper : c’est l’étoffe même pour la couleur, la lumière, les plis et le reste ; et la gorge, il est impossible de la faire mieux : c’est comme nous la voyons aux honnêtes femmes, ni trop cachée, ni trop montrée, placée à merveille, et peinte, il faut voir.

588. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 48, des estampes et des poëmes en prose » pp. 484-485

On voit de Paris par le secours d’une estampe, les plus grandes beautez que Raphaël ait peintes sur les murs du vatican.

589. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

Cependant les Précieuses ridicules, pièce satirique et personnelle, peignent des vices de salons propres à la nation française. […] Chaque bourgeois y croyait trouver son voisin peint au naturel ; et il ne se lassait point d’aller voir ce portrait : le spectacle d’ailleurs, quoique outré et hors du vraisemblable, mais parfaitement bien exécuté, attirait les spectateurs ; et on laissait gronder les critiques sans faire attention à ce qu’ils disaient contre cette pièce. […] Je ris des noirs accès où je vous envisage, Et crois voir en nous deux, sous mêmes soins nourris, Les deux frères que peint l’École des maris, Dont… ALCESTE. […] À peine Orgon a-t-il parlé, qu’il se peint tout entier par un de ces traits qui ne sont qu’à Molière. […] L’art du poëte comique n’est pas de peindre les travers de la pauvre humanité dans leurs plus grands excès, mais de saisir ce point unique qui excite tout à la fois la réflexion et la gaieté du spectateur.

590. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1885 » pp. 3-97

Il peint les choses lui tombant sous la vue, des hommes, des femmes, des paysages, des étoffes, que sais-je, mais, il va très peu chercher les motifs de sa palette dans les bouquins. […] Et Daudet dit qu’il aimerait à peindre cet engourdissement endormant de la douleur dans le plus secret de l’être, décrit joliment le côté enfantin, que ces choses amènent chez l’homme, avoue le besoin qu’il a, lui, de prendre la main de sa femme, dans un attouchement de bébé, quand le calmant opère. […] Les anatomies de David, dans ses compositions peintes, ne sont pas des dessins de peintre : ce sont des épures d’architecte. […] Cette mère dont il cause volontiers, il me la peint, avec des paroles tendres. […] Des tables en bois blanc peintes en noir, quelques chaises de paille, et sur la lèpre des murs, les croquis de la rédaction : voilà le mobilier.

591. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 294-295

Aucun homme de Lettres n’oubliera ce Vers si caractéristique, où, d’un seul trait, digne de Michel-Ange, il peint le Temple de la Mort, Le Temps, qui détruit tout, en affermit les murs.

592. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » pp. 311-312

Ses Réflexions sur la Peinture, ses Observations sur le Poëme de l’Art de peindre, ses Lettres critiques sur Cénie, sur l’Histoire du Parlement d’Angleterre, & sur quelques autres Ouvrages, n’ont eu qu’un succès momentané.

593. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » pp. 363-365

Il a cultivé différentes branches de la Littérature ; & ses Productions, soit didactiques, soit historiques, soit morales, annoncent en général l’homme instruit, l’observateur éclairé qui connoît les hommes, & sait peindre les vices & les vertus avec les couleurs qui leur sont propres ; mais trop de diffusion, quelquefois de la sécheresse, & assez souvent un ton peu naturel, défigurent son style, & l’excluent du nombre des bons Ecrivains.

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