L’amour-propre de l’homme a voulu tenir un engagement de jeunesse, et de toutes les conditions qui puissent être faites à l’inspiration, je n’en connais pas de plus triste. […] Or, c’est parce que je le tiens pour l’un et pour l’auteur qu’il me déplaît de lui voir perdre ses facultés dans des œuvres pour lesquelles évidemment il n’est pas fait.
La manière est petite et froide ; l’orateur divise et subdivise : il a l’air d’un homme qui craint de s’égarer, et qui se tient sans cesse à un fil. […] Au reste, ce défaut tient peut-être à un mérite de l’ouvrage, mérite d’autant plus estimable, qu’il ne se trouve dans aucune oraison funèbre, ni avant, ni après Massillon, et qu’il s’agissait d’un roi et de Louis XIV ; c’est que l’orateur y parle assez ouvertement des faiblesses et des vices de celui qu’il est chargé de louer ; et ne dissimule point que ce règne si brillant pour le prince a été souvent malheureux pour le peuple.
Nadaud, lui, se tient à l’écart de la mêlée ; sa poésie, aux goûts calmes, pêche à la ligne, prend les goujons et regarde sans trouble passer le fleuve des révolutions… La joie n’est pas le chant complet du monde, le plaisir n’est pas l’amour, l’esprit n’est pas la liberté.
L’atteindre ainsi du premier coup et dans sa perfection était certes la preuve d’un talent et d’une intelligence peu ordinaires ; et c’est pourquoi nous avons tenu à recueillir, parmi les chefs-d’œuvre de cette époque, cette épave d’un poète qui ne vivait plus, depuis longtemps, que dans la mémoire des dilettantes.
Remond de Saint-Mard a composé aussi une Poétique, mais une de ces Poétiques arbitraires, qui, dérogeant aux vrais principes, ne laissent voir que les idées de l'Auteur, contre lesquelles le bon goût doit se tenir sagement en garde.
Au sortir des mains de Pierre, il tomba dans celles de Bachelier, qui l’a livré cette année à Parocel, à Brenet, à Lépicié, à Monnet qui le tient à présent.
Oui, cette nuit, Catilina, c’est dans la maison de Lecca que tu as distribué les postes de l’Italie, que tu as nommé ceux des tiens que tu amènerais avec toi, ceux que tu laisserais dans ces murs, que tu as désigné les quartiers de la ville où il faudrait mettre le feu. […] « Vos honneurs enfin, à chacun desquels nous étions parvenus par une élévation progressive, vous nous les restituez tous en un seul et même jour ; en sorte que les biens que nous tenions soit de nos parents, soit des dieux, soit de vous-mêmes, nous les recevons tous à la fois de la faveur du peuple romain tout entier. […] J’ai essayé si je pourrais y réussir, et j’ai même poussé si loin la chose que j’ai tenu des entretiens philosophiques à la manière des Grecs. […] Par ce moyen la vie d’ici-bas tiendra déjà d’une vie céleste, et nous en serons mieux disposés à prendre notre essor quand nos chaînes se briseront. […] Que si le ciel nous laisse notre dernière heure inconnue, tenons-nous dans une telle disposition d’esprit que ce jour, si terrible pour les autres, nous paraisse heureux.
Les poètes, ses pairs, le tiennent en haute estime ; les cérébraux, ses frères, le disent un Esprit.
Une lettre à Ibis, un conte légendaire, deux petites histoires orientales, je tiens l’une, La Besace de toile bise, pour parfaite en son genre, et une brève nouvelle de notre temps, La Vieille à l’Araignée, forment la première partie du livre ; et, déjà, j’indiquerai une différence dans la manière d’écrire de M.
La sienne tient par intervalles de celles de chacun de ces Prédicateurs, sans atteindre à leur maniere.
Ne manquez pas d’y regarder une Piété qui s’attendrit et se console à la vue d’un Christ qu’elle tient entre ses mains.
À mon illustre ami le comte Roselly de Lorgues Permettez-moi, mon cher et noble comte, de vous dédier le sixième volume d’un ouvrage où vous teniez déjà votre place1.
Quoique la littérature française tienne pour nous, Français, la plus large place dans la littérature de notre temps, et que cet ouvrage soit plus particulièrement consacré à la littérature française, cependant, quand, dans les autres littératures contemporaines, marquera, à tort ou à raison, une œuvre ou un homme, nous les regarderons par-dessus leur frontière… À quoi bon, d’ailleurs, parler de frontière ?
D’où tiennent-ils ce pouvoir, si ce n’est de la vertu ? […] Les paroles du grand homme ont l’air plausible : devons-nous absolument les tenir comme des oracles, ou oserons-nous les réfuter ? […] Nous avons remarqué l’infériorité des machines allégoriques à côté de ces machines célestes dont les ressorts agissent d’une manière inexplicable, parce qu’ils tiennent aux systèmes religieux. […] « Ma patrie est la tienne, et ce sang est le mien. […] Sa muse, trop métaphysicienne, raisonne, expose, mais ne tient qu’un pinceau vague et confus.
François Coppée Je fais grand cas de l’auteur de : Dans la rue , et je le tiens pour un descendant, en ligne directe, de notre Villon.
Sa poésie tient encore à la poésie parnassienne pour sa forme et son souci plastique, mais elle est pénétrée d’intentions nouvelles et plus humaines.
Les choses d’alentour lui semblent maintenant tenir fixés sur lui des yeux tendres, profonds, dont les rayons descendent aux entrailles de sa pensée.
Qu’avoit-il besoin, après cela, de tenir toujours la lance en arrêt contre MM.
Il ne tient qu’à M. l’Abbé de Besplas d’y marcher lui-même avec gloire, à en juger par le Panégyrique de S.
Voici celui par lequel il débute : Estime qui voudra la mort épouvantable, Et la fasse l’horreur de tous les animaux ; Quant à moi, je la tiens pour le point désirable Où commencent nos biens & finissent nos maux.
Ce sentiment modéré de contentement animera toute la vie de Gibbon, et, même dans ses courtes passions, le tiendra à égale distance des ravissements et des désespoirs. […] En jetant un regard en arrière et en embrassant toute cette période de ses premières années, Gibbon tient à indiquer qu’il n’y laisse rien de regrettable ni à plus forte raison d’enchanteur ; que cet âge d’or du matin de la vie, qu’on vante toujours, n’a pas existé pour lui, et qu’il n’a jamais connu le bonheur d’enfance. […] Ce qui perce surtout dans cet Essai, et ce qui sera l’esprit même de la méthode de Gibbon, c’est de ne jamais sacrifier un ordre de faits à un autre, de ne pas accorder plus d’autorité qu’il ne faut à un accident saillant, de se tenir également éloigné de la compilation qui coud des textes à la suite, et du système absolu qui y tranche à son gré
L’évêque résistait ; la reine, mère du roi, et la reine sa femme, se joignirent à lui pour conjurer à genoux le malade de n’en rien faire ; mais saint Louis tint bon dans son désir et dans son vœu. […] Ce sont là de ces mots qui touchant toujours, parce qu’ils tiennent à la fibre humaine ; et plus l’expression du sentiment est simple, plus on aime à la noter chez l’historien comme chez le poète. […] Ce jour-là, avant le débarquement sur la plage d’Alexandrie, l’ordre du jour disait : Soldats…, vous portez à l’Angleterre le coup le plus sensible, en attendant que vous lui donniez le coup de mort… Vous réussirez dans toutes vos entreprises… Les destins vous sont favorables… Dans quelques jours les mamelouks qui ont outragé la France n’existeront plus… Les peuples au milieu desquels vous allez vivre tiennent pour premier article de foi qu’il n’y a pas d’autre dieu que Dieu, et que Mahomet est son prophète !
Il était depuis 1805 intendant général de la maison de l’Empereur, ce qui, de la part du souverain, indiquait le désir de le tenir habituellement rapproché de sa personne et de l’admettre à toute heure à son entretien. […] Roger, qui, à la recommandation de ses puissants amis, venait d’être nommé membre du Corps législatif, était de ceux qui tenaient M. […] Daru leur donnait la main par plus d’un côté, mais il s’en distinguait pourtant par des idées moins absolues et plus pratiques, par des goûts littéraires moins tranchés, moins exclusifs et d’une continuité plus modérée : entre eux et les amis de Fontanes, il tenait en quelque sorte la voie du milieu.
Homme du monde accompli, il était réservé à l’extérieur : « Il avait pour tout ce qui lui était indifférent une politesse froide qu’on pouvait quelquefois confondre avec le dédain. » Cette circonspection tenait sans doute à plusieurs causes : il avait vécu dans une petite cour et dans un grand monde où sa fortune ne répondait point à sa condition ; il avait de la dignité et une délicatesse susceptible qu’il ne voulait pas exposer aux blessures. […] Un jour, la fille du poète Roucher, écrivant à son père alors sous les verrous, relevait avec une sagacité remarquable et un sentiment de préférence filiale bien permis les défauts de la traduction de Delille au début des Géorgiques : « Mais d’un autre côté, répondait à sa fille l’honnête Roucher, tu ne me parais pas rendre toute la justice qui est due à sa grâce, à son harmonie, à ce je ne sais quoi qui plaît, même dans sa manière française, aux amateurs impartiaux de l’Antiquité. » On voit que je tiens à accorder à Delille tout ce qui se peut raisonnablement. […] Il disait aussi, en indiquant du geste sa vieille amie qui, toujours un peu bergère, se promenait par les jardins : « Tenez !
Vers 1725, il s’était formé à Paris, chez l’abbé Alary, de l’Académie française, une conférence politique qui se tenait tous les samedis ; et comme l’abbé demeurait à un entresol, place Vendôme, dans la maison du président Hénault, la société avait pris nom l’Entresol C’était à la fois un essai de club à l’anglaise et un berceau d’Académie des sciences morales et politiques. […] Sur quoi le refrain continuel du garde des sceaux était « de se tenir prêt à tout » et, en attendant, « de se fourrer hardiment dans le monde plus qu’il n’y était. » Une de ces idées favorites de M. de Chauvelinj, à la date de 1732, et qui fut même accueillie un moment du cardinal, était de faire de d’Argenson un premier président du Parlement. […] Il vivait médiocrement bien avec quelques portions de sa compagnie, des sots de provinciaux qui tenaient leur morgue.
Chassang, dans le Mémoire devenu tout un livre qu’il a composé à ce sujet et que l’Académie des inscriptions a couronné, s’attache, avec sa sûreté de critique, avec la science dont il use et dispose en maître, à suivre, à démêler et à démasquer le roman sous toutes les formes mythiques, historiques, allégoriques, morales, sous lesquelles il se glissait : la Cyropédie de Xénophon était déjà un roman qui tenait du Télémaque ; l’Atlantide de Platon n’était qu’une fiction de Salente, plus idéale et plus grandiose. […] Mon empressement tenait du délire, à tel point que, me dégageant des mains de Byrrhène comme d’une chaîne importune et lui disant brusquement adieu, je me mis à voler promptement au logis de Milon. […] Le philosophe à besicles, qui ne s’en tient pas à la première vue, et qui se mire dans ses abstractions, n’est venu que bien tard.
Il ne tient qu’à vous d’y ajouter encore en me permettant de cultiver l’honneur de votre correspondance… » Ainsi Ducis ne savait pas l’anglais, et le progrès en toute chose est si boiteux, que l’idée ne lui vint jamais de l’apprendre ; mais il sentait de ce côté de Shakespeare un « attrait inexplicable » qui n’est pas la moindre singularité de cette nature candide. […] Né à Versailles, dont il est resté le poète chéri, où il a vécu tant d’années et où il est mort69, fils d’un père savoisien et patriarcal, de qui il a prétendu tenir toute sa poétique, bien différente, dit-il, de celle des Marmontel et des La Harpe, et d’une mère, bonne femme humble et antique ; d’abord secrétaire de maréchaux et de généraux, il fit la guerre et la vit de près, sans en tirer grand profit pour son observation de poète : « Ducis a fait la guerre de Sept-Ans avec nous, dit le prince de Ligne. […] comme je me tiendrais sur mon pré, auprès de mon ruisseau, car j’aurais un ruisseau alors !
Tant de luttes et de combats, tant d’inimitiés soulevées depuis, tant de bruits contradictoires, d’injures et de calomnies même, ont pu obscurcir l’idée qu’on se fait de l’homme et en altérer l’impression, que j’ai tenu à dégager nettement ce premier portrait authentique d’Émile. […] Il fallut à M. de Girardin, pour tenir tête à ces attaques réitérées et qui se renouvelaient sous toutes les formes depuis celle de l’insulte directe jusqu’à celle de la légalité la plus chicanière et la plus inquisitive, un sang-froid, un calme, une intrépidité bien supérieure encore à ce qu’il lui en avait fallu dans la rencontre funeste. […] L’un, fier et chevaleresque, jetait le gant aux Gouvernements existants et se tenait debout, presque seul à la fin, dans une position étroite, difficile, contentieuse, se couvrant des habiletés et de la vigueur de sa plume, disputant le terrain pied à pied, sans rompre d’une semelle, comme on dit.
Mais il est un point sur lequel je tiendrai ferme et protesterai à l’égal des plus vifs défenseurs de Marie-Antoinette : non, cette reine charmante, noble et fière, aimable, sensible, élégante, n’aimait pas et ne pouvait pas aimer les vilaines lectures, et si elle avait de la prédilection pour quelques romans, je pourrais bien vous dire lesquels : c’était pour ceux de Mme Riccoboni ; là et non ailleurs serait sa nuance ; les Lettres de Juliette Catesby lui plaisaient, et si elle avait été condamnée à lire un peu trop longtemps par pénitence, c’est de ce joli roman ou de l’Histoire d’Ernestine qu’elle eût fait volontiers son livre d’Heures 62. […] Necker refusa et devait refuser ; touché des avances et des instances de l’ambassadeur, il lui répondait très sensément : « L’animadversion est au comble, et je vous demanderais comme mon ami de me retenir, si le désir de me rapprocher de Leurs Majestés et de travailler au bien public me rendait faible un moment ; car je serais sans force et sans moyens si j’étais associé avec une personne malheureusement perdue dans l’opinion, et à qui l’on croit encore néanmoins le plus grand crédit. » Dès ce moment, c’est la reine qui semble tenir le gouvernail, ce n’est plus le personnage d’au-dessus dont elle parlait tout à l’heure, ce n’est plus Louis XVI, qui n’a plus pour rôle que de céder sans cesse et qui se fait prophète de malheur en cédant. […] Courtois, fils du conventionnel et de qui je tiens le fait, possédait cet exemplaire annoté, que son père avait trouvé dans les papiers de Robespierre.
Un de ses bras les tient, l’autre bras en implore ; Elle en presse à son sein, et son œil cherche encore. […] Ce vilain côté me rappelle le bourreau qui, durant le noble combat des poëtes à la Wartbourg, se tenait, corde en main, pour pendre, séance tenante, le chantre vaincu. […] Ses livres peuvent attirer et forcer l’admiration pendant quelques pages, mais bientôt leur monotonie fatigue ; car ils sont le contraire de ces écrits chers à Montaigne, pleins de suc et de moelle intérieure, pétris d’expérience et d’indulgence, qui gagnent à être exprimés et pressés, et qui de tout temps ont fait les délices des hommes de sens, des hommes de goût, des hommes vraiment humains… Au résumé, c’est un militant ; il l’est en tout et partout ; comme tel, il laissera dans l’histoire des guerres politiques et religieuses de ce temps une trace lumineuse : Lacordaire et lui, deux lieutenants de La Mennais, et qui ont continué de tenir brillamment la campagne après que leur général avait passé à l’ennemi.
Mais Boileau ne s’en tenait pas aux théoriciens ; il s’instruisait directement aux œuvres, d’après lesquelles les théories ont été dressées, et sa sincérité d’admiration, la perpétuelle direction de sa pensée qui y va toujours spontanément chercher sa règle, nous témoignent évidemment qu’en dépit de certaines timidités de goût et de quelques gaucheries d’expression, Boileau comprenait et sentait les anciens comme il faut. […] Il tint à démontrer qu’Homère parlait congrûment de l’anatomie et du battage de l’or, qu’il savait la géographie et la durée ordinaire de la vie des chiens, et qu’il ne faisait pas tenir aux princesses des propos de corps de garde.
En dehors de la Révolution française, aucun milieu historique ne fut aussi propre que celui où se forma Jésus à développer ces forces cachées que l’humanité tient comme en réserve, et qu’elle ne laisse voir qu’à ses jours de fièvre et de péril. […] Mais le voisinage des vieux sanctuaires de Silo, de Béthel, près desquels on passe, tient l’âme en éveil. […] Il est cependant remarquable que Jésus, fils de Sirach, s’y tient strictement (XVII, 26-28 ; XXII, 10-11 ; XXX, 4 et suiv. ; XLI, 1-2 ; XLIV, 9).
Je trouve, racontée au long, une de ces conversations, qu’il tint à Ancône pendant la première campagne d’Italie, et je la trouve là où l’on s’y attendrait le moins, dans les notes d’un poème (La Chute de Napoléon) publié par M. […] Les soldats murmuraient, mais il tint bon. […] Celui qui les dictait eût été le seul capable d’y tenir la main.
Au milieu du désarroi où l’on est, elle trouve moyen de tenir l’enfant chaudement et de lui faire un lit, d’allumer du feu avec des branches sèches, et d’opposer encore la bonne humeur au guignon. […] nous sommes dans la réalité, nous sommes aux champs, et on a beau vouloir se tenir dans le sentiment pur, il y a, comme dit Mme de Sévigné, de certaines grossièretés sensibles dont on ne se passe pas si aisément. […] Elle aura tenu durant une huitaine de jours Amyot entrouvert, elle l’aura lu à bâtons rompus, et elle se l’est infusé plus abondamment et plus au naturel que le docte et l’exquis Courier durant des années de dégustation et d’étude de cabinet.
Elle tient bon pour Montaigne, qu’il ne goûtait pas ; elle s’en étonne, elle lui oppose ses raisons en maint endroit : Je suis bien sûre que vous vous accoutumerez à Montaigne ; on y trouve tout ce qu’on a jamais pensé, et nul style n’est aussi énergique ; il n’enseigne rien, parce qu’il ne décide de rien ; c’est l’opposé du dogmatisme : il est vain, — eh ! […] « Bref, dit-il, son âme est immortelle, et force son corps à lui tenir compagnie. » Il y a deux traditions sur Mme Du Deffand : la tradition purement française, qui nous est arrivée à travers ceux qu’elle avait jugés si sévèrement, à travers les gens de lettres et les encyclopédistes ; il y a autre chose encore, la tradition directe et plus vraie, plus intime, et c’est chez Walpole qu’il faut l’aller puiser comme à sa source. […] N’oublions pas non plus que Mme Du Deffand était de Bourgogne ; elle semble tenir de cette verve du terroir, qui inspira tant de piquants Noëls aux Piron et aux La Monnoye.
Né avec beaucoup d’esprit, beau comme le jour dans sa jeunesse, « il tenait, dit Saint-Simon, de ce langage charmant de sa mère et du gascon de son père », du gascon adouci par « un tour et des grâces naturelles qui prévenaient toujours ». […] Tous les succès de d’Antin à la Cour et la félicité où il nage en ces années 1709-1710 ne l’empêchent pas de revenir de loin en loin à son Journal, pour y consigner ses regrets, ses moralités, ses scrupules même de conscience : il semble qu’il ait eu, de temps en temps, besoin de s’administrer de petites leçons morales, des admonestations dont il sait bien qu’il tient trop peu de compte dans sa conduite : mais il espère toujours que, la grâce aidant, le moment viendra finalement d’en profiter. […] Il était de ceux que les maîtres qui se succèdent tiennent à s’attacher, car ce sont de ces acteurs rares et soumis qui remplissent parfaitement les rôles secondaires, et dont les aptitudes et les capacités, dans leur juste mesure, se dirigent à tout.
Boileau ne se tint pas ; Racine avait beau lui faire des signes, le prétendu bailli prenait feu et allait se déceler dans sa candeur. […] Il était plein de bons mots, de reparties et de franchise ; il parlait avec feu, mais seulement dans les sujets qui lui tenaient à cœur, c’est-à-dire sur les matières littéraires. […] Si au contraire on cherche le goût, il faut s’en tenir à l’édition de Daunou (1826) ; il ne manque à cette dernière, pour être parfaite littérairement, qu’un sentiment plus net et plus sûr de ce qui distingue la bonne poésie de la bonne prose.
Mais ce Muselli, comme presque tous les savants d’Italie, a grand désir de tenir par quelque lien à l’Académie des inscriptions de France, et Barthélemy prie M. de Caylus de négocier auprès de l’Académie en faveur dudit Muselli pour une place de correspondant, en s’arrangeant toutefois pour qu’on lui renvoie, à lui Barthélemy, la conclusion de l’affaire : Je passerai à Vérone, dit-il ; s’il me cède la médaille, je lui donnerai quelques espérances ; s’il me la refuse, je lui ferai peur de mon opposition à ses désirs ; le tout fort poliment. […] Il faut donc reconnaître, comme plus probable, que l’abbé Barthélemy était lié à Mme de Choiseul par un sentiment tendre, profond et pur, et qui, mêlé d’une nuance touchante, tenait avant tout de l’amitié29. […] Un des amis de Walpole, le général Conway, était venu en France, et, malgré le désir qu’on en avait exprimé de sa part, il n’avait pu réussir à faire la connaissance du duc et de la duchesse de Choiseul, qui s’y étaient peu prêtés : Quoique les Choiseul, écrit Walpole, se tiennent à distance de vous, j’espère que leur abbé Barthélemy n’est point soumis à la même quarantaine.
Ce qu’il disait à Mme de Chantal, il l’aurait dit également à toute âme : « Tenez voire cœur au large, ma fille ; et, pourvu que l’amour de Dieu soit votre désir, et sa gloire votre prétention, vivez toujours joyeuse et courageuse. » Si l’on ne voyait chez lui que quelques images de mauvais goût et quelques abus d’esprit, de sucre, de miel et de fleurs, on pourrait croire qu’il amollit et qu’il effémine la dévotion : en allant plus au fond et en dégageant sa pensée, les meilleurs juges ont trouvé qu’il n’en était rien, et qu’il est resté fidèle au véritable et sérieux esprit chrétien. […] Sur la douceur envers le prochain, il dira : « Ne nous courrouçons point en chemin les uns avec les autres : marchons avec la troupe de nos frères et compagnons doucement, paisiblement et amiablement. » Sur la manière de s’occuper de ses affaires et de s’aider soi-même, sans excès de trouble et sans tumulte ni empressement : En toutes vos affaires, appuyez-vous totalement sur la providence de Dieu, par laquelle seule tous vos desseins doivent réussir ; travaillez néanmoins de votre côté tout doucement pour coopérer avec icelle… Faites comme les petits enfants qui, de l’une des mains, se tiennent à leur père, et, de l’autre, cueillent des fraises ou des mûres le long des haies. […] Bossuet, qui sentait si bien Rancé gravissant âprement vers les hautes cimes et les mornes sommets de l’antique pénitence, suivait également saint François de Sales dans ses riches et riantes vallées ; et, s’étendant de l’un à l’autre en esprit, il tenait en quelque sorte le milieu du royaume chrétien.
Les différences qualitatives du plaisir et de la douleur tiennent donc aux perceptions qui s’y mêlent. […] Le point d’indifférence, nous l’avons vu, n’est qu’un moment idéal de transition, une limite commune entre le plaisir et la douleur, limite où il est impossible de se tenir, comme il est impossible à un cône réel de réaliser son équilibre idéal sur la pointe ; en un mot, l’indifférence est une neutralisation approximative de qualités en elles-mêmes agréables ou pénibles ; elle est un état dérivé et une composition d’états non indifférents. […] Aussi est-il clair que nous naissons avec des inclinations qui tiennent à la structure de nos organes et à la direction des mouvements vitaux.
» Ce matin, Pouchet m’entraîne dans une allée écartée, et me dit : « Il n’est pas mort d’un coup de sang, il est mort d’une attaque d’épilepsie… Dans sa jeunesse, oui, vous le savez, il avait eu des attaques… Le voyage d’Orient l’avait, pour ainsi dire, guéri… Il a été seize ans, sans plus en avoir… mais les ennuis des affaires de sa nièce, lui en ont redonné… et samedi, il est mort d’une attaque d’épilepsie congestive… oui avec tous les symptômes, avec de l’écume à la bouche… Tenez, sa nièce désirait qu’on moulât sa main… on ne l’a pas pu… elle avait gardé une si terrible contracture… Peut-être, si j’avais été là, en le faisant respirer une demi-heure, j’aurais pu le sauver… » Ça été tout de même une sacrée impression d’entrer dans le cabinet du mort… son mouchoir sur la table, à côté de ses papiers, sa pipette avec sa cendre sur la cheminée, le volume de Corneille, dont il avait lu des passages la veille, mal repoussé sur les rayons de la bibliothèque. […] En me mettant l’album dans les mains, elle m’a dit gentiment : « Tenez, je me porte très bien, je vous ferai attendre trop longtemps… Je ne sais quelle idée m’avait pris de les vendre cet hiver, comme ça je ne pourrai plus. » Jeudi 24 juin Je dîne aujourd’hui chez Francis Magnard, établi dans 2 500 mètres de terre, à Passy. […] * * * — On me faisait voir ici deux coqs, qui se tiennent tout en haut du perchoir.
Le poète, qui se croyait tenu à de certaines règles typographiques, s’est dégagé de ces règles et aussi de la rime obligatoire ; au lieu de chercher, par la rime, à donner l’illusion qu’il perpétuait la tradition de l’alexandrin, il se libère et d’un usage absurde et du souci de duper l’oreille ; maintenant il coupe le vers, non plus au commandement du nombre Douze, mais quand le sens s’y prête, d’accord avec un rythme secret et propre à dire une émotion particulière ; s’il use de la rime ou de l’assonance, c’est en vue soit de renforcer le rythme, soit de donner à la pensée une signification plus musicale. […] La prose rythmique tient à la fois de la prose et du vers ; c’est ce que nous dit l’auteur d’une ancienne Vie de Saint-Wulfram : elle tend à quelque similitude avec la douce cadence du vers, ad quamdam tinuli rhythmi similitudinem 209 ; elle ne se compose pas absolument de vers, puisque ses vers ou versets n’ont pas un nombre fixe d’accents ; elle n’est point de la prose pure, puisque l’accent y joue un rôle sans doute prépondérant, quoique obscur. […] Le début du Speculum humanæ Salvationis est un exemple de ce vers libre latin, mais fort médiocre ; il ne tient plus que par la rime, qui est lourde et banale ; ce sont des versets dont la nudité est vraiment sans aucun mystère ; les accents sont difficiles à situer et le rythme est nul : c’est loin de toute poésie.