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1539. (1893) Du sens religieux de la poésie pp. -104

Or, cette identification de chacun avec tous, ce souci unique de la jouissance immédiate et du confort, ce soin jaloux que nous avons de nous dissimuler les uns aux autres notre personnelle originalité afin, précisément, de ne pas troubler la jouissance individuelle de la vie, tous ces signes joints à la conception basse que la science vulgaire s’est faite de la vérité, ont compromis dans la plupart des esprits le sentiment juste de la civilisation, nous ramènent à un état de barbarie paisible, satisfaite, et, dans le mouvement perpétuel de la vapeur, à la lumière brutale de l’électricité, montreront bientôt à la nature épouvantée, sous nos chapeaux ridicules, la face cruellement béate du singe ancestral.

1540. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 13, qu’il est probable que les causes physiques ont aussi leur part aux progrès surprenans des arts et des lettres » pp. 145-236

On conçoit que Mummius qui voulut enrichir Rome des dépoüilles de Corinthe ne s’y connoissoit gueres, par la menace ridicule qu’il fit aux maîtres des navires qui les y devoient transporter.

1541. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Shakespeare »

Eh bien, excepté cette page, un peu ridicule, convenons-en !

1542. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

 » Quand bien même il ne subsisterait du crime monstrueux de celui que nous venons de voir présider, à l’exemple presque universel du clergé de France, aux pires violences et à la Révocation, quand il ne subsisterait, dis-je, que ce témoignage écrit de sa main, que ces quelques lignes révélatrices éclairant en traits de flammes sa nature intime, elles suffiraient, je pense, pour couvrir d’un éternel ridicule les biographes effrontés qui s’efforcent de transformer le Chef-Inquisiteur en un modèle de tendresse et de justice.‌

1543. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Seule l’unité d’action a trouvé grâce, et encore est-elle souvent élargie en unité d’intérêt ; quant aux unités de temps et de lieu (la dernière surtout) on a prouvé par a + b qu’elles étaient une contrainte ridicule.

1544. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Enfant de ce monde-là, pour avoir grandi au milieu, pour y être né, il en a tout naturellement le ton, la légèreté, la causerie sur tout sujet, le sentiment du ridicule ; mais il fait tout bas ses réserves, il a ses idées de derrière la tête (comme les appelle Pascal), et il ne les dit pas.

1545. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIe entretien. Épopée. Homère. — L’Iliade » pp. 65-160

« Un rire inextinguible dérida tous les dieux et toutes les déesses en voyant le ridicule Vulcain, époux de Vénus, s’empresser, en boitant, autour des tables, dans le palais de l’Olympe.

1546. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

Thiers affecte de prendre trop au sérieux Cambacérès, homme en qui le ridicule du caractère s’associait par égale portion avec la sagacité de l’esprit, excellent à un rang secondaire, dans l’ombre, mais qui n’aurait jamais existé s’il n’avait été le second d’un grand homme.

1547. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

cela ne serait pas moins ridicule que le rôle que M. 

1548. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

C’est ce que je vais faire, au lieu de vous tourmenter de ridicules remarques.

1549. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

Rousseau, Chateaubriand dans Atala ou René, et, de nos jours, Mme Sand, se livrent, sous la forme de roman, au lyrisme le plus transcendant de leur génie, et, pour flatter tantôt l’aristocratie, tantôt la religion, tantôt la démocratie du temps, chantent depuis les licencieuses amours de la Nouvelle Héloïse ou depuis les ridicules systèmes d’éducation de l’Émile, éminemment propre à former un peuple de marquis, jusqu’aux rêveries grotesques et féroces d’un socialisme et d’un communisme qui nient la nature, et qui prétendent refaire le monde mieux que le Créateur.

1550. (1879) À propos de « l’Assommoir »

Zola méritait cette distinction, aussi bien qu’un autre et mieux que bien des autres : ses théories sont contestables, ses critiques peuvent être blessantes, on n’est pas tenu d’aimer et d’admirer ses œuvres, mais il n’y a pas moyen de nier son talent ; ses adversaires les plus déclarés le reconnaissent, et ceux qui parlent encore de lui avec un dédain calculé ne font guère que se couvrir de ridicule.

1551. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1862 » pp. 3-73

* * * — Le plus fin critique du xviiie  siècle est peut-être Trublet, oui cet abbé ridicule, qui a trouvé cette définition du génie de Voltaire : « la perfection de la médiocrité », et qui a eu l’audace de mettre La Bruyère au-dessus de Molière.

1552. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Je remarque un portrait, d’une très blonde couleur, de Nadar fils, une spirituelle grisaille de Daumier, représentant un Don Quichotte ridicule, des Guys terribles, un chef-d’œuvre de Manet, une lettre du peintre, au bas de laquelle sont trois prunes lavées à l’aquarelle, qui sont des merveilles de lavis et du coloriage artiste.

1553. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

La poésie doit aller dans le sens et selon les degrés de l’évolution scientifique, graduer tous ses points de comparaison, grandir les êtres et la vie qui est en eux sans les déformer, sans en faire des monstres aussi ridicules dans l’ordre de la pensée que dans celui de la nature.

1554. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre sixième. Le roman psychologique et sociologique. »

Mais, si l’on trouve maint exemple de réalisme ridicule dans le romantisme, on trouve maint exemple de romantisme manqué chez nos réalistes contemporains.

1555. (1898) XIII Idylles diaboliques pp. 1-243

Il fait quelques sauts, fouette l’air de ses bras ridicules et crie du haut de sa Grosse Tête, cependant que Maître Phantasm rit à gorge déployée. […] Mais il devient avare au possible et il se fâche dès que nous lui réclamons seulement notre solde… C’est ridicule à la longue ; cela finira mal.

1556. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

Tempérée chez Marivaux, ou retenue par quelque crainte du ridicule, et mêlée dans la tragédie de Voltaire à d’autres nouveautés, et d’un autre ordre, c’est ici, dans les romans de Prévost, que la sensibilité se déborde. […] et tandis qu’une habitude s’établissait de ne parler des « ruelles » du siècle précédent, qu’avec les plaisanteries et sur le ton de Molière dans ses Précieuses ridicules ou dans ses Femmes savantes, nous n’avons encore aujourd’hui même qu’indulgence et que complaisance pour tant d’aimables personnes qui surent, comme les Tencin et comme les d’Épinay, si bien allier ensemble le désordre des mœurs et le pédantisme de la philosophie.

1557. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Et sans doute l’aveugle, le contrefait, le cul-de-jatte ou l’amputé pourra trouver sa propre vie bien dure, comparée à celle des hommes qui jouissent de leurs cinq sens et de tous leurs membres ; il lui paraîtra inexprimablement injuste et douloureux, étant un homme, de n’être pas complètement un homme ; et ne lui dites pas que, comparée d’autre part à la vie du mollusque ou de l’éponge, sa vie est un chef-d’œuvre de souffrance, mais aussi, corollairement, un chef-d’œuvre de félicité ; ne lui alléguez pas non plus, s’il est riche et si ses souffrances physiques ne sont pas intolérables, qu’il y a de par le monde de pauvres diables sains de corps et intacts de membrure qui souffrent plus que lui : il vous répondra que la pire souffrance, c’est d’être une exception ridicule et pitoyable, une créature visiblement manquée, et de s’en souvenir toujours ; que là est la plus grande douleur parce que là est la plus sensible humiliation… Oui, nous en sommes d’accord ; et cependant il y a chez l’homme une si surprenante faculté d’adaptation aux conditions d’existence les plus étranges, et l’habitude est une si puissante et si bienfaisante fée, que le plus lamentable des disgraciés physiologiques peut n’être pas entièrement malheureux. […] ce petit Fortunio si gentil, si tendre, si naïvement et si profondément amoureux, et si naturellement héroïque dans son jeune amour, cet adolescent délicieux, ce Chérubin sans polissonnerie, est devenu ce vieux notaire dur, maussade, soupçonneux, jaloux, égoïste, ridicule ?

1558. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

« Nous ne sommes pas des étrangers, nous sommes des Anglais. » Le mot de cette dame anglaise peut faire rire, cependant, tout ridicule qu’il est, il exprime un fait : les Anglais sont des citoyens du monde. […] Il y a une idée très forte dans cette conception première d’un don Quichotte sans chevalerie, d’un don Quichotte théologique, ridicule et féroce, formaliste et visionnaire.

1559. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Il est d’ailleurs si facile de tourner en ridicule ses patientes investigations ! Il faudrait avoir l’imagination bien stérile pour ne pas trouver quelque fade plaisanterie contre un homme qui passe sa vie à déchiffrer de vieux marbres, à deviner des alphabets inconnus, à interpréter et commenter des textes qui, aux yeux de l’ignorance, ne sont que ridicules et absurdes. […] Mais faut-il rendre les plus nobles penseurs responsables des commentaires ridicules que l’on fait de leurs doctrines, dans les comités électoraux et dans les cafés des chefs-lieux de canton ?

1560. (1897) Aspects pp. -215

Non seulement ceux que je viens de citer s’affranchissent mais d’autres ont été plus loin dans la conquête de soi-même : Saint-Georges de Bouhélier, Henri Degron, Signoret quand il laisse de côté les épîtres autolâtres et ridicules pour écrire de beaux vers comme les Chants du feu, Maurice Magre. — Tous : espoir des temps prochains. […] Et nous aurons la joie d’échapper aux compromissions, aux marchés louches qui font de la littérature actuelle une puante loge de portier, une parlote haineuse et ridicule où s’émoussent, s’ils n’ont la force de se tenir à l’écart, les caractères les mieux trempés. […] Le romantisme, au théâtre, fut en général ridicule.

1561. (1892) Les idées morales du temps présent (3e éd.)

Certainement, c’était ridicule ; mais elle sentait ainsi, elle ne pouvait se refaire ». […] Alexandre Dumas, placés dans cette optique spéciale qui achève de fausser nos notions sur le monde autrement éclairé que par un grand lustre, tantôt violents, tantôt pervers, tantôt grotesques, et ceux-ci ridicules par les défauts mêmes qui en rendaient d’autres sympathiques, et ceux-là sublimes par l’exagération d’un vice qui en faisait paraître d’autres odieux, M.. […] En sorte que beaucoup d’idées et de croyances, qu’on aurait pu croire tombées définitivement dans la défaveur, presque dans le ridicule, reprennent leur ancienne place ; en sorte que le culte de l’idéal, banni comme absurde, renaît sous des formes nouvelles ; en sorte que les jeunes gens d’aujourd’hui recommencent à célébrer la morale et la religion avec le même enthousiasme que les jeunes gens de 1848 mettaient à célébrer la science et la libre-pensée  comme le prouvent, entre bien d’autres symptômes, ces beaux vers de M. 

1562. (1896) Hokousaï. L’art japonais au XVIIIe siècle pp. 5-298

Un livre aux allusions ironiques, sans doute à propos de la publication d’un sérieux ouvrage sur l’histoire naturelle, et où l’imagination du dessinateur se donne toute liberté dans la création de ses monstres, les faisant, tour à tour, ridicules ou terribles. […] Et, la page des gras retournée, vous êtes en présence de ces torses que percent les côtes, de ces dos où se comptent les nœuds de la colonne vertébrale, de ces cous décharnés, de ces bras étiques, de ces jambes de phtisiques, de ces anatomies ridicules qui vous rappellent à la fois les macabres et comiques écoles de natation de Daumier. […] Un volume très poussé à la caricature, où l’Olympe japonais est ridiculisé à outrance, un volume de chutes ridicules, de nez interminables de Téngous, sur lesquels se fait de la prestidigitation ; de silhouettes, en ombres chinoises, d’épouvantables vieilles ; de figures de femmes devenues monstrueuses, à travers une loupe posée sur leurs visages ; d’allongements de cous pendant le sommeil, qui, selon une superstition du Japon et des îles Philippines, permettent aux têtes de ces possesseurs de cous d’aller visiter des contrées et des planètes étrangères ; de corps de naturels d’un pays où les hommes ne sont possesseurs que d’un bras et d’une jambe, et où ils sont accotés deux par deux.

1563. (1896) Les Jeunes, études et portraits

Ajoutez que les médecins traînent toujours après eux le ridicule que Molière a attaché à leurs longues robes et à leurs bonnets pointus. […] Il a eu cette bravoure, — si rare, — qui consiste à braver le ridicule. […] Joséphin Péladan, grâce aux plaisanteries des journaux et aux lazzi des revues de fin d’année, a reçu la grande consécration du ridicule.

1564. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre I. Les Saxons. » pp. 3-71

Ici le tempérament lent et lourd21 reste longtemps enseveli dans la vie brutale ; au premier aspect, nous autres, gens de race latine, nous ne voyons jamais chez eux que de grandes et grosses bêtes, maladroites et ridicules quand elles ne sont pas dangereuses et enragées.

1565. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre III. La nouvelle langue. » pp. 165-234

Il n’assomme pas, il pique, en passant, non par haine ou indignation profonde, mais par agilité d’esprit et prompt sentiment des ridicules ; il les jette à pleines poignées sur les personnages.

1566. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

« L’infirmité de l’inspiration est peut-être ridicule et malséante ; je le veux.

1567. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxiiie entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff »

Sans doute, il existe un petit nombre de seigneurs qui ne rappellent en rien cet odieux et ridicule personnage, et l’auteur en dépeint loyalement plusieurs dans ses récits, mais, ce ne sont là que des accidents heureux, comme on l’a dit du pouvoir.

1568. (1898) Émile Zola devant les jeunes (articles de La Plume) pp. 106-203

Les uns sont des êtres objectifs que nous ne pouvons déformer sans quelque ridicule, les autres des êtres subjectifs qui nous appartiennent, — et c’est pourquoi, sans critique de forme, je trouve certaines pages de M. 

1569. (1888) Épidémie naturaliste ; suivi de : Émile Zola et la science : discours prononcé au profit d’une société pour l’enseignement en 1880 pp. 4-93

Chaque romancier aura-t-il la ridicule prétention de nous dresser un rapport sur l’état anatomique et l’état dynamique de ses héros et de ses héroïnes.

1570. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Vernet » pp. 130-167

Nous ne nous avouons pas aussi franchement à nous-mêmes qu’un certain chirurgien le disait à son ami : je voudrais que vous eussiez une jambe cassée, et vous verriez ce que je sais faire ; mais tout ridicule que ce souhait paraisse, il est caché au fond de tous les cœurs, il est naturel, il est général.

1571. (1853) Portraits littéraires. Tome I (3e éd.) pp. 1-363

Eût-il été capable de concevoir le plan d’un roman ou d’une comédie dans les proportions adoptées par les maîtres les plus habiles, il n’eût jamais trouvé le temps de mûrir par la méditation le germe déposé dans sa pensée par les passions qui l’avaient agité, par les ridicules qu’il avait sous les yeux. […] Valtone, pour provoquer George Bussy, n’a pas besoin de s’enivrer avec le capitaine Gérard ; il lui suffit d’avoir été tourné en ridicule.

1572. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

Vinet sur Soumet est quasi ridicule de révérence, j’en suis bien fâché. […] Vinet, en réfutant Soumet, est véritablement tombé dans le cauchemar qui a suivi sa chute45 ; ce livre n’est que ridicule ; le succès ici n’a été que factice ; tout le monde s’en moque ou personne n’en parle. […] Sincères et sérieux, ces aveux sont beaux, ils ont de la grandeur ; nous les tiendrons pour sincères ; nous ne nous lasserons point d’encourager ces efforts, d’applaudir à ces bonnes intentions ; ils subiront nos éloges, et nous verrons en définitive de quel côté sera le ridicule. […] Mais quand cette mélancolie superbe, ce désespoir de haut lignage et de bon ton, atteint son fond et son principe ; quand nous trouvons le péché à la racine de ses vagues et poétiques douleurs ; quand nous connaissons que ce n’est pas Dieu qui nous a manqué, mais nous qui avons manqué à Dieu ; que la rupture vient de nous, rupture honteuse, insolente, impie ; que cette mystérieuse angoisse où nagent nos pensées, où se perd notre vie, n’est autre chose que l’instinct obscur, inexpliqué, de la condamnation ; alors cette mélancolie, où notre orgueil se complaisait, prend un caractère plus positif, plus froid, plus dur ; l’aspect de toutes choses devient de plus en plus mortifiant, amer ; une insupportable idée de ridicule s’attache à notre altier désespoir ; et ce qu’il faut craindre alors, c’est que, prenant en mépris son ancienne tristesse à cause des illusions dont elle était pleine, l’homme n’oublie trop que cette tristesse pourtant était une grandeur.

1573. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

En dépit de ces récits malveillants et sarcastiques, le peuple, qui aime assez que les grands hommes soient amoureux et qui ne se laisse pas troubler par le ridicule, continuait, avec les érudits, d’adorer Virgile. […] Et si, au lieu d’être à Portrieux, nous étions à Paris, et si, au lieu de quatre, nous étions seulement dix ou douze, je m’intimiderais tout à fait ; il me semblerait faire quelque chose de malséant, pis que cela, de ridicule. […] Pourquoi donc semble-t-il ridicule à nos Français que les femmes enseignent ce qu’elles savent ?

1574. (1865) Introduction à l’étude de la médecine expérimentale

C’est donc seulement la question du pourquoi qui est absurde, puisqu’elle entraîne nécessairement une réponse naïve ou ridicule. […] Mais les phénomènes de la vie, chez l’homme et chez les animaux élevés, peuvent se modifier sans qu’il arrive aucun changement cosmique extérieur appréciable, et de légères modifications thermométriques et barométriques n’exercent souvent aucune influence réelle sur les manifestations vitales ; et, bien qu’on ne puisse pas dire que ces influences cosmiques extérieures soient essentiellement nulles, il arrive des circonstances où il serait presque ridicule d’en tenir compte. […] Une pareille statistique eût été ridicule, car il y a une raison pour que les racines soient insensibles et une autre raison pour qu’elles soient sensibles ; c’est cette raison qu’il fallait déterminer, je l’ai cherchée et je l’ai trouvée ; de sorte qu’on peut dire maintenant : les racines rachidiennes antérieures sont toujours sensibles dans des conditions données, et toujours insensibles dans d’autres conditions également déterminées.

1575. (1911) L’attitude du lyrisme contemporain pp. 5-466

Hugo qui voyait énorme n’a pas su éviter toujours le ridicule. […] Qu’il vienne donc celui-là, parnassien, néo-romantique, intégraliste — ou autre ; qu’il ose enfin se montrer, ce Paraclet lyrique que l’Académie ne cesse d’appeler à grands cris ridicules ! 

1576. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

Si vous considérez le corps en tant que figuré, il est évident que vous ne le regardez pas comme lumineux, ni comme vivant, vous ne lui ôtez rien : ainsi il seroit ridicule de conclurre de votre abstraction, que ce corps que votre esprit ne regarde que comme figuré, ne puisse pas être en même tems en lui-même étendu, lumineux, vivant, &c. […] La raison de ces accusatifs Latins est donc qu’ils forment un sens qui est le terme de l’action d’un verbe actif ; c’est donc par l’idiotisme de l’une & de l’autre Langue qu’il faut expliquer ces facons de parler, & non par les regles ridicules du que retranché. […] Un homme plaisant est un homme enjoüé, folâtre, qui fait rire ; un plaisant homme se prend toûjours en mauvaise part ; c’est un homme ridicule, bisarre, singulier, digne de mépris. […] Il seroit inutile & ridicule de la répéter ; il en est de des comme de aux, l’un est de les, & l’autre à les : or comme lorsque le sens n’est pas partitif, on dit aux hommes sans ellipse, on dit aussi des hommes ; dans le même sens général, l’ignorance des hommes, la vanité des hommes.

1577. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1888 » pp. 231-328

pendant qu’avec ses bras rouges de laveuse de vaisselle, dans sa toilette de bal de vraie bonne, elle tourne sous les yeux de sa maîtresse… Pas la moindre coquetterie bête de femme, à preuve le chapeau ridicule du bal de la Boule-Noire… C’est vraiment une actrice !

1578. (1911) Psychologie de l’invention (2e éd.) pp. 1-184

Ajoutons qu’elles sont souvent mal comprises et tournées, involontairement ou non, en ridicule par les expressions de ceux qui parlent d’elles. […] Auguste Comte, l’un des esprits les plus puissamment systématiques, cependant, qu’il y ait eu, a été entraîné à des propositions ridicules par des applications trop étroites de ses idées maîtresses.

1579. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

Je me rappelai le ridicule dans lequel sont tombés quelques artistes et gens de lettres qui, oubliant que des poumons de cinquante ans n’ont pas l’élasticité de ceux de dix-huit, s’essoufflent à vouloir courir avec les collégiens, et ne sentent pas que les étourderies de l’enfance perdent toute grâce quand est venu l’âge mûr. […] Voici Austerlitz admirablement raconté ; dans le chapitre consacré à la grande bataille, je trouve cette réflexion fort juste, dans la bouche du général : « Presque tous les auteurs militaires surchargent tellement leurs narrations de détails qu’ils jettent la confusion dans l’esprit du lecteur, si bien que dans la plupart des ouvrages publiés sur les guerres de l’empire, je n’ai absolument rien compris, à l’historique de plusieurs batailles auxquelles j’ai assisté. » Terrible bataille ou les grenadiers à cheval s’acharnant sur les chevaliers-gardes, qui les avaient tournés en ridicule, criaient en leur passant leurs énormes sabres au travers du corps : — « Faisons pleurer les dames de Saint-Pétersbourg !  […]   Voyez, au contraire l’acteur vêtu d’un costume plaisant ou ridicule : casaque rayée du valet comique, houppelande du barbon, tablier du matassin.

1580. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Jean-Jacques Ampère »

Elle lui avait ôté, je le crois, un peu de son feu sacré ; mais en revanche elle lui avait donné du tact, du goût, et ce sentiment du ridicule qui n’est autre peut-être que celui de la bonne société.

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