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918. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Charles Perrault. (Les Contes des fées, édition illustrée.) » pp. 255-274

Et sans plus de réponse, je me borne à citer l’aimable anecdote suivante qui nous montre au vrai le caractère sincère et ingénu de Perrault, et je laisse l’impression s’en faire d’elle-même sur le lecteur : Quand le jardin des Tuileries fut achevé de replanter, et mis dans l’état où vous le voyez : « Allons aux Tuileries, me dit M.  […] Il ne manquerait à ces distinctions pour les vérifier et les éclaircir, que des exemples que chaque lecteur aujourd’hui peut alléguer, depuis Hamlet de Shakespeare jusqu’à René.

919. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « De la poésie et des poètes en 1852. » pp. 380-400

Dans les genres qui se rapportent plus particulièrement aux tentatives modernes, on aurait à noter, pour être juste, des recueils qui s’adressent plutôt à quelques lecteurs isolés qu’au public. […] Je voudrais pourtant donner quelque idée au lecteur ami des lettres, et que les préventions d’école n’aveuglent point, des richesses et des ressources que la poésie moderne recèle ; car on la calomnie souvent, et il y a des critiques instruits qui s’empressent de déclarer, à chaque rencontre, l’école moderne morte, et qui, de plus, ont l’air d’en triompher, comme si c’était le cas du proverbe : Tant plus de morts, tant moins d’ennemis.

920. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Son père, conseiller au parlement de Bourgogne, était un grand lecteur des anciens et très occupé de géographie et d’histoire ; sa mère, femme forte, était petite-fille du grand jurisconsulte Fevret, et faite aussi pour transmettre à son fils le zèle des nobles et solides traditions. […] Qui a su mieux peindre les situations, enchaîner les événements, perdre et retrouver d’une façon plus naturelle un si grand nombre de personnages, et, par une transition de deux vers, remettre son lecteur au fait de la suite d’une longue histoire racontée dans les chants précédents ?

921. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

En me présentant aujourd’hui devant de nouveaux lecteurs, et en espérant qu’ils sont peut-être ou qu’ils seront à peu près les mêmes que ceux que j’avais hier, je n’ai qu’une bien courte préface à leur adresser, et je la ferai simplement en quelques mots. […] L’abbé Barthélemy avait de l’attrait, du charme, un agrément continu, un sentiment véritable et attachant : « Ma destinée, disait-il, est d’avoir des amis vifs ; c’est un bonheur dont je sens l’étendue. » On a les lettres qu’écrivit l’abbé Barthélemy au comte de Caylus durant ces deux années de voyage d’Italie ; curieuses pour le biographe, elles n’ont rien d’intéressant pour l’ordinaire des lecteurs.

922. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre III. Personnages merveilleux des contes indigènes »

Je renvoie le lecteur à la note détaillée qui suit ce conte. […] Le conte du Cheval de nuit documentera le lecteur sur ce point.

923. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre V. Séductions pour la compréhension de la psychologie indigène. — Conclusion »

Pour un lecteur attentif, il ressortira aisément de la lecture des récits de ce recueil une impression, sinon très nette du moins très exacte, de la mentalité des indigènes. […] Pour en finir avec cette étude un peu aride je renvoie le lecteur à ce j’ai dit (Chapitre I) des conceptions ethniques, cosmogoniques et zoologiques des noirs telles qu’elles semblent ressortir des contes de ce recueil.

924. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre III : M. Maine de Biran »

Celle-là est la plus solide ; on n’a point d’adversaires quand on n’a point de lecteurs. […] Les lecteurs n’entendent pas l’auteur, mais l’auteur s’entend.

925. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « SAINTE-BEUVE CHRONIQUEUR » pp. -

C'est donc une œuvre nouvelle et à beaucoup d’égards inédite que nous offrons aujourd’hui aux lecteurs.

926. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « Mme DESBORDES-VALMORE. (Pauvres Fleurs, poésies.) » pp. 115-123

Quelques obscurités pourtant sont dues uniquement à des inadvertances typographiques, qui deviennent si communes dans les publications le plus en vogue, et dont les éditeurs font trop bon marché, au détriment des lecteurs et de l’auteur.

927. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Laurent (de l’Ardèche) : Réputation de l’histoire de France de l’abbé de Montgaillard  »

En voilà bien assez, j’espère, si tout est prouvé et nous renvoyons nos lecteurs à la réfutation pour faire descendre cette production si prônée de son haut rang d’histoire, et pour la réduire à la simple condition des Mémoires piquants et Suspects, dont on peut retirer quelque profit, quand on les consulte avec beaucoup de défiance.

928. (1874) Premiers lundis. Tome I « Hoffmann : Contes nocturnes »

Comment le mal augmente, quel remède on y trouve, et par quels degrés Eugène en vient à changer sa vieille et bonne moitié, qui se résigne d’elle-même au divorce, contre la petite nièce de quatorze ans qui a fini par en avoir seize, c’est ce que le lecteur ne manquera pas de lire tout au long dans Hoffmann avec plus d’un sourire entremêlé d’attendrissement.

929. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIX. De la littérature pendant le siècle de Louis XIV » pp. 379-388

Le style représente, pour ainsi dire, au lecteur le maintien, l’accent, le geste de celui qui s’adresse à lui ; et, dans aucune circonstance, la vulgarité62 des manières ne peut ajouter à la force des idées, ni à celle des expressions.

930. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre III. De la sécheresse des impressions. — Du vague dans les idées et le langage. — Hyperboles et lieux communs. — Diffusion et bavardage »

Il y a, dans la langue française, dans celle que parlent les trois quarts des gens, tout un vocabulaire qui sert à ne pas penser ; ce sont ces mots mal définis, qui s’adaptent à tout, qui n’empruntent leur sens que de l’objet auquel on les applique, et qui signifient plus ou moins selon l’esprit de l’auditeur ou du lecteur.

931. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Heredia, José Maria de (1842-1905) »

Il est demeuré grand lecteur de mémoires érudits, de brochures rares, de commentaires peu connus.

932. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Maeterlinck, Maurice (1862-1949) »

De la sorte, le lecteur finit par s’effrayer de chaque mot, car auprès d’aucun il n’a plus la sécurité d’une banalité plane, il n’est plus certain qu’il ne cache pas le plus terrifiant mystère.

933. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Silvestre, Armand (1837-1901) »

Jules Lemaître Les lecteurs du Gil Blas, qui se délectent deux ou trois fois par semaine aux amours de l’ami Jacques et aux aventures du commandant Laripète, ont-ils lu les Renaissances, les Paysages métaphysiques et les Ailes d’or, et soupçonnent-ils que M. 

934. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Sully Prudhomme (1839-1907) »

Ces productions sont trop connues évidemment des lecteurs de ces biographies sommaires pour les énumérer ou en citer quelque chose.

935. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre II. « Faire de la littérature » » pp. 19-26

La liberté d’écrire, la multiplication des lecteurs, les progrès de la librairie, l’envahissement du journalisme ont donné à l’homme de lettres un semblant de raison sociale, à son travail cette autonomie que vous jugerez, je pense, illogique et pernicieuse.

936. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’Empereur Néron, et les trois plus grands poëtes de son siècle, Lucain, Perse & Juvénal. » pp. 69-78

Je ne compte point Denys le tyran, que le démon des vers posséda toute sa vie ; qui briguoit d’en remporter le prix dans les jeux olympiques ; & chargeoit des lecteurs d’une poitrine forte & d’une voix admirable, d’y faire valoir ses poësies ; qui avoit dans son palais l’élite des gens de lettres comme autant de flatteurs à gages, employés à se récrier sur ses poëmes, à lui prostituer l’encens & des hommages ; qui ne trouva la vérité que dans la bouche d’un Philoxène, cet homme toujours le même malgré la crainte des supplices & la peine des carrières où il fut condamné.

937. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Ronsard, et Saint-Gelais. » pp. 120-129

Rien n’indigne tant un poëte que des vers mal rendus par un acteur ou par un lecteur.

938. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Voiture, et Benserade. » pp. 197-207

Leur goût est un goût dépravé, mais séduisant, fait pour plaire aux femmes, aux jeunes gens, à tous les lecteurs superficiels.

939. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre quatrième. »

Expression très-noble et rapprochement très-heureux, qui réveille dans l’esprit du lecteur l’idée du naufrage pour le marin et pour l’ambitieux.

940. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Lettre, à Madame la comtesse de Forbach, sur l’Éducation des enfants. » pp. 544-544

Nous y renvoyons le lecteur.

941. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 46, quelques refléxions sur la musique des italiens, que les italiens n’ont cultivé cet art qu’après les françois et les flamands » pp. 464-478

Il me souvient bien d’avoir lû dans les écrivains italiens plusieurs passages qui le prouvent, mais je crois devoir épargner au lecteur la peine de les lire, et à moi celle de les retrouver.

942. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XVI »

Le lecteur en jugera : J’ai dit, page 287 de l’Art d’écrire, que « pour trouver des images ou les rendre saillantes quand elles ne le sont pas, le travail et la refonte sont les deux grands moyens après le génie naturel ».

943. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Léon Feugère ; Ambroise-Firmin Didot »

Sous la pression de tant de détails, elle prend l’aspect d’une vaste nomenclature, abordable, sans doute, à l’énergique personnalité des gens spéciaux qui cherchent les informations dont ils ont besoin à travers toutes les broussailles, mais elle doit, par son continuel entassement et par sa sécheresse, repousser cette masse flottante de lecteurs qui, en fin de compte, est le véritable public.

944. (1893) Alfred de Musset

Aucun n’avait éveillé dans les cœurs autant de ces longs échos qui ne naissent que d’un accord intime avec le lecteur, et qu’un simple plaisir d’art est impuissant à produire. […] Il sent que le lecteur sera tenté de lui jeter quelque chose, et naturellement il pare le danger qu’il redoute le plus. […] Ce chœur emprunté à la tragédie grecque, qui venait exprimer des idées fort peu antiques dans un langage très moderne, troublait et déroutait le lecteur. […] Les semaines qui suivirent furent affreuses, et nous en épargnerons au lecteur le récit pénible et monotone. […] Il s’y trouve partout des inexactitudes et des inadvertances, et, à partir d’un moment que nous indiquerons, ces inexactitudes sont volontaires, et calculées en vue de dérouter le lecteur.

945. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

Je devins, à cause de lui, un lecteur fidèle du journal la Justice. […] » dira le lecteur ému. […] Ils ont su écrire pour vingt lecteurs, contents de travailler pour ceux-là qui viendront. […] Le lecteur sera tenté d’accorder, pour le moins, autant d’estime à celui-ci qu’à celui-là. […] Ces mots, dont le sens n’est point fixe, laissent au lecteur toute liberté.

946. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre second » pp. 200-409

Si le lecteur a eu la patience de me lire jusqu’ici, j’espère qu’il ne se rebutera pas pour quelques lignes de plus, — en revanche, je m’engage à plus de brièveté dans l’examen des autres ouvrages. […] J’aurai soin de vous rendre à vous-même meilleur que je ne vous ai reçu… » Si ce fait vous était connu, songez, lecteur, que beaucoup d’autres l’ignorent : j’aimerais mieux instruire celui qui ne sait pas, que de plaire à celui qui sait. […] Pour que le lecteur juge sainement de cet ouvrage, qui a attiré tant de reproches à Sénèque, il est à propos, ce me semble, de s’arrêter un moment sur la position de l’auteur dont il porte le nom, et sur le caractère du courtisan auquel il est adressé. […] Ceux d’entre vos lecteurs que votre apologie n’a pas convertis, ne changeront pas d’avis. […] Non, sans doute ; à Dieu ne plaise que j’arrache des mains du lecteur des feuilles qui lui offriront à chaque ligne les préceptes de l’art de bien vivre et de bien mourir !

947. (1891) Enquête sur l’évolution littéraire

Me pardonnera-t-on de présenter en un tableau cette récréation anodine dont le lecteur pourra, pour s’amuser à son tour, vérifier la justesse. […] en littérature, j’ai le sentiment que l’auteur soit le mâle, et qu’il fasse une espèce d’enfant au lecteur. […] La plume à la main, il se dupe lui-même et essaie de duper ses lecteurs, et je crois que tout son agrément vient de l’excès de son artifice. […] Les lecteurs le connaissent sous cette double face de sa sympathique personnalité. […] L’allitération est un charme que le poète emploie sans s’en apercevoir, que le lecteur subit sans s’en rendre compte non plus.

948. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

Tout le récit est d’une puissance extraordinaire, et il n’y est point fait un abus extravagant du dialecte écossais, ce qui est fort commode pour le lecteur. […] Les ouvrages de Sir William Petrie et d’autres sont un peu trop approfondis pour la moyenne des lecteurs studieux. […] Néanmoins les écrivains poétiques ont leur utilité, et il y a dans le dernier volume de sir Edwin Arnold bien des choses qui récompenseront le lecteur. […] C’est simplement un ennui pour le lecteur, et une erreur de la part de l’écrivain. […] « Le lecteur ou la lectrice auront leur part de travail, tout comme j’ai eu le mien.

949. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

Il distingue celui des lecteurs de journaux, celui des amateurs de théâtre, des académistes, des tragiques, et leur oppose le vrai public, supérieur au temps et au monde sensible. […] Nous serions vraiment en peine de signaler aux lecteurs de la Revue Wagnérienne un chapitre particulier du livre de M.  […] Camille Benoit n’avertit-il pas ses lecteurs ? […] Dujardin, en quête d’idéal ne semble pas remarquer ce que les notions de « régénération » du public sous la forme politique et religieuse peut avoir de dangereuse idéologiquement, mais ce sont des notions auxquels le lecteur du XXIe siècle est sensible après la récupération de Wagner par le troisième Reich.

950. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre VI » pp. 394-434

Chapitre VI C’est ainsi que nous cherchons à relier, l’une à l’autre, ces diverses études de la comédie aux différentes époques de notre histoire, et nous espérons fort, pour peu que le lecteur nous soit en aide, arriver à quelque utile résultat. […] Il s’occupa de reproduire le modèle incroyable qu’il avait sous les yeux, laissant aux lecteurs à venir, le soin de juger du mérite et de l’intérêt de la ressemblance. […] Notre lecteur se contentera de beaucoup moins, je l’espère, et s’il veut mademoiselle Mars tout entière, eh bien, qu’il la cherche çà et là, répandue à chacune de ces pages, et des pages qui viendront, plus tard, comme on ramasse, dans un jardin cultivé sans ordre, les diverses fleurs dont se compose un bouquet ! […] Voici en revanche un paysage (le lecteur aime le repos et le contraste), où se fait sentir, dans toute sa grâce et dans tout son charme, le repos rustique !

951. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

Dieu sait si j’aime et si je respecte ce grand Shakespeare, et mes lecteurs savent aussi si je nie les rapports de la moralité et du génie, et si ce n’est pas au contraire presque une poétique pour moi que la nécessité de tenir compte de leur union dans toute œuvre d’art et de littérature Dieu et mes lecteurs savent si j’ai jamais distrait la beauté morale de la vérité esthétique ; si, par ce côté-là comme par l’autre, Shakespeare, dans ses pièces de théâtre (uniquement dans ses pièces de théâtre, il est vrai), n’est pas à mes yeux le plus grand des artistes, Le plus grand, parce qu’il en est le plus pur ! […] C’est se mettre, soi et son obésité ou sa maigreur, entre le lecteur et Shakespeare : c’est ôter au lecteur son soleil !

952. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — I. » pp. 134-154

Le lecteur est là derrière, qui écoute comme il peut. […] Ces deux imprimeurs, dans un avertissement, s’adressaient « Aux lecteurs vertueux et judicieux ».

953. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. de Stendhal. Ses Œuvres complètes. — I. » pp. 301-321

Si son roman de La Chartreuse de Parme a paru le meilleur de ceux qu’il a composés, et s’il saisit tout d’abord le lecteur, c’est que, dès les premières pages, il a rendu avec vivacité et avec âme les souvenirs de cette heure brillante. […] Parlant de l’impression que cause sur place la vue du Forum contemplé du haut des ruines du Colisée, et se laissant aller un moment à son enthousiasme romain, il craint d’en avoir trop dit et de s’être compromis auprès des lecteurs parisiens : « Je ne parle pas, dit-il, du vulgaire né pour admirer le pathos de Corinne ; les gens un peu délicats ont ce malheur bien grand au xixe  siècle : quand ils aperçoivent de l’exagération, leur âme n’est plus disposée qu’à inventer de l’ironie. » Ainsi, de ce qu’il y a de la déclamation voisine de l’éloquence, Beyle se jettera dans le contraire ; il ira à mépriser Bossuet et ce qu’il appelle ses phrases.

954. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — I. » pp. 473-493

Un lecteur attentif et sagace a pris soin de noter dans les divers écrits de Mlle Le Fèvre et de M.  […] Cette personne honnête et probe croit à son lecteur, à son public, à l’affection qu’elle leur inspire, à l’intérêt que le monde témoigne pour la continuation et l’achèvement de son travail, à la compassion qu’il aura d’une interruption venue d’une cause si douloureuse ; elle se souvient de Cicéron pleurant sa fille Tullia, de Quintilien déplorant la perte d’un fils plein de promesses, et, tout en les imitant, elle verse de vraies larmes ; puis, en finissant, la mère chrétienne se retrouve et se soumet115.

955. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

Il publia en 1801 son Tableau de l’Agriculture toscane, dans lequel, à côté des détails précis, techniques et tels que les peut désirer tout lecteur propriétaire rural, se trouvent des peintures véritables inspirées par la beauté des lieux, et qui ne se rencontreront plus jamais ensuite sous sa plume. […] Les premiers volumes furent accueillis dans toute l’Europe avec un succès assez vif ; l’apparition de chaque tome nouveau était attendue, désirée des lecteurs libéraux et sérieux de tous les pays.

956. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Et qu’est-ce, me diront beaucoup de lecteurs, qu’est-ce d’abord que M.  […] Lecteur, tire-t’en comme tu peux.

957. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par. M. le Chevalier Alfred d’Arneth »

Comme le livre n’est destiné qu’à ceux de sa nationalité qui lisent le français et qu’il s’adresse, en revanche, à tous les lecteurs français dont la majorité est loin de posséder l’allemand, il eût été de meilleure grâce à M. d’Arneth d’en faire une publication toute française. […] Disons aussi que la modestie, — trop de modestie, — a pu faire craindre à M. d’Arneth de se hasarder dans une langue étrangère. — Pour que le lecteur français n’ignore rien des titres et des mérites du savant éditeur qui va acquérir une très-grande autorité dans le débat si vivement engagé sur l’authenticité des premières lettres de Marie-Antoinette, il est bon de savoir que M. 

958. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite.) »

Il est mieux de passer sans transition d’un récit à l’autre ; ce sont des changements à vue, et le lecteur y reçoit presque la même impression au vif qu’un témoin et un contemporain : «  Il m’écrivit de Berlin, nous dit Malouet, qu’il avait grande envie de passer du nord de l’Allemagne au midi de la France, et que probablement il viendrait à Toulon, où il arriva un mois après. […] Ce philosophe, qui par moments pouvait paraître un énergumène à ses lecteurs, n’était plus, quand on l’entretenait de près, qu’un enthousiaste des idées de M. 

959. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [III] »

… Je me tais par prudence, et plutôt pour vous que pour moi… » Berthier, ce grand chef d’état-major dont je ne prétends point méconnaître les mérites appropriés au génie du maître, mais « à qui il fallait tout dicter » ; Berthier, « à qui vingt campagnes n’avaient pas donné une idée de stratégie », et qui n’en avait que faire sans doute dans son rôle infatigable d’activité toute passive ; Berthier, qui, au début de la dernière guerre d’Allemagne (1809), dépêché d’avance à Ratisbonne pour y rassembler l’armée, avait signalé son peu de coup d’œil personnel, son peu de clairvoyance dans l’exécution trop littérale des ordres en face d’une situation non prévue ; Berthier, qui pourtant s’était vu comblé de toutes les dignités, de toutes les prérogatives, et finalement couronné et doté jusque dans son nom de cette gloire même de Wagram, — un tel personnage avait certes beau jeu contre un simple officier en disgrâce, dont il ne prévoyait pas les titres distingués et permanents auprès de tous les militaires instruits et des studieux lecteurs de l’avenir. […] Avec un peu d’attention et de patience, tout lecteur impartial va avoir la clef de cette destinée, qu’on peut dire unique et singulière entre toutes celles de la grande époque.

960. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

Je ne promets pas de me rendre aveuglément à toutes vos critiques (quoique vous en soyez trop avare avec moi) : nous avons tous une partie de nous-même en jeu dans nos œuvres, et nous tenons souvent autant à nos défauts qu’à nos qualités ; mais un lecteur éclairé voit mieux que nous, quand nous rendons bien ou mal nos idées les plus personnelles, et nous empêche de donner une mauvaise forme à nos sentiments. […] Seulement je profiterai encore de vos objections, qui sont bonnes par elles-mêmes : je me chargerai, moi conteur, ou bien quelqu’un de mes personnages, d’avouer au lecteur que la Cavalcanti n’est pas sans imprudence et sans tort.

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