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1239. (1930) Les livres du Temps. Troisième série pp. 1-288

Benjamin imite de son mieux, mais il grossit le trait, force la note et aboutit à une charge. […] La divergence importune plus Valéry que le trait commun ne l’apprivoise. […] Un seul trait me choqua : l’injure à Renan. […] Il y a des traits communs à tous les hommes et qui constituent l’homme en général. […] André Gide non seulement un trait de caractère, mais un principe.

1240. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

Souvent il ajoute à l’original des traits charmants… » Ainsi s’exprime M.  […] Ainsi, certains traits du rôle de Tartufe ont fait dire que Molière visait les jansénistes ; d’autres traits laissent plutôt croire que c’était aux jésuites qu’il en avait. […] Et c’est un trait de vérité de plus. […] Si, sous ces traits nouveaux, je venais à lui plaire ? […] Rassemblons ces traits.

1241. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LVIII » pp. 220-226

Au reste, c’est un trait honorable pour la presse en France, que le ton respectueux et l’absence de critique au sujet de Chateaubriand.

1242. (1874) Premiers lundis. Tome I « Dumouriez et la Révolution française, par M. Ledieu. »

Citons de Dumouriez deux traits qui attestent l’élévation ou du moins la délicatesse de ses sentiments.

1243. (1874) Premiers lundis. Tome I « Fenimore Cooper : Le Corsaire Rouge »

Il y a peint aussi en traits fidèles et ineffaçables des mœurs inconnues à l’Europe, et que l’Amérique elle-même voit fuir et disparaître chaque jour.

1244. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre premier. De l’invention dans les sujets particuliers »

Aussi le don Juan français offre-t-il des traits nouveaux qui l’éloignent du type primitif et manifestent la pensée originale du poète : la scène du pauvre, celle de M. 

1245. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 169-178

Ce n’est pas qu’on ne trouve dans ses Ouvrages des étincelles de lumieres, des maximes fortes, des traits hardis, des morceaux pleins de force & de vigueur ; mais ces découvertes ne se font que par intervalles, & souvent les intervalles sont très-longs.

1246. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 181-190

La Métaphysique & la Morale forment, à la vérité, les premiers traits du Tableau de ses passions ; mais elles n’indiquent que les causes, au lieu que l’Histoire nous en découvre les effets, & par-là les différens ressorts.

1247. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Joseph Scaliger, et Scioppius. » pp. 139-147

Il mourut à Leyde, 1609, victime des traits dont il avoit montré le funeste usage.

1248. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre VI. Des dictionnaires Historiques » pp. 220-228

Le premier est le Dictionnaire des portraits historiques, anecdotes & traits remarquables des hommes illustres, par M.

1249. (1761) Salon de 1761 « Peinture — M. Pierre » pp. 122-126

Point d’Amour qui décoche un trait ; ou qui écarte adroitement un voile.

1250. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 25, du jugement des gens du métier » pp. 366-374

L’on a souvent eu raison de reprocher aux illustres dont je parle, le trait d’amour propre dont Auguste fut accusé ; c’est de s’être choisi dans la personne de Tibere le successeur qu’il croïoit le plus propre à le faire regretter.

1251. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 39, qu’il est des professions où le succès dépend plus du génie que du secours que l’art peut donner, et d’autres où le succès dépend plus du secours qu’on tire de l’art que du génie. On ne doit pas inferer qu’un siecle surpasse un autre siecle dans les professions du premier genre, parce qu’il le surpasse dans les professions du second genre » pp. 558-567

Cesar auroit appris en moins de six mois tout ce que nous sçavons, et dès qu’il auroit eu connu nos armes, dès qu’il auroit eu connu, pour s’expliquer ainsi, la nature de nos traits et celle de nos boucliers, son génie en sçauroit faire des usages dont peut-être nous ne nous avisons point.

1252. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Émile Augier »

Voilà pourquoi, dans le Fils de Giboyer, il n’y a pas une seule plaisanterie que l’on n’ait entendue cent fois, pas un mot cherchant à faire trait que l’on n’ait ramassé sous les pieds de tous dans les conversations !

1253. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Ces traits sont faits pour le peuple326. […] Car je suppose que le Chevalier n’a pas envie de l’accompagner plus loin, en Espagne, par exemple, où il découvre quelques traits de génie dans le théâtre de Caldéron, trouve que personne ne s’intéresse à Don Quichotte346, analyse (avec quel sérieux !) […] comme si le goût de la petite monnaie philosophique n’était pas un des traits de l’esprit français, prompt à vulgariser toutes les richesses de l’esprit humain dont il est l’interprète ! […] Le dernier trait, l’acte suprême du pouvoir exercé par lui sous l’autorité du roi, fut l’exécution d’une coterie qui, par l’austérité réelle ou affectée de ses mœurs, était importune à la cour. […] Il y a dans son caractère deux traits dont la connaissance achève de répandre sur la nature spéciale de son génie comique tout le jour dont notre intelligence a besoin.

1254. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

Et il entrait avec un grand air, et il saluait galamment, et de temps en temps éternellement souriant, lançait un assez joli trait d’esprit, que Mme Récamier relevait, faisait valoir. […] Entre les deux fenêtres donnant sur la Seine, se lève une gaine carrée, portant un buste de marbre blanc de Pradier, le buste de la sœur de Flaubert, morte toute jeune, et qui avec ses traits purs et droits, encadrés dans deux grandes anglaises, semble une Grecque retrouvée dans un keepsake. […] Sa mère, née en 1794, et qui garde la vitalité des gens de ce temps, sous ses traits de vieille femme, montre les restes d’une beauté passée, alliée à une sévère dignité. […] Il remue avec joie tout son vestiaire de mascarade orientale, et le voilà se costumant, et montrant, sous le tarbouch, une tête de Turc magnifique, avec ses traits énergiques, son teint sanguin, ses longues moustaches tombantes… et du fond de ses loques colorées, il finit par retirer, en soupirant, la vieille culotte de peau de ses longues chevauchées, une culotte de peau toute ratatinée, — et qu’il considère avec l’attendrissement d’un serpent qui contemplerait sa vieille peau. […] Puis il me peint un champ de bataille, en l’étonnante symétrie, en l’espèce d’arrangement ordonné des morts, couchés avec d’étroites petites ombres portées derrière eux… et la terre, sur tout ce champ de bataille, sans une motte en relief, mais aplatie, durcie, battue comme une aire de grange… et toutes ces têtes, même celles aux traits boursouflés, augustes de paix.

1255. (1898) La poésie lyrique en France au XIXe siècle

Eh bien, ici déjà nous avons quelques-uns des traits essentiels qui vont contribuer à définir la poésie de Lamartine. […] Voilà déjà, par conséquent, un premier trait, celui de ce sentiment des beautés de la nature. […] Si je relève ce trait, ce n’est pas pour faire au poète un reproche de vanité, mais c’est parce qu’il est essentiel de noter chez lui l’origine plébéienne. […] Enfin, je noterai un dernier trait chez Alfred de Musset. […] Dans La Légende des siècles, Victor Hugo va s’efforcer de nous montrer successivement des tableaux des différentes époques de l’humanité, tableaux dont chacun mettra en relief un trait qui sera caractéristique de l’époque.

1256. (1889) La bataille littéraire. Première série (1875-1878) pp. -312

Tous les ravages du mal se creusèrent alors sur ses traits légèrement crispés par la difficulté d’une respiration sifflante. […] Il effila sa moustache d’un mouvement machinal ; mais ses traits demeurèrent immobiles. […] Bientôt il semble que la passion l’emporte ; les traits se multiplient et, par des retours subits et rapides, elle est entraînée de tous les côtés en même temps. […] Une joie étrange illumina les traits du coupable, et il expira. […] Voici encore un trait entre bien d’autres : Des soldats allemands entrent dans un village et exigent six victimes à fusiller ; probablement comme représailles.

1257. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — P.-S. » pp. 38-40

Par ces traits tout spirituels, elle n’est pas moins une petite Palestine pour nous et une figure du ciel que par ses figues, ses muscats, ses olives, ses oranges, etc. » — On voit que cet ami de Racine n’était pas sans avoir l’imagination quelque peu riante. — Il est moins question dans les toutes dernières lettres que nous avons de lui des deux prédicateurs émules ; la Cour les enlève à la ville ; Versailles et le monde, ce sera peu à peu l’écueil de l’illustre Massillon : « (23 mars 1700).

1258. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Académie française — Réception de M. de Falloux » pp. 311-316

Si, par hasard, des esprits oisifs et mécontents étaient venus à cette séance académique, où la plus belle société s’était donné rendez-vous, avec l’intention de chercher et d’applaudir quelques-uns de ces traits plus politiques que littéraires, sur lesquels on a trop compté en d’autres temps, ils auraient été désappointés.

1259. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXIV » pp. 247-253

, Qui prends, qu’on rie ou bien qu’on pleure, Lançant tes traits sans savoir où, Les dieux à jamais, l’homme une heure !

1260. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LXXVII » pp. 306-312

— Jules de Rességuier, un poëte assez agréable et très-maniéré, a fait autrefois, dans une pièce adressée à Soumet, ce vers qui peint en un trait le défaut de celui qu’il croit louer : Et c’est peu qu’ils soient beaux, tes vers, ils sont charmants !

1261. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — D — Desbordes-Valmore, Marceline (1786-1859) »

Et plus tard, dans le célèbre médaillon de David, vue de profil, — avec les mêmes traits, mais devenus si sérieux et si calmes, avec la grande paupière baissée, avec cette chevelure toujours courte qui s’arrange en masses, dignes de la statuaire, — comme à ce moment-là elle est épique et vraiment imposante !

1262. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre VII. Le théâtre français contemporain des Gelosi » pp. 119-127

Mais par son caractère aristophanesque et par les suites qu’elle aurait eues sans la spirituelle indulgence de Henri IV, elle tomba dans le domaine du chroniqueur, et son récit nous en a conservé les principaux traits.

1263. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Hartley »

Les traits fondamentaux de la doctrine de Hartley se réduisent donc aux propositions suivantes : A la vibration simple correspond la sensation simple.

1264. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre VIII » pp. 70-76

 » Toutefois il paraît que la facilité de madame de Sévigné était contraire à l’usage, puisque Bussy-Rabutin ajoute encore ce trait de satire : « Il n’y a guère que l’usage qui la pourrait contraindre ; mais elle ne balance pas à le choquer plutôt que les hommes 29. » Il paraît que Voiture, après avoir reçu de Julie une leçon de réserve, se crut en droit d’en donner de semblables à d’autres.

1265. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XVI, les Érynnies. »

En regardant de tous les côtés, il entrevit une grande femme maigre et livide, « semblable par les traits du visage et par l’habillement à une Furie tragique ».

1266. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre IV. Bossuet orateur. »

Trois choses se succèdent continuellement dans les discours de Bossuet : le trait de génie ou d’éloquence ; la citation, si bien fondue avec le texte, qu’elle ne fait plus qu’un avec lui ; enfin, la réflexion ou le coup d’œil d’aigle sur les causes de l’événement rapporté.

1267. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre viii »

Chapitre viii Catholiques, protestants, socialistes, tous en défendant la France, défendent leur foi particulière Un trait commun à ces diverses familles d’esprit durant cette guerre, c’est qu’elles sentent toutes que le meilleur, le plus haut d’elles-mêmes, leur part divine est engagée dans le drame, et périrait avec la France.‌

1268. (1913) Les livres du Temps. Première série pp. -406

Ils n’ont qu’un trait commun : la bonté. […] Jules Lemaître interprète arbitrairement un trait littéraire comme un indice de sotte vanité. […] Il remarque de nouveau cette horreur du concret, qui était (et qui est peut-être encore) un des traits de l’éducation universitaire. […] Qu’avec leurs noms anciens les personnages de Racine aient certains traits de son époque, ce n’est pas douteux. […] Malgré cette familiarité qui aurait pu passer pour un trait de caractère chez une paysanne, M. 

1269. (1898) Impressions de théâtre. Dixième série

Leurs traits individuels sont à peu près nuls. […] La vie mondaine n’est guère moins absorbante, par la minutie de ses rites, que la vie des gens qui ont à gagner leur pain, et est peut-être encore plus propre à effacer ou à atténuer, chez les individus, les traits originaux. […] Ce trait, ajouté par M.  […] Un trait nous montre que tous ses sentiments, et même sa piété d’enfant nerveux élevé par les prêtres, se ramènent à l’orgueil. […] Ce trait de rhétorique exaspère les mineurs, fait éclater la grève qui couvait, et vaut à Boussard une balle dans la tête. « La réponse du chacal au lion ! 

1270. (1898) Ceux qu’on lit : 1896 pp. 3-361

Jules Simon qui s’est trouvé avec lui à Berlin, à l’occasion du congrès relatif au travail et à la condition des ouvriers, n’a pu peindre qu’à petits traits ce mouvant modèle qu’il n’a pas eu le temps d’étudier à fond, mais chacun de ces traits est définitif et témoigne d’une grande sûreté de main. […] Mais la forme lui paraissait abrupte et négligée ; elle y trouvait des traits excessifs, des tons durs, une manière trop peu respectueuse de traiter la langue. […] Je suis très gonflée d’avoir eu ce trait de génie au début des vacances. […] Alors son regard prenait feu, le frémissement courait sur ses lèvres, ses traits s’éclairaient, sa voix se déployait en modulations émouvantes ou persuasives, il enlaçait, enveloppait, étreignait. […] Ses yeux aussitôt s’animèrent, et, tout d’un trait, il me la rendit complètement vide.

1271. (1906) La rêverie esthétique. Essai sur la psychologie du poète

Si l’on s’en tenait à cette signification, nous pourrions marquer d’un trait net le champ de la poésie : elle serait tout entière contenue dans l’art des vers. […] En elles-mêmes, elles sont si vagues, si indécises de traits, qu’à peine pourrait-on les qualifier au point de vue esthétique. […] Le trait mélodique dessine son arabesque, reste un instant tout entier présent à la conscience, et s’évanouit. […] Il est bien rare que le romancier femme ne donne pas à ses héroïnes quelque chose de sa mentalité propre et même de ses traits physiques. […] À remarquer tout ce qui a trait à l’utilisation de la rêverie, comme procédé d’invention.

1272. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

Ils répondront aux meilleurs raisonnemens par les traits de la parodie même. […] La parodie l’a dit ; le trait a fait rire : et dès-là pour certaines gens, la chose est prouvée. […] Dès qu’il fait rire il a raison, et je rirois le premier du trait de la parodie. […] S’il y a dans une tragedie quelques traits d’une vertu héroïque, et capables d’élever l’ame aux grands sentimens, ce sont ces traits mêmes que la parodie va employer en reproche de subtilité et de chimere. […] Jamais, pour conserver un trait excellent, on ne seroit réduit à s’en permettre un médiocre.

1273. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

Les signes frappants de l’hérédité, c’est la ressemblance des traits, la similitude de l’esprit et des manières d’être. […] Ce dernier, faisant montre d’une vertu qu’il n’a pas, proteste, s’indigne contre la représentation de certains faits, de certaines actions qu’il commet tous les jours sans scrupule et dans une parfaite tranquillité de conscience. » « Ces mêmes spectateurs ne manquent pas d’applaudir avec frénésie aux traits de désintéressement, de dévouement, d’héroïsme qu’ils se garderaient bien d’accomplir eux-mêmes comme étant trop préjudiciables à leurs plaisirs et à leurs intérêts ; mais il leur semble avoir pleinement satisfait les besoins de leur conscience et être pour quelque chose dans le triomphe des gens de bien dès qu’ils ont donné, par leurs larmes et leurs bravos, un témoignage public de leur sympathie. » Ainsi raisonne M.  […] Nous connaissons autour de nous mille traits de vertu. […] Le sublime ne trouve pas seulement son expression dans la poésie et dans l’art, mais encore dans l’histoire il n’y réside pas à l’état permanent ; il traverse un siècle, une époque, une existence il laisse après lui, comme traînée lumineuse, un acte de vertu, d’héroïsme, un trait de génie. […] A la manière des maîtres, dignes de ce nom, il trace ses personnages à grands traits, il en fait ressortir les caractères distinctifs, il en constitue l’ensemble par de larges touches afin de frapper plus immédiatement son lecteur.

1274. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE RÉMUSAT » pp. 458-491

Sa physionomie même et la forme de ses traits exprimaient, accusaient un peu fortement peut-être ce sérieux intérieur dans les goûts qu’il ne faudrait pas pourtant exagérer, et qui ne sortait pas des limites de son âge. […] Dans l’histoire (à peu près impossible malheureusement) de la conversation en France, un trait suffirait à qualifier Mme de Rémusat, à lui faire sa part, et on peut se rapporter à ce qu’il signifie pour le mélange du sérieux et de la grâce : elle est peut-être la femme avec laquelle ont le mieux aimé causer Napoléon et M. de Talleyrand. […] Cette figure impassible, trop habile pour trahir même son triomphe, ce ton demi-railleur, demi-bienveillant, qui lui est assez habituel, cette douceur qui est peut-être une ruse de plus, voilà bien des traits de signalement qui ne se rapportent qu’à lui.

1275. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (5e partie) » pp. 65-128

Aucune faiblesse féminine, aucune défaillance de cœur, aucun frisson du corps, aucune pâleur des traits. […] Ses traits ne portaient pas, comme ceux de son mari, l’empreinte de la béatitude anticipée du juste et du martyr, mais celle du dédain des hommes et de la juste impatience de sortir de la vie. […] Elle avait conservé, indépendamment de la reconnaissance, un vif sentiment de l’amabilité, de l’élégance et de la bonté familière de ce malheureux prince ; et, tout en déplorant, comme royaliste, les entraînements et les complicités presque parricides de Philippe-Égalité, elle ne pouvait s’empêcher de nous le peindre sous les traits d’un jeune père de famille accompli dans son intérieur, et d’attribuer à sa faiblesse, plus qu’à sa nature, les égarements et les crimes qui flétrirent plus tard son nom.

1276. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVe entretien. Vie de Michel-Ange (Buonarroti) »

La ligne droite, base fondamentale de ses statues, depuis l’orteil jusqu’au sommet de la tête, est plus longue et plus élancée que la ligne grecque ; les inflexions, plus hardies et plus étranges de cette ligne donnent aux traits, aux formes et aux mouvements de ses statues des nervures, des attitudes, des torsions, des majestés, des hardiesses qui dressent l’homme plus haut sur ses pieds et qui semblent faire escalader l’art jusqu’au ciel. […] nous donner à tous deux une longue vie, soit sur la toile, soit dans ce bloc, en y gravant notre âme et nos traits ? […] On y cherche les traits du Phidias chrétien, on n’y voit qu’un front proéminent creusé de rides transversales, des yeux encaissés dans des orbites osseuses, qui avaient, dit-on, les couleurs changeantes selon la pensée, des tempes profondément creusées par la vieillesse, des pommettes saillantes, des lèvres minces et fortement fermées, une barbe rare et courte, divisée sur le menton en deux bouquets, comme celle du bouc, un cou fortement noué à des épaules lourdes, l’altitude plus paysanesque que noble : en tout, point de beauté, mais une puissance plus robuste que nature, telle était l’enveloppe de cette âme, qui contenait, comme Socrate, la suprême beauté.

1277. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Les derniers mots que l’Ombre achève Du Tasse ont calmé les regrets : Plein de courage il se relève, Et tenant sa lyre et son glaive, Du destin brave tous les traits. […] Les traits paternels avaient pris au cercueil quelque chose de sublime. […] Rien ne me pressait ; je ne fixai point le moment du départ, afin de savourer à longs traits les derniers moments de l’existence, et de recueillir toutes mes forces, à l’exemple d’un ancien, pour sentir mon âme s’échapper.

1278. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Ainsi dans cette histoire poétique des Mérovingiens, dont on parlait tout à l’heure, se laissent entrevoir des vestiges de vieux poèmes francs ; dans les chansons de gestes, certains récits, certains personnages, des traits de mœurs, des usages de la vie guerrière et civile sont des résidus manifestes de la plus ancienne poésie et de la plus ancienne civilisation des Francs. […] Mais s’il ne fouille pas, il dessine : son trait est sec, mince, mais juste. […] Toutes ces horreurs sont racontées, dans Garin surtout, d’un style étrangement bref et sec, où pourtant le trait caractéristique est appuyé de façon à prendre une intense énergie d’expression : ainsi le monotone refrain des villes détruites ou incendiées par Bègue dans sa course en Bourgogne, finit par évoquer, avec une netteté singulière, je ne sais quelle image simplifiée et comme le symbole horrible de la guerre, de la guerre abstraite, d’une contrée imprécise où tout est ruine ou flammes.

1279. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

Ce dernier trait, à peine indiqué, achève la figure. […] Il a le mot qui emporte pièce, la couleur crue, intense, le trait net, ferme, qui détache vigoureusement l’image. […] De temps à autre, la pensée emporte un trait vigoureux, une formule saisissante ; c’est une bonne fortune d’éloquence ou d’ironie, comme en ont les hommes remarquables qui ne sont point écrivains.

1280. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

Les traits même purement septentrionaux ne sont pas absents des drames de notre compatriote. […] M. de Vogüé nous dit que deux traits les distinguent de nos réalistes à nous : 1º « L’âme flottante des Russes dérive à travers toutes les philosophies et toutes les erreurs ; elle fait une station dans le nihilisme et le pessimisme : un lecteur superficiel pourrait parfois confondre Tolstoï et Flaubert. Mais ce nihilisme n’est jamais accepté sans révolte ; cette âme n’est jamais impénitente ; on l’entend gémir et chercher : elle se reprend finalement et se sauve par la charité ; charité plus ou moins active chez Tourguenief et Tolstoï, affinée chez Dostoïewsky jusqu’à devenir une passion douloureuse. » 2º « Avec la sympathie, le trait distinctif de ces réalistes est l’intelligence des dessous, de l’entour de la vie.

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