Convenons-en, Voltaire, avec son seigneur Pococurante, traitant sous jambe les plus fameux auteurs et leurs chefs-d’œuvre, est bien loin d’ici, et je ne sais pourquoi il me revient précisément à l’esprit en ce moment, si ce n’est peut-être parce que dans une méthode excellente je crois entrevoir un peu d’abus, et que le goût nous avertit qu’il faut de temps en temps se détendre. […] Il ne s’agit plus de venir faire une simple lecture d’un auteur en l’accompagnant de remarques vives, de commentaires rapides et justes, de rapprochements heureux, et en y apportant un vif sentiment des beautés et aussi des défauts, comme ce serait le compte d’un disciple de Voltaire, de Pope et d’Horace. […] Ce livre d’ailleurs, comparé avec la thèse sur Ronsard, avec les études sur Homère et la Grèce contemporaine, sur Poussin, marque bien l’heureux progrès que les années de la maturité amenaient dans cette sérieuse, active et généreuse nature. » Les premières leçons et discours d’ouverture, imprimés aujourd’hui et qui comprennent ces six années de suppléance, depuis Pascal (janvier 1862) jusqu’à Diderot (décembre 1867), en passant par Bossuet, Fénelon, Montesquieu et Voltaire historien, constituent une suite de discours généraux sur la littérature française depuis le milieu du xviie siècle jusqu’au dernier tiers du xviiie , chaque période importante se rattachant à l’un de ces grands noms et se rangeant à l’entour.
Cette légèreté absente, ou corrigée à point, dans la belle littérature du grand siècle, reparut trop dès le commencement du suivant ; on se dédommagea, sous le roi Voltaire 139, de la contrainte et du temps perdu. […] Le roi Voltaire : c’est Béranger qui a trouvé cela le premier, comme le prouve la lettre suivante adressée à M. […] L’habitude de trôner est une mauvaise chose ; le roi Voltaire s’y entendait mieux.
Dès votre retour de Belgique, quelque temps après, vous allâtes achever de grandir en Suisse, dans cette ville de Lausanne que Voltaire avait choisie pour en faire la colonie de la liberté entre la persécution et les cours. Vous y trouviez, comme Voltaire lui-même, un beau ciel, un beau lac, de l’étude et des amitiés. […] Voltaire, — Mirabeau — Danton ; le premier des Bonaparte, comme homme de guerre ; Louis XVIII, quoique détestable écrivain ; Rossini, quoique exclusivement dieu de la musique ; Thiers, quoique plus orateur et historien qu’homme d’État ; le second des Bonaparte, quoiqu’il soit l’homme où l’esprit de parti aveugle ait eu la main heureuse en le choisissant pour dictateur ; — ces hommes, nés d’eux-mêmes, et vraiment remarquables, rapetissent tout ce qui est faussement grand autour d’eux.
Lui-même d’ailleurs, explique très clairement les raisons qui l’ont engagé à rester en dehors du drame : « Personnellement, dit-il dans son feuilleton » du Voltaire, je regardais la scène comme une tentative grave et dangereuse. […] Zola défend depuis trois ans dans le Bien public, dans le Voltaire et dans le Messager de l’Europe ne lui sont, d’ailleurs, pas particulières ; ce sont celles que professe tout le groupe auquel il appartient ; probablement que M. […] Ses critiques littéraires sur le roman, qui ont paru dans le Messager de l’Europe, et ses articles, du Voltaire réunies sous le titre de : Le Naturalisme au théâtre, paraîtront prochainement, en même temps qu’une nouvelle édition de Mes haines ; l’on pourra voir que ses opinions sont les mêmes depuis longtemps.
» 15 février Je me trouvais au quai Voltaire, chez France, le libraire. […] * * * — Le plus fin critique du xviiie siècle est peut-être Trublet, oui cet abbé ridicule, qui a trouvé cette définition du génie de Voltaire : « la perfection de la médiocrité », et qui a eu l’audace de mettre La Bruyère au-dessus de Molière. […] Son roman sur le nez, vous savez, c’est une épigramme de Voltaire, vous vous rappelez ça… Si, si, je vous assure que Lamartine a de l’esprit.
Maillart L’épigramme de M. l’abbé et son valet est le modèle de cette épigramme à deux tranchants dont usera plus tard Racine contre Boyer et Coras, et dont Voltaire saura si souvent armer sa colère. […] C’est à Voltaire qu’il ressemble le plus pour la vivacité et la grâce aisée de l’allure preste. Est-ce point un début de Voltaire que ceci : Pour à plaisir ensemble deviser. […] Que nous sommes loin des contes de Voltaire, qui du reste sont des chefs-d’œuvre, mais où l’on voit toujours dans le fond, et non pas très loin, la fine silhouette du malin auteur qui sourit, fait un joli geste, ou cligne de l’œil ! […] Un siècle après Calvin, Voltaire s’amusait à prouver aux docteurs de Genève qu’ils étaient semi-pélagiens, et il n’avait tort que de s’en amuser.
[Étude sur Shakespeare] C’est Voltaire qui, le premier, a parlé en France du génie de Shakespeare, et bien qu’il le traitât de barbare, le public français trouva que Voltaire en avait trop dit. […] On se demande si le système dramatique de Shakespeare ne vaut pas mieux que celui de Voltaire. […] Voltaire a cherché ses effets dans le contraste de l’amour parfaitement heureux avec l’amour au désespoir ; moyen puissant, il est vrai, mais moins puissant peut-être que cette préoccupation d’une situation unique et constante qui ne se développe que pour redoubler le sentiment qu’elle a d’abord inspiré. […] L’indifférence philosophique que lui a donnée Voltaire dans la première scène, pour faciliter plus tard sa conversion, rend plus invraisemblable encore le dévouement qu’elle porte si vite dans un devoir si récemment découvert. Si au contraire, dès le premier instant, Voltaire nous eût montré Zaïre troublée de scrupules et inquiète sur son bonheur, la crainte nous eût préparés d’avance à comprendre dans toute son étendue, à sa première apparition, le malheur qui la menace, et à la voir s’y livrer avec un abandon peu probable, parce qu’il est trop soudain.
Il ne faut pas prendre au pied de la lettre le pamphlet de Voltaire qui dit : « L’ambassade d’un duc et pair et d’un poète semblait devoir flatter la vanité et le goût de Frédéric ; il se moqua du roi de France, et signa son traité avec l’Angleterre le jour même que l’ambassadeur arriva à Berlin ; joua très poliment le duc et pair, et fit une épigramme contre le poète. » Frédéric était moins leste et persifleur que ne le fait ici Voltaire.
Le style est bon, court, net, clair, sans mauvaises locutions ; une fois pourtant il s’agit d’une personne qu’on n’aurait jamais connue sous un semblable rapport, une de ces manières de dire que ne toléraient Voltaire ni Courier ; M. […] « Est-ce pour prouver que Voltaire est un grand poëte et Zaïre une pièce touchante, ou bien que le mot de philosophe n’est pas exactement le synonyme de septembriseur ?
Voltaire, dans ses petits contes à l’orientale, dans le Bon Bramin, dans Zadig, a prodigieusement d’esprit, mais rien que de l’esprit, et à tout prix encore. […] Je sais que Voltaire (préface de Rome sauvée) a pu plaider avec avantage la cause de cet autre talent universel, et citer de fort beaux vers sur le combat de l’aigle et du serpent, qu’il a lui-même à merveille traduits.
Le siècle entier porta ce deuil de famille ; elle n’eut ni les funérailles populaires de Mirabeau, ni les funérailles littéraires de Voltaire, mais elle eut les pieuses funérailles de fille, d’épouse, de mère, sous les chênes de Coppet, au pied du cercueil de son père, sur les bords de ce lac, en face de ces Alpes, où sa mémoire se confond à jamais avec celle de J. […] Rousseau, son maître, de Voltaire, son voisin, de Byron, son hôte et son ami.
Je lui lus de la sorte les longues histoires du père Maimbourg, écrivain maintenant oublié, mais qui fut en son temps estimé de Voltaire ; diverses publications de M. […] Toutes ces « preuves », tous ces arguments apologétiques ruinent malheureusement l’œuvre de fond en comble l’éloquence et la dialectique de Rousseau, de Diderot, d’Helvétius, d’Holbach, voire de Voltaire, différant très fort de celles de l’abbé Gérard.
Ducis me seroit parvenu avant qu'on eût achevé d'imprimer l'article Voltaire, de la nouvelle Edition des Trois Siecles, cette lecture ne m'auroit rien fait changer au jugement que j'ai porté de cet Ecrivain célebre. […] Ses ennemis diront qu'il n'eût pas dû raisonner sur ce qu'il ne connoissoit pas à fond, ou du moins qu'il eût dû mieux choisir ses Faiseurs d'extraits ; mais je leur répondrai que Jupiter a eu ses foiblesses, & que si, pour s’être fait Taureau, il n’a point cessé d’être le Maître des Dieux, M. de Voltaire, pour s’être quelquefois oublié, n'a point cessé d’être Voltaire, c’est-à-dire, le Maître des Beaux-Esprits, des Savans, des Philosophes, des Poëtes, des Historiens, & des Littérateurs de toutes les especes.
Lorsqu’après plus de soixante ans on voit cet attardé reprendre par terre, où elles étaient tombées, toutes les impiétés de Voltaire, on ne craint pas, malgré le talent dont il abuse, de lui dire sur la tête qu’il est un esprit inférieur. […] Figurez-vous ce qu’aurait dit Voltaire lui-même, en retrouvant, lui d’une si princesse élégance, ces impiétés, qui manquaient déjà de distinction sur ses lèvres, sur les lèvres de ce paysan : En aurait-il ri ?
que ces deux jeunes hommes comme il faut, de bonne race, de manières charmantes, préoccupés, à ce qu’il semblait, uniquement d’art, dévorés par cette préoccupation ardente, fussent les ennemis du catholicisme de leurs pères, et les ennemis à la dernière façon du xixe siècle, à la dernière mode que le xixe siècle a inventée ; car nous avons une manière, nous avons une mode d’être les ennemis du catholicisme, que les hommes du xviiie siècle, que le bouillonnant et fougueux Diderot, par exemple, que même le diabolique Voltaire, ne connaissaient pas ! […] XV Car la question poignante d’un livre qui pouvait être si dramatique et si terrible est de savoir si l’âme et le génie peuvent vivre, dans leur double intensité, au fond de ce système nerveux endiablé, comme disait Voltaire, d’une comédienne qui aime son art comme tout être de génie aime le sien, et qui lui demande ses émotions, son bonheur et sa gloire.
Et cette conspiration contre la vérité et contre l’histoire, qui va de Burchard à Leibnitz, a encore passé par Bayle et par Voltaire, qui, un jour de bon sens, en a ri, pour arriver enfin à Victor Hugo, qui n’a pas le bon sens de Voltaire, — et qui n’en rira pas !
C’est ainsi qu’il a des paroles d’aversion, non seulement pour La Rochefoucauld, mais pour Voltaire, pour Molière.
Scherer a très bien dit que le de Maistre historique, c’est bien souvent du Voltaire retourné.
« On a de lui cinquante et un ouvrages, dit Voltaire ; ce sont ses Oraisons funèbres et son Discours sur l’Histoire universelle qui l’ont conduit à l’immortalité. » D’Alembert, Thomas, La Harpe, lui rendent pleine justice à cet égard, mais à cet égard seulement.
Rousseau ; je consens qu’ils ignorent les tragédies de Voltaire, sauf une ou deux, autant que celles de Lemierre.
Voltaire, imitant Shakespeare, a tout réduit, sous prétexte de régularité et de correction, à une précaution oratoire d’Antoine prend une fois pour toutes : Contre ses meurtriers je n’ai rien à vous dire ; C’est à servir l’État que leur grand cœur aspire…… Sans doute il fallait bien que César fût coupable.
Voici Mme du Châtelet, l’amie de Voltaire, l’illustre Émilie, avec ses globes, ses compas, sa physique et sa métaphysique, esprit viril, n’ayant que des vertus d’homme, dépourvue de pudeur à un degré singulier si l’on en croit son valet de chambre Beauchamp Puis, c’est Mme d’Épinay, l’amie de Jean-Jacques et de Grimm, bien femme celle-là, et bien de son temps ; très encline aux tendres faiblesses et parlant toujours de morale ; une brunette maigre et ardente gardant, avec sa philosophie et son esprit émancipé, on ne sait quelle candeur étonnée de petite fille ; bref, une de celles qui ont le plus drôlement et le plus gentiment confondu les « délicieux épanchements » de l’amour avec « l’exercice de la philosophie et de la vertu ».
Il y a chez lui du Renan et du Voltaire, du Borgia et du Béranger, du roué et du garde national.
Pour avoir une idée juste de madame de Maintenon, j’ai commencé par mettre en oubli tout ce que j’avais lu ou entendu sur son compte, les histoires de La Beaumelle, de Laus de Boissy, de madame de Genlis, de madame Suard, d’Auger, de Voltaire même, et jusqu’à la biographie écrite par le biographe le plus exact que je connaisse, M.
Voltaire et Vauvenargues en ont parlé, mais trop oratoirement, et l’on aimerait mieux des faits précis.
laisse-toi chasser, laisse-toi exiler comme Voltaire à Ferney, comme d’Aubigné à Genève, comme Dante à Vérone, comme Juvénal à Syène, comme Tacite à Méthymne, comme Eschyle à Gela, comme Jean à Pathmos, comme Élie à Oreb, comme Thucydide en Thrace, comme Isaïe à Asiongaber !
Chapitre II Le cerveau chez les animaux Ou sait l’admiration qu’inspirait à Voltaire le troisième chant du poème de Lucrèce.
Saint-Évremond, cet homme supérieur dont personne ne parle, ce pauvre assassiné par Voltaire et par Montesquieu, qui l’ont outrageusement volé, est jugé avec une fermeté de raison et une justice qu’il faut honorer ; car les injustices littéraires ne valent pas mieux que les autres, et le courage en littérature est aussi une vertu.
Il y a bien l’aversion de l’Église, mais cette aversion n’est pas la haine de Luther, ni celle de Calvin, ni celle de Voltaire, ni celle de Lamennais, ni même celle de M.
on peut affirmer que les pauvretés d’opinion et les superficialités d’aperçu ne manquent pas à cet homme de l’esprit le plus retors depuis Voltaire et qui a vu Napoléon !
Quand un homme, en effet, arrivé à peu près à la moitié du xixe siècle, jure par Cabanis en philosophie, en législation par Destutt de Tracy, et par Bentham en économie sociale ; quand cet homme, de l’esprit le plus mystificateur, semble se mystifier lui-même, en admirant politiquement M. de La Fayette, et ne se moque nullement de nous en nous disant que l’Amérique serait assurément un grand pays, si elle avait un Opéra, certes, on peut affirmer que les pauvretés d’opinion et les superficialités d’aperçu ne manquent pas à cet homme, de l’esprit le plus retors depuis Voltaire, et qui a vu Napoléon !
Voltaire (1691-1778) appartient à l’histoire des lettres plutôt qu’à celle de la philosophie.
Il me fait penser à Voltaire qui disait en riant que, nous Français, « nous sommes la crème fouettée de l’Europe. » LX Il manque à Trépidans une demi-once de cervelle de plus pour être tout à fait un homme d’esprit. […] Plus tard il a conquis quelque chose de très semblable à la fantaisie shakespearienne, il y a joint des poussées d’essor lyrique à la Byron ; il a surtout refait du Don Juan, et avec une pointe de Voltaire. […] Que ce soit au Christ, que ce soit à Voltaire, que cela s’accorde ou jure, peu lui importe, pourvu qu’il montre le poing à quelqu’un et qu’il lui crache à la face l’enthousiasme ou l’invective, et quelquefois les deux ensemble ! […] Ce libertin de Voltaire a remarqué que faire des idées pour celui qui pense, c’est un peu un plaisir pareil à celui de faire des enfants.
L’éloquence, dit très bien Voltaire, a tant de pouvoir sur les hommes, qu’on admira Balzac de son temps, pour avoir trouvé cette petite partie de l’art ignorée et nécessaire, qui consiste dans le choix harmonieux des paroles, et même pour l’avoir souvent employée hors de sa place. […] Voltaire est presque le seul de nos grands poètes dont la prose soit du moins égale à ses vers ; cette supériorité dans deux genres si différents, quoique si voisins en apparence, est une des plus rares qualités de ce grand écrivain. […] que la postérité serait surprise de voir les Voltaire et les Montesquieu déchirés dans la même page où l’écrivain le plus médiocre est célébré ! […] Plusieurs académiciens, entre autres Voltaire, ont donné cet exemple, qui paraît digne d’être suivi.
On vient le voir de très loin, comme au siècle précédent Voltaire ou Rousseau. […] Des siècles viendront, pour lesquels notre époque actuelle ne sera pas beaucoup plus jeune que celle d’il y a cent ou deux cents ans : à peu près comme aujourd’hui quand nous parlons de Dante et de Pétrarque, de Corneille et de Voltaire, nous pensons peu au laps de temps qui les sépare. […] On se rappelle qu’au temps de sa jeunesse il la tenait en grand mépris : Herder et lui, dans leurs causeries de Strasbourg, jugeaient avec une extrême sévérité Voltaire, Diderot, d’Holbach et leurs amis. […] Goethe lui répondit — ce sont les dernières lettres que les deux amis échangèrent — par un éloge, étonnant sous sa plume, de Louis XIV et de Voltaire : Louis XIV est un « roi français dans le sens-le plus élevé » ; Voltaire est « l’écrivain le mieux adapté à la nation française », et possède une longue série de qualités dont il serait fastidieux de reproduire l’énumération. […] Vous ne pouvez pas penser tout ce que je pense, car vous n’avez aucune idée de l’importance qu’avaient dans ma jeunesse Voltaire et ses grands contemporains, et de leur domination dans le monde moral.
Et comme Voltaire, comme Goethe et comme Hugo, voici qu’il entre, vivant, dans la Gloire. […] Voltaire devise avec Jésus, Platon sourit à Ézéchiel. […] La popularité de Voltaire est plutôt née de ce qu’on nommait son irréligion.
Et alors, avec Corneille, Racine et Voltaire, joués trois jours de la semaine, avec Molière, Regnard et Beaumarchais, joués trois autres jours, le théâtre moderne devenait complètement inutile, et M. […] Maintenant, il croit que c’est de Voltaire. […] Buloz. » (Dernier numéro du Satan, jeudi 5 septembre 1844, à propos de l’Éloge de Voltaire, par M.
Quant à Voltaire et à ses contemporains, ils n’avaient fait qu’ignorer et conspuer la beauté des œuvres helléniques. […] Mais il revient sans cesse à Racine pour son bien, à Voltaire pour son mal. […] C’est du pseudo Racine avec beaucoup de Voltaire, un mélange informe de Campistron et de Brifaut, Ninus II épousant la veuve du Malabar ! […] L’épître à M. de Maisonfort, Philosophie, quoique avec plus de correction, est écrite sur le ton des discours de Voltaire. […] À Paris ont poussé, comme des fleurs entre les pavés, Rutebeuf, Villon, Boileau, Molière, Regnard, Voltaire, et de nos jours Béranger avant Musset et Coppée.
Les phrases de Pascal, Rousseau, Montesquieu, Buffon, Voltaire ne contiennent pas énormément de choses à la fois. […] Ô Voltaire ! […] Voltaire dit dans sa préface de Marianne : « C’est contre mon goût que j’ai mis la mort de Marianne en récit, au lieu de la mettre en action. […] Voyez avec quel art Voltaire met en valeur ses sources d’information dans l’étonnante Histoire de Charles XII. […] Il n’y a pas huit hommes de lettres qui aient lu Voltaire. » C’est une chose monstrueuse, en effet, qu’un pareil mépris des classiques.
Il nous faut donc accorder plus de crédit, témoigner plus de reconnaissance à Racine qu’à tout autre dramaturge français digne de ce nom (je fais allusion à Corneille, Rotrou, parfois Crébillon l’aîné, même Voltaire) pour l’intérêt, l’amusement même, si j’ose ainsi m’exprimer, dignes d’un lettré, qui nous attachent à la forme sévère du drame français d’il y a plus d’un ou de deux siècles. […] Car que n’a-t-on pas dit, depuis Voltaire, qui assomma Racine à coups de louanges feintes, blasphéma Corneille, en l’attaquant et perdit toute raison quand il s’agit de Shakespeare, jusqu’au lourd Dr Johnson, ce pédant malicieux, et même jusqu’aux myrmidons des lettres de tous pays, des deux sexes, j’allais dire de toutes… les espèces. […] Puis vint la traduction de Letourneur, remplie, mais, c’est à peu près tout, de bonnes intentions, et sur laquelle Voltaire, pour comble, jeta l’anathème en son meilleur style ; traitant le traducteur de bonhomme étonné 10 comme Victor Hugo (dans la préface de l’ouvrage de son fils François) d’imbécile 11, et Shakespeare de « sauvage ivre ». […] Des prosateurs, moins nombreux, et pour la plupart moins éclatants que les poètes, — débutaient, qui se ressentirent dès lors de l’évolution irrésistible : Nodier, modifiant visiblement sa première manière, qui fleurait par trop du Voltaire des Contes ; Jules Janin, de qui l’Âne mort ou la Femme guillotinée semblait promettre un romancier plus que le délicieux critique, si j’ose m’exprimer ainsi, « délicieux ! […] — tous, à travers, évidemment et naturellement, Voltaire plus ou moins et Jean-Jacques beaucoup, procédèrent du grand Vicomte, lui-même imbu, je ne puis que le répéter, de Shakespeare et de Racine, et ce, dans une presque indéfinissable et plus apte à être sentie, ressentie, j’insiste sur les deux mots de tout à l’heure et j’appuie sur l’inversion présente, — manière d’indépendance qui devait engendrer la complète liberté dont nous jouissons maintenant en fait d’art littéraire, en attendant, sans la désirer, l’anarchie qui nous menace aussi bien que tout le monde, dans ce petit « coin d’or semé d’azur » de la société, où nous vécûmes jusqu’ici, nous les écrivains, sinon bien tranquilles ni trop heureux, ni par trop unis, du moins installés !
Jean-Jacques lui-même, à côté de Voltaire, sent l’effort : il y a mainte fois de l’ouvrier dans son art. […] Ainsi la plaisanterie de Swift est du pudding, comme celle de Teofilo Folengo est du macaroni, comme celle de Voltaire est du champagne.
Je ferais toucher du doigt, dans les Provinciales et les Pensées, des passages qu’on dirait de Bossuet pour la magnificence solide et l’audace toujours sensée, ou de Bourdaloue pour la suite d’un discours sévère à la fois et passionné, ou de La Bruyère pour l’éclat des couleurs et la vivacité des contrastes, ou de Voltaire pour la facilité et l’enjouement. […] C’est que Pascal a eu tous les dons de l’esprit en perfection : la rigueur scientifique d’un grand géomètre et l’imagination d’un grand poète ; une raison que ne contente pas ce qui paraît évident à celle de Descartes, et que ne rebute ni ne lasse jamais la difficulté de se contenter ; plus de sensibilité que n’en ont eu Descartes, Bossuet, La Bruyère ; de l’esprit comme Fénelon ; de la gaieté railleuse comme Voltaire.
Voltaire écrivant à Cideville. « Quant à moi, ajoute Beaumarchais, qui suis né très sensible aux charmes de la bonne musique, j’ai bien longtemps cherché pourquoi l’opéra m’ennuyait, malgré tant de soins et de frais employés à l’effet contraire ; et pourquoi tel morceau détaché qui me charmait au clavecin, reporté du pupitre au grand cadre, était près de me fatiguer s’il ne m’ennuyait pas d’abord ; et voici ce que j’ai cru voir. […] Citant Boileau, La Bruyère, Voltaire, et Gluck, il présente l’opéra comme une forme hybride annonciatrice du drame wagnérien et tente de faire de Beaumarchais un wagnérien avant l’heure !
LITTÉRATURE FRANÇAISE Cycle de Charlemagne Cycle d’Arthur Charles d’Orléans Villon Poème chevaleresque Poème satirique Fabliaux Bibles Romans Joinville Froissart Commynes Mystères Farces D’Aubigné, Rabelais, Calvin, Marot, Montaigne, Ronsard, Malherbe, Régnier Les familiers de l’hôtel Rambouillet, Corneille, Descartes, Balzac, de Sales, Retz, La Rochefoucauld Pascal, Racine, Molière, Boileau, La Fontaine, Bossuet, Fénelon, Malebranche, Saint-Simon, de Sévigné, La Bruyère Montesquieu, Buffon, Voltaire, Diderot, Rousseau, Lesage, Prévost, Delille, Bernardin de Saint-Pierre, Danton, Robespierre Chateaubriand, Chénier, les auteurs de l’Empire Lamartine, Béranger, Vigny, Hugo, Musset Baudelaire, Balzac, Dumas, Sand, Thiers, Michelet, etc. […] Zola est un pur balzacien avec un penchant vers Courbet et Musset ; Augustin Thierry admirait Chateaubriand et Walter Scott ; Michelet inclinait à Virgile, Bernardin de Saint-Pierre et Rousseau ; Taine a beaucoup lu Stendhal, Heine, Voltaire et les romantiques.
Si René avait décrit ses souffrances dans la langue simple, alerte et spirituelle de Voltaire et de Diderot, son récit serait passé inaperçu5 ; s’il n’avait dit que la vérité, rien que la vérité, ses malheurs auraient paru d’autant plus vulgaires que les aspirations des lecteurs étaient plus exaltées. […] Mais la révolution avait renouvelé la langue parlée à la tribune et écrite dans le journal et les romans ; des mots, des tournures, des formes de phrases, des images, des comparaisons, venus de toutes les provinces et de toutes les couches sociales, avaient envahi la langue châtiée, polie, légère et élégante des salons aristocratiques, la langue de Montesquieu et de Voltaire, et l’avaient révolutionnée.
La Henriade de M. de Voltaire est peut-être le seul de nos Poëmes épiques qui ait réussi dans les pays étrangers, & qui ait eu un grand succès en France. […] M. de Crebillon & de Voltaire qui font une classe à part, nous en avons eu quelques-uns très-supérieurs aux Poëtes contemporains des deux héros de la scène françoise.
Depuis Homère jusqu’à Milton, jusqu’au Tasse, jusqu’à Voltaire, je ne crois pas que le génie de l’épopée ait enfanté un poème qui ait paru dans un temps où l’on n’eût autre chose à faire que de le lire ; et beaucoup de difficultés doivent se réunir contre cette œuvre de l’esprit qui acquiert à son auteur la plus grande gloire dont l’homme soit susceptible.
. — C’est déjà la maxime relâchée du joli conte de Gertrude, par Voltaire : Les plus honnêtes gens y passèrent leur vie ; Il n’est jamais de mal en bonne compagnie.
La Cour de Sceaux, même en son meilleur temps, fut toujours un peu arriérée sans doute, cantonnée dans son vallon, fermée aux lumières et au souffle du dehors, obstinément cartésienne par M. de Malezieu ; mais ce Malezieu était un homme de savoir, nourri de premières études très fortes, qui lisait Sophocle dans le texte, et chaque jour il passait là, dans ce cercle de la princesse, des personnes du premier ordre par l’esprit : Voltaire, Mme du Châtelet, Mme du Defland ; Mlle de Launay, ce témoin exquis qui fait loi devant la postérité, y était en permanence.
J’épuiserai enfin le petit trésor manuscrit qui a été mis à ma disposition, en indiquant quelques vers de la jeunesse de Sénancour, une romance sur le rossignol, une espèce d’épître intitulée : J’ai vu, dans la forme, sinon dans le genre de la pièce attribuée à Voltaire, et qui fut composée à vingt-six ans.
Voltaire écrivant à l’abbé d’Olivet disait :« Je vous demande en grâce, à vous et aux vôtres, de ne vous jamais servir de cette phrase :nul style, nul goût dans la plupart, sans y daigner mettre un verbe.
En un mot, dans cette carrière ouverte au commencement du siècle par Racine fils et par Voltaire, et suivie si activement en des sens divers par Le Tourneur et Ducis, par Suard et l’abbé Arnaud, Léonard à son tour fait un pas ; il est de ceux qui tendent à introduire une veine des littératures étrangères modernes dans la nôtre.
Ce qui échappait complètement à Ronsard, à Racine, à Fénelon, à Voltaire, nous avons la joie et l’orgueil de le voir et de le sentir.
Rochefort est à celle de Voltaire ou de Beaumarchais ce que le pittoresque de Michelet est à celui de Buffon, ou l’impressionnisme d’Edmond de Goncourt à celui de Bernardin de Saint Pierre.
Il rappelle le nom de l’héroïne de Jean-Jacques, mais il rappelle aussi un vers de Voltaire : Chez Camargo, chez Gaussin, chez Julie.
Plus d’un sait encore ce splendide début de Rolla, cette apostrophe au Christ, cette autre apostrophe à Voltaire (car il y a beaucoup d’apostrophes), surtout ce ravissant sommeil de la fille de quinze ans : Oh !
Voltaire, le grand moqueur, dans sa jolie pièce des Systèmes, où il parodie toutes les écoles de philosophie et les amène à comparaître devant le Trône suprême, ne manque pas de mettre ce fameux argument dans la bouche de Descartes, s’adressant à Dieu : Voici mon argument, qui me semble invincible : Pour être, c’est assez que vous soyez possible.
Lélut, celui de Raphaël, celui de Voltaire, dont la petite tète est assez connue, celui de Napoléon, dont le crâne mesurait à peine une circonférence au-dessus de la moyenne.
Ainsi se sont développées, d’abord sous forme de chapitres, par exemple dans les écrits de Voltaire, puis comme œuvres distinctes et séparées, l’histoire des institutions, l’histoire des mœurs, des controverses religieuses, des lettres, des arts, des sciences, enfin des systèmes de philosophie.
C’est ainsi que le vif succès des Lettres Persanes de Montesquieu détermina par dizaines des Lettres Anglaises par Voltaire, Chinoises, Portugaises, etc.
Le gardien du cap des tempêtes, le dieu du vertige au milieu des précipices des Alpes, le génie de Rome défendant le passage du Rubicon, sans doute sont de belles inventions d’une muse qui ne prétendait point à la croyance des peuples ; mais comment Voltaire a-t-il pu oser nous présenter le Fanatisme et la Politique ?
Le duc de Bordeaux, ce pur descendant de Louis XV, le Corrompu, mais qui, tout corrompu qu’il fût, se sentit pourtant un jour assez roi pour ne pas recevoir Voltaire, lors de son triomphe à Paris, fou de sa présence !
Vitruve le remarquait au siècle d’Auguste : « Dans les théâtres de Rome, la scène proprement dite (pulpitum) était plus vaste que celle des Grecs, parce que toute la représentation s’y concentrait, l’orchestre étant occupé par les sièges des sénateurs161. » Nous croyons presque lire ici ce que dit Voltaire avec humeur de ces banquettes occupées par de jeunes seigneurs à l’ancien Théâtre-Français, et restreignant la scène de manière à gêner tout grand appareil de spectacle et à faire manquer souvent l’effet dramatique.
Répondons-leur qu’il y a deux manières de regarder notre homme, deux bouts de la lorgnette, l’un comique et l’autre tragique, le verre de Voltaire et le verre de Pascal. […] Il est le major Pictet, comme son parent du siècle passé était pour Voltaire, et mieux encore pour Catherine II, le géant Pictet. […] Cependant les Mais… Mais… à qui Voltaire faisait leur part dans l’ensemble de sa lune de miel berlinoise, notre Genevois pouvait en retrouver et en cultiver la graine. […] À côté de ce monde libre, de cette Allemagne ensemble weimarienne, staëlienne, hégélienne, d’où coulaient comme d’un toit du monde les fleuves de la pensée, et où le jeune Amiel avait cru recevoir de Carl Ritter la clef de la terre, de Schleiermacher et de Krause celle du monde intérieur, de Hegel celle des essences, il passait au foyer le plus strict, le plus exigu, ce coin genevois, cette parvulissime république que Voltaire poudrait tout entière en secouant sa perruque. — Petite par la matière, mais grande par le rayonnement. […] Il est traité par Anatole France non seulement comme Socrate par Platon, mais comme Martin et Pangloss par Voltaire.
Je n’ai pu poser ce principe, dont on me prête généreusement l’absurdité, que la vieillesse ou la jeunesse puisse exclure des honneurs attachés à la culture des lettres ; car je sais, comme vous, que Cicéron couronna ses derniers jours par son beau Traité de l’Orateur, et que Voltaire avait fait son Œdipe avant sa vingtième année. […] Ne nous serait-il pas permis de nous y tromper, puisque Voltaire lui-même écrivit que le célèbre comique d’Athènes ne lui paraissait qu’ un méprisable bateleur, qui de nos jours n’eût pas osé donner ses farces à la foire de Saint-Laurent ? D’où viendrait pourtant que nos arrêts ne seraient pas moins rigoureux, ni moins injustes, que ceux de Voltaire, à l’égard de cette sorte de comédie ? […] Néanmoins le témoignage du rhéteur Quintilien est d’un poids suffisant à nous faire récuser celui de Voltaire : les éloges que le premier fait d’Aristophane, dont il avait lu le texte original et médité les pièces, méritent plus de crédit que les capricieuses critiques de notre poète : et qu’admire-t-il dans l’auteur athénien ? […] On considérera que Plutarque fut plus un historien moraliste qu’un arbitre du goût, que Voltaire condamna plus d’une fois inattentivement les anciens dont le génie n’était pas en accord avec son esprit, et que La Harpe transmettait souvent les idées de son maître sans les examiner assez scrupuleusement.
Voltaire a dit que quand Molière n’aurait fait que l’École des Maris, il serait encore un excellent comique ; Boileau ne put entendre l’École des Femmes sans adresser à Molière, attaqué de beaucoup de côtés et qu’il ne connaissait pas encore, des stances faciles, où il célèbre la charmante naïveté de cette comédie qu’il égale à celles de Térence, supposées écrites par Scipion. […] C’est ce que n’ont pas senti beaucoup d’esprits de goût, Voltaire, Vauvenargues et autres, dans l’appréciation de ce qu’on a appelé les dernières farces de Molière. […] Molière disait du grand Corneille : « Il a un lutin qui vient de temps en temps lui souffler d’excellents vers, et qui ensuite le laisse là en disant : Voyons comme il s’en tirera quand il sera seul ; et il ne fait rien qui vaille, et le lutin s’en amuse. » N’est-ce pas dans ce même sens, et non dans celui qu’a supposé Voltaire, que Richelieu reprochait à Corneille de n’avoir pas l’esprit de suite ?
Moréas qui s’amuse à reconstituer la Pléiade à l’entour du café Voltaire nous paraît quelque peu ridicule. […] Et je pense que de toutes celles que nous connaissons, il n’en est pas de plus française et où l’esprit traditionnel ait autant persisté, que dans cette délicieuse et haïssable famille dont Voltaire pourrait être l’ancêtre, et qui, par Stendhal et Renan, aurait, en Maurice Barrès, sa conclusion définitive. […] Et surtout — avec Voltaire, Stendhal, Renan — il reste dans la tradition nationale.
Ballanche vit aussi M. de La Harpe, alors exilé à Corbeil par ordre du Consul, et lui proposa de donner ses soins à une édition choisie et purifiée de Voltaire : la mort de La Harpe, qui survint l’année suivante, coupa court à cette pensée. […] Ballanche, il n’aurait pas ri avec lui de cette émancipation de la pensée, ou c’est qu’alors il aurait ri de ce mauvais et diabolique sourire qu’il a lui-même tant reproché à la lèvre stridente de Voltaire.
De grands génies, non pas seulement parmi les philosophes, mais parmi les rois, Voltaire et Frédéric, avaient déversé le mépris sur la religion catholique et donné le signal des railleries pendant cinquante années. Le général Bonaparte, qui avait autant d’esprit que Voltaire, plus de gloire que Frédéric, pouvait seul, par son exemple et ses respects, faire tomber les railleries du dernier siècle.
Voltaire en profite pour montrer la supériorité théologique de l’Inde et de la Chine, à la même époque, sur les superstitions de Rome et de la Grèce. […] Voltaire a son étendue ; mais il n’a ni son élévation, ni sa majesté, ni son éloquence, ni son enthousiasme, ni sa piété divine envers la Providence.
Voltaire, à cet égard, pensait comme nous ; il bénit la philosophie de Socrate, et il maudit le verbiage, quelquefois sublime, plus souvent sophistique, de Platon. […] Saint Augustin dans son livre de la Cité de Dieu, Voltaire dans ses recherches philosophiques, Scaliger lui-même, n’hésitent pas à reconnaître dans ce livre la main d’un sage Égyptien.
J’ai toujours soupçonné Voltaire d’avoir dans les veines du sang napolitain, et, en remontant un peu loin, j’ai reconnu que je n’avais pas tout à fait tort. […] Le marquis de La Maisonfort avait le genre d’esprit de Rivarol ; c’était un émigré comme Rivarol : il avait autant d’esprit, et du meilleur, qu’il soit possible d’en concentrer dans une tête humaine, même au pays de Voltaire et du chevalier de Grammont.
Voltaire ne touche guère aux règles et au cadre consacré de la tragédie ; mais il remplit la tragédie de tirades contre les prêtres et le despotisme. […] Dans le règlement des rapports du pouvoir civil et de la religion, quand on enlève au clergé ses biens, quand on ouvre les couvents, quand on impose aux prêtres le serment à la Constitution, vous pouvez reconnaître l’inspiration de Voltaire.
Mais ce que je dis du moment où la connaissance du grec et du latin est utile au médecin, et de l’âge où il convient de se livrer à cette étude, je puis le dire du littérateur même, avec cette différence que sans grec, et, à plus forte raison, sans latin, on n’est point un homme de lettres : il faut absolument à celui-ci une liaison intime avec Homère et Virgile, Démosthène et Cicéron, s’il veut exceller ; encore suis-je bien sûr que Voltaire, qui n’est pas un littérateur médiocre, sait bien peu de grec, et qu’il n’est pas le vingtième, le centième de nos latinistes. […] Dont Voltaire disait qu’ils subsisteraient tant que la langue française durerait.
Voltaire, en son temps, s’est moqué de ces philosophes optimistes Qui criaient : Tout est bien !
Aussi, à défaut du coulant d’un Voltaire, de l’harmonie d’un Bernardin ou d’un Fénelon, et s’il n’a presque jamais ce qui chante, il a ce qui accentue et ce qui saisit.
Dans sa notice habile et légèrement ironique sur Villehardouin et sur les événements où le noble témoin fut mêlé, notice où il a réussi à combiner d’un air discret le rôle de disciple de Voltaire et celui de continuateur des Bénédictins, M.
» dit quelque part Voltaire, voulant faire valoir les avantages d’une chétive santé dans l’exercice des choses de l’esprit.
Voltaire a fait cette remarque à l’honneur du prince Maurice : « C’est d’ordinaire le parti le plus faible qui désire une trêve, et cependant le prince Maurice ne la voulait pas.
Journal de « valet de chambre », dit Voltaire, journal d’« huissier » ; tant que l’on voudra !
Par malheur, aucun de nos grands prosateurs d’alors, ni Montesquieu, ni Voltaire, ni Buffon, ni Jean-Jacques, n’ont lu directement Homère : il n’est entré pour rien dans la composition ni dans la trempe de leur talent ; on s’en aperçoit à leur cachet. — Ce n’est pas la bonne volonté pour Homère qui a manqué à Diderot, et, sans guère le lire, il a dû plus d’une fois en causer de près et par bouffées avec son ami l’Allemand Grimm, l’ancien élève d’Ernesti. — Celui qui l’a lu (j’entends toujours lu à la source), dans tout ce monde du xviiie siècle, ce n’est ni d’Alembert, ni Duclos, ni Marmontel, ni même le critique La Harpe, dont ce serait pourtant le devoir et le métier ; ce n’est pas même Fontanes, d’un goût si pur, mais paresseux.
J’étais très souvent invité, dit-il, chez Voltaire, chez lord Stanhope, chez la duchesse d’Anville (cette grande dame française qui, pour changer, allait de temps à autre se faire un salon sérieux à Genève)… Je visitai le sage Abauzit dont l’heureuse pauvreté et l’âme sereine me remplissaient d’enthousiasme ; il avait trente louis de revenu ; avec cela il vivait plus heureux qu’un roi… Je n’ai point oublié le sentiment de gloire que j’éprouvai quand lui, qui ne faisait de visite à personne, vint me voir dans ma pension… Le syndic Jalabert eut la bonté de me donner des leçons de physique ; j’étais lié avec Moultou, l’ami intime de Rousseau ; mes véritables maîtres étaient ces hommes distingués.
Le grand Frédéric n’eut, de bonne heure, pour modèle et pour idole que Voltaire ; c’est quelque chose, mais c’est trop peu.
Certes un prince ainsi disposé, devenu le maître, et nonobstant toutes ses vertus, ou, si l’on veut, à cause d’elles, aurait eu fort à faire avec les contemporains du Régent, de Montesquieu et de Voltaire.
Voltaire termine les deux beaux chapitres, où il a si vivement raconté les exploits et les malheurs de ce prince, par l’éclat de son arrestation ignominieuse à Paris, à l’Opéra, lorsque le faible gouvernement d’alors crut devoir à l’Angleterre cette satisfaction d’expulser le Prétendant du sol français.
J’ai beau y revenir après eux, le relire et l’ouvrir vingt fois au hasard, il m’est impossible de trouver en Cervantes rien de l’amertume d’Alceste dans Molière, rien encore moins (cela va sans dire) de l’ironie de Voltaire dans Candide, ni même de cette ironie fine et diffuse de Le Sage, car l’auteur de Turcaret perce parfois dans Gil Blas.
Il y a dans Bajazet un passage, entre autres, fort admiré de Voltaire : Acomat explique à Osmin comment, malgré les défenses rigoureuses du sérail, Roxane et Bajazet ont pu se voir et s’aimer : Peut-être il te souvient qu’un récit peu fidèle De la more d’Amurat fit courir la nouvelle.
Le café n’avait pas passé de mode, malgré la prédiction de madame de Sévigné ; bien au contraire, il devait exercer une assez grande influence sur le xviiie siècle, sur cette époque si vive et si hardie, nerveuse, irritable, toute de saillies, de conversations, de verve artificielle, d’enthousiasme après quatre heures du soir ; j’en prends à témoin Voltaire et son amour du Moka.
Puisque j’ai eu occasion de nommer Parny et que probablement j’y reviendrai peu, qu’on me permette d’ajouter une note écrite sur lui en toute sincérité dans un livret de Pensées : « Le grand tort, le malheur de Parny est d’avoir fait son poëme de la Guerre des Dieux : il subit par là le sort de Piron à cause de son ode, de Laclos pour son roman, de Louvet jusque dans sa renommée politique pour son Faublas, le sort auquel Voltaire n’échappe, pour sa Pucelle, qu’à la faveur de ses cent autres volumes où elle se noie, le sort qu’un immortel chansonnier encourrait pour sa part, s’il avait multiplié le nombre de certains couplets sans aveu.
Après Racine nous avons vu Voltaire, parce que, dans le dix-huitième siècle, on était plus penseur que dans le dix-septième.
Elle a l’âme de Rousseau : mais par l’esprit elle est fille de Voltaire, fille du xviiie siècle raisonnable et mondain.
Il a de l’esprit comme Voltaire et comme Henri Heine, et il en a comme le neveu de Rameau, avec quelque chose de plus élégant dans le débraillé.
Je tiens pourtant à montrer le philosophe et le politique américain dans ses conditions antérieures, avec son existence déjà si remplie avant son arrivée et sa faveur en France, avant qu’il embrasse Voltaire.
Ce n’est pas ainsi que j’entendrais réciter Voltaire.
Mais, ne craignons pas d’en faire la remarque, puisque l’occasion s’en présente, Voltaire a bien méconnu l’esprit des traditions lorsqu’il a composé sa tragédie de Mahomet.
Quand il dit ses vers ou qu’il les chante, avec cette voix stridente qui semble ne plus sortir d’entrailles humaines, il a ce que Voltaire exigeait qu’on eût quand on jouait la tragédie : il a, positivement, le diable au corps.
n’est qu’un déiste momentané, comme tout déiste, et dont toute la théologie est celle du Mondain de Voltaire, — le plus chétif des types de l’homme que ce génie de la superficialité pût rêver !
Ce dix-huitième siècle, tant méprisé, « ces poupées charmantes, musquées et poudrées », Voltaire et Montesquieu le recueillirent, et la vraie conversation commença.
Dans sa retraite, il réfuta les premiers ouvrages de Voltaire, et mourut laissant vingt volumes qui sont devenus classiques et que les élèves de rhétorique apprennent par cœur en même temps que les oraisons funèbres de Bossuet.
Cette belle poésie grecque, si négligée alors, hormis par quelques éditeurs allemands, si mal jugée et si défigurée dans les préfaces ou les imitations tragiques de Voltaire, il la connut à fond, en antiquaire, en artiste, en poëte.
J’ai tâché, au contraire, de pratiquer plus particulièrement les auteurs dont la forme est la plus éloignée de la sienne, Voltaire, par exemple. […] Et pourquoi pas, je vous prie, si d’autres épistoliers, qui le valent bien, m’ont fait cet honneur, si madame de Sévigné, Voltaire et, deux mille ans avant eux, Cicéron, ont mis dans leurs lettres quelque chose à mon adresse ? […] * Dans la liste des ouvrages dont Napoléon Ier voulait former sa bibliothèque de campagne, on lisait ceci : « Corneille, tout ce qui en reste. » « Voltaire, tout ce qui en reste. » J’en aurais pu faire la devise de mon Histoire de la Littérature française, où j’ai entendu ne juger que « ce qui reste », c’est-à-dire ce qui sera toujours vrai. […] Ce temple qu’éleva jadis au Goût Voltaire, Et moi, les clefs en main, sur le seuil me tenant, Et d’un œil soupçonneux regardant tout venant. […] C’est le nom que donne Voltaire à tous ceux qui s’efforçaient d’entrer, mais qui n’entraient pas dans le temple.
Or, Voltaire ne dormait plus content, et grinçait des dents au fond de sa tombe. […] Anatole France, c’est une raillerie posthume de Voltaire, c’est le dernier trait qu’il lance contre le citoyen de Genève, d’une rive à l’autre du Léthé, où jamais aucun de ces deux rivaux n’a voulu boire. […] Est-ce à dire qu’à l’exemple de son aïeul, ce petit-fils de Voltaire croie au bienfait d’une religion pour la foule ? […] Ils citaient Rabelais et Fénelon, Pascal et Voltaire, La Fontaine et Victor Hugo. […] Léon Bloy parle aussi intelligemment qu’un bigot parle de Voltaire ?
Telles la prose de Voltaire, pour citer deux exemples typiques, et celle de Gautier. […] Henri Beyle, sous-lieutenant à la 4e compagnie du 6e dragons, mentionne, à côté des bottes à la housarde, de la redingote d’uniforme galonnée et des pistolets d’arçon, un Condorcet : Essai sur le progrès, et un Voltaire en sept volumes. […] Le roman satirique et qui descend en droite ligne de Voltaire a été repris par M. […] Même à la date où il professait à Lausanne son cours sur les jansénistes, ses convictions intimes n’étaient pas très différentes de celles de Voltaire à l’égard du christianisme. […] L’intelligence le sauve des étroitesses du fanatisme dont Voltaire demeure le prisonnier.
C’était une ode aux Héros des Thermopyles, avec une épigraphe empruntée à Voltaire. […] Dans notre période classique, cette dernière a pour représentant le Voltaire des tragédies. […] À côté de Voltaire il faudrait mettre Hugo, et, tout au contraire, à côté de Corneille, si étrange que paraisse le rapprochement de ces deux noms, Alfred de Musset. […] Le compère de cette Revue est Voltaire, celui du Recueil des facéties parisiennes, j’allais dire de l’Éducation de Prince. […] mieux vaut, pour nous réchauffer, les baisers d’une vachère amoureuse. » Non, la gaieté de l’homme qui sent ainsi n’a rien de commun avec celle de Voltaire ou du prince de Ligne.
J’ai entendu Emmanuel Chabier, le grand musicien, s’écrier un soir, au café Voltaire : « Je déteste les maisons où l’on ne peut pas dire M… » Malgré les progrès de la mauvaise éducation, le mot de Waterloo n’est pas encore couramment du vocabulaire mondain. […] De pieuses paroissiennes croient que ses femmes damnées le sont pour avoir lu Voltaire ou fait gras le vendredi.
Non ; ce qui nous intéresse surtout, c’est d’apprendre qu’Aristophane ne développe pas d’intrigues, ne peint pas de caractères ; que son comique est une gaieté sans frein et une fantaisie sans bornes, animant, poétisant le tableau des mœurs publiques ; qu’il est tantôt lyrique et tantôt bas, à la fois cynique et charmant, tel enfin que Voltaire a pu l’appeler un bouffon indigne de présenter ses farces à la foire , et que Platon a pu dire : les Grâces choisissant un tombeau trouvèrent l’âme d’Aristophane . […] Tiré de Molière, de Voltaire et de Lessing.
Voltaire appelait la métaphysique le roman de l’esprit ; Voltaire avait raison.
Vous avez pu chasser Voltaire de votre bibliothèque, vous ne le chasserez pas de votre souvenir ; car Voltaire, c’est vous-même.
Deux heures avant sa mort, il s’est fait lire les Contes philosophiques de Voltaire. […] Taine proclamant qu’il y a dans About, du Marivaux et du Beaumarchais, quelqu’un lui crie : « About, non, il descend de Voltaire… par Gaudissart !
* * * — L’éloignement est excellent pour la gloire et le retentissement d’un homme vivant : Voltaire à Ferney, Hugo à Jersey, deux solitudes qui riment et semblent se faire écho. […] — Non, non, répète Michelet, Voltaire n’eût pas écrit ce livre-là… Ce n’était pas sa polémique… Un fait bien curieux… Un jeune homme est condamné à trois mois de prison dans le Midi, pour délit de presse… Il est maladif, il obtient de faire sa prison à l’hôpital… Les sœurs, qui soignent tout le monde, se mettent à le soigner, à lui demander s’il ne s’ennuie pas, s’il veut des livres.
Je lui rappelle le petit cadre, plaqué sur une porte cochère du quai Voltaire, le petit cadre en bois blanc, dans lequel, une de ses premières aquarelles nous donnait l’envie, à mon frère et à moi, de prendre des leçons de l’aquarelliste. […] Enfin, après avoir résisté à de magnifiques offres de la Russie, il se retrouvait en 1848, au quai Voltaire, assez misérable, assez besogneux, obligé de donner des leçons, quand L’Artiste, en qualité de voisin, lui consacrait un long article.
Le conte moral et le roman allégorique né du Gulliver de Swift et du Candide de Voltaire ont eu des continuateurs avec Pantalonie de Camille de Sainte-Croix, les Lettres de Malaisie, de Paul Adam, les romans demi-fantaisistes de M. […] Voltaire.
Toutes ces fragiles gloires de passage, Bembo, Politien, Ficin, Sannazar, talents de reflet qui, n’ayant pas d’originalité à perdre, pastichèrent l’antiquité dans des écrits qu’on ne lit plus, lui semblent plus grandes qu’elles ne sont, et la superstition de l’humanisme le possède si bien, qu’il perd entièrement la mesure d’Érasme, — cette première et débile ébauche, essayée par la nature, de l’homme qui sera Voltaire plus tard ! […] Enfin il a versé les premières gouttes de vérité sur le front d’Alexandre VI, sali par les menteries d’un valet renvoyé ; crachats de Burchard qui ont fait mal au cœur à Voltaire lui-même !
« On peut quelquefois, dit Voltaire, entasser des métaphores les unes sur les autres ; mais alors il faut qu’elles soient bien distinguées, et que l’on voie toujours votre objet représenté sous des images différentes. » Et il cite un exemple de Massillon ; il aurait pu aussi bien citer celui qu’on va lire : Souvenez-vous d’où vous êtes tombé ; … remontez à la première origine de vos désordres, vous la trouverez dans les infidélités les plus légères : un sentiment de plaisir négligemment rejeté ; une occasion de péril trop fréquentée ; une liberté douteuse trop souvent prise ; des pratiques de piété omises : la source en est presque imperceptible ; le fleuve, qui en est sorti, a inondé toute la terre de votre cœur : ce fut d’abord ce petit nuage que vit Élie, et qui depuis a couvert tout le ciel de votre âme : ce fut cette pierre légère que Daniel vit descendre de la montagne, et qui, devenue ensuite une masse énorme, a renversé et brisé l’image de Dieu en vous : c’était un petit grain de sénevé, qui depuis a crû comme un grand arbre, et poussé tant de fruits de mort : ce fut un peu de levain, etc.
« On eût dit, remarque Voltaire, que l’ouvrage de M. de La Motte était d’une femme d’esprit, et celui de Mme Dacier d’un homme savant… La Motte traduisit fort mal l’Iliade, mais il l’attaqua fort bien. » La Motte avait orné sa défense de toutes sortes de jolis mots et de maximes de bonne compagnie : Une douce dispute est l’âme de la conversation. — La diversité de sentiment est l’âme de la vie, et l’assaisonnement même de l’amitié. — Quand tout s’est dit de part et d’autre, la raison fait insensiblement son effet ; le goût se perfectionne, et il s’affermit alors, parce qu’il est fondé en principe. — Il faut que les disputes des gens de lettres ressemblent à ces conversations animées, où, après des avis différents et soutenus de part et d’autre avec toute la vivacité qui en fait le charme, on se sépare en s’embrassant, et souvent plus amis que si l’on avait été froidement d’accord.
Buffon n’est pas comme Voltaire et d’autres qui se répètent sauf variations chaque matin, qui improvisent au courant de la plume sur chaque sujet, et qui ne font pas mieux à soixante ans qu’à trente : lui, il est toujours en marche et en effort sur lui-même comme Montesquieu, mais il atteint mieux à son but que Montesquieu, qui se fatigue à la fin et se brise sensiblement : Buffon va jusqu’au bout d’un pas grave et soutenu en s’élevant.
Voltaire a hérité du manteau de Chaulieu ; il n’aurait rien eu de commun avec Maucroix.
On a aussi contre la personne de ce grand roi des préventions qui datent du temps de M. de Choiseul et de Voltaire, des opinions toutes faites qui se transmettent ou se renouvellent sans examen.
À deux pas de Coppet, au bord de ce beau lac, dans cette Suisse romande que Voltaire avait tant goûtée, Bonstetten, avant que les événements menaçants lui fissent la position trop difficile et vinssent mettre à une trop forte épreuve son caractère, avait trouvé le moyen de concilier tous ses goûts de curiosité, d’universalité, de philanthropie, de cosmopolitisme.
Il ne faut ‘ point être catin ni bégueule. » Puis, ce sont d’autres, cas de conscience : il suivrait la route directement opposée à celle de ses devanciers ; il serait dans un esprit contraire à celui de la feuille même (une feuille ultra-royaliste alors) à laquelle il travaillerait ; « Pour moi, Voltaire serait un modèle, au moins souvent, et Chénier une autorité.
Quand Fréron mourut, Voltaire s’écria : « Fréron est mort, qu’allons-nous faire ?
Dieu et la liberté, c’est grand, c’est le plus noble vœu, et qui rappelle le mot de Voltaire au petit-fils de Franklin ; mais mon père, mis là entre Dieu et la liberté, fait une sorte d’énigme ou du moins une singularité, et demande explication.
Pour moi, quand je lis Voltaire, que je rouvre presque à toutes les pages, je ne saurais voir en lui quelqu’un qui se fait la moindre illusion sur la nature française et parisienne.
Pour être à l’état de paradoxe et d’éclatante insulte dans les écrits de M. de Maistre, la doctrine de l’autorité n’en était pas moins frappante et donnait à réfléchir à tous les esprits qui ne faisaient point leur catéchisme des œuvres de Voltaire.
Au xviiie siècle, la race des attiques se perd : Voltaire est, quand il le veut, le modèle de l’urbanité ; mais l’atticisme léger, cette grâce un peu nue, cette exquise simplicité n’a plus sa place.
Et dans la tragédie dégénérée, Voltaire lui-même est un éloquent pousseur de tirades plus qu’un poète.
Un grain de Voltaire manque depuis longtemps à nos poëtes lyriques, quelque chose comme le sentiment du rire ou du sourire.
Étienne nous a été montré dès l’abord tel qu’on le connaissait, un peu embelli peut-être dans sa personne, selon les lois de la perspective oratoire, mais justement classé à titre d’esprit comme un élève de Voltaire.
Or, sans ce tribunal toujours existant, l’esprit des jeunes gens ne peut se former au tact délicat, à la nuance fine et juste, qui seule donne aux écrits, dans le genre léger, cette grâce de convenance et ce mérite de goût tant admiré dans quelques écrivains français, et particulièrement dans les pièces fugitives de Voltaire.
Sa philosophie a été celle déjà de Jean de Meung, sera celle de Molière et de Voltaire : celle, remarquons-le, des plus purs représentants de la race, et en effet elle exprime une des plus permanentes dispositions de la race, l’inaptitude métaphysique : une autre encore, la confiance en la vie, la joie invincible de vivre.
Il a radicalement détruit ce que Voltaire avait ébranlé, mais il a aussi radicalement détruit l’esprit voltairien : il a affranchi de l’anticléricalisme les cœurs qu’il a retirés pour jamais au christianisme.
Pour l’Allemagne, Voltaire est venu après Herder, Kant, Fichte, Hegel.
Ce n’est pas de lui qu’on dira qu’il avait le style étranglé, comme l’appelait Voltaire.
La Fare, dans ses mémoires écrits vers 1699, a très bien remarqué que depuis la mort de Madame Henriette, duchesse d’Orléans (1670), le goût des choses de l’esprit avait fort baissé dans cette cour brillante de Louis XIV : « Il est certain, dit-il, qu’en perdant cette princesse, la Cour perdait la seule personne de son rang qui était capable d’aimer et de distinguer le mérite ; et ce n’a été, depuis sa mort, que jeu, confusion et impolitesse. » Voltaire, qui voit le siècle de Louis XIV à travers le prisme de son enfance, se récrie contre une telle assertion.
Ajoutez qu’elle y devient de plus en plus une Mère de l’Église, et qu’elle s’y pose en adversaire à mort de Voltaire.
Respectons Patru, ne fût-ce que comme Voltaire respecta toujours son professeur le père Porée.
Il avait envoyé promener le berger de Watteau et sa flûte traversière, et il avait extrêmement aiguisé et acéré son talent sur la pierre à rasoir de Voltaire et de Beaumarchais.
Beaucoup d’espace, beaucoup de jour, peu de meubles ; en fait de livres, une bibliothèque toujours ouverte où sont les quatre-vingt-quatre volumes de Voltaire, et les trente-deux volumes de Condillac ; une autre, énorme, comblée d’ouvrages de fonds, mémoires des académies, journal des savants, recueils des mémoires et des historiens originaux, catalogues de faits de toute espèce et de toute forme ; dans un cabinet, quelques herbiers, deux ou trois squelettes, des cartons de portraits ou d’estampes, bref un choix de spécimens.
Voltaire enfin, le premier, inaugura véritablement chez nous la connaissance de la littérature anglaise ; mais c’était surtout les idées qu’il avait en vue, il s’en emparait et s’en servait comme d’une arme dans la lutte, comme d’un instrument d’inoculation philosophique, bien plutôt qu’il n’y cherchait matière et sujet à une comparaison impartiale et critique. […] « Il est une quantité d’accidents dans l’histoire des opinions humaines où il ne faut apporter que le rire de Voltaire et le branlement de tête de Montaigne. […] Il n’était pas toujours à cheval sur la priorité accordée à des Français, sur la prééminence française, et aussi il n’allait pas jusqu’à dire d’impatience comme Voltaire : « Nous autres, Français, nous sommes la crème fouettée de l’Europe. » Il se tenait en éveil de toutes parts, dans un état d’indifférence curieuse.
. — Comparaison de Swift et de Voltaire. — Sérieux et dureté de ses badinages. — Bickerstaff. […] Quoi de plus gai que les soirées de Voltaire ? […] Dans l’Arétin et Brantôme, dans La Fontaine et Voltaire, il y a la pensée d’un plaisir.
. — Son jugement sur Voltaire et Rousseau. — Son style. — Ses œuvres. — Hogarth. — Sa peinture morale et réaliste. — Contraste du tempérament anglais et de la morale anglaise. — Comment la morale a discipliné le tempérament. […] Oui, je voudrais le voir travailler dans les plantations. » — Il paraît qu’on ne goûte pas dans ce pays les novateurs philosophes ; voyons si Voltaire sera plus épargné : « De Rousseau ou de lui, il est difficile de décider lequel est le plus grand vaurien1094. » — À la bonne heure, ceci est net. […] Yes I would like to have him work in the plantations… It is difficult to settle the proportion of iniquity between them (Rousseau and Voltaire).
Simon Kra, éditeur, a fait vendre aux enchères, par ministère de commissaire-priseur, une collection d’autographes, où il y en avait de Voltaire et de Frédéric, de Napoléon, d’Auguste Comte, de Flaubert, de Vigny, de Mallarmé, de Verlaine, d’Anatole France, etc. […] J’ai connu quelqu’un — et qui n’était point bête — qui confondait dans ses souvenirs les romans d’Alexandre Dumas, les contes de Voltaire et les nouvelles de Maupassant. […] On aura reconnu la célèbre formule de Leibniz, ridiculisée par Voltaire dans Candide.
Et la bataille est autour de Voltaire. […] Tout le monde nous tombe dessus, et Sainte-Beuve finit par déclarer que la France ne sera libre, que lorsque Voltaire aura sa statue sur la place Louis XV. Et Voltaire amène chez Sainte-Beuve un éloge de Rousseau, dont il parle comme un esprit de sa famille, comme un homme de sa race, éloge qu’un brutal coupe par ces mots : « Rousseau, un laquais qui se tire la q…. » Renan devant cette violence de la pensée et du verbe, un peu effarouché, reste à peu près muet, curieux pourtant, attentif, intéressé, buvant le cynisme des paroles, ainsi qu’une femme honnête dans un souper de filles.
— Enfin, pas un mortel, pas même Voltaire, n’eut jamais en partage, à lui seul, tous les genres d’esprit ; c’est l’esprit qu’on n’a pas qui gâte celui qu’on a. […] Laissez venir seulement ces deux corrupteurs de la morale et de l’innocence, laissez venir Louis XV et Voltaire, alors Don Juan le scélérat, ne sera plus qu’un homme à bonnes fortunes, un philosophe ; il s’appellera M. le duc de Richelieu, pendant qu’en Angleterre, dans la patrie d’Hamlet, on verra ce même personnage de don Juan changer de nom, de costume, et s’appeler Lovelace ! […] J’ai besoin de vous avertir que c’est ici le même Lauzun qui fut le plus brillant cavalier et le plus aimé de la cour de Louis XIV ; que c’est le même chevalier de Grammont un bel esprit à la Voltaire dont Hamilton a fait son charmant héros. […] « Il fut forcé, dit Voltaire, d’exiler de Rome son propre frère, d’envoyer à Versailles son neveu, le cardinal Chighi, faire satisfaction à Sa Majesté, de casser la garde corse, qui avait tiré sur notre ambassadeur, et d’élever une pyramide qui contenait l’injure avec la réparation. » Voilà un poète anglais bien venu à faire dire à Louis XIV : On n’a jamais dit que Louis XIV n’eût pas abaissé son sceptre devant la crosse de l’Église.
Eh bien, prenez le langage de l’homme de cour dans Dom Juan, et vous trouverez des phrases hachées fin et menu comme celles de Voltaire, dans la scène où Dom Juan veut séduire Charlotte et Mathurine. […] Entre les cinq ou six chefs-d’œuvre de Molière je ne choisis pas ; je ne mets Dom Juan ni au-dessus ni au-dessous du Tartuffe et du Malade imaginaire ; mais je dis seulement que toutes les autres pièces de Molière sont autant de coins du monde profondément observés ; mais que Dom Juan est à lui seul tout un monde ; Dom Juan contient une conception complète, vraie ou fausse, de l’univers et d’un état social, comme le Candide de Voltaire ou comme le Faust de Goethe. […] Je ne le trouve nulle part dans les grands auteurs du siècle de Louis XIV ; il n’est pas même dans Voltaire avec ce sens ; je le dis, parce qu’on a accusé Voltaire d’avoir inventé la scène du Pauvre : Voltaire dit l’espèce humaine, le genre humain ; il ne dit pas l’humanité. […] La tragédie nous fournit quelques lumières indirectes ; mais de la façon qu’elle a été conçue en France, peignant les passions sous leurs traits les plus généraux, choisissant ses héros dans l’antiquité la plus reculée, et, alors même qu’elle ne se prive point de les faire parler à la moderne, réduite cependant par la nécessité de respecter son sujet à ne point souffrir une invasion trop manifeste et trop entière du moderne dans l’antique, vivant d’ailleurs par nature dans un monde de personnages et de sentiments idéaux, astreinte, à ce titre, à des traditions rigoureuses et à des vertus de convention que les dernières années du xviiie siècle ont à peine osé atteindre, elle a bien pu recevoir l’empreinte du changement des idées de Corneille à Racine, de Racine à Voltaire et à M.
Pourtant Voltaire est un secco, Voltaire écrit par petits jets courts et saccadés. […] Qu’admirons-nous surtout dans Voltaire ? […] Voltaire l’a tellement portée qu’elle en sécha sur sa maigre poitrine et perdit son parfum. […] Tourné vers la Touraine, il donne Descartes et Rabelais et Viette ; La Fontaine et Voltaire en tiennent indirectement. […] » Mais aussitôt je pense à Voltaire et il me vient certains doutes.
On y voit confirmé le bel éloge que Voltaire a fait du saint roi quand il a dit : « Prudent et ferme dans le conseil, intrépide dans les combats sans être emporté, compatissant comme s’il n’avait jamais été que malheureux. » À considérer cette réponse magnanime et si simple qu’on vient de lire, la pensée se reporte à d’autres monarques de renom, et l’on se demande ce qu’en pareille circonstance ils auraient répondu, ce qu’ils auraient fait à leur tour.
Dans la préface qu’il a mise en tête de l’Oraison funèbre du prince de Condé par Bossuet, l’abbé Bourlet de Vauxcelles a dit : Voltaire donne à entendre que, deux ans avant la mort du Grand Condé, son esprit s’était totalement affaibli.
[NdA] Ici j’avais tranché à faux : en effet, dans une lettre de Voltaire à d’Argental du 1er février 1762, on lit : « Je reçois le paquet avec ma romancine.
Elle était à Versailles en septembre 1725, lorsque Louis XV épousa Mlle de Leckzinska à Chantilly : « Tout le monde, écrivait Voltaire, fait ici sa cour à Mme de Besenval, qui est un peu parente de la reine.
Et Goethe que l’on peut citer à côté de Boileau, Goethe le grand et judicieux critique, a observé excellemment que « lorsqu’une famille s’est fait remarquer durant quelques générations par des mérites et des succès divers, elle finit souvent par produire dans le nombre de ses rejetons un individu qui réunit en lui les qualités et les défauts de tous ses ancêtres : il en est de même, ajoute-t-il, des peuples célèbres qui, la plupart, ont vu naître dans leur sein des hommes profondément empreints de la physionomie nationale, comme si la Nature les avait destinés à en offrir le modèle. » Et il cite en exemple Voltaire, le plus Français des hommes, celui que la Nature semble avoir chargé de représenter la France à l’univers.
Andrieux, dont on vient de publier les Œuvres, est un élève de Voltaire, ingénieux, spirituel et sans force ; tel il s’est toujours montré dans ses comédies, dont une seule est restée au théâtre, les Étourdis et dans ses poésies légères.
Voltaire, au chant VII de la Henriade, introduisant le fantôme divin de saint Louis et lui faisant révéler en songe à Henri IV le cours des choses futures et les destinées de sa race, a dit : Regardez dans Denain l’audacieux Villars, Disputant le tonnerre à l’aigle des Césars.
Je ne suis pas très-sûr que des peintres comme Horace Vernet, des écrivains comme Voltaire (horresco referens) lui fassent l’effet d’être des peintres ou des écrivains.
Entendons-nous bien : je ne parle pas de la langue de Molière, plus riche, plus ample et plus diversement composée ; mais quand on se place au point de vue de Racine, au centre de son œuvre, et qu’on le considère, ainsi que l’ont fait Voltaire et tous ceux de son école, comme le dernier terme de la perfection dans le style, on n’a pas alors à signaler de meilleur préparateur que Vaugelas.
Voltaire nomme à peine Don Quichotte dans ses écrits.
J’insiste donc parce que le danger aujourd’hui est dans le sacrifice des littérateurs et poètes que j’appellerai modérés : longtemps ils ont eu l’avantage et tous les honneurs ; on plaidait pour Shakespeare, pour Milton, pour Dante, pour Homère même ; on ne plaidait pas pour Virgile, pour Horace, pour Boileau, Racine, Voltaire, Pope, le Tasse, admis et reconnus de tous.
Il ne dirait même pas, en parlant de lui, comme Voltaire : L’heureux Villars, fanfaron plein de cœur !
Dans les bons siècles on proportionne l’estime et la louange : l’abbé Goujet reste à sa place, et Voltaire à la sienne.
Jasmin se rattache, je l’ai dit, à Marot, né tout près de là, à Villon, l’enfant de Paris, à Boileau du Lutrin, à Gresset, à Voltaire des Poésies légères, à Parny, à Béranger.
quoique Villon ne puisse passer rigoureusement pour un grotesque ; c’est un fils direct des trouvères et un malicieux aïeul de Voltaire.
A relire plus froidement aujourd’hui cette première moitié de son théâtre, on pourrait remarquer que, s’il se montre évidemment de la postérité de Racine par les soins achevés du style, il tiendrait plutôt de l’école dramatique de Voltaire par certaines préoccupations philosophiques et certaines allusions aux circonstances.
Le xviiie siècle comptait sans doute, ou plutôt ne se donnait plus la peine de compter une foule de pièces galantes, satiriques, badines, étincelantes d’esprit ; Voltaire y excelle ; les Saint-Lambert, les Rulhière, les Boufflers l’y suivaient à l’envi ; mais dans l’art sérieux, dans cet idéal qui s’applique aussi à ces formes légères, dans ce tour sévère et accompli qui achève la couronne de la grâce elle-même, qu’avait-on, depuis longtemps, à citer ?
Voltaire l’a bafoué ; Jean-Jacques l’a exalté et déprimé tour à tour ; Diderot, dans sa Correspondance, nous le fait aimer comme un galant et brillant mélange ; Crébillon fils nous en déroule les conversations alambiquées et les licences.
Il est né naturel et achevé ; simple, rapide, réservé pourtant, un style à la façon de Voltaire, mais chez une femme ; pas de manière, surtout dans Edouard ; un tact perpétuel, jamais de couleur équivoque et toutefois de la couleur déjà, au moins dans le choix des fonds et dans les accompagnements ; enfin des contours très-purs.
Voltaire écrit quelque part : Bellone va réduire en cendres Les courtines de Philipsbourg Par cinquante mille Alexandres Payés à quatre sous par jour.
Voltaire, en faisant l’histoire de la civilisation, avait donné une esquisse de l’histoire de France : en dehors de ses ouvrages, les Français ne pouvaient rien lire de passable sur l’histoire de leur nation.
N’était la valeur de la pensée philosophique, on croirait par endroits lire un discours de Voltaire.
Après cela, mille causes accessoires y ont concouru : on a pris goût au style poétique de la Bible, qui était pour Voltaire un sujet d’ineffables risées ; on a pris goût aux littératures étrangères ; on a étudié l’Orient ; on a eu besoin d’émotions nouvelles ; le sentiment de la liberté et de l’individualisme s’est montré partout, s’est appliqué à tout ; enfin on retrouve ici, comme dans mille autres questions, l’influence de tout ce qui compose ce qu’on appelle l’esprit du siècle.
On peut rapprocher cette opinion celle de Voltaire qui assigne l’imposture des prêtres comme l’origine des religions.
Nous aimons en toi notre Voltaire, clair, rieur et superficiel.
J’ai emprunté à Voltaire ses articles « Goût » et « Style » du Dictionnaire philosophique, son Temple du goût, et quelques passages de ses lettres où il juge Boileau, Racine et Corneille.
Pascal, dans les immortelles pensées qu’on a trouvées chez lui à l’état de notes, et qu’il écrivait sous cette forme pour lui seul, rappelle souvent, par la brusquerie même, par cet accent despotique que Voltaire lui a reproché, le caractère des dictées et des lettres de Napoléon.
Vous en faites un Balzac ridicule ; Érasme n’était qu’un Voltaire modéré, un Fontenelle au goût littéraire plus sain, le précurseur de Rabelais sans ivresse, un sage qui, venu trop tôt et placé entre des partis extrêmes dont il ne pouvait épouser aucun, demandait la permission de rester neutre.
J’en trouve quelques-unes qui pourraient paraître telles, dans le volume même que je viens de lire, et qui montrent que Fénelon n’était pas du tout un évêque selon l’ordination par trop commode de La Harpe, de d’Alembert et de Voltaire.
Voltaire seul n’en avait pas, et sa parole vive, nette, rapide, courait comme à deux pas de la source.
Ce style à la Montaigne serait, à bien des égards, en guerre ouverte avec celui de Voltaire.
Courier, parmi ces écrivains du xviiie siècle qu’il énumère, a grand soin d’oublier Voltaire, qui dérangerait sa théorie juste, mais excessive42.
Il évitait avec soin les querelles et le bruit ; on le voit conseiller à Walpole, en un certain cas, de ne pas fournir le moindre prétexte de guerre à Voltaire.
Parmi les objections que Voltaire a élevées contre l’authenticité de cet ouvrage, il en est une, entre autres, qui m’a frappé par sa faiblesse et par son contresens même : Avouez, dit-il en s’adressant à M. de Foncemagne, avouez qu’au fond vous ne croyez pas qu’il y ait un mot du cardinal dans ce Testament ; pensez-vous, de bonne foi, que le chevalier Walpole se fut avisé d’écrire un catéchisme de politique pour le roi George Ier ?
Dans ce dernier trait sur les moines, on saisit la pointe légèrement railleuse du Voltaire d’alors.
Il nous confesse, qu’à la publication de son roman dans Le Voltaire, l’écriture de la chose lui a paru détestable, et que pris d’un accès de purisme, il s’est mis à le récrire complètement, en sorte, qu’après avoir travaillé, toute la matinée, à la composition de ce qui n’était pas fait, il passait toute la soirée, à reprendre et à retravailler son feuilleton.
De physionomie, c’est une espèce de Du Châtelet sans Voltaire, qui fut, mais dans le privé, astronome et mathématicienne ; de lady Byron sans lord Byron.
Il y a du Dante, en effet, dans l’auteur des Fleurs du mal ; mais c’est du Dante d’une époque déchue, c’est du Dante athée et moderne, du Dante venu après Voltaire, dans un temps qui n’aura point de saint Thomas.
Toujours est-il que ce repas chez la future protectrice de Voltaire fut une des dernières parties de plaisir de Molière, la dernière sans doute. […] Ce silence n’a rien de fort merveilleux : peut-être que la Polyxène, roman qui avait alors quelque réputation et dont l’auteur se nommait Molière, eut quelque part à ce choix. » Bret, dans son édition des Œuvres de Molière (Paris, 1773), fait suivre la Vie de Molière par Voltaire, qu’il réimprime, d’un supplément où il rapporte une tradition qu’il est bien difficile de contrôler, mais qu’on ne saurait passer sous silence. […] « Dors-tu content, Voltaire ? […] Non, non, la naissance n’est rien où la vertu n’est pas. » Ne dirait-on point un de ces vers-maximes que Voltaire introduisait dans ses tragédies, comme des engins de guerre ? […] Voltaire, Diderot, Beaumarchais sont de la race élue qui est la nôtre.
Le directeur m’a montré comment il avait fait mettre, autant qu’il est possible, à l’abri des bombes, cette admirable statue de Voltaire, qui est la pièce la plus précieuse de sa collection de marbre.
Il s’enthousiasme pour un projet de roman sur l’Orient moderne, un Orient qui se défait comme l’Occident de Madame Bovary et de Bouvard et Pécuchet. « Le nombre des pèlerins de la Mecque diminue de jour en jour ; les ulémas se grisent comme des Suisses ; on parle de Voltaire ! […] Ainsi Voltaire, le magnétisme, Napoléon, la révolution, le catholicisme, etc., qu’on en dise du bien ou du mal, j’en suis mêmement irrité. […] La disproportion entre le rêve et la réalité, la tristesse et les désillusions qui suivent les ambitions de science, d’amour ou d’action, ce qui a fourni à d’autres littératures les types de Don Quichotte et de Faust, a fourni, dans le pays de La Fontaine et de Voltaire, le type d’Emma Bovary, et n’a fourni que celui-là. […] Intellectuel d’Yonville, il figure le Voltaire local. […] Ce style a pour corps la force intelligente, condensée et comme épigrammatique de Voltaire et de Montesquieu, et pour âme un souffle oratoire discipliné à la Chateaubriand.
Elle ne perd de sa raideur, elle ne fléchit qu’au dix-huitième siècle, avec Voltaire et Beaumarchais. […] Plus tard, au temps de Voltaire, les mœurs étaient déjà changées. […] Je continue à prendre quelques documents dans Voltaire. […] Taine pour établir à quelle distance nous sommes des jugements de la Harpe et même des commentaires de Voltaire. […] Voyez déjà Voltaire, deux ou trois œuvres maîtresses surnagent seules.
C’est ce moment que Byron choisit pour louer Voltaire et Rousseau, admirer Napoléon1250, s’avouer sceptique, réclamer pour la nature et le plaisir contre le cant et la règle, dire que la haute société anglaise, toute débauchée et hypocrite, fabrique des phrases et fait tuer des hommes pour garder ses sinécures et ses bourgs pourris. […] C’est depuis trente ans seulement que l’ascendant de la classe moyenne a diminué les priviléges et la corruption des grands ; mais à ce moment on pouvait leur jeter de rudes paroles à la tête. « La pudeur, disait Byron en prenant les mots de Voltaire, s’est enfuie des cœurs et s’est réfugiée sur les lèvres… Plus les mœurs sont dépravées, plus les expressions sont mesurées ; on croit regagner en langage ce que l’on a perdu en vertu… Voilà la vérité, la vérité sur la masse hypocrite et dégradée qui infeste la présente génération anglaise ; c’est la seule réponse qu’ils méritent… Le cant est le péché criant dans ce siècle menteur et double d’égoïstes déprédateurs. » Et là-dessus il écrivit son chef-d’œuvre, Don Juan 1301. […] Il y rit horriblement, comme Swift ; bien mieux, il y bouffonne comme Voltaire. « On voulut manger le second comme plus gras ; — mais il avait beaucoup de répugnance pour cette sorte de fin. — Pourtant ce qui le sauva, ce fut un petit présent qui lui avait été fait à Cadix — par une souscription générale des dames1321. » Pièces en main1322, il y suit avec une exactitude de chirurgien tous les pas de la mort, l’assouvissement, la rage, le délire, les hurlements, l’épuisement, la stupeur ; il veut toucher et montrer la vérité extrême et prouvée, le dernier fonds grotesque et hideux de l’homme.
Et tout cela, parce qu’il a la cervelle farcie de Voltaire. » Le vieillard détestait particulièrement Voltaire et ce mécréant de Diderot, bien qu’il n’eût pas lu une ligne de leurs œuvres : lire n’était pas de sa compétence. Petre Andrévitch ne se trompait pas ; Voltaire et Diderot remplissaient, en effet la tête de son fils, et non pas eux seulement, mais encore Rousseau, Raynal, Helvétius et consorts ; mais ils ne remplissaient que sa tête.
Lekain, le favori de Voltaire, et pour tout dire, son disciple, n’était guère plus grand que M. […] On ne va pas, disait Voltaire, à la postérité avec de gros bagages. […] Il l’est, le fut, ou le doit être : disions-nous autrefois du docteur Blanche, ce que disait Voltaire de l’amour ! […] Par quelle force (de nos jours cet accident n’est arrivé qu’à Fréron, insulté en plein théâtre par Voltaire) ! […] Regnard suit Molière, dit-on ; oui, comme, à la même heure, l’abbé Dubois suivait M. le Régent au bal masqué, en lui donnant des coups de pied au cul ; comme Voltaire suivait le grand prêtre dans Œdipe, en portant la queue du grand prêtre, et en tirant la langue au public.
Voltaire y échappe entièrement, M. […] « Nous ne pouvons plus avoir, dit-il, cette grandeur tout à la fois sublime et naïve qui appartenait à Bossuet et à Pascal, et qui appartenait autant à leur siècle qu’à eux ; nous ne pouvons plus même avoir cette finesse, cette grâce, ce naturel exquis de Voltaire.
Il fallait pour cet échange mutuel entre tout le monde et quelques-uns et pour ce second travail de la dissémination des lumières la lente action de deux siècles, une langue à l’usage de tous, non plus latine ni pédantesque, l’influence paisible et bienfaisante des chefs-d’œuvre, un frottement prolongé de société, et la coopération gracieuse d’un sexe que les Saumoise de tout temps n’ont apprécié que trop peu ; en un mot il fallait, après Scaliger, que vinssent Mme de La Fayette et Voltaire. […] On n’a donc ici ni le pudding de Swift, ni le Champagne ou le moka de Voltaire.
Voltaire a dit : « Les Français n’ont pas la tête épique. » Il nous semble plus juste de dire : Les âges où nous vivons ne sont pas épiques. […] Le dessin des caractères n’est pas moins savant ; la férocité d’Argant est opposée à la générosité de Tancrède, la grandeur de Soliman à l’éclat de Renaud, la sagesse de Godefroi à la ruse d’Aladin ; il n’y a pas jusqu’à l’ermite Pierre, comme l’a remarqué Voltaire, qui ne fasse un beau contraste avec l’enchanteur Ismen.
Je crois que Raphaël dessine bien, et que Titien est un admirable coloriste, que Voltaire écrit comme pense un homme d’esprit, et que Byron chante comme l’humanité pleure, surtout dans Don Juan ! […] On ne trouve rien de ce ton dans Boileau ni dans Voltaire, ces rois de l’épître.
Il dit de Voltaire : « Voltaire a, comme le singe, les mouvements charmants et les traits hideux. » Il dit de Platon : « Platon se perd dans le vide, mais on voit le jeu de ses ailes, on en entend le bruit. » Il nous apprend que « Xénophon écrit avec une plume de cygne, Platon avec une plume d’or et Thucidyde avec un stylet d’airain ».
Gavarret parle d’un discours sur Voltaire, que devait prononcer Royer-Collard à l’Académie, et que lui seul et M. de Barante ont entendu : Royer-Collard étant souffrant et ne pouvant se rendre à l’Académie. […] » et pour ses deux auditeurs il parla son discours à l’Académie, finissant par dire qu’il comprenait qu’on commandât une étude sur Voltaire, mais qu’un éloge dudit, dans un pays, où la majorité est si immensément catholique, ça lui paraissait manquer un peu de tact.
Voltaire, le premier, était en train d’y aider par La Henriade, lorsqu’ayant eu à se plaindre du descendant de Sully, il effaça dans son poème le nom de l’ancêtre et y substitua celui de Du Plessis-Mornay.
Voltaire, dans sa liste des écrivains français du siècle de Louis XIV, lui accorde du moins ce genre de mérite : « Michel, abbé de Villeloin, composa soixante-neuf ouvrages, dont plusieurs étaient des traductions très utiles dans leur temps. » Un écrivain de ce temps-là même, Sorel, dans sa Bibliothèque française, semble mettre ce fait d’utilité hors de doute, lorsque dans une page laudative, et que Marolles n’eût pas écrite autrement si on la lui eût demandée, il disait : Entre tous les auteurs qui se sont occupés à traduire dans ce siècle-ci, on n’en saurait nommer un qui ait travaillé à plus d’ouvrages et avec une assiduité plus grande qu’a fait M. de Marolles, abbé de Villeloin.
Voltaire ne fut de l’Académie qu’en 1746, c’est-à-dire tard, comme Boileau ; mais une fois entré, bien qu’absent et de loin, il y régna et gouverna, ce que Boileau n’avait pas fait.
et l’observation est de d’Argenson répliquant au ministre : ces petits hommes chétifs d’apparence, et qu’on croirait énervés par le luxe, vérifient à l’instant par leur exemple ce que Voltaire disait des courtisans français dans La Henriade : La paix n’amollit point leur valeur ordinaire ; De l’ombre du repos ils volent aux hasards… Ils sortent du sein de la mollesse pour aller aux combats comme des lions.
. — Il y avait encore la marquise de Boufflers, la digne mère du léger et spirituel chevalier, l’amie du bon roi Stanislas et qui faisait les beaux jours de la petite Cour de Luné-ville à l’époque où Mme du Châtelet et Voltaire y étaient invités.
Il y a quelqu’un qui a plus d’esprit que Voltaire, plus d’esprit que Bonaparte, plus d’esprit que chacun des directeurs, que chacun des ministres passés, présents, à venir : c’est tout le monde.
Quoi qu’on puisse dire, il ne se découvre pas même trace de ce genre de sentiment, si conforme à la jeunesse, dans les lettres qu’écrit d’Angleterre Benjamin Constant : en revanche, il cite le Pauvre Diable de Voltaire, et il s’en revient au gîte en se souvenant beaucoup de Pangloss.
D’Argental, le correspondant de Voltaire, et Pont-de-Veyle, étaient fils de Mme de Ferriol et amis d’enfance de Mlle Aïssé.
Dans ces visites d’importance, on cause de tout : l’abbé Raynal, Rousseau, Voltaire, la Suisse, le gouvernement, les Grecs et les Romains, on effleure tour à tour ces graves sujets.
Et croyez que cet art est le plus grand de tous, bien supérieur à la petite habileté qui équilibre de bonnes phrases correctes, à la rhétorique qui enferme toutes les idées dans le même moule, aux recettes littéraires qui font la période de Rousseau et de Johnson, ou le vers de Pope et de Voltaire.
Zadig, dans le conte de Voltaire, devine, sans l’avoir vu, que le cheval échappé du roi de Babylone a cinq pieds de haut, le sabot fort petit, qu’il porte une queue de trois pieds et demi de long, que les bossettes de son mors sont d’or à vingt-trois carats, et que ses fers sont d’argent à onze deniers.
Littérairement, Bossuet, Molière et Racine sont ses dieux, et, en cela, il a la religion du grand nombre ; mais il a plus que personne ses préférences et ses exclusions : il est pour Racine presque contre Corneille, pour Voltaire décidément contre Jean-Jacques.
Que dirait Voltaire ?
« Il ne prétend à rien moins, disait La Harpe, qu’à remplacer Turenne, Corneille et Bossuet. » Il serait trop aisé après coup et peu juste de venir faire une caricature de M. de Guibert, de cet homme que tout le monde, à commencer par Voltaire, considéra d’emblée comme voué à la grandeur et à la gloire, et qui a tenu si médiocrement la gageure.
Voltaire choisit ce moment pour lui écrire comme à une puissance ; il la priait d’intéresser le roi de Pologne à la famille Sirven.
Michaud, homme fin, aimable, de plus en plus spirituel en vieillissant, et dont on cite une foule de mots charmants, était le Voltaire de ce petit groupe qui comptait de jeunes noms, dignes déjà de s’associer avec le sien.
Il n’a jamais connu cet effort combiné qui consiste à monter une pièce, à la construire, à la faire sortir plus ou moins sauve de toutes les embûches des coulisses, à la faire marcher droit et haut devant la rampe redoutable ; il n’a jamais eu à consommer, comme dit Voltaire, cette œuvre du démon.
Voltaire a dit avec autant d’esprit que de raison : De nos cailloux frottés il sort des étincelles.
Ce n’était pas seulement l’opinion du Journal de Trévoux ou du Journal des savants, c’est celle de Voltaire lui-même.
Il avait un goût prononcé pour l’histoire : celle de Charles XII par Voltaire le transporta.
Tantôt ils affirment et tantôt ils doutent, mais toujours avec innocence et candeur, n’obéissant qu’aux lumières de leur raison, et jamais à un parti pris : vrais et inimitables philosophes, que Voltaire et Montaigne rappellent quelquefois par la sincérité du doute et l’absence d’esprit de système, mais sans les égaler jamais par la forme, la richesse et la grandeur de la pensée.
Quant au comique des Contes de Voltaire, essentiellement français, il tire toujours sa raison d’être de l’idée de supériorité ; il est tout à fait significatif.
Voltaire n’avait point encore acéré et multiplié les doutes de Bolingbroke.
Que, par exemple, Voltaire tragique existe, et que Campistron n’existe pas, ni l’abbé Leblanc, ni M. de Jouy. […] Il habitait sur le quai Voltaire, la maison qui porte aujourd’hui le numéro 9 et dont le rez-de-chaussée est actuellement occupé par le docte Honoré Champion et sa docte librairie. […] En ce genre, le Déjeuner de Ferney est son chef-d’œuvre : courtisan de Louis XV, il s’honora en se faisant le courtisan de Voltaire. Il se présenta à Ferney et, comme on hésitait à le recevoir, il fit dire au philosophe qu’étant gentilhomme ordinaire il avait le droit de le voir ; c’était traiter Voltaire en roi. […] Toujours aimable, toujours aimé, causeur plein de jeunesse, il reçoit toutes les célébrités de la France et du monde dans son illustre retraite du quai Voltaire.
Nous avons beau nous faire illusion, nos Tragédies ne nous touchent que fort peu ; encore a-t-il fallu pour cela tout l’art des Corneille, des Racine, des Voltaire. […] C’est que toutes ces extrémités ne sont pas dans nos habitudes, c’est que nous ne passons pas du monstre au héros sans transition ; c’est que nous croyons à la grandeur de l’homme tel qu’il est, sans échasses ; c’est que nous admirons mieux que qui que ce soit la création en ne voulant pas l’embellir ; et si nous sommes des sceptiques et des matérialistes, c’est que nous sommes les fils de nos pères Rabelais, Montaigne, Molière, Voltaire et Balzac, et que nous ne renions pas nos aïeux. […] Il a voulu des ancêtres ; mais, tout en essayant de faire croire que Molière et Rabelais étaient dans ses rangs, il en a repoussé Voltaire comme sceptique. […] Il rejetait le rire de Voltaire, qui détruit avec tant de grâce les sophismes des imaginations enthousiastes, déréglées, sans point d’appui sur la terre ; il acceptait, en paroles au moins, si ce n’est en esprit, toutes les inventions du mysticisme, et faisait de l’art un sacerdoce, du poète un prêtre, de tout un autel. […] * * * M. de Belloy a inventé deux réalistes : Voltaire et Henry Monnier, « sans toutefois avoir jamais songé à les comparer », dit-il.
Il imite Voltaire et Alfieri ; il retarde sur Népomucène Lemercier. […] Cette bonne vieille critique à la façon de La Harpe et, ma foi, aussi de Voltaire, où cette chose un peu surannée et ancien régime, « le goût », a le principal rôle. […] Et quant aux pièces philosophiques, il n’y a pas à dire, c’est tout autre chose que les « discours » de Voltaire. […] Le déisme de Voltaire ne contient pas une parcelle d’amour de Dieu : Lamartine en déborde.
La folle dialectique de Voltaire ne montrait que la verve de Voltaire. […] La « royauté » de Voltaire avait inauguré cette grande nouveauté des mœurs. […] La royauté de Voltaire n’avait été en mainte occasion que la royauté de Scapin. […] La domination de Voltaire fut comme un essai léger de celle de Rousseau. […] Un Constant chez Voltaire, c’est un oiseau de nuit qui va blesser ses yeux à des étincelles païennes et françaises.
Je ne jurerais même pas que Voltaire ait toujours été exempt de cette faiblesse, ni Chamfort, ni Beaumarchais. […] Elles font songer aux contes philosophiques de Voltaire, aux opéras-comiques de Favart et au théâtre de Musset ; et toutefois elles ne sauraient être que de Meilhac. […] La haine de Voltaire et de sa séquelle le rendit ici perspicace. […] Voltaire étant sa bête noire, il a merveilleusement vu tout le faible de son théâtre, et que ses tragédies glissent au mélodrame. […] » Si l’on joint à ce cri divinatoire ce qu’il dit ailleurs de la tragédie de Voltaire et de la comédie de La Chaussée et de Diderot, on verra qu’il s’en est fallu de fort peu que Geoffroy n’ait esquissé — déjà !
Je l’ai rencontré, il y a une vingtaine d’années, sur le quai Voltaire, dans les bureaux d’une revue à laquelle, étant fort jeune, je travaillais inconsidérément. […] De même, à la fin du dix-huitième siècle, les esprits philosophes, les âmes sensibles, oublièrent à l’envi les querelles retentissantes de Jean-Jacques et de Voltaire. […] Pour peu qu’on eût de sensibilité et de philosophie on mettait sur sa cheminée Voltaire et Rousseau en pendants. […] Les petits bustes de Voltaire et de Rousseau, qu’ils mettaient sur leur cheminée, étaient pour eux le symbole de la raison et de la justice victorieuses. […] C’est un humaniste habile et un écrivain de grand mérite, connu par des études littéraires et philosophiques, c’est un excellent biographe de Voltaire, enfin, c’est M.
Quand on aura l’éloignement et le recul nécessaires pour pouvoir porter sur Hugo un jugement relativement définitif, tout étant toujours relatif en ces sortes de choses, on s’y prendra, sans doute, avec Victor Hugo, comme nous en usons avec Corneille ou avec Voltaire. […] Savez-vous quelle était, sur « le vrai Voltaire », et le Voltaire qui « devait rester », l’opinion non pas générale, mais universelle et unanime, des contemporains de Voltaire et des hommes de la génération suivante, jusqu’à, et y compris, Chateaubriand ? L’opinion universelle était que ce qui devait rester éternellement de Voltaire, c’était ses tragédies.
De là, ce Pascal émasculé du dix-septième siècle, si fort cependant qu’il épouvanta jusqu’à Voltaire comme un monstre d’éloquence, de misanthropie et de passion. […] Qu’il eût de l’esprit comme Voltaire, qu’il fût fringant comme un roué, beau comme un Dieu grec, et redoutable comme un bravo, il suffisait pour s’en convaincre de le voir une fois et de l’entendre. […] Voici que l’homme moderne a cessé d’avoir cette notion du déisme, dogme consolateur où se réfugiaient les contemporains de Voltaire et de Rousseau. […] Nous commençons de définir à sa valeur la besogne accomplie par Voltaire. […] Ce qui maintenait debout un Boileau, un La Harpe, un Voltaire même dissertant sur Corneille, ou bien un Planche discutant sur Hugo, c’était la foi inébranlable en quelques canons absolus d’esthétique.
Depuis Voltaire, personne, en matière religieuse, n’a été plus bouffon ni plus mordant. […] Un d’entre eux, romancier, critique, historien et poëte, favori de son siècle, lu dans l’Europe entière, fut comparé et presque égalé à Shakspeare, eut plus de popularité que Voltaire, fit pleurer les modistes et les duchesses, et gagna six millions. « Je jurerais, je crois, lui écrivait son éditeur en achevant un de ses livres1205, et par tous les serments qu’on pourrait proposer, que je n’ai jamais éprouvé un plaisir aussi entier… Lord Holland me dit quand je lui demandai son opinion : Mon opinion ! […] malgré cet air ecclésiastique et les tirades contre Voltaire et son siècle1221, on se sent pris comme par un discours de Théodore Jouffroy.
» Elle n’en était pas moins enthousiaste pour cela. « Voltaire et l’Empereur se disputaient le cœur de Mme de Coigny. » Ajoutez qu’elle était devenue dévote, et combinez le tout comme vous le pourrez : il en résultait, quoi qu’il en soit, un très agréable composé, une vieille de grand air, vive, spirituelle, pas du tout ennuyée ni ennuyeuse.
Son Henri IV est très original, très instructif, et cependant il ressemble fidèlement à l’ancien, tel que se le figuraient nos pères, tel que Voltaire l’a célébré ; il sort du même fonds.
Que l’on ne dise donc jamais qu’il écrivait comme Voltaire, car il commença par un véritable style métaphysique, helvétique, mélange d’abstrait et de concret, et dont Rœderer lui-même se raillait.
« Celle qui s’est ri si dédaigneusement de toute la Grèce, celle qui avait à sa porte un essaim de jeunes amants, Laïs consacre son miroir à Vénus ; car, me voir telle que je suis, je ne le veux pas ; et me voir telle que j’étais, je ne le puis. » Et comme l’a traduit heureusement Voltaire, mais en y mettant un peu plus d’esprit : Je le donne à Vénus puisqu’elle est toujours belle, Il redouble trop mes ennuis.
Voltaire a trop de rapidité et d’à-propos pour s’astreindre à un modèle ; il passe outre et sert hardiment, et sous toutes les formes, les lumières, les idées et les passions de son temps.
Deschanel et y lire un très bon chapitre sur Molière, une suite de chapitres sur Christophe Colomb, une belle page sur Voltaire.
C’est que le grand et primitif Roland était tout à fait oublié, et, grâce au Pulci, au Bojardo, à l’Arioste, ce noble et fier sujet, ce héros du Moyen Âge, était tombé en parodie ; tout comme Jeanne d’Arc après Voltaire (si j’ose bien faire ce rapprochement), il était gâté pour le sublime.
Cela est encore plus vrai de Voltaire, qui toutefois dans certains passages de Zaïre, surtout dans quelques-unes de ses poésies diverses, a effleuré des cordes touchantes, deviné de secrets soupirs, mais ne l’a fait qu’à la traverse et par caprices rapides, il y a de la rage et trop d’insulte dans les cris étouffés de Gilbert.
Voltaire s’enrichissait plutôt encore à l’aide de spéculations étrangères que par ses livres, qu’il ne négligeait pourtant pas.
Du temps de Voltaire et de La Harpe, le comte de Schouwaloff était passé maître sur la double colline d’alors, et avait ses brevets signés et datés de Ferney et autres lieux.
Nulle part, je le crois, on n’avait expliqué d’une manière aussi vivante et aussi suivie, dans un relief aussi palpable, le fait du passage même, le secret d’une métamorphose qui, plus sensible dans ce grand cadre, n’y fut point pourtant circonscrite et dut se répéter en diminutif sur plus d’un point de l’empire : Des prêtres fortunés foulent d’un pied tranquille Les tombeaux des Catons et la cendre d’Émile, a dit Voltaire.
Voltaire en avait donné l’exemple avec séduction ; Robertson y avait porté une mesure spécieuse, et Raynal un excès rebutant.
Sans parler des précurseurs, de Voltaire, de Jean-Jacques Rousseau, les hommes naissent comme des personnifications instantanées des choses qui doivent se penser, se dire ou se faire.
Jamais il ne rime au petit bonheur, par à peu près, à coups d’épithètes incolores, « à la Voltaire ».
Saint Louis a trop souvent dans les histoires, et même chez Voltaire, l’angélique et fade pureté d’une image de piété : chez Joinville, il est saint, autant et plus qu’ailleurs : mais il est homme, et vivant.
3° Elle interrompt par l’Heptaméron la continuité de la nouvelle française, railleuse et maligne des fabliaux à Voltaire : elle inaugure le sérieux, la pitié, le tragique.
Toutes les parties de ses romans qui ne sont ou peuvent n’être que des contes à la Voltaire, sont charmantes : quel malheur qu’il ne s’en soit pas tenu là !
* La gloire de M. de Montesquieu, fondée sur des ouvrages de génie, n’exigeoit pas sans doute qu’on publiât ces fragmens qu’il nous a laissés ; mais ils seront un témoignage éternel de l’intérêt que les grands hommes de la nation prirent à cet ouvrage ; & l’on dira dans les siecles à venir : Voltaire & Montesquieu eurent part aussi à l’Encyclopédie.
Rappelons-nous les polémiques de Ronsard et de Grévin, celles de Boileau et de l’abbé Cottin, de Voltaire et de l’abbé Desfontaines.
France, aussi délicieusement puéril, dans sa bonhomie d’écrivain notoire, que finement éclairé, à sa mesure, du sourire d’ironie qui a plissé les lèvres de Voltaire, et peut-être des lèvres plus antiques, et d’humanité moins complexe, celles, non d’Épicure, mais de Pyrrhon ?
Saluons par conséquent un Décadent aussi dans Chateaubriand, auteur de la triste tragédie de Moïse, où il se montre le rival lamentable des La Harpe et des Marmontel et l’élève de Voltaire ou de Crébillon.
Le XVIIIe siècle n’a ni Racine ni Bossuet ; et pourtant il est bien supérieur au XVIIe ; sa littérature, c’est sa science, c’est sa critique, c’est la préface de l’Encyclopédie, ce sont les lumineux essais de Voltaire.
On n’a plus, il est vrai, le plaisir d’y entendre Piron, Voltaire, etc. » Piron et Pindare !
Maury devant notre illustre Académie, écrivait Voltaire, je croyais, à l’article des Croisades, entendre ce Cucupiètre ou Pierre l’Ermite, changé en Démosthène et en Cicéron.
M. l’Abbé d’Açarq, à l’imitation de M. l’Abbé d’Olivet, a donné en 1770. de nouvelles observations sur Racine, Boileau, Voltaire, où il y a du bon à recueillir ; mais il pousse quelquefois trop loin sa sévérité.
Je ne dis pas que le philosophe Voltaire par exemple, s’occupe en vain à démontrer la vérité et à démasquer l’erreur, car je dirais une grande sottise et la révolution qu’il a produite dans les esprits d’un bout de l’Europe à l’autre déposerait contre moi ; mais je peux bien avoir dit que l’abbé Baudeau et M. de La Rivière et M.
C’est elle qui fait dire à Voltaire : le moissonneur ardent, qui court avant l’aurore… etc.
En face de toute cette argile de Voltaire, l’homme religieux, en M.
Quand Gœthe, lutiné par l’idée de Voltaire, voulut jouer aussi à l’universalité, quand il se fit naturaliste, dessinateur, et dessinateur jusqu’au point de dire « qu’en dessinant, son âme chantait un morceau de son essence la plus intime », Gœthe tombait de son ancienne poésie, sentie, ressentie, exprimée, selon l’âme qu’il avait (et il n’en avait pas beaucoup), dans l’art élégant, ingénieux, fin, savant ; dans l’art qui est toujours le stérile, quoique le matériel amour des choses difficiles.
Puisqu’il s’emparait de l’idée chrétienne, de cette donnée qu’il faut accepter toute ou rejeter toute, car, si on est chrétien, il n’est pas permis de manquer à sa foi, et, si on est vraiment un homme, d’affaiblir par des arrangements de fantaisie, l’Évangile, l’Apocalypse, les Mystiques, la Légende et la Tradition, — puisque, ravi par la sombre splendeur du dogme de l’Enfer, il foulait d’un pied libre le cadavre de Voltaire, se souciant peu des rires que cet autre démon a semés sur les lèvres humaines, et se dévouant à chanter les supplices qui répugnent tant pour l’heure à notre spiritualisme épouvanté, il fallait qu’il allât jusqu’au cœur de l’idée chrétienne, il fallait qu’il la creusât dans tous les sens pour lui arracher toutes ses beautés !
Sous ce titre : Les Rois, il a encadré aussi bien un grand drame qui s’est joué dans le plus grand monde autrichien, les actes de folie et aussi de sagesse du roi de Bavière ; que d’exquises réflexions pleines de sagesse sous cette forme ironique qui fait songer aux contes de Voltaire. […] C’est le conte d’un Voltaire croyant, plein d’une philosophie sereine, que le récit de M. de Wyzewa. […] Il cite ce mot de Voltaire à propos de ses querelles avec Maupertuis : « Deux Français, dit-il en se levant de son fauteuil, deux Français ! […] Les détails abondent dans ce livre, par là difficile à résumer : le mouvement déjà sensible de la Révolution qui s’achemine n’échappe pas à de Maistre ; il manifeste déjà son horreur pour Voltaire, de qui il devait écrire : Je voudrais lui faire élever une statue… par la main du bourreau. […] Adieu, mon cœur… » Plus loin, il plaide contre Voltaire, demandant que la femme soit l’égale de l’homme.
Quand Voltaire voulait donner son avis sur une question à la mode, il publiait une brochure ; nous autres, nous publions un article dans une revue ou dans un journal ; mais Voltaire, au bout de l’année, ne recueillait pas en un volume ses diverses brochures ; il les laissait suivre séparément leur destinée. […] Cependant si le dix-huitième siècle écrit mal, c’est sans le savoir ; il trouve que Voltaire écrit bien, surtout en vers ; il ne reproche à Ducis que la barbarie de ses modèles ; il a un idéal ; il n’admet pas que la philosophie soit une excuse de la grossièreté littéraire ; on versifie les traités d’Isaac Newton et jusqu’aux recettes de jardinage et jusqu’aux manuels de cuisine. […] On retrouve là l’antinomie qui surprend dans Voltaire et dans les voltairiens d’hier : le même homme, courageux dans le sens de la justice ou de la liberté politique, se trouble et recule s’il s’agit de nouveauté ou de liberté littéraire ; arrivé à Tolstoï et à Ibsen, ayant fait une allusion à leur gloire, il ajoute (en note) : « Sont-ce là des gloires bien établies, celle d’Ibsen surtout ? […] Les formules changent aussi selon les périodes : au xviiie siècle, la non-imitation était qualifiée de faute contre le goût, et c’était grave au temps où Voltaire érigeait un temple, qui n’était qu’un édicule, à ce dieu badin ; jusqu’à ces dernières semaines et depuis quelque dix ans, les artistes et les écrivains rebelles à démarquer les maîtres furent stigmatisés soit de décadents, soit de symbolistes. […] Dès que Voltaire sait lire, il lit Boileau.
Quand Voltaire raille les Croisades, il est très bien guidé par son instinct. […] On se dit libéral parce qu’on répète les anciennes polémiques de Voltaire et de Diderot ; on se croit progressiste parce qu’on s’acharne à démolir ce qui est rasé. […] Les dix ou douze citations qui reviennent chacune deux cents fois environ dans ses ouvrages sont des phrases de Montesquieu et Rousseau, des vers de Jean-Baptiste Rousseau et Voltaire. […] « La liberté dans l’homme est la santé de l’âme », comme a dit Voltaire. […] Voltaire use de cet argument, Volney en abuse.
À toutes vos critiques, nous répondrons : c’est vrai ; et vous voilà empaillé, cristallisé, momifié dans votre victoire avec deux ou trois grands noms, Boileau, Voltaire, Racine, tout au plus. […] Toute cette intervention du remords ou de la fatalité dans l’action dramatique sous la forme de larves et de démons a été de tout temps du domaine de la poésie, et Voltaire, le plus froid et le plus positif des écrivains dramatiques, n’a pas dédaigné de reproduire à la scène l’ombre de Ninus. […] Goethe ferma le siècle de Voltaire avec un éclat qui effaça Voltaire lui-même. « On sent dans cette pièce, dit madame de Staël on parlant de Faust et en le comparant à plusieurs écrits de Voltaire, une imagination d’une toute autre nature ; ce n’est pas seulement le monde moral tel qu’il est qu’on y voit anéanti, main c’est l’enfer qui est mis à sa place. […] Goethe, tout disciple de Voltaire qu’il est, le laisse bien loin derrière lui dans l’art de rapetisser Dieu et d’écraser l’homme : c’est que Goethe a de plus que Voltaire la science et le lyrisme, armes plus puissantes que l’esprit, et auxquelles il joint encore l’esprit, dernière flèche acérée qu’il tourne contre la patience de Dieu aussi bien que contre la misère de l’homme.
Il y entendait parler de bien des choses, surtout de littérature, de Corneille et de Racine, de Geoffroy et de Voltaire, des Grecs et des Romains, de tout ce dont on causait volontiers alors, après les excès de la Révolution, avant le réveil de 1814, à l’ombre du soleil de l’Empire, « à cette époque, nous dit-il, où l’on avait de l’esprit, mais où l’on ne pensait pas. » Penser, en effet, c’est n’être jamais las, c’est recommencer toujours, et l’on avait horreur de rien recommencer. […] qui vous écoutent et qui vous répondent aussi, et le tout fait une réunion délicieuse, totam suavissimam gentem , disait Voltaire en parlant de la plus aimable des sociétés philosophiques de sa jeunesse.
. — Pascal, Swift et Voltaire. — Regnard et le Sage. — Piron et Legrand. — Caractère général du tragique. — II. […] L’ironie la plus légère, la plus fine, fût-ce celle de Voltaire, est toujours grave au fond, quelque enjouée qu’en soit la forme.
Voltaire seul, dans les temps modernes, a autant écrit ; mais Voltaire, maître, pendant une longue vie, de ses heureux loisirs, n’était ni orateur dans les causes privées, ni orateur dans les causes publiques, ni proconsul, ni général d’armée, ni consul, ni lieutenant de Pompée, ni négociateur avec César, ni accusateur de Catilina, ni sauveur de la patrie, ni proscrit, ni victime des triumvirs.
Son livre est plein de critique ; c’est un homme d’esprit sans parti pris, qui vous mène promener à travers le monde et qui vous dit : « Regardez et concluez. » Il a aussi beaucoup d’analogie avec Voltaire dans ses Mœurs des nations. […] Il vaudrait autant prendre aujourd’hui Voltaire pour le père de l’histoire moderne.
Il faut y joindre le Supplément au Voyage de Bougainville, qui est bien la chose la plus divertissante qu’ait jamais inspirée la philosophie et qu’il faudrait mettre au rang des contes de Voltaire. […] Il s’agit tout simplement de se procurer un tas d’objets hétéroclites et de les orner, avant de les mettre en vente, d’étiquettes de ce genre : « Plume avec laquelle Voltaire écrivit La Pucelle », ou bien : « Balle trouvée dans l’une des bottes de Napoléon après la bataille de Wagram », etc.
Ce Voltaire mystique, ah ! […] Ces Mémoires qui annonçaient, sous Charles II, le style de Voltaire, eurent une influence incontestable. […] Le Figaro, le Journal ont livré, nouvelle par nouvelle, Du Sang, de la Volupté, de la Mort ; l’Écho de Paris, le Lamartine qui paraîtra dans les Maîtres, mais en cherchant avec quelque ardeur, nul doute qu’on ne trouve, dans ces journaux, aussi bien que dans le Voltaire et dans la Cocarde, de quoi satisfaire notre curiosité religieuse. […] Les noms de Rousseau, de Voltaire, viennent aussitôt sous ma plume ; je ferai allusion à Byron également, bien que la figure de ce romantique évoque une atmosphère toute chargée de violence et de passion dans laquelle un professeur de culture morale comme M.
Comme Voltaire a raison, dans ses Commentaires, lorsqu’il dit : « Cette scène est une contestation entre deux amants, qui ressemble aux conversations de Clélie ; rien ne serait plus froid même dans un sujet galant, à plus forte raison dans le sujet le plus terrible de l’antiquité… Racine même y aurait échoué avec ses vers élégants : comment donc put-on supporter une si plate galanterie, débitée en si mauvais vers ? […] À propos de cette dernière scène du quatrième acte, Voltaire a été, dans ses Commentaires, dupe de l’illusion. […] Non, et si Voltaire l’a fait, c’est que, ne songeant qu’à Sophocle, il avait oublié que dans le quatrième acte de la pièce de Corneille, Œdipe est encore ignorant de son état de parricide et d’incestueux. […] Il admirait Montesquieu, Buffon, Voltaire, et il conservait une amitié fidèle à Marmontel et à Palissot. […] C’est Voltaire qui avait donné l’exemple de ces petites imitations, en faisant passer un reflet d’Othello dans Zaïre.
La réunion d’un certain art et du naturel au sein de l’imagination la plus vive n’aura lieu que chez Mme de Sévigné ; et cet art encore plus insensible et qui n’est plus que du goût, joint au naturel le plus parfait et le plus continu, ne se rencontrera qu’une fois dans tout son complet, chez Voltaire.
Fontainius in Conspicillis,La Fontaine dans le conte des Limettes ; Rulhierus in Ludis, Rulhière dans le poème des Jeux de main ; Voltairius in Asoto, etc, Voltaire dans l’Enfant prodigue, etc.
Il aurait pu lui dire, en effet, comme Voltaire le dit un jour au chevalier de Boufflers : Et j’aime en vous mon héritier.
que Voltaire visitant rapidement l’Angleterre et emportant de là tout ce qu’il pouvait de notions et d’idées, tout un butin de philosophie et de littérature pour en gratifier la France, avait plus noblement le démon en soi et ce que je ne crains pas d’appeler le diable au corps !
« Les recueils épistolaires, quand ils sont longs, offrent les vicissitudes des âges : il n’y a peut-être rien de plus attachant que les longues correspondances de Voltaire, qui voit passer autour de lui un siècle presque entier.
L’élément théocratique qui entre dans son organisation sociale lui a donné quatorze siècles d’existence63… » A-t-il bien pu, lui, M. de Bâville, dans le courant de la phrase, dire Bossuet tout court, citer d’emblée et sur la même ligne Pascal, Molière et Newton, Molière un comédien d’hier, Newton que Voltaire le premier en France vulgarisera ?
Durant la seconde moitié du xviiie , Voltaire, Marmontel, La Harpe, Fontanes, ne cherchaient encore dans les œuvres de Racine et de ses illustres contemporains que des exemples de goût et des éclaircissements en vue des théories classiques consacrées.
Voltaire, de toutes parts entouré, y échappe le plus souvent à force d’esprit et de saillie vive.
Ici, ma conscience d’écrivain et d’homme qui se croit le droit d’examen et de libre opinion se révolte, et prenant votre liste même, monsieur et respectable confrère, monsieur Suin, je la relève et je dis : Dans cette suite de livres que vous confondez sous une même dénomination infamante, je trouve Voltaire tout d’abord, le premier (et il est bien juste qu’il soit le premier) ; je le trouve pour son Dictionnaire philosophique, qui n’a le tort que de dire bien souvent trop haut et trop nettement ce que chacun pense tout bas, ce que l’hypocrisie incrédule de notre époque essaye de se dissimuler encore.
Les ouvrages de Voltaire, ceux de Marmontel et de La Harpe.
Ce discours avait plus de rapport avec la langue de Voltaire, que les vers ampoulés de Brébeuf ou de Chapelain.
En 1753 (Voltaire, Dictionnaire philosophique, article Population ), le dénombrement des feux donne 3 550 499 feux, outre 700 000 âmes à Paris, ce qui fait de 16 à 17 millions d’habitants si l’on compte par feu 4 personnes 1/2 et de 18 à 19 millions si l’on en compte 5.
Ce n’est pas non plus la raison des idéologues et des philosophes, la raison raisonnante, analytique et critique, qui loge tout l’univers en formules abstraites dans l’esprit humain, et réduit toute l’activité de l’intelligence à une sèche algèbre : ce n’est pas la raison de Voltaire et de Condillac.
De la tentative de La Chaussée et de Diderot, il n’était guère resté, conformément au sentiment de Voltaire, que la comédie mixte, où des scènes attendries et pathétiques alternent avec les scènes plaisantes.
Vous êtes trop grands l’un et l’autre pour vous haïr. » — Sur la mort de Mme de Girardin : Elle s’en est allée… La foule ne comprend pas les grandes âmes… Je voudrais m’en aller aussi Je rêve aux morts ; je les vois Je méprise la haine et la calomnie Idem Je travaille : le travail est bon Je suis las ; mais quelqu’un dans la nuit me dit : Va Je rentrerai, comme Voltaire, dans mon grand Paris.
Il s’inspira de l’Arioste et surtout de Voltaire, dont la langue et l’esprit lui étaient plus familiers.
J’ai déjà cité l’aventure de Voltaire à ses débuts, lorsqu’il voulut mettre en scène Œdipe, cette victime sanglante du destin.
Ce sont des Philosophes qui ont mis Seneque au dessus de Cicéron, Lucain au dessus de Virgile, Despréaux au dessous de Quinault, les Tragédies de Corneille & de Racine au dessous de celles de Voltaire, Lamothe à côté de J.
Mais cet homme aux quarante millions — que dirait l’Homme aux quarante écus de Voltaire ?
Je ne suis ni le prince Eugène, ni Voltaire, ni Mirabeau ; et, quand je posséderais leur puissance, j’aurais horreur de les imiter dans leur ressentiment.
Une étude du xviiie siècle où manqueraient Rousseau et Voltaire ne serait pas plus incomplète que cette même étude d’où serait absent Mirabeau.
De quel droit lancez-vous dans quelque chose dont vous doutez vous-mêmes les âmes obscures de vos condamnés, ces âmes telles que Voltaire et M.
Il en parle avec un sens très-juste et très-fin dans cette belle lettre à M. de Corcelles : « Comme vous, mon cher ami, je n’ai jamais eu beaucoup de goût pour la métaphysique, peut-être parce que je ne m’y suis jamais livré sérieusement, et parce qu’il m’a toujours paru que le bon sens amenait aussi bien qu’elle au but qu’elle se propose ; mais néanmoins je ne puis m’empêcher de reconnaître qu’elle a eu un attrait singulier pour plusieurs des plus grands et même des plus religieux génies qui aient paru dans le monde, en dépit de ce que dit Voltaire, que la métaphysique est un roman sur l’âme.
J’ai, répondit l’Italien, les mêmes plaintes à me faire à moi-même au sujet de la poésie française ; je crois savoir assez bien votre langue ; j’ai beaucoup lu vos poètes ; cependant les vers de Chapelain, de Brébeuf, de Racine, de Rousseau, de Voltaire, tout cela est égal à mon oreille, elle n’y sent que de la prose rimée.
Délécluze, devait se venger et nous venger des polissonneries de Voltaire ?
Dans l’Œdipe-Roi, ce chef-d’œuvre de Sophocle que Voltaire avait cru perfectionner, l’abaissement de la puissance, le châtiment des fautes dont elle est coupable, même sans le savoir, toute cette leçon vivante dans le drame est résumée par le chœur en axiomes sublimes.
C’est une Somme que les romans de Voltaire, malgré leur courte étendue : Candide et Zadig ne consistent qu’en une succession d’épisodes. […] Au contraire les romans de Lesage, de Voltaire, de Rousseau, sont presque des romans à tiroirs, Le Diable boiteux et Zadig en sont tout à fait. […] Pareillement ce qui reste le prodige et le délice des romans de Voltaire, ce sont ces doigts infatigables, d’intelligence et de flamme, ces doigts de fée railleuse toujours aperçus sous les robes transparentes de leurs marionnettes, sous le Guignol de Zadig ou de L’Ingénu. […] Bourget ne demande ses exemples qu’à la littérature dramatique (Corneille et Musset, Voltaire et Hugo) dont l’optique est fort différente de celle du roman. […] Je ne dis pas que cela ne se soit pas réalisé parfois, et trois « ménages » me viennent à l’esprit : Voltaire et Mme du Châtelet (qui était un cerveau remarquable), Constant et Mme de Staël, George Sand et Alfred de Musset.
Que dirait-on aujourd’hui d’un critique qui jugerait Calvin d’après les piétistes étroits et déplaisants qui se réclament de lui, Rabelais d’après les chroniqueurs orduriers qui se disent rabelaisiens, Racine d’après Campistron, Voltaire d’après M. […] On l’a comparé à Voltaire, parce que Voltaire, comme lui, a été le représentant de son siècle, mais Voltaire n’avait ni sa science ni son originalité de pensée et de style ; on l’a comparé à Gœthe, mais Gœthe est avant tout un artiste créateur, et son horizon intellectuel, si vaste qu’il fût, ne pouvait avoir, au temps où il a vécu, l’étendue de celui de Renan. […] Ils sont par rapport à nous ce qu’était l’Angleterre par rapport à la France au temps de Voltaire. […] Voltaire, Vico, Daniel de Foë ont proclamé au xviiie siècle ce principe que l’homme est fait pour l’action, se sauve par l’action.
La France a toujours été « de la religion de Voltaire. » La Fontaine ne fait que reprendre et sans aigreur les plaisanteries du moyen âge. […] Quelqu’un a-t-il parlé des hommes avec plus de compassion, et de la vie avec plus de tristesse, que « le prince des moqueurs », Voltaire ?
La Chaumière indienne est un beau plaidoyer pour l’existence, la personnalité et la providence de Dieu ; c’était une imitation de Voltaire, attaquant l’intolérance par l’onction, au lieu de l’attaquer par le ridicule, mais mettant toujours le Dieu à part, même avant de purifier son temple. […] Voltaire, qui a tout, n’a pas l’onction, le résumé de tout.
27 septembre Voltaire, et encore et toujours cette histoire de sa fièvre à l’anniversaire de la Saint-Barthélémy. […] Et bien, moi aussi je te baptiserai, Voltaire, tu es Satan-Prud’homme.
Voltaire, qu’il condamne, ne laisse pas de le charmer par ses grands airs. […] Comparez une lettre de Voltaire et une scène de Georges Dandin. […] Nous nous couchons et, tout près de mon lit dressé là comme un campement, j’avise un Voltaire en vingt-cinq volumes, où je cherche la Henriade, pour m’endormir. […] Mais ce Voltaire, insolent par sa taille, elle l’a sorti de sa coquille et brûlé. […] Je voulus lui toucher un mot de Voltaire.
Il sait les lois générales des nombres et des lignes ; il sait ce que sont les forces physiques : la pesanteur, la lumière, le son, l’électricité, la chaleur, et il sait qu’elles ne sont peut-être que les diverses apparences d’un mouvement unique et qu’elles obéissent toutes à des lois semblables dont un certain nombre d’exemples ont suffi à lui montrer l’éternelle fixité. » Soit l’histoire naturelle, l’anthropologie, l’histoire, un humanisme fait de la tradition gréco-romaine, où le christianisme ne figure que pour avoir versé dans le cœur de l’homme nouveau « le sentiment nouveau de la pitié » (contre sens qui vient de la proscription subie officiellement par tous les sens du mot charité), et qui se termine sur « la Réforme et la Renaissance l’éveillant pour ainsi dire de la longue nuit du passé, et lui mettant au front comme une aurore le rayon de la liberté de penser ; la France moderne, de Descartes à Voltaire, achevant dans une langue d’une force et d’une précision définitive l’affranchissement de son esprit, et faisant enfin, dans l’explosion de 1789, tomber autour de lui les dernières entraves, et le dressant, au milieu du monde, dans la hauteur de tous ses droits et le rayonnement de toutes ses libertés. » Évidemment, c’est monument de Gambetta, c’est court, et l’on comprend que ce manifeste officiel du laïcisme ait été alors accueilli avec quelque gaîté par l’opinion littéraire, laquelle allait céder au mouvement dit des Cigognes, et prendre parti, en sens divers, dans la bataille Brunetière-Berthelot de 1894 sur la faillite ou l’apothéose de la science, — sorte d’ouverture de l’affaire Dreyfus, où l’on se disputa fort le jeune Français de demain. […] Tandis que le radical descend de Voltaire, le socialiste descend de Rousseau, et le chien et le chat peuvent bien appartenir au même foyer, se faire pendant comme les chenets du feu de gauche, comme les petits bronzes de Voltaire et de Rousseau sur la cheminée, leur hostilité congénitale apparaît à de multiples occasions. […] Je sais, au temps de Combes, des radicaux clairvoyants qui discernaient un néo-cléricalisme dans le socialisme, comme, dans la religion de Jean-Jacques, Voltaire retrouvait le principal de ce qu’il combattait.
Fétis, qui veut absolument établir pour l’éternité la prédominance de la musique dans le drame lyrique, l’opinion d’esprits tels que Gluck, Diderot, Voltaire et Goethe n’est pas à dédaigner. […] Non, jamais Voltaire n’eût écrit une pareille turpitude. Voltaire avait trop de goût ; d’ailleurs, il était encore homme d’action, et il aimait les hommes. […] Voltaire ne voyait de mystère en rien ou qu’en bien peu de chose. Mais Victor Hugo ne tranche pas le nœud gordien des choses avec la pétulance militaire de Voltaire ; ses sens subtils lui révèlent des abîmes ; il voit le mystère partout.
Montaigne, La Fontaine, Madame de Sévigné, Voltaire, sont du nombre. […] C’est assurément le cas de répéter après Voltaire qu’il n’est rien de tel que d’arriver à propos. […] Voici comment ce livre a été apprécié par Voltaire : « Un des ouvrages qui contribuèrent le plus à former le goût de la nation, et à lui donner un esprit de justesse et de précision, fut le petit recueil des Maximes de François duc de La Rochefoucauld.
Il tend, par-dessus les âges, une main à Rabelais et l’autre à Voltaire. […] Ce serait une solution… « Voltaire ne comprend pas que Joad ne saisisse pas au bond la proposition d’Athalie. […] Toujours l’insoluble contradiction si bien exposée par Voltaire dans l’Histoire d’un bon Brahmin ! […] » Le bon brahmin répond négativement, et Voltaire raisonne là-dessus : « Il y a pourtant une furieuse contradiction dans cette manière de penser ; car enfin, de quoi s’agit-il ? […] C’est un conte de Voltaire, avec plus d’imagination et moins d’âpreté ; c’est un opéra-comique de Favart, avec une fantaisie plus hardie et plus bouffonne.
Si nous croyons, malgré Cléante, que c’est bien à la religion qu’il en veut, nous devons donc croire, malgré Clitandre, qu’il en veut aux sciences et aux lettres en général, et il se trouvera qu’étant déjà Voltaire, il est aussi Jean-Jacques. […] et les tragédies de Voltaire, et même plus tard, celles de Saurin, de du Belloy et de Ducis, est-ce que « l’esprit du temps » ne s’y trouvait point ? […] Si Voltaire et Crébillon avaient eu le génie de Corneille et de Racine, pourrions-nous dire aujourd’hui qu’après Athalie la tragédie meurt ou ne fait que languir ? […] Et Marivaux, et Voltaire, et La Chaussée, et Sedaine, et Beaumarchais, — et même Scribe, je vous assure — , ont eu, chacun à son tour, le dessein de s’approcher davantage du vrai. […] Voyez, dans la Correspondance de Voltaire, la quantité de jeunes poètes qu’il encourage.
Voltaire se rapproche de l’idéal du genre. […] Et enfin, mieux que Bossuet, mieux que Boileau, mieux que Vauvenargues, mieux que Voltaire, il savait manier le lieu commun. […] Voltaire n’aurait pas mieux dit. […] À quarante et un ans, en 1782, il était aussi connu que Voltaire. […] Brusquement, en 1745, et comme Racine, notez ce point, sous l’influence et la douce sollicitation d’une grande dame, il rentra dans la lice, avec un succès tel, comme vous savez, que Voltaire en entra en ébullition.
Pourtant n’en disons pas de mal, Voltaire, About, Mérimée n’ont pas été remplacés. […] Chateaubriand monta dans un des cabriolets qui stationnaient devant le quai et s’échappa lentement à cette ovation improvisée, en saluant la foule… La seconde fois, c’était sur le quai Voltaire. […] L’autre serait plutôt un « petit-fils de Voltaire », apparenté avec Renan. […] Allègrement, il s’est rangé du côté de Pascal contre Escobar, et avec Voltaire contre Nonotte et Patouillet. […] Après ce Béat, Voltaire, Montesquieu, Rousseau, fortifièrent de toute la puissance de leur génie une tradition reprise avec éclat, dans notre siècle, par Guizot, Taine, James Darmesteter.
Presque tous les hommes accoutumés à penser, et dont les opinions s’étaient formées avant la Révolution, appartiennent encore à l’école de Voltaire, mais ils ont aujourd’hui soixante-dix ans, et ils sont seuls : aucune des générations venues depuis n’a adopté ni leur tour d’esprit ni leurs opinions ; aucun homme, âgé de soixante ans et au-dessous, qui sache écrire, qui exerce la moindre influence, ne professe une incrédulité moqueuse ; il y a des doutes, mais du désir de se rattacher à des opinions plus relevées ; il y a un besoin de religion et de respect pour des croyances que peu de gens, cependant, peuvent adopter complètement.
La théorie qui y préside et qui n’est autre que celle de l’école du goût, de l’école d’Horace, de Despréaux et de Voltaire, s’appliquait avec une exacte convenance à des ouvrages qui ne sortaient point des cadres connus.
Dans une lettre inédite à Brissot (31 juillet 92), très-importante historiquement, elle devient, il faut le dire, injurieuse, insultante, et s’échappe à qualifier le vertueux général du même terme dont Voltaire irrité n’a pas craint de qualifier Rousseau.
» L’imitation de l’antique, au xvie siècle, ne saurait durer bien longtemps sans détonner ; et, bon gré mal gré, on se reprend à dire avec Voltaire : « Nous ne sommes que des violons de village auprès des anciens. » Revenons à nos poésies.
Messieurs, on a bien peur que nous restions par un peu de vivacité, de malice et de gaieté, les petits-fils de Voltaire, de Rivarol, de Chamfort, et je dirai même de Boileau, ce Boileau que M. de Montausier, aussi rébarbatif à sa manière que les majorités législatives d’aujourd’hui, menaçait tout simplement de jeter à la rivière.
Toutes les fois que l’auteur a besoin d’un personnage, il l’appelle du fond du néant, comme dans les contes de fées ou comme dans les contes de Voltaire, et le personnage obéit contre toute vraisemblance au signe de l’écrivain.
De même, selon les idées de Boileau, déterminées par la tradition gréco-romaine, on ne doit pas écrire l’épopée, ni la tragédie, ni la comédie en prose : ne savons-nous pas les colères de Voltaire, quand il entendait parler d’un Maillard ou Paris sauvé, en prose, et qu’aussitôt après la mort de Molière, les comédiens firent mettre son Don Juan en méchants vers par Thomas Corneille, pour ne pas donner au public cinq grands actes d’admirable prose, à laquelle on fut cent cinquante ans à revenir ?
Le rôle est dessiné, plutôt qu’écrit, avec des indications assez justes pour fournir sur la scène au jeu d’une grande actrice : et cela fait penser à Voltaire plutôt qu’à Racine.
La langue anglaise a continué d’être facultative ; s’y moquer des préceptes d’Addison n’y porte point malheur tandis que chez nous on a remarqué, même avant Voltaire, qu’on ne s’y moque pas impunément des préceptes de Boileau.
« Commençons par les dieux… »8 Le 25 auguste, comme disent les Allemands, — et nous savons aussi que Voltaire donnait ce nom au mois d’août, — a été le premier jour des fêtes célébrées dans la ville de Weimar, en commémoration de la naissance de Herder et de la naissance de Goethe.
Voltaire invente davantage, et sur un temps moins éloigné.
Mettez-le, ce termite de la critique indécise qui se glisse cauteleusement entre des textes, dans la clarté diabolique de Voltaire ou dans la flamme incendiaire de Diderot, il disparaîtra comme un néant devant ces hardis affirmateurs dans le faux et dans l’exécrable, lui qui n’a affirmé qu’une fois en sa vie, et encore, c’était une négation !
Au lieu de Jésus-Christ, le crucifié des Juifs et le bafoué de Voltaire, le peuple concret s’adorait dans la raison abstraite, symbolisée dans de la chair de courtisane.
Il n’a ni la morgue ni le charlatanisme retentissant de beaucoup d’autres, toujours sur la brèche de la publicité, faisant incessamment sonner à la Renommée les deux trompettes que lui donnait Voltaire, et ne méritant guères que celle qui sonnait par en bas… Octave Feuillet vit en province une partie de l’année, loin des commérages, des coteries, des affectations et des engouements de Paris, s’assainissant par cette vie de province, la seule chance de salut qui reste au talent, menacé de prostitution parisienne, et qui ne veut pas s’effacer au frottement de tous ces esprits qui s’effacent en effaçant les autres, comme une monnaie encrassée par le pouce de toutes les mains.
. — Un mot sur Voltaire, Turgot, Condorcet. — État présent de l’histoire universelle. […] Voltaire a le mérite d’avoir appelé l’attention sur les mœurs des nations 104 Voltaire, c’est là sa gloire, a le sentiment de l’humanité105 ; mais ce sentiment, égaré par une critique systématique et sans profondeur, et par une haine insensée contre le christianisme, dégénère souvent en déclamations qui ne valent pas grand-chose dans des tragédies, mais qui ne valent absolument rien dans l’histoire, où la passion doit faire place à l’intelligence. D’ailleurs, quand on s’emporte si violemment contre ce qui gouverne l’espèce humaine, au fond c’est l’humanité qu’on accuse ; car enfin, à ne parler qu’humainement, et en nous mettant au point de vue de Voltaire, une religion ne s’établit pas, ne se soutient pas toute seule ; il faut qu’elle trouve quelque consentement parmi les hommes. […] Il y a plus d’idées philosophiques dans ces deux discours que dans tous les ouvrages de Voltaire qu’ils ont précédés ; et, s’il n’avait pas été enlevé par les affaires à l’histoire et à la philosophie, nous ne doutons pas que le jeune sorbonniste ne se fût assis à côté de Montesquieu. […] Condorcet, ami et disciple de Voltaire et de Turgot tout ensemble, a déposé quelque chose du caractère de ses deux maîtres dans l’écrit intéressant qu’à la veille de périr il légua à la postérité107.
Il ne juge pas Shakespeare sur les innombrables quolibets dont il assaisonne ses pièces pour complaire à la populace de ses auditeurs de tous les soirs, sur les tréteaux de son théâtre ambulant de New-Market ; il ne dénigre pas Molière sur les farces du Médecin malgré lui ou de M. de Pourceaugnac ; mais il prend l’œuvre entière de ces deux grands hommes, et il décide, comme Voltaire, que Shakespeare est le génie inculte d’une époque barbare, et que Molière est le génie cultivé d’un âge éclairé. […] Né, élevé, grandi isolément dans une atmosphère supérieure au dix-huitième siècle, même à celle de Voltaire ; dédaigneux et dédaigné par tous nos philosophes, excepté Jean-Jacques Rousseau ; n’ayant de maître que la nature ; méprisant nos controverses religieuses ou philosophiques, et qui était apparu tout à coup, comme une comète excentrique, Paul et Virginie à la main, homme bien supérieur à Chateaubriand, capable d’écrire mieux que le Génie du christianisme, le Génie du cœur humain.
Saint-Matorel est un pauvre employé de commerce, boulevard Voltaire. […] Il plante ses souvenirs, le boulevard Voltaire, ses douces mortifications, et Léonie, et le triste pèlerin qui va, le dos courbé, le long des ruisseaux de Paris, pouir s’ébattre au milieu des êtres éternels et des soleils.
» Moi, j’ai une inspiration… Je lui réponds : « Ta sœur, autrefois, a donné à ton père un buste de Voltaire, et il dit souvent qu’il voudrait bien avoir en pendant un buste d’un autre écrivain de ce temps-là… Le nom ne me revient pas… Ah ! […] Cardinal avait voulu l’arrêter au passage… Il lui avait proposé de lui réciter sa conférence sur Voltaire, parce que dès qu’il tient quelqu’un… mais ça n’avait pas tenté Pauline… — Non, vois-tu, puisque je suis à la campagne, il faut que je profite de la campagne… Je vais aller me promener dans les champs. — Sais-tu seulement ce que c’était que Voltaire ? […] très bien… c’était un petit vieux tout ridé qui était autrefois en marbre dans le vestibule du Théâtre-Français… On l’a monté au foyer dans une jardinière… Une vraie tête de singe, mais il n’a pas l’air bête… Là, tu vois bien que je sais ce que c’est que Voltaire. […] Chez lui, rien de torturé ni d’alambiqué ; il dit ce qu’il veut dire à la façon de Stern et de Courier ; on y trouve aussi du charme de Goldsmith, et en même temps de cet esprit fin et de cette logique railleuse qui sont la marque gauloise des contes de Voltaire.
Le XVe siècle, dans la personne de ses Marmontel, de ses La Harpe, de Voltaire lui-même, n’en chercha et n’en ambitionna jamais d’autre.
Mais Désaugiers était de l’ancienne race, de cette malice du bon vieux temps et d’avant Voltaire ; on lui pardonnait de rire comme dans les vieux noëls, sans que cela tirât à conséquence.
Dans cette ascension de la Dôle, j’ai oublié, pour compléter la scène, de dire qu’outre les deux amis et le pâtre, il y avait là un vieux capitaine de leur connaissance, redevenu campagnard, révolutionnaire de vieille souche et grand lecteur de Voltaire.
C’était le génie sarcastique de Voltaire descendu du salon sur les tréteaux.
Moins détaché que Molière, moins hostile que Voltaire, son acte de foi est un acte de sens propre, indépendant et réfléchi.
Crise pour crise, ces prix ont fait un peu de bien : c’est leur meilleur ouvrage (Voltaire, passim).
Voltaire reprend toutes les idées de Montaigne, donne la précision et le tour vif de la polémique à ces opinions enveloppées dans Montaigne du langage abondant, pittoresque et quelquefois traînant, de la spéculation inoffensive.
Le mouvement sortait alors également d’Allemagne ; de là Werther de Goethe fit son chemin jusque dans la poche du Petit Caporal ; là naquit la compréhension de Shakespeare qui pour Voltaire n’avait été qu’un sauvage ivre : là Madame de Staël trouva son livre de l’Allemagne ; la semence étant mûre, germa le nouveau génie français ; en 1827, Victor Hugo publiait son Cromwell ; en 1830, la victoire de la poésie romantique était décidée.
Ami de Voltaire, il composa une quinzaine d’opéras et une quarantaine d’opéras comiques.
Listz 90 ; Voltaire musicien 91, qui renferme un chapitre intitulé Wagnérisme ; Lohengrin, instrumentation et philosophie 92, dédié à Mme Wagner ; Turin musical 93, qui renferme aussi un chapitre sur le Wagnérisme et où le nom de Wagner revient à chaque page.
» demande le voyageur de Sirius, dans Voltaire.
Elle chante en travaillant à des travaux de couture, dont elle réussit à se nourrir et ne court qu’un danger : celui d’être tentée d’ouvrir un Voltaire, situé dans un coin ; des oiseaux et des fleurs sont à la fenêtre.
Tour à tour courtisan et presque hiératique, chanteur de temple ou de palais, il était quelque chose d’aussi particulier, à sa manière, qu’un héraut d’armes au Moyen Âge, et, dans ces derniers temps, qu’un premier violon de chapelle, comme l’a dit Voltaire, le maître de Villemain, et qui ce jour-là n’a pas, après tout, dit si mal ; car il a fait sentir d’un tel mot ce qu’il y a de local et de particulier dans Pindare.
Il y a, dans le critique-poète dramaturge Euripide, du Voltaire, du Heine, du Racine, du Musset, du Dumas fils, — et du d’Ennery. […] de l’esprit le plus clair, le plus alerte, le plus gracieux, quelquefois le plus aigu. « Maîtresse, dit à Vasantasena une de ses esclaves, votre mère vous rappelle qu’il sera bientôt l’heure d’adresser vos hommages aux divinités. » Sur quoi Vasantasena, comme une princesse de conte de Voltaire : « Qu’on charge un brahmane de ce soin », dit-elle simplement. — Le méchant prince Samsthanaka est impayable. […] J’ai pu, à propos de la comédie de Soudraka, et sans effort et sans vain désir de vous étonner, nommer Musset, Henri Heine, Voltaire, Ibsen, Renan. […] Puis, c’est Voltaire avec sa note particulière, son pathétique brillant et facile, son joli romanesque… Et, après Voltaire et Crébillon, sous l’Empire, sous la Restauration, même sous la monarchie de Juillet, la tragédie se remet à couler d’un flot pâle et ininterrompu. […] « Carmosine, donnant son front à baiser au roi : — Sire, la reine a répondu pour moi. » Voilà des pages au bas desquelles je mettrais volontiers ce que Voltaire voulait écrire au bas de toutes les pages de Racine.
Qu’on rapproche le Jules César de Shakespear de celui de Voltaire ; d’un côté l’on voit le Peintre, & de l’autre la main tremblante & timide, nivelant des mots harmonieux & qui tombent en cadence. […] Ajoûterai-je que je ne puis lire la prose des Écrivains du dernier siècle, excepté celle de la Bruyere & de Fénelon, & que Montesquieu, l’Abbé Raynal, Voltaire, Buffon, Jean-Jacques Rousseau, d’Alembert, de Paw, &c. contre-balancent à eux seuls, dans mon esprit, tout le siècle de Louis XIV, qui n’a eu que des Poètes, & pas un seul homme qu’on puisse méditer en morale-politique ? […] Beaux Arts, (a dit Voltaire) vous êtes des plaisirs.
La Fayette s’y complaît évidemment ; il y revient en chaque occasion ; il nous rappelle que, parmi les républicains du 10 août, Condorcet avait alors oublié sa note fâcheuse sur le mot Patrie du Dictionnaire philosophique de Voltaire : « Il n’y a que trois manières politiques d’exister, la monarchie, l’aristocratie et l’anarchie. » Il se souvient que, parmi ces mêmes républicains, Clavière, deux ans auparavant, avait mis dans la tête de Mirabeau, dont il était le conseil, de soutenir le veto absolu du roi comme indispensable ; que Sieyès, un an auparavant, publiait encore, par une lettre aux journaux, que, dans toutes les hypothèses, il y avait plus de liberté dans la monarchie que dans la république. […] Il lisait même très-peu, et sa bibliothèque usuelle se composait à peu près en tout d’un Voltaire complet, qu’il recommençait avec lenteur sitôt qu’il l’avait fini, comme M. de Tracy faisait aussi volontiers ; et il disait que tous les résultats étaient là.
Comme Boileau et Voltaire il appartenait à une bonne et quelque peu vieille famille de bourgeoisie parisienne, de fonctionnaires. […] Des écrivains nous livrent une vraie carrière : un Bossuet, un Voltaire, un Balzac, un Hugo. […] Leconte de Lisle croira enrichir la poésie en allant chercher des sujets dans les traductions de poèmes hindous ou finnois, comme Voltaire pensait renouveler la tragédie en demandant des personnages à la Chine et à l’Amérique. […] Au xviiie siècle l’homme de lettres vit comme un empereur romain dans une domination inquiète et un triomphe précaire (voyez Voltaire sur la frontière de Ferney), jusqu’au jour où, éclatée en Révolution, l’idéologie couvre la France de parole et de papier.
ô pays de Voltaire ! […] ô pays de Voltaire ! […] Il est vrai que ça rime avec Voltaire. Il faut avouer aussi que Voltaire est bon ici : Puissance, liberté, vieil honneur militaire, Principes, droits, pensée, ils font en ce moment De toute cette gloire un vaste abaissement. […] C’est ce goût, ce besoin de nouveauté pour la différenciation, pour le renouvellement qui dans la stérilité d’un Voltaire lui fera faire les plus grands voyages, lui fera commettre les extrêmes divagations géographiques et chronographiques, l’emmènera en Chine, dans on ne sait quelle Perse et Babylonie, plus ou moins de convention, plutôt plus que moins, et toujours chez les Turcs.
Il a passé par Voltaire et par Montesquieu, croisé Rousseau et Chateaubriand. […] Tous deux ils aimaient la netteté brillante du style dans la tradition du XVIIIe siècle, de Voltaire et de Diderot, tradition très française que Vigny fit plus laconique et plus grave, que Nerval rendit plus souple et plus intime. […] Voltaire ou Rousseau, qu’on ne lit guère, vivent en nous, malgré nous, à dose infinitésimale. […] Il imprime à Kehl les œuvres de Voltaire. […] Saluons par conséquent un Décadent aussi dans Chateaubriand, auteur de la triste tragédie de Moïse où il se montre le rival lamentable des La Harpe et des Marmontel et l’élève de Voltaire ou de Crébillon.
Antoine et Jacques Desbordes devinrent libraires à Amsterdam, libraires très-riches, très-considérés ; ce sont eux qui ont donné ces éditions bien connues de Voltaire (1733-1738).
On lit dans la préface que l’auteur, au début, soumit le manuscrit de sa pièce à La Harpe, qu’on regardait alors comme l’oracle en telle matière ; et La Harpe, après avoir examiné, répondit : « Votre pièce est assez bien écrite, mais le sujet n’est nullement propre au théâtre ; s’il l’était, Voltaire ou moi nous nous en serions emparés. » Voilà bien de nos Aristarques.
Son état de souffrance la reporta vers les idées religieuses dont son enfance n’avait jamais manqué, et qui depuis n’avaient été que distraites ; elle rêva, elle pria, surtout elle médita : « La méditation, a-t-elle dit, diffère de la rêverie en ce qu’elle est l’opération volontaire d’un esprit ordonné. » Des réflexions qu’elle écrivit vers le même temps, après avoir lu celles de Mme Du Châtelet sur le Bonheur, nous la montrent bien contraire à cette morale égoïste et sèchement calculée de l’amie de Voltaire, comme d’ailleurs elle eût été peu encline à la morale purement sentimentale que de plus tendres avaient puisée dans Rousseau.
Considérez, par exemple, deux moments d’une littérature ou d’un art, la tragédie française sous Corneille et sous Voltaire, le théâtre grec sous Eschyle et sous Euripide, la poésie latine sous Lucrèce et sous Claudien, la peinture italienne sous Vinci et sous le Guide.
On commença par dépouiller les autels ; on défendit ensuite aux fidèles d’enseigner et d’étudier les Lettres… Les sophistes dont Julien était environné se déchaînèrent contre le christianisme. » Dans les temps modernes, au lendemain de Bossuet, « tandis que l’Église triomphait encore, déjà Voltaire faisait renaître la persécution de Julien.
Leconte de Lisle, dans un cycle des Atrides, ou si l’on flanquait dans une geste de Rome le Cinna de Corneille d’une Mort de César de Scudéry ou d’un Triumvirat de Voltaire ?
L’ignorance et l’incurie de Boileau et de Voltaire ne sont pas imputables à l’humanisme ; elles n’ont fait que suivre nécessairement l’ignorance et l’incurie moins pardonnables du dernier âge scolastique et féodal.
Mais toujours c’est la fable du Mendelssohn qui s’enfle et qui s’enfle, Voltaire reprenant la tragédie de Racine ; on est, de nature et d’éducation, incapable des grandes émotions totales, et l’on s’acharne à celles là, uniquement : ainsi les très misérables musiciens expriment faussement des émotions fausses.
ce n’est pas assez que mon pays soit en république, il fallait encore qu’il se plaçât sous l’invocation de Voltaire, de cet historien prenant le mot d’ordre des chancelleries, de ce bas flatteur des courtisanes de la cour, de cet exploiteur de la sensibilité publique, de ce roublard metteur en œuvre de l’actualité, de ce poncif faiseur de tragédies, de ce poète de la poésie de commis voyageur, de ce poète anti-français de la Pucelle, de ce lettré enfin, que je hais autant que j’aime Diderot.
La colonne de ce siècle, celle sur laquelle il s’appuyait en regardant avec assurance le siècle précédent, ne peut pas toujours résister aux années ; celui qui pendant quarante ans rendit à Racine une si éclatante justice, parce qu’il était le seul qui pût ne le pas craindre, ce grand tragique qui à ce titre sera seul mis dans la balance avec Racine, et que tant de titres de gloire, que lui seul a réunis, mettront d’ailleurs hors de toute comparaison ; cet homme à qui l’on refusa si long-temps sa place, parce qu’il mettait les autres à la leur, et qui n’a dû qu’à ses longues années cet avantage que n’eut pas Racine, de se voir enfin à son rang ; Voltaire préside encore au goût et aux beaux arts.
Et le rendez-vous général de ces exilés sans couronne, c’est Paris, qui a remplacé Venise, où Voltaire encaquait dans Candide les rois détrônés.
La Fontaine, Molière, Voltaire, Beaumarchais, ne sont pas, comme on a l’air de le croire, les seuls descendants de cette espèce de Magna parens de l’esprit français et de sa littérature.
Voltaire en était ravi ; Horace Walpole, en Angleterre était partagé entre le plaisir que lui causait l’esprit de l’écrivain et l’indignation qu’il éprouvait contre les mœurs judiciaires de notre pays. […] A quelque page que vous ouvriez l’un de ces quatre énormes in-folio, l’intérêt vous saisit bientôt et vous tient attaché ; il faut continuer à lire, comme quand on prend au hasard un volume de Voltaire ou de Macaulay. […] Sterne prêcha un jour sur la conscience trompeuse un bien curieux sermon, qui faisait l’admiration de Voltaire ; il avait pris pour texte de son analyse psychologique ce verset de l’épître aux Hébreux : « Nous sommes persuadés d’avoir une bonne conscience. » S’il est juste de montrer aux enfants le mal à côté du bien, par respect pour la vérité historique, il n’en demeure pas moins certain que le spectacle des belles choses est la seule grande école de la moralité. […] Il lit les Contes de Voltaire, la Gastronomie, le Roman comique, les romans « au ton canaille » de Pigault-Lebrun ; compose des madrigaux, des épigrammes galantes ; fait un vaudeville en collaboration avec un jeune évaporé de ses amis, et cite Panurge. […] Écrivant à un de ses amis qui est amoureux, il lui pose force questions sur l’objet aimé, afin sans doute de savoir l’estime qu’il doit en faire : « Qui préfère-t-elle de Voltaire ou de Racine, d’Ovide ou de Tibulle, de Mme de Genlis ou de Mme de Staël, le style à part ?
Je savais qu’il avait été fort admiré de son temps, que l’on opposait son naturel à l’affectation de Dorat, et que Voltaire l’appelait son cher Tibulle. […] Car les Galanteries de la Bible ne sont que des facéties de Voltaire mises en vers. […] Ainsi, avec une innocence qui a persisté jusque par-delà l’âge mûr, le chevalier de Parny a fait l’amour, a fait de petits vers, a bu, chanté et effeuillé des roses, a lu Voltaire, y a cru, — et ne s’est pas douté du reste. […] Voltaire écrivait, avec son équité et sa douceur habituelles : « Et ce polisson de Gresset, qu’en dirons-nous ? […] Voltaire, notamment, n’y a pas manqué.
Les Lettres Persanes et les Contes de Voltaire ouvrirent la voie ; mais c’est J. […] Disciple et héritier de Voltaire et de Diderot, Beaumarchais à la veille de la révolution faisait de la scène une tribune. […] Le premier de ces deux ouvrages, particulièrement, porte la marque d’une détestable inspiration ; on y sent à la fois le mépris de l’homme et la haine de toute religion ; c’est le pessimisme amer de Candide, allié à une sorte de fureur antichrétienne ; toute l’âcreté, tout le fiel de Voltaire, moins sa gaîté, son esprit et sa grâce. […] Un poète s’était rencontré qui, résumant en lui le scepticisme de Faust et l’ironie de Voltaire, les découragements de Werther et les vagues mélancolies de René, avait orné ces amères pensées du vêtement d’une poésie splendide, et les avait échauffées d’un sentiment profond des beautés de la nature. […] Vous êtes, dites-vous, les fils de Voltaire : il est vrai ; mais ce n’est pas Voltaire seul qui vous a fait tout ce que vous êtes.
Sous le règne du Bien-aimé, c’est le temps de l’amour frivole, le temps de ces poètes et conteurs, Voisenon, Gentil-Bernard, Grécourt, Moncrif, le temps des badinages de Voltaire. « Si la nature ne nous avait faits un peu frivoles, écrit Voltaire, nous serions très malheureux ; c’est parce qu’on est frivole que la plupart des gens ne se pendent pas. […] Puis, Rousseau étant à l’inverse du christianisme, c’est donc Voltaire, le chrétien ? […] … La langue française a pris plus de rigueur dialectique avec Descartes, plus de preste gaieté avec Voltaire ? […] et ne doit rien à Voltaire (grâces à Dieu !
L’Impératrice eût voulu montrer à ses illustres courtisans du dehors, les philosophes français, des rivaux dignes de se mesurer avec eux ; elle ne put qu’en imposer à Voltaire en lui vantant les pâles imitateurs de ses œuvres. […] On dirait que ces amis de Voltaire, de Montesquieu et de Diderot n’ont lu que Chompré, Crébillon ou Chaulieu. […] Mais l’artiste sévère intervient aussitôt pour régler le diapason ; il a reçu ce qu’il faut le plus souhaiter à l’écrivain, une éducation tout à l’encontre de ses instincts ; il la doit à ses premiers maîtres français, surtout à Voltaire ; de là l’équilibre de ses facultés. […] Quand il entre au lycée, il écrit à peine sa langue maternelle, mais il est nourri de Voltaire, il raffole de Parny et d’autres sires de cette espèce. […] Ce n’est pas la prose nette et limpide de Pouchkine, qui avait beaucoup lu Voltaire, et qui se souvenait.
De nos jours au contraire, les révolutions ont été trop fréquentes dans les régions de la pensée : quand Voltaire eut renversé la grande manière de Corneille, affaibli en la continuant la splendeur racinienne et que la façon pédestre de Diderot se fut poussée dans le monde à la place des grandes productions, la domination nouvelle ne vécut pas longtemps sans recevoir les coups terribles d’André Chénier, et bientôt ceux plus mortels encore de M. de Chateaubriand. […] Ainsi on pouvait là fulminer aussi bien contre les imitateurs de Ronsard que contre les serviles de Voltaire et en s’armant contre ces troupeaux, on n’avait pas tout à fait tort ; seulement la peine qu’on prenait était trop grande, et il aurait suffi de prouver à ces frelons que leur miel n’était que du bien volé.
Et à côté de lui un voltairien enragé, auquel cette sœur de charité éclectique, un jour de Noël, mettait dans ses souliers les Contes de Voltaire, tandis qu’elle mettait un chapelet dans les souliers du Breton. […] Lundi 16 décembre Diderot, lui, pendant que Voltaire et les autres sont encore à rimailler, et demeurent des poètes à chevilles et sans poésie, emploie uniquement la prose, comme la langue de sa pensée, de ses imaginations, de ses colères, et contribue si puissamment à sa victoire, à sa domination en ce siècle, qu’en dehors de Hugo et à peine de trois autres, la poésie n’est plus que l’amusement des petits jeunes gens de lettres à leur début, et pour ainsi dire, la perte de leur pucelage intellectuel.
Sans nous attarder aux brillantes tentatives du xviie et du xviiie siècle, et tout en donnant cette opinion de Voltaire qui veut que « les vers soient tellement faits que le lecteur ne s’aperçoive pas qu’on a été occupé de la rime », rappelons que Fabre d’Olivet, au commencement de ce siècle, s’éleva contre les ennemis de la rime, déclarant que « tout le mal que l’on dit d’elle n’est vrai qu’entre les mains d’un homme sans génie ou qui plaint sa peine », ce qui n’empêchera pas Mistral de nous donner une merveilleuse épopée et quelques poètes contemporains de mener bataille contre la rime. […] J’ai l’idée qu’il ne peut pas y avoir à l’étranger, en Allemagne, en Angleterre, par exemple, des prosateurs comparables aux nôtres, un La Bruyère, un Pascal, un Voltaire, un Chateaubriand, un Flaubert.
Bayle, Fontenelle, Voltaire, qui ont si ouvertement combattu le christianisme, ne le sont-ils pas ? […] Au XVIIIe, c’est principalement Paris, avec Voltaire. […] Ainsi, ce problème des problèmes, qui a troublé, qui a jeté dans des abîmes de méditation tous les grands penseurs qu’une foi dogmatique ne fixait point, et jusqu’à Voltaire lui-même, ce problème qui a soulevé d’une émotion sacrée un Goethe, un Lamartine, tous les grands poètes modernes, et auquel ces beaux génies ont répondu par une affirmation qu’ils craignaient seulement de trop limiter par les mots humains, il s’est formé une espèce de concert entre un grand nombre de ces braves gens du primaire, hommes de demi-éducation et de trop courte expérience intellectuelle, exagérément frappés des dernières nouvelles de Hœckel ou de Letourneau, pour le trancher par la négation autoritaire ou par le silence.
« (Voltaire, Candide, ch. xx).
Mais quand il ne s’agit pas d’amour, il cause souvent, en prose ou en vers, avec un esprit net et vif, d’un style léger et piquant, dont l’allure fait penser à Voltaire : son Épître au prince de Condé revenant d’Allemagne sort du goût précieux, et réalise déjà l’urbanité de la fin du siècle ou du siècle suivant.
Je sortis de mes études classiques sans avoir lu Voltaire, mais je savais par cœur les Soirées de Saint-Pétersbourg.
Adolphe Jullien fait justice des pseudo-patriotismes « des commerçants affolés par la concurrence… » 19 avril, le Voltaire : « la fille Wagner » par M.
Mardi 17 octobre Saint-Victor, qui a beaucoup vécu dans la société de Lamartine, affirmait que le poète ne lisait jamais que Gibbon, un voyage en Chine de lord Macartney, et la correspondance de Voltaire, et encore ne lisait-il ces livres, toujours les mêmes, que pour s’endormir.
Voltaire lui-même avait eu le pressentiment de cette rénovation poétique au contact de la science, et jamais il ne s’était plus approché de la grandeur que le jour où il s’était inspiré du vrai système du monde.
Dimanche, de Jacques Bonhomme et de Voltaire ; nous nous sentions devant eux comme des écoliers pris en faute ; nous regardions avec chagrin notre triste habit noir, héritage des procureurs et des saute-ruisseaux antiques ; nous jetions les yeux au bout de nos manches, avec inquiétude, craignant d’y voir des mains sales.
Pour ce qui est des erreurs de jugement, je ne vois point celles dont Vinet se croit coupable ; à mon sentiment, il est injuste à son propre égard et il donne trop aisément raison aux gens, plus nombreux encore qu’on ne croit, qui ressemblent à ce personnage d’un conte de Voltaire, lequel ne concevait pas que quelqu’un qui était né et avait vécu hors de France pût avoir le sens commun9. […] Au cours de son article, et avant d’arriver à Vinet, Sainte-Beuve, parlant des écrivains d’origine romande, touche à Benjamin Constant : « Benjamin Constant, dit-il, grâce à l’atmosphère environnante qui favorisait la nature de son esprit, était à douze ans un enfant de Voltaire… » Et il met en note : « Voir au tome premier de la Chrestomathie de M. […] Ce Nicolas Châtelain était un homme d’esprit à qui l’on doit : 1° des Lettres inédites de Voltaire qui sont du faux Voltaire, mais du Voltaire si bien imité que le docte Beuchot, qui s’y connaissait, « les annonça sans paraître se douter de la supercherie16 », 2° des lettres de Livry qui sont du faux Sévigné, 3° des Pastiches ou imitations libres de quelques écrivains, et encore des Lettres de Voltaire à Mme du Deffand au sujet de Benjamin Constant (lequel avait onze ans quand Voltaire mourut), et quelques autres facéties du même genre, sans parler d’ouvrages plus sérieux relatifs à l’histoire de l’Église (Le Synode de Dordrecht) ou à des actualités politiques et ecclésiastiques. […] Nicolas Châtelain, de Rolle, je vous répondrais : Probablement, parce qu’il trouvait, comme Sainte-Beuve, que la lettre était un peu forte pour un gamin de douze ans ; probablement aussi parce qu’on ne prête qu’aux riches, et Nicolas Châtelain n’était pas pauvre ; et enfin, très probablement, parce que Châtelain ayant fait des lettres de Voltaire à Mme du Deffand sur Benjamin Constant enfant, il n’était pas invraisemblable qu’il eût fait aussi une lettre de cet enfant prodige. […] Au surplus, il n’était pas dans l’esprit de Vinet de faire ce qu’on appelle des conversions, à la manière de celle dont rêve Mlle de Kerkabon dans l’Ingénu de Voltaire, et dont rêvaient, — je suis bien fâché de le dire, — les âmes pieuses du canton de Vaud en 1837 : « Nous le baptiserons, mon frère, nous le baptiserons ; ce sera une cérémonie bien brillante ; il en sera parlé dans toute la Basse-Bretagne, et cela nous fera un honneur infini. » Tout ce que Vinet désirait et espérait, c’était que le rayonnement de sa propre foi amenât peu à peu Sainte-Beuve à la désirer et à la partager.
N’écoutez pas ces esprits superficiels qui se donnent comme de profonds penseurs parce qu’après Voltaire ils ont découvert des difficultés dans le christianisme : vous, mesurez vos progrès en philosophie par ceux de la tendre vénération que vous ressentirez pour la religion de l’Évangile. […] Diderot avait des éclairs de génie ; mais, comme a dit de lui Voltaire, c’était une tête où tout fermentait sans venir à maturité. […] Prenez quelque poésie légère où partout règne la mesure, l’esprit et la grâce ; prenez une ode et surtout une épître d’Horace ou de petits vers de Voltaire, et mettez en regard l’Iliade ou ces poèmes immenses des Indiens remplis d’événements merveilleux et où la plus haute métaphysique s’unit à un récit tour à tour gracieux ou pathétique, ces poèmes qui ont plus de deux cent mille vers, et dont les personnages sont des dieux ou des êtres symboliques ; voyez si les impressions que vous éprouverez seront les mêmes. […] Voltaire l’appelait le diable au corps ; il l’exigeait même d’une comédienne pour être une comédienne de génie. […] D’abord Rabelais et Montaigne ; plus tard, Descartes, Pascal et Malebranche ; La Rochefoucauld et La Bruyère ; Retz et Saint-Simon ; Bourdaloue, Fléchier, Fénelon, Bossuet ; ajoutez tant de femmes éminentes, à leur fête Mme de Sévigné ; et cela, en attendant Montesquieu, Voltaire, Rousseau et Buffon127.
Rien n’est plus infécond, rien n’est moins suggestif qu’un sens parfaitement rond et achevé. » Évidemment le plaidoyer pourrait se soutenir avec chance de gain de cause devant un tribunal composé de génies littéraires suédois ou allemands, mais je crois qu’on ferait bien d’écarter de l’audience les nommés Molière, La Fontaine, Rabelais, Montaigne, Voltaire et Diderot lui-même, qui a dit, il est vrai : « La clarté nuit à l’enthousiasme… Soyez ténébreux ! […] Auguste Dorchain est un poète au sens absolu du mot, si poète signifie, comme disait Voltaire : « Écrivain qui remue l’âme et qui l’attendrit. » La moindre pièce du recueil de poésies : Vers la lumière, suffirait pour prouver ce que j’avance ; une exquise sensibilité anime toutes ces pages, dictées par l’émotion ; nul n’est plus sincère, nul n’est plus convaincu que celui qui les a écrites, et ce m’est un délicat régal de les relire après les lui avoir entendu réciter. […] Ce qui prouve une fois de plus que Voltaire avait bien raison de dire en de jolis vers qu’il faut avoir l’esprit de son âge ; j’ajouterai en prose inférieure, que ceux qui, malgré les années, ont conservé l’esprit jeune, feront bien de se méfier et de ne pas toujours croire à leur corps l’âge de leur esprit, XLIV. […] Il est vrai que Voltaire, qui avait beaucoup moins voyagé que l’auteur d’Atala, avait écrit l’autre siècle ce quatrain sur l’utilité des lointaines excursions : Dieu mûrit à Moka, dans le golfe Arabique, Le café nécessaire au pays des frimas. […] En revanche, toutes les fois qu’il s’agit de l’empereur Napoléon, l’enthousiasme déborde ; elle lui trouve l’esprit de Voltaire, un regard et un sourire irrésistibles, elle dit en parlant de lui à l’un de ses dévoués, et cela avec une conviction absolue : « Notre amour », traitant avec le plus profond mépris Marie-Louise, la femme du héros qui fit recevoir, par Neipper, Antonmarchi venant lui annoncer la mort de l’Empereur.
Ainsi on s’est demandé pourquoi Voltaire avait introduit une amourette inutile dans son Œdipe. […] Une anecdote nous apprend que ce sont les comédiens qui, pour rendre plus attrayante une tragédie sans amour, forcèrent Voltaire à ajouter ce romanesque épisode2. […] Il disait à propos de Diderot, « L’homme du xviiie siècle, ce n’est pas Voltaire, c’est Diderot. Préférer Voltaire à Diderot, cela juge une tournure d’esprit. […] Quelques-uns sont très connus : « Voltaire : Un chaos d’idées claires… Michelet : Un poète sensible et un garde national… Lamartine : Un homme de génie qui pouvait se passer d’avoir du talent… Tocqueville : un patricien libéral… Joseph de Maistre : un prétorien du Vatican… Stendhal : Un Saint-Simon de table d’hôte… Balzac : un tempérament d’artiste et un esprit de commis-voyageur… Edgar Quinet : Un de Maistre protestant… La philosophie de Wagner : Une philosophie de chef d’orchestre… » Je demandai un jour à Faguet ce qu’il pensait d’un écrivain très connu, qui passe pour un insupportable cuistre. « C’est bien simple, me dit-il, de sa petite voix en fausset, c’est un homme qui est déplacé partout où il se trouve.
Les périodes sont passées de mode, depuis Voltaire, et tous les oripeaux dont vous habillez vos mannequins depuis trente ans, tombent en loques. […] Je ne m’en serais jamais douté ; et quand je considère ce sillage lumineux, cette traînée d’étincelles qu’elle a fait jaillir depuis sa première et véritable incarnation en France, depuis Villon jusqu’à Béranger, je me demande comment Marot, Régnier, La Fontaine, Molière, Parny, Voltaire et toi, Pouyadoux ! […] Les périodes sont passées de mode, depuis Voltaire, et tous les oripeaux dont vous habillez vos mannequins depuis trente ans tombent en loques.
Quant à son admiration, très significative, pour les vers de Voltaire, on ne la prenait sans doute pas au sérieux chez un apprenti romantique qu’on avait nourri de Shakespeare et saturé de Byron, et à qui l’on avait fait étudier son métier, non sans profit, dans Mathurin Régnier. […] La vieille liberté par Voltaire laissée Était bonne autrefois pour les petits esprits. […] Sauf Chénier, pas un seul écrivain du xviiie siècle ; pas plus Voltaire ou Rousseau que Crébillon fils ou Duclos !
Molière est tout près de Voltaire, que l’on croirait entendre dans certains vers de Tartufe.
Son pire défaut est ce qui l’a fait préférer de Voltaire, de La Harpe et des Encyclopédistes, entre tous les prédicateurs.
La renaissance de la superstition, qu’il avait crue enterrée par Voltaire et Rousseau, lui semblait, dans la génération nouvelle, le signe d’un complet abêtissement.
Telles étaient les représentations scéniques de l’Inde primitive, pendant que le reste de l’Asie, à l’exception de la Chine, l’Afrique, l’Europe, la Grèce, Rome et les Gaules balbutiaient encore la langue de la philosophie, de la poésie et des arts ; quoi qu’en ait dit Voltaire, le jour moral s’est levé en Orient comme le jour céleste.
Ils se demandent s’ils n’ont pas été dupes de cette formule magique de la liberté de l’art, et si, pour avoir été moins libres qu’eux, Shakespeare et Molière, Descartes et Voltaire n’ont pas trouvé finalement le moyen de dire à peu près ce qu’ils pensaient.
Je doute pourtant que la perçante phrase de Voltaire soit plus mortelle que le tranchant de cette masse de fer. « Si, dans des arts moins nobles et presque mécaniques, celui-là n’est pas estimé digne du nom d’architecte accompli ou d’excellent peintre qui ne porte une âme généreuse au-dessus du souci servile468 des gages et du salaire, à bien plus forte raison devons-nous traiter d’imparfait et indigne prêtre celui qui est si loin d’être un contempteur du lucre ignoble, que toute sa théologie est façonnée et nourrie par l’espérance mendiante et bestiale d’un évêché ou d’une prébende grasse469. » Si les prophètes de Michel-Ange parlaient, ce serait de ce style, et vingt fois en lisant l’écrivain on aperçoit le sculpteur. […] Cela fait penser à l’histoire d’Irax, dans Voltaire, condamné à souffrir sans trêve et sans fin les éloges de quatre chambellans, et cette cantate : Que son mérite est extrême !
Il aime, il caresse d’imagination les proscrits, les brigands héroïques, les grands destins avortés, les lutins invisibles, les livres anonymes qui ont besoin d’une clef, les auteurs illustres cachés sous l’anagramme, les patois persistants à l’encontre des langues souveraines, tous les recoins poudreux ou sanglants de raretés et de mystères, bien des rogatons de prix, bien des paradoxes ingénieux et qui sont des échancrures de vérités, la liberté de la presse d’avant Louis XIV, la publicité littéraire d’avant l’imprimerie, l’orthographe surtout d’avant Voltaire : il fera une guerre à mort aux a des imparfaits.
Voltaire, Politique et Législation, La voix du curé (à propos des serfs de Saint-Claude) Discours du duc d’Aiguillon, le 4 août 1789, à l’Assemblée nationale : « Les propriétaires des fiefs, des terres seigneuriales, ne sont que bien rarement coupables des excès dont se plaignent leurs vassaux ; mais leurs gens d’affaires sont souvent sans pitié. » 92.
Charma rêva une fois qu’il était l’aide de camp de Henri IV, une autre fois qu’il était Voltaire. — Le docteur Macnish rêva qu’il était un pilier de pierre et voyait tout ce qui se passait autour de lui. — De Quincey, le fumeur d’opium, rêva qu’il était l’idole d’un temple brahmanique, etc.
L’esprit de société est cependant très-favorable à la poésie de la grâce et de la gaieté dont l’Arioste, La Fontaine, Voltaire sont les brillants modèles.
L’Europe, a dit Voltaire, regarde le Misanthrope comme le chef-d’œuvre du haut comique.
Pendant que dans la salle des dessins français, j’étais arrêté devant le « Couronnement de Voltaire », de Gabriel Saint-Aubin, qu’enfin, ils se sont décidés, je puis dire sur mes objurgations, à exposer, un monsieur qui le regardait admirativement, comme moi, et qui était Beurdeley fils, me dit que son père avait vendu 8 000 francs à M.
Le règne de Louis XV lui avait donné Montesquieu, Voltaire, Buffon, J.
Frédéric régnait alors à Berlin, et ceux des beaux-esprits français qui ne se sentaient pas capables de briller en France à côté de l’astre éblouissant de Voltaire, allaient à Berlin faire en sous-ordre les amusemens de la cour et du maître.
La langue d’un enfant qui fait un voyage de province se corrompt au bout de quelques semaines ; Voltaire, relégué sur les bords du lac de Genève, y conserve toute la pureté, toute la force, toute l’élégance, toute la délicatesse de la sienne.
Michelet serait un génie ailé comme Ariel, bon à monter, bon à descendre, aurait-il le droit de se jeter dans l’histoire avec des étourderies d’oiseau, et devrait-il s’y jouer, comme on a dit que Voltaire s’était joué dans la lumière, pour la briser et en éparpiller les rayons, avec les instincts d’un méchant ?
Rousseau dans ses détestables Allégories, ni Piron dans les couplets de ses pièces de la Foire, ni même Voltaire ! […] Pour sûr, ce n’est point la Grande Ourse qui lui a fait examiner, à lui, ses prières du soir ; et la ronflante apostrophe à Voltaire, volontiers citée par les ecclésiastiques, ne part pas d’un grand logicien. […] On sait ce qu’étaient devenues la versification et la poésie (car les deux ont presque toujours même sort) avec Voltaire, La Harpe, Marmontel et les petits poètes érotiques. […] Musset s’amuse à disloquer l’alexandrin, finit par revenir à la prosodie de Boileau et persiste à rimer plus pauvrement que Voltaire.
Je n’admettrai jamais qu’on dise les vers, même ceux de Voltaire ou de Casimir Delavigne, comme de la prose. […] Voltaire et les encyclopédistes auraient admis un martyr tempéré, un saint raisonnable et tolérant qui n’aurait prêché que l’amour de l’humanité. […] En somme, le sentiment de tout le xviiie siècle sur Polyeucte est résumé dans ces petits vers de Voltaire (préface de Zaïre) : De Polyeucte la belle âme aurait faiblement attendri, Et les vers chrétiens qu’il déclame Seraient tombés dans le décri, N’eût été l’amour de sa femme Pour ce païen, son favori. […] Que ne donnerais-je pas pour te voir à nu, avec des yeux vierges, et tel que tu es sorti des mains de ce Shakespeare qui est assurément un des plus grands poètes de tous les siècles, mais qui, si nous étions francs, nous ferait encore bien souvent, comme à Voltaire, l’effet d’un « sauvage ivre ». […] Notez que c’est Voltaire qui a découvert et lancé ce morceau ; ce devrait être pour les fanatiques de Shakespeare une raison de se méfier.
Voltaire, ce parfait maître de style, Grimm, Helvétius, furent plutôt des philosophes que de véritables artistes. […] Renan ne nous apparaîtront plus qu’en commun, dominant de leurs hautes figures le mouvement intellectuel de la seconde moitié de notre siècle : de même qu’au-dessus de toute la littérature du siècle passé nous apercevons unies, et désormais inséparables en dépit de l’histoire et de la critique, les deux figures de Voltaire et de Jean-Jacques Rousseau. […] France, comme les reflets superposés de trois époques de notre littérature : car, contemporain de La Fontaine par le style, il l’est, par la pensée, de Voltaire, avec des sentiments tout modernes, des sentiments qui le rapprochent à la fois de Dickens et de Baudelaire. […] Lemaître, par exemple, ayant écrit que Voltaire avait voulu corser une pièce de Shakespeare, une note, au bas de la page, avertit les collégiens que corser est pris ici dans un sens figuré, et signifie rendre consistant. […] Voltaire et Swift le préféraient à tous les autres, pour la peinture des vices de leur temps ; et vraiment je n’en vois pas d’autre qui lui soit préférable.
Corneille et Molière ont ouvert la route ; Voltaire les a suivis. […] Lanson sur Voltaire, à la conférence-lecture de Maurice Bouchor sur ce roman de Zadig, un des chefs-d’œuvre de la prose française, et au récit, plein de charme et de sens, de Jeannot et Colin. […] Les Cariatides et les Stalactites de Banville, achetées chez un bouquiniste du quai Voltaire, le remplissent d’admiration.
Les philosophes grecs et ceux du moyen âge, Voltaire et Joseph de Maistre, Proud’hon et Le Play, Karl Marx et Bergson, Taine et Renan, passaient tour à tour dans sa conversation. […] Voltaire en est un exemple singulier : la Henriade, les tragédies, le Dictionnaire philosophique, l’Essai sur les mœurs ne sont plus guère que des noms, tandis que le romancier de ce Candide improvisé en quelques jours durant sa vieillesse demeure aussi actuel que si le livre datait d’hier. […] Le fécond principe reconnu par Bonald, par Le Play, par Auguste Comte, que la famille représente la cellule sociale, échappait aussi bien aux élèves de Voltaire qu’à ceux de Rousseau.
Le Prince Othon Combien de gens, en France, ignorent le nom de l’exquis romancier anglais qui s’appelait Stevenson, combien aussi ne le connaissent que de nom et ne savent pas, pour en avoir joui, le charme de cet esprit délicat, de cet ironique de grande marque, petit cousin de Voltaire et de Sterne. […] Roujon sous de trop gros compliments, il me semblait, quand j’ai fermé ce petit volume, que je venais de lire quelque chose comme un conte commencé par Voltaire et terminé par Musset, tant l’esprit y est alerte, français, tant cette fantaisie a de légèreté et de charme. […] Les auteurs de fabliaux, comme ceux du Renard et de la Rose, étaient déjà voltairiens plusieurs siècles avant Voltaire et se gaussaient de tout avec un vilain sourire goguenard. […] Sa lettre à Voltaire est restée.
Il aurait volontiers senti par l’imagination, et aussi par aristocratie de nature, comme Joseph de Maistre, et il n’avait pas même au fond la religion de Voltaire ; il n’avait le plus souvent, en présence de l’univers et de la nature, que le regard silencieux de Lucrèce, avec l’agonie et le dédain de plus.
Au xviiie siècle, Voltaire excita, dès les premiers jours, de ces transports d’esprit dans le plus grand monde, — mais d’esprit seulement : les femmes qui l’aimèrent à ses débuts et qui ne craignirent pas de le montrer, la maréchale de Villars, toute la première, allaient droit à la célébrité, à la mode, au lion du moment.
Voltaire, avec sa promptitude de goût, ne s’y est pas trompé, et il dit dans une lettre : « Ce Théocrite, à mon sens, était supérieur à Virgile en fait d’églogue. » 2.
Le père Amyot, qui sait autant qu’Aristote et qui écrit à s’y méprendre comme Voltaire, en cite de longs fragments dans ses Mémoires pleins de sagacité.
à Voltaire ou à Jean-Jacques Rousseau ; mais demandez aux possesseurs de Ferney ou des Charmettes s’ils n’aimeraient pas mille fois mieux avoir succédé, dans ce château ou dans cette chaumière, à des hôtes sans nom, que d’être assiégés à chaque heure de l’année, au seuil de ces demeures, par ces pèlerins importuns du génie ou de la célébrité.
De Périclès et de Socrate chez Aspasie, de Michel-Ange et de Raphaël chez Vittoria Colonna, de l’Arioste et du Tasse chez Éléonore d’Est, de Pétrarque chez Laure de Sade, de Bossuet et de Racine chez madame de Rambouillet, de Voltaire chez madame du Deffant ou chez madame du Châtelet, de J.
V Nul ne peut nier que ceci ne soit le résumé parfaitement historique de l’institution de la papauté, et de son action séculaire pour rassembler autour d’un centre commun les débris de l’Italie, pour la défendre des barbares, pour la disputer à l’empire germanique et pour faire de ses membres épars une unité papale, au lieu d’une unité romaine : à ce titre, les historiens philosophes les moins chrétiens, tels que Gibbon, Sismondi, Ginguené, Voltaire lui-même, constatent les services réels rendus par la papauté à l’Italie dans le courant des siècles.
Les uns ont été plus poètes, les autres aussi éloquents, quelques-uns aussi politiques, ceux-ci aussi philosophes, ceux-là aussi écrivains ; mais nul, sans en excepter Voltaire, n’a été, dans tous les exercices de la pensée, de la parole ou de la plume, aussi vaste, aussi divers, aussi élevé, aussi universel, aussi complet que Cicéron.
Jules Janin, cet homme qui a autant d’esprit que Voltaire, autant d’érudition littéraire que Fontenelle, autant de bon sens que Boileau, autant de cœur qu’une jeune fille quand elle verse ses premières larmes dans le sein de sa mère sur la mort de son serin…, Jules Janin, ce véritable homme de lettres, en action perpétuelle depuis trente ans, qui a tout vu, tout su, tout retenu, tout raconté, et dont le sentiment est éternellement jeune parce qu’il est sans cesse renouvelé par la verve aimable de ce cœur qui ne s’est jamais racorni sous la mauvaise humeur.
Rousseau, correspondances des âmes effeuillées page à page et recomposées à la fin de la vie, confidences par confidences, sans songer que la main du public les décachètera un jour ; Lettres de Cicéron, Lettres de Pline le Jeune, Lettres de Sévigné, ce grand siècle écrit jour à jour par ses reflets intimes sur l’esprit d’une femme ; Lettres de Voltaire lui-même, ces lambeaux d’une passion acharnée à la destruction d’une idée ; Lettres de Mirabeau, ces flammes échappées du volcan d’un cœur pour en incendier un autre, etc., etc. ; demandez-vous sincèrement lequel de tous ces livres a pénétré le plus profondément dans votre cœur, lequel cohabite le plus habituellement avec vous dans la solitude de vos jours avancés, lequel est devenu votre ami le plus quotidien dans vos angoisses, avec lequel vous aimez le mieux vivre, avec lequel vous aimez le mieux mourir.
Voyez le crâne de Raphaël dans le moyen âge ; voyez le crâne exquis mais étroit de Voltaire dans le dernier siècle ; ces deux hommes, doués des plus merveilleuses facultés de l’intelligence, seraient des idiots si vous compariez la petitesse de l’organe de leur pensée à la masse tudesque des têtes de David.
Voir dans le Dictionnaire philosophique de Voltaire le charmant article Gargantua, où il est prouvé par des arguments tout semblables à ceux des apologistes que les faits merveilleux de l’histoire de Gargantua sont indubitables.
Voltaire Il est certain qu’aux nombreuses difficultés qu’offre toute traduction, de nouvelles s’ajoutent lorsque l’œuvre à traduire est musicale.
C’est Diderot sous le roi Voltaire et le néo-chrétien Jean-Jacques.
Il est devant une fenêtre fermée, dans la pose raide et ankylosée des hémiplégiques, une couverture de voyage sur les genoux, et assis devant une table où est posé devant lui un volume des Contes de Voltaire.
Au dix-huitième siècle, la littérature ayant acquis avec les Voltaire et les Rousseau un empire presque sans bornes, une hégémonie politique et sociale, les littérateurs commencèrent à se considérer comme les nouveaux souverains du monde.
Rousseau, la correspondance de Cicéron, celle de Voltaire, que les livres qu’on lit et qu’on relit le plus sont des livres personnels.
C’est là Cervantès, c’est là Arioste, c’est là Rabelais, c’est là Voltaire dans la Pucelle, c’est là Byron dans Don Juan.
XXVII Les poètes antipoétiques du dix-huitième siècle, Voltaire, Dorat, Parny, Delille, Fontanes, La Harpe, Boufflers, versificateurs spirituels de l’école dégénérée de Boileau, furent ensuite mes modèles dépravés, non de poésie, mais de versification.
Selon l’expression de Voltaire, — le plus aristocrate des hommes, — ce sont eux qui des Welches ont tiré des Français.
Jean Moréas a, entre le commencement et la fin de mon Enquête, immolé ses maîtres et amis du symbolisme aux prémices de sa dernière-née, l’École Romane, tenue, m’assure-t-on, sur les fonts baptismaux d’un modeste concurrent du café Voltaire, l’église, jusqu’ici, de toutes les chapelles. […] Plus tard, à côté de Voltaire, c’est Diderot et Rétif de la Bretonne. […] Voltaire, Rousseau, Diderot, Chénier, toutes les personnalités accusées et contraires, et qui pourtant constituent cet ensemble qu’on appelle un siècle littéraire ; en ce siècle, le nôtre, c’est identique !