C’est par une sorte d’abus, mais qui avait sa raison, que l’on a compris encore sous le nom de romantiques les poètes, comme André Chénier, qui sont amateurs de la beauté grecque et qui, par là même, sembleraient plutôt classiques ; mais les soi-disant classiques modernes étant alors, la plupart, fort peu instruits des vraies sources et se tenant à des imitations de seconde ou de troisième main, ç’a été se séparer d’eux d’une manière tranchée que de revenir aux sources mêmes, au sentiment des premiers maîtres, et d’y retremper son style ou son goût. […] Rendre à la poésie française de la vérité, du naturel, de la familiarité même, et en même temps lui redonner de la consistance de style et de l’éclat ; lui rapprendre à dire bien des choses qu’elle avait oubliées depuis plus d’un siècle, lui en apprendre d’autres qu’on ne lui avait pas dites encore ; lui faire exprimer les troubles de l’âme et les nuances des moindres pensées ; lui faire réfléchir la nature extérieure non seulement par des couleurs et des images, mais quelquefois par un simple et heureux concours de syllabes ; la montrer, dans les fantaisies légères, découpée à plaisir et revêtue des plus sveltes délicatesses ; lui imprimer, dans les vastes sujets, le mouvement et la marche des groupes et des ensembles, faire voguer des trains et des appareils de strophes comme des flottes, ou les enlever dans l’espace comme si elles avaient des ailes ; faire songer dans une ode, et sans trop de désavantage, à la grande musique contemporaine ou à la gothique architecture, — n’était-ce rien ?
Je restreindrai encore le point de vue, ou plutôt je le simplifierai en disant qu’il me paraît difficile que ces lettres aient aujourd’hui aucun effet de piété et de dévotion ; la spiritualité en est trop subtile, trop particulière, trop compliquée de style métaphorique, de fleurs surannées, et trop mêlée à des questions ou à des intérêts de circonstance. […] Singlin et de M. de Saint-Cyran une maxime pratique qu’elle applique sans cesse, c’est qu’il ne faut rien faire dans la précipitation, c’est que le désir, même lorsqu’il est dans le meilleur sens et vers le plus louable but, doit faire, en quelque sorte, sa quarantaine et son carême, et doit user son attrait avant de s’accomplir, si l’on veut qu’il produise tout son fruit : « Il faut faire toutes choses, dit-elle, dans une certaine maturité qui amortit l’activité de l’esprit humain, et qui attire une bénédiction de Dieu sur ces choses dont on s’est mortifié quelque temps. » C’est ce qu’on appelle en ce style mystique pratiquer la dévotion du retardement, et elle la conseille en toute occasion aux personnes qui lui font part de leurs peines et des obstacles qu’elles rencontrent dans la voie du bien.
Le style de M. de Musset, dans la Confession, est, comme il l’est en général dans sa prose, vif, net, court, transparent ; le tour aisé et concis, surtout dans les récits du second volume, se ressent de la prédilection que l’auteur affiche pour Candide et Manon Lescaut. […] J’ai noté, dans ce chapitre II, page 8, une phrase sur Napoléon, sur son arc, sur la fibre humaine qui en est la corde, et sur les flèches que lance ce Nemrod, et qui vont tomber je ne sais où ; une pareille phrase, si on la lisait dans la traduction du Titan de Jean-Paul, ferait dire : « Cela doit être beau dans l’original, » et ce demi-éloge de la pensée serait, à mes yeux, la plus sensible critique du style et de l’expression.
Cependant, comme il est difficile de se voir peint en beau sans en prendre quelque complaisance, j’appréhende avec raison que je n’y en aie pris plus qu’il n’appartient à un mort, et que vous n’ayez en cela donné une nouvelle vie à mon orgueil et à ma vanité, et je vous en dis ma coulpe. » Voilà qui est de l’homme d’esprit resté tel sous le froc, de celui dont Nicole disait qu’il avait un style de qualité. […] Le style, en sa mâle nudité, offre des singularités intéressantes, des expressions qui sentent leur propriété première, des locutions françaises, mais vieillies et toutes voisines du latin.
Un autre normalien, tout voltairien d’esprit et de style, conteur exquis et charmant causeur, d’intelligence plus agile que forte, et plus en surface qu’en profondeur, impertinent, tapageur et gamin, Edmond About843, fut un indépendant agréable à l’empire, qui le protégea, le décora : il y avait un point pourtant sur lequel About ne transigeait pas, c’était la question religieuse ; il représentait l’opinion anticléricale dans le parti bonapartiste, et il combattit toujours vivement le gouvernement lorsqu’il voulut se servir de l’Église ou parut la servir. […] Rien n’y maintenait plus certains mérites de style que la présence d’un pouvoir fort, dont il fallait tromper la sévérité ou humilier la brutalité.
Cette survivance indéfinie de leurs propriétés actives, les chefs-d’œuvre littéraires la doivent à la forme, personnelle et belle, dans laquelle l’originalité de l’écrivain s’est réalisée : disons, si vous voulez, au style. […] Étude des manuscrits, collation des éditions, discussion d’authenticité et d’attribution, chronologie, bibliographie, biographie, recherches de sources, dessins d’influence, histoire des réputations et des livres, dépouillements de catalogues et de dossiers, statistiques de versification, listes méthodiques d’observations de grammaire, de goût et de style, que sais-je encore ?
Le style de ces monuments était le style grec, mais approprié aux usages des Juifs, et considérablement modifié selon leurs principes.
Si, en effet, on a reconnu dans les écrits d’un homme un style éclatant, riche en comparaisons et en métaphores, une grande fertilité de combinaisons dramatiques, une habileté remarquable à dresser en pied un être vivant ou à brosser un paysage à grands traits, déclarer après cela que cet homme est doué d’une forte imagination, c’est au fond répéter la même chose en d’autres termes. […] Logique passionnée, effusions lyriques, style oratoire, apostrophes à la nature et à l’Etre suprême, exclamations perpétuelles qui choquaient tant Buffon, goût du roman sentimental, incapacité d’écrire sauf sous le coup d’une émotion violente, irritabilité nerveuse aboutissant à la manie de la persécution, tout cela nous apparaît désormais comme une série de faits unis entre eux par une dépendance mutuelle.
La critique de détail, en ce qui concernait les moindres artifices de style et de diction, prenait chez les anciens une importance dont personne ne songeait à se railler. […] Leur style, à tous deux, est marqué ; Nicole ou Raphaël autrefois y allaient plus uniment.
Un autre homme éminent, plus grand écrivain et plus puissant penseur que Carrel, apportait alors à la démocratie sa parole enflammée, son imagination amère, ardente, quelquefois si tendre et si douce, ses sombres colères, tout l’éclat de son style ; mais il ne lui apportait pas une pensée. […] Le vide de cette pensée, revêtue d’un si grand style, a quelque chose d’affligeant.
Par opposition à la littérature classique, on a nommé littérature romantique celle où l’on professe une plus grande indépendance des règles, où l’on se permet de nouvelles alliances de mots, et surtout de nouvelles inventions de style ; où l’on secoue les lois de l’analogie, où l’imitation étend son domaine, où la pensée fait effort contre la parole fixée, la parole écrite ; où les sujets sont tirés des traditions modernes. […] Sans doute, dans tous les ouvrages de Bossuet, l’esprit resterait étonné par un style vif, énergique et pittoresque ; par la grandeur des images et la hardiesse des figures ; par ce quelque chose de rude et de heurté d’un fier génie pour qui la faible langue des hommes est une condescendance de la pensée, car le feu de sa pensée, à lui, s’allume dans une sphère plus élevée.
Les temps modernes ne sont pas tellement beaux pour la littérature qu’elle ne puisse supporter beaucoup de choses cruelles et qu’elle n’y soit même accoutumée ; mais la condition d’avoir Buloz pour correcteur, — non plus d’épreuves, mais de son style et de sa pensée, — lui sembla cependant trop dure pour la supporter, et on vit en très peu de temps tout ce groupe de talents que je viens de nommer se détacher de la Revue des Deux Mondes 24, s’égrener et complètement disparaître d’un recueil dont la rédaction, pour qui avait le sentiment de sa valeur propre ou de son œuvre, était une douleur, quand ce n’était pas une indignité. […] J’ai parlé déjà de cette haine instinctive du style et de la couleur, qui est si caractéristique dans Buloz ; mais son amour de la platitude est encore plus fort que cette haine.
Les amis et les admirateurs de Banville (car il y en a), les puritains passionnés du style pour le style, les haïsseurs de la cheville, les sacrificateurs à la rime sévère, tous les hommes qui aiment la langue comme un beau vase, dût-on ne mettre rien dedans, trouveront ici leur théorie de la forme et du travail volontaire un peu compromise.
Bouchon de cristal de roche coupé à dix mille pans, son style n’a rien d’ample, même quand il veut l’être ; rien d’épanoui, de rond et de touffu. […] La durée ou l’immortalité, pour les œuvres, n’est pas une question de forme, mais d’essence, et c’est pour cela que tant d’œuvres meurent et disparaissent qui n’existaient que par un certain agencement de parties, un certain style, un certain art d’ensemble, mais qui, sans manquer de talent, manquaient de génie ou d’esprit.
On donne volontiers raison au prince de Ligne, lorsqu’il disait : « Dans les pensées de M. de Meilhan, il y a des traits de feu qui éclairent toujours, et des fusées qui vont plus haut qu’elles ne font de bruit. » M. de Meilhan s’était exercé, dans la première partie de sa vie, à traduire les Annales de Tacite, une double école de politique et de style.
Mais si, par quelques formes de son style.
Hérold, âme droite et sereine, amant des formes eurythmiques, et de qui la phrase souple et légère ondoie d’une harmonie personnelle, adéquate à son rêve, et telle que son style, suivant le juste critérium de Paul Adam, peut être dit excellent.
Pour mesurer le vide de cette poésie officielle, le faux goût de ces oripeaux mythologiques du Style Empire, qu’on aille méditer cette chute d’une strophe du temps, en face du bas-relief de l’Arc-de-Triomphe où Napoléon est si lourdement couronné : Et qui pourra prêter, pour tracer ton histoire, Une plume à Clio ?
Son style est aussi simple que noble, aussi clair que profond, aussi nombreux qu’énergique.
Nous en citerons des morceaux qui ne dépareroient pas le style du Siecle de Louis XIV.
A ce premier mérite, elle a joint celui d’un style naturel, élégant, correct, tel qu’il convient à ces sortes d’Ouvrages.
Quoi qu’il en soit, le style n’en est pas toujours soutenu ; tous les faits n’en sont pas exacts, ni les jugemens équitables.
Le style sur-tout, par sa gravité & son élégance, caractérise éminemment le sage Penseur & l’habile Ecrivain.
L’Abbé de Rancé a encore ajouté à ses autres travaux une Relation de la vie & de la mort de quelques Moines de la Trappe, en 4 vol. où, d’un style simple & plein d’onction, il trace des tableaux propres à édifier & à mettre les sentimens de la Religion dans tout leur jour.
« Le style de ce recueil, rassemblé, élucidé, rénové par Confucius, disent-ils (page 69 des Mémoires), est simple, laconique, éloquent seulement par le sens, par la clarté, par la brièveté. […] « Le style seul dans lequel il est écrit, indépendamment de sa sagesse, en démontre l’antiquité à quiconque a lu les beaux ouvrages des écrivains de toutes les dynasties chinoises. […] Elle voit qu’on ne présente à l’empereur que des Mémoires écrits dans le style le plus savant et le plus relevé ; que ses édits et ordonnances sont des modèles de compositions ; qu’il reprend publiquement les gouverneurs de province des erreurs qui se trouvent dans leurs placets et les plus habiles docteurs des fautes qui leur échappent dans leurs ouvrages ; qu’il parle en maître dans des préfaces raisonnées sur les ouvrages qu’il fait faire et qu’il fait publier, et que tout ce qui sort de son pinceau est marqué au coin de l’immortalité. […] Le souverain, le premier, subit le despotisme de la philosophie de Confucius, un des sages, des lettrés qui perpétuent son esprit. » Un écrit d’un des derniers empereurs de la Chine, au dix-septième siècle, commente ainsi la loi des jugements et des peines dans un style et dans un esprit que Fénelon, Montesquieu et Beccaria ne désavoueraient pas. […] Dans les derniers chapitres, quelquefois ce sont des pièces de vers entières des plus célèbres poètes, quelquefois des vers de toutes les mesures et de tous les styles, mais remarquables ou par les choses, ou par les pensées, ou par le choix et le brillant des expressions.
C’est plus qu’un style, c’est l’image même d’un homme de génie sortant du recueillement où il a préparé son âme plutôt que ses paroles, et jetant de fougue sur le papier des pensées dont il est plein et des expressions qui vont s’y ajuster d’elles-mêmes. […] Le style de Massillon a tous les défauts de l’amplification ; les figures de mots y abondent, et en particulier celles qui simulent la véhémence. […] C’est vouloir se tromper que d’en faire honneur à ce qu’on appelle son grand style. Grand style, soit ; pourvu que cette grandeur ne soit pas creuse, et qu’elle lui vienne des vérités qui remplissent les mots. […] Et quelle justesse dans cette remarque générale sur l’imagination du style et de l’expression, considérée comme une qualité de génie chez les poètes !
Fin d’avril À l’heure qu’il est, en littérature, le tout n’est pas de créer des personnages, que le public ne salue pas comme de vieilles connaissances, le tout n’est pas de découvrir une forme originale de style, le tout est d’inventer une lorgnette avec laquelle vous faites voir les êtres et les choses à travers des verres qui n’ont point encore servi, vous montrez des tableaux sous un angle de jour inconnu jusqu’alors, vous créez une optique nouvelle. […] La femme écrit, et j’ai lieu de la soupçonner d’être un artiste en style. […] Les persiennes fermées, on esthétise dans la pénombre, on cause, procédés, cuisine de style. […] Le sensualisme de la femme allemande a quelque chose, en style noble, du rut de Pasiphaé. […] Et la belle gravité de style que donne aux mouvements, aux attitudes, le danger du métier !
Les plus beaux vers de ce genre ont été inspirés par un brigand légendaire corse, qui parle en style biblique : . . . […] Tous les cerveaux de décadence, depuis Pétrone jusqu’à Baudelaire, se plaisent dans des imaginations obscènes, et leurs voluptés sont toujours plus ou moins contre nature ; leur style même est contre nature : ils cherchent partout le neuf dans le corrompu. […] Tout renversement de la corrélation et de la subordination des organes, dans l’organisme du style comme dans la vie individuelle et la vie sociale, est un signe de décadence, puisque c’est la réalisation de l’égoïsme sous la forme de l’art. […] L’idolâtrie de la forme aboutit le plus souvent au mépris pour le fond : tout devient matière à beau style, même le vice, surtout le vice. […] Les prétendus raffinés sont des simplistes qui s’ignorent ; les blasés qui croient avoir « fait le tour de toutes les idées » sont des ignorants qui n’ont pas même fait le tour d’une seule idée ; les dégoûtés de la vie sont de petits jeunes hommes qui n’ont pas encore un instant vécu. — Paul Bourget met dans la bouche des décadents cette parole : « Nous nous délectons dans ce que vous nos appelez corruptions de style, et nous délectons avec nous les raffinés de notre race et de notre heure ; il reste à savoir si notre exception n’est pas une aristocratie. » — Oui, pourrait-on leur répondre, une aristocratie à rebours, comme celle des hystériques, des névropathes, des vieillards avant l’âge.
Le sensualisme obscène des tableaux produisait ce cynisme grossier de l’expression ; il faut le pardonner à un enfant qui prenait l’engouement pour le goût ; le temps prenait bien l’ordure du mot pour la force du style. […] » Ce n’était pas une affectation de style, c’était une conséquence de principes. […] Ce n’est plus une débauche, c’est une ballade ; mais cette ballade est écrite en style de poète épique. […] La sainteté du lieu répand ici sa solennité grave sur le style. […] Oui, si j’étais ton frère de sang, aussi bien que je me sens ton frère de cœur, je voudrais anéantir d’abord toutes tes juvénilités en prose, idylles de mansardes, pastorales de tabagies où la finesse et la grâce du style ne rachètent pas même la monotone trivialité du sujet commençant toujours par une orgie pour finir par un suicide.
La littérature devenait une simple affaire de style. […] Avec les grands sujets, ils ont perdu le grand style. […] Leur style n’est plus qu’un instrument à noter des sensations. […] Que serait-ce si l’on essayait, avec cette langue et ce style, d’exprimer des idées abstraites ? […] La qualité des mots, les ressources du vocabulaire, tout l’appareil de la langue et du style, ils s’en sont occupés avec un soin minutieux.
« Maintenant, après une telle profession de foi, ai-je besoin de dire quelles sont en histoire les conditions du style ? […] Thiers quand il parle du style et qu’il le compare à une glace, glace d’autant plus parfaite, dit-il, qu’elle se borne à réfléchir avec plus de fidélité les objets, sans les colorier de teintes empruntées à sa propre surface, nous dirons que c’est rabaisser l’intelligence que de l’assimiler à un miroir inerte. […] Thiers, quoique intéressante et sagement pensée, ne se distingue par aucune qualité de composition ou de style de tout ce qui a été écrit sur cette grande époque. […] Au feu près, qui ne manque pas à son âme, mais qui manque un peu à son style, c’est l’historien des batailles. […] Le portrait de Joséphine, quoique très négligé de style, donnera un exemple de la manière de M.
quel grand style ! […] Lélia, cette horrible création, mais riche d’un si magnifique style ! […] quelle nouveauté dans ce style ! […] Villemain. — Son style. — État présent de la langue française. — Invasion des barbares. — Conclusion. […] Qui nous eût dit que cet homme si puissant par la pensée, par la parole, par le style, était un homme mort ?
Comme ces pièces premières de Lamartine n’ont aucun dessin, aucune composition dramatique, comme le style n’en est pas frappé et gravé selon le mode qu’on aime aujourd’hui, elles ont pu perdre de leur effet à une première vue ; mais il faut bien peu d’effort, surtout si l’on se reporte un moment aux poésies d’alentour, pour sentir ce que ces élégies et ces plaintes de l’âme avaient de puissance voilée sous leur harmonie éolienne et pour reconnaître qu’elles apportaient avec elles le souffle nouveau.
De nos jours on a essayé de rendre à la poésie sa langue propre, son style, ses images, ses priviléges, mais l’entreprise a pu paraître bien artificielle, parce qu’il a fallu aller chercher ses exemples dans le passé par delà Malherbe, et encore des exemples très-incomplets et sans autorité éclatante.
M. de Bonnières, dans ce coquet volume, a tenté de ressusciter la jolie langue et la charmante allure de style des conteurs du xviiie siècle.
Il faut louer sans réserve le style de M. de Gourmont, d’une pureté et d’une souplesse admirables, la joliesse de ses descriptions, l’art avec lequel il sait choisir le détail qui doit frapper l’observateur.
Villemain reçoit les feuilles savantes à mesure qu’elles sont imprimées, et en donne cette traduction où l’on trouve revêtues du plus beau style les plus profondes idées qu’on ait jamais émises sur la constitution de la société civile.
Quant à la partie du style, on peut s’en rapporter à M. de Voltaire, qui dit, dans son Siecle de Louis XIV : « Que la maniere d’écrire de Bayle est trop souvent diffuse, lâche, incorrecte, & d’une familiarité qui tombe quelquefois dans la bassesse ».
Dès qu’il eut fait paroître quelques-unes de ses Pieces, tous les esprits se réunirent pour admirer l’élévation de son style, la délicatesse & la force de ses pensées, l’énergie & la pureté de ses expressions, l’élégance & le naturel de ses Vers.
Fiches relatives à l’invention, aux idées nouvelles ; fiches relatives à la disposition, au plan, à la manière dont l’auteur conduit ses idées ou conduit son récit, ou mêle ses idées à son récit ; fiches sur le style, sur la langue ; fiches de discussion enfin, c’est-à-dire sur les idées de l’auteur comparées aux vôtres, sur son goût comparé à celui que vous avez, sur ses idées encore et son goût comparés à ceux de notre génération ou à ceux de la génération dont il était, etc.
Le goût leur était venu tout de suite, c’est-à-dire l’envie de plaire aux yeux, et d’exprimer une pensée par des formes, une pensée neuve : l’arche circulaire s’appuyait sur une colonne simple ou sur un faisceau de colonnettes : les moulures élégantes s’arrondissaient autour des fenêtres ; la rosace s’ouvrait simple encore et semblable à la rose des buissons, et le style normand se déployait original et mesuré entre le style gothique dont il annonçait la richesse, et le style roman dont il rappelait la solidité. […] Nulle splendeur, nulle couleur dans son récit : son style est tout à fait nu, jamais de figures ; on peut lire dix mille vers de ces vieux poëmes sans en rencontrer une. […] Rien de plus clair que le style de ses vieux contes et de ses premiers poëmes ; ou ne s’aperçoit pas qu’on suit le conteur, tant sa démarche est aisée, tant le chemin qu’il ouvre est uni, tant il se laisse glisser doucement et insensiblement d’une idée dans l’idée voisine ; c’est pour cela qu’il conte si bien. […] Ils effleurent les ridicules, ils se moquent sans éclat, et comme innocemment ; leur style est si uni, qu’au premier aspect on s’y méprend, on n’y voit pas de malice. […] Sans doute, les traces du goût français y sont visibles ; il n’en saurait être autrement ; les gens d’en bas ne peuvent jamais se défendre tout à fait d’imiter les gens d’en haut ; et les plus francs des poëtes populaires, Burns et Béranger, gardent trop souvent le style académique.
Deux discours de M. de Maistre, l’un publié lorsqu’il n’avait que vingt-deux ans, et l’autre prononcé quand il en avait vingt-quatre, vont nous le produire au début, ayant déjà l’instinct du style et du nombre, mais des plus rhétoriciens encore, assez imbu des idées ou du moins de la phraséologie du jour, et tout à fait l’un des jeunes contemporains de Voltaire et de Jean-Jacques finissants. […] Le pamphlet publié et distribué à Chambéry en août 95, sous le nom de Jean-Claude Têtu, est une Provinciale savoyarde à la portée du peuple, une petite lettre de Paul-Louis en style du cru. […] Le style en est grand, mâle, éclairé d’images, simple d’ordinaire, avec des taches d’affectation ; si on peut noter du mauvais goût par points, on n’y rencontre jamais du moins de déclamation ni de phrases. […] Son style, je le répète, est ferme, élevé, simple ; c’est un des grands styles du temps. […] Et ce style a l’avantage d’être tout d’une pièce, portant en soi ses défauts, sans rien de plaqué comme chez d’autres talents qu’à bon droit encore on admire.
Le style et le sentiment dans la couleur viennent du choix, et le choix vient du tempérament. […] Sa couleur splendide et rayonnante avait de plus un style très-particulier. […] Glaize compromet ses débuts par des œuvres d’un style commun et d’une composition embrouillée. […] D’autres, plus philosophes et plus raisonneurs, s’occupèrent surtout du style, c’est-à-dire de l’harmonie des lignes principales, de l’architecture de la nature. […] Aligny, Corot et Cabat se préoccupent beaucoup du style.
Il est écrit d'ailleurs d'un style noble, élégant, nombreux, toujours net & toujours châtié.
Ce qui a paru de lui dans le Public, se réduit à des Odes au dessous du médiocre, à une Satire sur le Goût, dont les principes sont assez judicieux, & la versification heureuse par intervalles ; à un Poëme intitulé Mon Odyssée, qu'on croiroit avoir été fait pour des Lecteurs tudesques, tant le style en est dur & baroque, tant les rimes en sont bizarres : qu'on ajoute à cela la pauvreté du sujet, & l'on aura l'idée du plus pitoyable Ouvrage qui ait été fait depuis d'Assoucy jusqu'à nous, puisque le Héros de ce Poëme est M.
En vérité, le style n’est qu’un détail typographique ; et de même la joliesse plastique des choses, demeure une convention.
Pour revenir au roman dont on publie ici une nouvelle édition, tel qu’il est, avec son action saccadée et haletante, avec ses personnages tout d’une pièce, avec ses gaucheries sauvages, avec son allure hautaine et maladroite, avec ses candides accès de rêverie, avec ses couleurs de toute sorte juxtaposées sans précaution pour l’œil, avec son style cru, choquant et âpre, sans nuances et sans habiletés, avec les mille excès de tout genre qu’il commet presque à son insu chemin faisant, ce livre représente assez bien l’époque de la vie à laquelle il a été écrit, et l’état particulier de l’âme, de l’imagination et du cœur dans l’adolescence, quand on est amoureux de son premier amour, quand on convertit en obstacles grandioses et poétiques les empêchements bourgeois de la vie, quand on a la tête pleine de fantaisies héroïques qui vous grandissent à vos propres yeux, quand on est déjà un homme par deux ou trois côtés et encore un enfant par vingt autres, quand on a lu Ducray-Duminil à onze ans, Auguste Lafontaine à treize, Shakespeare à seize, échelle étrange et rapide qui vous a fait passer brusquement, dans vos affections littéraires, du niais au sentimental, et du sentimental au sublime.
De plus, il y a dans le nom de Dieu quelque chose de superbe, qui sert à donner au style une certaine emphase merveilleuse, en sorte que l’écrivain le plus religieux est presque toujours le plus éloquent.
Une érudition très-étendue, une connoissance exacte des intérêts des différens princes de l’Europe, un style noble & élégant ; telles sont les qualités qui distinguent cet ouvrage.
Le style, dont quelques-uns font fi, — parce que sans doute ils se sentent incapables de le conquérir dans une de ces batailles que Léon Cladel, l’un des meilleurs forgerons de la phrase à notre époque, décrit dans ses Bonshommes, le style, voilà la seule parure de ces romans où l’invention est pour si peu et qui ne sont qu’anecdotes richement enchâssées et liées seulement par un mince fil d’or. […] Et par style, chez nos écrivains modernes, il ne faut pas entendre seulement le tour de la période, ni même le nombre de la phrase comme aux temps classiques et romantiques : le style est aujourd’hui, aussi bien cela que la langue que s’est faite l’écrivain, — à coups de dictionnaire ou par mille torsions de la pensée et de l’idiome parlé qu’il écrit, peu importe ! […] le style d’Edmond de Goncourt est comme un maillot pour la pensée, il en moule les moindres accidents, il en conserve la couleur naturelle dans ses teintes les plus fugitives. […] Un critique éminent trouve, dans les poètes chétifs qui succèdent à l’auteur des Contes de Canterbury, les signes de la décadence : exubérance parasite, faiblesse d’invention, faux goût, style outré. […] Il règne toujours une certaine harmonie mystérieuse entre le style, le talent d’un auteur, et les sujets dont il fait choix ; cette harmonie procède de causes intimes.
Le style en est sobre et ferme, la pensée heureuse, claire, profonde. […] Henry Houssaye a écrit là, d’un style sobre, une histoire impartiale. […] Il résume le style Louis XVI et l’esprit encyclopédique. […] Le dessin en était d’un bon style et la gravure assez ferme. […] Bouchor pour nous donner quelque idée de ce style shakespearien que Carlyle a si bien nommé un style de fête.
L’écrivain est un terrain où la pensée pousse en fleurs de style, larges, hautes et sauvages. […] Toutes les fois qu’il y a effort au style, il y a versification. […] Le style dont je désire la restauration donnera une nouvelle vigueur à l’expression poétique. […] Il n’a aucun style, comme Eugène Sue. […] On a pris, pour elle, jusqu’ici, certain style d’officielle sélection.
Jamais peut-être on n’a plus mal écrit en vers, d’un style à la fois plus emphatique et plus plat. […] Comme le leur, son dialogue est brillant, son style souvent précieux et souvent emphatique. […] Je ne connais qu’un style, à cet égard, qui soit comparable à celui de Pascal ; et il est aussi de Port-Royal, puisque c’est celui de Racine. […] Et, à ce propos, n’y aurait-il point quelque superstition dans l’admiration que l’on éprouve sans doute, puisqu’on l’exprime, pour le style de Descartes ? […] C’est pourquoi Montesquieu n’a point conformé son style à ses sujets, mais plutôt ses sujets à son style ; et sa manière d’écrire lui a comme imposé sa manière de penser.
Il loue, disais-je, le style Louis XVI de lui fournir contre elle comme une sauvegarde. […] Mallarmé s’intéressa, comme les jeunes gens, à ces vieilleries qui trouvent leur prix dans un style curieux de transition entre le naturalisme et le symbolisme. […] La préciosité, si vivace avant le classicisme, reparaît ’dans le romantisme avec le style Louis XIII. […] D’autre part se demander si elle se rapporte et ce qui s’en rapporte à son style ou bien à sa pensée paraîtra moins raisonnable encore. […] Aussi, comme la périphrase descriptive s’accorde avec le style oratoire, la périphrase explicative, par allusions, précautions, restrictions, minuties, tient naturellement en suspension dans le style désarticulé ou liquide de Mallarmé.
Saint-Marc est plus leste de ton, plus badin, persifleur, bel esprit et belle plume ; pour prendre idée du style et de la manière de Saint-Marc, lisez dans les Débats de vendredi (26 mai) l’article en tête contre la Gazette : c’est du pur Saint-Marc : caillette maligne et de grand esprit ; il porte d’ailleurs dans cette question l’intérêt personnel et d’amour-propre d’un universitaire. — Je crois pourtant, malgré les présomptions, que le gros des articles, ceux du milieu de la querelle, sont de Sacy16.
Il y a semé des aperçus justes, des observations élevées ; il a animé un sujet grave de mouvements honnêtes et généreux ; son style et sa parole sont restés fidèles à l’harmonie de ses maîtres.
dire que nous l’avons mal lu et, aussitôt, pour nous justifier de cette apparente négligence, qu’il dévoile une absence de style et de tact poétique que nous serions en droit d’exiger d’un poète ?
Au fond des pensées, l’Auteur joint les agrémens d’un style pur, net & facile.
On commence à connoître que quelques traits de Morale & de Littérature, dont les uns sont communs & les autres hasardés ; que des pensées & des réflexions détachées ; que des lambeaux de traduction secs & froids ; que des Eloges écrits d’un style plus imposant & plus maniéré, que solide & vigoureux ; que des Essais sans dessein, sans méthode, sans profondeur, sans vûes, sont de foibles titres pour une célébrité durable.
Quand il s’agit, comme dans l’ouvrage de Clarke, d’attaquer des hommes qui se piquent de raisonnement, et auxquels il est nécessaire de prouver qu’on raisonne aussi bien qu’eux, on fait merveilleusement d’employer la manière ferme et serrée du docteur anglais ; mais dans tout autre cas, pourquoi préférer cette sécheresse à un style clair, quoique animé ?
C’est par là que le style de M. […] Avec cette tournure de génie, il devait être entraîné, même à son insu, vers l’étude du style oriental. […] … Il a cette violence et cette âpreté de style qui caractérisent Michel-Ange. […] Le style moderne est marqué à son empreinte.
Victor Wilder l’a faite : son texte est de signification beaucoup plus fidèle qu’on ne le croit généralement ; le principal, le terrible défaut est le manque de « style » : style d’opéra, style romantique, classique, parnassien, tout s’y mêle un peu ; les poèmes de M. […] Comme artiste, il aura enrichi dans une proportion énorme l’arsenal où les compositeurs viendront puiser leurs inspirations et leurs armes. » La prédiction s’est déjà vérifiée, et combien de musiciens dans le monde ont tâché de s’approprier ses formules, son style, en un mot le côté matériel de l’œuvre d’art de Richard Wagner, qui n’avaient malheureusement pas son génie et qui, n’ayant rien pu produire avec cet appareil emprunté, se sont retournés contre le novateur dès qu’ils l’ont vu gagner tant soit peu de terrain en France et devenir, sinon une menace immédiate, à tout le moins un lointain danger !
J’ai cru d’abord qu’un peu de réflexion suffiroit pour détruire une idée aussi folle, démentie par l’uniformité de style, par celle des principes & par mille autres raisons ; mais rien n’est plus ordinaire, dans un certain monde, que de tout avancer & de tout faire croire, au mépris de l’évidence ; & c’est ce monde qu’on nous assure bonnement être le seul en état de penser & de raisonner, A présent qu’il ne m’est plus permis de douter que ce bruit ne soit une ruse philosophique, imaginée pour décréditer des censures & des jugemens avoués par la plus saine partie de la Nation, en les attribuant à des motifs étrangers, je déclare qu’aucun des Ecrivains, que je viens de nommer, n’a eu part à mon travail. […] Son style est à la vérité charmant ; mais je suis forcé de dire qu'il n'a pas le ton convenable. […] Si l'unité d’esprit, de systêmes, & de style, force les moins habiles à n’y reconnoître qu’une seule main, on se retourne d’un autre côté ; on attribue l’Ouvrage à un Habitué de Paroisse, qui, malheureusement pour ceux qui veulent lui faire honneur de mon travail, est mort il y a près de trois ans ; car pour rendre la chose vraisemblable, on n’auroit pas manqué de lui attribuer, aussi les augmentations faites depuis, & qui n’annoncent pas une plume différente. […] Un ton imposant, un style dogmatique, un jargon maniéré, des phrases sentencieuses, des sentimens enthousiastes, des expressions systématiques, la répétition perpétuelle de ces mots parasites, humanité, vertu, raison, tolérance, bonheur, esprit philosophique, amour du genre humain, & mille autres termes qui sont devenus la sauvegarde des inepties qu’on a avancées, à la faveur de ces mots, ont pu éblouir quelque temps les esprits faciles.
Les domestiques viendront répéter dans un autre ton, transposée en style moins noble, une scène déjà jouée par les maîtres. […] Un personnage qui s’exprimerait toujours dans ce style serait invariablement comique. […] Supposez maintenant des idées exprimées dans le style qui leur convient et encadrées ainsi dans leur milieu naturel. Si vous imaginez un dispositif qui leur permette de se transporter dans un milieu nouveau en conservant les rapports qu’elles ont entre elles, ou, en d’autres termes, si vous les amenez à s’exprimer en un tout autre style et à se transposer en un tout autre ton, c’est le langage qui vous donnera cette fois la comédie, c’est le langage qui sera comique.
Ce n’est ni de sa manière de penser ni de son style. […] La première condition est de savoir en perfection la langue dont on va apprécier les écrits, distinguer les emplois et les styles, peser les locutions et les mots ; c’est bien le moins quand on prétend s’ériger en censeur ; et pour cela il n’est que de commencer par lire, la plume à la main, et, s’il se peut, en observant l’ordre chronologique, tous les auteurs d’une langue : c’est là le premier point. […] Les auteurs chez qui le style et la langue sont admirables, je les aime, je les lis, je les relis avec enthousiasme, je tâche d’entrer dans le sanctuaire de leur pensée et d’en concevoir toutes les beautés ; mais je ne les éditerai jamais, parce que je ne me crois pas assez de pénétration ni assez de science pour suffire à une telle entreprise.
C’est que, tout en distribuant çà et là le blâme à un livre, où d’autres ne voyaient guère qu’à admirer, vous étiez le seul qui eussiez réellement compris Tocqueville comme écrivain et jugé son style. […] Ampère me disait souvent qu’il croyait la Correspondance de Tocqueville supérieure par le style à tout ce qu’il avait écrit pour le publier. […] — Il y a, il est vrai, dans ce volume une partie (celle qui contient les lettres d’Amérique) dans laquelle doivent se trouver des incorrections : cependant je ne sais pas si cette Correspondance elle-même, adressée à ses plus proches et écrite dans l’abandon de la plus grande intimité, ne rachète pas ces négligences de style par la naïveté incomparable de ces premières et vives impressions… » Je répondis à M.
Qu’il suffise de dire que le respect des dignes adversaires eux-mêmes pour l’abbé de Rancé n’en subit aucune atteinte ; que Nicole, approuvé en cela par Arnauld, s’écriait qu’il se ferait plutôt couper le bras droit que d’écrire contre M. de la Trappe, et que Bossuet, souvent pris pour arbitre en ces querelles révérentes, ne parlait des écrits de Rancé, de ceux-là mêmes en apparence excessifs, que comme d’ouvrages où « toute la sainteté, toute la vigueur et toute la sévérité de l’ancienne discipline monastique est ramassée. » Ce fut Bossuet qui le contraignit à publier le livre de la Sainteté et des Devoirs de la Vie monastique ; lisant ce livre en manuscrit au retour de l’Assemblée de 1682 : « J’avoue, écrivait-il à Rancé, qu’en sortant des relâchements honteux et des ordures des casuistes, il me falloit consoler par ces idées célestes de la vie des solitaires et des cénobites. » Le style de Rancé, quand il ne s’agit pas d’une simple discussion dans laquelle il a hâte de couper court et d’en finir, ce qui lui arrive souvent, mais quand ce style s’applique comme ici à des traités de doctrine et d’édification, a de l’étendue et de la beauté : « Je ne vois rien, a dit un contemporain, de plus égal, de plus naturel, ni de plus fleuri. […] Peu à peu le style se glace ou s’irrite ; le jour de poste n’est plus impatiemment attendu, il est redouté ; écrire devient une fatigue.
Bayle, qui vécut toujours hors de France, qui ne tient point, à vrai dire, au règne de Louis XIV, qui, par le style comme par les idées, fut plutôt du siècle d’avant ou de celui d’après, Bayle admira beaucoup cette petite école ; il la jugeait très-poétique et tout à fait à son gré. […] Je remarque dans le style quelque chose de précis, pas plus d’imagination et bien moins d’esprit que chez Mme Des Houlières. […] Villemain, Tableau du dix-huitième Siècle, onzième leçon. — Il a eu raison dans tout ce qu’il a dit du style, mais il a été injuste en ce qui concerne la personne et le caractère.
Dans le style, c’est l’équivalence du mot à l’idée : dans la conception, l’équivalence de l’idée à l’objet. […] Tout l’homme, toute la nature, la politique, la science, et même la religion, tout se revêtait indifféremment du style burlesque. […] Il avait mis la sincérité absolue dans sa pensée, la simplicité absolue dans son style.
Ne prenons pas le change sur le cadre ou sur le ton : tant d’énumérations moralisées ou satiriques que nous rencontrons, ne sont qu’une forme originale de littérature réaliste, dont le caractère essentiel est de réveiller chez l’auditeur la sensation des réalités qui lui sont prochaines : et comme cette littérature s’adresse à des imaginations vierges, non blasées encore, ni réfractaires par un trop long usage à l’action suggestive des mots, les noms soûls des choses, sans descriptions, sans épithètes, sans tout le mécanisme compliqué du style intense, les noms tout secs sont puissants : le poète se contente d’appeler, pour ainsi dire, chaque objet, aussi le voilà présent, en sa concrète et naturelle image, aux esprits de ceux qui l’entendent. […] Ce bouillonnement d’idées et de raisonnements qui se dégorgent incessamment pendant dix-huit mille vers, sans un arrêt, sans un repos, cette verve et cet éclat de style, net, incisif, efficace, souvent définitif, cette précision des démonstrations, des expositions les plus compliquées et subtiles, cette allégresse robuste avec laquelle le poète porte un énorme fardeau de faits et d’arguments, le mouvement qui, malgré d’inévitables langueurs, précipite en somme la masse confuse et féconde des éruditions scolastiques et des inventions hardiment originales, tout cela donne à l’œuvre un caractère de force un peu vulgaire, qui n’est pas sans beauté. […] La grossièreté cynique de ses images ne doit pas nous arrêter : il y a de la grandeur dans la façon dont il a traduit par le lourd martèlement et l’insistance rude de son style l’effort de la nature réparant incessamment la mort par la naissance.
Ce style leur paraît être en harmonie avec la dignité de leur fonction ; et ils en ont, au surplus, souvent besoin, ayant à enseigner nombre de vérités indémontrables et qui, par suite, ne sauraient être développées que par des procédés oratoires. […] Ferdinand Fabre fait quelquefois parler ses personnages comme ils écriraient, en style de mandement ; mais cette convention, si c’en est une, est des plus efficaces pour l’effet général de ses peintures. […] Et le style est touffu, pesant, laborieux, excessif, mais solide aussi, robuste, savoureux et coloré.
Il a versé son immense savoir dans son roman de Vathek ; mais, au lieu de donner à son œuvre la forme grande et sérieuse dont elle était digne, il conte dans un style badin, pastiche très habile de Hamilton, les plus sombres et les plus terribles légendes qu’ait inventées l’imagination orientale. […] Plus tard Pouchkine trouva le style qui convient aux récits merveilleux, et quelques-unes de ses ballades sont de modèles en ce genre ; on s’aperçoit qu’il a étudié et surpris les procédés des conteurs populaires. […] Avant Sterne, Rabelais, avec sa verve et l’originalité de son style incomparable, avait fait la satire de l’Église, de la cour et de la société tout entière, à la faveur d’un conte à dormir debout.
C’est ce style de la discussion sérieuse plus habituellement nerveux que coloré, qui a plus de mouvements que d’images, son objet n’étant point de plaire, mais de convaincre ; instrument formidable par lequel la société française allait conquérir un à un tous ses progrès, et faire passer dans les faits tout ce qu’elle concevait par la raison. […] Là est la cause de cette tristesse que Bossuet a remarquée dans son style. […] Son style exact précis, vigoureux, manque de couleur et d’onction.
Pour moi, qui ne puis m’accoutumer à ce que la marche des nations soit une course aveugle à travers le temps, qui regarde la guerre qu’on fait au passé comme une guerre civile, tout en admirant dans l’Essai la beauté de la pensée première, les vérités de détail dont le livre est semé, un style où, à la différence du style précieux, ce sont les beautés et non les défauts qui se cachent, j’estime que le bien n’y compense pas le mal, et je ne verrais pas sans inquiétude pour mon pays qu’on y préférât l’Essai sur les mœurs au Siècle de Louis XIV. […] Il n’y a pas une phrase de style précieux dans la Correspondance, pas même dans les louanges, où l’on est enclin à raffiner et où l’on ne craint pas dans les gens qu’on loue les scrupules du goût.
Quant au style, en général, je renvoie à ce que j’ai dit au début de la préface. […] J’avoue toutefois que pour leur donner plus de vivacité, j’ai substitué parfois le style direct au style indirect et que j’ai remplacé, de temps à autre, par des noms les périphrases qui désignaient les personnages.
Nous avons, au seizième siècle, des conteurs que La Fontaine a connus, qu’il a très bien connus probablement presque tous, lesquels continuent la tradition du moyen âge, non seulement la continuent en la conservant, puisque le plus souvent ce sont des fableaux qu’ils remettent au style du jour et à la mode du temps, soit qu’ils les aient lus, ce qui n’est pas probable, soit qu’ils les aient tenus de la tradition orale toujours vivante, toujours solide et toujours féconde. […] C’est ainsi que lorsque Psyché supplie l’Amour, le dieu Amour, de se révéler à elle, l’Amour lui fait une réponse très spirituelle dans la forme, assez profonde, au moins assez pénétrante dans le fond, et qui est celle-ci (c’est une très jolie raillerie philosophique ; n’était le style, qui ne rappelle pas celui de l’homme que je vais nommer, on dirait quelque chose comme un de ces contes dont Renan nous régalait vers la fin de sa vie) : « — Apprenez-moi, du moins, dit Psyché au dieu, les raisons qui vous rendent si opiniâtre. […] Je n’oserais, si ce n’était pour vous ; Car c’est beaucoup que d’essayer ce style Tant oublié, qui fut jadis si doux Et qu’aujourd’hui l’on croit facile.
Assurément, il n’arrive à personne de parler de la beauté, de la grandeur d’un feuilleton, de célébrer le style de Ponson du Terrail, l’harmonie des périodes chez Xavier de Montépin, de rechercher, parmi les génies grecs, latins ou français, la filiation littéraire de M. […] Le style, les épisodes, le choix de ces vastes tableaux faits pour séduire les imaginations les plus simples, tout révèle une divination géniale de l’âme populaire. […] Croyez bien, en outre, que si les gens du peuple perdent quelques-unes des finesses d’esprit ou de style que les lettrés goûteront, ils ne les perdront pas toutes ; qu’il y aura des qualités maîtresses, les qualités d’âme et de cœur qui ne leur échapperont pas.
Nommé à l’Académie française deux ans après La Bruyère lui-même, qui avait signalé son entrée par un si neuf et si éloquent discours de réception, il en fit un des plus ordinaires ; et, comme Fontenelle, à qui il le montrait en manuscrit, lui faisait remarquer que le style en était plat : « Tant mieux, dit l’abbé, il m’en ressemblera davantage ; et c’est assez pour un honnête homme de donner deux heures de sa vie à un discours pour l’Académie. » Il était homme à répondre comme un de nos contemporains à celui qui critiquait une de ses phrases : « Ah ! je le vois, mon cher, vous avez le préjugé du style. » J’aurais aimé à savoir ce que le digne abbé pensait de La Bruyère, et s’il lui en voulut un peu.
Un critique spirituel et sensé le remarquait à propos de la musique d’Auber, en parlant d’un de ses derniers opéras qui avait fort réussi : « Pour remporter ce succès avec une œuvre si élégante et si claire, un style si aimable et si charmant, il a fallu, disait-il, un très grand talent et un très grand bonheur ; car aujourd’hui, par la pédanterie qui court, par les doctrines absurdes qu’on voudrait accréditer, par l’ignorance et l’outrecuidance de quelques prétendus savants, la clarté, la grâce et l’esprit sont un obstacle plutôt qu’un avantage… Le beau mérite que d’entendre et d’admirer ce que tout le monde admire et comprend ! […] J’en dirai autant de Ma retraite ; on sent ce qui fait défaut à l’aimable poète : il a plus de sentiment que d’imagination, que d’étude et de science pittoresque, que de style et d’art poétique.
Mais, à force de méditer sur les prérogatives de la poésie, Le Brun en était venu à envisager les hardiesses comme une qualité à part, indépendante du mouvement des idées et de la marche du style, une sorte de beauté mystique touchant à l’essence même de l’ode ; de là, chez lui, un souci perpétuel des hardiesses, un accouplement forcé des termes les plus disparates, un placage extérieur de métaphores ; de là, surtout vers la fin, un abus intolérable de la Majuscule, une minutieuse personnification de tous les substantifs, qui reporte involontairement le lecteur au culte de la déesse Raison et à ces temps d’apothéose pour toutes les vertus et pour tous les vices. […] A part ce défaut, qui chez Le Brun avait dégénéré en une espèce de tic, son style, son procédé et sa manière le rapprochent beaucoup d’Alfieri et du peintre David, auxquels il ne nous paraît nullement inférieur.
Mais si la méthode et la précision du raisonnement, le style, les idées accessoires sont susceptibles de perfectionnement, les discours des modernes peuvent acquérir, par leur ensemble, une grande supériorité sur les modèles de l’antiquité ; et ce qui appartient à l’imagination même produirait nécessairement plus d’effet, si rien n’affaiblissait cet effet, si tout servait au contraire à l’accroître. […] Si vous supposez un homme que la réflexion ait rendu tout à fait insensible aux événements qui l’environnent, un caractère semblable à celui d’Épictète ; son style, s’il écrit, ne sera point éloquent : mais lorsque l’esprit philosophique règne dans la classe éclairée de la société, il s’unit aux passions les plus véhémentes ; ce n’est pas le résultat du travail de chaque homme sur lui-même ; c’est une opinion établie dès l’enfance, une opinion qui, se mêlant à tous les sentiments de la nature, agrandit les idées sans refroidir les âmes.
Pascal, La Bruyère, Fénelon sont de meilleurs maîtres de style et en donnent mieux la théorie que Buffon et Marmontel, où l’on vous ramène sans cesse. […] S’il est excellent de se mesurer avec certaines opinions hautaines, extrêmes, injustes, proclamées par des esprits puissants et sincères en un bon style, on ne saurait trop éviter l’erreur terne et sans relief, capable de s’insinuer parce qu’elle n’a pas la force de choquer, les demi-vérités dont les esprits vulgaires et laborieux, cherchant la gloire du paradoxe, font de pleines et plates erreurs.
Vous avez une bonne douzaine de chroniqueurs, jeunes ou vieux, chez qui vous retrouverez le même échauffement artificiel, le même désir vulgaire d’étonner, la même outrance facile, le même claquement de cravache, au reste le même vide et souvent la même insuffisance de style et, par endroits, de syntaxe. […] Et je ne vous parlerai pas non plus de son style, souple, ondoyant, nuancé, dont la facilité abondante est pourtant pleine de mots et de traits qui sifflent, tout chaud de la hâte de l’improvisation quotidienne, avec un fond de langue excellente, mais avec des négligences çà et là, des plis de manteau qui traîne, comme celui de quelque jeune Grec, auditeur de Platon.
Familiarisé depuis longtemps avec les ressources du style poétique, il abonde en tropes, en similitudes. […] On est las quelquefois du style plastique et de ses ciselures, du pittoresque à outrance, de la rhétorique impressionniste et de ses contournements.
Elle est tout le contraire de ses bons amis les jansénistes, qui ont le style triste. […] Le soir même du mariage, qui s’était célébré à grande pompe, et où la reine avait fait à la mariée l’honneur de lui donner la chemise (style du temps), à peine tout ce monde retiré, Sidonia comprit dès les premiers mots qu’elle avait affaire, dans M. de Courcelles, à un homme grossier et vil, et elle le méprisa.
Restent donc les détails du style. […] L’auteur accepte pour juges de la sévérité austère de son style les personnes mêmes qui s’effarouchent de la nourrice de Juliette et du père d’Ophélia, de Beaumarchais et de Regnard, de l’École des Femmes et d’Amphitryon, de Dandin et de Sganarelle, et de la grande scène du Tartuffe, du Tartuffe accusé aussi d’immoralité dans son temps !
Ce qui sera de l’enfant, ce sera une composition bien ordonnée, une disposition claire et peut-être déjà adroite des idées, et un style déjà plus ou moins formé, et ce sera toujours sur ces choses qu’il faudra juger un devoir d’enfant. […] Non, il faut se contenter d’un fond de discours qui n’aura d’ordinaire aucune originalité, qui sera d’emprunt plus ou moins adroit, et d’idées plus ou moins bien repensées — et d’une bonne disposition des parties, et d’un style sain, parfois agréable.
Théophile Gautier disait un jour de Janin : « On a beau dire, il y a un fameux tempérament dans ce style-là. » Quel sanglant éloge !
Le lien qui unit la forme lyrique de notre temps à celle du XVIe siècle, et moyennant lequel le style poétique de plus d’un de nos contemporains s’apparente réellement à celui de Regnier et des vieux maîtres, a été suffisamment indiqué et démontré en mainte occasion.
Il n’y a point de matière, si brute qu’elle soit, qui n’ait une forme : pareillement les pensées, matière des créations de l’esprit, ne peuvent être conçues hors de toute forme, c’est-à-dire sans un certain plan et sans un certain style.
Émile Blémont et Léon Valade est une très joyeuse et très littéraire farce, qui amuse par la bouffonnerie des incidents et charme par la grâce et l’inattendu du style.
N’en doutez, mie, cette médiocrité du style accuse la faiblesse d’un esprit incapable de coordonner et de hiérarchiser les idées élémentaires, la pauvreté d’une pensée gonflée mais anémique.
Tous les Médecins célebres y sont loués d’un style de Faculté qui n’est pas celui des Muses.
Il avoit cependant, dans ce dernier Ouvrage, un modèle bien capable de féconder son imagination, & d’adoucir son style.
Il est vrai que la Langue seroit restée dans une barbarie ridicule, si son style avoit servi de modele à ceux qui l'ont suivi ; mais on trouve dans ses Ouvrages une verve qui étonne, & des traits d'esprit, qui, revêtus d'expressions moins baroques, feroient honneur aux meilleurs Poëtes de ce Siecle.
Ils ont lieu malgré la peine que le public peut avoir à goûter des écrits peignant des lieux et des milieux lointains, conçus dans le style généralement médiocre des adaptateurs, recommandés au début par quelques enthousiastes seulement.
Laissons donc ce style à ces génies immortels, qui, par diverses causes, se sont créé un genre à part ; genre qu’eux seuls pouvaient soutenir, et qu’il est périlleux d’imiter.
… Toute la pièce est écrite de ce style de furie en goguette : voilà comment M. […] Parlerai-je du style de M. […] Je me disais, en le lisant, qu’il était difficile d’être plus Français que le sujet choisi par son double patriotisme : son style, ses pensées, l’âme qui respire dans son livre, ne m’ont pas fait changer d’avis. […] Parlerai-je du style de ces ouvrages ? Non : j’ai dit, en commençant, que je n’aimais pas les lieux communs, et que je prétendais les éviter ; la prétention n’était pas modeste : je m’en punis, en ne louant pas le style de M.
À l’absence totale de style et d’idées on sent la gageure ; on devine l’homme d’esprit qui s’amuse et plaisante à froid. […] Le style, de plus en plus simple, est épaissi et négligé. […] Il craint jusqu’au prestige d’un beau style, et c’est malgré lui qu’il est un grand écrivain. […] L’ordre de la pensée fait tout le style ; le reste n’est que manie, grimace et caprice. […] Il eut du style, une bonne anatomie, des draperies majestueuses.
C’est qu’en effaçant ainsi les limites qui séparent les arts, Perrault en arrive insensiblement à une indifférence entière — et barbare — sur les questions de forme et de style. […] Son style est approximatif, trop voisin de celui de la conversation, — où nous savons qu’elle excellait, — et, comme tel, trop vague en son contour, vif d’ailleurs et spirituel, mais un peu négligé. […] Et c’est encore Chateaubriand, sur les traces de Bernardin de Saint-Pierre et de Rousseau, dont le style prestigieux a fait de la description de la nature extérieure, mouvante et colorée, l’âme d’une poésie nouvelle. […] Nisard, lui, est un tout autre homme, un écrivain de race ; et non pas seulement de verve, comme Saint-Marc, lequel a beau s’évertuer et se travailler, son style sent toujours la facilité de l’improvisation. […] La sécheresse du premier, sa continence et sa frugalité ne se retrouvent-elles pas dans ses vers, dans le caractère de son style, dans cette absence de grâces, dans cette sévérité d’ajustements qui sentent le vieux célibataire ?
Ils dédaignent l’exécution, lâchent le style et trahissent la langue. […] » s’écrie-t-il, car lorsqu’il s’agit de converser avec soi-même à quoi bon recourir aux conventions du style noble ? […] Il a piqué son style de mots rares. […] Quoi qu’il fasse, il arrive que sous les fioritures et les colifichets reparaisse l’honnête transparence du style. […] Maurice du Plessys a reconquis le style plein et vigoureux de Malherbe.
Dites que notre littérature s’est gâté le style, qu’elle s’est chargée d’abstractions genevoises et doctrinaires, de métaphores allemandes, de phraséologie drolatique ou à la Ronsard : et quatre ou cinq noms qu’à l’instant tout le monde trouvera vous rappelleront les écrivains les plus vifs, les plus sveltes et dégagés, qui aient jamais dévidé une phrase française.
Le style est en harmonie avec les choses ; il ne manque pas d’images, mais on pourrait lui reprocher parfois des formes un peu abstraites et une allure trop métaphysique.
Ce style est d’une facture large et aisée, qui convient admirablement au poème épique porté à la scène.
Elle réussit à faire sentir dans son style la préciosité de cette littérature, vieille et raffinée.
Est-ce par des phrases philosophiques, par des ironies indécentes, par un style épigrammatique, par un ton & par des manieres conformes aux mœurs énervées de notre temps, qu’on prétendroit nous retracer, dans la plus noble des fonctions, cette élévation, cette force, cette vive sensibilité, & sur-tout cette décence qui caractérisoit chez les Romains les Défenseurs des Loix & les fléaux de l’iniquité ?
Vous faites des choses si belles, Si justes & si naturelles, Que votre style est sans égal ; Sans cesse je vous étudie : Qui peut être votre Copie, Passe pour être Original.
La curiosité, l’intérêt, l’amusement, le rire, les larmes, l’observation perpétuelle de tout ce qui est nature, l’enveloppe merveilleuse du style, le drame doit avoir tout cela, sans quoi il ne serait pas le drame ; mais pour être complet, il faut qu’il ait aussi la volonté d’enseigner, en même temps qu’il a la volonté de plaire.
Il nous répugnerait autant de louanger un médiocre imitateur, un plat versificateur, que de méconnaître un tempérament original égaré dans des recherches malheureuses de style ou de pensées ?
Ce style, ces sentiments n’ont point de modèle dans l’antiquité42.
Tous méritent les plus grands éloges par leur précieux dessin et le style délicat dans lequel vous les avez traités.
« Je ne connais rien de plus fatigant et de plus puéril que cet affreux patois (il s’agit du style de Mme Sand dans Jeanne) ; franchement, je préférerais presque l’argot : il a au moins le mérite de l’étrangeté, tandis que la langue de la plupart des personnages de Jeanne est d’une trivialité à faire frémir. […] Je ne parle plus du style : à part quelques passages, où le cœur rencontre par hasard, et comme de lui-même, la belle et pure langue d’autrefois, tout le reste est prétentieux ou hérissé d’incorrections ; on sent à chaque phrase un anneau qui manque à la chaîne des idées. […] Nulle part on ne sent l’étude de la nature, nulle part le désir d’appliquer exactement le mot sur la chose ; les descriptions sont vagues, sans intérêt, et n’évoquent pas les objets qu’elles devraient représenter ; le style passe de l’afféterie la plus maniérée à la boursouflure la plus asiatique, et rien n’est plus désagréable que ce mélange du mignard avec le gigantesque : les comparaisons ne se rapportent pas aux choses qu’elles expriment, et détruisent l’effet des vers qui les précèdent. » Je m’arrête, mon ami, je n’ai pas assez d’haleine pour vous dire quatre pages de critique, et surtout lorsque cette critique frappe un de mes meilleurs amis. […] Je lus un jour dans la Revue de Paris qu’on signalait au public mon style déshonoré par une affectation entortillée et par l’incorrection grammaticale , ce même style que la Revue de Paris avait bénévolement offert au même public dix mois avant dans l’ouvrage même qu’elle critiquait. […] Dumas et Frédéric Soulié sont à l’abri des insinuations de M……, et nous lui souhaitons le style et la probité littéraire de ces hommes qui ne sont que des écrivains français. » Revue de Paris, juin 1844.
Quoiqu’on ne puisse juger d’une langue morte aussi sûrement que de la sienne, le style d’Horace paraît non-seulement plus élégant, mais aussi plus propre au sujet qu’il traite. […] « Ainsi, l’on peut compter dans toute la tragédie six éléments qui servent à déterminer ce qu’elle est et ce qu’elle vaut : ce sont la fable, les mœurs ou caractères, le style, l’esprit ou les sentiments, le spectacle et la mélopée. […] « D’ailleurs, ce ne sont pas quelques poètes en petit nombre et qu’on pourrait compter, qui ont employé ces six éléments ; toute pièce, sans exception, renferme à la fois spectacle, caractères, fable, style, musique et pensées. […] C’est dans le Traité de l’âme, plus que partout ailleurs, qu’on peut bien voir ce qu’est toute sa manière, cette ordonnance grandiose et lucide des pensées, ce style concis et ferme jusqu’à l’obscurité et à la sécheresse axiomatiques, sans ornements d’aucun genre qu’une admirable justesse, une incomparable propriété d’expressions, une vigueur sans égale, et, au milieu d’une apparente et réelle négligence, des allures où éclate toujours la puissance du génie. Ce sont là les qualités extérieures du style aristotélique ; il en a d’autres plus profondes, dont la philosophie lui doit plus particulièrement tenir compte.
Quant au style, on ne s’occupe pas de cela chez ce public ingénu, bon diable, facile à émouvoir et qui, se livrant de grand cœur, ne compte pas plus ses larmes que ses rires. […] ; hacher le style court et menu, filer interminablement, hier l’intrigue, aujourd’hui la description, demain le dialogue ; émietter en des parts innombrables le corps du sujet, allonger à l’infini les lieux communs du genre : embrouillamini de paternité, suppositions d’enfants, vengeances et trahisons, distillées goutte à goutte jusqu’au suprême épuisement de la matière : c’est toute une gamme d’artifices. […] Qui voudrait éplucher les formes de style, usées ou non, dont ils les accommodent ? […] Que leur importent toutes ces pages, écrites d’un style haletant et convulsé ? […] Il est donc très vivement à souhaiter qu’une orientation nouvelle soit donnée à notre littérature d’imagination ; qu’elle ait le souci de la vérité, de la pensée, du style, et en même temps qu’elle ne rebute pas le gros public par les recherches d’une « écriture » compliquée à plaisir, par l’abus des descriptions, par l’amertume de son pessimisme, par une dédicace aristocratique pour « la bêtise humaine », généreusement prêtée à la totalité des hommes, exception faite des seuls littérateurs.
Leur but doit être le style, qui consiste dans l’expression parfaite et dans l’union libre des tendances musicale et dramatique. […] Donner sur une scène française — ou, tout au moins, sur une scène de langue française — une des œuvres les plus hardies et les plus originales du hardi novateur ; la monter avec un soin jaloux des moindres détails de la mise en scène et de l’interprétation vivante ; commencer à mettre les chanteurs français, enclins à parader dans le style italien, aux prises avec la musique d’action ; obliger les chœurs à prendre part à la comédie, à y jouer franchement un rôle : ce n’est pas seulement plaire aux connaisseurs désintéressés, c’est aussi hâter l’avènement d’un art de sincérité, de liberté, d’émotion et de logique. […] Camille Benoit : « Jamais de telles noces ne s’étaient encore accomplies entre l’antique Poésie et la jeune Musique. » La préface des Souvenirs est aussi remarquable par la sobre vigueur du style que par la haute raison des doctrines. […] Pour André Cœuroy (Wagner et l’esprit romantique, Paris : Gallimard, 1965, p. 254) qui cite Dujardin, il ne fit que se contenter « de développer dans le style qui lui était propre l’analyse de l’Ouverture de Tannhäuser insérée dans le programme que l’ouvreuse lui avait remis » et rien n’est plus étranger à la pensée de Wagner que ce texte qu’il qualifie d’une « des excroissances les plus curieuses de la littérature wagnérienne ». […] Le procédé est classique, le style l’est moins et présente les tournures habituelles au symbolisme.
On pouvait en être le Saint-Simon ou le Suétone : — abonder de détails, les dénuder, les faire saillir, les rougir de cette flamme de l’indignation, qui est à l’horizon moral de l’histoire ce qu’est, à l’horizon physique de leurs tableaux, cette pourpre sanglante sur le fond de laquelle les_ peintres détachent mieux quelque scène criminelle et tragique ; — ou bien on pouvait, comme Tacite, aspirer à la sobriété hautaine, au choix supérieur qui suffit pour montrer tout sans rien étaler, à cette concentration terrible qui fait du style et de la pensée un acide qui perce et dissout. […] Méthode, arguments, abondance de notions, force de logique et d’induction, clarté d’exposition redoublée par la clarté du style, telles sont les qualités frappantes pour tout le monde de cette œuvre puissante, qui donnera du mal, s’il s’en présente aux contradicteurs Des contradicteurs ! […] Ainsi, il l’est surtout, et mieux qu’ailleurs, dans le superbe onzième chapitre de son ouvrage, où il raconte, dans le style ferme qu’on lui connaît, la prise de Rome, avec la gravité romaine. […] Finalement, comme « style est tout l’homme », il devait avoir et il eut aussi la force du style, qui, comme l’acier, ne brille chez lui que de pureté et de solidité, et semble dédaigner tout le reste.
En même temps, la littérature normande s’est desséchée ; séparée de la tige, et sur un sol étranger, elle a langui dans les imitations ; un seul grand poëte, presque Français d’esprit, tout Français de style, a paru, et après lui comme avant lui s’étale le radotage irrémédiable. […] La fine élégance est devenue débauche ignoble ; le doute délicat s’est tourné en athéisme brutal ; la tragédie avorte, et n’est qu’une déclamation ; la comédie est effrontée et n’est qu’une école de vices ; de cette littérature, il ne subsiste que des études de raisonnement serré et de bon style ; elle-même est chassée de la scène publique presque en même temps que les Stuarts au commencement du dix-huitième siècle, et les maximes libérales et morales reprennent l’ascendant qu’elles ne perdront plus. […] De là cette excellence et cette originalité de la satire politique, du discours parlementaire, de l’essai solide, du roman moral, et de tous les genres qui exigent un bon sens attentif, un bon style correct, et le talent de conseiller, de convaincre ou de blesser autrui. […] C’est de cela qu’on lui parle dans les églises, en style grave et froid, avec une suite de raisonnements sensés et solides : comment un homme doit réfléchir sur ses devoirs, les noter un à un dans son esprit, se faire des principes, avoir une sorte de code intérieur librement consenti et fermement arrêté, auquel il rapporte toutes ses actions sans biaiser ni balancer ; comment ces principes peuvent s’enraciner par la pratique ; comment l’examen incessant, l’effort personnel, le redressement continu de soi-même par soi-même doivent asseoir lentement notre volonté dans la droiture : ce sont là les questions qui, avec une multitude d’exemples, de preuves, d’appels à l’expérience journalière1331, reviennent dans toutes les chaires, pour développer dans l’homme la réforme volontaire, la surveillance et l’empire de soi-même, l’habitude de se contraindre, et une sorte de stoïcisme moderne presque aussi noble que l’ancien.
Ces livres ne renferment pas une ligne de bon sens, c’est le délire rédigé en style barbare et indéchiffrable. […] Je suppose qu’un homme d’esprit (c’est presque le cas d’Apollonius de Rhodes) pût attraper le pastiche du style homérique de manière à composer un poème exactement dans le même goût, un poème qui fût à Homère ce que les Paroles d’un Croyant sont à la Bible ; ce poème, aux yeux de plusieurs, devrait être supérieur à Homère ; car il serait loisible à l’auteur d’éviter ce que nous considérons comme des défauts, ou du moins les manques de suite, les contradictions. […] Mais il y a quelque chose de bien plus beau encore, c’est l’impression qui résulte de ces salles, de la pose ordinaire des personnages, du style général des tableaux, du coloris dominant. […] « Quand on a une fois trouvé le commode et le beau, dit Fleury, en ne devrait jamais changer. » Il y a encore des gens qui regrettent qu’on n’écrive plus de la même manière que sous Louis XIV, comme si ce style convenait à notre manière de penser 100.
On a pu juger, par quelques citations que j’ai données, du ton et (si ce mot est permis) du style de Villehardouin. […] Il serait évident, rien qu’à voir les deux styles, que, dans l’intervalle de Villehardouin à Du Cange, il est arrivé un accident à la langue ; qu’elle s’est de nouveau compliquée, qu’elle a été reprise de latinisme et ne s’en est pas encore débarrassée.
Il se distingue avec avantage du style épigrammatique de d’Alembert et du style opaque de Condorcet.
Soit naïveté, soit finesse (car il est très spirituel), il trouve moyen de convaincre à la fois de sa véracité et de sa jactance ; les fiertés de son style nous rendent bien celles de son courage et de sa personne : il n’est pas donné à tout le monde d’être un Catinat. […] Il convient pourtant qu’il n’est pas inutile de l’être quelquefois ; car il faut avoir la tête bien grosse quand on a éprouvé une perte en un lieu pour ne pas y pourvoir lorsqu’on se retrouve exposé au même hasard ; c’est le cas de se faire sage par sa perte : « Mais je me suis bien trouvé, ajoute-t-il, de ne l’avoir pas été, et aime mieux m’être fait avisé aux dépens d’autrui qu’aux miens. » Pour un personnage tout d’action et si homme de main, il est à remarquer comme il aime les préceptes, les sentences, et à moraliser sur la guerre ; il le fait en un style vif, énergique, imaginatif, gai parfois et qui sourit : oh !
La naissance, le progrès, les divers temps de ce mal de jalousie chez Roger, ses soupçons tantôt irrités, tantôt assoupis, et que le moindre mot réveille, son horreur du partage, l’exaspération où il s’emporte à cette seule idée, tous ces degrés d’inquiétude et de torture jusqu’à la fatale et horrible scène où il a voulu n’en croire que ses yeux et être le témoin de sa honte, sont décrits avec un grand talent, avec un talent qui ne se refuse aucune rudesse métallique d’expression, qui ne craint pas d’étreindre, de violenter les pensées et les choses, mais qui (n’en déplaise à ceux qui n’admettent qu’une manière d’écrire, une fois trouvée) a certainement sa forme à lui et son style. […] Dans toutes les parties d’Adolphe qui ne sont pas essentielles, on trouverait de ces espèces de défauts, et même des défauts de style. — « Mon père, dit Adolphe parlant de certaines liaisons, les regardait comme des amusements, sinon permis, du moins excusables, et considérait le mariage seul sous un rapport sérieux. » — La note perpétuelle d’Adolphe est une note sourde, intérieure : « Je m’agitais intérieurement. — Je me débattais intérieurement.
Le premier livre qui le tira de ce pêle-mêle, en lui donnant un terme de comparaison, et qui l’initia à la littérature classique, ce fut Gil Blas, qu’il vit entre les mains d’un ami ; le livre, à peine lu, le dégoûta à l’instant « de la faconde moderne, du roman d’intrigue, du roman de thèse, du roman de passion, et de tout cet absurde et de toute cette emphase qu’il avait tant aimés. » Ce prompt effet du naturel et du simple sur un esprit ferme et né pour le bon style est rendu à merveille. […] Veuillot, et que je les rencontre à côté de tant de jugements fermes, sagaces, bien frappés : tel est dans ce chapitre le jugement sur Hugo et sur Musset, en six lignes qui disent tout. — Entre les classiques français qu’il se mit à lire régulièrement, il n’en est aucun auquel il fut plus redevable qu’à La Bruyère ; il l’étudia à fond, tour et style.
On avait beau demander à la Convention des secours, le Nord même de la France était alors découvert et en péril ; et la Convention, en son style figuré et d’une rhétorique sublime, puisque chacun y mettait sa tête pour garant des paroles, répondait à ses généraux et à ses représentants : « Vous demandez du lait à une mère épuisée ! […] Elle donna presque une entière satisfaction au vieux général qui, dans une saillie d’orgueil peu ordinaire aux accusés, osait réclamer d’elle, non seulement réintégration, mais récompense, et qui lui demandait dans le style emphatique, mais sincère, du temps, « de le tirer du séjour des Mânes, en déclarant qu’il avait bien mérité de la patrie.
Le dialogue est moins bien ; il y a trop de style ou de ce qu’on appelle ainsi : les personnages parlent trop comme on écrit quand on se soigne ; c’est du style habillé et paré.
L’Empereur estima « qu’une Adresse faite à Posen par un vieux Polonais, écrite en mauvais style, mais en style évidemment polonais, aurait été meilleure. » M. de Bassano le manda en propres termes, et sous sa dictée, à l’abbé de Pradt.
Son style est le style reçu dans la bonne compagnie depuis Mme de La Fayette, avec de jolies nuances et des variantes de teintes et de pensées qui le relèvent sans jamais le dénaturer.
Les Fables Nous pouvons négliger tout le reste de l’œuvre de La Fontaine, les Contes, si ennuyeux et si tristement vides de pensée dans la grâce légère de leur style, tout le théâtre, les Poèmes sur le Quinquina et la captivité de Saint-Malo, les pièces détachées, les lettres. […] Il mêle tous ces emprunts dans le courant limpide de son style, et les plus vertes expressions, les plus triviales, et qui sentent la canaille ou l’écurie, n’étonnent ni ne détonnent chez lui, tant elles sont à leur place, et justes, naturelles, nécessaires.
Je ne puis me tenir de détacher de la conclusion ces lignes où l’émotion de l’érudit, tout en se contenant, teint son style d’une couleur charmante : … Certes nous avons eu, depuis la Renaissance, une littérature plus belle, plus variée, plus riche pour le cœur et pour l’esprit que la poésie rude et simple de Roland ; et, quand nous revenons écouter ce langage naïf en sortant des harmonies savantes de nos grandes œuvres littéraires, il nous semble entendre le bégayement de l’enfance. […] Gaston Paris, uniquement préoccupé d’être clair, n’a point, en écrivant, de marque très personnelle et ne cherche pas à en avoir, et qu’il n’arrive à la couleur, quelquefois à l’émotion, que par l’extrême précision et la sincérité de son style.
Ils cesseraient toute communication aux journaux quotidiens pour ne pas gaspiller leur style et leur jugement en de petits articles hâtifs jetés dans le tonneau des Danaïdes de l’actualité. […] L’un étudierait la jalousie dans le roman, l’autre l’altruisme, l’autre les nouvelles formes du style.
Non seulement le burlesque est renvoyé à la province, mais on essaie de mettre partout noblesse et solennité ; on ne pardonne pas le sac de Scapin à l’auteur du Misanthrope ; et si Boileau s’amuse, comme Scarron, à écrire une parodie d’épopée, il compose un poème héroï-comique, où, par un procédé qui est juste l’inverse de celui de son devancier, il pare et drape d’un style pompeux une mesquine querelle de chanoines. […] Mais en même temps le pessimisme, qui teignait de noir les romans de Zola et de ses adeptes, leur souci du milieu où vivent les personnages qu’ils mettent en scène, leur effort pour élargir la langue littéraire jusqu’aux limites de la langue parlée, leur style même souvent si chatoyant de couleurs et de métaphores, tout cela permet de dire : C’est une queue du romantisme.
Nous devons renoncer désormais à cette critique verbale qui n’entre point dans le fond des choses, qui s’attache surtout aux formes du style, à l’économie d’une composition, à l’observance de certaines règles, à la comparaison superstitieuse avec les modèles, sorte de critique secondaire dont M. de La Harpe est souvent un modèle si parfait. […] L’architecture nous a donné le style gothique ; mais les terribles inondations des Sarrasins et des hommes du nord, mais les croisades n’ont pu féconder notre imagination.
La critique, le goût et le style lui manquent tout à fait : rien que cela.
— La Presse annonce aussi un Mémorial de Sainte-Hélène refait par le général Montholon : on ajoute que c’est Alexandre Dumas qui prêtera sa plume, pour plus d’authenticité, aux souvenirs du digne général ; et « la Presse, dit le Globe, s’extasiait l’autre jour sur le style de ce dernier.
Je parlerai peu du style ; tout ce qu’on en a déjà dit, il faudrait ici le redire.
Ce qui est vrai du peu de composition de l’ensemble, ne l’est pas moins pour le détail du style : la phrase ne finit pas, le vers enjambe sur le vers et sur la strophe, ¿ans qu’il en résulte beauté ni mouvement.
Deux « styles » : celui des gares, et surtout celui des pièces de pâtisseries montées.
Dans le premier et le quatrième se retrouvent la plupart des qualités d’Henry Bataille : véritable instinct du théâtre, aisance du dialogue, style à la fois serré et fin, d’une désinvolture aiguë et charmante, mots spirituels et profonds d’auteur dramatique, comme le : « Enfin, un homme !
Il est mort plein de jours, en possession d’une immense sympathie publique, et je ne veux, certes, contester aucune de ses vertus domestiques ; mais je nie radicalement le poète aux divers points de vue de la puissance intellectuelle, du sentiment de la nature, de la langue, du style et de l’entente spéciale du vers, dons précieux, nécessaires, que lui avaient refusés tous les dieux, y compris le dieu des bonnes gens, qui, du reste, n’est qu’une divinité de cabaret philanthropique.
Cet ouvrage écrit en français est d’un style pur et d’une limpidité parfaite.
Seroit-il permis d’ajouter, que peu de Littérateurs ont eu le coup-d’œil plus juste pour découvrir les défauts d’un Livre, le tact plus fin pour en sentir les négligences & les beautés, qu’il a été long-temps le seul des Journalistes qui relevoit les fautes de langage aujourd’hui si communes, & qui, en matiere de style, ait su plus finement distinguer le simple du bas, le naturel du recherché, le sublime de l’enflure, le vrai du faux ?
La première partie du Discours sur l’Histoire universelle est admirable par la narration ; la seconde par la sublimité du style et la haute métaphysique des idées ; la troisième par la profondeur des vues morales et politiques.
Son livre, qui est l’exposé lucide, dans un style vif et pur, de la doctrine catholique sur les rapports éternels de deux puissances, — la puissance séculière et la puissance religieuse, — est divisé en deux parties.
Nous assurons à Homère le privilège d’avoir eu seul la puissance d’inventer les mensonges poétiques (Aristote), les caractères héroïques (Horace) ; le privilège d’une incomparable éloquence dans ses comparaisons sauvages, dans ses affreux tableaux de morts et de batailles, dans ses peintures sublimes des passions, enfin le mérite du style le plus brillant et le plus pittoresque.
Donc ces messieurs ont prodigué les critiques de style. […] L’une avait plus de style, et l’autre plus de passion. […] Pour ce qui est du style, il est plus orateur que poète. […] C’est tout simplement une différence d’habitudes de style. […] Cela fait quelque chose d’extraordinairement inégal, de bizarre aussi, parce que l’auteur a l’air de quelqu’un qui, tour à tour, pratique très savamment l’art du style et se moque volontairement de l’art du style.
Il y a un bon style de finances comme il y a un bon style littéraire. […] La raison en est qu’elle sentait fortement et n’avait pas appris le beau style. […] L’invention en semble un peu maigre ; mais le style en est vif, sobre, nerveux. […] Les temps sont passés ; mais un style simple, vrai, calculé, un style savant, travaillé, voilà ce qu’il nous est permis de produire. […] Plus d’un style convient à l’histoire.
Le premier dictionnaire venu vous dira qu’il ne s’emploie plus que dans le style badin ou poétique : au fait, à qui l’appliquerait-on ? […] Quel style facile, incisif, plein de recherches, et pourtant toujours clair ! […] Renan, mais donne une idée fort erronée de son style, qui est en général clair, rapide et nerveux. […] Pour bien juger son style, il faut lire le chapitre qu’il consacre au P. […] L’exagération et l’amour des contrastes violents ont toujours compté parmi les caractères les plus saillants du style de Victor Hugo.
Elle aime à associer les noms de l’amitié aux émotions publiques qui envahissent son âme et la transportent : « C’est ajouter, » dit-elle en un style plein de nombre et dont le tour accompli rappelle le parler de Mme de Wolmar, « c’est ajouter au grand intérêt d’une superbe histoire l’intérêt touchant d’un sentiment particulier ; c’est réunir au patriotisme qui généralise, élève les affections, le charme de l’amitié qui les embellit toutes et les perfectionne encore. » Les lettres du 24 et du 26 janvier 91 à Bancal, alors à Londres, par lesquelles elle essaie de le consoler de la mort d’un père, méritent une place à côté des plus élevées et des plus éloquentes effusions d’une philosophie forte, mais sensible. […] La parole, le style de Mme Roland est plus ferme, plus concis, plus net que le style de Mme de Staël en sa première manière ; cette différence tient au caractère, aux habitudes d’éducation des deux écrivains, et à dix années de plus chez Mme Roland.
Sans doute l’idée de morale le préoccupa outre mesure ; il y subordonna le reste, et en général, dans toute son esthétique, il méconnut les limites, les ressources propres et la circonscription des beaux-arts ; il concevait trop le drame en moraliste, la statuaire et la peinture en littérateur ; le style essentiel, l’exécution mystérieuse, la touche sacrée, ce je ne sais quoi d’accompli, d’achevé, qui est à la fois l’indispensable, ce sine qua non de confection dans chaque œuvre d’art pour qu’elle parvienne à l’adresse de la postérité, — sans doute ce coin précieux lui a échappé souvent ; il a tâtonné alentour, et n’y a pas toujours posé le doigt avec justesse ; Falconnet et Sedaine lui ont causé de ces éblouissements d’enthousiasme que nous ne pouvons lui passer que pour Térence, pour Richardson et pour Greuze : voilà les défauts. […] Demandez plutôt à l’auteur des Saisons, à M. de Saint-Lambert, qui, entre les gens de lettres, est une des peaux les plus sensibles (nous dirions aujourd’hui un des épidermes) ; à M. de La Harpe, qui a du nombre, de l’éloquence, du style, de la raison, de la sagesse, mais rien qui lui batte au-dessous de la mamelle gauche, …………… Quod laeva in parte mamillae Nil salit Arcadico juveni…………… JUV. […] Auguis dans ses Révélations indiscrètes du xviiie siècle, est peut-être le premier exemple en notre littérature du style à la Janin ; dans ce genre de charge fine, l’échantillon de Garat reste charmant.
Montaigne a résumé avec originalité cette habitude d’appropriation savante dans son style tout tissu, en quelque sorte, de textes anciens : « Il fault musser, dit-il, sa foiblesse soubz ces grands crédits. » Quant aux poëtes d’alors, ils n’y entendent point malice à beaucoup près autant que Montaigne, et ils sont aussi bien moins créateurs que lui ; ils y mettent moins de pensées de leur cru ; mais souvent, quand le fonds les porte, ils ont l’expression heureuse, forte ou naïve, et une véritable originalité se retrouve par là. […] Comme échantillon du style bizarre et alambiqué, je citerai une lettre de François Ier, que le Recueil met à l’adresse de la duchesse d’Alençon, c’est-à-dire de Marguerite. […] L’hôtel Rambouillet n’a pas inventé, comme on va le voir, le style des précieuses : « Un chascun se sçait esjouir, ma mignonne, de son ayse ; mais celuy qui l’a, a tant forte querelle, qu’elle a anticippé et occuppé toute demonstration, si qu’il se peult dire le sentir parfaictement.
Vous prétendez que les premiers offrent des situations touchantes, de grands caractères, des scènes pathétiques, où pour nous enchanter et nous instruire, tout est mis en usage, l’élégance et l’énergie du style, la profondeur et la clarté des idées, la vivacité des images, la sublimité des sentiments, la nature enfin habilement imitée dans tout ce qu’elle a de vrai et de noble à la fois ; voilà le mal : mais nous avons aussi des farces tragi-comiques que nous appelons mélodrames ; là, rien ne nous manquera bientôt des meilleures pratiques, fables compliquées, personnages gigantesques, préceptes moraux d’un aussi fort poids que les bons mots et les jeux d’esprit qui s’y entremêlent. […] Racine même n’est pas plus tendre, et n’obtient la palme que par la sagesse des plans, l’harmonie et la constante perfection du style. […] Enfin le style du premier admettra tour à tour l’emphase de la poésie et les familiarités de la prose ; celui du second, soumis à des lois austères, restera toujours poétique, sans jamais cesser d’être l’expression la plus naturelle et par conséquent la plus élégante des pensées et des sentiments de chaque personnage.
Quand on lit les opuscules de Denys d’Halicarnasse sur Platon, sur Thucydide, sur le style de Démosthène, on croit lire les mémoires de M. et de Mme Dacier et des honnêtes savants qui remplissent les premiers volumes des Mémoires de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. […] La forme, le style sont les trois quarts de la pensée, et cela n’est pas un abus, comme le prétendent quelques puritains. Ceux qui déclament contre le style et la beauté de la forme dans les sciences philosophiques et morales méconnaissent la vraie nature des résultats de ces sciences et la délicatesse de leurs principes.
La foule aime le style voyant. […] J’ai passé un an à éteindre le style de la Vie de Jésus, pensant qu’un tel sujet ne pouvait être traité que de la manière la plus sobre et la plus simple. […] J’ai de même fait passer ce que la médiocrité humaine regarde comme des hardiesses grâce à un style modéré et à des mœurs graves.
J’aurai fait la plus ordurière chose pornographique, je n’aurais cherché ni l’élévation austère de la pensée, ni la rigidité du style, ni le coup d’aile poétique, que je serais absolument traité comme je le suis. […] On parle, en marchant, de Meilhac et de la modernité de ses pièces, on parle des femmes de la société bourgeoise se disputant Gambetta, on parle des catastropheux de la littérature, et de la mission officielle qu’ils se donnent, d’apprendre à leurs amis, sans en être priés, que leurs livres ne valent rien, on parle des Mémoires de Philarète Chasles, dont Daudet admire la vie du style. […] * * * — Saint-Simon jugé par Mme du Deffand : « Le style est abominable, les portraits mal faits, l’auteur n’était point un homme d’esprit. » Jeudi 11 octobre Il y a chez moi une aversion telle de la politique, qu’aujourd’hui, où c’est vraiment un devoir de voter, je m’abstiens… J’aurais passé toute ma vie, sans voter une seule fois !
Mais on ne peut douter qu’après lui, quand un souvenir naïf de mœurs étrangères, quand une passion vraie ne montait pas au cœur de l’écrivain, l’érudition et la recherche, la science du style poussée jusqu’au raffinement, la prétention de l’art, devenue comme une manie superstitieuse, ne jetassent le talent même dans le bizarre et le ténébreux. […] Ce serait une étude technique de noter, dans les vers de l’Alexandra, les mouvements, les images, les formes de style, empruntés ou détournés d’Eschyle ou de Pindare. […] Mais c’est de Jupiter que j’attends la vertu. » Rien, ce semble, de plus élégant que le style de l’original, dans cet hymne de cour.
« Son discours, dit-il, bien loin de couler avec cette douceur agréable, avec cette égalité tempérée que nous admirons dans les orateurs, paraît inégal et sans suite à ceux qui ne l’ont pas assez pénétré ; et les délicats de la terre, qui ont, disent-ils, les oreilles fines, sont offensés de la dureté de son style irrégulier. […] De même qu’on voit un grand fleuve qui retient encore, coulant dans la plaine, cette force violente et impétueuse qu’il avait acquise aux montagnes d’où il tire son origine, ainsi cette vertu céleste qui est contenue dans les écrits de saint Paul, même dans cette simplicité de style, conserve toute la vigueur qu’elle apporte du ciel d’où elle descend116. » N’est-ce pas là, sauf la différence des rôles, le portrait de Bossuet ? Il ne lui a pas même manqué des délicats dont les oreilles fines ont trouvé dur et irrégulier le plus grand style dont les lettres nous offrent l’exemple. […] Il faut lire certains passages des Provinciales, où Pascal se raille légèrement du langage des Pères, et cite des phrases dont l’affectation et le raffinement contrastent si étrangement avec le naturel et la candeur de son style. […] Voici ce que disent du style des Maximes Bossuet et ses deux collaborateurs, l’évêque de Chartres et l’archevêque de Paris, dans une déclaration en latin, adressée au pape Innocent XII : « Aussi en général, le style du livre est-il tellement entortillé et glissant (tortuosus ac lubricus) qu’à peine en peut-on tirer un sens certain en plusieurs endroits, après s’y être appliqué ; ce qui est la marque d’une doctrine sans principe et sans suite, où l’on ne cherche, par tant de correctifs, que des faux-fuyants et des détours. » 152.
Huysmans, se perdent dans un mysticisme passablement malsain, aggravé d’un style déplorable. […] Zola s’exagère peut-être les côtés morbides de son style. […] On peut relever encore l’abus du style indirect et les tournures de phrases identiques d’un bout à l’autre du volume. […] Le style du Mandarin est un peu lourd. […] Son style, à larges périodes, très puissant, parfois un peu embarrassé, possède des qualités de couleur tout à fait remarquables.
Laya : « Ce que vous appelez mon affectation (dans le style) est mon naturel. » J’ajouterai que cet homme bouillant et brillant, qui portait toutes ses qualités en dehors et qui les avait aussi en dedans, avait une véritable modestie littéraire sous un air de faste, de même qu’il disait avoir eu une timidité première à vaincre avant d’arriver à toute sa hardiesse.
— Les quolibets de la haute littérature sur Lucrèce courent le monde et ne tarissent pas : « C'est du style vieilli, dit de Vigny, il mérite un accessit.
Il y a dans cette partie du récit une sobriété de style et une simplicité de tour qui est du tact par opposition à l’abondance même des sensations.
Discours sur le style.
Et c’est à l’unité, à la cohésion trop exacte que se trahissent l’étude et la méditation dans certains recueils de lettres : on sent que chaque lettre est écrite, que c’est style d’auteur, et non langage de causeur.
Le romantisme, plus nourri qu’on ne croit de l’antiquité, l’avait abandonnée, au moins en apparence, par le choix des sujets et l’emportement du style.
D’abord j’y ai savouré des trouvailles de style.
La crainte d’une inimitié redoutable put bien imposer silence à son indignation, pendant que le Philosophe Géometre m’accabloit d’injures en style de Crocheteur : elle ne put ni étouffer le mépris que méritoit un tel procédé, ni l’empêcher de me dire le lendemain en propres termes : Ces vilains Philosophes dégradent perpétuellement les Lettres.
Il est certain qu'on n'y retrouve pas cette noblesse, cette élégance soutenue, cette même force de génie qui caractérise ses Poésies lyriques ; mais on seroit injuste de ne pas y admirer une raison supérieure, une poésie nerveuse, une facilité de style, une sûreté de goût, qui décelent le grand Maître, sur-tout dans les matieres où il parle de son Art.
Son style est froid, mais ses raisonnemens sont profonds, & il tire d’un sujet toutes les réfléxions qu’il fournit.
Je ne dis pas que Taraval vaille mieux que Fragonard, ni Fragonard mieux que Taraval, mais celui-ci me paraît plus voisin de la manière et du mauvais style.
Celui en qui les leçons des philosophes auraient développé les sentiments de l’humanité et de la pitié n’aurait pas eu non plus ce style si fier et d’un effet si terrible avec lequel il décrit dans toute la variété de leurs accidents, les plus sanglants combats, avec lequel il diversifie de cent manières bizarres les tableaux de meurtre qui font la sublimité de l’Iliade.
Avec cela, et un progrès immense dans son style, n’avait-il pas le droit d’espérer un nouveau triomphe ? […] Ponsard entra en pleine possession de son style, style plus composite qu’homogène, où il est facile de reconnaître la trace de diverses inspirations et de diverses écoles, ou la nouveauté et l’archaïsme se coudoient sans se combiner toujours, mais qui, après tout, est d’une trame assez ferme, d’un tissu assez solide pour qu’il ne soit plus permis d’en parler avec dédain. […] … » — Et ainsi de suite : toute la préface est écrite de ce style, qui fait un singulier effet à côté du simple et ferme langage de M. […] Je voudrais donner une idée du style enchanteur de M. […] Je comprends très bien l’Académie française, celle des Sciences, celle des Beaux-Arts ; nul, que je sache, ne peut songer à faire du style mieux que MM.
Elle me semble même dangereuse, car le maître russe revêt ses paradoxes de toute la magie d’un style entraînant, souple et nerveux ; il expose une théorie fausse avec une éloquence qui fatalement persuadera plus d’un esprit faible. […] Sans le mensonge du grand style ! […] Plus loin encore, Nietzsche consacre quelques lignes à la question du style. […] Sa manière, en cela, rappelle les frères de Goncourt, qui sont à rapprocher aussi de Wagner quant au style. […] De là cette appréciation du génie et du tempérament de Beethoven : « Beethoven n’aura été que le dernier écho d’un style transitoire, d’un changement de style et non, comme Mozart, l’écho d’un grand et long siècle de goût européen.
Comment voulez-vous que je traduise, sinon ainsi : « Point d’effets de style, point de jonglerie de rimes ; la substance du style, c’est la pensée. » La suite le prouve mieux encore. […] Le bon Nicolas veut nous dire qu’il faut réfléchir pour avoir un style clair. […] Voici le patron ancien style, M. […] Écrit agréablement et d’un style qu’on peut appeler bonhomme. […] Vous rappelez-vous que Gambetta avait le style peu imagé ?
Malherbe, homme de forme, de style, esprit caustique, cynique même, comme M. de Buffon l’était dans l’intervalle de ses nobles phrases, Malherbe, esprit fort au fond, n’a de chrétien dans ses odes que les dehors ; mais le génie de Corneille, du père de Polyeucte et de Pauline, est déjà profondément chrétien. […] Rien d’étonnant, au reste, que cette fine et mystique nature de Fénelon, dans sa blanche robe de lin, dans sa simple tunique, un peu longue, un peu traînante (en fait de style), n’ait pas entendu ces admirables plis mouvants, étoffés, du manteau du grand comique. […] La Rochefoucauld, en son style ingénieux, a dit que l’absence éteint les petites passions et accroît les grandes, comme un vent violent qui souffle les chandelles et allume les incendies : on en peut dire autant de l’absence, de l’éloignement, et de la violence des siècles, par rapport aux gloires. […] La Bruyère a dit : « Un homme né chrétien et François se trouve contraint dans la satire : les grands sujets lui sont défendus, il les entame quelquefois et se détourne ensuite sur de petites choses qu’il relève par la beauté de son génie et de son style. » — Molière n’a pas du tout fait ainsi, il ne s’est beaucoup contraint ni devant l’Église ni à l’égard de Versailles, et ne s’est pas épargné les grands sujets. […] Il n’en a pas été ainsi de Scott, qui, pour être de la même famille, ne possédait d’ailleurs ni leur vigueur de combinaison, ni leur portée philosophique, ni leur génie de style.
Rousseau d’Athènes, possédant un style admirable pour les chimères, mais n’ayant pas la moindre connaissance des hommes, ni le moindre tact des réalités, et donnant à sa république idéale des lois en perpétuelle contradiction avec la nature humaine et avec la fondation, la conservation et le but des sociétés. […] C’est le style qui embaume les idées pour l’éternité. […] Elle paraîtrait plus belle encore si elle était plus simplement exposée par Platon, non dans le style de l’école et de l’académie grecques, mais dans le style simple, naïf, limpide et populaire des paraboles évangéliques.
J’ai tenté d’en dérober quelquefois, et autant qu’il convient à ma faiblesse, le style à Racine. […] Soit que le style ferme et modeste de mon billet l’eût prévenu machinalement en ma faveur, soit que mes caractères élégants et mon nom semi-aristocratique eussent eu un attrait non raisonné pour ses yeux, il ne m’avait pas fait faire antichambre une heure aux portes de sa gloire. […] « Lisez », me dit-il en me le rendant, « et, pour épargner votre fatigue et notre temps, lisez seulement les scènes qui sont de nature à me donner une idée nette du style et de l’ouvrage. » J’ouvris le manuscrit et je lus. […] Le style n’est ni prose, ni vers, ni récitatif, ni mélodie : c’est de la pensée fondue au feu du sanctuaire d’un seul jet avec la forme ; c’est le métal de Corinthe de la langue moderne.
. — Il faut que la volonté soit une faculté bien belle et toujours bien fructueuse, pour qu’elle suffise à donner un cachet, un style quelquefois violent à des œuvres méritoires, mais d’un ordre secondaire, comme celles de M. […] Le tableau est mauvais ; pas de style ; mauvaise composition, mauvaise couleur. […] Cela ne manque pas de style, ou plutôt d’une certaine prétention au style.
Bossuet, dans une instruction sur le style oratoire, a écrit : « Les poètes aussi sont de grand secours. […] Gandar, et pour se demander si Henri IV ne devait pas en quelque degré, à cette première éducation, « son style et le tour si français de ses lettres ?
Peu s’en faut même qu’il ne la préconise comme le principe de tout le style historique. […] Je ne saurais accorder non plus que le plus parfait style en histoire doive être si limpide, si incolore, qu’il ressemble à la grande glace de l’exposition, qui laisse voir tous les objets au-delà sans qu’on la voie elle-même ; car remarquez, encore une fois, que les faits de l’histoire ne sont pas tout existants et tout disposés avec ordre indépendamment de celui qui les regarde.
Les romantiques, s’il m’en souvient, lui trouvaient le style un peu pâteux ; c’était leur mot. […] Son style d’abord n’avait pas tout le fil, j’en conviens ; c’est sur le marbre de la tribune qu’il l’a aiguisé, et maintenant sa langue écrite diffère peu, pour le tranchant et pour l’incisif, de sa langue parlée.
Il traite son sujet et ne l’élude pas ; il introduit la discussion dans le récit : le sentiment du haut style est toujours présent comme une image du dieu d’Olympie. […] si l’on est d’un art particulier, tout en restant le confrère et l’ami des artistes, savoir s’élever cependant peu à peu jusqu’à devenir un juge ; si l’on a commencé, au contraire, par être un théoricien pur, un critique, un esthéticien, comme ils disent là-bas, de l’autre côté du Rhin, et si l’on n’est l’homme d’aucun art en particulier, arriver pourtant à comprendre tous les arts dont on est devenu l’organe, non-seulement dans leur lien et leur ensemble, mais de près, un à un, les toucher, les manier jusque dans leurs procédés et leurs moyens, les pratiquer même, en amateur du moins, tellement qu’on semble ensuite par l’intelligence et la sympathie un vrai confrère ; en un mot, conquérir l’autorité sur ses égaux, si l’on a commencé par être confrère et camarade ; ou bien justifier cette autorité, si l’on vient de loin, en montrant bientôt dans le juge un connaisseur initié et familier ; — tout en restant l’homme de la tradition et des grands principes posés dans les œuvres premières des maîtres immortels, tenir compte des changements de mœurs et d’habitudes sociales qui influent profondément sur les formes de l’art lui-même ; unir l’élévation et la souplesse ; avoir en soi la haute mesure et le type toujours présent du grand et du beau, sans prétendre l’immobiliser ; graduer la bienveillance dans l’éloge ; ne pas surfaire, ne jamais laisser indécise la portée vraie et la juste limite des talents ; ne pas seulement écouter et suivre son Académie, la devancer quelquefois (ceci est plus délicat, mais les artistes arrivés aux honneurs académiques et au sommet de leurs vœux, tout occupés qu’ils sont d’ailleurs, et penchés tout le long du jour sur leur toile ou autour de leur marbre, ont besoin parfois d’être avertis) ; être donc l’un des premiers à sentir venir l’air du dehors ; deviner l’innovation féconde, celle qui sera demain le fait avoué et’reconnu ; ne pas chercher à lui complaire avant le temps et avant l’épreuve, mais se bien garder, du haut du pupitre, de lui lancer annuellement l’anathème ; ne pas adorer l’antique jusqu’à repousser le moderne ; admettre ce dernier dans toutes ses variétés, si elles ont leur raison d’être et leur motif légitime ; se tenir dans un rapport continuel avec le vivant, qui monte, s’agite et se renouvelle sans cesse en regard des augustes, mais un peu froides images ; et sans faire fléchir le haut style ni abaisser les colonnes du temple, savoir reconnaître, goûter, nommer au besoin en public tout ce qui est dans le vestibule ou sur les degrés, les genres même et les hommes que l’Académie n’adoptera peut-être jamais pour siens, mais qu’elle n’a pas le droit d’ignorer et qu’elle peut même encourager utilement ou surveiller au dehors ; enfin, si l’on part invariablement des grands dieux, de Phidias et d’Apelle et de Beethoven, ne jamais s’arrêter et s’enchaîner à ce qui y ressemble le moins, qui est le faux noble et le convenu, et savoir atteindre, s’il le faut, sans croire descendre, jusqu’aux genres et aux talents les plus légers et les plus contemporains, pourvu qu’ils soient vrais et qu’un souffle sincère les anime.
À vrai dire, toute ornementation un peu élégante jure avec le style primitif des Évangiles. […] — L’Imprimerie Impériale, qui, dans cette affaire, est allée par le grand chemin, une fois mise hors de cause, la question générale reste entière : Quel est l’art, le style de dessin, le plus convenable à employer dans l’accompagnement et l’encadrement des textes sacrés évangéliques ?
Un jeune homme de mérite, pauvre, cherchait du travail dans les journaux ; il s’adressa à Mercier qui dirigeait alors les Annales patriotiques et littéraires (1795), et dont le langage philanthropique lui avait inspiré confiance : « Je lui communiquai, nous dit le jeune homme, quelques morceaux que j’avais écrits : il parut enchanté de ma manière ; il y trouva tout réuni, force de style, imagination, philosophie. […] Le style est partout approprié au sujet, il est succulent.
Je ne veux que votre style. » M. […] Despréaux a tous les papiers. » En accordant M. de Valincour comme historiographe adjoint, le roi eut donc bien soin de marquer à Despréaux qu’il entendait que lui seul eût « la plume et le style. » La fonction du nouveau collègue devait se borner à ramasser des mémoires ; on ne voit pas qu’il y ait été bien diligent, à moins que les papiers n’aient été détruits dans l’incendie qui dévora sa bibliothèque.
Les amoureux de la Nouvelle Héloïse échangent, pendant quatre volumes, des morceaux de style, et là-dessus une personne, « non seulement mesurée, mais compassée », la comtesse de Blot, dans un cercle chez la duchesse de Chartres, s’écrie « qu’à moins d’une vertu supérieure une femme vraiment sensible ne pourrait rien refuser à la passion de Rousseau304 ». […] Du public aux princes, et des princes au public, en prose, en vers, par les compliments de fête, par les réponses officielles, depuis le style des édits royaux jusqu’aux chansons des dames de la halle, c’est un échange continuel de grâces et de tendresses.
Impuissante à créer, elle excelle à noter ; et si elle a le style le moins artiste du monde, comme écrivain d’idées elle est supérieure. Ne lui demandons ni couleur ni énergie sensible, ni rythme expressif, ni forme en un mot ; mais une parole agile, souple, claire qui forme d’ingénieuses combinaisons de signes, qui dégage avec aisance des idées toujours intéressantes, souvent nouvelles ou fécondes, voilà ce que Mme de Staël nous offre : son style, c’est de l’intelligence parlée.
Il est si obtus que, voulant se déclarer à une femme jeune, spirituelle, nullement dévote, éminemment « laïque », il y emploie le style des Manuels de piété et ne conçoit pas ce qu’un tel langage, appliqué à une telle matière, doit avoir nécessairement, pour cette jeune femme, de répugnant et de souverainement ridicule. […] Continuons. « Tartuffe, disais-je, est si obtus que, voulant se déclarer à une femme jeune, intelligente, nullement dévote, éminemment laïque, il y emploie le style des manuels de piété. » Mais veut-on qu’il se démasque tout de suite ?
Desjardins rédige en style de séminariste bilieux ; il est ignorant (jusqu’à prendre les philosophes grecs comme types d’altruistes alors qu’aucun n’a envisagé la morale autrement que comme une éthique) ; il est naïf (jusqu’à se féliciter des séances politiques où la droite et la gauche s’entr’applaudissent, citant comme telles l’incident où la loyauté de M. de Cazenove de Pradines fut saluée par tous ses collègues, — ce qui est faux, car il fut nargué par la droite, — et l’intervention de l’évêque d’Angers dans la politique d’Extrême-Orient — ce qui ne provoquait l’admiration d’aucun député informé, attendu que Mgr Freppel, chacun le savait, n’agissait que pour défendre ses missionnaires) ; il est encore obséquieux avec les gens en place (jusqu’à cette platitude : « Nous avons par bonheur un ministre de l’instruction publique à tendances idéalistes »). — Mais un autre que M. […] Cette fiction déconcertante est rédigée en un style inégal, tantôt hardi, savoureux et novateur, tantôt poncif et mal correct.
Sur quoi Franklin répondait spirituellement à Hume, et en style d’économiste : Votre compliment d’or et de sagesse est très obligeant pour moi, mais un peu injuste pour votre pays. […] Lui qui, à certains égards, a paru si bien sentir et a même imité en quelques paraboles le style de l’Évangile, il ne sent bien ni Job ni David.
La vision des plus grises réalités est impitoyablement nette ; la force graphique du style en fait saillir aux yeux les ternes linéaments, — et à cette évidence se joint un sentiment du mystérieux, du spectral et de l’hallucinatoire, qui par un merveilleux alliage, infuse, au vrai, tout le noir effroi du rêve. […] La sordide saleté des mansardes, où rôde un solitaire, qu’empeste toute une famille, la puanteur des escaliers pauvres, la nourriture immangeable et rare, la nausée et la rage que met dans la tête le vide de l’estomac, l’existence farouche du déclassé dans l’étincellement des capitales, requièrent l’âpre insistance de son style ; et au-delà de ces choses physiques, il a vu les vices et les atroces indélicatesses auxquelles condamne l’inclémence de ce sort.
Le peintre de genre de son côté regarde la peinture historique comme un genre romanesque, où il n’y a ni vraisemblance ni vérité, où tout est outré ; qui n’a rien de commun avec la nature ; où la fausseté se décèle et dans les caractères exagérés qui n’ont existé nulle part, et dans les incidents qui sont tous d’imagination ; et dans le sujet entier que l’artiste n’a jamais vu hors de sa tête creuse ; et dans les détails qu’il a pris on ne sait où, et dans ce style qu’on appelle grand et sublime, et qui n’a point de modèle en nature, et dans les actions et les mouvements des figures, si loin des actions et des mouvements réels. […] Chercher entre ses membres des oppositions purement techniques, y sacrifier la vérité rigoureuse de son action, voilà l’origine du style antithétique et petit.
Ces lettres se distinguent par une parfaite élégance de diction et une douceur de ton exquise ; il y avait du Fénelon dans le style de Rabaut comme dans son cœur.
En se rappelant les remarquables récits du fils, on apprécie mieux par comparaison les mérites qui recommandent ceux du père, la mesure parfaite du ton, ce style d’un choix si épuré, d’une aristocratie si légitime, et toute cette physionomie, si rare de nos jours, qui caractérise, dans les lettres, la postérité prête à s’éteindre, des Chesterfield, des Nivernais, des Boufflers.
Si l’on n’y remarque aucune vue d’ensemble bien nouvelle sur nos épopées, s’il se hâte trop, selon nous, de rejeter dans un horizon fabuleux ce qu’on pourrait appeler les grosses questions à ce sujet, on y trouve en revanche beaucoup de détails piquants, des rapprochements d’une scrupuleuse exactitude, le tout exprimé en ce style élégant et légèrement épigrammatique dont M.
Ils n’ont point encore de littérature formée : mais quand leurs magistrats sont appelés à s’adresser, de quelque manière, à l’opinion publique, ils possèdent éminemment le don de remuer toutes les affections de l’âme, par l’expression des vérités simples et des sentiments purs ; et c’est déjà connaître les plus utiles secrets du style.
Placer ses Héros dans des circonstances embarrassantes, les en tirer sans effort ; étonner le Spectateur par des sentimens, des réponses, des raisonnemens imprévus ; réunir à la fois l’élévation des pensées, la grandeur des images, la variété & l’énergie du style : tout cela n’étoit qu’un jeu pour un Génie devant qui les difficultés s’applanissoient d’elles-mêmes.
Peut-être sera-t-on bien aise de trouver ici un échantillon du style polémique de ce célebre Ecrivain.
Le grand art, l’art sérieux est celui où se maintient et se manifeste cette unité ; l’art des « décadents « et des « déséquilibrés », dont notre époque nous fournira plus d’un exemple, est celui où cette unité disparaît au profit des jeux d’imagination et de style, du culte exclusif de la forme.
La composition du Moïse sauvé est languissante, le vers lâche et prosaïque, le style plein d’antithèses et de mauvais goût.
On a chaud de toute cette bonne et grasse couleur qu’Hebel étend sur la nature et les choses visibles ; on est encore tout attendri du sentiment moral qui spiritualise et poétise cette couleur d’école hollandaise appliquée sur des sujets allemands, et voilà que de ces fomentations délicieuses pour l’imagination et pour le cœur on entre dans le froid de la nudité et de la pauvreté réunies, — pauvreté d’idées, nudité de style, toutes les indigences à la fois !
Mais le charme de style en est incomparable. […] Si le charme de style en est délicatement senti dans le dernier de ces deux passages, l’idée maîtresse n’en est pas moins heureusement saisie dans le premier. […] Justesse et clarté, force et précision, ampleur de la phrase, mouvement, véhémence, le style de Lamennais a toutes les qualités d’un grand style, et cependant… je ne sais pourquoi ni comment toutes ces qualités ont en lui quelque chose d’anonyme et d’impersonnel. […] La correction un peu froide et la sobriété de son style, dont il affectait, quand il écrivait pour la scène, de retrancher les moindres ornements, y font-elles peut être l’effet de la sécheresse ? […] Ou bien encore, parlerai-je de la facture de son vers et de la trame de son style ?
Balzac et ses œuvres (3e partie) I Si nous descendons plus bas dans les formules du style et dans la combinaison bourgeoise de ses romans, nous arrivons à la faute vulgaire du Père Goriot et de ses deux filles. […] Vous y verriez un baromètre à capucin qui sort quand il pleut, des gravures exécrables qui ôtent l’appétit, toutes encadrées en bois noir verni à filets dorés ; un cartel en écaille incrustée de cuivre ; un poêle vert, des quinquets d’Argand où la poussière se combine avec l’huile, une longue table couverte en toile cirée, assez grasse pour qu’un facétieux externe y écrive son nom en se servant de son doigt comme de style, des chaises estropiées, de petits paillassons piteux en sparterie qui se déroule toujours sans se perdre jamais, puis des chaufferettes misérables à trous cassés, à charnières défaites, dont le bois se carbonise. […] Elle écrivit à cette jeune femme une lettre dans l’ancien style, et la remit à Eugène, en lui disant que, s’il réussissait auprès de la vicomtesse, elle lui ferait retrouver ses autres parents. […] Pour décider mes parents à venir au collège, je leur écrivais des épîtres pleines de sentiments, peut-être emphatiquement exprimés, mais ces lettres auraient-elles dû m’attirer les reproches de ma mère qui me réprimandait avec ironie sur mon style ? […] X Ce style consacré continue ainsi jusqu’au retour de Balzac en Touraine, où ses parents le ramènent après le retour de Napoléon de l’île d’Elbe en 1815.
Jusque dans ses articles, mais surtout dans ses lettres et dans ses romans, dans ses recueils de petits contes et de « variétés », il ne rougit point d’avoir le style « dévot », à la façon d’un curé de campagne. […] L’écrivain qu’il aima le plus quand il commença à savoir lire, ce fut La Bruyère, et son style en demeura pour toujours imprégné. […] Il est aussi préoccupé, et presque à l’excès, de l’harmonie du style, très rigoureux sur ce point, sévère aux cacophonies (cf. […] Au reste, une souplesse incroyable, une extrême diversité de ton et d’accent depuis la manière concise, à petites phrases courtes et savoureuses, et depuis la façon liée, serrée, pressante du style démonstratif, jusqu’au style largement périodique de l’éloquence épandue, et jusqu’à la grâce inventée et non analysable de l’expression proprement poétique… Bref, il me semble avoir toute la gamme, et la grâce et la force ensemble, et toujours, toujours le mouvement, et toujours aussi la belle transparence, la clarté lumineuse et sereine.
Parmi les choses imitées de Corneille, on y rencontrait des traits comme ceux-ci : J’ai besoin d’un époux illustre et magnanime, Qui m’allie à la gloire et me tire du crime ; Dont la vertu pour moi calme les factieux, Ecarte la tempête et désarme les dieux4… et des maximes de ce style : Et l’aveugle terreur, quand on doit trébucher, Précipite la chute, au lieu de l’empêcher5. […] La vérité cornélienne n’a guère qu’une expression, une forme, un style : c’est le sublime. […] La variété de ce style, qui en est la qualité la plus éminente, cette force où la force sied, cet éclat tempéré, ces grâces, cette souplesse, cette mollesse même où la situation le veut, qu’est-ce autre chose que la conformité du langage dramatique avec la vie ? […] On a dit qu’il avait créé d’innombrables rapports de mots ; qu’il avait été tout à la fois le plus hardi et le plus sage des novateurs ; qu’aucun n’a plus risqué que lui ; qu’il excelle dans le style elliptique. […] Cette variété, image de la diversité des caractères et des passions, échappe à plus d’un esprit trop prévenu pour certaines qualités particulières du style, pour la force, par exemple, ou pour l’éclat des figures.
L’esthétique est ainsi dominée et dirigée, et souvent, plus que la conduite, par les croyances morales, sociales, religieuses — car le style, comme l’accent de la voix, est plus spontané que l’action. […] On dit que Buffon demandait, en parlant de Montesquieu : « A-t-il du style ? […] De même pour Bossuet et Pascal, ces créateurs de notre langue française actuelle, qui ont été les initiateurs du style moderne, caractérisé par une grande familiarité de l’expression unie à la puissance de l’image et de l’idée51.Après la Révolution, quand la foi au sens divin des livres sacrés eut été ébranlée, ce fut le moment où l’on put commencer à comprendre et à commenter leur valeur littéraire. […] Le matérialisme de l’expression n’est pas toujours incompatible avec une certaine mysticité du sentiment ; c’est le désir de l’idéal, l’attente de Dieu qui est exprimée dans le livre de Job par cette image violente : « Oui, je le sais, il apparaîtra sur la terre… Mes reins se consument d’attente au-dedans de moi. » Ce qui dans le style est matériel et violent pour l’un ne l’est pas pour l’autre, car chaque sensibilité est la mesure de ses propres sensations ; ce qui est pénible pour un homme à sensibilité délicate est précisément ce qui commencera chez un autre à éveiller l’intérêt. […] Pour comprendre comme Pascal s’était fortement pénétré du style biblique il suffit de lire les traductions qu’il a faites dans les Pensées, de divers passages des prophètes, surtout celles du chapitre cxix d’Isaïe : « Ecoutez, peuples éloignés. » C’est, dit M.
Ce livre est un rapport, richement documenté, pesamment motivé, rédigé en style de procès-verbal, avec une impartialité suffisante. […] Sac au dos est un exercice de style dont l’auteur semble avoir entrepris d’écrire le savoureux poème de la peur, de la colique, de la crasse et de la diarrhée. […] C’est sur ce ponton qu’il écrivit de verve, à bride abattue, le récit de ses aventures, d’un style vif, pittoresque, intrépide, style d’un homme d’action en qui sont restées d’adorables candeurs d’enfant, style d’un militaire lettré que séduit la victoire, qu’enchante le beau sexe et dont l’âme belliqueuse et galante, bien française, patiente, sentimentale et gaie, plonge par ses racines jusqu’aux origines lointaines d’une race où n’est pas éteinte la lignée des chevaliers et des troubadours. […] Je ne voudrais pas être injuste pour ce livre où il y a tant de science, tant d’allégresse guerrière et dont le style est remarquablement précis et net. […] Ce livre, que vous aimerez dès que vous l’aurez ouvert, est plein de cette pensée : on la sent, bien que l’auteur se défende de toute prédication, on la sent qui circule sous le tissu du style coloré, alerte et pimpant.
Parfois, les historiens de la peinture parlent de leurs sujets en un style propre à effrayer tous ceux qui gardent encore quelques soucis esthétiques. […] Le style en est souple, léger, transparent, docile au contour des objets, exactement ajusté à l’importance des choses, style de femme élégante et drôle, qui fait vite et bien, qui aime ce qui est gracieux et « bon enfant », qui déteste tout ce qui bouffe, tout ce qui gondole, tout ce qui exagère et déforme. […] Le style de Gyp ressemble à ces corsages-blouses, dont la soie molle indique aux yeux un libre dessin et laisse à l’imagination une agréable liberté. […] On remarque aisément, par cet exemple, les qualités et les défauts du style de M. […] Le style en est apprêté et agréable, comme ces brocarts où les teinturiers anglais jettent des iris cueillis aux vergers de Tennyson et de Burne-Jones.
Au-dessus, une glace dans le mur, entourage de bois peint en blanc, de style Premier Empire des plus sobres, et bordée de cartes, d’enveloppes, de menus illustrés peu répondus. […] Comme construction, le bâtiment était de style gothique, mais assez délabré et tout entier crépi de plâtre grossier ; avec la charpente extérieure peinte en rouge foncé. Les fenêtres, de bon style anglais du xve siècle, avaient des carreaux en forme de losanges réunis par un treillis de plomb. […] Mais Racine savait voiler et atténuer ces sacrifices nécessaires sous son style harmonieux, le plus harmonieux de la langue française, sans jamais en affaiblir les effets. […] , — mais d’un style, d’une syntaxe, d’un parfait, d’un net, d’un clair !
Profondément estimé en France de tous ceux qui avaient lu quelques-uns de ses morceaux de morale et de critique dans lesquels une pensée si forte et si fine se revêtait d’un style ingénieux et savant, il laisse un vide bien plus grand que la place même qu’il occupait, et il serait impossible de donner idée de la nature d’une telle perte à quiconque ne l’a pas vu au sein de ce monde un peu extérieur à la France, mais si étendu et si vivant, dont il était l’une des lumières.
Le style en paraît verbeux, le ton guindé, les idées factices ; il faut un commentaire ou une préface pour comprendre que cet emportement a été de la chaleur, et cette déclamation de l’éloquence.
C’est là du bon style ; mais il est fâcheux encore que toutes les saines pensées et les maximes justes de la pièce se trouvent rejetées dans la bouche de ce triste Féline, et qu’elles s’y trouvent (notez-le), non pas comme des ressorts de son rôle, mais à titre même de choses justes ; il devient ainsi par moments une manière d’Ariste véritable ; c’est Tartufe et Cléante mis en un, s’il est permis d’amener ici ces grands noms
C’est que, d’instinct, le nouveau venu marchait sans balancier sur la corde raide du paradoxe ; il trouvait la formule d’un style clownique, désarticulé, chahutant et cascadeur ; des mots alertes, des phrases retroussées, lestes, pimpantes, décolletées, agaçant l’œil, qui complétaient et servaient merveilleusement son esprit incisif, mordant, railleur, prompt à la riposte et rompu à toutes les charges, à tous les argots d’atelier, de coulisses, de boulevard.
Il n’écrit ni vers sonores ou martelés, ni strophes à combinaisons savantes ; il n’est ni naturiste ni symboliste ; son style est un mélange de précision et de gaucherie, l’une naturelle, l’autre voulue.
Si son style manque quelquefois de noblesse & de correction, il est du moins constamment simple & plein de clarté, semé de traits vifs, énergiques, attachant par un ton de franchise & de liberté qui ajoute à l’intérêt des matieres.
A une heureuse habitude de réfléchir, il joignoit le talent de donner à ses idées une tournure saisissante, & d’embellir, par la vivacité du style, le fruit de ses profondes méditations.
Conversationniste éblouissant, qui parle comme il écrit et qui écrit comme il parle (et quand on a dit cela on ne sait pas ce que l’on a vanté le plus de sa conversation ou de son style), cet esprit multicolore a toujours eu la facilité du génie, même les jours où il n’en eut pas la puissance.
Ces ornements du style naquirent, dans l’origine, de l’indigence du langage.
Parmi les-bas-reliefs, il recherchait ceux dont le style était le plus ancien ; il en faisait autant au sujet des médailles, et vantait particulièrement le naturel et l’élégance du trait des figures peintes sur les vases dits étrusques. […] Les fréquentes recommandations que faisait David à ses élèves, de se guider sur les ouvrages de l’art grec, et particulièrement sur ceux du style antérieur à Phidias, avaient porté leurs fruits. […] Le maître lui-même ne fut pas épargné : les Sabines, même avant d’être achevées, furent critiquées avec amertume par les penseurs, qui ne tardèrent pas à signaler cet ouvrage comme fort peu avancé par son style moderne. […] Rarement il venait corriger ses élèves sans qu’il leur parlât de sa nouvelle composition, des différentes idées qui s’étaient offertes à son esprit, et de la sévérité de style qu’il comptait mettre dans l’exécution de ce dernier ouvrage. […] En cette occasion, David redoubla d’efforts pour purifier encore son dessin et son style, et il était parvenu à ébaucher presque entièrement son tableau, lorsque des événements politiques de la plus haute importance en suspendirent l’exécution.
traduit par Tola Dorian L’art aryen Récemment, voulant représenter Lohengrin à Paris, le directeur du théâtre parisien de l’Opéra-Comique est venu en Allemagne étudier le style Wagnérien […] Faisons donc au moins ce dont nous sommes capables, puisqu’un maître de l’art nous a donné la grande parole ; et rappelons-nous ces mots de ses écrits posthumes : « S’il se confirme que l’attention et l’espérance des nations » étrangères se tourne vers le déploiement de l’art allemand sur le terrain de la poésie et de la musique, nous pouvons admettre qu’elles tiennent avant tout à l’originalité et à la spécialité non troublée de ce déploiement ; puisque sans cela elles ne recevraient pas de nous de nouvelles impulsions, je crois que, à ce point de vue, il ne serait pas moins profitable à nos voisins qu’à nous-mêmes de voir former fidèlement par nous un vrai style germain. » Ce style germain, c’est l’œuvre d’art Aryenne.
Il est très probable que le Virgile que nous lisons ressemble à ce qu’aurait pu être Villon réduit au style et au goût de Malherbe, ou à ce qu’est devenu sous la plume des copistes du xve siècle le rude Joinville du xiiie . […] Le style frivole et recherché passe des Caffés, jusqu’aux tribunaux les plus graves, et si Dieu n’y met la main, la Chaire des Prédicateurs sera bientôt infectée de la même contagion. […] Si l’on n’admet pas, comme jadis, l’autorité absolue de l’usage, du bel usage, on n’a pour guide que son propre goût ; mais on aurait plus de chances de le faire prévaloir, à écrire en beau style quelques livres de forte littérature qu’à recueillir des anecdotes philologiques.
Ils ont complètement oublié que la scène française n’avait acquis sa réputation que par le choix éclairé des ouvrages qui se recommandaient d’eux-mêmes par la pureté du style, l’énergie de la pensée, le naturel du dialogue et par des effets dramatiques ingénieusement amenés. […] Après le choix du sujet, le premier but que se propose l’auteur est d’en tirer une conséquence morale ; le second d’intéresser au sort de tels ou tels héros, connus ou inconnus, vertueux ou coupables, par des qualités qui les élèvent au-dessus du vulgaire ; le troisième de les environner de figures secondaires propres à faire ressortir leur caractère ou à émouvoir leurs passions ; le quatrième de faire jouer tous ces personnages dans la chaîne d’une intrigue claire et pourtant variée ; le cinquième de les faire parler selon le temps, la circonstance, leur rang dans le monde, leur caractère bien exposé, dans un style simple, naturel, énergique et toujours élégant ; enfin, Monsieur, de les faire arriver à une catastrophe qui n’inspire pas une trop grande horreur, ou à un dénouement qui ne blesse ni la raison, ni la décence. […] Vous vous imaginez à tort que la trivialité est le naturel, et que de vieux mots, qui ne sont plus dans la langue, ajoutent beaucoup à la couleur du style.
Ce n’est pas du style de Voltaire, c’est du style de la tragédie de cette époque, voilà tout. […] Mon très lettré ami M. de Couynart me fait remarquer : 1° qu’en 1680-1685 des essais assez nombreux d’acclimatation de Shakespeare en France avaient été faits et que La Fontaine avait pu jeter les yeux sur quelque oeuvre du dramatiste anglais 2° que la tragi-comédie de Statira, tirée par Pradon de la Cassandre de La Calprenède, jouée à la fin de 1679, avait été incriminée de mélange de trivialité et de tragique, et que, du reste, Pradon en 1684 ayant, par un factum, exercé des représailles contre Boileau, La Fontaine a pu, réveillé par ce factum contre son ami, se souvenir de Statira et y faire cette allusion prolongée que nous venons de voir ; M. de Couynart penche pour la seconde de ces hypothèses J’y pencherais aussi, sans doute ; mais d’abord en 1684 Boileau et La Fontaine, compétiteurs à l’Académie, ne devaient pas être si bien ensemble que La Fontaine voulût venger Boileau de Pradon avec un tel éclat ; ensuite Statira présente-t-elle en effet un tel mélange de haut style et de bassesses ?
Le style, c’est l’homme. […] Le ciel est gris comme le style d’un homme politique. […] Par là, c’est une bonne maîtresse de style. […] Jules Legras compare son style d’aujourd’hui au style de ses dissertations de licence et de ses exercices d’agrégation, il doit remarquer en lui-même (si modeste qu’il soit) un heureux changement. […] Il alourdit de « documents » la trame aisée de son style.
Le style et la versification de M. […] C’est de la prose librement et secrètement rythmée… » — Et telles étaient, en effet, les démarches de style de la vieille légende du chanteur trégorrois. […] C’est tout ; et autant dire que le puriste abbé d’Olivet a trouvé le style et la langue d’Iphigénie quasi irréprochables. […] Voilà qui est pour ravir l’auteur du Travail du style enseigné par les corrections des grands écrivains. […] C’est ce qu’on joue là, qui, dès qu’on y mettra plus de style, s’installera tranquillement à la Comédie française à la place de la Tragédie vénérable et épuisée.
Le style de l’école, dans le pittoresque ? […] Cependant, le style lui était un dur travail ; il en parle comme d’un supplice. […] Mais, en lui laissant sa laideur, il l’a vêtue de beau style. […] Le style : celui qu’il fallait. […] Un style obéissant à l’idée, et qui accompagne son chemin, sa course, voire ses bonds.
De cette méthode, que j’ai voulu caractériser avec détail, il est peut-être résulté une chose : c’est que mes tragédies dans leur ensemble, et malgré les nombreux défauts que j’y vois, sans compter tous ceux que peut-être je n’y vois pas, ont du moins le mérite d’être, ou, si l’on veut, de paraître pour la plupart venues d’un seul jet et rattachées à un seul nœud, de telle sorte que les pensées, le style, l’action du cinquième acte s’identifient étroitement avec la disposition, le style, les pensées du quatrième, et ainsi de suite, en remontant jusqu’aux premiers vers du premier, ce qui a du moins l’avantage de provoquer, en la soutenant, l’attention de l’auditeur, et d’entretenir la chaleur de l’action. […] Chaque jour mon cœur s’élève, s’adoucit, s’améliore en elle, et j’oserai dire, j’oserai croire qu’il en est d’elle comme de moi, et que son cœur, en s’appuyant sur le mien, y puise une force nouvelle. » XIII Deux écrivains très remarquables, le premier par son zèle ardent pour la vérité, le second par le talent et le style, M. de Reumont, ministre de Prusse en Toscane, et M. […] Il faut citer cette lettre tout entière, avec ses incorrections de style et son orthographe ; on y verra ce que la société italienne pensait de cette singulière aventure.
» Dimanche 27 février Aujourd’hui, au Grenier, on parlait, du beau port de corps, du style des égoutiers, des vidangeurs, et en général de tous les gens qui portent de grandes et de lourdes bottes : le soulèvement des grandes bottes, amenant un noble soulèvement des épaules dans la poitrine rejetée en arrière. […] Au fond, dans le roman, la grande difficulté pour les écrivains amoureux de leur art, c’est le dosage juste de la littérature et de la vie, — que la recherche excessive du style, il faut bien le reconnaître, fait moins vivante. […] Vendredi 9 septembre Aujourd’hui, la princesse parlait de son adoration de Versailles, disant qu’elle voudrait s’y faire construire une maison dans le style de Louis XIV, et où tout serait à l’imitation du temps, jusqu’aux crémones des fenêtres, et soudain s’interrompant, elle reprend : « Enfin là, à Versailles, je parle bas comme dans une église ! […] Il vient de la mêlée de la délicatesse des sentiments, du style et de l’action, avec son réalisme théâtral.
Son style, sorte de nuée nocturne, s’illumine coup sur coup d’images qui empourprent subitement tout l’abîme de cette pensée noire et qui vous font dire : Il éclaire ! […] Tacite applique son style sur une épaule d’empereur, et la marque reste. […] De là le soudain, faisant irruption à chaque instant dans ses personnages, dans son action, dans son style ; l’imprévu, magnifique aventure. […] Avoir, par peur de Boileau, éteint bien vite le lumineux style de l’Étourdi, avoir, par crainte des prêtres, écrit trop peu de scènes comme le Pauvre de Don Juan, c’est là la lacune de Molière.
La forme est pour lui la chose capitale, « ôtez, dit-il à tous ces grands hommes cette simple et petite chose, le style, et de Voltaire, de Pascal, de Boileau, de Bossuet, de Fénelon, de Racine, de Corneille, de La Fontaine, de Molière, de ces maîtres, que vous restera-t-il ? — Ce qui reste d’Homère après avoir passé par Bitaubé ». — La vérité de l’observation et la force et l’originalité de la pensée, sont choses secondaires, qui ne comptent pas. — « La forme est chose plus absolue qu’on ne pense… Tout art qui veut vivre doit commencer par bien se poser à lui-même les questions de forme de langage et de style… Le style est la clef de l’avenir… Sans le style vous pouvez avoir le succès du moment, l’applaudissement, le bruit, la fanfare, les couronnes, l’acclamation enivrée des multitudes, vous n’aurez pas le vrai triomphe, la vraie gloire, la vraie conquête, le vrai laurier, comme dit Cicéron : insignia victoriæ, non victoriam 27. » Victor Cousin, le romantique de la philosophie, et Victor Hugo, le philosophe du romantisme, servirent à la bourgeoisie l’espèce de philosophie et de littérature qu’elle demandait.
Buffon, qui estimait Massillon le premier de nos prosateurs, semble l’avoir eu présent à la pensée lorsque, dans son Discours sur le style, il a dit : Pour bien écrire, il faut donc posséder pleinement son sujet ; il faut y réfléchir assez pour voir clairement l’ordre de ses pensées et en former une suite, une chaîne continue, dont chaque point représente une idée ; et, lorsqu’on aura pris la plume, il faudra la conduire successivement sur ce premier trait, sans lui permettre de s’en écarter, sans l’appuyer trop inégalement, sans lui donner d’autre mouvement que relui qui sera déterminé par l’espace qu’elle doit parcourir. C’est en cela que consiste la sévérité du style.
Kervyn de Lettenhove se flatte d’avoir retrouvé dans la bibliothèque de Bourgogne à Bruxelles deux poèmes inconnus et inédits de Froissart, la Court de may et le Trésor amoureux ; ni l’un ni l’autre, il est vrai, ne portent le nom de l’auteur ; « mais pour quiconque a étudié Froissart, dit M. de Lettenhove, il est impossible de ne pas y reconnaître aussitôt son style ». Cette sorte de preuve, n’en déplaise au savant investigateur, est bien périlleuse, bien décevante, prête bien à l’illusion, et peut tromper même des gens de goût. — Froissart, en poésie, n’a pas de style, il n’a qu’un genre qui est celui de son temps, le genre en vogue à cette date ; et ce genre, qui nous dit que d’autres à côté de lui ne le cultivaient pas avec autant de facilité ?
Ainsi, prêchant devant la reine mère en 1658 ou 1659 le Panégyrique de sainte Thérèse, Bossuet, excité peut-être par les recherches de style de la sainte espagnole, et développant à plaisir un passage de Tertullien qui dit que Jésus, avant de mourir, voulut se rassasier par la volupté de la patience, ne craindra pas d’ajouter : Ne diriez-vous pas, chrétiens, que, selon le sentiment de ce Père, toute la vie du Sauveur était un festin dont tous les mets étaient des tourments ? […] De même qu’on voit un grand fleuve qui retient encore, coulant dans la plaine, cette force violente et impétueuse qu’il avait acquise aux montagnes d’où il tire son origine : ainsi cette vertu céleste, qui est contenue dans les écrits de saint Paul, même dans cette simplicité de style conserve toute la vigueur qu’elle apporte du ciel d’où elle descend.
Les lettres qu’il écrit durant le temps de ce séjour à Paris à son ami le chanoine Favart nous peignent à ravir et au naturel sa situation d’esprit : « Vous connaîtrez, si je ne me trompe, au style de cette lettre, dit-il dès les premiers jours, que je suis un peu sombre ; il est vrai que je le suis : que sert de dissimuler ? […] S’il avait vécu à Paris, sa plume élégante et qui cherchait des sujets où s’employer, eût peut-être aspiré à l’histoire, l’histoire écrite en beau style et traitée comme on l’entendait alors : « Je me serais hasardé à composer une histoire de quelqu’un de nos rois. » Mais vivant en province, loin des secours et des riches dépôts, il finit par s’accommoder très bien de cet obstacle à un plus grand travail, et sauf quelques heures d’étude facile dans le cabinet, il passa une bonne partie de sa vie à l’ombre dans son jardin, au jeu, aux agréables propos et en légères collations.
Pourtant, par son jugement plein et sa ferme démarche d’esprit, par son style sain, grave et scrupuleux, et qui eut même son éclat d’emprunt, il mérite estime et souvenir comme tout ancien précepteur qui a été utile en son temps ; l’histoire littéraire lui doit de le placer toujours à la suite de Montaigne, comme à la suite de Pascal on met Nicole, — comme autrefois on mettait à côté de La Rochefoucauld M. […] À propos de certaines locutions de la langue française, à l’article faire croire ou faire accroire, Scipion Du Pleix, dans sa polémique contre les novateurs, disait : « Il me souvient que René Charron, Parisien (que j’ai connu familièrement en ma jeunesse, lui étant théologal à Condom), homme plus signalé par la pureté de son style que par celle de sa croyance, rejetait et condamnait ce verbe accroire et disait toujours faire croire.
La lettre suivante à Mme de Grammont, qui est de huit jours après, se ressent encore de cette joie, mais elle est plus courte : « Mon cœur, je ne la puis faire plus longue, parce que je vais monter à cheval. » Avec cette lettre, Henri envoyait à la comtesse une copie de celle que la reine Élisabeth avait adressée à Henri III au sujet de son accommodement avec les ligueurs : « Vous y verrez, dit-il, un brave langage et un plaisant style. » Et, en effet, dans cette lettre énergique et d’une âme royale, Élisabeth faisait honte à Henri III de sa lâcheté à se défendre et de sa condescendance à des rebelles : Mon Dieu ! […] Ce style généreux allait à Henri et aussi à la comtesse chevaleresque, qui savait au besoin faire preuve de virilité et de vaillance.
Petitot, dans sa collection de mémoires, dit que si l’on compare ce dernier ouvrage aux autres écrits du duc de Rohan, « on y reconnaît le même style, la même manière de présenter les choses ». C’est tout le contraire qu’il faut dire : on y retrouve une manière d’exposition plus générale qu’il n’est habituel à Rohan ; il y a aussi plus d’images dans le style, plus de littérature, si je puis dire, et quantité d’expressions et de locutions qui ne sont point et ne peuvent être de lui.
Gustave Flaubert des autres observateurs plus ou moins exacts qui, de nos jours, se piquent de rendre en conscience la seule réalité, et qui parfois y réussissent ; il a le style. […] Voilà mes objections à un livre dont je prise très haut d’ailleurs les mérites, observation, style (sauf quelques taches), dessin et composition.
Nous sommes comme des Romains du ive ou du ve siècle qui viendraient disserter à perte de vue, en style africain, sur des billets trouvés dans la cassette d’Auguste, de Pollion et de Mécènes. […] Mme des Ursins écrit bien ; elle écrit d’un grand style, sa phrase a grande tournure, et pourtant on s’aperçoit à certains mots, à certaines locutions qui échappent à sa plume, qu’elle est, depuis des années, absente de France et qu’elle est rarement venue s’y retremper.
La partieà laquelle vous vouliez m’attacher est, sans contredit, celle qui m’eût présenté le plus de charmes ; mais, même dans cette partie (style d’employé), un journaliste qui craint le scandale devient bientôt froid, et c’est être ridicule. […] Il donne encore d’autres raisons plus justes de son refus, son peu d’habitude du théâtre, son peu de fonds en connaissances classiques : « Enfin, j’ai bien fouillé dans tous les plis de mon cerveau, et il ne me semble point y trouver cette forme légère, ces tournures piquantes, cette facilité de style qui rendent un article agréable aux lecteurs, et permettent à celui qui les possède de parler cent fois de la même chose en paraissanttoujours nouveau.
Histoire (composition et style historique). […] C’est l’expression dont on s’est servi dans le Moniteur es parlant de lui le lendemain de sa mort mais aussi les plus dénués de la faculté du style qui fût jamais.
Si Collin d’Harleville avait eu du style, et s’il avait fait de mieux en mieux dans le genre du Vieux Célibataire, on aurait pu l’appeler chez nous un demi-Térence ; mais il est resté au quart du chemin. […] Ce donc au commencement d’une phrase, et qui semble marquer le pas comme si l’on frappait en même temps du talon, est un reste du style moyen âge, gothique ou chevaleresque, mais n’est pas du tout de la langue de Térence ni du langage d’une mourante.
Il a dans la pensée un type de théâtre à lui, une scène idéale de magnificence et d’éclat, de poésie en vers, de style orné et rehaussé d’images, de passion et de fantaisie luxuriante, d’enchantement perpétuel et de féerie ; il y admet la convention, le masque, le chant, la cadence et la déclamation quand ce sont des vers, la décoration fréquente et renouvelée, un mélange brillant, grandiose, capricieux et animé, qui est le contraire de la réalité et de la prose : et le voilà obligé de juger des tragédies modernes qui ne ressemblent plus au Cid et qui se ressemblent toutes, des comédies applaudies du public, et qui ne lui semblent, à lui, que « des opéras-comiques en cinq actes, sans couplets et sans airs » ; ou bien de vrais opéras-comiques en vogue, « d’une musique agréable et légère, mais qui lui semble tourner trop au quadrille. » Il n’est pas de l’avis du public, et il est obligé dans ses jugements de compter avec le public. […] pourtant il ne faudrait pas trop dire de mal des maniérés : ce sont des gens de beaucoup de talent et d’invention, qui ont eu le tort de venir lorsque tous les magnifiques lieux communs, fonds du bon sens humain, avaient été exploités par les maîtres d’une façon supérieure : ne voulant pas être copistes, ils ont tâché de renouveler la face de l’art par la grâce, la délicatesse, le trait les mille coquetteries du style ; le riche filon était épuisé, ils ont poursuivi la fibre dans ses ramifications les plus imperceptibles.
L’Antiquité grecque, son théâtre avec son génie et son style, mieux compris, ont donné les points nécessaires, les hauteurs essentielles pour les mesures comparées. […] Qu’on appelle cela style ou langue peu importe, car qui dit langue dit aussi tours et locutions.
Toutes ses instances pour la faire rétracter sont vaines, et, on ne lui concède un peu que sur le tour et le style des dépêches : « Versailles, le 5 mai 1778. […] Je n’entends pas assez les affaires pour en juger ; mais Mercy, qui ne me paraît pas trop content du fond, l’est beaucoup plus du style et de la tournure de celle-ci. » Ah !
J’aurais beaucoup à ajouter ; je pourrais poursuivre en détail dans les conceptions, comme dans le style et dans le rhythme, cette influence singulière, inattendue, ce triomphe presque complet des défauts de l’école dite matérielle sur le poëte qui en était le plus éloigné d’instinct et qui y parut longtemps le plus contraire de jugement ; triomphe d’autant plus bizarre qu’elle-même paraissait déjà comme vaincue : mais est-ce bien à moi qu’il conviendrait d’y tant insister ? […] Sujets, style, composition et détail, il a raison peut-être de tout lâcher ainsi au courant de l’onde, satisfait de son flot puissant ; car la génération qui nous jugera n’est pas la génération qui déjà finit : ceux qui auront le dernier mot sur nos œuvres auront appris à lire dans nos fautes ; ils brouilleront un peu tout cela, et nos barbarismes même entreront avec le lait dans le plus tendre de leur langue.
Ce grand seigneur académicien, qui avait la passion des lettres, de l’esprit, et du style exact, et qui écrivait avec une précision si fine, encore qu’un peu sèche, ne se rangea jamais complètement au parti de Boileau. […] Nous ferions bon marché peut-être de l’art, du caractère esthétique, mais non pas de la rhétorique, au bon sens du mot, des qualités de composition et de style qui diminuent l’effort et accroissent le plaisir du lecteur.
Le style primitif ne connaissait ni division de phrase, ni division de mots. Le style analytique appelle à son secours une ponctuation compliquée, destinée à disséquer les membres divers.
Ils sont légion : Retz et la Rochefoucauld, deux adversaires politiques, deux rivaux de gloire littéraire ; Scarron, Molière, Boileau, trois maîtres, à des degrés divers, du comique et de la satire ; Mme de Sévigné, la reine du style épistolaire ; Cyrano de Bergerac, malgré son nom de ; consonance gasconne ; Bachaumont et son ami Chapelle, le bon buveur, qui doit son surnom au village de la Chapelle, devenu aujourd’hui un faubourg de Paris agrandi ; Patru, Chapelain, Conrart, les petits grands hommes de l’Académie naissante ; d’Aubignac, un auteur de pièces sifflées qui se venge en se faisant le législateur du Parnasse ; le galant abbé Cotin, ce martyr de la critique littéraire, d’autres encore, sans compter les peintres Lesueur et Lebrun, attestent la fécondité alors décuplée de la grande ville. […] Ainsi Mérimée, pour n’en pas citer d’autre, plus enclin à regarder au dedans qu’au dehors, se plaisait à décrire en style assorti des états d’âme violents, des caractères âpres, des éclats de passion sauvages pareils aux paysages que les descriptifs et les peintres d’alors jetaient sur le papier ou sur la toile.
Que de temps exigerait la fastidieuse besogne d’éclairer l’une après l’autre les principales sottises prétentieuses accumulées par Bourget, jadis snob de la psychologie et de la vie mondaine, aujourd’hui snob du catholicisme… Il serait long aussi, et combien écœurant, d’étudier son style de bon élève et son écriture d’enfant sans imagination : le plus banalement coordonné des styles ; la plus grise des écritures.
Ces ouvrages, remarquables par un intérêt facile, de fines observations et des portraits de société, un style coulant et clair, et de justes prescriptions de détail, sont tous plus ou moins gâtés par du romanesque, de la sensiblerie factice, de l’appareil théâtral ; et, sous leur première forme, ils ont fait leur temps. […] On a dit très justement de son style, comme on le disait d’une actrice qui jouait avec plus de sagesse que de mouvement : Elle est toujours bien, jamais mieux.
Parlant du style de l’histoire, Cicéron, par la bouche d’Antoine, le veut et le recommande sans rien qui rappelle le barreau ou la tribune, coulant et continu, et d’un beau courant de récit. […] Lucien, qui se moque de ces historiens prétendus poétiques, qui ont, au début, des invocations pleines d’emphase, Lucien, qui veut de la simplicité dans l’histoire, admet pourtant que le style y participe, en certaines occasions, de la poésie : « Il faut alors qu’un petit vent poétique enfle les voiles du navire, et le tienne élevé sur le sommet des flots. » Il ne veut point que la diction s’élève trop, il suffit que la pensée soit un peu plus haut que l’expression, celle-ci à pied et tenant de la main, comme en courant, l’autre qui est montée et qui devance.
Eux, ils ne l’ont que dans le style, et lui, il l’a dans le style à la fois et dans le jeu des petites scènes.
Croce verra combien mon « système » diffère de la classification rigide encore en usage) que la satire n’est pas un « genre », pas plus que l’idylle, ou le poème héroï-comique, ou le roman champêtre… Ces combinaisons variées, dont nul ne saurait fixer le nombre ni la forme, naissent parfois de la fantaisie d’un génie et meurent avec lui, car les imitations qu’elles suscitent ne sont le plus souvent que de mauvaises copies et ne révèlent qu’une mode sans âme ; — d’autres fois, ces combinaisons (celles-là surtout qu’on essaie de grouper en « genre didactique »), sont tout simplement des œuvres de morale ou de science ; leur style agréable ne suffit pas à en faire des œuvres littéraires ; il s’agit d’un domaine intermédiaire, comme il y en a tant dans la vie où tout n’est que transition ; dans ces cas-là, qu’on commence par rendre courageusement à la morale et à la science tout ce qui n’est pas œuvre d’art ; il y a des documents d’une grande valeur psychologique qui sont sans « forme » au sens précis du mot, donc sans art ; il faut les connaître, les utiliser, en dire l’intention, la signification ; mais, loin de les mettre au nombre des œuvres d’art, dire pourquoi ce ne sont pas des œuvres d’art. […] Il ne suffit pas d’exprimer en style correct des idées nobles et profondes pour faire œuvre d’art ; l’art n’est le plus souvent que secondaire pour les moralistes ; il est pour eux un moyen et non un but ; c’est une différence essentielle, qui devrait assigner aux moralistes une place particulière dans l’architecture d’une histoire littéraire.
L’intérêt n’y manque point, et le style en est d’une couleur savante, quelquefois d’une couleur de sang, comme l’époque qu’il raconte. […] Il éprouve devant la nature des sensations vives, des émotions lyriques qu’il sait rendre en un style coloré, très artiste, abondant d’expressions, un style d’impression et de mouvement où l’image des choses surgit éclatante et nette, où l’âme des êtres apparaît avec ses joies et ses douleurs d’humanité. […] Quelle magie, quelle gaieté, quelle honnêteté, quel prodigieux entrain, quelle histoire, quel style aussi ! […] Il est possible que quelques-uns soient choqués par ce style barbare, polychrome, et forgé de mots techniques, pris aux glossaires de l’antiquité, bien que ce style ait vraiment une grande allure, des sonorités magnifiques, un fracas d’armures heurtées, de chars emportés et comme l’odeur même — une odeur forte de sang et de fauves des âges qu’il raconte. […] Il y avait, dans ce livre, pour qui sait lire, des pages terribles, où la forme élégante, où le style raffiné et joli rendaient plus visibles la saleté de ces cœurs, le cynisme de ces âmes.
, cap. xvi) à enchâsser les mots de l’empereur dans des vers dénués de naturel, vides d’enthousiasme et bigarrés de différents styles. […] J’aurai de l’indulgence pour le style épistolaire, je conviendrai que la familiarité de ce genre admet des pensées et des expressions qu’on s’interdirait dans un autre ; mais quoique pleines de belles choses, ses lettres, assez naturelles dans la traduction, ne m’en paraîtront pas moins recherchées dans l’original242. […] C’est ainsi que je pensai de Sénèque dans un temps où il me paraissait plus essentiel de bien dire que de bien faire, d’avoir du style que des mœurs, et de me conformer plus aux préceptes de Quintilien, qu’aux leçons de la sagesse. […] Ainsi, l’on disait d’un chien, d’un animal engendré de deux espèces, d’un style mêlé de plusieurs idiomes, d’un mot composé de mots empruntés de deux langues, qu’ils étaient hybrides ; ou du latin umber, mestif (métis, en vieux français) dont on fit imber, iber, ibrida : et pourquoi pas de Iberus, Espagnol ? […] Il y a le style du siècle, de la chose, de la profession, de l’homme : notre langue n’est pas celle du règne de Louis XIV ; cependant le français que nous parlons n’est pas corrompu : Fontenelle écrit purement, sans écrire comme Bossuet ou Fénelon.
l’orthographe est la propreté du style.
Le caractère du style aussi bien que de la vie du marquis d’Argenson est le bon sens, comme on le croira sans peine ; ennemi du clinquant et de ce qu’il appelle les épigrammes politiques, il ne l’est pas moins des pointes et des épigrammes du langage ; avide avant tout de vérités proverbiales, de dictons populaires, et heureux d’en confirmer sa pensée, la trivialité même ne l’effraye pas, il ne l’évite jamais ; mais par malheur la raison n’est pas toujours triviale ; il arrive donc souvent aux saillies à force de sens, et beaucoup de ses comparaisons sont piquantes parce, qu’elles sont justes, Qu’Albéroni, par exemple, vivant à Rome après sa disgrâce, entreprenne, au nom du pape, souverain temporel, la conquête de la petite république de Saint-Marin ; M. d’Argenson, qui vient de nous exposer avec précision et peut-être sécheresse les travaux et les talents du cardinal, saura bien ici nommer cette entreprise une parodie des comédies héroïques qu’Albéroni a données à l’Espagne vingt ans auparavant, et, lui-même, le montrer joueur ruiné quoique habile qui se conduit en jouant aux douze sous la fiche, comme il faisait autrefois en jouant au louis le point.
Surtout la versification n’est pas exempte de rudesse, ni le style d’incorrection.
Scribe y songe : la haute muse comique, qui à la vue des excès du vaudeville est blessée au cœur et nous boude avec raison, a tendu la main à l’auteur de la Camaraderie, et le protégerait de préférence à beaucoup d’autres, si, au lieu d’éparpiller ses forces, il s’appliquait à les réunir ; s’il livrait plus souvent de véritables combats, au lieu d’escarmouches sans fin ; s’il donnait à son observation plus d’étendue et de profondeur, et s’il ne dédaignait pas aussi ouvertement cette puissance ombrageuse qui ne se laisse captiver que par de continuels sacrifices, mais qui seule aussi peut faire vivre l’écrivain : c’est du style que je veux parler.
Cependant la différence est grande : Buffon prescrit le mot propre partout et toujours en vue de la noblesse du style, et sa doctrine mène à la métonymie inexacte et à la périphrase énigmatique.
Mais ne vous y trompez pas ; avec tous les défauts et tous les travers de son école, il est artiste, il est poète ; il a un tour à lui, un style, un goût, une façon de voir et de sentir.
Son style est toujours nombreux, d’une allure presque classique ; souvent, il s’agrandit encore, se sculpte en formes amples.
L’auteur du Fils de Giboyer avait le droit, sinon la puissance, d’être féroce comme Aristophane contre Socrate, comme Voltaire contre Fréron, sans avoir besoin de demander pardon pour l’atrocité de son génie dans une préface sans esprit, sans style et sans fierté.
Est-ce que j’ai besoin, moi qui vous parle, à mon réveil, de rencontrer de si beau style ? […] En ce moment de la journée, on ne vous demande qu’un journal, c’est-à-dire une page écrite en courant, au courant de la plume, en dehors de toute ambition littéraire ; où en voulez-vous venir, avec tout votre style ? […] Croyez-moi, mes chers confrères, quand vous voudrez rester dans les bornes légitimes du goût, du style, des convenances, de l’imagination et de l’esprit, soit que M. […] quelle langue, et quel style ! […] Dans ses lettres à M. le maréchal de Bellefonds, l’évêque de Meaux raconte d’un style attristé, grave et touché tout ensemble, ce drame caché dont M.
Nous ne doutons pas de la faveur que doit assurer à ces pages le mérite d’une judicieuse et fine critique, d’une érudition sûre, d’un style d’une remarquable clarté et d’une rare précision. […] Si j’en avais le temps, je ferais avec vous une étude sur les images et sur le style de Lamartine ; je vous montrerais comment Lamartine a toujours emprunté ses images à ce qu’il y a de plus pur et de plus léger, ce qui vole, ce qui est aérien, ce qui est fluide ; et de même pour son style, je vous montrerais que les mots dont se sert Lamartine, ce sont les mots dans lesquels il y a le moins de matière. […] Je vous montrerais bien des négligences chez Alfred de Musset ; il y en a même chez Victor Hugo, qui cependant, pour le style, a plus de soin que les autres. […] Le style, d’après lui, doit être plastique, et cette théorie même est celle de Théophile Gautier : la théorie du style plastique, la théorie d’après laquelle le poète doit rivaliser avec le peintre et le sculpteur. […] De même que Théophile Gautier a été l’inventeur de la théorie du style plastique, il est le premier qui ait recommandé ce que l’on appelle la théorie de l’art pour l’art.
Telle n’est pas du tout la nôtre : de nos jours, le style courant ne vaut rien. […] Paul Bourget, reprochait à Flaubert un « style fabriqué ». Sans aucun doute, un style naturel vaut mieux. […] Je n’ose dire, et je dirai pourtant qu’il n’est de style que fabriqué. […] Il écrit bien, d’un style tout uni, à peu près sans faute, mais sans vive originalité.
., etc. » Les autres petits changements ne sont que de style.
Ils veulent absolument voir dans la pièce grecque une autorité et un précédent direct pour les drames d’aujourd’hui, et non-seulement quant à la franchise et la crudité des actions, mais quant au style, mélange, assurent-ils, de naïveté et de recherche ; tellement qu’ils ont pu entrer tout droit chez le poëte d’Antigone en sortant de chez le poëte de Falstaff (ces messieurs ont en effet traduit et arrangé pour la scène quelque chose de Shakspeare).
Son recueil énorme et magnifiquement imprimé prépare, par ses obscurités, ses enchevêtrements et ses prétentions de style, bien des tortures aux Saumaise futurs, si tant est qu’ils veuillent s’y appliquer comme à l’un des classiques florissant en 1844.
Celle de la reine d’Angleterre est un chef-d’œuvre de style, et un modèle d’écrit philosophique et politique.
Il serait bien intéressant d’étudier la question du style chez les auteurs de talent comme MM. […] Le style ne consiste pas en belles images, pas plus que la peinture ne consiste en belles couleurs. […] Le style est l’expression logique et originale du vrai. […] Dirai-je un mot du style, maintenant ? […] L’intolérable est qu’on devine une continuelle prétention au beau style.
Ce qu’il fallait trouver, c’était le style propre, le style précisément adapté à ce genre de poème. […] C’est tout à fait le style des monologues de Corneille. […] Le style se déshabille comme tout le reste. […] Et le bon parrain a la joie de pouvoir dire à sa filleule : « Il y a maldonne », en style de joueur, ou : « au temps ! » en style militaire.
La rare qualité du style décèle l’excellent élève qui a failli être un brillant lauréat du concours général. […] Leur histoire est contée du même style et avec les mêmes sentiments qui eussent été les leurs. […] Je fais un roman sur les faubourgs, et en relisant mes premiers chapitres, ce matin, je me suis dit : le dialogue est bon, parce qu’il est vrai, mais le récit autour de ce dialogue, c’est du style d’homme de lettres. […] Beyens est écrit du style volontairement surveillé d’un agent qui veut d’abord renseigner avec précision les dirigeants de son pays. […] Son intelligence toujours en éveil sème en diverses revues des articles et des comptes rendus, dont le style alerte ne laisse pas croire qu’il soit entré dans sa quatre-vingt-neuvième année.
Nous parlerons peu du style des Études, continue le disciple ; les éloges à ce sujet sont épuisés. […] Son style, plein de pompe et d’harmonie, manque de nuances, de sensibilité et de douceur, tandis que celui de Bernardin de Saint-Pierre, simple comme la nature, semble destiné à la peindre dans sa grâce et dans sa sublimité. […] Aucun ne vous laissera dans l’âme cette harmonie paisible du beau antique que les Grecs, ou les Latins, ou les Indous appelaient la beauté suprême, parce qu’elle était à la fois vérité et volupté, et qu’elle produisait sur le lecteur un effet divin et éternel sentiment de l’âme à tout ce que l’on désire, qui la remplit sans la laisser désirer rien de plus, ivresse tranquille où les rêves mêmes sont accomplis, et où le style, où l’expression ne cherche plus rien à peindre, parce que tout est au-dessus des paroles. […] Mais ce silence est plus éloquent que des phrases: voilà le style sans style, le murmure du cœur muet de paroles, mais qui n’a pas besoin de paroles pour être entendu.
La sensibilité et l’imagination dans le style, l’expression continente et jalouse, s’acquièrent, se conservent autrement. […] A un certain moment, le jeune homme, qui lit Werther, se monte la tête ; le style de ses lettres s’échauffe ; cela va se gâter, quand tout à coup le père, au lieu d’arriver, envoie une de ses sœurs, une tante de la jeune fille, qui la vient chercher et comme enlever du soir au lendemain. […] La suite des diverses petites scènes, chez Mme de Rémusat, est bien dessinée, bien motivée ; je demanderais au style toujours élégant et pur, sinon plus d’éclat par places, du moins plus d’imprévu, quelques molles négligences.
134 Il attend apparemment que les chiens viennent l’étrangler. « On assomme la pauvre bête » ; un manant lui coupe le pied droit et la tête ; on les cloue à la porte du seigneur, avec un avertissement en style picard, à l’usage « des biaux chires leups » encore novices, et qui apprennent leur métier aux dépens de leur peau. […] Ainsi préparé au beau style, il écrit en homme du monde, avec la correction et l’art d’un académicien ; il présente ses bêtes au public sans descendre à leur niveau ; il reste digne, il garde en tout le ton convenable ; il orne la science ; il veut qu’elle puisse entrer dans les salons ; il l’y amène en la couvrant de décorations oratoires. […] Ces deux vers de style si correct et si bien tournés ne conviennent qu’à une dame du temps, à une héroïne du beau monde.
Celui-là seul pourrait décerner le prix de la forme, qui posséderait toutes les langues de l’Europe aussi à fond que nous possédons la nôtre, c’est-à-dire de manière à percevoir, dans ses moindres nuances, ce qui constitue le « style » de chaque écrivain. […] De même le style des écrivains étrangers doit toujours nous échapper en grande partie. […] Mais alors on me dira que leur supériorité n’en est donc que plus grande, si elle a pu éclater à certains yeux, même sans le secours du style.
XVIII Mais les vers de jeunesse de madame de Girardin ont tout ce que l’atmosphère dans laquelle elle vivait comporte ; c’est de la poésie à demi-voix, à chastes images, à intentions fines, à grâces décentes, à pudeurs voilées de style. […] XXVI La tragédie de Judith, celle de Cléopâtre, élevèrent son style poétique au-dessus de l’élégie, à la hauteur de la scène antique. […] Elle écrivait alors avec une verve virile sa belle tragédie de Cléopâtre, dont le style a la solidité et le poli du marbre.
Par malheur, Mézeray, dans ce genre de vie, pas plus que dans son style, ne sut éviter le bas ; il était devenu un anachronisme sous le règne de Louis XIV. […] On y apprend cette vieille France racontée dans son propre langage, avec ses propres images, ses plaisanteries de circonstance ou ses énergies naïves, et toutes ses couleurs familières, et non traduite dans un style modernisé.
Le prince a le style le plus contraire à celui de certaines personnes de notre connaissance ; il a le style gai et qui laisse passer des rayons.
Ses mémoires ont été longtemps traités comme ceux de Sully, c’est-à-dire qu’on les a rajeunis de style et gâtés. […] Les écrivains issus de ces écoles ou de ces races compliquées et sombres, peuvent s’essayer dès l’âge de vingt ans, ils n’ont pas d’âge ni d’heure, on ne dira jamais d’eux, de leur pensée ni de leur style : « Le souffle matinal y a passé. » On est en Chypre.
Ses écrits ont du sens, de la fermeté, de la finesse, mais il gardait toute sa chaleur et son intérêt pour la conversation ; il y était lui tout entier, il y avait son style, et bien des mots nous en sont restés. […] L’opinion qu’on a de moi à cet égard vient de ce que, dans la conversation, j’ai un tour et un style à moi, qui n’ayant rien de peiné, d’affecté ni de recherché, est à la fois singulier et naturel.
Andrieux nous a relu ses Deux Vieillards : le style en est parfait ; l’intrigue laisse à désirer. […] Daru alors en Allemagne, en Westphalie (août 1808), et lui apprenant que « les bons Parisiens sont menacés de quatre grandes, comédies en vers », d’Andrieux (Les Deux Vieillards), de Picard (Les Capitulations), de Lemercier (Le Faux Bonhomme), et de lui-même Duval qui se met à lui citer des vers de son Aventurière, et qui regrette de ne le pouvoir consulter plus en détail : « Je me rappelle vos observations sur Le Tyran domestique, ajoute-t-il ; elles m’ont contrarié sans doute, mais j’en ai profité. » D’un caractère à part dans ce groupe des amis d’alors ; ombrageux, jaloux, très sensible à la critique, mais doué d’une certaine force de conception dramatique et de la faculté d’intéresser, Alexandre Duval, Breton de naissance, se pliait malaisément au ton de la petite société des dimanches ; il dépassait un peu par sa chaleur et sa poussée d’imagination l’ordre de critiques de style et d’observations de détail si goûtées d’Andrieux et de ses dociles émules.
ce n’est pas le style bref et nu, le style abrupt et souverain de Napoléon racontant ses campagnes, ce n’est pas une plume d’airain qui écrit : c’est un roi qui, même à cheval et à la tête de ses armées, parle à loisir et sans se presser sa langue héréditaire.
Lapaume et a très ingénieusement montré que l’auteur très probable des Épitaphes est Jean de Saint-Martin, avocat en parlement, auteur de plusieurs autres épitaphes du même temps et du même style. C’est dans cette étude comparée du style des diverses épitaphes grecques et latines composées par ce Saint-Martin, qu’est le piquant de l’ouvrage de M.
Il te faut le style, en un mot Il te faut encore, s’il se peut, le sentiment, un coin de sympathie, un rayon moral qui te traverse et qui te vienne éclairer, ne fût-ce que par quelque fente ou quelque ouverture : autrement, bientôt tu nous laisses froids, indifférents, et hommes que nous sommes, comme nous nous portons partout avec nous, et que nous ne nous quittons jamais, nous nous ennuyons de ne point trouver en toi notre part et notre place. […] Je ne te demanderais alors, en me résignant et en m’accommodant à toi, que d’être comme chez les frères Le Nain, d’un ton solide, ferme, juste, d’une conscience d’expression pleine et entière ; car, selon que La Bruyère l’a remarqué, — et ces honnêtes peintres, aujourd’hui remis en honneur, en sont la meilleure preuve, — « un style grave, sérieux, scrupuleux, va fort loin. » 15.
Sans se contraindre à aucun style, à aucun genre, à aucune espèce de sujets, il s’est mis à reproduire tous les objets qui frappent journellement son imagination si mobile et si heureuse ; aussi est-il éminemment le peintre de la France et du xixe siècle, par la manière dont il représente notre nature et notre époque ; aussi a-t-il un degré de vérité, de grâce, de génie, que le talent ne doit jamais qu’à la présence immédiate des objets qu’il veut peindre. […] Se livrant avec une imagination vive et sensible à l’impression des objets, il en prend tour à tour le caractère : il change alternativement de style, de couleur, de moyens, et ne se ressemble qu’en une seule chose, la grâce et le naturel.
Il semble qu’éditer un vieux livre déjà publié ou quelques bribes inédites insignifiantes soit aujourd’hui un titre plus digne d’estime que d’avoir du style et de la pensée. […] É. de Barthélémy ne craint pas de s’exprimer ainsi : « Ce premier travail montre de sérieuses qualités et le soin que La Rochefoucauld apportait au polissement de son style : il ne témoigne pas grandement, par exemple, en faveur de la modestie du duc.
La netteté, la résolution de l’esprit se retrouvent dans la parole qui ne fait qu’un saut sur le papier, et sans songer à ce qu’on appelle le style, ni y faire songer, il se trouve qu’on en a un. […] La morale a changé de nom ; elle s’appelle maintenant statistique : c’est de la comparaison seule des faits que la vérité doit désormais jaillir… » Tel est ce petit livre où l’on ne saurait méconnaître le talent et dans lequel, à défaut d’éclat et d’originalité de forme ou de style, il y a exaltation, chaleur, et même de l’éloquence.
Dans ses descriptions ou analyses pittoresques, son style serré, pressé, procédant par séries, par rangées et enfilades, à coups denses et répétés, par phrases et comme par hachures courtes, aiguës, qui récidivent, a fait dire à un critique de l’ancienne école qu’il lui semblait entendre la grêle rude et drue tombant et sautant sur les toits : Tam multa in tectis crepitans salit horrida grando. Ce style produit sur l’esprit, à la longue, une impression certaine, inévitable, qui va quelquefois jusqu’aux nerfs.
Mais il a sur Malherbe, comme sur Boileau, l’avantage d’écrire dans une langue très-riche en monosyllabes ; à la manière dont il use de ces mots si courts, il se montre encore très anglais de style, et je crois pouvoir dire, sans m’aventurer, que son vocabulaire, quoique plus composé de mots abstraits que chez d’autres poètes, est du meilleur et du plus pur fonds indigène. […] André Chénier, lorsqu’il a dit dans une Épître, parlant de son art composite et de ce métal de Corinthe auquel il compare son style : Tout ce que des Bretons la muse inculte et brave, Tout ce que des Toscans la voix fière et suave ……………………………………………… M’offraient d’or et de soie est passé dans mes vers, se souvenait probablement de ce passage de Pope.
cet homme qui a vécu en pleine tourmente, au milieu des Jacobins, qui a entendu tous les jours Danton, Robespierre, les fait parler dans le style élégamment délayé de la tragédie classique du troisième ordre : c’est une troisième décoction de Campistron. […] Daunou a essayé dans ce style une Histoire de la Convention, et il n’est pas allé au-delà du premier chapitre.
Ils savent les styles, ils ont le coup d’œil, le tact. « Apprendre à voir, ont-ils dit, est le plus long apprentissage de tous les arts. » Ils ont fait depuis longtemps cet apprentissage ; ils sont passés maîtres en matière de xviiie siècle. […] Et, par exemple, pour ne pas sortir du détail du style, MM. de Goncourt ont dit : « L’épithète rare, voilà la marque de l’écrivain. » Ils ont raison, à la condition que l’épithète rare ne soit pas toujours le ton pris sur la palette.
Le style de ce livre est grave, nombreux, élevé, élégant ; il prend, par moments, avec bonheur, les accents de l’hymne. […] Ainsi, dans ce style de couleur exacte et simple, le château de la Wartbourg ne devrait jamais être désigné, ce me semble, comme le centre du mouvement politique et administratif du pays : je n’aime pas non plus voir sainte Élisabeth jeter les bases de la vénération dont ces beaux lieux sont entourés.
Marie-Joseph Chénier a écrit sur Mme de Souza, avec la précision élégante qui le caractérise, quelques lignes d’éloges applicables particulièrement à Eugène : « Ces jolis romans, dit-il, n’offrent pas, il est vrai, le développement des grandes passions ; on n’y doit pas chercher non plus l’étude approfondie des travers de l’espèce humaine ; on est sûr au moins d’y trouver partout des aperçus très-fins sur la société, des tableaux vrais et bien terminés, un style orné avec mesure, la correction d’un bon livre et l’aisance d’une conversation fleurie…, l’esprit qui ne dit rien de vulgaire, et le goût qui ne dit rien de trop. » Mais indépendamment de ces louanges générales, qui appartiennent à toute une classe de maîtres, il faut dire d’Eugène de Rothelin qu’il peint le côté d’un siècle, un côté brillant, chaste, poétique, qu’on n’était guère habitué à y reconnaître. […] — Une épigraphe d’un style injurieux lui ayant été attribuée par mégarde dans un ouvrage assez récent, Mme de Souza écrivit ce modèle de rectification où l’on reconnaît tout son caractère : « M...
Le style de Mme de Duras, qui s’est mise si tard et sans aucune préméditation à écrire, ne se sent ni du tâtonnement ni de la négligence. Il est né naturel et achevé ; simple, rapide, réservé pourtant, un style à la façon de Voltaire, mais chez une femme ; pas de manière, surtout dans Edouard ; un tact perpétuel, jamais de couleur équivoque et toutefois de la couleur déjà, au moins dans le choix des fonds et dans les accompagnements ; enfin des contours très-purs.
Aristote et Horace d’abord, et Quintilien et Longin, tous ceux qui, en grec ou en latin, avaient donné les règles de la poésie ou de l’art d’écrire : Boileau les avait lus, médités, s’en était nourri ; Quintilien et Longin l’avaient aidé à se former un idéal de style et d’élocution. […] Il fit parler spirituellement et même raisonnablement son abbé sur la technique des beaux-arts ; il y distingua des beautés universelles et des beautés relatives ; il fit voir que les formes, le style et le goût sont choses infiniment variables, qui enveloppent et déguisent certaines conditions générales et permanentes.
Il y a de la vigueur dans ce style simple, courant, direct, qui ne s’étale pas en plats bavardages : on aime mieux cette sécheresse archaïque et nerveuse que l’insipide et intarissable prolixité des Grébans. […] Des scènes décousues qui défilent devant nous comme une collection d’images sous les yeux d’un enfant, nulle préoccupation des caractères, des sentiments et de la vie intérieure, une stricte déclaration des pensées précisément nécessaires pour rendre les actes intelligibles dans leur suite, mais non pas dans leur production, un courant facile et plat de style où sont semés des îlots de rondels, motets et chansons, certains raffinements d’art, et point de poésie : voilà ces Miracles de Notre-Dame.
« Moderne » par insuffisance d’éducation et inintelligence de l’antiquité, irrespectueux jusqu’à mettre en style burlesque et insipide l’Iliade et le Télémaque, Marivaux était qualifié pour se faire bien venir de Fontenelle et de La Motte, pour être accueilli dans les salons de Mme de Lambert et de Mme de Tencin : voilà le groupe où il se classe. […] Les œuvres de La Chaussée, gâtées par le romanesque des intrigues, par la fausse sentimentalité des caractères, par la vague boursouflure du style, sont à peu près illisibles aujourd’hui.
La même conception humanitaire et démocratique qui a produit, dans un style direct et subjectif, le galimatias apocalyptique d’un « Jocrisse », donne, dans une forme objective et mythique, un chef-d’œuvre réellement unique. […] Hugo, dans la composition d’un recueil ou d’un poème comme dans le détail du style.
Il est charmant, le style de M. […] Rabusson serait donc quelque chose comme un Feuillet sans illusions et sans foi, avec un peu de l’esprit et du style d’un Crébillon fils ou d’un Laclos.
Voilà une des caractéristiques du style de Paul Adam, de Barrès ou de Bordeaux, du « style bibelot » : l’effort immense et ridicule pour maintenir en une grâce tranquille les reflets d’idées brutales ; pour parer d’un calme philosophique le souvenir microscopique des plus orageuses doctrines ; pour identifier dans la mort les vivants les plus contradictoires.
Malgré les surcharges et les arabesques d’un style vaniteux, Laurent Tailhade, je l’avoue, est aujourd’hui un orateur. […] C’est toi qui inclines France à tant de pastiches de style et de pensée.
Au moment de la mort du poète, il l’a loué par une jolie pièce latine dans laquelle il célèbre ses grâces ingénues, son naturel nu et simple, son élégance sans fard et cette négligence unique, à lui seul permise, inappréciable négligence, et qui l’emporte sur un style plus poli. […] Littérairement, on a beaucoup loué et cherché à définir Fénelon, mais nulle part, selon moi, avec une sensibilité d’expression plus heureuse et une plus touchante ressemblance que dans le passage suivant, où il s’agit autant de son style que de sa personne : « Ce qu’il faisait éprouver n’était pas des transports, mais une succession de sentiments paisibles et ineffables : il y avait dans son discours je ne sais quelle tranquille harmonie, je ne sais quelle douce lenteur, je ne sais quelle longueur de grâces qu’aucune expression ne peut rendre. » C’est Chactas qui dit cela dans Les Natchez.
J’aimerais à voir la jeunesse s’apprivoiser et s’adoucir petit à petit à ce style plus simple, à ces manières de dire vives et faciles, qui étaient réputées autrefois les seules françaises. […] Ce petit traité, qui renferme des réflexions fermes et hautes, des remarques fines, et rendues dans un style net et vif, avec un vrai talent d’expression, a un défaut : il est sec et positif ; il a ce cachet de crudité qui déplaît tant au milieu des meilleures pages du xviiie siècle, et qui fait que la sagesse qu’on y prêche n’est pas la véritable sagesse.
C’est comme journaliste que, dès ses débuts, La Harpe se montre d’abord le plus remarquable, et avec une verve propre qui se produit moins dans son style que dans la suite de sa conduite même et de son zèle. […] Nous aujourd’hui, même quand nous voyons Phèdre, nous ne sommes guère sensibles qu’aux trois ou quatre grandes scènes et à l’admirable style ; mais l’ordre de la pièce, la suite des scènes intermédiaires, leur arrangement et une foule de détails ne nous arrivent plus ; nous n’y entrons plus complètement.
Ernest Serret ; un sentiment pur, un style correct, nous y rendent quelque chose d’un Colin d’Harleville rajeuni. […] Le jour où il plaira à Dieu et à la nature de produire un talent complet doué de cette puissance d’action et de sympathie, il trouvera pour ses créations un rythme, des images, un style propre aux tons les plus divers, en un mot des éléments tout préparés.
Les scènes mélodramatiques de la fin et les airs de mélancolie, répandus çà et là dans l’ouvrage, sont la marque du temps ; ce qui est bien déjà à Mme Gay, c’est le style net, courant et généralement pur, quelques remarques fines du premier volume ; par exemple, lorsque Laure dit qu’en se retirant du monde pour vivre à la campagne, partagée entre les familles des deux châteaux voisins, elle avait cru se soustraire aux soins, aux tracas, aux passions, et qu’elle ajoute : « Eh bien ! […] Son style aussi, en affectant plus de couleur, s’est tendu par endroits et s’est altéré ; il est moins pur qu’autrefois.
Nous voyions près de nous des montagnes couvertes de neige, qui nous faisaient frais aux yeux… On a dit du président de Brosses qu’il savait peu écrire ; le fait est qu’il n’y songe pas ; son style en lui-même n’est rien, mais l’esprit lui donne à tout moment de ces expressions heureuses, pittoresques, qui disent tout en deux mots. […] En même temps, et si son style laisse à désirer pour un certain poli, nul plus que lui n’eut le goût fin et délicat des arts, la sensibilité italienne unie à la malice et à la naïveté gauloise.
Ce désir du retour finit par l’emporter sur celui qu’il avait eu d’abord de rester, et qui lui faisait dire énergiquement : « J’abandonnerai ce pays avec les regrets de Pyrrhus quand il fut contraint d’abandonner la Sicile. » Durant ce voyage d’Italie, il me semble voir deux instincts aux prises et en lutte au sein de l’abbé Barthélemy : il y a l’instinct pur de l’antiquaire, de l’amateur des vieux débris et du zélé collectionneur de médailles, qui se dit d’épuiser la matière et de rester ; et il y a l’écrivain, l’homme d’art moderne et de style, qui, à la vue de ces monuments épars et de cette ruine immense couronnée d’une Renaissance brillante, sent à son tour le besoin de se recueillir, de rentrer dans sa ruche industrieuse, et de composer une œuvre qui soit à lui. […] On vit avec un plaisir mêlé de surprise combien notre abbé le rendait intéressant aux femmes et aux gens du monde qui l’écoutaient, par les grâces de son style, par la finesse de sa critique, et par ses principes justes et lumineux. — Les femmes mêmes, lit-on dans les Mémoires de Bachaumont, ont été enchantées de cette lecture.
Pour goûter les écrits de Richelieu, pour en tirer tout le fruit et tout le suc qu’ils renferment, il faut se faire à son style et se tenir bien averti d’avance sur quelques défauts qui, autrement, pourraient rebuter. […] Même quand il nous expose ces longs contretemps qui barrent sa fortune, le style de Richelieu n’est point irrité et ne marque ni colère ni dépit.
La poésie n’est pas seule infectée de tous ces vices de la pensée et du style. […] Si je pouvais me croire le droit de leur adresser quelques avis, je leur dirais : Laissez enfin pour morts ces héros de la Grèce et de Rome, que nos poignards tragiques ont épuisés de sang ; faites revivre les personnages des âges chrétiens et chevaleresques : mais gardez-vous d’appliquer à ces sujets d’un temps barbare, les règles d’une poétique plus barbare encore, et n’imitez pas ce peintre de nos jours, qui voudrait représenter les princes et les guerriers du dixième siècle, dans le style gothique des vitraux de leurs chapelles, ou du marbre de leurs tombeaux.
Or, je nie le bon sens dans ce livre ; je nie le talent relevé, consistant, formidable ; je nierais même le style, si on me poussait. […] J’en trouve beaucoup comme celle-ci dans ce livre, qu’on dit un chef-d’œuvre de style : « Jésus avait puisé dans le contact (puiser dans un contact !)
Mais l’analyse de tous les sentiments du cœur humain est si admirable, il y a tant de vérité dans la faiblesse du héros, tant d’esprit dans les observations, de pureté et de vigueur dans le style, que le livre se fait lire avec un plaisir infini.
Son style trop uniforme a un éclat que les pages de l’Indifférence ne surpassaient guère, et qui ne trahit pas la vieillesse d’un talent depuis si longtemps guerroyant.
C'est la poésie des recueils sur le théâtre ; » voulant faire entendre que le succès de Lucrèce est d’avoir fait connaître à tous sur la scène, en fait de beautés de style, ce qui auparavant s’imprimait un peu à la sourdine et n’était lu que des gens du métier.
Il n’en a pas été ainsi de Scott, qui, pour être de la même famille, ne possédait d’ailleurs ni leur vigueur de combinaison, ni leur portée philosophique, ni leur génie de style.
Le style de l’ouvrage est d’une belle clarté et d’une rigueur philosophique qui rappelle en certaines pages d’exposition l’auteur de la Controverse chrétienne ; et il nous a semblé que celui-ci, ami des éditeurs, pourrait bien ne pas être étranger en effet à la rédaction d’un livre modeste, et dont pourtant toute plume s’honorerait.
Cette facilité-là est pire que la stérilité : car il faut désapprendre ce style et retourner à l’ignorance primitive avant de faire aucun réel progrès.
On est las quelquefois du style plastique et de ses ciselures, du pittoresque à outrance, de la rhétorique impressionniste et de ses contournements.
La force du style ne le cède ici qu’au pittoresque des détails.
Encore une fois, c’est là le caractère du talent et du livre de Nicolas : une grande bonté et une grande lumière, un attendrissement éloquent avec une larme qui perle dans chaque mot et qui fait étinceler son style des lueurs les plus douces.
Les pusillanimes d’organisation, les vues ophtalmiques, les sens qui se croient délicats parce qu’ils sont faibles, se plaindront de la violence d’une œuvre qui, par la couleur et le style, rappelle Rubens et Rabelais ; mais moi, non !
Il a reporté sur « l’univers cette même piété que l’homme pieux (ancien style), avait pour son Dieu2 ».
Le style a trop peu de saillie ; le mérite est le fond, c’est-à-dire la multitude et la justesse des connaissances.
Le voyant enorgueilli de ses premiers essais et du beau langage qui lui venait sans effort, Corinne lui aurait dit « qu’il manquait aux muses, en ne sachant pas employer les fictions, ce qui est le grand œuvre de la poésie, tandis que les expressions, les figures de style, la mélodie, le rhythme, ne sont qu’un agrément ajouté aux choses mêmes ».
Et alors, c’est la plus condamnable orgie du style dit « poétique » de ce dix-huitième siècle dont le jeune Chateaubriand est encore jusqu’aux moelles. […] Pas tant que cela : mais enfin le style de cette seconde partie des Natchez est un peu moins tendu. […] Et cette cruelle tension de style, à faire trouver le Télémaque délicieux et naturel ! […] Le style, presque tout en sensations et en images, ne faiblit point. […] Son style est celui des prophètes », oh !
Elles l’ont prouvé en répondant avec abondance à plusieurs questions touchant le style, la poésie nouvelle, les littératures du nord. […] Voici les gazouillements : « — Laissons au style son gracieux naturel. […] qu’est devenu le style des grands maîtres ? […] — Le style de nos écrivains modernes est un cliquetis brillant. […] — Et du style !
Adieu. » Et Meyer est digne d’elle, même par l’esprit ; écrivant à son ami Godefroy, il n’est pas en reste, à son tour, pour ces finesses d’âme subitement révélées : « Tu trouves le style de mes lettres changé, mon cher Godefroy ! […] madame, reprit l’abbé après un moment de silence, si je pouvais… — Vous pourriez, interrompit la baronne. — Mais non, je ne pourrais pas, dit l’abbé ; mon style vous paraîtrait si fade au prix de celui de tous les écrivains du jour ! […] Il y disait : « Ce n’est qu’une bagatelle, assurément ; mais c’est une très-jolie bagatelle ; mais il y a de la facilité, de la rapidité dans le style, des choses qui font tableau, des observations justes, des idées qui restent ; mais il y a dans les caractères cet heureux mélange de faiblesse et d’honnêteté, de bonté et de fougue, d’écarts et de générosité, qui les rend à la fois attachants et vrais ; il y a une sorte de courage d’esprit dans tout ce qu’ils font, qui les fait ressortir, et je soutiens qu’avec une âme commune on ne les eût point inventés ; mais il y a une très-grande vérité de sentiments : toutes les fois qu’un mot de sentiment est là, c’est sans effort, sans apprêt ; c’est ce débordement si rare qui fait sentir qu’il ne vient que de la plénitude du cœur, dont il sort et coule avec facilité, sans avoir rien de recherché, de contraint, d’affecté, ni d’enflé… » 223. […] Dans tout ce qui précède, je n’ai pas parlé du style chez Mme de Charrière ; les citations en ont pu faire juger.
Comment discerne-t-on le style et l’âme d’un musicien d’un autre musicien, dans ces compositions chantées ou exécutées, aussi infailliblement qu’on discerne le style d’un grand écrivain ou d’un grand poète du style d’un écrivain ou d’un poète médiocre ? Comment ce style du compositeur inspiré ou inhabile nous donne-t-il des ravissements ou des dégoûts qui nous enlèvent jusqu’au troisième ciel, ou qui nous laissent froids et mornes au vain bruit de ses notes sans idée et sans âme ?
On a quelque peine à se faire au style de Bernis dans cette correspondance toute politique ; plus tard, en écrivant de Rome, il aura bien des familiarités encore ; mais la politesse du langage sera continuelle chez lui, et la décence de la pourpre romaine s’étendra graduellement sur les sujets qu’il aura à traiter. […] Montmartel craint de risquer sa fortune ; sa femme l’obsède et le noircit, et moi je suis obligé d’aller lui remettre la tête et de perdre vingt-quatre heures par semaine pour l’amadouer (quel style, trop d’accord avec la situation !
On a de lui un petit écrit fait à dix-sept ans sur les Verreries de Saint-Quirin, dont il fut plus tard l’un des actionnaires principaux, et dont il célèbre en style animé, un peu romantique, l’industrie créatrice et le site au fond des vallées des Vosges. […] En général, il ne condense pas et ne grave pas de la sorte sa pensée : mais cette fois la vivacité de l’impression, l’effroi des souvenirs, et aussi cette forte idée de Hobbes, lue et méditée auparavant dans la retraite, et se résumant en un style concis, ont servi à l’inspirer.
Il y avait là une extrême variété de sujets que l’auteur avait rassemblés dans une contexture habile, et rendus dans un style soigné, étudié, et dont l’élégance allait parfois jusqu’à la parure. […] Cette admiration pour un empire de plus de deux cents millions d’hommes, où il n’y a pas un seul homme qui ait le droit de se dire libre ; cette philosophie efféminée qui donne plus d’éloges au luxe et aux plaisirs qu’aux vertus ; ce style toujours élégant et jamais énergique, annoncent tout au plus l’esclave d’un électeur de Hanovre. » Ce jour-là Mirabeau avait évidemment besoin de faire l’orateur et de se donner un adversaire qu’il pût invectiver ; il se figura Gibbon en face de lui et lança son apostrophe.
Hugues et moi nous relûmes l’épître que vous m’avez adressée : nous y trouvâmes beaucoup de délicatesse, jointe pourtant, en quelques endroits, à une certaine lâcheté de style, qui, jusqu’à présent, a été votre péché originel. […] Daru, dans une longue lettre motivée qu’il adressa à l’auteur de L’Année littéraire, et qui, je crois, n’a pas été publiée, conteste avec politesse la prompte conclusion du critique ; il insiste sur un point, c’est que, pour traduire fidèlement, il ne suffit pas de bien rendre le sens de l’original, mais qu’il faut encore s’appliquer à modeler la forme de l’expression : « Pour ne pas sortir de notre sujet, dit-il, un traducteur de Cicéron qui aurait un style sautillant serait-il un traducteur fidèle ?
Le style ensorcelle quelques autres, et, à travers les labyrinthes et les déserts de l’erreur, les mène s’extasiant pour une harmonie ; tandis que la paresse séduit la plupart, trop faibles pour soutenir l’insupportable fatigue de la pensée, et prêts à engloutir, sans réflexion et sans choix, le bon et le mauvais grain, le son et la fleur du froment. […] Cette pièce est empreinte de sa manière la plus vigoureuse, avec ses qualités et ses défauts ; elle a de l’inégalité de style, de la complication de pensée, mais de la grandeur, et elle décèle, dans ce poète qui ne passe que pour celui des régions moyennes, un disciple énergique de Milton.
À propos de je ne sais quel ouvrage de l’avocat Target, qu’on disait excellent : « Je le crois, mais je ne le saurais lire, disait-elle : je suis si frivole que j’aime le style, et si bête que j’aime la justesse. […] Elle n’a rien qui rie dans son style ni dans sa parole.
Ne lui demandez pas de se soigner, de se relire : « Mes affaires et mes amis, dit-il, ont besoin de moi, et le peu de temps qu’on me laisse est mieux employé à composer qu’à m’appesantir sur des révisions de style… Si je me contraignais pour me rendre méthodique, je suis certain que je serais moins lu encore que je ne le serai dans toute la pompe de la négligence et des écarts2. » Dans la Théorie de l’impôt, qui est censée une suite à l’entretiens ou discours tenus et prêchés à Louis XIV par Fénelon, cet éloquent prélat parle le plus rébarbatif des langages ; il dira que « l’honneur, ce gage précieux dont le monarque est le principal et presque le seul promoteur, a comme toute autre chose, son acabit ou son aloi nécessaire ». […] À lui qui vise à conquérir un nom dans les lettres et à entrer peut-être à l’Académie, il essaye de lui faire peur des gasconismes que peut contracter son style (hélas !
. — D’autres fois, et perpétuellement, ce sont de simples gentillesses et des ragoûts de style par où La Beaumelle relève la matière. […] Le style de Frédéric, avec ses incorrections et ses longueurs, est plus simple, plus digne et d’une langue plus saine..
Ainsi parlait un ami et un camarade dans son style de réclame et de prospectus, comme nous dirions aujourd’hui. […] Colbert, il le définissait très bien en peu de mots : C’est un écrivain rapide, dont le style est ce qu’il a de moins mauvais ; il n’est pas sans savoir, mais il est sans aucun jugement, traduit mal, ne fait rien raisonnablement que les généalogies.
Il a un bon style et certainement aussi, en ces matières académiques, un bon esprit ; mais il abrège et dessèche tout plus qu’il n’était nécessaire. […] La Bruyère, avec un style tout personnel, a imité un genre déjà créé. » Je sais que, de nos jours, des bibliophiles enthousiastes, qui avaient sans doute, ce jour-là, sous les yeux un bel exemplaire des portraits dédiés à Mademoiselle, se sont écriés que ce recueil était l’origine du genre des portraits, et que, sans ce précédent, La Bruyère peut-être n’aurait pas fait les siens.
Pour un futur ministre des Affaires étrangères, il a le plus singulier style, bas, trivial, qui devait faire bondir les diplomates polis : Topez là… l’Espagne tope ; pour : l’Espagne consent ; — donner ou recevoir des nazardes. […] Il a des barbarismes tout gratuits ; parlant d’une femme (la duchesse de Gontaut) : « Elle intrigue, elle prétend déplacer les ministres, et avec cela elle s’est hypocrisée en quittant le rouge… » Mais ce même homme, au style hérissé et sauvage, a de soudaines expressions qui lui sortent du cœur, et qui d’un trait peignent un homme ou expriment des vérités politiques profondes.
Le grand défaut de son style, c’est l’élégance vague, celle du beau monde et des salons. […] C’est là l’excès du style poli.
On se rappelle aussi le vers du poète : « Ære ciere viros martemque accendere cantu. » Rêvez, combinez, imaginez tant que vous voudrez : rien ne vit que par le style ; et, comme le dit une expression espagnole bien énergique, c’est lorsqu’on est au détroit du style que la grande difficulté commence.
Tant qu’il n’a été que modeste, on n’a eu qu’à louer son zèle et ses recherches, sans trop demander à son style l’exactitude, ni à ses jugements une parfaite justesse. […] Collé est mieux, il est tout à fait bien et comme dans son élément quand il parle de Beaumarchais ; à propos des fameux Mémoires, il dit de lui dans une page qu’il y a plaisir à citer : « Cet homme a tous les styles.
Lui-même, dans son style, il ne se prive pas de pratiquer la rhétorique ou la demi-rhétorique. […] Mme Dufrenoy était un vrai poète par l’âme, par la passion, par le sentiment du rythme et de l’harmonie ; elle avait de la composition, du dessin jusque dans l’élégie : par malheur, l’éclat du style a manqué à ses inspirations et à sa flamme.
On avait Marot, Calvin, on avait surtout Rabelais ; mais le grand réveil poétique de la pléiade n’était pas encore sonné ; on n’avait pas Montaigne ni même les douceurs prochaines d’Amyot, ni tout ce qui remplit si bien, en érudition, en doctrine parlementaire, en histoire, en poésie, en style, la seconde moitié de cette riche et confuse époque. […] Si tel écrivain habile a, par places, le style vide, enflé, intarissable, chargé tout d’un coup de grandes expressions néologiques ou scientifiques venues on ne sait d’où, c’est qu’il s’est accoutumé de bonne heure à battre sa phrase, à la tripler et quadrupler (pro nummis), en y mettant le moins de pensée possible : on a beau se surveiller ensuite, il en reste toujours quelque chose.
Il naquit à Amiens, comme on sait, le 29 août 1709 ; son père, qui remplissait d’honorables fonctions judiciaires, était tant soit peu poëte, et rimait en style convenable des épîtres ou satires à l’imitation de Boileau. […] M. de Cayrol, qui n’entend pas contradiction sur son héros, traite fort mal M. de Feletz, pour avoir osé mettre en doute l’agrément de Gresset en prose ; il me semble qu’au moment où il plaidait pour les agréments d’un autre, le digne biographe l’aurait pu faire en un style plus persuasif et mieux assorti ; pour moi, en ces matières d’urbanité, je suis accoutumé à reconnaître M. de Feletz comme un excellent juge.
Son style offre les mêmes contrastes : il est mièvre et il est fort ; il est pédantesque et il est simple ; tout glacé d’abstractions, roide et guindé, et soudain gracieux et languissant, ou plein, coloré, robuste. […] Son style même a comme un timbre auquel on ne se trompe pas : il rend un son plaintif, gémissant, éploré… Sans doute l’absence de croyance positive et l’esprit d’analyse peuvent, chez quelques-uns, se tourner en nonchalance (voyez Montaigne), mais non pas chez ceux dont la sensibilité au bien et au mal moral est exceptionnellement développée.
Certes ; mais alors l’harmonie formelle naîtra de leur opposition dans l’unité générale du style. […] Encore, si l’unité formelle de l’ensemble est malaisée à saisir, on y découvre sans peine une unité générale d’impression, l’unité parfaite du style, avec une certaine atmosphère morale qui ne cesse de prêter sa couleur à toute l’œuvre.
On sait, les honnêtes gens, style du xviie , c’était le monde, la cour, la société polie, frivole et blasée, aussi difficile à divertir que peut l’être aujourd’hui la compagnie des monocles du mardi. […] Henry Céard, par la vision aiguë qu’ils découvrent de la vie, par l’impitoyable philosophie qu’il révèlent, par l’eurhythmie de leur composition et la maîtrise de leur style, Les Résignés ne sont pas un simple essai de cet art nouveau, ils en sont le premier, l’incontestable chef-d’œuvre.
On sait, les honnêtes gens, style du xviie , c’était le monde, la cour, la société polie, frivole et blasée, aussi difficile à divertir que peut l’être aujourd’hui la compagnie des monocles du mardi. […] Henry Céard, par la vision aiguë qu’ils découvrent de la vie, par l’impitoyable philosophie qu’ils révèlent, par l’eurhythmie de leur composition et la maîtrise de leur style, les Résignés ne sont pas un simple essai de cet art nouveau, ils en sont le premier, l’incontestable chef-d’œuvre.
Augier est une œuvre de sentiment et de beau langage ; peu d’action, des situations simples, l’entrain et les incidents de la vie commune, mais des émotions vraies, des indignations généreuses, la chaleur de l’idée, l’esprit du détail, et, par-dessus tout, le charme du style. […] Pourtant la lionne pauvre est aux abois ; elle doit dix mille francs à sa marchande à la toilette, dix mille francs payables le lendemain, à deux heures de relevée, style du métier.
Elle les trouve simplement amusants d’abord, « quoique le style en soit abominable, dit-elle, et les portraits mal faits », c’est-à-dire jetés comme à la brosse et en couleurs étranges. […] À propos d’une de ces querelles d’étiquette et de prérogative que Saint-Simon souleva, Louis XIV ne put s’empêcher de remarquer « que c’était une chose étrange que, depuis qu’il avait quitté le service, M. de Saint-Simon ne songeât qu’à étudier les rangs et à faire des procès à tout le monde », Saint-Simon était possédé sans doute de cette manie de classer les rangs, mais, surtout et avant tout, de la passion d’observer, de creuser les caractères, de lire sur les physionomies, de démêler le vrai et le faux des intrigues et des divers manèges, et de coucher tout cela par écrit, dans un style vif, ardent, inventé, d’un incroyable jet, et d’un relief que jamais la langue n’avait atteint jusque-là.
» Tout ce style est net, piquant, plein de traits, un peu mince ou aigu. Il y a des incorrections, par exemple : « La plus grande peine n’est pas de se divertir, c’est de le paraître. » Mais Montesquieu, sur le style, a des idées fort dégagées : « Un homme qui écrit bien, pense-t-il, n’écrit pas comme on écrit, mais comme il écrit ; et c’est souvent en parlant mal qu’il parle bien. » Il écrit donc à sa manière, et cette manière, toujours fine et vive, devient forte et fière et grandit avec les sujets.
Il acheta quelques livres de voyages ; un peu plus tard, un volume dépareillé du Spectateur d’Addison lui tomba sous la main et lui servit à se former au style. […] « J’approuve, pour ma part, qu’on s’amuse de temps en temps à la poésie, dit-il, autant qu’il faut pour se perfectionner le style, mais pas au-delà. » Il a pourtant lui-même, sans y songer, des formes d’imagination et des manières de dire qui font de lui non seulement le philosophe, mais quelquefois le poète du sens commun.
Necker se formera au style en avançant ; il écrira mieux ; il trouvera sa forme, et ses derniers ouvrages seront véritablement très distingués. […] Necker y rappelait en style peu pratique quelques vérités d’expérience ; on a remarqué depuis qu’il y parlait de la propriété et des propriétaires un peu légèrement, et qu’il y présentait ceux qui vivent de leur travail ou les prolétaires comme étant toujours la proie des premiers : « Ce sont, disait-il, des lions et des animaux sans défense qui vivent ensemble ; on ne peut augmenter la part de ceux-ci qu’en trompant la vigilance des autres et en ne leur laissant pas le temps de s’élancer. » M.
Les bras sont dessinés comme les Carraches ; toute la figure dans le style des premiers maîtres d’Italie. […] En effet son style et son pinceau ne sont qu’à lui ; il ne veut s’endetter qu’à Raphaël, le Guide, le Titien, le Dominiquin, Le Sueur, le Poussin, gens riches que nous lui permettrons d’interroger, de consulter, d’appeler à son secours, mais non de voler.
Elle peut être CONTENTE de ma conduite ici, ce me sera un bonheur véritablement sensible, parce qu’il n’y a rien que je désire davantage que l’estime et l’amitié de Votre Éminence, que j’HONORE, et pour ne pas parler plus librement, avec le respect le plus fidèle. » Et c’est le style ! […] Au dehors, le bon ordre, la conservation des familles, la paix et l’honneur des mariages, la source des alliances, la solidité des établissements, tout crie en faveur de ces lois ; au dedans de nous-même, une voix puissante se fait entendre qui les canonise et nous les fait respecter comme l’explication des lois de Dieu même. » Quelle accablante autorité dans la pensée et dans le style !
il en a la magnificence, l’imagination dans le style, avec une chaleur que Buffon n’avait certes pas. […] Toutes les ardeurs d’esprit d’un tel homme, de ce somptueux de style, de ce fulgurant, de cet Écarlate d’esprit comme d’habit, ses entraînements, son monde, ses vanités, ses mœurs frivoles (elles l’étaient, et même un peu plus…) toutes ses manières de sentir et de se produire au dehors, auraient fait croire, en Rivarol, à un tout autre historien que Tacite, et cependant ce fut celui-là qu’il devint quand il fallut écrire l’histoire !
Aujourd’hui que le tigre est sorti de ses jungles, nous nous apercevons qu’il a fait ses humanités en Allemagne et qu’il n’est qu’un chat assez moucheté, car il a du style par places, mais cachant sous sa robe fourrée et ses airs patelins la très grande peur et la petite traîtrise de tous les chats, — ces tigres manqués ! […] D’ailleurs le style n’est pas plus ici que le reste.
Élevé, comme tous ses contemporains, dans le style exact et simple, il put noter ses idées avec vérité et avec précision. […] Jouffroy vécut à l’abri du style obscur et sublime ; ses phrases restèrent libres de généralités et de métaphores, et il ne fut point tenté d’étudier, au lieu des idées et des sensations, « les capacités et les facultés. » Il vécut retiré, presque toujours à la campagne, dans une petite maison, au pied d’une colline, près d’une jolie rivière murmurante, dans son comté de Kent.
Les premiers sermons de ce premier des orateurs sont pleins d’antithèses, d’images incohérentes, de battologie, d’exagération, d’enflure de style.
Sa collaboration devient d’autant plus difficile à saisir, qu’elle s’est fondue quelquefois dans des articles écrits avec Pierre Leroux, de telle sorte qu’on sent par moments les idées de l’un, le style de l’autre.
Voix sonore et retentissante, timbre éclatant et pur, geste simple ; puis une parole facile, abondante, harmonieuse ; une manière de style étrangère à toute affectation, à toute enflure ; un laisser-aller plein de ressources ; un art heureux de diriger, de détourner sa pensée, de la lancer chemin faisant dans les questions, et de l’arrêter toujours à propos ; un penchant à s’étendre sur les moralités consolantes quand il y a jour, et, sitôt qu’on arrive aux hommes, un parfait mélange de discrétion et de loyauté, voilà ce qui nous a surtout frappé dans l’éloquent discours de M. de Lamartine.
Majestueux dans sa figure, dans ses attitudes, dans son style, il l’était aussi dans son caractère : il avait une vraie noblesse d’âme, beaucoup de bon sens, de solidité, d’honnêteté, point de vanité, aucun sentiment bas ou mesquin.
Son style même, ample, aisé, frais et plein, ne se recommande ni par une finesse ni par un éclat extraordinaire, mais par des qualités qui semblent encore tenir de la bonté et lui être parentes… George Sand a été une matrice pour recevoir, un peu pêle-mêle, les plus généreuses idées.
Il rappelait avec un style plus plastique (car on ne naît pas impunément dans la seconde moitié du dix-neuvième siècle) — les conteurs d’autrefois et, si vous voulez, cet imperturbable Alain Lesage.
Il a du style, de la fantaisie, du brio.
Il y a à Londres un jargon mondain et diplomatique : thé dansante, landau sociable, style blasé, morning-soirée ; solide s’exprime par solidaire, bon morceau par bonne-bouche et de pied en cap par cap à pied 78.
Les effets (Synthèse des moyens) 1° Effet général exaltant, par : a) Richesse, éclat du style (l°)22 b) Imprévu de la syntaxe (2°) c) Imprévu des métaphores et leur clarté (5° c) d) Coloris violent des époques et des lieux ; (6° a, b, da′***) e) Simplicité des personnages (5° b, 6° da′ et b′) f) Humanitarisme et déisme optimiste (6° e d′) g) Exaltation du ton (4°) h) Saillie des objets par antithèse (3° b, 5° ab′, 6° d a′** et b′) 2° Grandiosité amplifiante, par : a) Procédés de répétition (3° a, 5° a a′) b) Absence de détaillement (5° a a′) c) Lointain des époques (6° d, 6° ee′) d) Clair-obscur des lieux (6° b c) e) Simplicité des personnages (6° d) ; f) Art général des développements ascendants g) Ton (4°) h) Sujets (6° e e′) 3° Mystère, par : a) Mots indéfinis (1°) b) Ellipses (2°) c) Tentative d’aperception immédiate, totale, peu claire (5° a a′) d) Lointain des époques (6° a) et des sujets (6° e e′) e) Vague métaphysique (6° e d′ et e′) f) Obscurité des lieux (6° b, c) g) Ton (4°) h) Prédilection générale pour les sujets et les situations où l’imagination n’est pas bornée par les faits, poétisme.
Pour ce qui est des questions de style et de forme, il n’en parlera point.
À l’égard du style, il est hardi, précipité, souvent brusque, toujours plein de vigueur ; il peint d’un trait ; la liaison est plus entre les idées qu’entre les mots ; les muscles et les nerfs y dominent plus que la grâce ; c’est le Michel-Ange des écrivains ; il a sa profondeur, sa force, et peut-être un peu de sa rudesse.
Le style est bon, court, net, clair, sans mauvaises locutions ; une fois pourtant il s’agit d’une personne qu’on n’aurait jamais connue sous un semblable rapport, une de ces manières de dire que ne toléraient Voltaire ni Courier ; M. Suard aurait dû ne point laisser passer cela ; il aurait coupé à la racine la seule espèce de défaut plus tard reprochable à ce style si simple d’ailleurs, si vrai, et surtout fidèle à la pensée. […] Elle dit de Mme Des Houlières : « Ses idylles n’ont peut-être d’autre défaut que de vouloir absolument être des idylles… Elle a mis de l’esprit partout et des fleurs où elle a pu. » — « Le talent de Mme Cottin ne permet guère de le juger, dit-elle, que lorsque les émotions qu’elle a fait naître sont passées, et ces émotions durent longtemps. » Elle dit du style de Mme de Genlis qu’il est toujours bien et jamais mieux 97.
Quoique l’auteur s’excuse presque d’avoir oublié sa langue durant dix années de voyages et d’absence, le style est déjà tout formé, et l’on y retrouve plus d’une esquisse gracieuse et pure de ce qui est devenu plus tard un tableau. […] Dans les descriptions, les odeurs se mêlent à propos aux couleurs, signe de délicatesse et de sensibilité qu’on ne trouve guère, ce me semble, chez un poëte moderne le plus prodigue d’éclat63. — Des groupes dignes de Virgile peignant son Andromaque dans l’exil d’Épire ; des fonds clairs comme ceux de Raphaël dans ses horizons d’Idumée ; la réminiscence classique, en ce qu’elle a d’immortel, mariée adorablement à la plus vierge nature ; dès le début un entrelacement de conditions nobles et roturières, sans affectation aucune, et faisant berceau au seuil du tableau ; dans le style, bien des noms nouveaux, étranges même, devenus jumeaux des anciens, et, comme il est dit, mille appellations charmantes ; sur chaque point une mesure, une discrétion, une distribution accomplie, conciliant toutes les touches convenantes et tous les accords ! […] Michel-Ange traitait volontiers Raphaël d’efféminé ; Corneille parlait de Racine comme d’un blondin ; Buffon répondait à Hérault de Séchelles qui le questionnait sur le style de Jean-Jacques : — « Beaucoup meilleur que celui de Thomas ; mais Rousseau a tous les défauts de la mauvaise éducation ; il a l’interjection, l’exclamation en avant, l’apostrophe continuelle. » On vient d’entendre Bernardin de Saint-Pierre, visiblement impatienté, prononcer sur l’auteur de René : « Imagination trop forte !
Ajoutons que ces esprits exquis sont en général des esprits classiques, adorateurs des traditions, imitateurs des modèles transmis par les âges, traducteurs des chefs-d’œuvre que l’antiquité nous a légués ; répugnant aux innovations de style toujours un peu désordonnées ou hasardeuses et faisant dresser l’oreille au goût, conservateurs un peu timides des formes du style ; ayant le culte respectueux du beau antique, sans en avoir le fanatisme ; classiques, en un mot, de caractère, d’éducation, d’habitude, derrière lesquels on peut marcher un peu lentement, mais avec lesquels on ne risque pas de s’égarer ; des guides des lettres, en un mot. […] À cela près, nous ne connaissons pas un recueil de dépêches mieux senti, mieux écrit, présentant au lecteur sérieux, dans un meilleur style, plus de lumière et plus d’agrément.
Il me disait qu’il cherchait toujours, qu’il venait de découvrir à peu près la tache que fait sous des arbres, une amazone de femme, et qu’il ne désespérait pas, à la longue, de trouver le caractère, le style d’un habit noir, enfin l’héroïsme de la vie moderne. […] Jeudi 2 mars Hier dans le fumoir de la princesse, l’on causait style, et l’on parlait de l’impuissance de bien écrire chez les gens qui parlent plusieurs langues. […] Toute la fin de mon livre aura été écrite, avec la pensée, le pressentiment, que tant d’efforts, de recherches, de travail de style, auront pour récompense l’amende et la prison, et peut-être la privation des droits civiques — que je serais enfin déshonoré par des magistrats français, absolument comme si j’avais été surpris dans une pissotière.
C’est néanmoins au xixe siècle, c’est depuis trente années surtout, que par son alliance avec l’histoire, la philosophie, l’éloquence, par la grandeur et l’universalité de ses travaux, par le sentiment d’artiste dont elle a su animer ses appréciations et son style, la critique a mérité de prendre place parmi les genres littéraires les plus importants, les plus goûtés, et d’être à son tour l’objet d’une étude sérieuse, la matière d’une nouvelle critique. […] La critique militante gagna alors deux choses, de l’esprit et du style. […] Cette histoire est intéressante, et je veux bien la croire fort exacte ; mais on m’avait promis de l’éloquence française, et je n’en trouve guère ici… si ce n’est dans le style du narrateur.
Suivant les temps ou les circonstances, le vers est du style hiératique. […] et quel style !) […] Son style a tous les désordres de sa pensée.
Nous reconnaîtrons volontiers, pour notre part, qu’elles sont des modèles de « style passionné ». […] … N’est-ce pas à peu près l’esquisse de Werther et, déjà, le style du roman ? […] écrivit-il à son ami, en son style le plus échevelé… Le malheureux ! […] Le style ne le relève certes pas. […] Dès la première contemplation des choses, vous auriez reçu en vous la forme du nécessaire, et, dès votre premier essai, le grand style se serait développé.
Les idées et les arguments s’y répètent beaucoup ; mais c’est prodigieux comme les tours de style s’y renouvellent, et quelle souplesse d’invention verbale a permis à cet homme de répéter cent fois la même accusation avec un bonheur de style toujours nouveau. […] C’est du style du temps. […] C’est agréable et tourné en fort bon style. […] Voilà une leçon de style admirable en même temps qu’une étude psychologique d’un singulier intérêt. […] Ils sont une bonne fortune pour l’étudiant en français, en style français, en « composition » française et en métrique française.
Là, il peint des acteurs et des scènes de théâtre dans le style de Tsoutzoumi Tô-rin et produit beaucoup de dessins sur des feuilles volantes, appelés Kiôka Sourimono. […] Depuis, il change son style, en crée un tout nouveau, qui lui est personnel. […] Le style appelé Hokousaï-riou est le style de la vraie peinture Oukiyoyé, la peinture naturiste, et Hokousaï est le vrai et le seul fondateur d’une peinture qui, prenant ses assises dans la peinture chinoise, est la peinture de l’école japonaise moderne. […] Et, secouant complètement le joug du style de Katsoukawa, les dessins signés Mougoura sont plus libres, plus vus sous une optique personnelle. […] Deux pivoines dans un panier, dessinées avec ce style que les Japonais mettent à la fleur ; un style parent du style que nos vieilles écoles de peinture de l’Europe mettaient à la représentation de l’humanité.
Le style. — Celui de cette pièce offre sans doute nombre de fautes grammaticales. […] Le style. — Plus correct que celui de L’Étourdi et du Dépit amoureux. […] Le style. — Encore plus châtié que dans les dernières pièces. […] Le style. — Il sera toujours le modèle, et peut-être le désespoir des auteurs qui voudront écrire la comédie en vers libres. […] Le style. — Chaque personnage a celui de son état.
Il s’en est trouvé plusieurs aussi pour avancer qu’il avait un méchant style et que son tour d’esprit n’était pas sans vulgarité. […] Le style Louis XV ; impertinence et libertinage ! […] Il n’y a pas d’exemple qu’une œuvre ait vécu, à laquelle manquait le mérite du style ; on discute sur les caractères du style, non sur l’absence de style ; de très grands écrivains écrivaient mal, mais ils écrivaient. […] Cette manie de voir des devoirs et des vertus partout a mis de la pédanterie dans son style et du malheur dans sa vie. […] Si la trame de son style, le plus souvent prosaïque, se relève çà et là d’ingénieuses images, ce ne sont que de subites trouvailles sitôt abandonnées.
De là ces phrases reprises, ces mots répétés, ce style uniforme qui, sans faire grand effet au premier abord, finit par enlacer l’âme comme en un cercle magique. […] L’unité grandiose attire l’auteur plus que la diversité des paysages ou des événements, et son style répond au caractère de sa pensée. […] Si le style jusqu’ici a été large et ferme, il manque parfois de cette sobriété qui est le nerf de la langue. […] Jules Lemaître a signalé les qualités contraires et les grandes inégalités du style de M. […] À part le sourd grondement d’un style austèrement contenu et les révélations presque involontaires de courts passages, Scherer ne s’ouvrait point en public.
À celui-ci, le dernier et délicat travail qui arrête le détail de la composition et du style, et donne à tout le fini, le poli, le travail de la dernière main a manqué. […] » C’est avec ce style, ce style sujet à de tels contournements et à de telles défaillances, que Molière réussit à faire parler à tous ses personnages, une fois qu’il les a vigoureusement conçus, le langage le plus juste, le plus varié, le plus simple, et, quand il le faut, le plus aisé. […] Il la trouvait très difficile à accepter, et notez que c’est, à ne considérer que le style, le chef-d’œuvre de Molière peut-être. […] Monsieur (dit-il à Dom Juan), quel diable de style prenez-vous là ? […] Elle s’est pliée à la phrase périodique et au style soutenu du xviie siècle avec autant d’aisance qu’à la phrase hachée menu, au style vif et sautillant xviiie ; l’alexandrin lui a servi comme le vers leste et varié du vaudeville.
. — Sa largeur d’esprit et son ampleur de style. — Hales et Chillingworth. — Éloge de la raison et de la tolérance. — Jeremy Taylor. — Son érudition, son imagination, sa poésie. […] Nul grand mot, nul étalage de style, nul déroulement de dialectique. […] Ils rejettent comme profanes le style orné et l’ample éloquence que l’imitation de l’antiquité et de l’Italie avait établis autour d’eux. […] Point de style ; ils parlent en hommes d’affaires ; tout au plus, çà et là, un pamphlet de Prynne a de la vigueur. […] Le style est décousu, obscur, passionné, extraordinaire, comme d’un homme qui n’est pas maître de son cerveau, et qui, malgré cela, voit juste par une sorte d’intuition.
L’érudition et l’artificiel seront tenus moins en faveur et il ne s’agira plus, pour être admiré, de donner à sa phrase un tour démodé, d’habiller et de pomponner sa pensée selon des coutumes surannées ou de donner à son style la grâce futile, troublante et gracieuse des temps jadis, comme le font si habilement MM. […] Faut-il évoquer la simplicité d’écriture des Évangiles, la banalité sublime d’Homère, le style populaire des Tragiques grecs pour démontrer que M. […] D’ailleurs, pour un écrivain aussi peu romantique, chez qui le goût domine, une épithète trop passionnée, une exclamation trop sincère paraîtrait un oubli des convenances, une offense au beau style et aux bonnes mœurs. […] Si le style doit être consubstantiel à l’objet qu’il célèbre, celui de Verhaeren, ravagé et chaotique, demeure bien l’image et le reflet de ce tempérament exténué sous la violence des chocs sensoriels. […] On la pressent seulement sous l’apparence de son style.
Comme il distingue le bon et le mauvais dans l’expression, il discerne le mauvais et le bon qu’elle exprime ; c’est ainsi qu’il purge le style et la pensée. […] Ce que le rhéteur grec institue relativement au plan, au style, aux embellissements de ces poèmes, concerne toutes les qualités qui leur sont particulières. […] Le style tantôt le plus naturel, tantôt le plus métaphorique et le plus hardi, n’est-il pas tour à tour prescrit par les qualités du genre ? […] On ne saurait trop bien faire discerner ces différences qui seules établissent les caractères distincts des ouvrages, les limites précises des genres, et celles du style qui leur est proprement convenable. […] » La remarque est juste, et de ces dispositions naturelles aux deux auteurs, sortent les différences de leur style.
En effet, ce style n’était pas celui qu’on demandait aux examens. […] Ses mauvaises lectures ont gâté son style. […] Ils s’expriment fort bien, en style correct et imagé, avec des gestes mesurés et polis. […] Son style est calme et sensuel, exact et câlin, précis et vague, respectueux et très impie. […] Oubliez les truculences du début, ce style qui a des airs de mystification et de gageure, ce vertige qui souvent fait trembler la main, vaciller l’esprit, broncher la plume, gauchir le style.
Une fois produit, il travailla vigoureusement à se faire sa place, à concilier l’étude du cabinet avec la pratique : il était littérateur à la façon du xvie siècle, parlant latin autant et plus volontiers que français ; c’est pour le latin qu’il garde ses élégances : quand il écrit dans sa langue maternelle, son style bigarré exprime à merveille le mélange de goût qui régnait dans les professions savantes durant la première moitié du xviie siècle. […] Mais Renaudot n’était pas facile à émouvoir sur ce point ; il croyait à l’utilité de ses diverses innovations et de ses établissements, à celle de sa Gazette entre autres, et il s’en faisait gloire : Mon introduction des Gazettes en France, écrivait-il en 1641, contre lesquelles l’ignorance et l’orgueil, vos qualités inséparables, vous font user de plus de mépris, est une des inventions de laquelle j’aurais plus de sujet de me glorifier si j’étais capable de quelque vanité… ; et ma modestie est désormais plus empêchée à récuser l’applaudissement presque universel de ceux qui s’étonnent que mon style ait pu suffire à tant écrire à tout le monde déjà par l’espace de dix ans, le plus souvent du soir au matin, et des matières si différentes et si épineuses comme est l’histoire de ce qui se passe au même temps que je l’écris, que je n’ai été autrefois en peine de me défendre du blâme auquel toutes les nouveautés sont sujettes.
La Dissertation de l’abbé de Pons amena l’aimable jésuite du Cerceau à le réfuter dans le Mercure du mois suivant, et à venir plaider la cause de la poésie et de la versification dans un article fort poli, assez juste, et où il s’applique à disculper les vers de ce reproche d’air gêné et d’affectation : Pour moi, observait-il assez finement, si j’ose dire ce que je pense, je m’en aperçois bien davantage (de cet air contraint) dans des ouvrages de prose, pleins d’esprit d’ailleurs, mais dont le style me paraît bien plus gêné et plus affecté que celui de la poésie. […] Voilà la contradiction nettement posée, Rivarol se chargera de confirmer et de mettre en relief la pensée de l’abbé de Pons quand il dira dans son Discours sur l’universalité de la langue française : Le français, par un privilège unique, est seul resté fidèle à l’ordre direct, comme s’il était tout raison ; et on a beau, par les mouvements les plus variés et toutes les ressources du style, déguiser cet ordre, il faut toujours qu’il existe ; et c’est en vain que les passions nous bouleversent et nous sollicitent de suivre l’ordre des sensations, la syntaxe française est incorruptible.
Un peu de miroitement (car ils ont trop de talent de style, et ils ont fait trop de progrès dans leur manière pour qu’on ne leur touche pas quelque chose de leurs défauts), un peu trop de scintillement, dis-je, et de cliquetis est l’inconvénient de cette quantité de mots et de traits rapportés de toutes parts et rapprochés. […] C’est une faute de français ou plutôt contre la grammaire ; mais dans ces styles parlés on n’y regarde pas de si près, et l’on n’en reste que mieux dans le génie de la langue.
Mais l’Empire, en se transportant à Byzance, rend au génie grec, subtil, raisonneur, inventeur, son ascendant et sa supériorité : dès lors, la Grèce byzantine va prendre la tête des arts, et mettre sa marque et comme sa signature à un style nouveau. […] Cet art byzantin fut inoculé par les Nestoriens fugitifs aux Arabes ; il poussa de ce côté une de ses branches, bientôt florissante ; et il s’insinua, il s’infiltra aussi, tout à l’opposé, dans notre Occident, dans notre Gaule, vers l’époque de Charlemagne, et entra pour beaucoup dans la formation de notre premier style roman.
On se contenta donc, au lieu de préluder à la grande guerre et, par un coup d’essai immortel, de frayer la route à la campagne de Marengo, de faire une campagne dans le vieux style, le style ordinaire, selon la bonne méthode chicanière, savante, manœuvrière, pied à pied.
A tous ceux qui s’occupent de langue, qui ont à cœur le style, l’élévation, l’éclat, l’ornement, je conseillerais de relire de temps en temps, de dix en dix ans, cette ingénieuse, en grande partie judicieuse et tout à fait généreuse Défense et Illustration de la Langue françoise, cette éloquente plaidoirie pour notre idiome vulgaire, que l’on s’efforçait pour la première fois de rehausser et d’enrichir des dépouilles des Anciens. […] L’on comprend d’ailleurs ce succès ; les habitudes scolastiques données aux esprits par les théologiens et par les légistes, qui étaient les deux classes de la société spécialement littéraires, rendaient facile à comprendre et intéressante à suivre une forme de pensée et de style qui nous paraît aujourd’hui pénible autant que fastidieuse et monotone, parce que nous ne sommes plus dans un milieu imprégné de ce genre d’études et de ces distinctions quintessenciées qui étaient comme dans l’air.
Avec plus d’un illustre, le discours ne sort plus de là : c’est un cri de misère en style de haute banque et avec accompagnement d’espèces sonnantes. […] Les journaux s’élargissant, les feuilletons seiment, l’élas indéfiniment, l’élasticité des phrases a dû prêter, et l’on a redoublé de vains mots, de descriptions oiseuses, d’épithètes redondantes : le style s’est étiré dans tous ses fils comme les étoffes trop tendues.
Les gens de parlement, les théologiens, les doctes, écrivaient la veille en latin ; leur style, en passant au français, était tout gorgé de latinismes. […] Ampère a rappelé la Chine à propos d’Ausone et de ses périphrases : « Il existe entre les lettrés, a-t-il dit, surtout quand ils écrivent en vers, une langue convenue comme celle des précieuses, et dans laquelle rien ne s’appelle par son nom. » Le Père Garasse sent si bien qu’il est sujet à cette espèce de chinoiserie de style, qu’en tête de sa Somme thèologique, voulant être grave, il avertit qu’il tâchera d’écrire nettement et sans déguisement de métaphores ; ce qui n’est pas chose aisée, ajoute-t-il, « car il en est des métaphores comme des femmes, c’est un mal nécessaire. » Le Père Lemoyne de la Dévotion aisée n’est pas moins ridicule (et dans le même sens) que le plus mauvais des rimeurs allégoriques du ive siècle.
D’autre part, on n’y trouve ni style, ni goût, ni composition, ni sens de la vie : ce ne sont pas des œuvres d’art. […] Très exactement informé, religieusement attaché à la vérité et aux documents qui la montrent, bon écrivain dont le style a de la solidité et du relief, ce clerc errant, de vie assez libre, est intraitable sur les privilèges et la mission du clergé ; c’est un de ces enfants perdus, de ces polémistes que rien n’effraie, qui, de leur autorité privée, se font défenseurs et régents de l’Église, aussi prompts à en invectiver la corruption qu’à réclamer pour elle toute la puissance : l’Eglise, de tout temps, a eu de ces serviteurs zélés, brutaux, indociles, qui la gênent, la compromettent autant qu’ils la servent, et, somme toute, lui font payer cher leurs services.
Il pose les lois de la versification, qui sera correcte d’abord, mais aussi harmonieuse, expressive ; il pose les lois du style, qui sera correct et clair, mais efficace et expressif, les lois de la composition qui sera juste et proportionnée : vers, langage, plan, ce sont trois moyens, qui doivent concourir à approcher l’objet naturel, sans le déformer, de l’esprit du lecteur. […] Voir les Pensées de Pascal sur le style et sur l’éloquence, notamment éd.
Il lui restait en propre l’art avec lequel il avait su fondre ces éléments divers, en conservant la verve la plus franche, le trait le plus net et le style le plus vif qu’on eût jusqu’alors admirés sur la scène française. […] Les Italiens avaient pu caricaturer certaines façons minaudières, quelques singularités de costume, mais non le style de Madelon ou de Cathos.
L’arbitraire est là si évident et le public s’est si bien habitué depuis une vingtaine d’années à toute espèce de nudités de style que le cercle des choses jadis défendues s’est étrangement rétréci. […] Pas plus que la gloire future de l’écrivain, la langue et le style ne se trouvent bien de ces perpétuelles improvisations ; en revanche, certains genres naissent ou prospèrent ; la polémique sur les affaires publiques prend une intensité et aussi une violence extrêmes ; la critique au jour le jour, le roman débité en tranches, la nouvelle, l’essai, en un mot l’exposé, le commentaire et la discussion de tout ce qui est actuel, susceptible d’être présenté en peu d’espace et compris sans effort, croissent et fleurissent avec énergie.
le style « décadent » de la Revue, ce prétendu style décadent aboli depuis un an, qui depuis un an n’existait même plus, et qu’on me reprochait après un an, et un an de relations amicales… Pareil prétexte n’avait certainement pu être suggéré que par les rancunes de quelque metteur des drames wagnériens en livrets d’opéra… Et M.
Quel est donc la raison d’être de son grand succès : le dialogue, l’esprit, la poésie, le style ? […] Grattez l’élégance vernie et superficielle de son style, vous trouverez une tendance, à peine contenue, à la panse et à la trogne de la facétie rabelaisienne et je ne sais quelle façon prosaïque et positive d’entendre les choses, peu favorable à l’éclosion de la poésie.
Le président de Mesmes (qui fut premier président du Parlement) lui adressait, avec des étrennes, des vers qu’il avait fait faire en style de chevalerie, en style marotique, selon la mode du moment, et où il se qualifiait le très puissant Emperier de l’Indoustan écrivant à la plus que parfaite Princesse Ludovise, Emperière de Sceaux.
Son ton partout est vif, son style leste, espiègle, éveillé ; mais ne lui demandez rien de grave ou de profond. […] Duclos l’a bien défini un écrivain agréable, et dont le style a les grâces négligées d’une femme.
Cependant, cette grande opposition n’y cause nulle rudesse… On remarque assez les négligences de style, les répétitions, les longueurs. […] Un de ces plus grands inconvénients, et qui donne le plus d’ennui, c’est que les gens du monde ne s’imaginent point qu’on puisse aborder un bel esprit de la même façon qu’une autre personne, et lui parler autrement qu’en haut style : Car enfin je vois des hommes et des femmes qui me parlent quelquefois, qui sont dans un embarras étrange, parce qu’ils se sont mis dans la fantaisie qu’il ne me faut pas dire ce qu’on dit aux autres gens.
C’est le style des Contes moraux qui recommence. […] En maltraitant ce dernier, il n’a pas senti que dans les vers de Boileau il y avait plus de vraie poésie de style que dans tous ces vers prosaïques et soi-disant philosophiques du xviiie siècle, quelques pièces de Voltaire exceptées.
En français, au contraire, il traduit ; il cite, il enchâsse de belles pensées, de jolis traits, de beaux et riches exemples et, au milieu de la bonhomie de son style, cela aussitôt se distingue. […] Le mérite, à cette date de 1726, c’est d’avoir donné la Rhétorique classique très large et très facile d’une époque où l’on comptait déjà les excellents et élégants traducteurs, les Gédoyn, les Montgault, les d’Olivet, les Sacy ; il les amène et les introduit dans le courant de son style, sans rien de sec ni d’accablant.
Parlant des écrivains latins qui imitèrent le style de Salluste et forcèrent sa manière, il fait un retour sur les écrivains modernes qui se piquent aussi d’imiter les deux plus beaux esprits du siècle (Fontenelle et Voltaire), et qui veulent prendre notamment à ce dernier « le ton philosophique, la manière brillante, rapide, superficielle, le style tranchant, découpé, heurté ; les idées mises en antithèses et si souvent étonnées de se trouver ensemble.
Mais le xviiie siècle, dans son ambition, ne se contente point de si peu ; Sieyès, dans un de ses rares moments d’épanchement, disait : « La politique est une science que je crois avoir achevée. » Et quant à la morale, plus d’un philosophe du temps eût été plus loin et eût dit : « Je crois l’avoir à la fois achevée et inventée. » Piqué par les reproches du Génie et enhardi par sa présence, le voyageur s’ouvre donc à lui ; il veut savoir « par quels mobiles s’élèvent et s’abaissent les empires ; de quelles causes naissent la prospérité et les malheurs des nations ; sur quels principes enfin doivent s’établir la paix des sociétés et le bonheur des hommes. » Ici les ruines de Palmyre s’oublient : le Génie enlève le voyageur dans les airs, lui montre la terre sous ses pieds, lui déroule l’immensité des lieux et des temps, et commence à sa manière toute une histoire de l’humanité et du principe des choses, de l’origine des sociétés, le tout sous forme abstraite et en style analytique, avec un mélange de versets dans le genre du Coran. […] Son style est toujours soigné, quelquefois recherché, l’on pourrait même dire précieux.
Le Capitole, construction d’un style encore innommé, est une longue bicoque en plâtre — couleur lilas pâle. […] » Et je me mis à contempler ces vestes en velours vert, relevé de rubans jaunes et rouges, et ces chatoyantes écharpes — omnicolores à humilier le style de Saint-Victor.
L’autre imitation, qui est celle que nous faisons des anciens, devrait consister non point à les copier, non point à imiter leur manière la forme de leur style, la tournure de leurs phrases, leur système de composition, mais à imiter la nature, comme ils l’ont imitée, c’est-à-dire à peindre les objets par l’impression reçue. […] Si nous pouvions nous arrêter à des détails, nous aurions ici quelques remarques singulières à faire sur la solennité de Balzac, qui n’a point été égalée, sur la magnificence du style de Buffon, et la plénitude de celui de Thomas ; tentatives plus ou moins heureuses du génie de la langue française qui s’agitait dans les liens de la prose.
Ce n’est pas seulement une force de style acquise ou spontanée, un faire particulier dont le poète est doué, c’est quelque chose de plus étonnant et de plus profond. […] Ainsi les pièces du volume les plus hérissées de difficultés et qui en paraissent comme fantastiques, c’est Le Voyageur, poëme géographique ; c’est La Fontaine de Jouvence, poëme hydrothérapique ; c’est Le Nain, c’est L’Égoïste, que l’auteur appelle une folie ; c’est Pan, c’est L’Idylle du Financier et de la Bergère ; c’est La Chine, c’est Blaise et Rose, une idylle réaliste, en style marotique, et ces pièces ont une étendue qui les rend impossibles à citer.
Lu, le discours trahira de grandes irrégularités de style, et plus que des audaces, je veux dire des incohérences d’images, des disparates de ton et des défauts d’analogie qui s’apercevront assez : Cela sautait aux yeux, même à l’audition.
Peu importait en ce moment, l’essentiel était fait ; Alfred de Vigny était entré dans notre galerie ; sans être satisfait en tout, il n’était point fâché, il ne nous en voulait pas : il m’écrivait à cette occasion en son style poétique : « Je vois que de toutes les Constellations que j’ai suivies, c’est encore à la Lyre que vous donnez la préférence. » Il avait raison.