Vous ne cessez de vanter l’intelligence, et vous tuez les plus intelligents. […] Mais le pouvoir déclare qu’il ne protège que les intérêts positifs, et qu’il est étranger à l’intelligence, dont il a ombrage ; et cela hautement déclaré et imprimé, il répond : Que ferais-je de vous ? […] « J’ai voulu montrer l’homme spiritualiste étouffé par une société matérialiste, où le calculateur avare exploite sans pitié l’intelligence et le travail.
Prenons les hommes que l’auteur nous montre dans la nouvelle intitulée Kor et Kalinitch : ils ne le cèdent assurément pas, pour l’intelligence et la dignité, aux paysans des pays les plus éclairés, et l’emportent sur eux à beaucoup d’autres égards. […] Il est ennemi déclaré de la mauvaise compagnie, et craint par-dessus tout de manquer aux convenances ; ce qui n’empêche pas que dans ses moments de bonne humeur il ne lui arrive de se poser en partisan d’Épicure ; mais il estime peu, toutefois, la philosophie ; il l’appelle la nourriture brumeuse des intelligences germaniques, et parfois même il la traite de fatras insipide. […] Ayant fait choix d’un emplacement convenable, sur le bord d’une clairière, vous vous y arrêtez ; ainsi posté, vous promenez vos regards de tous côtés, vous examinez vos capsules, et de temps en temps vous échangez un signe d’intelligence avec votre compagnon.
Il y a une loi de nécessité qui s’exécute sans dessein, sans effort, sans intelligence, sans progrès, sans résistance dans toutes les œuvres de nature. […] — Il est vrai ; mais la machine Raphaël n’a jamais été commune ; mais les ouvrages de cette machine ne sont pas aussi communs que les feuilles de chêne ; mais par une pente naturelle et presque invincible nous supposons à cette machine une volonté, une intelligence, un dessein, une liberté. […] On ne voit pas ici plus de bâtiments qu’il n’en faut pour enrichir et animer la scène ; c’est l’intelligence et le goût ; c’est l’art qui les a distribués pour l’effet mais l’effet est produit sans que l’art s’apperçoive.
Un mouvement de vénération nous convainc avant que, de si loin et si vite, Minerve ait pu toucher notre intelligence. […] Je ne pense pas que le plus grand nombre des trompeurs le soient par malice et par une certaine intelligence ; et Socrate eut raison de soutenir que ceux qui mentent volontairement sont meilleurs que ceux qui mentent malgré eux. […] Mais il avait raison de se moquer des prétentions minéralogiques et géologiques de son jeune rival, et de lui dire : Pourquoi user votre intelligence contre de misérable pierraille ? […] Un philosophe a dit : « La Nature n’est belle que pour une intelligence qui la contemple. » Mais que serait-ce, à son tour, une intelligence sans emploi ? […] Si quelque chose pouvait contredire la pensée du philosophe qui a dit : « La Nature ne se connaît point ; elle n’est belle que pour une intelligence qui la contemple », ce serait l’harmonie avec laquelle la Seine suit ses rives.
Privation, & alors on l’appelle alpha privatif, ce que les Latins ont quelquefois imité, comme dans amens qui est compose de mens, entendement, intelligence, & de l’alpha privatif. […] Les personnes sensées ont de la peine à croire qu’il y ait eu des hommes assez déraisonnables pour réaliser leurs propres abstractions : mais entre autres exemples, on peut les renvoyer à l’histoire de Valentin hérésiarque du second siecle de l’Eglise : c’étoit un Philosophe Platonicien qui s’écarta de la simplicité de la foi, & qui imagina des aons, c’est-à-dire des êtres abstraits, qu’il réalisoit ; le silence, la vérité, l’intelligence, le propator, ou principe. […] D’autres enfin se placent également bien devant ou après leurs substantifs, c’est un savant homme, c’est un homme savant ; c’est un habile avocat ou un avocat habile ; & encore mieux, c’est un homme fort savant, c’est un avocat fort habile : mais on ne dit point c’est un expérimenté avocat, au lieu qu’on dit, c’est un avocat expérimenté, ou fort expérimenté ; c’est un beau livre, c’est un livre fort beau ; ami véritable, véritable ami ; de tendres regards, des regards tendres ; l’intelligence suprème, la suprème intelligence ; savoir profond, profond savoir ; affaire malheureuse, malheureuse affaire, &c.
Tous ces bruits, toutes ces intelligences qui circulent rapidement dans les cours et s’y dispersent, ne tombaient point chez lui en pure perte ; il en faisait amas pour nous et réservoir. […] En tout, Saint-Simon est plutôt supérieur comme artiste que comme homme ; c’est un immense et prodigieux talent, plus qu’une haute et complète intelligence.
Le beau serait de réunir les deux destinées : nul homme ne l’a fait ; mais il n’y a cependant aucune incompatibilité entre l’action et la pensée dans une intelligence complète. […] Ils proscrivent du domaine de l’action celui qui excelle dans le domaine de l’intelligence et de la parole ; ils ne veulent pas que Platon fasse des lois réelles, ni que Socrate gouverne une bourgade.
Son nez était aquilin, la finesse naturelle du demi-Italien s’y révélait sur la bonhomie indécise du montagnard de Savoie ; ses lèvres étaient un peu pincées, mais un pli d’amertume triste en caractérisait fortement les coins ; son menton, trait principal de l’intelligence, était ferme, long, carré, et dessinait avec ses joues maigres et creuses un angle fermement accentué comme chez un vieillard. […] Virieu et moi, nous étions souvent en froid avec lui ; il nous était trop supérieur en intelligence et en connaissance du monde pour être notre égal.
Et il avait l’intelligence : de tous nos romantiques, Vigny est le plus, peut-être le seul penseur. […] Ni lyrique, ni orateur, il a le souffle court, l’invention pauvre : la sensibilité nulle, l’intelligence médiocre.
L’intelligence, chez plusieurs d’entre nous, s’est assez affranchie de l’instinct, assez différenciée pour que ceux-là puissent comprendre, encore qu’un peu confusément, ce qu’ils sont et ce qu’ils font. […] Ainsi l’âme sociale et l’âme égoïste retrouvent leur accord et peuvent s’essayer à vivre en bonne intelligence.
Les Apocryphes de l’Ancien Testament, surtout la partie juive des vers sibyllins et le Livre d’Hénoch, joints au Livre de Daniel, qui est, lui aussi, un véritable apocryphe, ont une importance capitale pour l’histoire du développement des théories messianiques et pour l’intelligence des conceptions de Jésus sur le royaume de Dieu. […] Si l’amour d’un sujet peut servir à en donner l’intelligence, on reconnaîtra aussi, j’espère, que cette condition ne m’a pas manqué.
Van Dyck et Blauwaert, Mme Boidin-Puisais doivent à ce maître leur intelligence de l’œuvre, la belle netteté, si peu commune, de leur diction : mais le drame wagnérien n’est point appris facilement ; ces artistes avaient trop de choses à oublier encore pour s’y rendre parfaits. […] Sans doute, le public a saisi ce caractère ce l’œuvre ; une interprétation un peu hésitante aux débuts, mais bonne en somme6, une mise en scène minutieusement soignée par les directeurs, lui ont rendu plus aisée l’intelligence.
« Quant aux efforts qu’il m’en coûta pour m’y rendre raison d’abord de quelques mots, puis par-ci par-là de phrases isolées, et enfin de passages d’une assez longue haleine, il sera facile au lecteur de s’en faire une idée, comme aussi du plaisir qui me transporta quand je fus parvenu à cette intelligence. […] ne faut-il pas que le vénérable ermite ait perdu, par l’âge, l’intelligence, pour souffrir que de si grossiers vêtements enveloppent un si beau corps ?
Un petit nombre de naturalistes, doués d’une intelligence ouverte et qui d’eux-mêmes ont déjà commencé à douter de l’immutabilité des espèces, peuvent être influencés par cet ouvrage ; mais j’en appelle surtout avec confiance à l’avenir et aux jeunes naturalistes qui s’élèvent et qui pourront regarder les deux côtés de la question avec plus d’impartialité. […] Quand nous ne regarderons plus un être organisé comme un sauvage regarde un navire, c’est-à-dire comme quelque chose qui surpasse notre intelligence ; quand nous considérerons chaque production de la nature comme ayant eu son histoire ; quand nous regarderons chaque organe et chaque instinct comme la résultante d’un grand nombre de combinaisons partielles dont chacune a été utile à l’individu chez lequel elle s’est produite, à peu près comme nous voyons dans toute grande invention mécanique la résultante du travail, de l’expérience, de la raison et même des erreurs de nombreux ouvriers ; je puis dire, d’après mes propres expériences, que d’un pareil point de vue l’étude de chaque être organisé et de la nature tout entière nous semblera bien autrement intéressante.
Aux maîtresses elle recommande aussi de n’employer que des mots qui soient bien compris des jeunes intelligences, de ne pas emprunter aux livres qu’on lit les termes qui sont bons surtout pour ces livres, et qui sont de trop grands mots pour le discours commun.
Bossuet croit à la religion de toute son intelligence et de tout son cœur, et dans le cours de cette vie si pleine on ne voit pas d’interstice par où le doute se soit jamais introduit.
Il est homme de lettres aussi, celui que le feu de son imagination porte sans cesse vers des sujets nouveaux ; qui, doué de verve et de fécondité naturelle, n’a pas plus tôt fini d’une œuvre qu’il en recommence une autre ; qui se sent jeune encore pour la production à soixante ans comme à trente, qui veut jouir tant qu’il le peut de cette noble sensation créatrice et mener la vie active de l’intelligence dans toutes les saisons.
Sa tristesse et sa distraction se dissipèrent : elle ne résista plus au charme secret que répandait dans son âme la vue du bonheur que je lui devais ; et quand nous sortîmes de table, nos cœurs étaient d’intelligence comme si nous n’avions jamais été séparés.
Il est amusant, quand on sait de quoi il retourne, de suivre de l’œil jour par jour le train de cette Cour et de ses plaisirs, ces continuelles parties à La Muette, à Madrid, à La Rivière, à Choisy, ces voyages intimes du roi et des quatre sœurs ainsi qu’on les appelle, c’est-à-dire des deux princesses du sang, Mlle de Charolais et Mlle de Clermont, et des deux sœurs, Mme de Mailly et Mme de Vintimille ; car Mme de Mailly, à un certain moment, s’était adjoint une de ses sœurs, avec laquelle elle paraît avoir vécu en parfaite intelligence, quoique celle-ci fût d’une humeur plus hardie et plus inégale.
On y assiste ; dans un tête-à-tête avec son fils, elle lui adresse successivement quatre requêtes, et lui demande au moins de quatre choses l’une : 1° de ne point mourir, lui son fils, de ne point souffrir mort, s’il est possible ; 2° cette première requête refusée, et puisque cette mort est jugée nécessaire, de ne point la souffrir si amère, si honteuse et si cruelle ; 3° cette requête rejetée encore par Jésus au nom des Écritures et des Prophéties, de permettre au moins que sa mère meure la première et n’ait point à voir de ses yeux une mort si terrible ; 4° puisque cette troisième pétition n’est pas plus accueillie que les deux autres, de vouloir bien qu’elle perde au moins connaissance pendant la durée de la Passion, qu’elle soit ravie en esprit et demeure comme une chose insensible, privée d’intelligence et de sentiment.
Ce livre, l’un des plus récréatifs et des plus substantiels qui existent, commencé d’abord presque au hasard, ne visant qu’à être une moquerie des romans de chevalerie et d’un faux genre littéraire à bout de vogue est devenu vite en avançant, sous cette plume fertile, au gré de cette intelligence égayée, un miroir complet de la vie humaine et tout un monde.
C’est presque une profanation, à côté de cette Mlle Leduc, même épousée et devenue comme dans une mascarade marquise de Tourvoie, de nommer la comtesse de Bouflers qui présidait avec tant d’intelligence et de goût au salon de l’Isle-Adam, cette généreuse amie de Hume, de Rousseau et de Gustave III, esprit supérieur malgré de légers travers, et dont quelques pages, aujourd’hui retrouvées, sont dignes de l’histoire41.
Anton Seidl avec une intelligence unique de la pensée Wagnérienne.
Walckenaer appartient au mouvement scientifique de la fin du xviiie siècle et à cette impulsion généreuse dans l’ordre de l’intelligence.
Nous n’étions que nous trois, elle, l’amour & moi, Et l’amour fut d’intelligence.
Lorsque les hommes qui se sont arrogé le domaine de l’intelligence ou de l’imagination, et qui ont renoncé en même temps à l’inspiration de la poésie, se sont ainsi avancés sans mission, ils ont cru pouvoir choisir parmi leurs propres pensées.
Pas plus qu’un Hellène n’aurait pu tirer de l’âme égyptienne son inspiration, ni un artiste du moyen-âge de l’âme grecque, un moderne dont les sens et l’intelligence ne sont pas clos, ne peut, quelque soit son propre tempérament, faire que la vérité d’hier soit celle d’aujourd’hui.
Il y a plus encore : les nécessités immédiates d’une nation à faire, c’est-à-dire la politique, l’industrie, le commerce, l’agriculture, l’armée, l’école, la législation, tous ces devoirs impérieux ont absorbé et absorbent encore une quantité d’intelligences de premier ordre, qui, en d’autres circonstances, se seraient orientées vers les arts et la littérature.
Le compositeur a cru pouvoir, sans inconvénient pour l’intelligence de notre Préface, intervertir l’ordre de nos feuillets, — vous devinez quel pêle-mêle grotesque est résulté de cette méprise typographique. […] ils abondent autour de nous, les malades de l’esprit ; ils emplissent le monde, les désolés de l’intelligence ; — et, parmi les plus jeunes hommes d’à présent, pour quelques gaietés véritables, que d’irrémédiables inquiétudes ou d’implacables tristesses ? […] L’élément humain a peut-être dans son livre une part plus large ; il s’adresse moins à l’intelligence, au cœur davantage. […] Mais, comme il possède, en somme, — ce revenant littéraire, ce bel-esprit, moitié mousquetaire et moitié abbé, — une très haute et très sagace intelligence, il ne dépend pas de lui d’échapper à la compréhension absolue du présent, pour murer sa pensée dans le culte exclusif d’un passé évanoui ; sans avoir rien oublié, il a appris quelque chose. […] § III Certes, l’article sur Béranger, qui ameuta autour de M. de Pontmartin les colères de tant de gens d’esprit mêlés à tant de bélîtres, renfermait plus d’une vérité bonne à dire, plus d’une idée juste ; les intelligences d’élite, seules capables d’apprécier à leur réelle valeur les beaux vers et de marquer leur vrai rang aux poètes, lui auraient su gré d’attacher ce grelot, si, en faisant beaucoup de bruit, M. de Pontmartin l’avait fait pour son propre compte. — Mais, en cela comme en bien d’autres choses, il était la cloche de l’Univers.
Elles sont, en un mot, les truchements de l’intelligence qui nous distingue des brutes, dont la grossièreté muette manque de signes comme d’idées. […] L’Iliade seule, en nous donnant la mesure de l’intelligence d’Homère, devient pour tous les hommes le plus haut degré proportionnel de la grandeur de leur génie. […] Ses principes, quoique délicats et reculés dans l’intelligence, n’échappent pas à une pénétration forte et subtile ; mais leur quantité trouble l’esprit qui, voulant en faire le compte, s’y éblouit quelquefois. […] Prétendre à donner les raisons de tout, me paraît la borne la plus étroite de l’intelligence, et le comble du déraisonnement. […] Quand nous détaillerons les ressorts de cette terrible tragédie, vous désapprouverez, je crois, le ton d’ironie dédaigneuse que prend La Harpe en en parlant, et en la jugeant d’après son intelligence imbue des opinions de nos jours, et moins étendue que son érudition.
Mme de Staël reproduit donc suffisamment en elle cette manière et ce charme d’autrefois ; mais elle ne s’en tient pas à cet héritage, car ce qui la distingue, comme la plupart des génies, et plus éminemment qu’aucun autre, c’est l’universalité d’intelligence, le besoin de renouvellement, la capacité des affections. […] Oui, en ses années de vie entière et puissante, instinctivement et par l’effet d’une sympathie, d’une curiosité impétueuse, elle aspirait, on peut le dire avec éloge, elle aspirait à une vaste cour, à un empire croissant d’intelligence et d’affection, où rien d’important ou de gracieux ne fût omis, où toutes les distinctions de talent, de naissance, de patriotisme, de beauté, eussent leur trône sous ses regards : comme une impératrice de la pensée, elle aimait à enserrer dans ses libres domaines tous les apanages. […] Voici quelques traits de celui de Zulmé par M. de Guibert : « Zulmé n’a que vingt ans, et elle est la prêtresse la plus célèbre d’Apollon ; elle est celle dont l’encens lui est le plus agréable, dont les hymnes lui sont les plus chers… Ses grands yeux noirs étincelaient de génie, ses cheveux de couleur d’ébène retombaient sur ses épaules en boucles ondoyantes ; ses traits étaient plutôt prononcés que délicats, on y sentait quelque chose au-dessus de la destinée de son sexe… » J’ai eu moi-même sous les yeux un portrait peint de Mlle Necker, toute jeune personne ; c’est bien ainsi : cheveux épars et légèrement bouffants, l’œil confiant et baigné de clarté, le front haut, la lèvre entr’ouverte et parlante, modérément épaisse en signe d’intelligence et de bonté ; le teint animé par le sentiment ; le cou, les bras nus, un costume léger, un ruban qui flotte à la ceinture, le sein respirant à pleine haleine ; telle pouvait être la Sophie de l’Emile, tel l’auteur des Lettres sur Jean-Jacques, accompagnant l’admirable guide en son Élysée, s’excitant de chacun de ses pas, allant, revenant sans cesse, tantôt à côté et quelquefois en avant. […] Zacharias Werner, l’un des originaux de cette cour, et dont on jouait l’Attila et les autres drames avec grand renfort de dames allemandes, Werner écrivait vers ce temps (1809) au conseiller Schneffer (nous atténuons pourtant deux ou trois traits, auxquels l’imagination, malgré lui sensuelle et voluptueuse, du mystique poëte, s’est trop complu) : « Mme de Staël est une reine, et tous les hommes d’intelligence qui vivent dans son cercle ne peuvent en sortir, car elle les y retient par une sorte de magie.
L’intelligence ainsi dirigée est plus propre que toute autre à comprendre le devoir ; la volonté ainsi armée est plus capable que toute autre d’exécuter le devoir. […] Les ecclésiastiques qui les écrivent, Clarke, Bentley, Law, Watt, Warburton, Butler, sont au niveau de la science et de l’intelligence laïques. […] C’est le sens moral qui, après lui avoir gardé la fidélité des basses classes, lui a conquis l’assentiment des hautes intelligences. […] Mais ce qui le distinguait entre tous les autres, c’était une large intelligence compréhensive qui, exercée par des études et des compositions philosophiques868, saisissait les ensembles, et, par-delà les textes, les constitutions et les chiffres, apercevait la direction invisible des événements et l’esprit intime des choses, en couvrant de son dédain « ces prétendus hommes d’État, troupeau profane de manœuvres vulgaires, qui nient l’existence de tout ce qui n’est point grossier et matériel, et qui, bien loin d’être capables de diriger le grand mouvement d’un empire, ne sont pas dignes de tourner une roue dans la machine. » Par-dessus tant de dons, il avait une de ces imaginations fécondantes et précises qui croient que la connaissance achevée est une vue intérieure, qui ne quittent point un sujet sans l’avoir revêtu de ses couleurs et de ses formes ; et qui, traversant les statistiques et le fatras des documents arides, recomposent et reconstruisent devant les yeux du lecteur un pays lointain et une nation étrangère avec ses monuments, ses costumes, ses paysages et tout le détail mouvant des physionomies et des mœurs.
la science obligeant la liberté de l’esprit humain au joug des lois de la nature et s’imposant comme d’autorité ; l’art, au contraire, échappant à la contrainte de ces lois et rendant l’intelligence à la pleine possession d’elle-même ! […] Il n’existe pas de cœur qui n’ait jamais battu, d’intelligence qui n’ait jamais pensé, d’imagination qui n’ait jamais rêvé. […] comme si les soucis de la vie faisaient trêve un instant, et que, libre de toute contrainte, l’intelligence fût un instant transportée dans un monde qu’elle se créerait au gré de sa fantaisie ! […] Seulement, à ces questions vagues, une nature moins sensuelle, une intelligence plus ferme, une volonté plus active répondent par l’acceptation du devoir quotidien dont elles apprennent vite à goûter le charme et la poésie latente. […] Je crois avoir montré que je ne me trompais pas en disant que la sympathie, la sympathie de l’intelligence et du cœur en même temps, était l’âme de ce naturalisme.
C’est le moyen de lui être encore agréable, et elle vous saura gré de cette intelligence, du reste excessivement rare. […] Il s’est trouvé des gens de très petite intelligence, des gens très bornés, qui avaient un immense génie littéraire. […] Molière, lui, était une belle intelligence, et un incomparable génie littéraire, mais ce n’était peut-être pas un puissant génie philosophique. […] Il s’est servi, par exemple, avec beaucoup d’intelligence, de cette Lettre sur l’Imposteur qui parut quinze jours après l’interdiction de Tartuffe, et qui est assez généralement attribuée à Molière lui-même, quoique ce ne soit pas mon avis qu’elle soit de lui. […] Joad conspire en prophète, et conspire en homme d’État, avec un ton d’oracle et avec autorité, très avisé en même temps que très ardent et très fort, intelligence froide au service d’une passion ardente.
La France compte assurément d’autres grands producteurs dans les choses de l’intelligence. […] C’est ainsi que, dans les Mémoires d’un orphelin, il admire beaucoup, en l’attribuant à la seule Franche-Comté, cette expression d’innocent appliquée à l’enfant privé d’intelligence. […] L’art, en effet, s’adresse uniquement à l’intelligence ; l’art est le langage de l’âme ; l’art n’existe, l’art n’est vraiment divin, comme l’ont fait les anciens, que s’il subordonne l’émotion des sens à l’émotion de l’esprit. […] Rien ne leur est étranger de ce qui émeut ; aucune délicatesse de sentiment ne leur échappe ; si l’homme a plus spécialement l’intelligence de l’esprit, il est donné à la femme d’avoir l’intelligence du cœur. […] Eugène Sue avait à faire faire par un de ses personnages un récit long, assez insignifiant, mais indispensable à l’intelligence de l’action.
Cet antique est d’un grand goût de dessein, mais sans intelligence de groupes ni de clair-obscur. […] L’intelligence de l’optique a rendu Phidias célèbre. […] Le Titien est parfait dans la partie du coloris & pour l’intelligence du paysage. […] L’intelligence de l’Arabe & du Syriaque peut faciliter le commerce avec le Levant(*). […] On lit dans les ancodotes de la constitution unigenitus, qu’il fut désavouer avec ferment, chez un notaire, une lettre qu’il avoit écrite au cardinal de Noailles, pour lui donner avis qu’on conspiroit, dans la société, contre le régent, & qu’elle avoit des intelligences avec l’Espagne.
Son faux Contrat social et le vrai contrat social (1re partie) I La politique spéculative a été en tout temps l’exercice le plus important et le plus passionnant des hautes intelligences parmi les écrivains (j’en excepte toutefois les religions, exercice plus relevé encore des spéculations humaines). […] C’est par là qu’il vit : l’adoration est la vertu de l’intelligence.
Les imbéciles se plaignent de cette minutie apparente de descriptions, les hommes de haute et profonde intelligence l’admirent. […] Le seul aspect de son cousin avait éveillé chez elle les penchants naturels de la femme, et ils durent se déployer d’autant plus vivement qu’ayant atteint sa vingt-troisième année, elle se trouvait dans la plénitude de son intelligence et de ses désirs.
Les chuchotements de la maison lui avaient fait connaître la secrète intelligence qui existait entre la jeune Anglaise et moi, les obstacles que sa mère mettait par religion à ce penchant de sa fille, et les difficultés qu’elle apportait à nos entretiens. […] Ce fut là que j’eus l’occasion de voir et d’admirer, suspendue aux bras de sa mère, cette ravissante princesse Christine, dans toute la fleur de beauté et d’intelligence, que son sort destinait pour épouse au roi d’Espagne, Ferdinand VII, et qui a su, au milieu des tempêtes, plaire, gouverner, transmettre un trône à sa fille, régner, tomber, ou plutôt se retirer du trône, plus heureuse et plus habile que Christine de Suède, dans le demi-jour d’une existence à l’abri des coups de vent.
XIII Nous concevons le vers, à l’origine des littératures, quand l’intelligence pure était moins dégagée des sens. […] Des foules de traducteurs studieux, acharnés à l’intelligence des livres indiens, sanscrits, comme des ouvriers à la fouille des sphinx dans le désert du Nil, ne nous laissent plus manquer de texte pour nos études sur la littérature des Indes.
Le traité de ces règles générales s’appelle grammaire générale raisonnée ; celui qui la possède a la clef des autres, et il est prêt à étudier avec intelligence, et à apprendre avec rapidité, quelque langue particulière que ce soit. […] À cela je réponds qu’on peut exercer et étendre la mémoire des enfants aussi facilement et plus utilement avec d’autres connaissances que des mots grecs et latins ; qu’il faut autant de mémoire pour apprendre exactement la chronologie, la géographie et l’histoire, que le dictionnaire et la syntaxe ; que les exemples d’hommes qui n’ont jamais su ni grec ni latin, et dont la mémoire n’en est ni moins fidèle, ni moins étendue, ne sont pas rares ; qu’il est faux qu’on ne puisse tirer parti que de la mémoire des enfants ; qu’ils ont plus de raison que n’en exigent des éléments d’arithmétique, de géométrie et d’histoire ; qu’il est d’expérience qu’ils retiennent tout indistinctement ; que quand ils n’auraient pas cette dose de raison qui convient aux sciences que je viens de nommer, ce n’est point à l’étude des langues qu’il faudrait accorder la préférence, à moins qu’on ne se proposât de les enseigner comme on apprend la langue maternelle, par usage, par un exercice journalier, méthode très avantageuse sans cloute, mais impraticable dans un enseignement public, dans une école mêlée de commensaux et d’externes ; que l’enseignement des langues se fait par des rudiments et d’autres livres ; c’est-à-dire qu’elle y est montrée par principes raisonnes, et que je ne connais pas de science plus épineuse ; que c’est l’application continuelle d’une logique très-fine, d’une métaphysique subtile, que je ne crois pas seulement supérieure à la capacité de l’enfance, mais encore à l’intelligence de la généralité des hommes faits, et la preuve en est consignée dans l’Encyclopédie, à l’article CONSTRUCTION, du célèbre Dumarsais, et à tous les articles de grammaire ; que si les langues sont des connaissances instrumentales, ce n’est pas pour les élèves, mais pour les maîtres ; que c’est mettre à la main d’un apprenti forgeron un marteau dont il ne peut ni empoigner le manche, ni vaincre le poids ; que si ce sont des clefs, ces clefs sont trèsdifficiles à saisir, très-dures à tourner ; qu’elles ne sont à l’usage que d’un très-petit nombre de conditions ; qu’à consulter l’expérience et à interroger les meilleurs étudiants de nos classes, on trouvera que l’étude s’en fait mal dans la jeunesse ; qu’elle excède de fatigue et d’ennui ; qu’elle occupe cinq ou six années, au bout desquelles on n’en entend pas seulement les mots techniques ; que les définitions rigoureuses des termes génitif, ablatif, verbes personnels, impersonnels sont peut-être encore à faire ; que la théorie précise des temps des verbes ne le cède guère en difficulté aux propositions de la philosophie de Newton, et je demande qu’on en fasse l’essai dans l’Encyclopédie, où ce sujet est supérieurement traité à l’article TEMPS ; que les jeunes étudiants ne savent ni le grec ni le latin qu’on leur a si longtemps enseigné, ni les sciences auxquelles on les aurait initiés ; que les plus habiles sont forcés à les réétudier au sortir de l’école, sous peine de les ignorer toute leur vie, et que la peine qu’ils ont endurée en expliquant Virgile, les pleurs dont ils ont trempé les satires plaisantes d’Horace, les ont à tel point dégoûtés de ces auteurs qu’ils ne les regardent plus qu’en frémissant : d’où je puis conclure, ce me semble, que ces langues savantes propres à si peu, si difficiles pour tous, doivent être renvoyées à un temps où l’esprit soit mûr, et placées dans un ordre d’enseignement postérieur à celui d’un grand nombre de connaissances plus généralement utiles et plus aisées, et avec d’autant plus de raison qu’à dix-huit ans on y fait des progrès plus sûrs et plus rapides, et qu’on en sait plus et mieux dans un an et demi, qu’un enfant n’en peut apprendre en six ou sept ans.
Un homme doué d’une médiocre intelligence, qui a quelque mémoire et de l’application, peut acquérir une grande réputation, surtout s’il a une physionomie imposante ou spirituelle… Mais il faut distinguer pour l’élévation du génie l’homme d’État d’avec l’homme propre aux affaires.
Les langues, les sciences, le droit public, la médecine, entrèrent pour beaucoup et presque à la fois dans cette éducation que favorisait la plus heureuse intelligence.
La plupart des hommes ne cherchent à concevoir, connaître, ou travailler d’une manière quelconque leur intelligence que pour la produire au dehors.
Buffon lui accorde le génie créateur qui tire tout de sa propre substance : « Il n’existera jamais, lui dit-il, de Voltaire second » ; c’était une réplique au compliment de Voltaire qui avait appelé Archimède de Syracuse Archimède premier, pour donner à entendre que Buffon était Archimède second ; et faisant ainsi à son rival de Ferney les honneurs du génie, Buffon ne se réserve pour lui que le talent, lequel, si grand qu’il soit, dit-il, « ne peut produire que par imitation et d’après la matière. » Cette lettre à Voltaire, comme plus tard celles qui seront adressées à l’impératrice Catherine, passe la mesure ; Buffon y est deux fois solennel ; il y fait de la double et triple hyperbole, et l’homme qui, à son époque, avait le plus de sens et de jugement, nous fait sentir par là que ces qualités solides d’une éminente intelligence ne sont pas du tout la même chose que le tact et le goût.
Mais s’il devait s’affranchir par l’intelligence, il appartenait bien radicalement à ce monde de La Chênaie par la sensibilité, par les impressions profondes, par les premiers et sincères témoignages du talent : tellement que, dans la perspective littéraire du passé, il s’y vient placer comme une figure dans son cadre, en s’en détachant ; il en est et en demeurera dans l’avenir le paysagiste, le peintre, le véritable poète.
La patrie des La Rive, des Fictet, ne s’est pas appauvrie d’intelligences.
Un nouvel univers s’offrit, pour ainsi dire, à sa contemplation : il aperçut la chaîne invisible qui lie entre eux tous les êtres ; il vit une main puissante étendue sur tout ce qui existe ; le sanctuaire de la nature fut ouvert à son entendement, comme il l’est aux intelligences célestes, et toutes les plus sublimes idées que nous attachons à ce mot Dieu se présentèrent à son esprit.
Si l’on pouvait un moment avoir raison de la passion et du système qui s’identifient dans les intelligences élevées avec une idée exagérée de dignité et d’honneur, je ne demanderais qu’une chose aux esprits restés politiques ou destinés à le devenir : ne retombons pas dans la même faute qu’ont faite, sous la Restauration et sous le régime des dix-huit ans, les générations obstinées et excessives ; ne soyons pas, de parti pris, et au nom d’un principe, irréconciliables.
L’intelligence humaine en possession des méthodes modernes, de ces méthodes précises et graduelles « qui lui donnent non des ailes pour l’égarer, mais des rênes qui la dirigent, » y reçoit des hommages qui ne sont, à les bien prendre, qu’un juste et fier encouragement.
Je le suppose sur le trône et vivant son cours de nature : vingt ans s’écoulent ; la génération dont est Diderot s’élève et grandit, et l’on est en présence de cette armée de jeunes savants désœuvrés et travailleurs, qui, à chaque recommandation, à chaque sommation de se disperser et de se ranger, répondent et s’écrient par la bouche ardente de leur chef : « Je ne veux rien être dans la société ; je ne veux être ni homme en place, ni médecin, ni homme de loi… je ne veux être que le serviteur et l’artisan de l’intelligence humaine !
Ensuite je rendis au comte Gyllenbourg son écrit, comme il m’en avait priée, et j’avoue qu’il a beaucoup servi à former et à fortifier la trempe de mon esprit et de mon âme. » Si nous suivons le parallèle des deux intelligences et des deux caractères si mal appareillés par le sort, quel contraste !
si l’on est d’un art particulier, tout en restant le confrère et l’ami des artistes, savoir s’élever cependant peu à peu jusqu’à devenir un juge ; si l’on a commencé, au contraire, par être un théoricien pur, un critique, un esthéticien, comme ils disent là-bas, de l’autre côté du Rhin, et si l’on n’est l’homme d’aucun art en particulier, arriver pourtant à comprendre tous les arts dont on est devenu l’organe, non-seulement dans leur lien et leur ensemble, mais de près, un à un, les toucher, les manier jusque dans leurs procédés et leurs moyens, les pratiquer même, en amateur du moins, tellement qu’on semble ensuite par l’intelligence et la sympathie un vrai confrère ; en un mot, conquérir l’autorité sur ses égaux, si l’on a commencé par être confrère et camarade ; ou bien justifier cette autorité, si l’on vient de loin, en montrant bientôt dans le juge un connaisseur initié et familier ; — tout en restant l’homme de la tradition et des grands principes posés dans les œuvres premières des maîtres immortels, tenir compte des changements de mœurs et d’habitudes sociales qui influent profondément sur les formes de l’art lui-même ; unir l’élévation et la souplesse ; avoir en soi la haute mesure et le type toujours présent du grand et du beau, sans prétendre l’immobiliser ; graduer la bienveillance dans l’éloge ; ne pas surfaire, ne jamais laisser indécise la portée vraie et la juste limite des talents ; ne pas seulement écouter et suivre son Académie, la devancer quelquefois (ceci est plus délicat, mais les artistes arrivés aux honneurs académiques et au sommet de leurs vœux, tout occupés qu’ils sont d’ailleurs, et penchés tout le long du jour sur leur toile ou autour de leur marbre, ont besoin parfois d’être avertis) ; être donc l’un des premiers à sentir venir l’air du dehors ; deviner l’innovation féconde, celle qui sera demain le fait avoué et’reconnu ; ne pas chercher à lui complaire avant le temps et avant l’épreuve, mais se bien garder, du haut du pupitre, de lui lancer annuellement l’anathème ; ne pas adorer l’antique jusqu’à repousser le moderne ; admettre ce dernier dans toutes ses variétés, si elles ont leur raison d’être et leur motif légitime ; se tenir dans un rapport continuel avec le vivant, qui monte, s’agite et se renouvelle sans cesse en regard des augustes, mais un peu froides images ; et sans faire fléchir le haut style ni abaisser les colonnes du temple, savoir reconnaître, goûter, nommer au besoin en public tout ce qui est dans le vestibule ou sur les degrés, les genres même et les hommes que l’Académie n’adoptera peut-être jamais pour siens, mais qu’elle n’a pas le droit d’ignorer et qu’elle peut même encourager utilement ou surveiller au dehors ; enfin, si l’on part invariablement des grands dieux, de Phidias et d’Apelle et de Beethoven, ne jamais s’arrêter et s’enchaîner à ce qui y ressemble le moins, qui est le faux noble et le convenu, et savoir atteindre, s’il le faut, sans croire descendre, jusqu’aux genres et aux talents les plus légers et les plus contemporains, pourvu qu’ils soient vrais et qu’un souffle sincère les anime.
Mais aucun monarque et souverain ne s’était rencontré encore dans la situation extraordinaire de Napoléon, à la fois abdiquant et captif, — prisonnier sans avoir été pris et en quelque sorte de son propre choix, pour s’être allé asseoir au foyer de la nation son implacable ennemie ; détenu non dans une prison, mais sur le rocher le plus perdu de l’Océan ; non par la vengeance d’un seul adversaire, mais par la terreur de l’Europe entière conjurée ; et désormais élevé (seule élévation dernière qui lui manquât) à l’état de victime ; — ayant abdiqué pour la seconde fois et toujours forcément sans doute,, mais enfin de cœur comme de fait, et résigné ; ne nourrissant plus aucun espoir de retour, mais conservant jusqu’à la fin toute la sérénité de son coup d’œil, toute sa plénitude d’intelligence politique ; sevré de presque toute information actuelle, et se reportant avec d’autant plus d’impétuosité et d’ardeur aux grands événements récents ou passés, à l’histoire d’hier ou à l’histoire des siècles ; perçant de plus dans l’avenir et plongeant sur les horizons lointains avec la haute impartialité du conquérant apaisé, avec la vue épurée du civilisateur.
Un jour (c’était un an avant sa mort), Eckermann le remit sur la voie en lui disant qu’il lisait Daphnis et Chloé dans la traduction de Courier : « Voilà encore un chef-d’œuvre que j’ai souvent lu et admiré, dit Gœthe, où l’on trouve l’intelligence, l’art, le goût portés au plus haut degré, et qui fait un peu descendre le bon Virgile.
Sa brusque et sèche intolérance m’en a rappelé d’autres du même genre, dont j’ai été quelquefois témoin en effet dans le monde de ce temps-ci, dans le même monde que voyait Sibylle ; mais les femmes qui s’y abandonnent ne brillent, en général, ni par la supériorité de l’intelligence, ni par les lumières : ce sont pour l’ordinaire de petits génies qui s’imaginent se grandir en se raidissant.
» Est-ce qu’on parle ainsi des beaux génies et des grandes intelligences ?
Thiers qui, dans ses développements étendus et lucides, non-seulement riche des documents des Affaires étrangères, mais muni de la lecture des lettres mêmes de Napoléon, se portait en conquérant dans ce vaste sujet, y traitant tour à tour et indifféremment de l’administration, de la diplomatie, de la guerre, et promenant sur tous les points une intelligence ondoyante et diverse qui ne se laissait point gêner ni retarder par une trop grande exigence d’unité logique.
Max Buchon s’y est appliqué avec intelligence et zèle58.
Le maréchal Keith, Écossais de naissance et l’un des principaux lieutenants de Frédéric, en écrivait de grands compliments à son père, et en rabattant tout ce qu’on peut attribuer à la politesse, il est bien certain que le jeune homme se fit estimer par son tact, sa mesure et son intelligence.
Delavigne, qui avait bien des avantages comme poète, n’approchait pas de Loyson dans l’ordre des idées, dans l’intelligence des questions philosophiques et politiques : il eût été profondément incapable de manœuvrer en prose et de tenir campagne en face d’un Bonald, d’un Benjamin Constant et d’un La Mennais. — Delavigne, confiné dans son art, ne s’intéressait qu’aux vers et y bornait sa vue : Loyson s’intéressait à tout130.
« M. le ministre d’État, malgré sa supériorité de talent et d’intelligence, n’est pas obligé, s’étant occupé toute sa vie d’autre chose, de savoir quel est le caractère et, pour tout dire, le tempérament d’un véritable homme de lettres.
Le public, qui ne lit pas ces ébauches plus ou moins téméraires et malheureuses, ne sait pas ce qu’il en coûte pour arriver jusqu’à lui, et dans ces marches forcées de l’intelligence, pour un qui atteint au but ou qui obtient du moins d’être nommé et discuté, combien d’autres tombent obscurément le long du chemin, sans une mention, sans un regard.
Le livre donne du respect pour la jeune intelligence qui l’a conçu.
Si notre intelligence et nos sens étaient assez perfectionnés, assez vigoureux, assez illuminés, pour nous permettre de voir et de sentir les molécules mêmes du cerveau ; si nous pouvions suivre tous les mouvements, tous les groupements, toutes les décharges, électriques, si elles existent, de ces molécules ; si nous connaissions parfaitement les états moléculaires qui correspondent à tel ou tel état de pensée ou de sentiment, nous serions encore aussi loin que jamais de la solution de ce problème : Quel est le lien entre cet état physique et les faits de la conscience ?
Quelque temps après, Charles X nomma M. de Montmorency gouverneur du duc de Bordeaux, emploi qui lui convenait parfaitement, qui honorait son royalisme et qui unissait dans sa personne la fidélité aux Bourbons et la haute intelligence de la Charte.
Il y a conflit entre l’intelligence et la sensibilité du poète.
Vauvenargues fut un homme de son temps : il eut pour Voltaire une admiration qui toucha profondément le philosophé, étonné d’abord d’avoir fait la conquête, d’un capitaine d’infanterie, saisi bientôt de ce qu’il y avait d’intelligence, d’activité, d’énergie dans ce jeune homme, et découvrant peu à peu toute la noblesse de cette âme.
Un de mes correspondants me dit que Orgon peut fort bien être un bourgeois notable, avoir été fidèle au roi pendant la Fronde, et n’être qu’un imbécile ; et je suis tout à fait de cet avis, l’instinct conservateur en politique n’étant pas nécessairement une preuve d’intelligence.
faut seulement distinguer, parmi ces vérités, celles qui sont d’une pratique constante et universelle, de celles dont l’application est plus particulière à certaines sociétés ; les vérités qui nous servent d’armes offensives et défensives dans la conduite de la vie, de celles qui demeurent au fond de notre intelligence à l’état de notions spéculatives, et qui nous aident à juger les hommes et les choses.
Comme il savait tout ce qu’on pouvait savoir de son temps, il met à profit les erreurs de la géographie, de l’astronomie et de la physique : et le triple théâtre de son poëme se trouve construit avec une intelligence et une économie admirables.
Après toutes les folies du début, la naissance de Gargantua par l’oreille gauche, la description mirifique de sa layette, les premiers signes qu’il donne de son intelligence et certaine réponse très coquecigrue qu’il fait à son père et à laquelle celui-ci reconnaît avec admiration le merveilleux entendement de son fils, on lui donne un maître, un sophiste en lettres latines ; et c’est alors que commence la satire la plus ingénieuse et la plus frappante de la mauvaise éducation de ce temps-là.
S’il manquait à ces lectures ce qui les eût vivifiées dans le sens mondain et littéraire, dans le sens politique et profane, si l’intelligence et le souffle du nouveau siècle ne pénétraient pas dans ces horizons tracés, peut-on s’en étonner, peut-on l’en plaindre ?
Dans son Œdipe chez Admète, où il confond deux actions distinctes, deux tragédies, celle d’Alceste voulant mourir pour son époux, et celle d’Œdipe expirant entre les bras d’Antigone, Ducis a plus que des mots ; il a, au troisième acte et au cinquième, des tirades pathétiques, une touche large, comme lorsque Œdipe, s’adressant aux dieux, les remercie, jusque dans son abîme de calamités, de lui avoir laissé un cœur pur : C’est un de vos bienfaits que, né pour la douleur, Je n’aie au moins jamais profané mon malheur… On s’explique aussi très bien le succès de son Othello, représenté pour la première fois en 1792, et parlant comme un soldat parvenu qui sert avec désintéressement la République et n’a rien à envier aux grands : Ils n’ont pas, tous ces grands, manqué d’intelligence, En consacrant entre eux les droits de la naissance : Comme ils sont tout par elle, elle est tout à leurs yeux.
Mais dans ces mêmes auteurs, ou encore mieux dans leurs imitateurs ridicules, le mot cru et gros, la couleur violente et aveuglante, la description acharnée qui ne demande à l’intelligence aucun effort et qui fait simplement tourner le cinématographe, le relief des choses, cathédrale, quartier, morceau de mer, champ de bataille, aussi l’imagination débordante et enlevante, qui vous entraîne vers des hauteurs ou des lointains confus comme dans la nacelle d’un ballon, toutes ces choses qui ne demandent au lecteur aucune collaboration, qui le laissent passif tout en le remuant et l’émouvant ; aussi et enfin une misanthropie qui ne donne pas ses raisons et qui ne nous fait pas réfléchir sur nous-mêmes, mais seulement flatte en nous notre orgueil secret en nous faisant mépriser nos semblables sans nous inviter à nous mépriser nous-mêmes : voilà ce que le lecteur illettré de 1840 voit, admire et chérit dans les romantiques ; voilà la déformation du romantisme dans son propre cerveau mal nourri, dans la misère physiologique de son esprit.
La scène entière est ordonnée d’enthousiasme ; tout y est bien d’action et de position, rien n’y manque que l’intelligence et le pinceau de Rubens, la magie de l’art, la distinction des plans, de la profondeur.
Est chose tout objet de connaissance qui n’est pas naturellement compénétrable à l’intelligence, tout ce dont nous ne pouvons nous faire une notion adéquate par un simple procédé d’analyse mentale, tout ce que l’esprit ne peut arriver à comprendre qu’à condition de sortir de lui-même, par voie d’observations et d’expérimentations, en passant progressivement des caractères les plus extérieurs et les plus immédiatement accessibles aux moins visibles et aux plus profonds.
si souvent dans les choses de l’art et de l’intelligence, c’est précisément le mérite de ces sortes de compositions qui fait leur infortune, et, nous le répétons, pour publier un volume de ces choses dédaignées du public, il faut ou la candeur d’un mouton qui au bord d’une route rêve un pré, ou l’insouciance altière d’un véritable artiste qui écrit pour ses pairs littéraires et donne sa démission à l’avance de toute popularité.
Pour fixer les idées, nous formulerons la thèse ainsi : « Un état cérébral étant posé, un état psychologique déterminé s’ensuit. » Ou encore : « Une intelligence surhumaine, qui assisterait au chassé-croisé des atomes dont le cerveau humain est fait et qui aurait la clef de la psychophysiologie, pourrait lire, dans un cerveau qui travaille, tout ce qui se passe dans la conscience correspondante. » Ou enfin : « La conscience ne dit rien de plus que ce qui se fait dans le cerveau ; elle l’exprime seulement dans une autre langue. » Sur les origines toutes métaphysiques de cette thèse il n’y a d’ailleurs pas de doute possible.
Les Parisiens montrèrent plus d’intelligence que les Comédiens, en ne faisant pas fête à ce spectacle de mauvais goût11. […] Il marquait une ardeur guerrière, il poussait, au moment opportun, des hennissements, il trépignait avec un tel naturel, que le public ne se lassait point d’admirer sa haute intelligence. […] Il eut l’intelligence de comprendre qu’il fallait jeter de côté toutes les vieilleries admises jusqu’alors au théâtre. […] On peut affirmer que Racine est le poëte de l’intelligence ; car l’oreille, l’esprit et le cœur, en l’écoutant, sont satisfaits. […] En effet, il joua, à son second début, avec tant d’intelligence, qu’on l’applaudit du parterre et des loges.
Tout se renouvelle ; l’Amérique et les Indes sont découvertes, la figure de la terre est connue, le système du monde est annoncé, la philologie moderne est fondée, les sciences expérimentales commencent, les arts et les littératures poussent comme une moisson, la religion se transforme ; il n’y a point de province dans l’intelligence et dans l’action humaines qui ne soit défrichée et fécondée par cet universel effort. […] À leur exemple, il mesure les moyens de frapper l’attention, d’aider l’intelligence, d’éviter la fatigue et l’ennui. […] On ne connaît pas encore l’espèce de prison étroite où le cant officiel et les croyances bienséantes enfermeront plus tard l’action et l’intelligence. […] Cette confiance en l’élargissement infini de la puissance humaine, cette glorieuse idée de la conquête universelle de la nature, cette ferme espérance en l’augmentation continue du bien-être et du bonheur, croyez-vous qu’elle eût pu germer, grandir, occuper tout un esprit, et de là s’enraciner, se propager et se déployer dans les intelligences voisines, en un temps de découragement et de décadence, quand on croyait la fin du monde prochaine, quand les ruines se faisaient tout autour de l’homme, quand le mysticisme chrétien comme aux premiers siècles, quand la tyrannie ecclésiastique comme au quatorzième siècle, lui démontraient son impuissance en pervertissant son invention ou en écrasant sa liberté ? […] Il y a tel état de l’intelligence publique qui exclût tel genre littéraire ; et il y a tel état de l’intelligence publique qui exclut telle conception scientifique.
Mais je n’en connais guère où l’on voie mieux ce que la composition de Malherbe a de proprement oratoire, en tant qu’appropriée à toutes les intelligences. […] Et comme il n’y avait pas d’ailleurs une seule manifestation de l’intelligence ou de l’activité qui ne fût enveloppée dans les replis de sa religion, c’est ainsi que toute sa politique, toute sa morale, toute sa philosophie s’est trouvée exprimée en fonction de la Providence. […] Ces exemples peuvent suffire, si nous voyons par eux comment la science et la philosophie s’essaient à remplir dans les intelligences le vide que la morale et la religion y ont laissé en s’en allant, ou comment encore, au goût des vérités de croyance et de foi se substitue le goût des vérités de raisonnement et de fait. […] Ni de savoir ce que c’est que la substance en soi, par exemple, ou par quel moyen s’établit la communication des substances, du fini et de l’infini, de la matière et de l’étendue, du corps et de l’âme, aucune de ces questions, dont on commence à soupçonner qu’elles passent la capacité de l’intelligence humaine, n’éveille, n’intéresse, ne soutient, ni surtout ne passionne désormais la curiosité. […] « La nature, à force de multiplier et de varier ses ouvrages, ne peut s’empêcher quelquefois de trahir son secret. » Préparons-nous à le surprendre, car l’intelligence aussi fait des progrès, et la lente accumulation des faits tend d’elle-même, pour ainsi parler, au perfectionnement des méthodes.
Trouver alors chez un autre homme de caressantes, de délicates manières, une intelligence des nuances du cœur à demi féminine, voir souvent cet homme dans une familiarité émue que l’on ne pense pas à se reprocher, parce que le principe en est si noble, — c’est une épreuve redoutable et un péril très grand. » Bref, ils pleurèrent ensemble. […] Son père, Trank Spiro, était un bey chrétien, en bonne intelligence avec les musulmans du pays, mais fidèle à sa foi, notable de sa paroisse, et lié d’amitié avec l’évêque orthodoxe de Durazzo. […] C’est là sans doute la raison de l’amer pessimisme dont les accès ont précédé, longtemps à l’avance, la crise finale où s’est obscurcie l’intelligence si lucide de Maupassant. […] Nul n’a mieux mesuré l’étendue et le contenu de cette intelligence, la portée de cette prévision si lucide, la rapidité, la fécondité, « le jeu et le jet » de cette pensée victorieuse, dont l’essor n’avait pas de limites. […] On suit déjà, au cours de son ouvrage, le progrès de son intelligence, un peu compliquée, surchargée par l’éducation moderne, et se redressant au contact de la réalité.
C’est ainsi qu’après avoir émancipé l’individu de la tyrannie de la communauté, et substitué la sensibilité dans les droits de l’intelligence même, Rousseau achève son œuvre en posant ce principe qu’on exprimera désormais l’homme en fonction de la nature. […] De l’utilité de ces détails pour l’intelligence des romans de Prévost : — il a vraiment vécu son œuvre ; — les hasards de sa vie en expliquent le décousu ; — et ce qu’il n’en a pas vécu, il l’a moins « imaginé » que « senti ». — Du caractère sombre et mélodramatique des romans de Prévost ; — et combien ils diffèrent des romans de Le Sage et de Marivaux. — La passion de l’amour dans les romans de Prévost ; — comment elle les remplit à peu près uniquement ; — et qu’elle y affecte les mêmes caractères de soudaineté ; — de violence ; — et de fatalité que dans les tragédies de Racine. — Que là même, et non pas du tout dans une peinture de la fille ou de la courtisane, est le mérite éminent de Manon Lescaut. — La peinture des mœurs dans les romans de Prévost ; — et combien elle y est insignifiante ou superficielle. — Les romans de Prévost sont des romans idéalistes ; — nullement psychologiques d’ailleurs ; — et le style en est celui de la passion ; — c’est-à-dire, tantôt capable de la plus haute éloquence ; — et tantôt de la pire banalité ; — toujours facile d’ailleurs, harmonieux, abondant et prolixe. […] 2º L’Écrivain. — Sa jeunesse libertine, — et ses allures volontiers cyniques. — Originalité de son humeur ; — et médiocrité de son talent. — Ses romans : Histoire de la baronne de Luz, 1741 ; — et les Confessions du comte de…, 1742 ; — et qu’ils sont de la famille de ceux du jeune Crébillon ; — c’est-à-dire aussi indécents, aussi ennuyeux, et sans doute aussi faux. — Son Histoire de Louis XI, 1745, est à peu près illisible aujourd’hui. — En revanche, ses Considérations sur les mœurs de ce siècle, 1750, — qui sont assez proprement écrites, — contiennent sur différents objets des remarques assez intéressantes ; — et utiles surtout à l’intelligence des mœurs de son temps [Voyez notamment le second chapitre, sur l’éducation et les préjugés ; — le cinquième, sur la réputation, la célébrité, la renommée et la considération ; — le septième, sur les gens à la mode ; — le onzième, sur les gens de lettres]. — Le succès de ce livre a d’ailleurs été considérable ; — nul homme de lettres à son heure n’ayant été plus à la mode que Duclos ; — et n’ayant su mieux gouverner sa fortune. — Il a su aussi très bien défendre son indépendance ; — et sa dignité ; — non seulement contre les gens en place ou les gens du monde, — mais surtout contre les gens de lettres ses confrères ; — et particulièrement contre les Encyclopédistes. — C’est ce qui donne à son personnage une signification que n’ont pas ses œuvres ; — et c’est pourquoi son nom mérite vraiment d’être retenu. […] Les Idylles d’André Chénier ; — et que ce n’est pas sans doute l’inspiration de l’Oaristys, ou celle du Jeune Malade, — qui diffère de l’inspiration de l’Hermès ou des Élégies ; — telle du moins qu’elle vient d’être définie. — Mais, comme André Chénier remonte directement aux sources grecques ; — et qu’il a le sens profond de l’alexandrinisme ; — sinon de la haute antiquité, sophocléenne, pindarique, homérique ; — il y retrempe le vers inconsistant et décoloré qui est autour de lui celui de ses émules ; — sans qu’il y ait rien là de contradictoire aux idées de son temps. — Ou plutôt, et semblable en tout le reste à ses contemporains, — il ne s’en distingue que par une intelligence plus subtile de ce classicisme dont ils ont perdu le sens ; — et pour avoir en lui réconcilié cette admiration de leur temps, — et ce sentiment de l’art qu’exprime le vers devenu proverbial : Sur des pensers nouveaux faisons des vers antiques. […] — On n’a jamais en effet joint ensemble plus de fanatisme et plus de crédulité ; — de naïveté même ; — et masqué naturellement, sous plus de science et d’intelligence, moins de réelle originalité. — Qu’après cela, pour ne rien dire de ses travaux scientifiques proprement dits, — son édition des Pensées et son Éloge de Pascal, 1776, ainsi que sa grande édition de Voltaire, — dite édition de Kehl, et dont Beaumarchais était l’entrepreneur, — sont deux des témoignages les plus intéressants qu’il y ait de l’état des esprits à la veille de la Révolution française ; — et que, de ce seul fait, Condorcet en tire une valeur « représentative » considérable. — Que, d’autre part, son action se continue toujours parmi nous ; — s’il a été le véritable organisateur ou inspirateur de notre système d’instruction publique ; — et qu’à cet égard, pour mesurer la valeur de ses idées, il suffit de les comparer à celles de son ami Cabanis, par exemple. — C’est l’esprit de Condorcet qui règne encore dans nos programmes d’études. — Enfin, son Esquisse d’une histoire des progrès de l’esprit humain ; — qui fait honneur à son courage et à la force, ou plutôt à la sérénité de son caractère ; — s’il l’a rédigée, comme l’on dit « sous le couteau de la guillotine » ; — demeure une œuvre capitale dans l’histoire de l’esprit moderne, — non seulement français, mais européen ; — pour la précision de contour, l’étendue de diffusion, et la vigueur d’impulsion, — qu’elle a donnée à l’idée même de Progrès.
Son imagination allait d’un côté, son intelligence de l’autre. […] Et cependant Samson, à ce moment où il montre tant de douceur et de complaisance, sait tout : il sait la ruse de la femme, ses perfides confidences à son sujet, ses intelligences avec l’ennemi, et que la femme est et sera toujours Dalila.
Cette intelligence, cette demi-intelligence du latin dura encore selon les lieux deux ou trois siècles, ou peut-être au-delà. […] Ce facilius pourtant semblerait indiquer un reste d’intelligence du latin.
Car ce qu’il lui faut, c’est un bonheur d’espèce particulière, fin, léger, rapide, incessamment renouvelé et varié, où son intelligence, son amour-propre, toutes ses vives et sympathiques facultés trouvent leur pâture ; et cette qualité de bonheur, il n’y a que le monde et la conversation pour la fournir. […] Sous le roi Louis XV, les ducs d’Orléans, de Nivernais, d’Ayen, de Coigny, les marquis de Courtenvaux et d’Entraigues, le comte de Maillebois, la duchesse de Brancas, la comtesse d’Estrades forment avec Mme de Pompadour la troupe « des petits cabinets » ; le duc de la Vallière en est le directeur : quand la pièce renferme un ballet, le marquis de Courtenvaux, le duc de Beuvron, les comtes de Melfort et de Langeron sont les danseurs en titre290. « Ceux qui sont dans l’usage de ces spectacles, écrit le sage et pieux duc de Luynes, conviennent qu’il serait difficile que des comédiens de profession jouassent mieux et avec plus d’intelligence. » — À la fin l’entraînement gagne encore plus haut et jusqu’à la famille royale.
Il faut laisser de côté les mots de raison, d’intelligence, de volonté, de pouvoir personnel, et même de moi, comme on laisse de côté les mots de force vitale, de force médicatrice, d’âme végétative ; ce sont des métaphores littéraires ; elles sont tout au plus commodes à titre d’expressions abréviatives et sommaires, pour exprimer des états généraux et des effets d’ensemble. […] Comme on voit dans l’histoire de la respiration ou de la locomotion un élément organique devenir, par une légère modification, l’instrument d’une fonction plus compliquée, puis, par une seconde modification surajoutée, exécuter une fonction supérieure ; de même, dans l’histoire de l’intelligence, on voit un élément psychologique fournir par une petite modification à des opérations très étendues, puis, par une seconde modification superposée, accomplir des opérations si complexes, si délicates et si nombreuses qu’elles semblaient pour toujours devoir rester au-delà de sa portée.
L’énergie des caractères et la puissance des intelligences qu’elle produit sont en perpétuel contraste avec la petitesse des États et avec la servitude des institutions pour lesquels ces natures romaines devaient vivre ; en sorte que cette noble et belle terre souffre doublement de rêver ce que fut l’Italie jadis, et de subir ce que l’Italie est aujourd’hui. […] « “L’intelligence humaine ne peut pas comprendre ma félicité actuelle ; elle n’attend que toi pour être complète, et j’ai laissé là-bas sous mes pieds ce beau voile de mon corps que tu as tant aimé !
C’était une de ces natures de second ordre, un de ces esprits nés disciples et acolytes, et tout préparés par un fonds d’intelligence et de dévouement, par une première piété admirative, à être les secrétaires des hommes supérieurs. […] Pour être vrai, il devait se montrer avec toute la bienveillance de ses jugements, avec la pleine clarté et la pleine force de son intelligence, avec la dignité naturelle à un caractère élevé. — Ce n’était pas là une petite difficulté.
Les hommes qui croient que l’esprit de déception et de supercherie est capable de ces prodiges sont dans l’erreur, ils méconnaissent la portée du génie humain ; les vraies beautés d’Ossian sont dans les mœurs plus que dans l’intelligence. […] L’invention, le style, les images ossianiques ne sont-ils pas restés dans toutes les langues de l’Europe, depuis l’Espagne, l’Italie, l’Allemagne et la France, une partie du trésor connu de l’intelligence ?
Elle joue ici le rôle d’un décor, d’une plastique, d’un jeu de gestes et d’intentions perceptible à l’oreille et pénétrant l’intelligence sans être arrêtée par l’objectivité des phénomènes visuels. […] Il forme notre oreille et prépare noire intelligence par une initiation progressive à cette langue si parfaite et si prodigieusement mélodique à laquelle nous ne devons pas un instant soustraire notre attention.
* * * — Dans l’élite de ceux qui pensent, il se fait une visible réaction contre le suffrage universel et le principe démocratique ; et des esprits se mettent à voir le salut de l’avenir dans une servitude de la canaille, sous une aristocratie bienfaisante des intelligences. […] Quel dommage, quelle perte qu’une pareille intelligence d’observateur et de physiologiste, n’écrive pas un livre dont il nous donnait, ce soir, un si curieux morceau sur les effets moraux des maladies de poitrine : un livre dont la première ligne n’a pas été encore écrite, un livre qui serait une clinique médico-littéraire de ces maladies de foie, de cœur, des poumons, si liées et si attenantes aux sentiments et aux idées du malade, et présenterait toutes les révolutions de l’âme dans la souffrance du corps !
L’intelligence, s’il y a une intelligence chez l’homme, au lieu de progresser, diminue.
Johannes, orgueil fait de force suffisante solitaire, s’enroule au cartésien anneau de son intelligence. […] Elle est assez inoffensive, malgré qu’elle soit le nombre, parce qu’elle combat contre l’intelligence.
Ce n’est pas en des temps de Fronde qu’il eût appris à les concevoir, et c’est pour avoir, en ses jeunes années, en sa saison de verve et d’entreprise, vu réunies entre les mains de Richelieu les pièces merveilleuses de cet assemblage, c’est pour lui avoir vu reconquérir ce Roussillon aliéné depuis un siècle et demi, et lui avoir vu refaire en tous sens une France, qu’il a su mêler lui-même à son Histoire cet esprit français étendu, cette intelligence d’ensemble qui y subsiste à travers les remarques plus ou moins libres et les réflexions conformes à notre vieux génie populaire.
Les émigrés, selon lui, ont emporté l’honneur (dans le sens royaliste) ; les rebelles n’ont gardé de leur nation que l’intelligence et le courage : il oublie que ces rebelles, qui sont à peu près tout le monde, ont, de plus, gardé intact le sentiment de patrie.
La comédie était une autre de ses passions, et qui tenait en elle à l’intelligence et au goût des choses de l’esprit.
Pour qu’il ne soit pas dit que je ne cherche chez lui que les leçons aux grands et aux puissants, dans ce même Sermon sur l’honneur, où il énumère et poursuit les différentes sortes de vanités, il n’oublie pas les hommes de lettres, les poètes, ceux aussi qui, à leur manière, se disputent le renom et l’empire : Ceux-là pensent être les plus raisonnables qui sont vains des dons de l’intelligence, les savants, les gens de littérature, les beaux esprits.
Bailly n’était qu’un déiste optimiste et bienveillant, qui se plaisait volontiers à croire à l’excellence et à la divinité de l’intelligence humaine.
Quoique je sois bien loin d’avoir tous ces avantages, il s’en faut beaucoup que je ne me félicite pas de mon sort, et je serais un ingrat envers la divine intelligence si j’osais lui adresser l’ombre d’une plainte, surtout maintenant que j’ai le bonheur de vivre en famille.
Charron n’entre en rien dans cette intelligence et cette explication vraiment philosophique de l’humanité, qui, pour la mieux comprendre, en suivrait d’abord les directions générales et en reconnaîtrait les vastes courants : il prend l’homme au rebours et dans ses écarts ; il l’observe malade, infirme, le voit toujours en faute, dans une sottise continuelle, dans une malveillance presque constante : « La plupart des hommes avec lesquels il nous faut vivre dans le monde, dit-il quelque part, ne prennent plaisir qu’à mal faire, ne mesurent leur puissance que par le dédain et injure d’autrui. » De ce qu’il y a certains cas où les sens se trompent et ont besoin d’être redressés, il en conclut que ce qui nous arrive par leur canal n’est qu’une longue et absolue incertitude.
Voltaire alors en Suisse, aux Délices, et très lié avec les Tronchin de Genève, eut l’idée d’employer un des membres de cette famille, Tronchin, banquier à Lyon, et de le prendre pour son intermédiaire auprès de l’archevêque de cette ville, le cardinal de Tencin, autrefois du conseil du roi, mis de côté pour le moment, mais qui avait toujours des intelligences à Versailles et des lueurs d’espérances d’y revenir.
On croit entendre milord Édouard morigénant un peu fastueusement Saint-Preux ; Il ne laisse pas d’être singulier de voir un historien, et l’historien d’un pays libre, faire fi à ce point de la pratique politique, comme si les anciens qu’il invoque n’avaient pas dû à l’exercice des charges publiques et au maniement des affaires le sens et l’intelligence supérieure qu’ils portaient ensuite dans leurs livres ; comme si Thucydide, Salluste et Cicéron n’avaient fait dans toute leur vie qu’une seule chose, — écrire.
Sur Mirabeau, le comte de La Marck peut servir à rectifier ce qu’elle vient de lui imputer de relations intimes et d’intelligences factieuses avec ce parti.
On avait vu, à propos du Béranger des Familles, descendre des hauteurs où il se tient d’ordinaire, et se lancer dans l’arène, un esprit fin, délicat, élevé, un peu dédaigneux, une intelligence aristocratique, et qui a gardé des abords du sanctuaire et du commerce des Prophètes l’habitude du respect et une sorte de démarche religieuse jusque dans la suprême philosophie.
Ses besoins d’aimer, ses ambitions d’intelligence, ses jalousies tendres qui se rassemblaient et s’accumulaient faute de mieux sur une tête chérie, ses soifs de Tantale qu’elle ne peut assouvir, ses accès de dévouement à la Décius qu’elle ne sait à quoi employer, ses colères à la Tarquin dans lesquelles elle abat impitoyablement tout ce qu’elle a dédaigné de cueillir et de respirer, tout cela s’épanche avec plus de naïveté qu’on n’aurait cru, et les ressorts humains, les mobiles naturels jouent fort distinctement devant nous, sans préjudice de la fibre religieuse fondamentale.
On y trouve à chaque fois de nouvelles beautés, sur lesquelles l’éloge repasse et renchérit ; on en cause avec quelques amis du même temps que nous, avec quelque camarade de collège resté comme nous fidèle à la tradition ; l’on se fait l’un à l’autre pour la centième fois les mêmes citations de certains beaux passages, les mêmes allusions fines auxquelles on répond par un coup d’œil de satisfaction et d’intelligence, en secouant la tête.
Cousin, qui traite avec tant de dédain les Relations d’Elie Benoît pour des époques antérieures, et qui, du haut de son esprit, a déclaré cet utile et modeste historien « une très-médiocre intelligence », serait obligé ici de convenir qu’il doit y avoir quelque chose de très-vrai dans ce fonds d’horreurs où un intéressé seul pouvait nous faire pénétrer77 : c’est chose si désagréable en effet que d’avoir à s’appesantir sur des atrocités ; cela même semble contraire au bon ton et au respect qu’on a pour soi et pour ses lecteurs.
Cette ressource a disparu pour la France ; et l’Ordonnance de dissolution du 5 septembre a plus fait sans doute qu’elle ne croyait faire. » Cette vue, on peut l’affirmer hardiment et d’après l’expérience, est fausse : il n’est pas exact de dire que l’état de mécontents, d’inactifs et d’émigrés à l’intérieur, entretenu et prolongé durant dix et quinze ans, ait jamais pu être une bonne préparation pour l’intelligence et le maniement des affaires publiques.
On aura remarqué dans toute cette scène ce qui est partout ailleurs dans Térence, le sentiment et l’intelligence de la jeunesse, une parfaite indulgence pour cet âge où la vie est si belle et si propice qu’il lui faut bien passer quelque chose, s’il abonde et s’il excède dans sa joie.
Cela constitue le second jugement, réfléchi et pondéré, en vue du public : c’est celui de l’équité et de l’intelligence.
Dans un voyage qu’il fit en Alsace, en juin 1679, les magistrats de Strasbourg étaient venus à Schelestadt lui faire leurs protestations les plus humbles pour l’avenir ; il dissimula, répondit par des paroles assez polies, et noua probablement dès lors des intelligences secrètes avec quelques-uns du dedans.
Elle eût évoqué l’affaire, s’en fût emparée par l’intelligence comme par le cœur, l’eût comprise dans le fond et dans la forme ; elle eût écouté les raisons des ministres de Louis XVI, y eût ajouté l’autorité de sa raison propre ; elle eût épargné à un roi faible ses tiraillements et son embarras, elle eût épousé sa politique sans abjurer la voix du sang : au lieu d’être un simple écho et de répéter sa leçon de Vienne, elle aurait eu sa façon de voir, un avis à elle, et indiquant toute la première la voie moyenne à suivre, la seule possible, renvoyant à Marie-Thérèse quelques-unes des objections que l’impératrice avait faites à Joseph II, elle eût réjoui Marie-Thérèse elle-même, et celle-ci, reconnaissant jusque dans les demi-résistances de sa fille ses propres pensées, sa propre sagesse, se fût écriée avec orgueil : « Elle est deux fois ma fille et mon sang !
Il était bien avec Mme de Pompadour ; il était au mieux de tout temps avec les frères Paris, ces gros bonnets financiers de l’époque et d’une intelligence qui allait au génie ; le maréchal de Noailles lui avait dans toutes les circonstances témoigné une affection tendre, et il se fit fort de le détacher de l’infante pour le convertir à l’alliance saxonne.
Fénelon, qui ne fut de l’Académie qui ; bien après Bossuet, et trop tard pour participer au travail du premier Dictionnaire, a donné, on le sait, d’excellents préceptes pour les occupations de la Compagnie, indépendamment de cette obligation principale et perpétuelle du Dictionnaire ; il lui a en quelque sorte taillé sa tâche : et avec quelle largeur, quel sentiment vif de la tradition, et aussi quelle intelligence présente du lendemain !
Mérimée en admette la moindre trace au sein de cette vaste intelligence de Cicéron ; il en fait un pur avocat sans franchise : par contradiction, l’avouerai-je ?
Or il arrive que chacun d’eux possède précisément une des principales qualités qu’on regrette chez l’autre : celui-ci, la tournure d’esprit rêveuse et les extases choisies ; celui-là, le sentiment profond et l’expression vivante de la réalité : comparés avec intelligence, rapprochés avec art, ils tendent ainsi à se compléter réciproquement.
A l’imitation des philosophes, un érudit, l’abbé Barthélémy, se sert du roman pour vulgariser la connaissance de l’antiquité hellénique ; par malheur, la faiblesse de l’invention littéraire fait tort à la solidité de l’érudition, à la probité des recherches, à l’intelligence des interprétations.
Mais il y a un jour où se ramassent dans une explosion unique tous les sentiments de toute nature, moraux, politiques, sociaux, que l’œuvre des philosophes avait développés dans les cœurs, joie de vivre, avidité de jouir, intense excitation de l’intelligence, haine et mépris du présent, des abus, des traditions, espoir et besoin d’autre chose : ce jour de folie intellectuelle où toute la société de l’ancien régime applaudit aux idées dont elle va périr, c’est la première représentation du Mariage de Figaro (27 avril 1784).
On y est engourdi par la béatitude de vivre, et l’abondance et la continuité des sensations agréables vous y berce dans un rêve sans fin… Mais en même temps le vieux monde fait des apparitions brusques et bizarres dans cette île enfantine où ses navires s’arrêtent en passant : et le vieux monde, c’est sans doute le péché, mais c’est l’effort ; c’est la douleur morale, mais c’est la dignité ; c’est le labeur, mais c’est l’intelligence.
Il est bon, là, ce rhéteur mal embouché qui prétend affranchir nos intelligences !
Au fond, cette grande loi n’est pas seulement la loi de l’intelligence humaine 153.
Elle parle aussi dans la même lettre d’une lecture que Boileau doit faire chez ce même cardinal, de son Lutrin et de sa Poétique, il faut que nos commentateurs se croient bien supérieurs en intelligence à cette bonne madame de Sévigné, pour se persuader qu’il leur était réservé de découvrir, à près de deux siècles de distance, une malveillance dont elle était l’objet, et dont elle ne se doutait pas, et pour pénétrer le sens et l’intention d’écrits dirigés contre elle, dont elle avait la sottise d’approuver le fond et la forme et d’aimer les auteurs.
Je ne vois pas que la tradition catholique, la tradition protestante ou la tradition évolutionniste empêchent Malebranche, Leibnitz et Spencer d’être de grandes et fécondes intelligences.
Lui qui connaissait si bien les hommes, il est un point du génie français qui lui a toujours échappé, un point sur lequel il ne fut français ni d’accent, ni de sentiment, ni d’intelligence.
Modéré d’humeur, réglé et pacifique d’intelligence, il ne se pose point le problème comme Pascal ou comme Hamlet.
Jacques, le fils d’un maître d’école de Chalon-sur-Saône… Cinq ans, il a été militaire… Au siège d’Anvers, il est passé en revue par le duc d’Orléans qui remarque l’intelligence de sa figure parmi toutes les brutes qu’il a sous les yeux : « Voltigeur, êtes-vous content de la nourriture ?
Votre intelligence, ils la dépassent ; votre imagination, ils lui font mal aux yeux ; votre conscience, ils la questionnent et la fouillent ; vos entrailles, ils les tordent ; votre cœur, ils le brisent ; votre âme, ils l’emportent.
Au nombre de ces biens chaque jour répandus sur un plus grand nombre d’individus, il faut mettre au premier rang le développement de l’intelligence, la diffusion des lumières.
Enseignez donc à ce siècle-ci le respect de la tradition, l’intelligence du passé, le goût de la stabilité, l’amour de ce qui dure, rien de mieux.
Si l’on ne s’explique plus devant des Claude Monet ou des Renoir les rafales de rire des anciennes expositions d’impressionnistes, encore moins peut-on s’imaginer comment en 1875 des personnes amoureuses de musique se dirigeaient vers le Châtelet avec des sifflets quand on y devait donner la Danse macabre, comment Carmen échoua, comment jadis des hommes d’intelligence pratique réelle eurent horreur d’Hernani, comment Baudelaire scandalisa, comment Flaubert froissa ; et je ne cite que des nouveautés où l’élément d’art était le seul en question, admettant que le naturalisme fut d’abord discuté simplement au nom de la morale, et que le patriotisme seul amena les Parisiens à manifester contre Lohengrin… En tout cas, le jour de Tannhauser ils n’avaient encore d’autres raisons que l’horreur du nouveau.
Il était homme, par conséquent, à se tourner du côté des arts, peinture, musique, mais sans doute il n’avait point ces goûts ou ces aptitudes, et il est peu à peu revenu à ce qui l’avait, sinon charmé, du moins intéressé vers la quinzième année, et il s’est aperçu, son intelligence et sa sensibilité s’étant accrues, que ces auteurs sont d’excellents et d’exquis aliments de l’âme et de l’esprit.
Critiques, tous deux, de sentiment et de sensation ; compréhensifs bien plus qu’exclusifs d’intelligence et de doctrine ; portant sur les choses de ce monde un regard curieux, ouvert et bienveillant ; ayant la même philosophie sans métaphysique, la même opinion politique, les mêmes goûts pour les lumières modernes et la même foi (un peu éblouie, selon moi) dans le progrès des sociétés, ils ne diffèrent guère que par la destinée, qui fait de ces charmants coups quelquefois : — c’est que Macaulay est monté plus haut dans son pays que Philarète Chasles dans le sien.
… C’était audacieux de la peindre, mais, puisqu’on en avait l’audacieuse fantaisie, il fallait la peindre avec l’intelligence des grands peintres, qui sauvent tout des sujets les plus dangereux par la passion et par l’accent de leur peinture.
Le trait a bientôt pesé, la couleur s’est foncée, et toute intelligence, même celle de son propre dessein, a disparu !
Elle lui montre qu’il est double comme sa destinée, qu’il y a en lui un animal et une intelligence… L’homme, se repliant sur lui-même, commença à prendre en pitié l’humanité, à méditer sur les amères dérisions de la vie.
. — Comment il diffame l’intelligence humaine. — Les Voyages de Gulliver. […] C’est qu’il n’y a que deux façons de s’accommoder au monde : la médiocrité d’esprit et la supériorité d’intelligence ; l’une à l’usage du public et des sots, l’autre à l’usage des artistes et des philosophes ; l’une qui consiste à ne rien voir, l’autre qui consiste à voir tout. […] Pour achever, Swift leur enseignait un expédient pratique, proportionné à leur intelligence et à leur état. « Le simple soldat, quand il ira au marché ou à la taverne, offrira cette monnaie ; si on la refuse, il sacrera, fera le diable à quatre, menacera de battre le boucher ou la cabaretière, ou prendra les marchandises par force, et leur jettera la pièce fausse.
. — A-t-il rassemblé les opérations et les découvertes de l’intelligence sous un principe unique qui leur donne à toutes un tour nouveau ? […] Cela seul lui donnerait la mesure de notre intelligence. […] On n’y discute pas la valeur de ces opérations, la véracité de notre intelligence, la certitude absolue de nos connaissances élémentaires ; ceci est une affaire de métaphysique.
Janssen, dans son mémorable ouvrage sur L’Allemagne et la Réforme, — que comme d’intermédiaires pour parvenir à une intelligence plus profonde du christianisme et à l’amélioration de la vie morale » ; et c’était sans doute une manière parfaitement légitime d’en user, mais on en pouvait concevoir une autre. […] V. — La Satire Ménippée [1593-1594] 1º Les Sources. — Presque toutes les pièces un peu particulières, nécessaires ou utiles à l’intelligence de la Satire Ménippée, ont été réunies dans l’édition de Ratisbonne, donnée par Prosper Marchand, 3 vol. in-12, 1726, chez les héritiers de Mathias Kerner. — Joignez l’introduction de Charles Labitte à son édition de la Satire, Paris, s. d. ; — et, du même : Les Prédicateurs de la Ligue, Paris, 1841. […] Que son rôle philosophique n’a pas été non plus sans réelle importance. — De sa traduction du Manuel d’Épictète et de son Traité de la philosophie des Stoïques. — Comment son œuvre est connexe de celle de Charron, qu’elle éclaire ; — mais, de plus que Charron, il a été mêlé aux grandes affaires, et de là sa supériorité d’expérience ; — le champ de l’observation psychologique et morale s’en élargit d’autant. — Il se fait aussi de la dignité de la raison et du pouvoir de la volonté une idée plus « stoïcienne » ; — et plus haute, par conséquent, de la hauteur dont le point de vue stoïque dépasse le point de vue épicurien. — Enfin, dans son Traité de la sainte philosophie, il accomplit le dernier pas : — après avoir essayé de séculariser la morale, il y renonce ; — et ne voyant plus de remède à la corruption que dans le retour à la morale chrétienne, il en proclame la nécessité. — Analogie de cette évolution avec celle de la pensée de Pascal. — Les Traités philosophiques de Du Vair sont aussi nécessaires que la Sagesse à l’intelligence du mouvement d’où va sortir le jansénisme.
. — A-t-il rassemblé les opérations et les découvertes de l’intelligence sous un principe unique qui leur donne à toutes un tour nouveau ? […] Cela seul lui donnerait la mesure de notre intelligence. […] On n’y discute pas la valeur de ces opérations, la véracité de notre intelligence, la certitude absolue de nos connaissances élémentaires ; ceci est une affaire de métaphysique.
Raymond Brucker, l’un des êtres les plus extraordinaires de son siècle, le fulgurant et augural improvisateur qui fécondait autour de lui les intelligences et dont abusèrent tant d’écrivains couverts de gloire, Raymond Brucker mourut dans l’obscurité et dans la plus déchirante misère, au moment même de la plus grande popularité catholique de Louis Veuillot, sans proférer une plainte contre ce triomphant qui l’abandonnait, après avoir écrit sous sa dictée l’Esclave Vindex et le Droit du Seigneur, les deux seuls livres peut-être qui resteront de toute cette œuvre que la première coulée du temps va submerger ! […] Telle est la Trinité divine de cette rognure de siècle, la seule trinité qui soit désormais sortable et dont le mystère n’accable pas nos intelligences. […] La vérité, la substance des choses, le fond des âmes, étaient de peu d’intérêt pour lui et les splendeurs morales de toute sorte glissaient sur son intelligence et sur son cœur comme les rayons du soleil d’Afrique sur les écailles d’un vieux crocodile affamé et larmoyant aux pieds du Sphinx de l’Épouvante. […] Il ne s’agit pas seulement de sauver les âmes et de sauver les États, il faut encore sauver l’intelligence humaine qui est en perdition sur un océan de bêtise et qui va tout à l’heure être engloutie. […] Le Christianisme enseigne que la souffrance est nécessaire et les hommes de génie qui sont les Pélicans de l’intelligence paraissent avoir reçu la mission de le démontrer, tant cette féroce amoureuse des hommes est jalouse des plus grands d’entre eux et tellement est intime son enlacement à ces rouvres mélancoliques de la patience.
Il prenait avec intelligence le mouvement indiqué et savait tenir la pose, qualité rare ! […] quelle intelligence profonde de toute une civilisation ! […] Beaux temps où les choses de l’intelligence passionnaient à ce point la foule ! […] Avec cette intelligence parfaite du coloris, qui ne lui a jamais fait défaut, M. […] « Je dis alors que de tels dessins contribuaient énormément à une intelligence complète du poème.
Ils prenaient sur leur repos et sur leur sommeil pour copier avec un grand soin et aussi une véritable intelligence les monuments du vieux théâtre. […] Et puis, chose toute naturelle, puisqu’il s’agit d’une actrice chez qui l’intelligence est la première qualité, les parties effacées du rôle sont venues en première ligne. […] Sa sphère est au-dessus de ton intelligence. […] Il n’y avait ici qu’à suivre le texte ; mais encore il fallait le suivre avec intelligence et avec l’entente de la scène. […] La voix est très belle, la diction parfaite, l’intelligence du texte absolument juste et la puissance d’émotion extraordinaire — sans moyens violents — et extrêmement communicative.
Rien d’ailleurs n’est plus facile, sans remonter pour cela jusqu’aux Pères, sans sortir de l’histoire de notre littérature, que de trouver, dans Bossuet, par exemple, tout ce qu’il faut connaître du sujet pour une pleine ou suffisante intelligence des Pensées. […] Nous serions d’ailleurs trop heureux si nous pouvions nous soustraire à la préoccupation de tant de problèmes qui passent notre intelligence, et qui doivent leur invincible et fatal attrait justement à ce qu’ils la passent. […] Ici se place le mystère de la rédemption, qui ne serait pas « mystère » s’il ne choquait pas rudement notre intelligence. […] Si ce serait dépasser les bornes du cadre où je voudrais me contenir que d’essayer de réparer ici ces oublis, il importe pourtant, il est même essentiel à l’intelligence du roman de Le Sage d’indiquer brièvement quelques-uns au moins de ces caractères. […] Voltaire n’a jamais su ce qui se passe dans l’âme d’un paysan, d’un homme du peuple, d’un laquais, d’une fille d’auberge, ce qu’ils ruminent silencieusement de colères et de haines, ce qui gronde sourdement en eux contre un ordre social dont leurs épaules sentiraient bien encore, à défaut de leur intelligence, qu’ils portent eux seuls tout le poids.
Le vigilant consul, entretenant des intelligences parmi cette foule d’hommes pervers, était averti de leurs projets, et assistait, pour ainsi dire, à leurs conseils. […] Les harangues de Cicéron abondent en pensées fortes, ingénieuses et profondes ; mais la connaissance de son art l’oblige à leur donner toujours ce développement utile pour l’intelligence et la conviction de l’auditeur ; et le bon goût ne lui permet pas de les jeter en traits saillants et détachés. […] et veut-il que, silencieux et privés d’intelligence comme aux premiers jours où nous sommes nés, nous allions nous courber de nouveau pour le gland sauvage et l’eau pure des fontaines28 ! […] Quelle peut donc être l’influence d’un mauvais gouvernement, pour qu’une race ingénieuse, et qui continuait à cultiver son esprit, soit descendue si bas, et ait langui si longtemps dans un marasme social qui lui ôtait la force et lui laissait l’intelligence ? […] Hors de ce cercle, il est incontestable que le progrès de la liberté moderne, qui nous éloigne si fort du moyen âge, nous a donné cependant une plus vive intelligence de sa littérature énergique et sans frein.
La foi avec tous ses motifs n’y ferait plus rien : dégagés que nous serions de ce souvenir de la mort, qui, comme un maître sévère, nous retient dans l’ordre, nous nous ferions un point de sagesse de vivre au gré de nos désirs, nous compterions pour réel et pour vrai tout ce que le monde a de faux et de brillant ; et notre raison, prenant parti contre nous-même, commencerait à s’accorder et à être d’intelligence avec la passion.
Quoique ces auteurs, même les plus classiques comme Andrieux, n’eussent point à beaucoup près, autant que Fontanes, le culte et la vive intelligence de la langue du xviie siècle, ils ne laissaient pas dans leurs principaux membres (et le nom de Daru nous les résume et nous les garantit) de composer une bonne école, somme toute, une bonne race en littérature.
Si Bernier, dans cette lettre, ne se réconcilie pas nettement avec Descartes qu’il continue de considérer comme un philosophe trop affirmatif en ses solutions, il y rétracte du moins aussi formellement que possible les doctrines de Lucrèce et d’Épicure et toutes les assertions purement matérialistes nées de la théorie des atomes ; il y insiste particulièrement sur l’impossibilité d’expliquer par la matière seule et par le mouvement de corpuscules, si petits qu’on les fasse, des opérations d’un ordre aussi élevé que celles qui constituent l’intelligence, le raisonnement, la perception de certaines idées, la conscience qu’on a d’avoir ces idées, la volonté, le choix dans les déterminations, etc. ; en un mot, il y combat au long et avec détail l’épicuréisme, auquel il sait bien que Chapelle incline et est d’humeur, soit en théorie, soit en pratique, à s’abandonner : Je me promets, lui dit-il, que vous donnerez bien ceci à ma prière, qui est de repasser un moment sur ces pensées si ingénieuses et si agréablement tournées qu’on a su tirer de vos mémoires (apparemment quelques écrits et cahiers de philosophie et de littérature de Chapelle), sur tant d’autres fragments de même force que je sais qui y ont resté, et généralement sur tous ces enthousiasmes et emportements poétiques de votre Homère, Virgile et Horace, qui semblent tenir quelque chose de divin.
De la hardiesse, de l’intelligence, de l’esprit, et même un assez bon esprit, de qualité ferme et assez judicieuse, tout cela se dépensa dans une vie de courtisan et dans un cercle d’intérêts frivoles.
Vous citez M. de Chamberlan, auquel vous prétendez que j’ai écrit que tous les hommes sont nés avec une égale portion d’intelligence.
Pourtant, on a beau être savant et d’une pénétrante intelligence, comme on est jeune, comme on a soi-même ses excès intérieurs de force et de désirs, comme on a ses convoitises et ses faiblesses cachées, il y a des illusions aussi que peuvent faire ces œuvres toutes modernes du dehors et qui s’adressent à la curiosité la plus récente ; on les voit comme les premières jeunes femmes brillantes qu’on rencontre et à qui l’on croit plus de beauté qu’elles n’en ont ; on leur suppose parfois un sens, une profondeur qu’elles n’ont pas, on leur applique des procédés de jugement disproportionnés, et on les agrandit en les transformant.
Voilà proprement la crise de Vauvenargues, cette belle folie de jeunesse qu’il est bon d’avoir ressentie dans l’intelligence, comme dans le cœur.
La bonne intelligence régna sur les frontières ; le commerce ne fut point interrompu ; l’Empire demeura tranquille, et j’eus le loisir de me pourvoir abondamment de tous mes besoins. » Le grand dessein n’éclate qu’au commencement du printemps (1672) : « J’avais disposé mes projets de guerre de manière que je devais tomber en même temps sur quatre places considérables des ennemis, dans la pensée que j’avais qu’on ne pouvait faire un trop grand effort dans le commencement pour déconcerter les États-Généraux et leur abattre le courage. » Le prince de Condé, à la tête d’une armée, Louis XIV, à la tête d’une autre, débouchent de concert dans la Belgique par les Ardennes et par Charleroi, et sont rejoints au-delà de la Meuse par les troupes venues du pays de Cologne.
Il ne manquerait cependant à l’oisiveté du sage qu’un meilleur nom, et que méditer, parler, lire et être tranquille, s’appelât travailler. » Il se flatte aujourd’hui d’avoir à peu près réalisé ce plan qu’il s’était proposé, d’avoir vécu en sage et en philosophe, étranger à ce qu’on appelle succès, indifférent à ce qu’on appelle gloire, et de s’être uniquement « attaché, en cultivant les lettres, à mettre en jeu les ressources de son intelligence, dans l’espoir de prendre une idée de l’ensemble des choses de ce monde où il ne fera que passer, et de purifier, autant qu’il est possible, son esprit et son âme par la méditation et l’étude. » Ce sont ses propres termes, et je n’ai pas voulu affaiblir l’expression de cette satisfaction élevée ; mais il est résulté de cette conscience habituelle de sa propre sagesse et de cette confiance tranquille en soi, qu’il a été enclin à voir les autres plus fous ou plus sots qu’ils n’étaient peut-être ; il se disait, en les écoutant, en les voyant animés de passions diverses : « Est-il possible que tous ces gens-là ne soient point raisonnables et sages comme moi-même ?
Son voyage de Paris fut un grand événement dans sa vie : elle dut, selon son expression, y être fréquemment tentée ; son intelligence si ouverte put y donner plus d’un secret assaut à sa foi ou du moins à son cœur.
Malgré ce léger défaut d’action et de composition qui ne s’aperçoit qu’en y repensant et à l’analyse, l’effet de lumière est si vrai, si large, si bien rendu, si pleinement harmonieux ; la bonté, l’intelligence et les vertus domestiques peintes sur toutes ces figures sont si parfaites et si parlantes, que l’œuvre attache, réjouit l’œil, tranquillise le cœur et fait rêver l’esprit.
Thiers ; je ne vois pas qu’il y ait grande comparaison à établir entre eux, sinon en ce qu’ils ont tous deux traité des mêmes époques avec une âme et une intelligence bien françaises, un coeur national, et aussi avec clarté et netteté.
Il y a de ces batailles classiques aussi, dont il faut avoir l’entière intelligence comme on l’a de tout chef-d’œuvre.
Il y vit comme par hasard son cousin Eugène, et, sous air de ne chercher que la distraction, il y noua sans nul doute avec l’Allemagne et l’Empire des intelligences sérieuses.
Il a dû changer d’armes plus d’une fois et se transformer pour se faire égal aux circonstances ; mais, certes, ce qui ne lui a jamais manqué, c’est le courage ; ce n’est pas non plus l’intelligence des temps, des moments et de la société moderne largement envisagée, hardiment comprise, et si souvent talonnée par lui ou devancée en plus d’un sens.
Il s’était donné en effet (c’était le mot) aux époux Roland, et il était, jusqu’au sein du foyer conjugal, un de ces amoureux discrets, silencieux, obéissants, dormant sous la cendre, qui désirent moins qu’ils ne le croient, qui espèrent peu et ne demandent rien, un Ballanche (moins la haute intelligence), un de ces êtres dévoués et doux, tels que les femmes honnêtes pourraient en garder près d’elles sans inconvénient pendant une éternité.
Victime lui-même de la persécution et de la calomnie, Buzot se montre d’une extrême injustice pour tous ses adversaires et les confond dans une commune et banale injure : ce sont d’inévitables représailles ; et il serait encore plus élevé d’intelligence que de cœur, celui qui saurait s’en abstenir.
Mirabeau voulait que le roi sortît de Paris en roi, en plein jour, non déguisé ni, certes, en domestique, sans rien de ce qui avilit aux yeux d’une nation ; il voulait aussi l’appui d’un général, de M. de Bouillé ; la guerre civile peut-être, non la guerre étrangère… La reine, cependant, commençait à reconnaître qu’il y aurait eu avantage et peut-être salut à suivre plus tôt cette voie de conciliation et d’intelligence avec quelques-uns des hommes influents de l’Assemblée.
S’il fallait que le major ou major général, pour avoir action, fût tellement en rapport d’esprit et de bonne intelligence avec son chef, comme M. de La Feuillade était colonel du régiment des gardes, il s’ensuit de son refus qu’il jugeait que Catinat, devenu son major, ne serait point du tout à l’unisson avec lui ; et pour peu qu’on y songe et qu’on se rappelle le caractère connu de M. de La Feuillade, rien ne paraît alors plus naturel que ce refus de prendre Catinat pour son canal habituel et son porte-voix.
Othman fait d’abord trois voyages en Algérie, et, entre chacun de ces trois voyages, il conduit des explorateurs français dans son pays ; enfin, pour couronner ses efforts, tendant à des ouvertures de relations, il vient en 1862 à Paris, ville où jamais un Targui n’avait mis les pieds… Homme d’une haute intelligence et d’un grand sens pratique, Othman a surtout remarqué en France ce qui contraste avec le désert : le nombre considérable des habitants, l’abondance des eaux, la richesse et la variété de la végétation, la rapidité et la sécurité des communications, enfin la généreuse hospitalité qu’il y a reçue.
MM. de Goncourt sont des spécialistes trop distingués pour qu’on essaye (ce qui serait d’ailleurs bien superflu) de les détourner un seul instant de leur ligne et de leur voie ; elle est la leur, ils se la sont faite, et ils ont certes droit de la tenir et de la garder : je ne voudrais, si j’avais à leur donner conseil, que les conseiller dans leur sens même et avec l’intelligence de leur direction.
Elle a de toutes choses l’étude colorée et vivifiée, l’intelligence et l’amour.
Il faut dire pourtant que ce ne fut que dans les hautes classes que le talent du jeune Casimir se révéla : jusqu’à l’âge de quatorze ans, son intelligence elle-même paraissait sommeiller.
MADAME DE SÉVIGNÉ Les critiques, et particulièrement les étrangers, qui, dans ces derniers temps, ont jugé avec le plus de sévérité nos deux siècles littéraires, se sont accordés à reconnaître que ce qui y dominait, ce qui s’y réfléchissait en mille façons, ce qui leur donnait le plus d’éclat et d’ornement, c’était l’esprit de conversation et de société, l’entente du monde et des hommes, l’intelligence vive et déliée des convenances et des ridicules, l’ingénieuse délicatesse des sentiments, la grâce, le piquant, la politesse achevée du langage.
Gerdy, Physiologie des sensations et de l’intelligence. — Bain, Senses and Intellect, 87, 250.
Perrault était l’homme de confiance de Colbert, auprès de qui il avait remplacé Chapelain : esprit ouvert, inventif, un peu trop assuré et présomptueux, comme sont souvent les gens qui se sont formés eux-mêmes, incapable de douter de son savoir, comme de se douter de ses ignorances, ayant plutôt la curiosité d’un amateur et l’intelligence d’un directeur des beaux-arts que les dons d’un écrivain ou d’un critique, faisant une forte cabale avec ses deux frères, le receveur des finances et le médecin, fort appliqués comme lui aux sciences et aux arts, et fort répandus aussi dans le monde.
Comme lorsqu’on dit : Ce sabre ne s’inquiétait pas : il y a là 1° une métonymie, le sabrepour Napoléon ; 2° une autre figure qui personnifie le sabre, l’anime et le dote d’intelligence et de passion.
On appelle de ce nom au xviiie siècle la réflexion de l’intelligence sur les émotions, réelles ou possibles, de la sensibilité : c’est moins le sentiment que la conscience et surtout la notion du sentiment.
L’amour, l’intelligence, le talent, l’esprit même, tout cela non seulement peut se passer du monde, mais a toujours vécu hors de lui, loin de lui, sauf par accident.
nous savons, tout de suite que c’est un imbécile, et « quel pauvre cerveau de paysan laborieux, quelle étroitesse d’intelligence cachent la solennité de ce lauréat académique fabricant d’in-octavos, sa parole à son d’ophicléide faite pour les hauteurs de la chaire », Mais M.
André Gide une de ces intelligences critiques que leur délicatesse scrupuleuse paralyse.
Bergeret, vous les prenez donc pour « des énergies précieuses », les basses avidités ouvertes vers les misérables et fangeux royaumes qui sont de ce monde — Votre intelligence vive, alerte, capable de tout comprendre successivement, inégale à la vue synthétique qui seule donne la sérénité, hésite entre Spinoza qui put tirer de ses richesses intérieures un univers harmonieux et le pauvre Napoléon dont l’Europe conquise ne remplissait pas le vide décidément incurable.
Je passe la scène où Giboyer se lance dans d’interminables tirades contre l’aristocratie de l’argent opposée à l’aristocratie de l’intelligence.
Les seconds, délicats surtout, et qui sentent leur idée supérieure à leur exécution, leur intelligence plus grande encore que leur talent, même quand celui-ci est très réel.
Il fit un Mémoire pour le rétablissement en France de l’ordre des Frères prêcheurs, qu’il dédia pour premier mot « À mon pays » ; il écrivit une Vie de saint Dominique, qui serait à discuter historiquement, mais où respire et reluit l’intelligence vive du Moyen Âge.
Thiers a débuté par un Éloge de Vauvenargues, qui a remporté le prix à l’Académie d’Aix, et dont on ne connaît que des fragments remarquables par l’ampleur et l’intelligence.
De la modération, du ménagement en toutes choses, une intelligence vaste et tempérée, un sincère et ingénu désir de conciliation, une mémoire prodigieuse, immense, une expression pure, élégante et soignée, cette politesse affectueuse qui naît d’un fonds d’honnêteté et de candeur, c’est ce que témoignent tous ses écrits, et ce qu’on lirait aussi, jusqu’à un certain point, dans les traits de son noble et beau visage, dans ce sourire discret, dans cet œil fin, bienveillant et doux, et jusque dans ces contours si ronds et sensiblement amollis, où rien n’accuse la vigueur.
Devant Montauban, par exemple, Luynes a trop compté sur une intelligence qu’il a pratiquée avec un traître du parti.
Hugo fait un cours d’hydrothérapie, il nous entretient de l’ablution qu’il prend chaque matin : ablution qu’il a enrichie de quelques carafes d’eau glacée, qu’il se verse lentement sur la nuque, dans le cours de la journée, — vantant fort ce réconfort pour les travaux de l’intelligence et autres.
Mais pour aborder les grands sujets, pour célébrer les rites fondamentaux de la vie et de l’intelligence, il conviendrait de recourir aux grandes orgues de l’alexandrin.
Cependant il semble résulter des contes que, loin de refuser aux fils, nés de captifs et d’hommes libres, l’intelligence et les qualités de cœur, on les oppose souvent, et à leur avantage, aux enfants issus de parents libres l’un et l’autre.
Baudelaire a trop d’esprit pour être, quand il sera moraliste, d’une autre morale que de la morale chrétienne ; mais, quoique ses conclusions contre ces drogues, aliénatrices de la liberté et de l’intelligence humaines, mais dont il nous fait un peu trop poétiquement l’histoire, soient des conclusions que le Christianisme peut avouer, ce n’est pas, voyons !
Le père Deléglise (Jean-Marie), des Pères Oblats de Marie Immaculée, aumônier volontaire au 13e bataillon de chasseurs alpins : « D’un dévouement absolu, exerçant ses fonctions avec un tact et une intelligence au-dessus de tout éloge, apprenant à ses hommes le plus profond mépris de la mort, et montrant la même indifférence complète du danger ; à l’assaut du 14 juin 1915 a suivi la colonne, donnant à tous le meilleur réconfort ; frappé à son tour, en portant un blessé sur ses épaules, s’est relevé pour continuer sa marche avec son glorieux fardeau ; a été tué presque aussitôt d’une balle en plein front. » (J.
Je pourrais prendre l’un après l’autre les différents rôles classiques du provincial : le petit marchand des villes, le gros marchand enrichi, le châtelain ignorant et vaniteux, le châtelain pauvre, le châtelain grand seigneur, les femmes surtout qui se ressemblent presque toutes dans les romans dits provinciaux, mal habillées, sentimentales, courtes d’intelligence, de dévotion étroite, intimidées et hypnotisées à la seule vue d’une Parisienne ; je pourrais prendre ces personnages et montrer que, sauf de bien légères nuances, ils n’ont pas changé en passant de livre en livre, qu’ils sont au fond les mêmes et comme immuables dans la littérature depuis trois siècles.
C’est une loi de notre intelligence que deux objets différents lui paraissent différer moins s’il les compare ensemble à un troisième, qui diffère beaucoup et de l’un et de l’autre.
Vous préparez les expériences de ce médecin, qui, pressant ou lâchant la cervelle saillante d’un trépané, supprimait et ranimait en lui la pensée, à l’instant, d’un coup de pouce, ouvrant et fermant tour à tour l’intelligence aussi sûrement qu’un robinet !
C’est la connaissance qui, appliquée d’abord à la sensation, se porte ensuite vers la pêche, et la connaissance est une action de l’intelligence.
Au moment où, conduit par une rêverie savante à ce matérialisme épicurien dont César devait abuser en factieux quelques années après, Lucrèce allait expliquer la formation spontanée du monde, l’action exclusive de la matière, l’intelligence passagère qui en résulte et la mortalité absolue de l’être humain, il élève ses regards vers les cieux ; il y voit briller un astre cher à la superstition romaine ; il en retrouve le souvenir et le nom dans les origines de Rome, et il ouvre son poëme antimythologique et antiplatonique par cette invocation incomparable à la déesse de la fécondité dans la nature, à cette déesse de la beauté et de l’amour, qu’il supplie de désarmer le dieu de la force et de la guerre : « Mère des enfants d’Énée, charme des hommes et des dieux, bienfaisante Vénus !
Tête respirant la franchise, œil brillant d’intelligence, regard profond et bienveillant révélant un cœur d’or, voilà l’homme que la moitié de la France acclame, quand il lance aux foules sa parole toujours généreuse et élevée. […] L’intelligence arrive avant la volonté en la présence de l’Aimé, bien que toutes deux luttent de vitesse. […] Les oiseaux du verger, chantant à l’aurore, donnent au solitaire l’intelligence d’amour, et quand les oiseaux, cessent leurs chants, l’Aimé s’évanouit d’amours, et cette défaillance est un délice plus grand, une douceur ineffable. […] L’Aimant court par les rues de la ville, on lui demande s’il devient fou, et lui répond qu’il a mis dans, les mains du Seigneur sa volonté et son intelligence, ne se réservant que la mémoire pour se souvenir de lui. […] — À donner un peu de nouveau à nos intelligences de blasés, à mettre une étincelle d’imprévu dans le siècle le plus platement bête que l’on ait pu rêver !
Nous devons reconnaître qu’au temps de Racine on n’avait pas, au même degré qu’aujourd’hui, l’intelligence du passé, le sentiment et le goût de l’exotique, la notion de la variété profonde des types humains. […] Je voudrais voir jouer Andromaque par des femmes et des hommes parfaitement beaux et qui auraient la science et l’intelligence des Olympiens. […] Une fable d’il y a trois mille ans et des sentiments d’aujourd’hui, des actions de sauvages et un langage de courtisans, le fond le plus brutal et la forme la plus élégante et la plus tempérée, mythologie et christianisme…, la saveur de ces multiples mélanges échappait évidemment au candide auditoire de l’autre jour, et il n’avait de la tragédie de Racine qu’une intelligence superficielle et grossière. […] S’ils n’ont pas pénétré aussi avant dans l’intelligence de la pièce que certains lettrés prétentieux qui peut-être y veulent voir trop de choses, ils ont du moins pressenti la beauté des vers, la délicatesse des analyses morales et la noble ordonnance de l’œuvre. […] » et d’Arcy : « Votre grande intelligence, saisissant à la fois les pôles opposés des choses, a toujours séparé l’esprit de la lettre, l’institution de son but idéal, la convention de ce qui la justifie. » C’est une sorte de transposition philosophique du langage de la passion.
Quand vous rencontrez une intelligence robuste, fournissez-lui quelque aliment, et ne la condamnez pas à mâcher à vide, si j’ose m’exprimer ainsi. […] Le marquis de Flers est un conseiller référendaire à la Cour des comptes, qui a été inculpé du délit d’entretien d’intelligence à l’étranger, dans le but de troubler la paix publique ou d’exciter à la haine et au mépris du gouvernement de l’empereur. […] UN VIEUX GÉNÉRAL DU PREMIER EMPIRE (un peu sourd) Intelligence à l’étranger… Avec les Chinois, sans doute… Nous n’avons pas d’autre guerre. […] Il y a plusieurs manières d’entretenir l’intelligence, et il en est plus d’une qui n’est pas légale. […] Étrange parfum qui varie selon le caractère et l’intelligence de celui qui le respire, mais qui enivre les plus froids et les plus sceptiques.
C’est à peine s’il lui concède une certaine dose d’intelligence. […] Il goûte la Ronde de nuit de Rembrandt, et rapporte d’Amsterdam une pièce de vers qui vaut une page de critique… Décidément ce « satyre » n’est pas dénué d’intelligence. […] Fabié est issu d’une humble famille du Rouergue ; son père était bûcheron ; il eût été bûcheron lui-même si ses maîtres n’eussent distingué son intelligence et ne l’eussent lancé dans la carrière des lettres. […] Un poème comme ceux de Maeterlinck n’a presque plus de forme qui lui soit propre ; il devient un prétexte à rêver ; quelque chose comme une mélodie sans paroles que chacun comprend et goûte à son gré, et qui exige de ceux qui l’écoutent une puissance considérable d’imagination et de réflexion… En vérité, je vous le dis, l’auteur de Pelléas compte trop sur l’intelligence du lecteur, il lui demande un effort d’intellect qui équivaut à une demi-collaboration. […] On y est plongé, on y sent grouiller la populace ; on y respire l’odeur du vin bleu… Il n’en est pas moins curieux d’opposer au héros légendaire du roman le vrai Chevalier de Maison-Rouge, cet homme extraordinaire, qui dépensa des trésors d’intelligence pour mourir fusillé à la fleur de l’âge, et qui fût devenu peut-être un grand général ou un grand ambassadeur, si Napoléon eût daigné se servir de ses talents.
Ces livres pour moi sont des plus curieux : ce sont des analyses de l’inassouvissement, — la maladie de l’intelligence du temps. […] Puis mon frère tombe malade, très malade, est malade, tout un an de la plus effroyable maladie qui puisse affliger un cœur et une intelligence, noués au cœur et à l’intelligence d’un malade. […] Renan annonce qu’il vient de recevoir une lettre de Mommsen, déclarant qu’il serait temps de renouer des relations, de reprendre les travaux de l’intelligence communs aux deux nations. […] 14 novembre Au dîner de Brébant, Robin établit que la pesanteur du cerveau est un symptôme de la valeur de l’intelligence, que la moyenne d’un cerveau bien constitué se trouve entre 1 350 et 1 400 grammes, que le cerveau de 1 100 grammes est presque toujours un cerveau d’idiot.
Notre intelligence, faculté ordonnatrice, se plaît à constater la régularité de leur dessin et l’ingéniosité de leurs combinaisons : notre œil de géomètres en est un instant réjoui. […] Les lois de l’association agissent sur toutes les intelligences, même sur les plus positives. […] Si le peintre ne nous a rien rendu de ce qui, dans la chimie, parle à l’intelligence abstraite, il nous a rendu tout ce qui frappe les sens et l’imagination. […] Que pourrait ici l’intelligence ? […] C’est une aspiration de la sensibilité, non une intuition de l’intelligence.
On sait, par exemple, avec quelle finesse d’intelligence & de sentiment Baron dans le début de Mithridate avec ses deux fils, marquoit son amour pour Xipharès & sa haine contre Pharnace. […] Celui qui n’a que du sentiment, ne joue bien que son propre rôle ; celui qui joint à l’ame l’intelligence, l’imagination & l’étude, s’affecte & se pénetre de tous les caracteres qu’il doit imiter ; jamais le même, & toûjours ressemblant : ainsi l’ame, l’imagination, l’intelligence & l’étude, doivent concourir à former un excellent comédien. […] Et c’est-là que triomphe l’actrice, qui joue ce rôle avec autant de vérité que de noblesse, d’intelligence que de chaleur. […] Les Poëtes gémissent de leur côté de ne pouvoir se reposer sur l’intelligence & le talent de leurs acteurs pour l’expression des réticences. […] Le public comprend trois classes ; le bas peuple, dont le goût & l’esprit ne sont point cultivés, & n’ont pas besoin de l’être ; le monde honnête & poli, qui joint à la décence des moeurs une intelligence épurée & un sentiment délicat des bonnes choses ; l’état mitoyen, plus étendu qu’on ne pense, qui tâche de s’approcher par vanité de la classe des honnêtes gens, mais qui est entraîné vers le bas peuple par une pente naturelle.
Les défauts des contradictions, les bizarreries, un peu de mystérieuses ténèbres, bien loin de leur être préjudiciables, leur rendent un service vraiment vital en excitant sans fin ni terme l’intelligence et l’imagination lancées dans une carrière immense. […] L’homme d’action se sert de son intelligence pour agir, et l’homme intelligent qui est mêlé à l’action ne se sert guère de l’action que pour comprendre plus de choses. […] Sans compter qu’il n’y a rien de plus précieux pour la santé, l’intelligence, pour tout ! […] Tout en étant complètement de son avis, je me permettrai pourtant de dire à l’abbé Pierre : Je reconnais ainsi que vous la nécessité d’une religion surtout en présence des horribles choses que nous a données la libre pensée mise à la portée de toutes les intelligences. […] Cette femme bien nourrie, bien portante, d’une intelligence moyenne, n’avait pas de désillusions par conséquent.
Sans cet avertissement opportun, certaines gens abusés auraient pu s’en aller avec l’impression que la sculpture était une sorte de procédé mécanique à la portée des intelligences les plus rudimentaires. […] Ils n’ont point la vivacité d’intelligence des Français. […] Il peut néanmoins se trouver des gens qui en aient enfin assez de cette étrange tendance moderne qui charge l’enthousiasme de faire le travail de l’intelligence. […] Certes, il se peut que j’en parle avec exagération : et même je l’espère car il n’y a pas d’amour sans exagération, et là où l’amour fait défaut, l’intelligence est absente. […] En outre, le plaisir critique que nous éprouvons à suivre à travers les détours d’apparence compliquée, d’une phrase, le travail de l’intelligence constructive, n’est point à dédaigner.
Je les considérais tous deux, l’un comme un grand galion espagnol, et l’autre comme un vaisseau de guerre anglais ; maître Jonson, comme le galion, était exhaussé en savoir, solide, mais lent dans ses évolutions ; Shakspeare, comme le vaisseau de guerre anglais, moindre pour la masse, mais plus léger voilier, pouvait tourner à toute marée, virer de bord, et tirer avantage de tous les vents par la promptitude de son esprit et de son invention. » Au physique et au moral, voilà tout Jonson, et ses portraits ne font qu’achever cette esquisse si juste et si vive : un personnage vigoureux, pesant et rude ; un large et long visage, déformé de bonne heure par le scorbut, une solide mâchoire, de vastes joues, les organes des passions animales aussi développés que ceux de l’intelligence, le regard dur d’un homme en colère, ou voisin de la colère ; ajoutez-y un corps d’athlète, et vers quarante ans, « une démarche lourde et disgracieuse, un ventre en forme de montagne109. » Voilà les dehors, le dedans y est conforme. […] Il n’y a point en lui de force permanente et distincte qui maintienne son intelligence dans la vérité et sa conduite dans le bon sens.
Nous allons l’étudier ensemble ; mais je dois d’abord vous dire comment j’ai pu le connaître et lui donner sa place, la première de toutes, dans le catalogue des grandes et saines intelligences. […] Ce ne fut que longtemps après que je demandai tout bas à un des témoins de ces scènes, qui était cet homme si dévoué et si calme, et qu’on me répondit : « C’est Barthélemy Saint-Hilaire, le traducteur d’Aristote. — Cela ne me surprend pas », dis-je à mon tour : « il y a du grec dans cette intelligence, et de la philosophie dans ce courage. » III Nous nous perdîmes de vue pendant quelque temps ; je m’informai avec anxiété de lui ; j’appris que, retiré dans un petit jardin de légumes au milieu d’un faubourg de la banlieue de Meaux, résidence de Bossuet, Barthélemy Saint-Hilaire, après avoir refusé ce qu’on le conjurait d’accepter comme gage de son silence, vivait à Meaux du travail de ses mains dans une hutte de son jardin, et nourrissait sa vieille tante de quatre-vingt-six ans des carottes et des pommes de terre cultivées par lui.
Il faut donc, sous peine de forcer ces grandes natures à se réfugier dans le tombeau avant l’heure marquée par le destin et à chercher la paix dans le suicide, il faut que la Providence, dans sa bonté infinie pour tous les êtres, donne à cet homme d’élite la goutte d’eau de l’éponge qu’on laisse tomber sur les lèvres pâles du Nazaréen dans son agonie sur la croix ; cette goutte d’eau, c’est le culte fidèle de quelques rares et tendres admirateurs au-dessus du monde par leur intelligence et leur dévouement, qui s’attachent aux pas, aux malheurs même des hommes supérieurs et persécutés, et qui les suivent de station en station jusqu’à leur supplice ou à leur mort. […] …………………………………………………… Chacun est du climat de son intelligence, Je suis concitoyen de tout homme qui pense, La vérité c’est mon pays.
Intelligence haute et mélancolique mélancolique d’être haute, et haute pour les mêmes raisons qui la font mélancolique il ne paraît pas d’aplomb dans sa vie. […] L’oie, reçue chez le chat — non gratuitement — s’est crue en pays de bohème ; et c’est, en somme, le chat qui a galamment « exploité » l’oie, tout en l’amusant, et même en lui ouvrant l’intelligence.
» Oui, c’est vraiment positif, au fond le scientifique est devenu le goût de toutes les intelligences, depuis les plus hautes jusqu’aux plus basses, et ne voilà-t-il pas une pauvre petite créature, qui au lieu de couper des romans au bas des journaux, coupe des articles de science, et a l’envie passionnée d’aller à un cours médical, comme autrefois l’une de ses pareilles avait l’envie d’aller au bal. […] Eh bien, sous ces attaques, et plus tard dans le silence un peu voulu qui a suivi, renfonçant en lui l’amertume de sa carrière, et n’en faisant rejaillir rien sur les autres, Flaubert est resté bon, sans fiel contre les heureux de la littérature, ayant gardé son gros rire affectueux d’enfant, et cherchant toujours chez les confrères ce qui était à louer, et apportant à nos heures de découragement littéraire, la parole qui remonte, qui soulève, qui relève, cette parole d’une intelligence amie dont nous avons si souvent besoin, dans les hauts et les bas de notre métier.
Son style est pur & facile, & ses notes servent à l’intelligence de son auteur sans être trop longues. […] in-12. sous ce titre : Histoire secrette de Néron, ou le Festin de Trimalcion, traduit de Petrone, avec des notes historiques, un discours préliminaire sur Petrone, son histoire secrette, & plusieurs autres remarques servant à l’intelligence de cet ouvrage.
Il y a même plus d’intelligence du clair-obscur, que les autres peintres n’en avoient en ces temps-là. […] Ils ont vû Jules Cesar citoïen aussi distingué par son éloquence et par plusieurs vertus civiles, que capitaine fameux par ses exploits et par son intelligence dans l’art militaire.
Fils de ce romantisme qui, en passant, a laissé partout une lave incandescente de vie qu’on n’éteindra plus, Féval ne procède jamais à la manière incolore de ce pauvre diable de Le Sage, à peu près poétique comme son nom, mais il n’en trouble pas moins la hiérarchie des choses, dans son système de roman, en mettant en premier l’intérêt des événements, qui devrait être le second, et en second l’intérêt des sentiments, qui est certainement le premier… Et ne croyez pas qu’il n’en ait point l’intelligence ! […] Nous avions besoin de cette preuve, nous autres chrétiens… Nous avions parmi nous de très hautes intelligences, — des génies même, comme de Maistre et Bonald, — des savants, des docteurs, des éloquents ; mais un homme d’esprit qui sût rire, tout en restant chrétien, il faut bien le dire, il n’y en avait pas.
En présence de plusieurs plaisirs conçus par l’intelligence, notre corps s’oriente vers l’un d’eux spontanément, comme par une action réflexe. […] L’homme et l’intelligence, page 36.
Cependant, s’ils avaient été supérieurs par l’intelligence et les arts, surtout s’ils avaient apporté avec eux un culte nouveau, l’ancienne civilisation, l’ancienne langue eût été vaincue par la nouvelle, aidée de la force. […] Ce ne sont pas des luttes de vassaux qui se battent pour un maître, qui souffrent ou frappent, sans que leur intelligence s’élève, et que leurs droits s’augmentent. […] L’intelligence de l’Europe à cette époque se divise en deux grandes fractions. […] Mais il est plus facile d’expliquer des règles de grammaire que de retrouver l’intelligence de ce premier enthousiasme poétique, emprunté à des temps si différents du nôtre, à des mœurs qu’il faut étudier. […] L’intelligence de la guerre y manque toujours ; on ne sent pas, en lisant cela, comment, au douzième siècle, battait le cœur sous l’armure.
Elle n’était pas si inférieure à ce roi qu’on le croirait, ou plutôt elle ne lui était inférieure qu’en politesse, en mesure, en esprit de suite et de précision : mais, à certains égards, elle le jugeait avec bien de l’intelligence et avec un bon sens plus libre et plus étendu qu’il n’osait se le permettre pour son propre compte ; elle le trouvait ignorant sur une foule de points, et elle avait raison.
Son admiration pour Pétrarque est sincère, celle qu’il a pour Dante me paraît un peu apprise : dans ces parties élevées et un peu âpres, c’est l’intelligence qui avertit en lui le sentiment.
Sa maladie ne ressemble point à celle de Pascal : ce dernier, qui peut avoir eu à certains moments des visions et des hallucinations, dominait en général par l’intelligence son état nerveux.
Pendant que Frédéric s’appliquait, après tant de désastres, à rétablir toutes les parties de l’État qui avaient souffert, soignant l’agriculture et l’industrie, attirait chez lui les populations voisines, faisait bâtir des villages, rendait à l’armée sa discipline et le ton de solidité qu’elle avait autrefois, et, en cela comme dans le veste, moins inventeur et novateur que praticien, « se bornait à donner par la routine, par de continuels exercices, aux officiers et aux troupes, l’intelligence et la fermeté dans tous les mouvements, pour être sûr d’eux à l’occasion s’il était nécessaire de les employer dans le sérieux » ; pendant que chaque jour, depuis le matin jusqu’à la nuit, il remplissait ainsi en conscience son devoir de chef et de tuteur de peuple, il fut atteint de la plus cruelle des douleurs.
Voir les choses telles qu’elles sont et les hommes tels qu’ils ont été est l’affaire déjà d’une intelligence qui se désintéresse, et un effet, je le crains, du refroidissement.
Mosant de Brieux à Caen sur le sens d’un vers de Lucrèce (24 janvier 1660) : Je n’ai pas le loisir d’examiner les explications que lui donnent Érasme, Turnèbe et Lambin, et ainsi je n’en puis parler… Mais pour celle de l’abbé de Marolles, sans examen on la peut rejeter, tant ce traducteur est antipode du bon sens, et tant il s’éloigne partout de l’intelligence des auteurs qui ont le malheur de passer par ses mains !
Rathery sur les bons côtés, sur les parties fortes et élevées de l’intelligence politique du personnage.
Des hommes d’esprit et d’intelligence se rencontraient pourtant au milieu de cette vie de bombance, et quelques-uns savaient concilier leurs devoirs extérieurs avec leurs aises au dedans.
Je ne mettrai pas d’insistance à me défendre, car c’est bien moi qui représente cette neutralité que j’aimerais aussi entendre appeler tantôt impartialité, et tantôt curiosité d’intelligence et d’observation.
Je ne donne point cela précisément comme un agrément ni comme une grâce, mais c’était au moins de l’intelligence et un talent.
Les traits de son visage, trop arrondis et trop obtus aussi, ne conservaient aucune ligne pure de beauté idéale ; mais ses yeux avaient une lumière, ses cheveux cendrés une teinte, sa bouche un accueil, toute sa physionomie une intelligence et une grâce d’expression qui faisaient souvenir, si elles ne faisaient plus admirer.
Ces gens de goût, Montaigne et Horace, quand ils nous parlent d’eux et qu’ils se jugent, doivent être écoutés avec intelligence et sourire, avec quelque chose de ce sourire fin qu’eux-mêmes ils ont en nous parlant.
Les maîtres seuls sont d’intelligence avec la nature ; ils l’ont tant observée qu’à leur tour ils la font comprendre.
La volonté chez la plupart des hommes est sujette à se rouiller avant l’intelligence, et celle-ci me demeurant des plus nettes et des plus lucides.
Quand il fit volte-face et qu’il changea subitement de sentiments et de parti, il erra au hasard d’abord, de manière à faire peine et pitié même à quelques-uns de ceux dont il se trouvait devenu l’allié et qui admiraient le plus sa vigueur et sa portée d’intelligence.
Sa brouille avec l’illustre maréchal a cessé ; le voilà revenu à la bonne intelligence des belles années.
Livrés à eux-mêmes, sans surveillance immédiate exercée par des pairs en intelligence, les hommes d’imagination, sentant de plus le cadre qui les contenait brisé à l’entour, ont exagéré leurs défauts, ont pris leurs licences et leurs aises.
Combien de poëtes sont ainsi, et eurent le talent plus distingué que l’intelligence !
Dans cette voie si périlleuse de la biographie contemporaine, il a su éviter les écueils de plus d’un genre, et atteindre le but qu’il s’était proposé : de la loyauté, de l’indépendance, aucune passion dénigrante, de bonnes informations, la vie publique racontée avec intelligence et avec bon sens, la vie privée touchée avec tact, ce sont là des mérites dont il a eu l’occasion de faire preuve bien des fois en les appliquant à une si grande variété de noms célèbres tant en France qu’à l’étranger ; cela compense ce que sa manière laisse à désirer peut-être au point de vue purement littéraire, et ce qui doit manquer aussi à ses jugements en qualité originale, car l’étendue même de son cadre lui impose un éclectisme mitigé.
Jugez par là de leur intelligence politique.
Enfin il recherche de préférence, dans ce règne aimable, les plantes qui par leurs accidents, leurs goûts, leurs mœurs, entretiennent des intelligences secrètes avec son âme.
Notre esprit ne produit qu’en transformant mystérieusement des données de sensibilité en faits d’intelligence.
Notre esprit ne produit qu’en transformant mystérieusement des données de sensibilité en faits d’intelligence.
Elles pèchent plutôt par précocité d’intelligence et de caractère.
Profitant de la paix forcée de l’Europe, assuré de l’alliance de la Russie et certain d’acheter sa connivence à l’Occident moyennant un appât du côté de la Turquie, Napoléon conçoit à un moment l’idée de mettre la main sur le trône d’Espagne, d’en précipiter un roi imbécile, une reine dissolue, et de déshériter leur fils qui, au fond, ne valait guère mieux, mais à qui l’on n’avait à reprocher alors que de ne pouvoir vivre en intelligence avec ses tristes parents et avec leur scandaleux favori, le prince de la Paix.
Quicherat, est celle d’un enfant sérieux et religieux, doué au plus haut degré de cette intelligence à part qui ne se rencontre que chez les hommes supérieurs des sociétés primitives.
Tout en regrettant de rencontrer trop souvent chez lui ce coin d’exagération que lui-même il accuse, le peu de discrétion et de sobriété, quelque licence de mœurs et de propos, et les taches de goût, nous rendons hommage à sa bonhomie, à sa sympathie, à sa cordialité d’intelligence, à sa finesse et à sa richesse de vues et de pinceaux, à la largeur, à la suavité de ses touches, et à l’adorable fraîcheur dont il avait gardé le secret à travers un labeur incessant.
La géométrie l’avait fort occupé dès le collège, et, au zèle dont il s’y appliquait, elle semblait presque sa vocation ; ou plutôt, dans sa curiosité élevée et étendue, il menait, dès sa jeunesse, toutes les connaissances de front : « Il ne voulait pas qu’un autre pût entendre ce qu’il n’aurait pas entendu lui-même » ; il s’en serait senti humilié comme homme, et ce noble sentiment d’orgueil, soutenu d’une opiniâtre volonté et servi d’une admirable intelligence, le porta au sommet des sciences sublimes.
Alors, quantité de définitions et de sentences d’or apparaissent : par exemple, cette définition de l’homme, que d’autres avant lui avaient trouvée, mais qu’il a réinventée et mise en honneur de nouveau : « L’homme est une intelligence servie par des organes. » Voici quelques-unes encore de ces belles pensées, et qui sentent le moderne Pythagore : En morale, toute doctrine moderne, et qui n’est pas aussi ancienne que l’homme, est une erreur.
On sent, dans tout ce qu’il écrit, « la raison mâle et cette énergie d’intelligence que donnent la réflexion, la liberté et la conviction ».
Jugeant la politique, absurde selon lui autant qu’ingrate, qui avait scindé et désaffectionné les royalistes vers 1823, il disait : « Je ne suis jamais trop sévère contre les bassesses du cœur humain, je le connais trop pour cela, mais je ne pardonne jamais la bassesse quand elle est en dehors de l’intelligence, quand elle est stupide. » Il avait fini par se détacher complètement des personnes en fait de gouvernement, et il ne se souciait plus, disait-il, que des peuples : « Les peuples vont, non parce qu’on les gouverne, mais malgré qu’on les gouverne. » Son bon moment de royalisme avait été lorsqu’il venait le matin dans le cabinet de M. de Chateaubriand aux Affaires étrangères : il y rencontrait M.
J’ai imaginé aussi (car c’est mon plaisir d’opposer ces noms à la fois voisins et contraires), j’ai plus d’une fois, dans le courant de ce travail, imaginé à Paul-Louis Courier un interlocuteur et un contradicteur plus savant et non moins fait pour lui tenir tête, dans la personne de l’illustre et respectable Quatremère de Quincy, cette haute intelligence qui possédait si bien le génie de l’Antiquité, mais qui résistait absolument aux révolutions modernes.
Cette émancipation de son intelligence semble n’avoir souffert aucune gêne ni aucun retard.
C’était un singulier oubli et une inadvertance de l’amour-propre en ces rares intelligences : ils jugeaient l’humanité d’après eux-mêmes, et ils la mettaient très haut ; ils jugeaient des autres individus d’après eux aussi, et, sitôt qu’ils ne les trouvaient point à leur mesure et jetés dans le même moule, ils les jugeaient très inférieurs et tout à fait petits.
Quand il le sait malade et qu’il le voit comme prêt à s’évanouir dans sa pure essence, il s’écrie : La seule pensée de votre mort me sert d’argument pour prouver l’immortalité de l’âme ; car serait-il possible que cet être qui vous meut et qui agit avec autant de clarté, de netteté et d’intelligence en vous, que cet être, dis-je, si différent de la matière et du corps, cette belle âme douée de tant de vertus solides et d’agréments, cette noble partie de vous-même qui fait les délices de notre société, ne fût pas immortelle ?
Quelquefois ils défient l’intelligence la plus pénétrante par la profondeur et la subtilité de leurs spéculations ; ailleurs ils peuvent être lus même par des enfants.
du bonheur de sentir le lien de l’orthodoxie autour de sa gerbe mystique, qui peut se rompre tout à l’heure et s’en aller, comme les épis au vent, à l’erreur, — Mme de Gasparin l’a fait, comme elle s’en croyait le droit, et le Paradis qu’elle a vu, comme Dante a vu le sien, est, autant que celui du Dante, une vision chrétienne ; mais splendide encore plus d’intelligence et de pureté que splendide de sa splendeur même.
II C’est le regret des forces perdues, ramer regret, pour qui aime les choses de l’intelligence, des chefs-d’œuvre qu’un homme pouvait faire et qu’il n’a pas faits.
Ne suppose pas que je fais des efforts d’intelligence pour voir les choses et les hommes à leur place dans le tout ; aucun vraiment.
Il en serait d’elle comme de l’ascète dont les sens et l’intelligence demeurent fermés aux actions qui l’entourent.
« Quand cet être si fort, si fier, si plein de lui-même, si exclusivement préoccupé de ses intérêts dans l’enceinte des cités et parmi la foule de ses semblables, se trouve par hasard jeté au milieu d’une immense nature, qu’il se trouve seul en face de ce ciel sans fin, en face de cet horizon qui s’étend au loin et au-delà duquel il y a d’autres horizons encore, au milieu de ces grandes productions de la nature qui l’écrasent, sinon par leur intelligence, du moins par leur masse ; lorsque, voyant à ses pieds, du haut d’une montagne et sous la lumière des astres, de petits villages se perdre dans de petites forêts, qui se perdent elles-mêmes dans l’étendue de la perspective, il songe que ces villages sont peuplés d’êtres infirmes comme lui, qu’il compare ces êtres et leurs misérables habitations avec la nature qui les environne, cette nature elle-même avec notre monde sur la surface duquel elle n’est qu’un point, et ce monde à son tour avec les mille autres mondes qui flottent dans les airs et auprès desquels il n’est rien : à la vue de ce spectacle, l’homme prend en pitié ses misérables passions toujours contrariées, ses misérables bonheurs qui aboutissent invariablement au dégoût. » Il se demande si la vie est bonne à quelque chose, et ce qu’il est venu faire dans le petit coin où il est perdu.
« J’ai sous le bras, dans mon carquois », dit-il avec sa forme originale, « bien des traits qui parlent aux intelligences, mais qui, pour la foule, ont besoin d’interprètes. — 111 Tends ton arc vers le but, ô mon âme !
Qui me voit et ne se sent pas amoureux, n’aura jamais l’intelligence de l’amour.
dans son théâtre, une très grande place à la satire des travers de l’esprit (Précieuses ridicules, Femmes savantes, etc. ).Il comprenait d’ailleurs que tout se tient, que la rectitude de l’intelligence est ce qui défend le mieux la droiture du cœur. […] Nous avons beau faire, ce que nous aimons si nous voulons « aimer » Dieu, ce sera toujours un beau supplicié ou un vieillard excellent, à qui nous attribuerons toute la bonté et toute l’intelligence que notre expérience nous permet d’imaginer, — mais, naturellement, rien de plus. […] Les drames du grand poète ont été rêvés de nouveau par toutes ces imaginations et repensés par toutes ces intelligences ; et j’ose dire qu’ils ont été singulièrement éclaircis, agrandis et enrichis par elles. […] Une casserole, c’est une fille qui a des intelligences avec la police. […] Deux hommes fréquentent la maison : Charmeretz, homme de lettres de son état, célèbre ou, du moins, connu, et son ami Bernaud, petit employé à deux mille francs, un brave garçon, et d’intelligence vive et délicate.
Ensuite, et ceci fait honneur à son intelligence, on voit qu’il a bien compris que le socialisme n’est pas quelque chose de très sérieux, et que l’anarchisme est la seule affaire importante dans la question. […] Ils ont admiré jusqu’à l’enthousiasme le talent de leur professeur ; mais ils se moquent du kantisme à vingt-cinq ans, avec très peu d’intelligence, mais une très forte conviction négative. […] Les hommes sont des intelligences ; les enfants, les primitifs, les extatiques et les imbéciles sont des âmes. […] Et il nous a donné un résumé de ses lectures sur cette affaire et de ses impressions, qui ne m’a pas paru, entre nous, un parangon d’intelligence critique. […] L’arrangement agréable des personnages et des accessoires y tient la place de la composition : l’idée ingénieuse, de l’idée élevée ; l’esprit, de la gaieté ; l’intelligence, du sentiment et de la passion.
Épris de l’immensité, avide d’en connaître les mystère^ le voilà étudiant les espaces, entassant calculs sur calculs, cherchant les nébuleuses, traversant des profondeurs de sept milliards de lieues avec son intelligence, écrivant et nous laissant ce livre qui suffit et au-delà pour donner idée d’un esprit supérieur et qui s’appelle l’Éternité par les astres. […] Gaudry enregistre les progrès continus dans l’activité, la sensibilité et l’intelligence des êtres. […] Le fameux improbus labor n’y peut rien, et l’un d’eux, Gabriel Morsalines, tombe amoureux fou d’une petite voisine, d’une jeune fille remarquable par sa beauté autant que par son intelligence. […] Le capitaine du génie Paulin-Ruelle, petit-neveu du général, a très bien résumé, dans un avant-propos, la vie de l’auteur de ces Mémoires qui ne nous révèlent pas seulement en ce militaire la bravoure et l’intelligence, mais aussi une âme sensible et délicate, chose rare chez ces hommes habitués à la vie des camps, durs pour les autres comme pour eux-mêmes. […] Ce très intéressant ouvrage contient de curieuses pages sur celui qui devait être Paul Ier et qui, atteint d’un mal étrange, vit s’affaiblir son intelligence et devint en telle suspicion à la haute noblesse qu’elle se débarrassa de lui par un assassinat dont les cruels détails ont été enregistrés par l’histoire.
Redoutable Dieu, qui ne ressemble guère à la calme intelligence qui sert aux philosophes pour expliquer l’ordre des choses, ni à ce Dieu tolérant, sorte de roi constitutionnel que Voltaire atteint au bout d’un raisonnement, que Béranger chante en camarade et qu’il salue « sans lui demander rien. » C’est le juste Juge impeccable et rigide, qui exige de l’homme un compte exact de sa conduite visible et de tous ses sentiments invisibles, qui ne tolère pas un oubli, un abandon, une défaillance, devant qui tout commencement de faiblesse ou de faute est un attentat et une trahison. […] On voit alors se former une littérature nouvelle, élevée et originale, éloquente et mesurée, armée à la fois contre les puritains qui sacrifient à la tyrannie du texte la liberté de l’intelligence, et contre les catholiques qui sacrifient à la tyrannie de la tradition l’indépendance de l’examen, également opposée à la servilité de l’interprétation littérale et à la servilité de l’interprétation imposée. […] Avec une gravité et une simplicité soutenues, il montre aux puritains que les lois de la nature, de la raison et de la société sont, comme la loi de l’Écriture, d’institution divine, que toutes également sont dignes de respect et d’obéissance, qu’il ne faut pas sacrifier la parole intérieure, par laquelle Dieu touche notre intelligence, à la parole extérieure, par laquelle Dieu touche nos sens ; qu’ainsi la constitution civile de l’Église et l’ordonnance visible des cérémonies peuvent être conformes à la volonté de Dieu, même lorsqu’elles ne sont point justifiées par un texte palpable de la Bible, et que l’autorité des magistrats, comme le raisonnement des hommes, ne dépasse pas ses droits en établissant certaines uniformités et certaines disciplines sur lesquelles l’Écriture s’est tue pour laisser décider la raison. « Car si la force naturelle de l’esprit de l’homme peut par l’expérience et l’étude atteindre à une telle maturité, que dans les choses humaines les hommes puissent faire quelque fond sur leur jugement, n’avons-nous pas raison de penser que, même dans les choses divines, le même esprit muni des aides nécessaires, exercé dans l’Écriture avec une diligence égale, et assisté par la grâce du Dieu tout-puissant, pourra acquérir une telle perfection de savoir que les hommes auront une juste cause, toutes les fois qu’une chose appartenant à la foi et à la religion sera mise en doute, pour incliner volontiers leur esprit vers l’opinion que des hommes si graves, si sages, si instruits en ces matières, déclareront la plus solide366 ? […] » Éperdu, « je regardai le ciel, et je fus comme si, avec les yeux de mon intelligence, j’avais aperçu le Seigneur Jésus, me regardant d’un air très-fâché contre moi, et comme s’il m’avait sévèrement menacé de quelque griève punition pour ces pratiques impies et les autres semblables416. » Tout d’un coup, réfléchissant que ses péchés étaient très-grands, et qu’il serait certainement damné quoi qu’il fît, il résolut de se contenter en attendant, et pendant cette vie de pécher tant qu’il pourrait.
Félix Reyssié, avocat à Mâcon, nous a décrit, avec une pieuse exactitude, la maison et le pays natal de son illustre compatriote ; et son heureuse diligence a su rassembler, sur l’enfance et la jeunesse de l’auteur des Méditations, des documents d’une réelle saveur Le noble poète Charles de Pomairols, étudiant l’intelligence et l’art de Lamartine, a défini avec la plus affectueuse pénétration cette âme un peu cousine de la sienne Enfin, M. […] C’est que l’homme est une intelligence et que le fleuve est un élément. […] Si j’insiste, c’est que l’épisode qui a été le plus blâmé par tous les critiques sans exception est justement le plus indispensable à l’intelligence du poème, et comme le nœud de ce merveilleux drame moral. […] L’intelligence en nous, hors de nous la nature, Voilà la voix de Dieu ; le reste est imposture.
Ici comme dans le cas précédent et comme en toute recherche exacte, il faut en premier lieu classer les faits, et considérer chaque classe de faits à part, d’un côté les trois grandes œuvres de l’intelligence humaine, la religion, l’art et la philosophie, de l’autre les deux grandes œuvres de l’association humaine, la famille et l’État, de l’autre enfin les trois grandes œuvres matérielles du labeur humain, l’industrie, le commerce et l’agriculture, et dans chacun de ces groupes généraux les groupes secondaires en lesquels il se subdivise. […] Guizot oublie que le talent le plus efficace est la sympathie, que les grands événements ne sont pas les actions extérieures de l’homme, mais les mouvements intérieurs de l’âme, qu’en psychologie la lucidité c’est l’émotion, que le lecteur n’aperçoit les secousses morales qu’en les éprouvant lui-même, que l’historien doit se faire tour à tour puritain et royaliste pour peindre les puritains et les royalistes, que le cœur, aussi bien que l’intelligence, est un ouvrier de l’histoire, et que, pour représenter la vie humaine, si variée et si complexe, il faut imposer à son talent toutes les allures et tous les tons. […] Étant né de tels parents, il est naturel que tu sois en tout le premier. » Il a puisé aussi dans son noble sang les dons de l’esprit et de l’âme ; ses compagnons disent qu’il est déjà philosophe et poète ; et, pour prendre le mot d’Homère et de Platon, sa mère a engendré un homme heureux : car il a l’intelligence prompte, il n’est point orgueilleux de tant de grands avantages ; sa modestie et sa beauté s’ornent l’une l’autre. […] Bien plus et bien pis, par besoin de nouveauté et par raffinement d’intelligence, nous avons recherché les nuances imperceptibles, les images extraordinaires, les paradoxes de style, les accouplements d’expressions, les tours inattendus ; nous avons voulu être piquants et nouveaux, nous avons écrit pour réveiller la curiosité lassée, nous avons sacrifié le naturel et la justesse pour surmonter l’inattention et chasser l’ennui. — Au temps de Mme de la Fayette, la littérature naissait, et personne ne naît dégoûté et savant. […] Nous y voyons la monarchie absolue amenée et maintenue par la dépopulation, par la ruine de la classe moyenne, par l’avilissement du peuple, par l’abaissement de l’invention, par l’affaissement de l’intelligence, par le débordement du mysticisme, et nous voyons ici la population croissante, la classe moyenne étendue, le bien-être augmenté, la richesse multipliée, l’invention développée, la nation proclamée souveraine, et, à travers dix constitutions successives, exerçant sa souveraineté par l’ascendant de l’opinion.
C’est l’intelligence assaisonnée de prescience : un des plaisirs de Dieu, s’il vous plaît ! […] Quand on a causé quelque peu avec ces petits hommes jaunes aux pommettes saillantes et aux yeux retroussés, on constate sans doute qu’ils ont dans l’esprit, aussi bien que dans le corps et dans les manières, je ne sais quoi de puéril et d’étriqué, qu’ils ont l’intelligence vive et courte et qu’ils ne sont pas très aptes à concevoir les idées générales ; mais cela est aussi le fait de beaucoup d’Occidentaux. […] J’ai beau faire, je ne vois pas très clairement en quoi la virginité de Thouvenin avant le mariage est indispensable pour l’intelligence de son rôle. […] Supposez que ce crime soit commis en vertu de l’affirmation la plus indémontrable et la plus obstinée sur ce qui échappe, par nature, aux prises de l’intelligence humaine, et que cette meurtrière affirmation de l’« inconnaissable » porte d’ailleurs sur des nuances de mots (ce qui en redouble l’effroyable folie) ; et vous aurez tout le rôle de Paolo. […] C’est qu’on croit faire ainsi preuve de clairvoyance ; on se figure sans doute qu’il est plus difficile de voir le mal que le bien, que cela suppose une intelligence plus dégagée, plus sagace et plus forte.
C’est à cette vie errante dans un des plus beaux pays du monde, c’est à cette vie rêveuse et inquiète que Rousseau doit son intelligence et son amour de la nature, et d’avoir inventé, ou peu s’en faut, la poésie romantique. […] D’abord, il n’en sait rien : car l’inégalité des forces musculaires, en un temps où elle ne peut guère être compensée par l’intelligence, pourrait bien être la plus dure de toutes. […] Son rôle mondain impliquait une rapide intelligence des hommes, beaucoup de tact et de souplesse. […] Et, si la matière mue nous montre une volonté, la matière mue selon de certaines lois nous montre une intelligence. […] — Je puis du moins entrevoir ses attributs : intelligence, puissance, justice, bonté.
Les Pyrénées dans le sens propre sont de hautes montagnes qui séparent la France et l’Espagne : il n’y a plus de Pyrénées , c’est-à-dire, plus de séparation, plus de division, plus de guerre : il n’y aura à l’avenir qu’une bone intelligence entre la France et l’Espagne : c’est une métonymie du signe, ou une métalepse : les Pyrénées ne seront plus un signe de séparation. […] Quand on ne traduit que pour faire entendre la pensée d’un auteur, on doit rendre, s’il est possible, figure par figure, sans s’atacher à traduire litéralement ; mais quand il s’agit de doner l’intelligence d’une langue, ce qui est le but des dictionaires, on doit traduire litéralement, afin de faire entendre le sens figuré qui est en usage en cette langue à l’égard d’un certain mot ; autrement c’est tout confondre ; les dictionaires nous diront que aqua signifie le feu, de la même manière qu’ils nous disent que (…) ; car enfin les latins crioient (…), quand le feu avoit pris à la maison, et nous crions alors au feu, c’est-à-dire, acourez au feu pour aider à l’éteindre. […] L’allégorie est un discours, qui est d’abord présenté sous un sens propre, qui paroit toute autre chose que ce qu’on a dessein de faire entendre, et qui cependant ne sert que de comparaison, pour doner l’intelligence d’un autre sens qu’on n’exprime point. […] Mais come je l’ai dèja remarqué, il faut suivre dans le sens allégorique et dans le sens anagogique ce que la révélation nous en aprend ; et s’apliquer surtout à l’intelligence du sens litéral, qui est la règle infaillible de ce que nous devons croire et pratiquer pour être sauvés. […] Une montre nous dit qu’il y a un ouvrier qui l’a faite, l’idée qu’elle fait naitre en moi de cet ouvrier, quelque indéterminée qu’elle soit, n’est point l’idée d’un être abstrait, elle est l’idée d’un être réel qui doit avoir de l’intelligence et de l’adresse : ainsi l’univers nous aprend qu’il y a un créateur qui l’a tiré du néant, qui le conserve, qu’il doit avoir des perfections infinies, et qu’il exige de nous de la reconoissance et des adorations.
XIX M. de Lamennais, crédule comme La Fayette ; chose remarquable, l’un étant tellement homme d’intelligence, et l’autre tellement homme du monde. […] Il y a eu en lui solution de continuité dans la région de l’intelligence ; et c’est par la physiologie, par le tempérament qu’il le faut expliquer. (1836) XXI M. de Lamennais est affecté d’une incontinence de pensée ; tout ce qui lui passe par l’esprit, il le dit aussitôt, il l’écrit : il ne garde rien. […] ce sont des hommes de grande vie que ces princes de l’intelligence, et quand ils sont remuants comme l’était celui-ci, il ne fait pas bon être leur voisin ; ils empiètent à chaque instant sur vous.
Une des raisons qui donnent tant de suffrages à Cinna, c’est qu’il n’y a aucune narration du passé : celle qu’il fait de sa conspiration à Émilie, étant plutôt un ornement qui amuse l’esprit des spectateurs, qu’une instruction nécessaire des particularités qu’ils doivent savoir pour l’intelligence de la suite. […] La musique y fait le charme du merveilleux ; le merveilleux y fait la vraisemblance de la musique ; on est dans un monde nouveau ; c’est la nature dans l’enchantement, et visiblement animée par une foule d’intelligences dont les volontés sont des lois. […] Il ne doit pas être exécuté en mesure exacte ; il faut qu’il soit abandonné à l’intelligence et à la chaleur de l’acteur, qui doit se hâter ou se ralentir, suivant l’esprit de son rôle ou de son jeu.
Il était temps que les affaires et le monde revinssent occuper cette vive et brillante intelligence.
Sans doute les grands génies dont s’honore l’intelligence humaine ont subi cette épreuve, et l’une de leurs gloires est d’y avoir résisté ; mais les Sonnets de La Boétie ne le classeront pas avec Pindare, Anacréon, Horace… J’accorde qu’il ne perdra pas à être envisagé de près ; mais je crois qu’il gagnerait à être entrevu à distance.
Ceux-ci, en effet, gens économes par nature, sont payés pour croire qu’on court après l’esprit quand on en a plus qu’eux : « Messieurs, lisez-moi, semblent-ils dire ; vous verrez un homme qui pense simplement, raisonnablement, qui va son grand chemin, qui ne pétille point : et voilà le bon esprit. » Selon Marivaux plaidant dans sa propre cause, « il y a un certain degré d’esprit et de lumières au-delà duquel vous n’êtes plus senti ; c’est même un désavantage qu’une si grande finesse de vue, car ce que vous en avez de plus que les autres se répand toujours sur tout ce que vous faites, embarrasse leur intelligence » ; on vous accuse d’être obscur par trop de subtilité ; et il conclut avec découragement, et en ayant l’air de consentir, par égard pour les lecteurs vulgaires, à ne plus être sagace qu’à demi : « Peignez la nature à un certain point, mais abstenez-vous de la saisir dans ce qu’elle a de trop caché ; sinon vous paraîtrez aller plus loin qu’elle, ou la manquer. » Tels étaient les ingénieux sophismes que le désir de se justifier suggérait à Marivaux, et sur lesquels il revient en vingt endroits.
Joignant à cela une grande application, qui amène nécessairement quelque intelligence, il est impossible qu’on ne soit pas recherché de degrés en degrés pour les premiers emplois, car on a besoin de vous.
Cette leçon, donnée par une autorité que personne ne pouvait contester, était parfaitement appropriée à notre intelligence militaire.
Trois personnages donc, trois députés marquèrent dès les premiers jours leur rang comme orateurs et comme chefs de la minorité dans cette Chambre de 1815, et chacun selon sa mesure et suivant son pas, ils marchèrent constamment d’intelligence et de concert : nous nous plairons aujourd’hui à les considérer, n’en déplaise aux mauvais restes vénéneux des passions de ce temps-là et à ces esprits louches que le regard de l’histoire offense42.
En égard à son âge de dix-sept ans75, il s’entend très-bien aux choses du monde, et quoique les Espagnols, qui ont coutume d’exagérer leurs faits et de s’émerveiller de tout, exaltent quelques questions qu’il adresse indistinctement à tous ceux qui l’approchent, d’autres, avec plus de fondement peut-être, tirent de l’inopportunité de ces questions un argument peu favorable a son intelligence. » Voilà la triste vérité que notre bon compagnon et compatriote Brantôme vient confirmer et relever de sa manière gaillarde et piquante, ne fut-ce que par ce seul petit trait : « Moi, étant en Espagne, il me fut fait un conte de lui, que son cordonnier lui ayant fait une paire de bottes très mal faites, il les fit mettre en petites pièces et fricasser comme tripes de bœuf, et les lui fit manger toutes devant lui, en sa chambre, de cette façon. » Quand un prince de dix-neuf ans en est là, il me semble qu’il est jugé à jamais et que son avenir est écrit plus clairement que dans les astres.
et à quatre-vingts ans elle a vu l’onde de l’Achéron, l’ouvrière Platthis qui avait fait de si beaux tissus et si bien. » Heureux, dans toutes les professions qui demandent l’intelligence et qui n’excluent pas l’agrément, celui qui peut, au terme de sa carrière, se rendre ce témoignage, comme on l’a dit de la bonne Platthis, qu’il a accompli et « parcouru en compagnie des Grâces le stade de Minerve !
Viollet-Le-Duc, un des plus curieux pour l’étude et l’intelligence entière du Moyen-Âge, le Dictionnaire raisonné du Mobilier français durant cette époque ; c’est le complément naturel et tout agréable de son grand Dictionnaire de l’Architecture française dans les mêmes siècles.
Ses talents, son intelligence, sa spécialité de courage et d’habileté, on venait de les voir à l’œuvre par un de ces soleils qui ne laissent rien dans l’ombre, et la suite des épreuves, même en des circonstances moins heureuses, ne fera que les confirmer.
Il avait tout à craindre des jacobins, s’ils le devinaient ; je ne devais pas me montrer en intelligence avec lui, en supposant même qu’il me fît des avances : et il m’en fit.
On sent à quelques éclairs lumineux combien il n’a manqué à cette exquise intelligence qu’un peu de recueillement et d’étude pour tout entendre des arts, de la littérature proprement dite, de tout ce qui constitue une culture accomplie.
Dans sa Réponse à quelques objections, il indique assez, d’ailleurs, qu’il ne pense point que les esprits des Modernes soient de moindre essence et qualité que ceux des Anciens ; son intelligence courageuse répugne à l’idée d’abâtardissement et de décadence.
Et telle que je la conçois, la critique, dans sa diversion et son ambition de curiosité, dans sa naïveté d’impressions successives et légitimes, dans son intelligence ouverte aux contrastes, je consentirais qu’on lui pût dire, comme à cet abbé du dix-huitième siècle, mais sans injure : Déjeunant de l’autel et soupant du théâtre.
Cette intelligence secrète et sentie que n’ont pas eue tant d’estimables historiens, pourtant réputés à bon droit critiques, ce don, cet art particulier dont la sobre magie se dissimule à chaque pas, qui ne convertit pas tout en or, mais qui rend à tout ce qu’il touche la qualité propre et la vraie valeur, tient de très-près à l’esprit poétique, modéré et corrigé comme je l’entends.
Eynard a très-bien résumé ces premières phases du développement de Mme de Krüdner, quand il dit : « Encore enfant, à Millau, elle ne cherchait que l’amusement ; à Venise, son cœur parle ; à Copenhague, sa vanité s’éveille ; mais c’est à Paris que son intelligence semble réclamer ses droits. » A peine y est-elle arrivée en effet, que Mme de Krüdner recherche les savants et les gens de lettres en renom, l’abbé Barthélémy, Bernardin de Saint-Pierre.
Jusque-là Boileau composait avec les idées de sa mémoire ; il assemblait sans conviction des abstractions conçues par son intelligence sur la foi de ses livres ; maintenant il obéit à sa passion intime : il travaille sur les matériaux de sa propre expérience.
Par là, si inférieur qu’il soit à Hérodote en intelligence, en réflexion, en sens esthétique, ce chevalier inhabile à penser a dans son récit enfantin des impressions d’une fraîcheur, d’une vivacité qui font penser au premier des historiens grecs.
Il a peint des femmes toujours viriles, parce que toujours elles agissent par volonté, par intelligence, plutôt que par instinct ou par sentiment.
Chez les peuples primitifs, toutes les oeuvres merveilleuses de l’intelligence sont rapportées à la Divinité ; les sages se croient inspirés et se vantent avec une pleine conviction de relations mystérieuses avec des êtres supérieurs.
L’espace manquait dans son modeste appartement pour ces hôtes nouveaux ; les plus petits enfants furent pendant quelque temps couchés dans son propre lit ; puis, par des prodiges d’intelligence et d’activité, elle réussit à constituer cet étonnant établissement qui renferme aujourd’hui soixante Alsaciennes ou Lorraines âgées de dix-huit mois à dix-huit ans.
Ils concevaient comme supérieure au mariage, attachant de force l’un à l’autre deux êtres humains qui peuvent en être venus à se haïr ou à se mépriser, une union ne reposant que sur l’amour, pouvant se nouer et se dénouer sans l’intervention de l’autorité sociale, et ils voulaient acheminer les intelligences paresseuses vers cet idéal encore lointain.
Mais si leur angoisse consterne son intelligence, elle n’abat pas sa conscience.
Son intelligence, tirée à quatre épingles, ne fait pas un pli.
Il est enchanté et ravi de voir un si grand individu que Beethoven venir augmenter sa collection et sa connaissance : « J’ai eu bien du plaisir, dit-il, à voir se refléter en moi cette image d’un génie original. » Ce grand miroir de l’intelligence de Goethe tressaille involontairement, quand un nouvel objet digne de lui s’y réfléchit.
Notre théâtre est devenu non seulement le témoignage éclatant de tout le dévergondage et de toute la démence auxquels l’esprit humain peut se livrer quand il est abandonné sans aucun frein, mais il est devenu encore une école de débauche, une école de crimes, et une école qui fait des disciples que l’on revoit ensuite sur les bancs des cours d’assises attester par leur langage, après l’avoir prouvé par leurs actions, et la profonde dégradation de leur intelligence et la profonde dépravation de leurs âmes.
Les deux contemporains avec qui il était le plus en intimité, le plus en rapport de cœur et d’intelligence, Grimm et Diderot l’ont jugé tout à fait avec admiration, avec enthousiasme, et ils parlent de lui comme d’un vrai génie.
Cette intelligence vaste, féconde et puissante, revêtue d’une si admirable et si soudaine faculté de mise en œuvre par la parole, lui échappait, et il ne voulait voir que l’apparence, le jeu, le coup de théâtre, l’appareil sonore, sans rendre justice à l’âme réelle qui unissait, qui inspirait et passionnait tout cela.
Celle-ci se décidait enfin à recourir aux conseils de Mirabeau, et c’était par M. de La Marck qu’elle voulait nouer et entretenir l’intelligence.
Les conseils que Mme de Lambert donne à sa fille sont remarquables surtout par une extrême intelligence de tous les côtés tendres et vulnérables du sexe, et par une crainte extrême qui lui fait appeler à son aide toutes les précautions et toutes les ressources.
Cette intelligence profonde de Bourdaloue me semble le chef-d’œuvre critique de Maury.
Marmontel, dans les livres suivants, continue d’exposer les faits avec lucidité et de peindre les personnages politiques avec intelligence et mouvement ; mais ce n’est plus le père qui parle à ses enfants, c’est l’historiographe de France qui remplit sa charge et ses derniers devoirs envers Louis XVI.
Je fais comme Rollin, et, en présence de cette éloquente et vraiment belle page si peu connue, je ne me lasse point de copier : Déjà, continue-t-il, ils nous révèlent, malgré eux, toute la tristesse de cette indépendance que l’orgueil avait proclamée au nom de leur bonheur, et rendent témoignage à la sagesse d’une éducation si bien assortie aux besoins de l’homme, qui préparait à l’accomplissement des devoirs par de bonnes habitudes, hâtait le développement de l’intelligence sans le devancer, et retenait chaque âge dans les goûts qui lui sont propres.
Cosnac, par son intelligence et sa capacité, était donc tout à fait digne de servir directement ce sage et prudent maître, ce monarque de son siècle, et non plus ces cadets chétifs et avortés, qui se consumaient dans les corruptions et les vaines intrigues.
Il apportait à Paris les romances tendres, tristes et vagues que l’on chante de la Forêt Noire aux Alpes Tyroliennes ; il prit en France la souplesse et la prestesse d’intelligence, la grâce, la mesure et l’esprit que Beaumarchais a légués à ses petits-fils du boulevard.
La capacité ou l’incapacité d’un sujet rare par son intelligence ou par sa stupidité décide la sorte d’instruction forte ou faible qui lui convient.
Nous assistons à une apothéose du cerveau, de l’intelligence qui crée et produit pousse et fructifie, d’où jaillit, incendiaire et constructeur, l’élan vital.
Le style serré, quand il n’est d’ailleurs ni décousu ni obscur, a le premier de tous les mérites, celui de rendre le discours semblable à la marche de l’esprit, et à cette opération rapide par laquelle des intelligences se communiqueraient leurs idées.
Dans ces Études de critique littéraire, à propos de l’autorité, des deux morales, et particulièrement de l’aumône, vous sentez à quel point le Christianisme, compris avec cette intelligence de sa vérité la plus profonde et de ses beautés les plus secrètes, a pénétré la pensée de ce critique dont l’esprit, hier, pour vous et pour moi, paraissait rigoureux parce que la conscience était irréprochable, mais dont la politesse exquise, trouvée aujourd’hui dans ses livres, est peut-être de la charité !
Rien ne peut remplacer l’audace et la franchise de vivre : aucune vertu ni aucun vice, aucune patience ni aucune finesse, aucune intelligence ni aucune délicatesse ne peuvent valoir le clair et libre accomplissement d’un acte naturel et libre, pas même l’art prodigieusement esthétique et raffiné auquel peut parvenir l’égotisme dans tous les mondes, et spécialement — selon l’intention de cet article — dans une partie de la jeunesse littéraire moderne.
Senancour, je le dis nettement, me semble un roi de l’intelligence : mais il a peu de musique, et celle qu’il a est sourde. […] C’est un état intermédiaire, non pas peut-être créé, mais perfectionné par l’intelligence humaine. […] Et peu à peu il goûte la sociabilité française, « ce commerce charmant, facile et rapide des intelligences, cette absence de toute morgue et de tout préjugé ». […] Assurément, ce noble esprit, si supérieur à l’intelligence des Hugo, des Michelet et des autres romantiques, ne se figurait pas le nouveau régime sans quelque horreur. […] C’est par là (et par les occasions), non par l’intelligence, qu’un Talleyrand a pu l’emporter, comme diplomate, sur l’auteur d’Atala.
Je ne demande point au poète comique une morale positive ; je ne lui demande même pas de s’interdire la représentation de la ruse, du mensonge, de l’égoïsme, des mauvaises passions, de 1 immoralité en un mot ; la comédie ferait mieux de ne rien peindre de pire que des ridicules, mais il lui est permis de produire sur la scène le vice lui-même, pourvu que le poète ait une assez grande intelligence de son art et assez de tact moral pour empêcher que ma conscience ne vienne élever sa voix au milieu de la fête qu’il donne à mon esprit. […] des demi-coquins, qui, sans immoralité scandaleuse, font servir leur intelligence à satisfaire l’instinct animal.
Hugo n’eut rien d’un penseur, et c’est précisément ce que nous lui reprocherons, si nous considérons la littérature comme l’expression tout autant d’une intelligence que d’une sensibilité, si tout poète, pour être grand, nous semble devoir se doubler d’un philosophe. […] Ce principe explique une prédilection pour Baudelaire, beaucoup plus capable de s’adapter à des tempéraments très divers par son intelligence précise des idées, des sensations et des mots.
… N’est-il pas temps, au moins, d’examiner, d’un œil moins idolâtre que les beaux yeux de madame de Staël, le génie de l’Allemagne, ses travaux, sa place, enfin, dans le monde de l’intelligence ? […] Mais enfin Werther, malgré sa facile composition à bâtons rompus, est un livre qu’on peut ouvrir encore avec un intérêt d’intelligence et peut-être une émotion de sensibilité, tandis que le Wilhelm Meister et les Affinités électives ne sont pas des livres, même mauvais, mais des choses sans nom, inénarrables, illisibles, — et à aucun degré quelconque des compositions.
Le caractère prêtre est fait pour la solitude ; les ménagements, les abandons et les grâces, l’agrément et la douceur nécessaires à toute société lui font défaut ; on l’admire, mais on le plante là, surtout quand on est comme la femme de Milton un peu bornée et vulgaire442, et que la médiocrité de l’intelligence vient s’ajouter aux répugnances du cœur. « Il avait, disent les biographes, une certaine gravité de nature…, une sévérité d’esprit qui ne condescendait point aux petites choses », et le maintenait dans les hauteurs, dans une région qui n’est pas celle du ménage. […] Bien plus, ils conservent comme dans une fiole l’efficacité et l’essence la plus pure de cette vivante intelligence qui les a engendrés. […] Par sa force d’intelligence, il est plus capable que personne d’entasser la science ; par sa force d’enthousiasme, il est capable plus que personne de sentir la haine.
Nos mains sont un peu plus adroites que les siennes, grâce à des circonstances particulières, mais son intelligence était fort supérieure à la nôtre. » Ce mot de Vauban vaut mieux que toutes les discussions ; et je le livre aux réflexions du lecteur. […] On l’avoue naïvement : c’est que l’infériorité des historiens modernes serait contradictoire avec la progression de l’intelligence humaine . […] Mais comment y parviendra-t-il sans l’intervention des intelligences célestes et amies de la nature humaine ? […] sans doute ces instructions, puisées à la source du vrai et du beau, sont dignes d’avoir pour interprète Minerve même, c’est-à-dire l’intelligence qui gouverne l’univers.
Je suis frappé, en lisant les lettres du paysagiste Théodore Rousseau, du côté sophiste, rhéteur, du côté alambiqué, qu’il y a dans toutes les grandes intelligences du dessin et de la peinture, à commencer par Gavarni, à finir par Rousseau. […] C’est la supériorité du Prussien dans ce moment. » Renan, relevant la tête de son assiette : « Dans toutes les choses que j’ai étudiées, j’ai toujours été frappé de la supériorité de l’intelligence et du travail allemand. […] Samedi 15 octobre À vivre sur soi-même, à n’avoir que l’échange d’idées, aussi peu diverses que les vôtres autour d’une pensée fixe ; à ne lire que les nouvelles, sans inattendu, d’une guerre misérable, à ne trouver dans les journaux que le rabâchage de ces défaites, décorées du nom de reconnaissances offensives ; à être chassé du boulevard par l’économie forcée du gaz ; à ne plus jouir de la vie nocturne, dans cette ville de couche-tôt ; à ne plus pouvoir lire ; à ne plus pouvoir s’élever dans le pur domaine de la pensée, par le rabaissement de cette pensée aux misères de la nourriture ; à être privé de tout ce qui était la récréation de l’intelligence du Parisien ; à manquer du nouveau et du renouveau ; à végéter enfin dans cette chose brutale et monotone : la guerre, — le Parisien est pris dans Paris, d’un ennui semblable à l’ennui d’une ville de province. […] Tout le monde de rire, et ceux qui connaissent la personne du gouverneur de Paris, de le peindre, comme une petite intelligence, appartenant aux idées étroites du militarisme, fermée à toute invention qui vient à se produire, à toute idée nouvelle, apportant aussi bien son veto à une chose sérieuse qu’à une chose chimérique.
Aucun de ceux qui travaillent à resserrer les relations intellectuelles entre les États-Unis et la France n’ignore la double contribution qu’elle apporte à cette grande tâche : celle de son intelligence et celle de son cœur. […] Il arrive à l’inconnu ; et quand, affolé, il finirait par perdre l’intelligence de ses visions, il les a vues ! […] Il faut donc supposer « une autre attraction », et « quelque principe d’intelligence, quelque chose de semblable à ce que nous appelons désir, aversion, mémoire » (Par. […] Mais Diderot suivra-t-il Maupertuis dans la démarche que nous avons signalée, et qui consiste à restituer à l’atome matériel quelque principe d’intelligence, quelque chose de semblable à ce que l’on appelle désir, aversion, mémoire ?
On passe, il est vrai, sa vie à la cour, oui, mais on est compté à peine comme un homme ; on coudoie, en rougissant, ces grands seigneurs dont on est à peine le jouet d’une heure ; absolument il faut amuser ces esprits qui s’ennuient, il faut plaire à ces intelligences parfois très lentes ; plus d’une fois il faut appeler la farce à son aide, et devenir un bouffon, quand on se sent un philosophe. […] En ce moment déjà, il comprenait qu’il serait le maître absolu des esprits et des intelligences de son temps. […] Toujours est-il que l’esprit, l’intelligence, l’étude des modèles, ne suffisent pas à faire un comédien. […] Il a publié une bonne édition des Œuvres de Marivaux, avec des notes et des commentaires, où se rencontre, au plus haut degré, le calme bon sens et l’intelligence du critique.
La malheureuse mère, en proie à une douleur haletante et sèche qui ne peut pas pleurer, m’a montré, pour la deuxième fois, aux mêmes places, les tableaux et les livres ; elle m’a parlé longuement de la pauvre morte, m’a révélé les trésors de bonté de ce cœur que n’avait point étouffé l’intelligence. […] on prend une créature qui est attachée à ses maîtres, qui a parfois une intelligence bien supérieure à celle de certains bipèdes, mais qui n’est pas en état de se défendre, voilà le sublime de la petitesse et de la méchanceté. […] Ce que vous me dites des cinquante ouvriers travaillant, cet emploi exagéré des bras, n’est-ce pas une de ces manœuvres d’abrutissement populaire, dont le régime à jamais exécrable des Césars s’est servi pour annihiler les intelligences ouvrières ? […] À vous de trouver le bon moyen, vous êtes le gouvernement, vous êtes nos intelligences.
Un des chapitres auxquelles l’intelligence et la nature canine se montrent plus volontiers rétives, est celui qui concerne l’observation de certaines convenances qu’on pourrait appeler digestives. […] Quel plaisir pouvait-on prendre à mâcher une plante amère, endormant les facultés de l’intelligence ? […] Le Jérémie est un fruit sec littéraire, et, le plus ordiremont, — il greffe sur l’impuissance, cette maladie honteuse de l’intelligence qu’on appelle l’envie. […] — Le public, encouragé quelquefois par la critique, a tenté de se soustraire à cette domination évidente : il se brouillait avec son actrice ; — mais elle demeurait toujours la favorite et, à chacun de leurs raccommodements, l’art gagnait une de ces belles fêtes comme on en voyait souvent à ces heureuses époques, où les sereines distractions de l’intelligence étaient plutôt un besoin véritable qu’une affaire de mode. — Si on recherche quelle a été l’influence de mademoiselle Rachel sur le mouvement dramatique de son époque, il y aura peu de chose à dire qui puisse ajouter à sa gloire. — Elle a restauré passagèrement la tragédie française : rien de plus. […] L’habent sua fata, que les anciens appliquaient aux livres, peut s’appliquer encore plus justement aux ouvrages dramatiques. — Le caprice du public faisant du théâtre le terrain le plus mouvant où puissent s’aventurer les inventions de l’intelligence, en donnant le Mariage d’Olympe, M.
François Porche, je revoyais le Valéry de nos années de jeunesse, le Valéry d’il y a trente ans bientôt, nouvellement arrivé à Paris, dont les premiers vers, parus dans la Conque, nous ravissaient, et qui, futur auteur de Charmes, nous charmait déjà par la merveilleuse vivacité et par la riche étendue de son esprit, par la souple universalité de son intelligence, par la brillante verve de sa causerie. […] Flaubert, à peine acquitté du procès similaire fait à Madame Bovary, Sainte-Beuve, esprit très libre quand les rancunes personnelles ne faussaient pas sa vaste et minutieuse intelligence, le soutinrent de la leur, celle de Théophile Gautier lui était acquise. […] Il est certain que Baudelaire s’apprit beaucoup dans Poe en y découvrant et en y retrouvant des parties de lui-même ignorées ou préférées, des affinités de sensibilité et d’intelligence, maintes vues identiques sur la nature et l’art, un même goût du mystère et de la mystification, la même croyance, en poésie, à un élément de solennité et de bizarrerie, à une sorte de mathématique de l’inspiration. […] On pourra donc, en quelque sorte, tenir Sainte-Beuve et Gautier pour les parrains littéraires de Baudelaire, mais aucun des deux, quelle que fût leur haute intelligence critique, ne comprit complètement la portée profonde de l’œuvre baudelairienne. […] N’est-il pas avéré que l’esprit classique donne le pas à l’intelligence et à la raison sur l’imagination et la sensibilité, à la discipline sur l’inspiration, à l’ordre et à la mesure sur l’abondance et l’exaltation, au général sur le particulier, à la pensée sur le sentiment ?
La plus jeune, une fillette de dix-sept à dix-huit ans, avait le nez friand, du vice et de l’intelligence de Paris sur un minois futé, des bottines qui reniflaient l’eau, une tenue de petite rouleuse du Quartier latin, une voix éraillée, une conversation agrémentée de termes médicaux. […] Peut-être cessa-t-il d’y croire, peut-être cet illuminé devint-il sceptique ; son intelligence ne pouvait survivre à une telle transformation. […] Les peuples ont leur enfance comme les hommes ; certes nous mentons en menaçant notre enfant de croquemitaine et du loup, mais on l’a subitement impressionné, empêché de se blesser, de se brûler, jusqu’au temps où l’on pourra s’adresser à sa raison et à son intelligence. […] À présent, pour l’intelligence de ce qui va suivre, il faut savoir : 1º que le comte Alexis de Saint-Priest, très spirituel, auteur d’une remarquable Histoire de la conquête de Naples par Charles d’Anjou, visait à l’Académie et prétendait y arriver ayant l’éminent poète ; — voyez le néant des ambitions humaines ! […] La mémoire est obligée de travailler seule, patiemment, pendant cinq minutes, pour retenir machinalement les mots comme une leçon qu’on lui impose, jusqu’au moment où, à la fin de la période, le sens se dégage, l’intelligence perd son élan et l’énigme est résolue.
J’avoue que je ne les crois nullement nécessaires à l’intelligence du roman et que l’auteur eût pu se contenter de dire que Saccard et Mme Sandorff trompaient M. […] Notre admiration pour les pays du Nord, que ce soit l’Angleterre, l’Allemagne, la Hollande, est tout autre que celle que nous ressentons pour les beautés de l’Italie ; pour ceux-là il nous faut comme un peu plus de réflexion, d’érudition, un effort d’attention ; qu’il s’agisse de la nature ou de l’art, nous avons besoin d’être initiés ; tandis que, dès que nous sommes sur la terré italienne, les mots, comme les idées, l’intelligence des choses, nous viennent spontanément. […] Et l’esprit lui dépeint tous les dieux inventés par l’homme ; entre autres je citerai ces vers charmants à propos du prétendu Dieu des bonnes gens, inventé et popularisé par le très accommodant Béranger : Est-ce Dieu qui veut la chanson pour prière, Qu’on invoque en trinquant, Dieu bon vivant, qui rit, Comprend, sait que la chair est faible, a de l’esprit ; Dieu point fâcheux, qui vit en bonne intelligence Avec les passions de votre pauvre engeance, Excusant le péché, l’expliquant au besoin, Clignant de l’œil avec le diable dans un coin, Flânant, regardant l’homme en sa fainéantise, Mais jamais du côté qui fait une sottise, Et pas très sûr au fond lui-même d’exister ? […] Demain, cette nuit peut-être, ce sera vous plein de santé, vous orgueilleux de vos forces, vous si fier de votre intelligence, vous dont la jeunesse est imprégnée de joie, ce sera vous que tranchera l’inexorable faux. […] Arrivent les premières années de Louis-Philippe, son éducation par Mme de Genlis, les marques de sa précoce intelligence et de sa bonté de cœur ; puis ce sont les événements de Varennes pendant lesquels il sauve de la mort, par son énergie, deux prêtres que la populace voulait égorger ; belle action qui lui vaut une couronne civique ; cette couronne est maintenant au château d’Eu, dans la salle d’études des jeunes princes.
Et l’illustre auteur de l’Intelligence ajoutait : « Un flux et un faisceau de sensations et d’impulsions qui, vus par une autre face, sont aussi un flux et un faisceau de vibrations nerveuses, voilà l’esprit. […] Teodor de Wyzewa, rapide et polyglotte, aventurait dans tous les pays sa souple et subtile intelligence. […] Après les généralisations hâtives, brillantes et inutiles de l’école de Raynouard, de Fauriel, d’Ampère et de Villemain, alors que l’intelligence du moyen âge était compromise par l’à-peu-près et le clinquant romantiques, il fallait que cette réaction érudite se produisit. […] Il serait trop long d’énumérer tous les Français dont l’intelligence et le goût furent éveillés par ses doctes et spirituelles leçons.
Et, par exemple, lui qui savait si bien le latin et qui avait une des plus belles bibliothèques de particulier, il avait peu étudié le grec, et des oracles qu’il citait sans cesse, il y avait une bonne moitié qu’il ne prenait pas directement à leur source : J’ai grand regret, écrivait-il à Spon, de n’avoir exactement appris la langue grecque tandis que j’étais jeune et que j’en avais le loisir ; cela me donnerait grande intelligence des textes d’Hippocrate et de Galien, lesquels seuls j’aimerais mieux entendre que savoir toute la chimie des Allemands, ou bien la théologie sophistique des Jésuites… Pour bien juger Gui Patin, il le faut voir en son cadre, en sa maison, dans son étude ou cabinet, et, par exemple, le jour enfin où, ayant été nommé doyen de la Faculté (honneur pour lequel il avait déjà été porté plus d’une fois, mais sans que le sort amenât son nom), il traite ses collègues dans un festin de bienvenue (1er décembre 1650) : Trente-six de mes collègues firent grande chère : je ne vis jamais tant rire et tant boire pour des gens sérieux, et même de nos anciens.
Quand on l’aurait présenté comme le narrateur le plus varié et le plus piquant des entreprises d’armes et de toutes les chevaleries d’alors, il y aurait à se garder encore de le trop circonscrire et de lui refuser l’intelligence du reste ; car, s’il entend par excellence le fait des chevaliers et gentilshommes, il a montré dans ses récits des affaires et des troubles de Flandre qu’il n’entendait pas moins bien le tribun du peuple, le factieux de la bourgeoisie et de la commune, le chef des chaperons blancs, c’est-à-dire des bonnets rouges de ce temps-là.
Avec tous les défauts de sa manière, Fontenelle est un grand esprit, une haute intelligence.
Ce spectacle même, à s’en donner un moment la vue, est consolant et beau : sur le trône la bonté dans sa magnanimité ou dans sa grâce ; sur les marches du trône et dans les plus hauts rangs de la société, intelligence, générosité, discernement et activité pour le bien, pour l’allégeance des misères ; à tous les degrés de l’échelle, des associations utiles et secourables : et malgré tout il y a des problèmes insolubles ou non résolus encore, des intérêts rivaux qui semblent ennemis, qui sont certainement contraires et qu’il n’est pas donné aux meilleures intentions, aux résolutions les plus louables, d’accommoder ni de trancher.
C’est un brave enfant, et une intelligence très distinguée.
Monnard, « l’opinion de ce prince s’était fortifiée encore dans des entretiens avec un Vaudois, toujours patriote loin de sa patrie, son aide de camp, le baron de Jomini dont il appréciait non seulement le génie militaire, mais aussi la haute intelligence politique et le franc-parler. » — Nous avons eu, de ce franc-parler, assez de preuves en toute rencontre pour n’en pas douter.
Véritable précurseur, il invoque un historien qui sache parler guerre, administration, politique, et qui ait, comme on l’a dit, l’intelligence.
Béranger appréciait surtout chez le vétéran d’Arcole l’intelligence ferme et lucide, les sentiments chauds et droits sans rien de factice, la vie naturelle ; l’homme du peuple au complet, dans une organisation perfectionnée.
Au milieu de toutes ces merveilles qu’il gaspille, de ces trésors qu’il dissipe en fumée, Balthazar Claës, qui croit se mettre au courant de la science moderne en poursuivant le but mystérieux des Nicolas Flamel et des Arnauld de Villeneuve, est proclamé à tout instant homme de génie, et ses actes déréglés ou même cruels envers sa famille nous sont donnés comme la conséquence inévitable d’une intelligence supérieure en désaccord avec ce qui l’entoure.
que je vous aie jamais parlé ni écrit à Charleville ; car, s’il en savait quelque chose, cela nous mettroit en mauvaise intelligence, et feroit cesser celle que vous savez.
Que si maintenant, à la hauteur relative où telle famille d’esprits peut s’élever dans l’intelligence d’un poëme, il ne se rencontre pas une qualité correspondante qui soit comme une pierre où mettre le pied, comme une plate-forme d’où l’on contemple tout le paysage, s’il y a là un roc à pic, un torrent, un abîme, qu’adviendra-t-il alors ?
Il m’est arrivé plus d’une lois, messieurs, en assistant à certaines de vos discussions, de former un regret et un vœu : ce vœu, ce serait de voir plus souvent dans cette enceinte un prince si remarquable par les dons de l’intelligence, si riche de connaissances qu’il accroît de jour en jour, d’un esprit vraiment démocratique, doué d’éloquence, d’une capacité multiple et prompte que tous ceux qui ont eu l’honneur de l’approcher admirent, et qui, pour tout dire d’un mot, est digne de sa race.
Et à cause de cela beaucoup de choses, sans échapper à son intelligence, restent en dehors de ses sympathies, quelque effort qu’il fasse d’ailleurs pour les aimer.
Trop peu confiant dans l’intelligence ou l’imagination de son lecteur, il veut tout lui expliquer ; il se commente lui-même, et le moindre risque qu’il court, c’est de nous rendre, pour ainsi dire, témoins du travail de sa composition, au lieu de nous en présenter le résultat.
Ils ne sont pas ceux que l’on aime ou que l’on admire : ils suscitent à la fois l’élan vierge du cœur avec l’assentiment de la hautaine intelligence dont ils agenouillent le respect. — Or nous tous, voyageurs qui gravissons l’âpre montagne, si quelque fierté d’âme convie notre faiblesse à ne point nous trahir, nous ne pourrons nous arrêter à l’aube par crainte des brûlants midis torrentiels.
La même intelligence des besoins du lecteur a inspiré le chapitre des Anecdotes et particularités et le chapitre des Lettres et arts.
En revanche, il y aura toujours une place d’honneur pour la belle et poétique intelligence qui s’inspira, au commencement de ce siècle, de tout ce qui voulait revivre du passé, de tout ce qui commençait à vivre de l’avenir.
Aux préventions romantiques dont elle avait hérité à l’endroit de la femme fatale, s’ajoutait l’influence de Schopenhauer, qu’elle venait de découvrir, et qui déniait à la femme toute vertu d’intelligence et de beauté.
Tout homme a droit à la vraie religion, à ce qui fait l’homme parfait ; c’est-à-dire que tout homme doit trouver dans la société où il naît les moyens d’atteindre la perfection de sa nature, suivant la formule du temps ; en d’autres termes, tout homme doit trouver dans la société, en ce qui concerne l’intelligence, ce que la mère lui fournit en ce qui concerne le corps, le lait, l’aliment primordial, le fond premier qu’il ne peut se procurer lui-même.
À ce prix, nul ne serait heureux, ou celui-là seul le serait dont l’intelligence bornée ne pourrait s’élever à la conception du problème et du doute.
Cette théorie, qui transporte de l’intelligence à la sensibilité la direction de la vie, qui propose comme guides les mouvements du cœur, tout le xviiie siècle l’adopte et l’applique.
Depuis que ces hautes Intelligences s’appliquent à éclairer les hommes, elles ne leur montrent la vérité, qu’en leur faisant tirer des conséquences presque toujours aussi justes que celle que je viens d’indiquer.
Seroit-ce enfin cette supériorité d’intelligence, qui ne veut rien voir au dessus d’elle, qui soumet tout à ses recherches, qui dégrade ce qu’elle ne peut concevoir, & qui finit par ne rien admettre, parce que tout devient problématique à son tribunal ?
Après six ans de jeunes inouïs, de macérations affreuses, de méditations à faire éclater le crâne, après s’être assis, les jambes croisées, contre un arbre, en s’écriant : « Qu’ici mon corps se dessèche, que ma peau, ma chair et mes os se dissolvent, si, avant d’avoir obtenu l’intelligence suprême, je soulève mon corps de cette herbe où je l’assieds », Sidhârta se redresse un matin, en frappant d’une main la terre que sa parole va conquérir.
L’intelligence établie entre la marquise et lui n’avait pas échappé au commandant Saint-Mauris, qui avait hâte de ressaisir et de confiner celui qu’il avait trop laissé s’émanciper.
Maintenant très original dans sa façon de s’exprimer, il l’est assez peu dans sa façon de penser, n’ayant une impression de la beauté et du caractère des choses, que lorsqu’il en est averti par un livre bon ou mauvais, croyant, à la façon d’une intelligence inférieure, à l’imprimé, et par cette servitude assez soumis dans le fond à l’opinion générale.
Guizot au Père Lacordaire, les preuves vivantes et les heureux témoins du sublime progrès qui s’est accompli parmi nous dans l’intelligence et le respect de la justice, de la conscience, des droits, des lois divines, si longtemps méconnues, qui règlent les devoirs mutuels des hommes, quand il s’agit de Dieu et de la foi en Dieu.
Une musique qui ne serait formée presque entièrement que de simples blanches ou de simples noires, serait certainement plus monotone, et par conséquent moins agréable, que si dans cette même musique, sans y rien changer d’ailleurs, on entremêlait avec intelligence et avec goût les noires et les blanches, et s’il résultait de là une mesure plus vive, plus marquée, et plus variée dans ses parties.
Après la guerre, il manquera à la France des intelligences, des pensées, des bras : c’est vous, les gosses d’aujourd’hui, qui serez la jeunesse de demain.
J’en aurai fini avec l’objection de l’incompatibilité entre l’intelligence populaire et la beauté littéraire, lorsque j’aurai expliqué de quelle compréhension il s’agit.
Que l’on enlève à celui-là la faculté particulière par laquelle il est un génie, et il restera toujours encore un homme capable, souvent d’une intelligence et d’une habileté supérieures, moral, apte à discerner, qui saura partout tenir sa place dans notre engrenage social. […] « Ce sont », dit Tarabaud, « des bizarres, des originaux, des déséquilibrés, des incapables ; ce sont de ces individus dont on ne peut pas dire qu’ils ne soient pas intelligents, mais ils ont une intelligence improductive27 ». « Un caractère commun les unit », écrit Legrain : « la faiblesse du jugement et l’inégal développement des facultés intellectuelles… Les conceptions ne sont jamais élevées, le débile est incapable d’avoir de grandes pensées, des idées fécondes ; ce fait contraste singulièrement avec le développement exagéré de ses facultés imaginatives28 ». « S’ils sont peintres », lit-on chez Lombroso, « la qualité dominante chez eux sera la couleur, ce seront des décoratifs. […] Si, outre cela, le sujet, l’« anecdote » du tableau fait de l’effet sur le spectateur, ce n’est plus le mérite du peintre comme tel, mais celui de l’intelligence non exclusivement picturale, qui a choisi le sujet et l’a livré, pour être représenté, aux facultés picturales proprement dites. […] Laurent Tailhade enfin, un des principaux symbolistes, évente le secret : « Je n’attribuai jamais à ces jeux d’autre valeur que celle d’un amusement passager ; nous essayâmes sur l’intelligence complaisante de quelques débutants littéraires la mystification des voyelles colorées, de l’amour thébain, du schopenhauérisme et de quelques autres balivernes, lesquelles, depuis, firent leur chemin par le monde ».
Je leur ai appris par mes tragédies à raisonner, à réfléchir : aussi ont-ils plus d’intelligence et de clairvoyance, plus d’aptitude pour mieux tenir, entre autres choses, leur ménage et se rendre compte de tout en se disant : “Comment est ceci ? […] Elle se réduit à la bataille ; la bataille à des combats singuliers qui rendent impossible la tactique, inutiles les calculs de l’intelligence. […] On peut même dire qu’elles n’ont en Europe qu’un effet incontestablement commun, le plus grand à la vérité, qui est l’affranchissement relatif ou absolu des intelligences et des volontés. […] Pour les réalistes positivistes de France, la condamnation péremptoire de l’imagination est une conséquence rigoureuse de leurs doctrines : en présence de « l’évolution qui emporte le siècle et pousse peu à peu toutes les manifestations de l’intelligence humaine dans une même voie scientifique146 », elle n’a plus d’office : son ère est close.
L’Évangile élégant qu’il nous prêche (et qui n’est ni humble ni chaste) est déjà selon le goût ou le caprice des plus voluptueuses intelligences d’à présent. […] Songez cependant que tout ce qu’elle dit se peut expliquer par une finesse et une précocité d’intelligence qui n’est pas rare chez les petites filles, et, d’autre part, se concilier avec la plus parfaite ignorance enfantine. […] Il marche, les yeux attachés sur de fuyants et toujours renaissants mirages d’entreprises industrielles et de spéculations financières, dont il ne voit que la beauté abstraite, — travail et intelligence mués en argent, que l’intelligence et l’audace de nouveau multiplient, — avec l’illusion qu’il est un beau lutteur, un homme à idées, bien qu’il n’ait jamais pu en préciser une seule… « C’est un homme… vague, qui commet des actions… vagues », dit de lui son beau-frère le magistrat. […] C’est beau, ce savant édifice de corruption élevé par un homme de tant de volonté, de tant d’intelligence et de tant d’argent, renversé par le cri d’un bébé. […] Sa vive intelligence, son talent, et certains coins de générosité intacte ne permettent point de le confondre avec les petits bandits vulgaires qui ont, paraît-il, depuis trente ans, envahi le journalisme.
En vérité, il faut la très intéressante intelligence littéraire de M. […] — n’admet pas que l’Art soit autre chose qu’une manifestation de la sensibilité et un travail de l’intelligence au service de la morale. […] Ajoutez qu’il ne peut guère les tenir de Corneille, n’étant venu à Paris qu’en 1680 ou 1681, alors que Corneille était très affaibli d’intelligence. […] Blanchard connaît il l’analyse bien et il l’extrait avec intelligence. […] Huszar est destiné à guérir les Français de cette admiration pour Corneille qui fait sourire tous les étrangers doués de quelque intelligence littéraire.
Gaston Paris, et, tout en doutant que la littérature française du moyen âge ait l’importance qu’il lui accorde « pour l’intelligence du développement de notre conscience nationale », il ne nous paraît guère moins bon qu’à lui-même qu’elle ait une part, une petite part, une toute petite part, « sagement restreinte », dans la culture générale, dans l’instruction des lettrés, et, si l’on veut enfin, jusque dans l’éducation populaire. […] Je n’ai pas besoin, quant à moi, d’Auguste Comte ni de Claude Bernard pour m’expliquer, depuis vingt-cinq ans ou trente ans bientôt, les progrès du Naturalisme ; et j’ose bien affirmer que la lecture de la Philosophie positive ou de l’Introduction à la médecine expérimentale n’éclaire pas beaucoup l’intelligence de la Cousine Bette ou de César Birotteau. […] En effet, ce qu’Emma Bovary est en femme, Frédéric Moreau l’est en homme ; et chez le second, comme chez la première, le développement maladif d’une éducation purement sentimentale a désagrégé l’intelligence et la volonté. […] Et dirai-je qu’ils manquent de sympathie, parce qu’ils manquent d’intelligence ? […] « Les très nombreuseset incessantes polémiques que suscitèrent depuis trois ans les manifestations du groupe symboliste rappellent les grandes luttes qui, en ce siècle, signalèrent l’essor du romantisme et du naturalisme. » Ainsi s’exprimait, tout récemment, l’auteur d’un Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents ; et il n’oubliait qu’un point c’est que les Jean Moréas ou les Francis Poictevin n’ont pas encore écrit leur Madame Bovary, ou seulement leur Assommoir, les Verlaine et les Mallarmé leurs Orientales ou leur Cromwell.
— Savez-vous bien que le premier il a lumineusement expliqué le sens du mot épisode dans les drames grecs, ce qui est toute une révélation pour l’intelligence de la constitution du drame grec ? […] Il a bien compris Corneille, ses grandes qualités, le péril aussi de sa tournure d’esprit et par où il risquait de passer l’intelligence commune des spectateurs et de n’être plus suivi. […] Et puis, chose naturelle, puisqu’il s’agit d’une actrice chez qui l’intelligence est la première qualité, les parties effacées du rôle sont venues en première ligne. […] Rocafort a essayé d’établir, non sans soin, non sans intelligence et non sans succès. […] Une âme et une intelligence du dix-huitième siècle, unies à une imagination du dix-neuvième et à un don d’expression tout personnel, c’est Victor Hugo.
Également dangereux peut-être, qui rendent malheureux tout le monde, également les uns et les autres, qui involontairement trompent tout le monde, également les uns et les autres, qui font, qui involontairement font de fausses ententes, de faux accords, de fausses pénétrations, de fausses intelligences, tout ce qu’il faut pour aller mal, des mastics enfin. […] Un homme comme Hugo, un vieux politicien, poète, politicien, s’aperçoit très bien, au moins de temps en temps, moitié instinct, moitié intelligence, moitié compréhension ; moitié entente ; que c’est encore le génie qui rapporte le plus, et même au fond qu’il n’y a peut-être que le génie qui rapporte ; que c’est le meilleur placement, peut-être le seul ; que c’est le génie en définitive qui donne le volume, la surface de base, la base d’appui ; que le parasite ne serait rien sans le parasité ; que les pièces fausses ne prendraient pas, s’il n’y en avait de vraies. […] Il avait trop d’instinct, et même trop d’intelligence, surtout trop de main pour ne pas avoir senti, pour ne pas savoir toutes les fois qu’il manquait, qu’il avait manqué. […] Chercher des renseignements sur un monument, sur une œuvre, sur un texte, pour un texte, pour l’intelligence d’un texte partout ailleurs que dans le texte même, (et ce sont les mêmes qui font semblant d’avoir inventé de recourir au texte, d’aller aux textes), (vous savez, les célèbres sources), chercher des lumières sur un texte, pour l’intelligence d’un texte, partout, pourvu, à cette seule condition que ce ne soit pas dans le texte ; même. Vous savez, Halévy, qu’ils tiennent tout, toutes les chaires, tout le pouvoir temporel ; et qu’un homme qui défend le français, le latin, ou le grec, ou simplement l’intelligence, est un homme perdu ; qu’il ne se fait pas actuellement une seule nomination dans l’enseignement supérieur sans que le candidat ait fait sa soumission, à ces messieurs, sans qu’il ait donné des gages, signé le revers, signé la capitulation et de la pensée, et de la liberté de la pensée.
Tout cela se fondait en une forte intelligence générale. […] La conversation de Stéphane Mallarmé aidait singulièrement à l’intelligence de son œuvre écrite. […] Elles montrent que Chénier ne fut pas seulement un créateur de rythmes, mais aussi une intelligence vive, large et forte. […] Le grand Lundiste fut en effet une intelligence singulièrement sagace, fine, active, variée et admirablement laborieuse. […] Son intelligence déjà curieuse se fut élargie avec le temps.
Ce double souvenir, qui retentit longtemps au fond de nous-mêmes, nous dispose à venir de nouveau savourer cette sensation exquise ; et cette disposition est précisément la marque d’un goût qui s’aiguise au souvenir et à l’espoir d’un plaisir, dans lequel se combinent également l’intelligence et la sensibilité. […] Viennent ensuite l’intelligence et le travail, au moyen desquels il pousse la représentation de ces images au degré désirable de fini et de ressemblance. […] Son physique et jusqu’à son moral, jusqu’à son intelligence, sont des matières plastiques qui prennent aisément la forme des moules où il les enferme. […] Le nombre des personnages de théâtre s’accroîtra considérablement, et chacun d’eux ne nous apparaîtra plus qu’avec son idéal particulier, c’est-à-dire un idéal ramené à la mesure de son intelligence, de son développement moral et de sa fonction sociale. […] C’est en somme le triomphe de l’être humain sur la nature, de l’intelligence sur la matière.
Toute vanité, toute ambition, toute intelligence, toute fermeté et résolution d’action et de plan : ça allait à l’amour. […] Ils vous rabougrissent l’intelligence… Puis moi, sur l’éducation, j’ai des idées philosophiques… Ça tient peut-être à la manière dont j’ai été élevée… Oui, ma mère ne m’a pas gâtée !
Dira-t-on que dans les traductions litterales, faites en latin par des sçavants à qui personne n’a contesté l’intelligence des deux langues, je n’aye pû m’assurer suffisamment de ce qui fait l’objet de ma critique ? […] L’art de l’auteur est d’écarter tout ce qui peut rendre son dessein équivoque ; autrement il ne sçauroit faire ce plaisir d’unité, qui vient de ce qu’on rapporte naturellement toutes les parties à un tout, qu’on en approuve les proportions, et qu’on admire l’intelligence de l’ouvrier, qui n’a rien fait au hazard, et qui semble avoir conçû son ouvrage tout à la fois. […] L’iliade n’est, selon eux, qu’une fable, semblable au fonds à celles d’ésope, pour faire entendre que le grand interest d’un parti est la bonne intelligence. […] il y a toûjours, dit-elle, quelque si, quelque mais, qui ne laisse pas ce grand poëte joüir en paix de sa réputation ; je sçai bien qu’elle ne veut ni de si ni de mais sur un auteur qu’elle juge irréprochable : car elle a beau dire par condescendance, qu’il peut bien y avoir quelque chose dans Homere qui se ressente de l’humanité, elle défend avec ardeur tout ce que les critiques y ont repris : ils ont été assez malheureux jusqu’ici pour n’attaquer rien que de parfait, que de divin : ni la malice ingénieuse à trouver des fautes, ni la raison qui les trouve d’autant mieux, qu’elle les cherche sans prévention, n’ont pû appercevoir les foiblesses d’Homere ; elles échappent même à la pénétration de Me D et il semble que ce soit un secret impénétrable à l’intelligence humaine.
Vous y trouverez de l’esprit, un esprit un peu mince et précieux, nuancé d’un peu d’ironie ; vous y trouverez ce style, qui est le sien, non seulement élégant, mais pénétrant, mais aigu dans l’affectation de sa simplicité ; et vous y trouverez enfin la question mieux posée, beaucoup mieux, d’une manière un peu sophistique, il est vrai, mais enfin mieux posée que dans le Siècle de Louis le Grand, et par un homme d’une tout autre portée d’intelligence. […] Puisque les œuvres sont dans l’histoire, la connaissance de l’histoire est indispensable à leur intelligence. […] Il s’amuse de la biographie plutôt qu’il ne s’en sert, et il nous en amuse plutôt qu’il ne la tait servir à l’intelligence des œuvres. […] Thiers, sur le Charles-Quint de Mignet, sur les Évangiles, sur les Entretiens de Goethe et d’Eckermann, sur le Mystère du siège d’Orléans… Enfin, vous connaissez l’intérêt, le charme et la séduction de cette critique… Peut-être tiennent-ils surtout à ce que Sainte-Beuve a aimé passionnément son art, et qu’au lieu de se faire de la littérature, comme tant d’autres, comme Cousin ou comme Villemain, un moyen de fortune, un titre aux ministères, il l’a, jusqu’à son dernier jour, cultivée pour elle-même, comme le plus noble emploi de l’intelligence et de l’activité… Mais avant d’essayer de définir et de caractériser cette critique par des traits plus précis — ce qui sera aujourd’hui le principal objet de cette leçon, — je voudrais dire quelques mots de deux hommes qui n’ont pas fait profession de critiques, mais qui n’en ont pas moins, à mon avis, exercé quelque influence — et sur la direction générale de la critique contemporaine, et sur celle des idées de Sainte-Beuve lui-même, — en complétant ou en resserrant cette union intime de l’histoire et de la critique dont nous avons vu les commencements en parlant l’autre jour de Villemain. […] Indispensable à la connaissance de Pascal lui-même, la question ne l’est pas moins à l’intelligence des Pensées.
Il prétend que Dieu, c’est-à-dire l’auteur de nous et de nos alentours, est mort avant d’avoir fini son ouvrage ; qu’il avait les plus beaux et vastes projets du monde et les plus grands moyens ; qu’il avait déjà mis en œuvre plusieurs des moyens, comme on élève des échafauds pour bâtir, et qu’au milieu de son travail il est mort ; que tout à présent se trouve fait dans un but qui n’existe plus, et que nous, en particulier, nous sentons destinés à quelque chose dont nous ne nous faisons aucune idée ; nous sommes comme des montres où il n’y aurait point de cadran, et dont les rouages, doués d’intelligence, tourneraient jusqu’à ce qu’ils se fussent usés, sans savoir pourquoi et se disant toujours : Puisque je tourne, j’ai donc un but. […] Croyez-vous que, quand même je ne serais point susceptible d’amitié, quand ce serait sans reconnaissance et sans tendresse que je pense à notre séjour de deux mois ensemble, à cette espèce de sympathie qui nous unissait, à l’intérêt que vous preniez à moi malade, maussade, abandonné, exilé, persécuté, je sois assez bête pour ne pas regretter cette intelligence mutuelle de nos pensées qui circulait, pour ainsi dire, de vous à moi et de moi à vous ? […] Il y a entre nous un point de rapprochement qui aurait surmonté toutes les différences de goûts, de caprices, d’engouements qui auraient pu s’opposer à notre bonne intelligence ; nous nous serions souvent séparés avec humeur, mais nous nous serions toujours réunis.
C’est là que trônent ces aristocrates de la pensée, ces grands seigneurs de l’intelligence, ces rivaux de toutes les gloires et de toutes les noblesses — comme dirait l’un d’eux en parlant d’eux. — Le foyer de l’Opéra est donc un vaste salon qui a ses groupes ; chaque groupe a en quelque sorte son président ; on n’y demande pas la parole, on la prend ; là se glissent quelques greffiers qui annotent et mnémonisent pour continuer leur métier de colporteur par lequel ils vivent avec la réputation de gens d’esprit. […] Karr a dans ses romans une originalité qui ne convient guère à nos idées plus graves, et tout son esprit de mots, de subtilités, nous échappe, parce que nous n’avons pas autour de nous les mille explications nécessaires à l’intelligence et à l’appréciation du goût de ce sel attique. […] Aujourd’hui les ministres sont de l’Académie et se vendent comme pittoresques ; c’est une nouvelle intelligence qui se fait jour.
Allez, allez toujours dans cette voie, écrivains mes frères, qui êtes l’exemple et l’honneur du journal français, une des gloires de l’Europe moderne ; allez dans cette voie ; on y rencontre, il est vrai, toutes sortes d’intelligences médiocres, toutes sortes de lecteurs imbéciles, et des ignorants, et des niais, et des frivoles, et des beaux esprits de café, et des idiots qui courent après l’aventure, après le hasard, empêtrés dans les fêtes sanglantes de la cour d’assises, dans les événements de la rue, ou dans les émotions du carrefour. […] Oui, l’intelligence est une belle chose ; on ne sait pas où elle finit, on ne sait pas où elle commence. […] — Une des peines de l’esprit, c’est l’inaction, c’est la lutte qu’il faut soutenir contre les intelligences médiocres.
Devenu veuf, il avait trouvé dans une amie, dans une personne d’intelligence et de cœur, une femme dévouée, l’épouse des jours plus sombres et des heures sérieuses.
Il faut, à chaque instant, justifier de son droit et de son privilège en étendant sa vue, en découvrant ce qui se fait ou se tente de remarquable alentour, en ne s’enchaînant pas à des doctrines métaphysiques ou littéraires inflexibles, en s’associant, sans se faire trop prier, toute intelligence supérieure et ornée, toute imagination puissante et féconde, de quelque bord qu’elle vienne ; en n’étant point des derniers à reconnaître l’avènement des talents chers au public et applaudis, en témoignant à l’occasion de l’estime à ceux mêmes qui ne sont pas de l’ordre académique, et qui comptent pourtant dans la grande confrérie des Lettres ; en n’affectant pas absolument de les ignorer.
Cette dévotion éloquente, cette invocation au christianisme du sein d’une carrière d’honneurs, de combats politiques ou de plaisirs, cette rêverie sauvage, cette mélancolie éternelle de René se reproduisant au sortir des guirlandes et des pompes, ces cris fréquents de liberté, de jeunesse et d’avenir, dans la même bouche que la magnificence chevaleresque et le rituel antique des rois, c’en était plus qu’il ne fallait pour déconcerter d’honnêtes intelligences qui chercheraient difficilement en elles la solution d’un de ces problèmes, et qui prouveraient volontiers, d’après leur propre exemple, que l’esprit est matière, puisqu’il n’y tient jamais qu’une seule chose à la fois.
Lucas-Montigny qu’il faut lire les preuves de ces tempéraments indomptables et de ces vertes intelligences.
Diderot fut cet homme ; Diderot, riche et fertile nature, ouverte à tous les germes, et les fécondant en son sein, les transformant presque au hasard par une force spontanée et confuse ; moule vaste et bouillonnant où tout se fond, où tout se broie, où tout fermente ; capacité la plus encyclopédique qui fût alors, mais capacité active, dévorante à la fois et vivifiante, animant, embrasant tout ce qui y tombe, et le renvoyant au dehors dans des torrents de flamme et aussi de fumée ; Diderot, passant d’une machine à bas qu’il démonte et décrit, aux creusets de d’Holbach et de Rouelle, aux considérations de Bordeu ; disséquant, s’il le veut, l’homme et ses sens aussi dextrement que Condillac, dédoublant le fil de cheveu le plus ténu sans qu’il se brise, puis tout d’un coup rentrant au sein de l’être, de l’espace, de la nature, et taillant en plein dans la grande géométrie métaphysique quelques larges lambeaux, quelques pages sublimes et lumineuses que Malebranche ou Leibnitz auraient pu signer avec orgueil s’ils n’eussent été chrétiens84 ; esprit d’intelligence, de hardiesse et de conjecture, alternant du fait à la rêverie, flottant de la majesté au cynisme, bon jusque dans son désordre, un peu mystique dans son incrédulité, et auquel il n’a manqué, comme à son siècle, pour avoir l’harmonie, qu’un rayon divin, un fiat lux, une idée régulatrice, un Dieu85.
Vacherot, esprit sévère, consciencieux, voué à la science pure et rien qu’à la science, est une des intelligences les plus honorables de ces temps-ci.
Il dérive toutes les opérations de l’intelligence de ces deux lois. — Voyez aussi Mervoyer, Étude sur l’association des idées (1864).
. — C’est qu’ici joue un mécanisme dont l’emploi est universel dans notre intelligence.
Ce serait un pauvre spectacle, aux yeux de cette adorable Divinité, de qui tout émane et à qui tout aboutit, de cette âme universelle qui n’est qu’âme, c’est-à-dire intelligence, volonté, force et perfection, que le spectacle de populations plus ou moins nombreuses broutant la terre dans un ordre plus ou moins régulier, comme celui du troupeau devant le chien, sans autre fin que de se partager plus ou moins équitablement l’herbe qui nourrit leur race, jusqu’au jour où leurs cadavres iront engraisser à leur tour le fumier vivant tiré du fumier mort, et destiné à devenir à son tour un autre fumier !
— Pour nous mieux pénétrer de la bonté de votre cause, ajoutai-je, ne trouverez-vous pas à propos de prononcer lentement, de vous arrêter de temps à autre, et même de traduire quelquefois en passant, comme si ce que vous lisez ne devait pas toujours parvenir du premier coup à l’intelligence de votre auditoire ?
Aussi, voyez comme ce nom remplace tous les autres, même celui de Voltaire, le dictateur de l’intelligence universelle ; à peine s’en souvient-on encore, et il vient seulement de mourir au seuil des temps qu’il a créés.
Or, c’est surtout à cette multitude anglaise que l’art dramatique doit le maintien des bonnes et naturelles traditions théâtrales : car n’ayez peur qu’elle tolère des productions qui dépasseraient la portée de son intelligence, des beautés dont elle ne se sentirait pas immédiatement frappée.
Tous les professeurs de sciences vous le diront comme moi… » Cette remarque très grave d’un professeur qui, sous ses yeux, chaque jour, voit se former et se développer les jeunes intelligences nouvelles, est confirmée d’une façon extrêmement forte par une lettre au ministre de l’Instruction publique, écrite par M.
Il aima à la fois la rudesse des temps barbares, la civilisation affinée de l’antique Grèce et la gracieuse décadence de Paris ; son intelligence et ses sens vibrèrent à toutes les beautés, et s’il nous est cher, c’est parce qu’il ne se confina pas en une manière, parce qu’il fut toujours un artiste sincère et bien vivant.
Il fallait rendre la poésie populaire, appeler le plus grand nombre aux pures délices et aux sévères enseignements de l’art ; trouver, pour un pays encore partagé en classes, une langue qui ne fût ni au-dessous de la délicatesse des classes élevées, ni au-dessus de l’intelligence de la foule, une langue commune à la cour, à la ville et au peuple.
La composition, c’est-à-dire l’art de disposer et de développer avec ordre et proportion toutes les parties d’un sujet, de lui donner l’étendue qu’il comporte, de n’y faire entrer que les idées qui s’y rattachent, d’en écarter toutes celles qui lui sont étrangères, de l’approprier aux intelligences les moins préparées, est un art presque inconnu au seizième siècle.
La majorité des hommes comprendra donc toujours plus facilement le doute que la foi ; il est à la portée de presque toutes les intelligences.
Gudehus et Vogl : Gudehus, moins bon acteur, mais d’une superbe voix, et d’une remarquable intelligence ; Vogl, dont la voix se fatigue, mais le seul de ces acteurs qui sache à peu près poser son personnage.
Enfin, si la sensation est, comme le veut Condillac, l’origine et la fin de toute activité mentale, pourquoi les hommes dont les sens sont le plus actifs ne sont-ils pas ceux dont l’intelligence est la plus puissante ?
Comme les choses ne saisissent les Hommes que selon la proportion qu’elles ont avec leur intelligence, & que les lumieres de la multitude ne sont ni justes ni profondes ; comme la maniere d’exprimer une pensée décide de tout chez la plupart des Lecteurs : il n’est pas étonnant que par l’art de se mettre à la portée du commun des esprits, de rendre ses idées avec agrément, il ne se fasse goûter, & n’enleve des suffrages.
On me le peint encore, dans cette même demi-teinte à la fois fidèle et adoucie, arrivant tard à la littérature sérieuse, ne s’y naturalisant qu’avec effort ; s’en distrayant souvent ; s’essayant de bonne heure à des sujets de poésie plus ou moins imités de l’anglais, de l’allemand, à de petites pièces remarquables de ton et de coloris, mais où l’expression trahissait la pensée, et qu’il a corrigées et retravaillées depuis, sans les rendre plus parfaites et plus faciles ; « nature exquise pour l’intelligence, avec des moyens de manifestation insuffisants ; point d’amour-propre en tête-à-tête, humble aux observations dans le cabinet, douloureux et hargneux devant le public ; généreux de mœurs et désintéressé, mais faisant mille tours à ses amis et à lui-même. » D’un cœur ardent, passionné, d’un tempérament vif et amoureux, il avait un grand souci de sa personne et de tout ce qui mène à plaire.
Je me permets de croire que si son talent distingué, mais de courte haleine et stérile, et qui ne cherchait que des prétextes pour ne pas récidiver, avait été au niveau de son intelligence et de son esprit, et que si la veine chez lui avait coulé de source, il aurait été moins chagrin et moins malheureux.
Cauchemar du gendre, la nuit, voyant des milliers de têtes dont le nez est ainsi tourmenté par des mains au bout de bras n’appartenant à personne. » Octobre Mlle *** (Renée Mauperin), la cordialité et la loyauté d’un homme alliées à des grâces de jeune fille ; la raison mûrie et le cœur frais ; un esprit enlevé, on ne sait comment, du milieu bourgeois où il a été élevé, et tout plein d’aspirations à la grandeur morale, au dévouement, au sacrifice ; un appétit des choses les plus délicates de l’intelligence et de l’art ; le mépris de ce qui est d’ordinaire la pensée et l’entretien de la femme.
Flaubert, une intelligence hantée par de Sade, auquel il revient comme à un mystère et à une turpitude qui l’affriolent, et gourmand de la turpitude et la collectionnant, et heureux, selon son expression, de voir un vidangeur manger de ce qu’il transporte, et s’écriant, toujours à propos de M. de Sade : « C’est la bêtise la plus amusante que j’aie rencontrée !
Méthode, s’il fallait voir dans le choix des images l’influence d’une intelligence volontaire, comme le désire M.
La manière dont Schiller développe les motifs qu’on leur présente, et gradue l’effet que produisent sur eux ces motifs ; la lutte qui a lieu dans ces âmes farouches entre l’attachement et l’avidité ; l’adresse avec laquelle celui qui veut les séduire proportionne ses arguments à leur intelligence grossière, et leur fait du crime un devoir, et de la reconnaissance un crime ; leur empressement à saisir tout ce qui peut les excuser à leurs propres yeux, lorsqu’ils se sont déterminés à verser le sang de leur général ; le besoin qu’on aperçoit, même dans ces cœurs corrompus, de se faire illusion à eux-mêmes, et de tromper leur propre conscience en couvrant d’une apparence de justice l’attentat qu’ils vont exécuter ; enfin le raisonnement qui les décide, et qui décide, dans tant de situations différentes, tant d’hommes qui se croient honnêtes, à commettre des actions que leur sentiment intérieur condamne, parce qu’à leur défaut d’autres s’en rendraient les instruments, tout cela est d’un grand effet, tant moral que dramatique.
… Nous l’avons dit déjà, mais tant de prostitution d’admiration y fait revenir, hors le rang social qui lui donne sa valeur de surface, hors ce piédestal, aujourd’hui brisé, réduit en poudre, de la grande société à laquelle elle appartenait, Mme de Chevreuse n’a rien qui puisse la faire placer au-dessus des femmes de notre temps et de tous les temps, qui se distinguent par le double désordre de l’intelligence et des mœurs.
Chez lui, le reptile est caméléon… Nier, du reste, la philosophie n’empêche pas cet esprit fuyant comme l’eau d’écrire à la tête de son présent volume : Dialogues et fragments philosophiques, car le fond même de cette intelligence sans muscle et sans vertèbre, c’est la contradiction, et non pas la contradiction affirmative, osée, coupante, à angles aigus, comme elle l’est toujours sous les plumes de quelque vigueur quand elles ont le malheur de se contredire, mais la contradiction sans hardiesse, noyée, dissoute, presque imperceptible ; le propre de ce lâche esprit étant de dissoudre tout, non comme un mordant, mais comme un liquide !
Feuillet achève son héros en le faisant père, aussi bêtement père qu’il est, dans tout le roman, amant et mari… Il meurt de son petit, comme d’une maladie… Le bronze de la volonté, de l’intelligence, de l’égoïsme hautain, qui ne devait être brisé que par des foudres, s’amollit et fuit aux moindres contacts, et devient, qu’on me passe le mot !
La « matière », plus intimement scrutée, a prouvé qu’elle contenait de la vie spirituelle ; la cellule révèle un instinct, une tendance, un désir d’où une finalité, c’est-à-dire une virtualité d’intelligence.
Une intoxication légère peut donner lieu à des troubles déjà profonds de l’intelligence, de la sensibilité et de la volonté.
Bien des chances lui étaient offertes dès lors, et dans le siècle suivant, par la dispersion de la Grèce sur tant de points du monde, par cet appel qu’une langue, une civilisation savante et victorieuse venaient faire aux intelligences diverses de tant d’indigènes d’Europe, d’Asie et d’Afrique, rapprochés par la conquête d’Alexandre.
Cette gauche parodie de la vie révolte l’intelligence ; cette factice perpétuité du corps semble nier l’immortalité. […] Go monde moral à la renverse était fait pour ébranler les cœurs les plus fermes, les intelligences les plus droites. […] Le peuple entier des animaux insurgés contre l’homme, et se ralliant autour d’un monstre doué de volonté et d’intelligence, donnerait à peine l’idée du péril que la civilisation courut à cette sombre date. […] Un nom qui retentit dans l’oreille comme un coup de canon, mais qui n’ébranle ni le cœur ni l’intelligence. […] Aux autres les villes policées, les maisons solides, le foyer qui fonde, le champ qui enracine, la sécurité du bien-être, les travaux de l’intelligence.
Un homme, quelque profonde intelligence qu’il ait de l’esprit de son temps, quelque habileté qu’il déploie à s’en servir comme d’un instrument docile, n’a ni pouvoir, ni mission pour le changer, pour le détourner de sa route. […] L’intelligence du temps présent, la connaissance de son esprit et de ses tendances a toujours constitué, et constitue plus que jamais le génie de la politique. […] On se jeta dans la science des sensations, espérant qu’elle serait plus à la portée de l’intelligence humaine. […] Hume n’alla pas plus loin ; satisfait de raisonner plus juste que les disciples de Locke, et de montrer à ceux qui doutaient de l’âme, qu’ils étaient crédules et frivoles de croire au témoignage des sens, il se reposa sur cette ruine de l’intelligence humaine. […] Kant rechercha les règles que suit constamment l’intelligence humaine dans ses procédés.
Mais cet avénement s’était fait à travers tous les désordres, à travers l’orgie des intelligences et l’anarchie matérielle la plus sanglante, principalement en France, moyennant Rabelais et la Ligue. […] C’est alors que par la vérité des sentiments, par l’intelligence des expressions et par toutes les finesses de l’art, il séduisoit les spectateurs au point qu’ils ne distinguoient plus le personnage représenté d’avec le comédien qui le représentoit.
Elle parle au jeune homme du beau temps qu’il fait et du poudding qu’elle vient de préparer : Pendennis découvre dans ces deux phrases une profondeur d’intelligence étonnante et une majesté d’abnégation surhumaine. […] Thackeray a dû remonter au sens primitif des mots, retrouver des tours oubliés, recomposer un état d’intelligence effacé et une espèce d’idées perdue, pour rapprocher si fort la copie de l’original.
. — Oui, oui, certainement, si j’avais dix ans devant moi… Eh, mon Dieu, je ne parle pas de la mort… mais de la diminution de l’intelligence, à laquelle, mon cher ami, je suis peut-être condamné par ma maladie. […] » Jeudi 27 décembre Discussion à table avec Daudet, où je soutiens qu’un homme qui n’a pas été doué par Dieu du sens pictural, pourra peut-être, à force d’intelligence, goûter quelques gros côtés perceptibles de la peinture, mais n’en goûtera jamais la beauté intime, la bonté absconse au public, n’aura jamais la joie d’une coloration, et je lui parlais à ce propos de l’eau-forte, de ses noirs, de certains noirs de Seymour-Haden qui mettent l’œil dans un état d’ivresse chez l’homme, au sens pictural.
Parmi les vertébrés, le degré d’intelligence et les ressemblances de structure avec la structure humaine entrent évidemment en compte. […] Mêmes doutes à l’égard des plantes, chez lesquelles on ne retrouve plus l’intelligence pour servir de mesure et de guide ; de sorte que certains botanistes donnent le rang supérieur aux plantes qui possèdent la série complète de leurs organes, c’est-à-dire des sépales, des pétales, des étamines et un pistil pleinement développés dans chaque fleur ; d’autres au contraire, avec plus de vérité probablement, considèrent comme plus élevées dans l’échelle organique les plantes chez lesquelles les organes sont le plus différenciés, le plus localisés pour des fonctions spéciales, et en général moins nombreux pour la même fonction.
— Le public ne connaît que ses tragédies ; à l’étudier de près, son génie dépasse de beaucoup les limites du théâtre ; il faut le voir en Acante dans la Psyché de La Fontaine, lire ses vers, ses lettres, ses commentaires des auteurs anciens ; et l’on découvre chez lui toutes les émotions, toutes les sensibilités et toutes les intelligences. […] Lanson : « La forme grave et supérieure de notre intelligence, c’est l’esprit d’analyse, subtil et fort, et la logique, aiguë et serrée : le don de représenter par une simplification lumineuse les éléments essentiels de la réalité, et celui de suivre à l’infini sans l’embrouiller ni le rompre jamais le fil des raisonnements abstraits ; c’est le génie de l’invention psychologique et de la construction mathématique. » Rassemblant ces remarques qui semblent éparses, revenons-en à la grande ligne de l’évolution.
Corneille lui-même ne s’est pas fort élevé au-dessus de cet usage dans l’exposition de rodogune, où, par un acteur désintéressé, il fait faire à un autre qui ne l’est pas moins, toute l’histoire nécessaire à l’intelligence de la tragedie, et qui pis est, une histoire si longue qu’il a fallu la couper en deux scenes : on l’interrompt pour laisser parler les deux princes qui arrivent, et on la reprend dès qu’ils sont sortis. […] On a tort cependant, quand ces fautes ne sont pas fréquentes, de les imputer avec mépris à défaut d’intelligence ; et pourvû que les auteurs en conviennent, dès qu’on les leur fait appercevoir, ils méritent bien qu’on ne les regarde que comme un effet d’inattention, toûjours pardonnable dans un ouvrage de longue haleine : mais les censeurs eux-mêmes sont sujets dans leurs reproches à une légereté plus imprudente encore ; ils prennent souvent pour contradiction, ce qui ne l’est pas : comme il s’en faut bien que l’ouvrage leur soit aussi présent qu’à l’auteur, ils n’en saisissent pas si surement les differens raports ; et dans l’impatience de censurer, il leur suffit des premieres apparences. […] La critique a saisi avidement cette apparence de contradiction ; et faute d’intelligence, ou de bonne foi, elle m’en fait le reproche le plus amer. […] D’ailleurs la mesure et les phrases, ordinairement plus coupées dans les vers, aident beaucoup leur intelligence ; ils en discernent plus aisément le sens ; ils en prennent mieux les tons, et ils les soutiennent davantage ; au lieu qu’il leur faudroit plus de finesse que n’en ont quelques-uns, pour saisir dans les phrases étenduës de la prose les inflexions délicates que demanderoient les raisonnemens et les passions.
Quel incroyable et pourtant très vivant mélange d’égoïsme féroce et de sentiment d’un devoir supérieur, de superstition inepte et de haute intelligence, d’hypocrisie et de franchise, de faiblesse et de force, de cruauté et de générosité, de grotesque et de grandiose ! […] Cette histoire d’un homme dont la solitude et la souffrance développent l’intelligence et la valeur morale, puis qui reparaît en punisseur des méchants et qui, se vengeant, venge aussi la justice…, pendant qu’elle se déroulait sur la scène, je me disais que nos chers ancêtres indirects, les Ioniens d’il y a trois mille ans, l’avaient déjà presque entendue, que le père Dumas s’était appelé Homère, et que, en dépit de la vulgarité, — alerte d’ailleurs et plaisante, — de sa forme, Monte-Cristo ressemblait étrangement, dans le fond, à la divine Odyssée. […] cette femme qui n’est pas bête et qui montrera, tout le long de la pièce la plus vive intelligence, n’a pu, devenue maréchale et duchesse, se défaire, même un peu, de ses façons et de son langage de blanchisseuse mal embouchée Oui, je sais, la maréchale Lefebvre est restée célèbre pour la familiarité populaire de son langage. […] Ce n’est nullement par un effet de leur intelligence, mais en grande partie par leurs ridicules physiques et par l’assurance même de leur stupidité (pourvu qu’il s’y joigne un instinct de vérité et un don d’imitation de la vie) que certains de nos bouffons les plus célèbres nous plongent dans de telles gaietés ; et 3e (cette observation-là est moins neuve encore que les deux premières) la vanité professionnelle est, neuf fois sur dix, plus forte chez le comédien que tous les autres sentiments, y compris l’amour et même l’amour « pour de bon ». […] Les artistes jolies, bien élevées, qui avaient consenti à se charger des rôles des petites lazaristes, y apportaient tant d’intelligence et de bonne volonté qu’elles donnaient l’impression de personnes qui n’imitent point, mais qui retrouvent.
Je vois que la pensée chrétienne, exprimée dans une des plus vieilles et des plus traditionnelles formules de l’enseignement de l’Église, et la pensée bergsonienne, exprimée partout dans l’œuvre de notre maître, et notamment dans Matière et Mémoire, (essai sur la relation du corps à l’esprit), et dans l’Essai sur les données immédiates de la conscience, procèdent par une démarche à ce point parallèle, pénètrent dans les réalités spirituelles, par un approfondissement à ce point parallèle et parent que nous ne sommes entrés dans le plein de l’intelligence de cette vieille formule de l’enseignement de l’Église qu’armés du plein du sens et de l’intelligence et de l’éclairement de la pensée bergsonienne. […] Tel fut l’abîme de malentendu, l’abîme de désabusement, l’abîme de détresse qu’avec sa profonde et claire intelligence politique, dont elle a donné tant de preuves par ailleurs, tel fut l’abîme de miséricorde qu’elle mesura instantanément. […] Tout l’en garde, et ce génie, que nous avons dit, et cette intelligence, que nous avons dite, et ce système de totale loyauté qui est ce même dont nous parlons. […] (Le seul ancien qui ait été dévêtu de la sagesse et surtout de l’intelligence antique et qui ait revêtu, (mais complètement du premier coup), l’intelligence moderne).
Il lisait Shakespeare avec beaucoup de peine ; mais, aidé et averti, il s’en rendait compte, et son goût surtout (car il faut en revenir là), son intelligence faisaient le reste.
Le poëme devait avoir trois chants, à ce qu’il semble : le premier sur l’origine de la terre, la formation des animaux, de l’homme ; le second sur l’homme en particulier, le mécanisme de ses sens et de son intelligence, ses erreurs depuis l’état sauvage jusqu’à la naissance des sociétés, l’origine des religions ; le troisième sur la société politique, la constitution de la morale et l’invention des sciences.
Mais la Toscane, ce merveilleux phénomène de la richesse, cette royauté de l’intelligence, cette monarchie du travail à l’époque où l’industrie européenne n’était pas née, devait décroître et tomber d’elle-même aussitôt que l’industrie de la laine, de la soie, de la banque, cesserait d’être le monopole, le brevet d’invention de Florence, et que les mêmes industries, mères du même commerce et sources des mêmes richesses, s’établiraient à Lyon, à Venise, à Londres, à Birmingham, à Calcutta, et que le travail européen et asiatique ne laisserait au peuple des Médicis, de Dante, de Michel-Ange, que cette primauté du génie des arts qui fait la gloire, mais qui ne fait pas la puissance militaire et politique des nations.
Les paraboles mêmes, ces apologues évangéliques qui ne font rejaillir la vérité que sous la forme ingénieuse de l’allusion, sont froides comme les images répercutées dans le miroir lumineux mais impassible de la pure intelligence.
Ce front est plane et limpide comme le marbre qu’il aime tant à décrire ; l’harmonie de ses facultés n’y souffre ni plis, ni creux, ni saillies, signes de prédominance ou de vide dans les dispositions de l’intelligence.