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702. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

Passons l’éponge sur ce moment d’illusion et d’oubli dans lequel nous ne pourrions d’ailleurs faire un seul pas sans obscurité ou sans éblouissement. […] On est plus disposé à passer cet excès à saint François de Sales, en raison de son siècle, et aussi à la faveur d’une certaine poésie franche qui s’y mêle et qui ne se donne que comme poésie. […] On le lui passe comme à quelqu’un qui tient d’Amyot, qui est venu avant Bossuet et qui s’est formé avant Malherbe. […] Je n’en dis pas plus, et je passe vite. […] Si peu qu’il reste de désirs et de sensibilité d’amour-propre, on a toujours ici de quoi vieillir : on n’a pas ce qu’on veut, on a ce qu’on ne voudrait pas ; on est peiné de ses malheurs, et quelquefois du bonheur d’autrui ; on méprise les gens avec lesquels on passe sa vie, et on court après leur estime.

703. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — I. » pp. 180-197

Vous aimez Fénelon, vous chérissez ses grâces, son insinuation noble et fine, ses chastes élégances ; vous lui passeriez même aisément ce qu’on appelle ses erreurs : et Bossuet les a combattues, ces erreurs, non seulement avec, force, mais à outrance, mais avec une sorte de dureté. […] L’abbé Victor Vaillant, ayant à passer sa thèse de docteur à la faculté des lettres de Paris en 1851, choisit pour son sujet une Étude sur les sermons de Bossuet d’après les manuscrits. […] Il rendait remarquables les endroits par où il passait, par la profusion de ses grâces. En cette bourgade, il n’y a plus d’aveugles ni d’estropiés : sans doute, disait-on, le débonnaire Jésus a passé par là. […] » On lui passe tout cela, à cause de sa plume de cygne.

704. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « L’abbé de Marolles ou le curieux — I » pp. 107-125

Il n’y a pas de traductions, trahisons et crimes envers les anciens qu’on ne passe de grand cœur au bon abbé, s’il n’y avait pas d’autre chemin pour en venir à ses mémoires. […] Ses frères se montraient aussi amateurs d’épées, de chevaux, de chiens et de chasse, que, lui, il était posé, enjoué, amateur de livres et de peintures, de musique, de contes et d’histoires du temps passé. […] Cependant le capitaine Marolles avait quitté sa compagnie des Cent-Suisses et était passé au service de la maison de Nevers, en qualité de gouverneur du jeune duc de Rethelois. […] Il s’occupa de lui achever son éducation et, pour cela, de mêler l’utile et l’agréable, dans les soirées qu’il passait en tiers avec elle et avec sa gouvernante. […] [NdA] Je demande qu’on me passe ce mot de collectionneur qui m’est nécessaire et qui exprime la manie ; collecteur ne dit pas assez.

705. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Essai sur l’Histoire générale des sciences pendant la Révolution française. »

À chaque relais venaient des gendarmes pour demander des papiers ; un simple mot du jeune homme les satisfaisait, et l’on passait. […] Un souffle généreux y a passé, et ce souffle est celui qui animait l’élite des jeunes générations se remettant en marche avec espérance au lendemain de la Terreur. […] Pour toute réponse, un d’eux (Berthollet) fait apporter un filtre, y passe la liqueur, et n’hésite pas à en boire : tous les autres suivent son exemple, « Comment, lui dit Robespierre, osez-vous boire de ces eaux empoisonnées ?  […] Biot dans le passé. […] Que s’était-il passé dans l’intervalle ?

706. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La Grèce en 1863 par M. A. Grenier. »

faut-il que celles que l’on a le plus admirées et plaintes, le plus exaltées et célébrées, nous fassent faute à quelques années de là, nous donnent le regret, la confusion et presque le remords de nos espérances, et que cette misérable vie qui, passé une certaine heure, se compose pour nous d’une suite d’affronts secrets et d’échecs individuels, ne puisse s’achever sans que nous ayons vu coucher l’un après l’autre tous nos soleils, s’abîmer dans l’Océan toutes nos constellations, pâlir au fond du cœur toutes nos lumières ? […] La Grèce, depuis que ses dissensions intestines ont éclaté, depuis qu’elle a cru devoir se passer du roi modeste qu’elle avait gardé pendant trente ans et en quêter partout un autre, a présenté à ses anciens amis et admirateurs un spectacle bien digne de réflexion et qui reporte la pensée avec d’étranges vicissitudes vers des temps de meilleure mémoire. […] Rends honneur à tout, à l’antiquité, aux hauts faits du passé, aux fables elles-mêmes…, etc. » Le précepteur et professeur peut continuer longtemps sur ce ton : le spirituel élève d’Athènes, à peine débarqué, songea bien vraiment à ces recommandations de ses maîtres ! il regarda, il vit tout, il pensa de son chef, et dit gaiement, impertinemment et avec une grâce des plus vives et des plus mordantes, tout ce qu’il pensait ; il se passa toutes ses saillies et ses fantaisies à la barbe des vieux murs et des grands ancêtres. […] La race grecque est encore, malgré tous ses mélanges et ses altérations, une race d’élite, aisément reconnaissable : « On a beau considérer à Athènes, ou dans une autre ville grecque, toutes les physionomies qui passent et repassent devant les yeux, il n’y en a pas une qui soit vulgaire, niaise, assottie, plate, éteinte, bonasse, moutonnière, badaude, végétative.

707. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

Des sentiments de famille naturels et purs, une facilité de talent non combattue, bientôt l’émotion rapide, mobile, du plaisir et de la rêverie, c’est là le fonds entier de sa jeunesse, ce sont les caractères qui, en simples et légers délinéaments, pour ainsi dire, vont passer de l’âme de Millevoye dans sa poésie. […] Mais, un jour que le jeune Millevoye était, au fond du magasin, absorbé dans une lecture, le chef passa et lui dit : « Jeune homme, vous lisez ! […] La faible couleur est si passée, que le discernement n’y prend plus. […] Il essayait du luxe et de la simplicité tour à tour, et passait d’un entresol somptueux à quelque riante chambrette d’un village d’auprès de Paris. […] Il avait passé les six dernières semaines à Neuilly, et ne revint à Paris que tout à la fin ; la veille de sa mort, il avait demandé et lu des pages de Fénelon.

708. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXe Entretien. Souvenirs de jeunesse. La marquise de Raigecourt »

Depuis cette perte, il alla plusieurs fois en pèlerinage à Jérusalem, et vécut dans une modeste obscurité, après avoir passé son enfance dans toutes les promesses des cours, et sa jeunesse dans toutes les opulences et dans toutes les délices de son double mariage. […] Je me souviens de l’avoir vu caracoler à la suite de ce prince, qui passait, en 1814, une revue sur le Carrousel. […] Je passai peu de jours sans le voir. […] Il venait souvent me prendre dans sa calèche pour nous promener au bois de Boulogne ou à Saint-Cloud ; ses chevaux étaient magnifiques, ses équipages princiers, les grandes guides de son attelage étaient d’or et de soie ; ses cochers ne les maniaient qu’avec des gants blancs pour ne pas les ternir ; les livrées étaient de la même recherche ; il attirait les regards de la foule partout où il passait. […] Quand l’hiver fut remplacé par le printemps, il me demanda de l’accompagner dans sa résidence d’été, et d’y passer avec lui et ses amis quelques jours.

709. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les deux Tartuffe. » pp. 338-363

Je lui emprunte ces lignes intéressantes : « … Au siècle passé… l’emploi des premiers comiques s’appelait aussi l’emploi des valets, et la garde-robe des acteurs qui tenaient ces sortes de rôles se bornait presque à des habits de livrée. […] Tartuffe passa donc des comiques aux premiers rôles. […] « Il ne dit point : Ma haire et ma discipline, au contraire ; il passerait pour ce qu’il est, pour un hypocrite, et il veut passer pour ce qu’il n’est pas, pour un homme dévot ; il est vrai qu’il fait en sorte que l’on croie, sans qu’il le dise, qu’il porte une haire et qu’il se donne la discipline… S’il se trouve bien d’un homme opulent, à qui il a su imposer, dont il est le parasite… il ne cajole point sa femme, il ne lui fait du moins ni avance, ni déclaration ; il s’enfuira, il lui laissera son manteau, s’il n’est aussi sûr d’elle que de lui-même. […] « S’il vient à roter… », entendez : si cela lui arrive, par hasard… comme cela peut arriver à tout le monde… Du Tartuffe violemment caricaturé par Dorine, passons au Tartuffe pieusement et béatement dessiné par Orgon. […] Voici ce qui s’est passé, d’après Orgon.

710. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

Après n’avoir fait que passer à Londres et en Hollande, il alla à Vienne, et y résida habituellement jusque vers 1843, sauf les voyages qu’il fit dans l’intervalle. […] Sous ce rapport, rien d’aussi remarquable que ce qui se passe en Égypte n’est apparu depuis longtemps. […] Mais quand l’homme se trouve en face d’une difficulté réelle, disproportionnée avec ses forces, il se résigne ; et si l’expérience lui a enseigné que le temps et un effort réglé et continu sont les seuls moyens du succès, il prend alors l’habitude de la patience, et cette habitude passe dans sa nature. […] L’Armée a été mon berceau, j’ai passé ma vie dans ses rangs, j’ai constamment partagé ses travaux, et plus d’une fois j’ai versé mon sang dans ces temps héroïques dont la mémoire ne se perdra jamais. Parvenu à cet âge où tout l’intérêt et les consolations de la vie sont dans les méditations sur le passé, je lui adresse un dernier souvenir.

711. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — II. (Suite.) » pp. 149-166

Il visita l’Écosse dans l’été même de cette année 1759, et il s’y lia avec les hommes de premier mérite dont cette contrée était alors si pourvue, et qui y formaient un groupe intellectuel ayant un caractère particulier, l’historien Robertson, David Hume, Ferguson et plusieurs autres : En somme, je dois dire, écrivait-il en revenant sur ce voyage d’Édimbourg, que ces six semaines que j’y ai passées sont, je le crois, celles du bonheur le mieux rempli et le plus dense que j’aie jamais eu dans aucun temps de ma vie ; et l’agréable et instructive société que j’y ai trouvée en telle abondance a laissé une si douce impression dans ma mémoire, que, si de forts liens ne me tiraient ailleurs, je crois que l’Écosse serait le pays que je choisirais pour y passer le reste de mes jours. […] Je vais partir du vieux monde pour le nouveau, et je me figure que je sens quelque chose de pareil à ce qu’on éprouve quand on est près de passer de ce monde à l’autre : chagrin au départ ; crainte du passage ; espérance de l’avenir. […] Franklin, élu membre de l’Assemblée de Pennsylvanie et directeur général des Postes, passe un peu plus de deux années à prendre la part la plus active aux affaires locales. […] Pendant les dix années de résidence de Franklin, la question passa par bien des phases, par bien des variations successives avant l’explosion finale ; mais on peut dire pourtant qu’elle ne recula jamais. […] Après plus d’une année passée dans les travaux les plus actifs et les missions les plus fatigantes, après avoir été envoyé, au sortir à peine de l’hiver, pour tenter d’insurger le Canada, il est choisi pour aller traiter auprès de la cour de France et pour s’efforcer de la rallier à la cause américaine.

712. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Gustave Droz » pp. 189-211

Gustave Droz, qui fixe sous son fusain couleur de chair… (trop couleur de chair…) la chose qui passe, l’attrait qui s’évanouit, la mode qui va passer, n’est pas seulement qu’un La Bruyère mauvais sujet, c’est aussi un Marivaux. […] C’est bien souvent un de Musset par la sveltesse, le tour d’imagination, le mouvement et l’étincelle ; mais c’est un de Musset qui a passé par l’atelier, et il lui est resté, à certaines places, un peu de Mistigris, — que j’aurais voulu effacer. […] Mais, justement, Gustave Droz passe tout le temps que dure son livre à se moquer de ce qui pourrait changer sa nature et élever à sa plus haute puissance son sentiment paternel. […] D’écrivain délicieusement personnel, Gustave Droz est passé romancier impersonnel et pénétrant, et c’est comme romancier qu’il faut le prendre et le juger. […] Le livre de Droz, c’est tout ce qui va se passer autour de cette source : toute une comédie, sinistre, au fond, de coquinerie sacrilège, mais gaie par endroits et par-dessus, comme Les Fourberies de Scapin.

713. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IV : M. Cousin écrivain »

. — Il contredit toutes les habitudes françaises, il dément toutes les siennes, il se fait disciple de Hegel, en déclarant que la méthode expérimentale ne convient pas à la philosophie de l’histoire, qu’il faut, pour la construire, trouver a priori les idées fondamentales de la raison, que ces idées ont dû passer dans les faits, que les grandes périodes de l’histoire les représentent, et qu’on ne peut trouver en histoire, comme en physique, que le fini, l’infini et leur rapport. — Il s’apprête des embarras graves, en jetant imprudemment à chaque page des phrases panthéistes ; en disant par exemple que la création25 est fort aisée à comprendre et que Dieu créa le monde comme nous créons nos actions, « qu’il crée parce qu’il est une force créatrice absolue, et qu’une force créatrice absolue ne peut pas ne pas passer à l’acte. » On se souvient encore de la manière dont il absolvait l’industrie, la guerre, la philosophie, la géographie, et beaucoup d’autres choses. C’étaient de grandes revues passées à tire-d’aile ; le philosophe, appuyé sur le fini, l’infini et leur rapport, se tenait partout en équilibre. […] Ainsi construite, elle laisse dans l’esprit un plaisir tranquille et une croyance sereine ; nous avons passé si aisément et si naturellement d’un point à l’autre, qu’il nous semble que nous sommes dans la vraie route, et nous nous abandonnons désormais à la sage main qui nous a si bien guidés jusqu’ici. […] En disant que les axiomes et les notions de la raison sont dans la conscience, et font partie de la conscience, il leur attribue l’autorité et la certitude de la conscience ; comme la conscience a toujours passé pour infaillible, la raison, par contagion, devient infaillible. […] Les abstractions s’entre-choquent ; des formes obscures passent devant l’imagination troublée ; dans le cerveau s’agite et roule une ronde d’êtres métaphysiques, grandioses et vides, poésie confuse et sublime que réclament toutes les jeunes têtes d’Allemagne, et qui, avec la bière, suffit pour les remplir à vingt ans.

714. (1901) L’imagination de l’artiste pp. 1-286

Mais elle ne lui dit rien : il la regarde, la juge, et passe. […] La période de floraison est passée. […] Il est trop évident qu’ici l’on ne saurait s’en passer. […] La période géniale est passée. […] Il passe sans effort d’une interprétation à l’autre.

715. (1895) Impressions de théâtre. Huitième série

C’est que le ragoût de chien n’a pas pu passer. « Ah ! […] Le premier acte se passe dans sa boutique, le 10 août 1792. […] J’avais, il y a déjà sept ou huit ans, (comme le temps passe !) […] L’auteur n’a songé qu’à « passer la rampe », comme disent les malins. […] Et un tel passé s’écroulerait ?

716. (1902) La formation du style par l’assimilation des auteurs

Le fond passe avant la forme. […] On a fait un petit grillage pour empêcher qu’ils ne passent. […] Au commencement, je laissai les autres passer devant moi. […] Quand il entame les roses, toutes les espèces de roses y passent. […] La jeunesse se passe à désirer et la vieillesse à regretter.

717. (1895) Nouveaux essais sur la littérature contemporaine

Je ne sais ; et c’est, d’ailleurs, une question qu’on peut se passer de décider. […] Passe encore pour une maîtresse ! […] Les choses ont dû se passer comme les rapporte M.  […] Renan, et qui depuis déjà longtemps a passé dans les livres de ses nombreux disciples. […] Le fût-elle pour le passé, nous avons en nous ce qu’il faut pour faire que l’avenir ne ressemble pas au passé.

718. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

« Ce qui s’est passé avant ? […] La Révolution, fatale au pittoresque de la vie humaine, a passé par là. […] Et le passé de Tartufe ? […] Passe le maréchal de Saxe. […] Mais passe !

719. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Hialmar, très solennel, l’interroge sur son passé. […] ça ne se passe jamais ainsi dans la réalité. […] On passe devant Nice : éloge de Nice. […] Que s’est-il donc passé ! […] Que s’est-il donc passé ?

720. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Diderot »

On s’enferme pendant une quinzaine de jours avec les écrits d’un mort célèbre, poëte ou philosophe ; on l’étudie, on le retourne, on l’interroge à loisir ; on le fait poser devant soi ; c’est presque comme si l’on passait quinze jours à la campagne à faire le portrait ou le buste de Byron, de Scott, de Gœthe ; seulement on est plus à l’aise avec son modèle, et le tête-à-tête, en même temps qu’il exige un peu plus d’attention, comporte beaucoup plus de familiarité. […] Les révolutions passent sur les peuples, et font tomber les rois comme des têtes de pavots ; les sciences s’agrandissent et accumulent ; les philosophies s’épuisent ; et cependant la moindre perle, autrefois éclose du cerveau de l’homme, si le temps et les barbares ne l’ont pas perdue en chemin, brille encore aussi pure aujourd’hui qu’à l’heure de sa naissance. […] Or, le xviiie  siècle passe avec raison pour avoir été prodigue d’idées, familier et prompt, tout à tous, ne haïssant pas le déshabillé ; et quand il s’était trop échauffé en causant de verve, en dissertant dans le salon pour ou contre Dieu, ma foi ! […] Diderot dit que c’était une des plus puissantes affections de l’homme : « Un cœur paternel, repris-je ; non, il n’y a que ceux qui ont été pères qui sachent ce que c’est ; c’est un secret heureusement ignoré, même des enfants. » Puis continuant, j’ajoutai : « Les premières années que je passai à Paris avaient été fort peu réglées ; ma conduite suffisait de reste pour irriter mon père, sans qu’il fût besoin de la lui exagérer. […] Sa vie se passa de la sorte, à penser d’abord, à penser surtout et toujours, puis à parler de ses pensées, à les écrire à ses amis, à ses maîtresses ; à les jeter dans des articles de journal, dans des articles d’encyclopédie, dans des romans imparfaits, dans des notes, dans des mémoires sur des points spéciaux ; lui, le génie le plus synthétique de son siècle, il ne laissa pas de monument.

721. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (4e partie) » pp. 81-143

Que s’était-il passé ? […] Elle rentra pensive à la maison de la rue de l’Ouest où Jean Valjean, selon son habitude, était venu passer six semaines. […] Et le jour où vous avez passé devant moi ? […] J’ai cru vous voir passer une fois que je lisais les journaux sous les arcades de l’Odéon. […] Passons, c’est un étrange caprice.

722. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIVe entretien. Mélanges »

La duchesse de B*** passait pour sa mère. […] Dès ce jour, M. de Genoude fut considéré comme un transfuge qui passait des bras de la Piété dans les bras de l’Amour. […] J’étais alors en Orient, où je passai deux ans séparé de la France. […] En parlant ainsi, elle releva légèrement le bord de son tablier de sculpteur et me laissa entrevoir la pointe d’un poignard dont le manche était passé sous sa jarretière et qui pendait jusqu’à son cou-de-pied. […] Mon passé s’oppose à ce que j’aie des rapports avec lui.

723. (1890) L’avenir de la science « VIII » p. 200

Tout ce qui sert à la restauration ou à l’illustration du passé a droit d’y trouver place. […] La philologie n’a point son but en elle-même : elle a sa valeur comme condition nécessaire de l’histoire de l’esprit humain et de l’étude du passé. […] Tout cela faute d’avoir compris dans un sens assez large l’histoire de l’esprit humain et l’étude du passé. […] Or cette étude n’est possible que par l’étude immédiate des monuments, et ces monuments ne sont pas abordables sans les recherches spéciales du philologue, Telle forme du passé suffit à elle seule pour occuper une laborieuse existence. […] Ce qui manque au Moyen Âge, ce n’est ni la production originale, ni la curiosité du passé, ni la persévérance du travail.

724. (1809) Quelques réflexions sur la tragédie de Wallstein et sur le théâtre allemand

Les scènes se suivent sans que rien les enchaîne l’une à l’autre ; mais cette incohérence est naturelle ; c’est un tableau mouvant, où il n’y a ni passé, ni avenir. […] Dans nos tragédies, tout se passe immédiatement entre les héros et le public ; les confidents sont toujours soigneusement sacrifiés. […] Leur opinion est, pour ainsi dire, devancée et dirigée par un public intermédiaire, plus voisin de ce qui se passe, et non moins impartial qu’eux. […] Tell, échappé aux poursuites de Gessler, a gravi la cime d’un rocher sauvage qui domine sur une route par laquelle Gessler doit passer. […] Schiller, n’ayant pas cette ressource, y supplée par l’arrivée d’une noce champêtre qui passe, au son des instruments, près des lieux où Tell est caché.

725. (1889) La littérature de Tout à l’heure pp. -383

Ce grand souci du passé décèle une impuissance à porter le présent, à préparer l’avenir. […] C’est un précurseur, un phare toujours brillant dans le passé. […] Son œuvre sent plus qu’une autre le passé précisément par sa relative perfection. […] — le son divin, et passe. […] Il aime le passé, ne gêne pas le présent, n’opprime pas l’avenir.

726. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

Mais tout passe, et le torrent de cette douleur s’écoula. […] Quand on y passe, l’obscurité donne le frisson. […] Jean passa en faisant le bien. […] Tout passe. […] » Que s’était-il passé ?

727. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

De là le charme puissant du passé. […] Schiaparelli y a vu des canaux, l’an passé. […] — des figures de vierges passer dans leur tunique blanche. […] Il avait passé sa licence et enseigné la rhétorique en province. […] Il portait une barbe de bouc où le peigne ne passait jamais.

728. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « [« Pages extraites d’un cahier de notes et anecdotes »] » pp. 439-440

Elle aimait à parler des années anciennes et à initier ceux qu’elle appelait ses jeunes amis aux confidences d’autrefois : « C’est une manière, disait-elle, de mettre du passé dans l’amitié. » C’est donc elle qui parle autant et plus que moi dans ce que je vais dire : « La première passion de Mme de Staël, à son entrée dans le monde, a été pour M. de Narbonne qui s’est très mal conduit avec elle, comme font trop souvent les hommes après le succès. […] Elle va à Lyon ; il la suit avec sa femme et passe son temps près d’elle, négligeant un peu Mme de Constant. […] Il passa une nuit près d’elle morte : mais pour cela la regretta-t-il profondément ?

729. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 100-104

Sa Muse a commencé trop tard à garder le silence, puisqu'elle ne s'est exercée que sur des sujets licencieux ou bizarres, dont notre Littérature pouvoit très-bien se passer. […] Il y passe en revue la plupart des Auteurs de nos jours qui ont fait quelque sensation dans le Monde littéraire ; & si ses portraits n'ont pas toujours le mérite de la ressemblance, la touche en est du moins vigoureuse, hardie, & originale. […] Mais devant moi quel vil Ecrivain passe ?

730. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier après les funérailles »

La mort de Charles Nodier n’a pas semblé moins prématurée que celle de Casimir Delavigne ; et quoiqu’il eût passé le terme de soixante ans, ce qui est toujours un long âge pour une vie si remplie de pensées et d’émotions, on ne peut, quand on l’a connu, c’est-à-dire aimé, s’ôter de l’idée qu’il est mort jeune. […] Charles Nodier était né à Besançon, en avril 1780 ; il fit ses études dans sa ville natale, et, sauf quelques échappées à Paris, il passa sa première jeunesse dans sa province bien-aimée. […] Là-dessus les souvenirs des contemporains ne tarissent pas ; quand une fois le nom de Nodier est prononcé devant le bon Weiss (aujourd’hui inconsolable), devant quelqu’un de ces amis et de ces témoins d’autrefois, tout un passé s’ébranle et se réveille, les histoires, les aventures s’enchaînent et se multiplient, l’Odyssée commence. […] Ou si la mort était ce que mon cœur envie, Quelque sommeil bien long, d’un long rêve charmé, La nuit des jours passés, le songe de la vie ! […] La réunion était complète, on s’asseyait : c’est alors qu’il s’animait par degrés, que sa parole facile, élégante, retrouvait ses accents vibrants et doux, que le souvenir évoquait en lui les Ombres de ce passé charmant qu’il redemandait tout à l’heure au sommeil ; le conteur-poète était devant nous ; nous possédions Nodier encore une fois tout entier.

731. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVIII. Gentils conteurs » pp. 218-231

Quelques-unes de ses couleurs familières ont passé de mode, qui furent à l’origine d’une teinte, je me souviens, excitante, cuisse-de-nymphe émue et même pâmée. Du naturalisme léger, elle a passé avec armes et bagages — avec un talent mûr et une plume bien aiguisée — au symbolisme, à ses pompes et à ses chefs-d’œuvre. […] Ajalbert d’avoir méprisé l’épilogue d’usage : « Jacques alluma un quatrième cigare, s’étendit sur un divan, et considéra gravement les couronnes tremblantes de fumée, sans plus penser à rien, dans la lassitude aiguë de tant de passé remué… » — cet épilogue, n’est-ce pas, que les typographes du Gil-Blas ont toujours tout composé sur le marbre… VI. — Maizeroy Autre conteur facile : M.  […] Mais sa nuit de noce qu’il escomptait difficile, douloureuse, saignante et écœurante, se passe très bien. Peut-être s’est-elle passée trop bien, digère-t-il.

732. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Royalistes et Républicains »

Faits spécialement pour le quart d’heure, que deviennent-ils, le quart d’heure passé ? […] cela est certain que, depuis que nous avons passé par des gouvernements d’Assemblées, le parti royaliste a, par l’inflexibilité de ses principes… ou de ses passions, fait échouer toutes les combinaisons, excepté celle des plus monstrueuses coalitions avec ses plus mortels ennemis contre le gouvernement parlementaire, ce château de cartes de la difficulté politique ! […] Plus tard, quand fut fini le magnifique épisode de l’Empire qui, tout le temps qu’il dura, sut fort bien se passer, lui, de vos petites combinaisons et ne connut d’équilibre que celui qu’il fit perdre à toute l’Europe, le Royalisme de la Restauration recommença ce que le Royalisme d’après Thermidor avait fait ; comme aujourd’hui, dans l’effroyable situation où la révolution, la guerre, tous les malheurs et toutes les anarchies ont mis la France, il est prêt à le recommencer encore !   […] Mallet-Dupan, le survivant dans le désespoir funèbre de Mirabeau, passa toute sa vie à répéter contre le royalisme le cri terrible qu’en mourant Mirabeau avait jeté. […] Les partis extrêmes n’appartiennent pas au premier sermonnaire politique venu comme Thureau-Dangin, et ce n’est pas l’expérience du passé, qui, du reste, ne sert jamais à rien, qui les empêchera d’être ce qu’ils sont ou ce qu’ils ont toujours été, imbécilles ou sublimes, mais obtus !

733. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jules Girard » pp. 327-340

« qui estime que le culte du passé est une superstition (pages 19 et suivantes), — qui le méprise, ce passé, et l’appelle une barbarie, — qui supplée à la tradition par le raisonnement, et, — le croira-t-on ?  […] Faire, de système et de réflexion, acte négatif de raison en histoire au lieu de faire acte positif de compréhension historique, chicaner le fait mystérieux qui est à l’origine de tout, en histoire aussi bien qu’en nature humaine et quand la chicane qu’on en fait est impuissante, le supprimer d’autorité et passer outre, — comme Thucydide a passé outre sur les temps barbares de la Grèce, — est-ce là réellement le dernier mot du génie humain dans une race, et du génie d’un homme qui, dans cette race, à un moment donné, écrit l’histoire ? […] III Cette vieille poétique, qui est probablement « la poétique de l’avenir », comme la raison philosophique de la Grèce doit être « la raison de l’avenir », cette vieille poétique n’est autre que la littérature des Grecs passée, après coup, à l’état de théorie, et qui a droit de retour et de despotisme si elle a l’absolu d’une vérité ; Or, pour M. 

734. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Valmiki »

Malheureusement le temps est un peu passé où l’imagination occidentale voyait en Orient les splendeurs amoncelées de je ne sais combien de civilisations finies, mais qui avaient laissé derrière elles aux chercheurs de trésors trois ou quatre terrains d’alluvions de poudre de perles et de fragments d’escarboucles. […] À nous aussi, le préjugé traditionnel avait passé au cou le nœud de pourpre et de soie — doux et éclatant — dans lequel il étrangle la Vérité, contente d’être étranglée comme un Turc soumis au kalife, et si nous nous sommes débarrassés du lacet fascinateur et terrible, si nous l’avons rejeté et rompu, grâces en soient rendues surtout à ce grand poème du Ramayâna, — l’un des plus beaux (disent les savants) de la littérature sanscrite, — et qu’on vient de traduire tout exprès pour nous qui ne serions, certes ! […] Encore une fois, nous le répétons, on peut passer beaucoup à un traducteur, comme à un voyageur qui revient de fort loin, mais il est des bornes pourtant à l’affirmation et à l’enthousiasme, surtout quand le traducteur est un homme de science et d’esprit qui, s’il ne s’agissait pas de son fétiche hindou, aurait le sentiment des choses poétiques tout aussi sûr et aussi net que nous qui le jugeons. […] On ne l’a pas assez remarqué : les Indiens sont, dans l’ordre intellectuel, des espèces de somnambules sans lucidité, des cataleptiques aux yeux retournés, tombés, depuis des siècles, dans la contemplation de leur moi imbécille, mais des cataleptiques qui sentent les coups malgré leur extase ; car ils tremblent devant le bambou qui les a toujours menés, dans quelque main de conquérant qu’il ait passé, depuis Alexandre jusqu’à Clive. […] Tout ce qu’on y discerne, c’est que Rama est une mystique incarnation de Vichnou qui doit passer par toute une longue série d’épreuves, selon le dogme de cette métempsycose expiatoire, la puérile philosophie des Orientaux.

735. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XI. Gorini »

L’auteur de ce travail, M. l’abbé Sauveur Gorini, ne peut pas passer pour un écrivain dans le sens littéraire du mot, quoiqu’il ait souvent ce qui fait le fond de l’écrivain, — une manière de dire personnelle, — mais c’est un érudit, et un érudit d’une nouvelle espèce, venu en pleine terre, à la campagne, comme une fleur sauvage ou comme un poëte… Jusqu’ici vous aviez cru, n’est-ce pas ? […] qu’il nous passe le mot, c’est presque un phénomène. […] II Et ce serait une intéressante page de biographie à écrire et qui éclairerait la Critique… M. l’abbé Gorini, au doux nom italien, est un prêtre de Bourg qui a passé la plus longue partie de sa jeunesse et de sa vie dans un des plus tristes pays et une des plus pauvres paroisses du département de l’Ain, si pour les prêtres qui vivent, les yeux en haut et la pensée sur l’invisible, il y avait, comme pour nous, des pays tristes et de pauvres paroisses, et si même la plus pauvre de toutes n’était pas la plus riche pour eux ! […] Les historiens mêmes qu’il avait si bien passés au crible ! […] Boileau avait trop de rigueur, mais s’il condamnait La Bruyère, que dirait-il de M. l’abbé Gorini, lequel a aussi son langage d’un alinéa à un autre, et un langage d’une correction pleine de clarté, où passent çà et là d’aimables sourires… ?

736. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Gustave D’Alaux »

Est-ce à cause de cette ressemblance avec les blancs dans l’insensé et dans l’atroce, que le nègre, cet enfançon vagissant et informe de la barbarie, et dont, grâce à Papa Soulouque, la tétrelle de sang est toujours pleine, pourra passer un jour de pied en cap à l’état d’homme ? […] Pour peu qu’il les eût aperçues, en effet, il en fût passé dans son livre quelque chose qui ne s’y trouve pas. […] C’est un de ces nègres vulgaires, comme tant d’autres chefs d’un instant de la barbarie noire, et qui n’a dû son élévation qu’à de chétives circonstances de taille avec sa petitesse, et, depuis, aux passions qui, comme celles des masses, ont une manière de faire des chefs de certains hommes qu’elles poussent devant elles en attendant qu’elles leur passent par-dessus. […] Sous Hérard il devint chef d’escadron ; sous Guerrier, colonel ; sous Richer, commandant supérieur de la garde du palais. » Tels étaient Soulouque et son passé, et son historien nous raconte avec infiniment de précision, d’information et de justesse, ce que ce bonhomme ingénu, qui balbutie de timidité en parlant et qui rougit aimablement devant tout inconnu, pour qui sait voir la rougeur de la peau sous son ébène, devint bientôt pour les nègres et pour les mulâtres. […] Voilà, selon d’Alaux, l’explication et la clef de ce phénomène, qui s’appelle pour l’heure Faustin Ier, de la tyrannie indurée de cet homme, arrivé au pouvoir en se frottant les yeux, comme l’Éveillé de la comédie, sans parti pris, sans intention que d’imiter Richer, non parce qu’il était le plus intelligent de ces souverains de pas sage, mais parce qu’il était le dernier passé, et qui trouve tout à coup dans sa religion de barbare, dans sa terreur des sorciers et dans son fétichisme méprisé, une initiative qui fait de lui le représentant le plus pur qu’ait jamais eu à Haïti le parti ultra de la réaction africaine !

737. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

Il faut que les hommes aiment bien les excès, puisque celui-ci est presque passé en proverbe. […] J’ai passé mes plus belles années sans oser entreprendre une tragédie. […] Il n’est pas naturel que toutes les parties d’une action se passent dans un même apartement ou dans une même place. […] Qui prononçassent distinctement et avec ordre tout ce qui se passe dans leur coeur ! […] Premierement : en rapelant des actions passées qui flétrissent le personage.

738. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIIe Entretien. Montesquieu »

Ce fut dans ce château féodal qu’il passa son enfance, sous la direction d’un père qui avait quitté le service militaire où il s’était distingué, pour se renfermer dans la vie de famille. […] Il passa en Suisse, parcourut les bords du Rhin, s’arrêta en Hollande, et ayant retrouvé à la Haye lord Chesterfield, s’embarqua avec lui pour l’Angleterre, le 31 octobre 1729. […] Il était, à vingt ans de distance, aussi mort et aussi oublié que le passé lui-même. […] Qui lui aurait dit dans le passé et qui lui dira dans l’avenir : « Tes limites naturelles sont là, et tout ce que tu y ajouteras t’affaiblira ?  […] On passa toute sa jeunesse à les apprendre, toute sa vie à les pratiquer.

739. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

Les luttes et le travail littéraire du IIIe siècle, lesquels se passent déjà au grand jour, ne seraient exposés qu’en traits généraux. […] L’auteur y parle toujours comme témoin oculaire ; il veut se faire passer pour l’apôtre Jean. […] Qu’on essaye d’arriver au vrai sur la manière dont s’est passé tel ou tel fait contemporain ; on n’y réussira pas. […] Aucun des miracles dont les vieilles histoires sont remplies ne s’est passé dans des conditions scientifiques. […] À la lecture des textes, j’ai pu joindre une grande source de lumières, la vue des lieux où se sont passés les événements.

740. (1899) Les industriels du roman populaire, suivi de : L’état actuel du roman populaire (enquête) [articles de la Revue des Revues] pp. 1-403

(Vous savez que cela se passe en des terres exotiques.) […] On passe un traité. […] Ils provoquent la commande, la reçoivent et passent la main. […] On avait, avant lui, passé à la caisse sans laisser au fond la moindre pistole. […] Mais je ne sais rien, moi, de ce qui se passe dans mon roman !

741. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Ce solécisme passait dans la langue. […] Pour former le passif, ils ne se servaient pas tout d’abord du verbe être ; ils ne l’admettaient que pour un ou deux temps, le passé et le futur passé. […] Si quelque chose exclut la possession, c’est le passé. […] De là, sans doute, il a passé dans les romans de chevalerie. […] Mais, de là, elle passa dans tous les genres de poésie et fut dictée par le goût.

742. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

« Roland gardait les monts ; tous passaient sans effroi. […] Elle passe au parti de l’ange de l’amour, son amant. […] Le temps de ces poèmes ou de ces opuscules épiques était passé. […] « D’où vient ce qui se passe ? […] D’où vient donc ce qui se passe ?

743. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIe entretien. L’homme de lettres »

Il est vrai que mon âme est jeune et que mon imagination est malheureusement passée toute fervente dans mon cœur. […] Je passais peu de jours sans la voir. […] Lainé, avec douleur, mais sans colère, la diplomatie, dans laquelle j’avais passé ma jeunesse. […] C’est là que je passe ma vie seul, sans femme, sans enfants et sans esclaves. […] Elle eut le chagrin de voir que sa fortune passerait après elle à des parents qu’elle haïssait.

744. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — I. » pp. 473-493

Il simplifie le plus qu’il peut la grammaire ; il fait passer le plus tôt possible son élève à la lecture graduée des auteurs, à l’explication ; il se garde bien de commencer, comme on faisait, par la composition ou le thème. […] Mme Dacier, en tant qu’écrivain, retarde un peu sur son époque ; elle n’a point passé par l’école de Boileau, de Racine ; elle est plus antique et se rattache, par Huet, par M. de Montausier, aux écrivains d’auparavant. Il y a eu deux sortes d’écrivains qui n’ont point passé par Boileau, les uns ayant un reste de précieux, même dans leur élégance, comme Fléchier, Pellisson ; les autres restés un peu gothiques. […] Il en a passé au contraire quelque chose dans l’œuvre d’étude et de prud’homie de Mme Dacier. […] tout ce qui est doux passe vite !

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