Le lecteur aime assez à se croire plus sévère que le critique ; je lui laisse ce plaisir-là. […] Mais un tel accord de deux êtres si à l’unisson lui semble trop beau : Un cœur, capable d’un tel amour, dit-elle, une âme si tendre et si ferme, semble avoir épuisé le pouvoir de la Divinité ; il en naît une en un siècle ; il semble que d’en produire deux soit au-dessus de ses forces, ou que, si elle les avait produites, elle serait jalouse de leurs plaisirs si elles se rencontraient. Et, se rabattant alors à une liaison moins égale et moins haute, elle estime que l’amour peut encore nous rendre heureux à moins de frais ; « qu’une âme sensible et tendre est heureuse par le seul plaisir qu’elle trouve à aimer ». […] Quand l’âge et les maladies ont diminué son goût, j’ai été longtemps sans m’en apercevoir : j’aimais pour deux ; je passais ma vie entière avec lui, et mon cœur, exempt de soupçons, jouissait du plaisir d’aimer et de l’illusion de se croire aimé.
je n’y prenais plus de plaisir ; il me rappelait nos lectures, voilà tout ; mais plus d’ivresse. […] Ces plaisirs étaient purs, vifs, aimables ; ils suffisaient à parer le présent des plus douces, des plus riantes couleurs. […] La Motte a prétendu démontrer, par toutes sortes de bonnes raisons, que la fable des Deux Pigeons pèche contre l’unité, « qu’on ne sait trop ce qui domine dans cette image, ou des dangers du voyage, ou de l’inquiétude de l’amitié, ou du plaisir du retour après une longue absence. » Ces deux pigeons, d’ailleurs, qui ne sont d’abord que deux frères et deux amis, se trouvent être à la fin deux amants. […] Cependant, au milieu de ces plaisirs, Florian qui en était l’âme, et qui redoublait, pour en donner à chacun, les saillies de sa gaieté communicative, s’arrêtait quelquefois tout rêveur, en disant : « Croyez-moi, nous paierons bien cher ces jours heureux !
Voltaire, à qui Rulhière avait envoyé ce discours, lui avait répondu : Je vous remercie, monsieur, du plus grand plaisir que j’aie eu depuis longtemps. […] Rulhière était d’avis que, dans un cercle, il ne fallait jamais se presser de demander quel était l’homme qu’on voyait entrer et qu’on ne connaissait pas : « Avec un peu de patience et d’attention, on n’importune ni le maître ni la maîtresse de la maison, et l’on se ménage le plaisir de deviner. » Il avait là-dessus toutes sortes de préceptes, de menues remarques très fines, très ingénieuses, dont il faisait la démonstration quand on le voulait, et il ne se trompait guère : Il en fit en ma présence l’application chez Mlle Dornais, raconte Diderot : il survint sur le soir un personnage qu’il ne connaissait pas ; mais ce personnage ne parlait pas haut ; il avait de l’aisance dans le maintien, de la pureté dans l’expression, et une politesse froide dans les manières […] Dès que j’ai vu l’espérance me fuir, J’ai suspendu ma course volontaire, J’ai dans un sort nouveau pris un nouveau plaisir, Et mon repos forcé devient un doux loisir. […] On lira toujours avec plaisir chez Rulhière de curieux et saillants portraits, la description de Varsovie à l’ouverture de la diète électorale, les scènes de tumulte et de confusion grandiose dont il traduit aux yeux le drame.
Il se voit, je ne sais à propos de quel petit méfait, à la suite duquel il avait été sermonné par son précepteur, puis fouetté, puis privé de dîner, il se voit se promenant dans le jardin, et buvant, avec une espèce de plaisir amer, l’eau salée qui de ses yeux, le long de ses joues, lui tombait dans les coins de la bouche. […] Ils se firent alors un plaisir de lui montrer, dans les plus grands détails, leur exposition. […] Quelqu’un ajoute, que les officiers de marine sont unanimes à reconnaître que dans tout l’Orient, c’est seulement au Japon qu’on trouve chez la femme, la gaieté, l’entrain, un amour du plaisir, presque occidental. […] Je me promène aujourd’hui dans cette maison qui s’arrange, fait sa toilette, devient un nid d’art, et mon plaisir est tout triste, qu’il ne soit pas là, pour en jouir, pour lui aussi promener, dans ces pierres reluisant neuf, sa jolie gaîté d’autrefois.
Tous les autres genres ont sans doute participé à cette révolution, mais seulement sous le rapport des idées et du langage, et par un effet de cette influence que le théâtre, le plus populaire de tous les plaisirs de l’esprit, exerce infailliblement sur la société et sur la littérature. […] Ils ne voient, dans le bonheur et dans le plaisir, que de la prose ; et ils ne trouvent de poésie que dans le malheur et dans l’affliction. […] Si nous repoussons l’homme dont la folle et étourdissante gaîté s’exerce sur tout, et vient troubler nos pensers les plus sérieux, nous fuyons aussi celui dont l’importune et fatigante tristesse se déploie à tout propos, et vient empoisonner nos plaisirs les plus purs. […] Dans l’âge où tout invite au plaisir, quelque grande infortune les aurait-elle désabusés du songe de la vie et du néant de nos félicités ?
Il y raconte tout et peut-être au-delà ; il s’y montre à nu, sans façon et d’assez bonne grâce pour un vieillard ; épicurien comme Horace, qu’il aime à citer, sensualiste ouvertement, sans trop de cynisme, quelque peu chrétien par là-dessus, à ce qu’il dit, je ne me chargerai pas d’expliquer comment ; plein de regrets pour le passé, mais sans trace de repentir, il va, il déroule à plaisir, il recommence sa jeunesse. […] S., avec la belle Henriette, avec ces divinités sans nombre qu’il a aimées et qu’il déclare toutes suaves, c’est la facilité, l’insouciance mêlée de tendresse, le plaisir dominant, le bonheur, l’amour à l’antique, nu, comme les Grecs ioniens, comme Horace l’entendaient, comme Courier de nos jours et Béranger, un amour vif, tendre, jouissant, successif et oublieux, l’âme n’y étant que pour orner les sens, les délasser et leur sourire, non pour les torturer de ses jalousies ou de ses remords. […] Je te ferai plaisir en t’informant que j’ai si bien mis ordre à mes affaires que je serai pour le reste de mes jours aussi heureuse qu’il peut m’être donné de l’être, privée de toi.
La terre, un peu sèche et pierreuse, ne leur donne guère que du pain et du vin ; encore ce vin est-il léger, si léger que les gens du Nord, pour y prendre plaisir, le chargent d’eau-de-vie. […] Boccace prend le plaisir au sérieux ; la passion chez lui, quoique physique, est véhémente, constante même, fréquemment entourée d’événements tragiques et médiocrement propre à divertir. […] Ce plaisir ne ressemble en rien à la joie physique, qui est méprisable parce qu’elle est grossière ; au contraire, il aiguise l’intelligence et fait découvrir mainte idée fine ou scabreuse ; les fabliaux sont remplis de vérités sur l’homme et encore plus sur la femme, sur les basses conditions et encore plus sur les hautes ; c’est une manière de philosopher à la dérobée et hardiment, en dépit des conventions et contre les puissances.
Diderot abat la barrière qui séparait la peinture, l’architecture de la littérature ; il fait des œuvres des artistes une matière d’activité et de plaisir littéraires. […] Il a permis avec une douce indulgence la libre poursuite du plaisir sensuel, sous la seule condition de respecter les convenances sociales, du reste singulièrement élargies ; et voici que de la sensation physique toute pure, dans laquelle il avait simplifié l’amour, est sortie la satiété ; la vanité même, par où on en relevait la saveur, n’a pas suffi à dissiper l’impression de langueur accablante, d’écœurante monotonie, que dépose à la longue dans les cœurs le libertinage du siècle. […] Ainsi s’oriente le monde vers la « sensibilité », vers l’idée d’abord et le désir, peu à peu vers la réelle capacité des plaisirs du sentiment.
Le Chénier qu’elles nous offrent est un homme du monde, qui n’a que des sens, qui court après « le plaisir », et ne spiritualise point l’amour. Sa Camille « aux yeux noirs », sa « Julie au rire étincelant », sa Rose « dont la danse molle aiguillonne aux plaisirs », sont de faciles créatures ; et ce qu’il espère, ce qu’il se promet de ses vers, c’est qu’ils soient un code d’amour et de volupté ; c’est qu’ils échauffent les désirs dans les jeunes âmes, et qu’ils éloignent « du cloître austère » la pensée des vierges619 . […] La Grèce qu’il, aime, où il vit, c’est la Grèce aimable, légère, joyeuse de vivre, absorbant avidement de ses sens subtils tout ce que la nature a répandu de beautés et de plaisirs dans l’air, dans la lumière, dans les lignes des monts et la mobilité des îlots ; la Grèce des joies physiques et des passions naturelles, primitivement sensuelle ou voluptueuse avec raffinement, la Grèce homérique, alexandrine ou gréco-romaine, épique, idyllique, élégiaque.
En effet, la confusion première de Cavanon était de mêler son propre plaisir et une organisation d’autrui. […] L’hésitation ultime du novateur, tel que celui présenté dans le roman d’Adam, s’explique par ce doute où il s’abîme : ai-je agi pour mon plaisir ? […] La gaffe commune de ces ascètes bourgeois, pleins d’ailleurs et bedonnants de bonnes intentions, consiste dans l’oubli d’une notion expérimentale : que notre plaisir ne peut susciter la joie d’autrui, — et dans la négligence d’une vérité plus foncière : que nos mouvements affectueux sont d’ordre sentimental, tandis qu’une équitable construction sociale serait d’ordre rationnel et scientifique.
S’il en montrait moins, il me laisserait respirer et me ferait plus de plaisir : il me tient trop tendu ; la lecture de ses vers me devient une étude. […] Il a des commencements de chapitres, parfaits de ton, de tenue, de sévérité, d’une haute critique ; puis il descend ou plutôt il s’élance, il saute à des points de vue tout opposés. « Mais ce n’est point ma faute à moi, dira le critique ; je n’invente pas mon sujet, je suis obligé d’en descendre la pente, et de suivre les modernes dans ces recoins du cœur humain où ils se jettent, après que les sentiments simples sont épuisés. » — Pardon, répondrai-je encore ; votre ingénieuse critique, en faisant cela, n’obéit pas seulement à une nécessité, elle se livre à un goût et à un plaisir ; elle s’accommode à merveille de ces recoins qu’elle démasque, et dont elle nous fait sentir, en se jouant, le creux et le faux. […] Pour en sortir, préférez à tous les plaisirs des mœurs régulières et simples, des devoirs et des intérêts de tous les jours.
Des sensations de douleur et de plaisir affectant le moi, transformées par le moi en perceptions, situées par le moi dans l’espace et dans le temps, voici toute la substance de l’univers. La douleur et le plaisir déterminent ici et fixent le sujet qui disperse hors de lui, parmi les perspectives de l’espace et du temps, les causes de ses douleurs et de son plaisir.
La question touchant le plaisir ou le déplaisir que causait ou méritait de causer telle œuvre, demeurait posée ; mais on s’astreignait à savoir, en outre, quelle était la personne c’est-à-dire l’intelligence qui l’avait produite, et encore quel était l’ensemble des circonstances historiques c’est-à-dire sociales, dont sa production avait été entourée ; pour ces deux sortes de renseignements le critique avait à se doubler d’un historien ou d’un biographe et devait pénétrer dans le domaine des sciences morales. […] Mais il veut aussi le connaître, sans parvenir à voir que cette connaissance n’affecte en rien le plaisir esthétique que peuvent donner ses livres. […] Après avoir paraphrasé ses beautés, retracé sans appréciation et sans restriction le plaisir ou l’émotion qu’elle peut procurer, il l’envisage comme un moyen de connaître l’âme de son auteur, puis l’âme de ceux dont cet homme a été le contemporain et le compatriote.
Le poète, comme aussi le grand prosateur, ne livre pas du même coup tous ses genres de beautés et ne peut pas donner à la fois tous les plaisirs qu’il est capable de donner. […] Un grand plaisir, difficile pour la plupart et pour moi du moins, avec les prosateurs, très facile avec les poètes, est, non plus de lire, mais de réciter de mémoire les morceaux qui se sont fixés dans notre esprit et que nous chérissons de dilection particulière. […] Cette manière d’incubation a donc, non seulement ses plaisirs, mais ses avantages.
Je ne me donnerai pas ce plaisir ; encore moins en triompherai-je. […] C’est d’une telle évidence, et ses antithèses sont si peu « noyées », si peu « invisibles », que la plupart des critiques ont pris plaisir à les signaler. […] Un des procédés habituels de notre polémiste, nous l’avons dit, consiste à nous prêter des opinions qui ne sont pas les nôtres, pour se donner le plaisir de les réfuter. « La bête noire de M.
Je dirai de plus que le caractère de mes relations avec M. de Chateaubriand a été tout à fait méconnu et défiguré à plaisir par des critiques, venus depuis et qui ne se sont pas rendu compte des vrais rapports naturels entre une ardente jeunesse qui s’élève et une gloire déclinante qui vieillit. — Je ne désirai jamais être présenté à M. de Chateaubriand : ce fut M. […] Je vous demande mille pardons d’avoir oublié de vous la remettre : j’étais dans la distraction du plaisir de causer avec vous.
Elle leur donne le peu de temps qu’elle a, avec un plaisir qui fait regretter qu’elle n’en ait pas davantage. […] « N’espérez pas de plaisir, dit-elle à son frère, sur le récit de ce voyage, ni sur la citadelle de Tournay.
C’est un grand plaisir de comprendre. […] Taine ressent ces impressions de deux ordres si tranchés : le plus grand plaisir devant les choses naturelles, devant les champs, les montagnes, la mer, les heures diverses du soleil, et un dégoût passionné des individus qu’il rencontre ou, plus exactement, des conditions de vie où ils se meuvent.
Et les plaisirs d’un La Fontaine, malgré les apparences, ne ressemblent pas à ceux du premier venu. […] Après avoir gagné ou perdu, sans recours possible, il reste le plaisir de discuter les coups. […] Entre-temps, elle apprend avec plaisir la mort de Thésée. […] La vie future ne serait pas nécessairement une partie de plaisir. […] Leuwen s’occupait tout juste de ses affaires, et davantage de ses plaisirs.
C’est un rare plaisir que d’entendre M. […] « Le bonheur, dit-elle, c’est le plaisir fixé. […] Et il en avait d’étranges impatiences : « C’est trop fort de n’avoir ni le plaisir auquel on sacrifie sa dignité, ni la dignité à laquelle on sacrifie le plaisir ! […] Pourtant, je le revois toujours avec plaisir. […] Que de fois j’ai pris plaisir à le voir et à l’entendre !
J’aurais laissé pourtant le plaisir et la fantaisie de recomposer cette existence, bien simple d’événements, aux lecteurs de Mme de Sévigné, si un petit document inédit, mais très-intime, ne m’avait engagé à mettre la bordure pour l’encadrer. […] Bussy reçut le livre comme étant de Segrais, se disposa à le lire avec grand plaisir ; « car Segrais, disait-il, ne peut rien écrire qui ne soit joli ; » après l’avoir lu, il le critique et le loue toujours dans la même persuasion. […] Ce mot, qui la peint tout entière, est bien de celle qui disait aussi, à propos de Montaigne, qu’il y aurait plaisir à avoir un voisin comme lui109. […] Le plaisir qu’elles en ont vaut-il les railleries qu’elles en essuient ? […] Quoi qu’il en soit, l’ensemble atteste un esprit exact et fin, décemment ironique, et tel que Fontanes l’aurait pu consulter avec plaisir et profit avant de critiquer Mme de Staël.
Elle allégua pourtant les délices du bain, La curiosité, le plaisir du voyage, Cent raretés à voir le long du marécage. […] Le voyage est un arbre qui ne donne pour tout fruit que des inquiétudes. — Si les fatigues des voyageurs sont grandes, repartit l’Aimé, elles sont bien récompensées par le plaisir qu’ils ont de voir mille choses rares, et quand on s’est accoutumé à la peine, on ne la trouve plus étrange. — Les voyages, reprit l’Aimant, ne sont agréables que lorsqu’on les fait avec ses amis : car, quand on est éloigné d’eux, outre qu’on est exposé aux injures du temps, on a la douleur encore de se voir séparé de ce qu’on aime. […] Ta justice, C’est ton utilité, ton plaisir, ton caprice. […] Cependant pour salaire Un rustre l’abattait : c’était là son loyer Quoique, pendant tout l’an, libéral il nous donne Ou des fleurs au printemps, ou des fruits en automne, L’ombre l’été, l’hiver les plaisirs du foyer. […] L’homme ne l’abat que pour le plaisir d’être méchant.
Une foule d’hommes vivants ont connu l’inventeur, dont le nom réveille constamment dans sa patrie l’idée de l’antique hospitalité, du luxe élégant et des nobles plaisirs. […] Vous pourrez, quand il vous plaira, vous donner le plaisir de vérifier ce texte. […] Mais comment pourra-t-il accomplir la loi, lui qui est un être moral et miséricordieux ; lui qui est né pour aimer ; lui qui pleure sur les autres comme sur lui-même, qui trouve du plaisir à pleurer, et qui finit par inventer des fictions pour se faire pleurer ; lui enfin à qui il a été déclaré qu’on redemandera jusqu’à la dernière goutte du sang qu’il aura versé injustement ? […] Nous ne pouvons résister au plaisir d’en citer quelques fragments, et ces fragments ont pour nous un charme plus exquis encore, parce que nous pouvons y ajouter son accent ému de tendresse et sa physionomie rayonnante de saine gaieté. […] Ses pensées passeront ou sont passées, mais son style restera la durable admiration de ceux qui lisent pour le plaisir de lire.
Molière n’avait point encore auprès du roi un accès assez libre : de plus, ce n’était pas ce prince qui donnait la fête, c’était Fouquet ; et il fallait ménager au roi le plaisir de la surprise. Cette pièce fit au roi un plaisir extrême, quoique les ballets des intermèdes fussent mal inventés et mal exécutés. […] Les fêtes que Louis XIV donna dans sa jeunesse, méritent d’entrer dans l’histoire de ce monarque, non-seulement par les magnificences singulières, mais encore par le bonheur qu’il eut d’avoir des hommes célèbres en tous genres, qui contribuaient en même temps à ses plaisirs, à la politesse, et à la gloire de la nation. […] Cette pièce réussit beaucoup dans une cour qui ne respirait que la joie, et qui au milieu de tant de plaisirs, ne pouvait critiquer avec sévérité un ouvrage fait à la hâte pour embellir la fête. […] Les fous y étaient aussi à la mode ; chaque prince et chaque grand seigneur même avait son fou ; et les hommes n’ont quitté ce reste de barbarie, qu’à mesure qu’ils ont plus connu les plaisirs de la société et ceux que donnent les beaux-arts.
Nous croyons l’avoir déjà dit dans un de nos précédents articles et il n’est pas inutile de le répéter quelquefois, le monde lisant d’aujourd’hui est ainsi fait, que malgré ses airs dédaigneux, il ne saurait prendre plaisir qu’aux productions d’une littérature médiocre. […] La femme, dans ces poésies, est un être essentiellement fait pour le plaisir. […] Nul, sans doute, n’a pu lire sans quelque plaisir le morceau suivant : Regrettez-vous le temps, où le ciel sur la terre Marchait et respirait dans un peuple de dieux ! […] Avec une pareille donnée, on a, certes, les coudées franches pour représenter le bonheur, ou au moins le plaisir ; le poète a cependant tiré un très médiocre parti de tant d’éléments réunis à si grands frais. […] Théophile Gautier nous parle incessamment de festins où on servait des langues de phénicoptères et des foies de scarrus, quand il nous montre de belles dames vêtues de conopoeums et de calasiris, nous avouons humblement que notre plaisir est fort médiocre.
Et, comme je l’étais aussi, cela me fit plaisir. […] Il prolonge et renouvelle quatre ou cinq fois l’épreuve, pour le plaisir. […] Mme Guichard lui donne de l’argent, et il lui donne du plaisir. […] Il est vrai que vous aurez eu le plaisir de tuer l’homme que vous haïssiez (plaisir d’une minute) et que vous êtes du moins bien sûr qu’il ne possédera plus le corps de votre femme. […] Je ne saurais dire le plaisir que me fait cette combinaison originale.
Je vois avec plaisir que vous allez mieux. […] J’ai parcouru ce volume avec un extrême plaisir. […] C’est prévu et ça fait toujours plaisir. […] On l’a dit mille fois, et j’ai plaisir à le redire. […] Et cela est un plaisir.
On y voit qu’il fit, au printemps de l’année suivante probablement (car les dates précises n’y sont point marquées), un voyage près de Coblentz pour s’y distraire, et qu’il y devint légèrement amoureux d’une des filles de Mme de La Hoche : « Rien n’est plus agréable, dit-il à ce sujet, que de sentir une nouvelle passion s’élever en nous lorsque la flamme dont on brûlait auparavant n’est pas tout à fait éteinte : ainsi à l’heure où le soleil se couche, nous voyons avec plaisir l’astre des nuits se lever du côté opposé de l’horizon : on jouit alors du double éclat des deux flambeaux célestes. » Cela nous apprend du moins que l’amour qu’il pouvait avoir gardé pour Charlotte n’avait rien de furieux ni d’égaré. […] Il est maintenant suspendu au mur de ma chambre, et me fait aujourd’hui autant de plaisir qu’hier. […] Je suis presque aussi heureux que deux personnes qui s’aiment comme vous ; il y a en moi autant d’espérance qu’il y en a chez des amoureux ; j’ai même depuis pris plaisir à quelques poésies et autres choses pareilles. […] Mais il apprendra avec plaisir que j’ai écrit à son cher ami, car je ne saurais vous dire combien il a toujours parlé de vous et de votre famille. […] Il a dans le passé, dans le souvenir des jours qu’il a vécu à Wetzlar, au sein de la famille allemande, entre Charlotte et Kestner, sa saison d’âge d’or, un cercle pur et lumineux que rien n’éclipsera : « Vous avez été pour moi jusqu’ici, écrira-t-il à Kestner des années après, l’idéal d’un homme heureux par l’ordre et par la modération des désirs. » — « J’apprends avec plaisir, lui dit-il encore, ce que vous m’écrivez de vos enfants.
Le tact est merveille qui, sans totalement en transformer aucune, opère, sur la scène et dans la symphonie, la fusion de ces formes de plaisir disparates. […] Et l’on assista à ce spectacle unique : un train de plaisir organisé pour conduire les Berlinois au spectacle à Schwerin ! […] Naturellement, je me décidai tout de suite à prendre ce fameux train de plaisir. […] À la gare, une foule attendait cette nouveauté, ce train de plaisir qui arrivait avec une charge de gens illustres, et je remarquai un carrosse étrange, le carrosse de la cour, un carrosse de gala qui avait cahoté sur les pavés inégaux des rues Dieu sait combien de générations de grands-ducs de Mecklembourg, et qui s’ébranla avec un bruit de ferrailles. […] J’ai entendu les Maîtres chanteurs à Londres, fort bien interprétés par les chanteurs de Münich et de Vienne et par un orchestre que dirigeait Richter, et l’indifférence des femmes décolletées et des hommes en habit venus là pour la mode, m’a gâté mon plaisir.
Si parfois le plaisir se présente, c’est un plaisir haletant ; la fatigue est plus vive que la joie. […] Qu’une occasion de plaisir se présente, elle la saisira sans remords. […] Cependant elle a fait plaisir au troisième acte. […] C’est dégrader à plaisir l’intérêt dramatique. […] On relit ce qu’on a d’abord admiré, on cherche à deviner la cause de son plaisir.
Enfin nul mortel n’a pu délier le Nœud gordien du plaisir et de la peine que par le fer qui tranche la vie. […] Il craignait comme nous les outrages des hommes ; comme nous peut-être Il regrettait ceux qu’Il chérissait, sa mère et ses disciples ; comme nous, et mieux que nous peut-être, Il aimait cette terre féconde et les célestes plaisirs d’une active bienfaisance dont Il remerciait son Père chaque jour. […] Il prétendait que les hommes ne devaient avoir que le plaisir pour objet dans ce monde ; mais comme il est très difficile de s’en assurer les jouissances, il conseillait la mort à ceux qui ne pouvaient les obtenir. […] N’y a-t-il pas bien plus de vraie chaleur dans ce qui est compris par tous, que dans ces natures humaines inventées, pour ainsi dire, comme une fiction faite à plaisir ? […] Hier notre ami Asham vint me voir et sa présence me causa d’abord un vif plaisir ; elle réveilla dans mon esprit le souvenir des heures si douces et si fécondes que j’ai goûtées avec lui dans l’étude des anciens.
Cela me fit plaisir, c’était quelqu’un. […] Il me la passa, et j’y bus un peu de mauvais vin blanc avec beaucoup de plaisir ; je lui rendis le coco. […] « Le bon chef de bataillon s’apprêta solennellement à parler, avec un plaisir d’enfant. […] Ça me faisait plaisir à voir, moi. […] Si elle pouvait conserver les bagues que sa mère lui a données, cela me ferait bien plaisir.
Je demande si cela ne vaudrait pas mieux pour la gloire du poète et pour le plaisir du lecteur. […] N’est-ce pas lui qui a fait ces vers délicieux qui expriment comme dans un regret rapide et sobre les premières grâces de la vie : Tout le plaisir des jours est en leurs matinées ; La nuit est déjà proche à qui passe midi. […] On y reconnaît un amour reposé des champs, non pas tant pour le plaisir de les chanter que pour la douceur et l’habitude d’y vivre. […] Ne forme que de saints désirs, Et te sépare des plaisirs Dont la molle douceur te fait aimer la vie.
Cette admiration pour un empire de plus de deux cents millions d’hommes, où il n’y a pas un seul homme qui ait le droit de se dire libre ; cette philosophie efféminée qui donne plus d’éloges au luxe et aux plaisirs qu’aux vertus ; ce style toujours élégant et jamais énergique, annoncent tout au plus l’esclave d’un électeur de Hanovre. » Ce jour-là Mirabeau avait évidemment besoin de faire l’orateur et de se donner un adversaire qu’il pût invectiver ; il se figura Gibbon en face de lui et lança son apostrophe. […] Deyverdun prend feu et lui répond (10 juin 1783) par l’aperçu d’une vie heureuse faite pour tenter ; il connaît bien son ami, il veut l’arracher à une condition politique qui n’est pas faite pour lui, et où sa nature véritable a dû nécessairement souffrir : « Rappelez-vous, mon cher ami, lui dit-il, que je vis avec peine votre entrée dans le Parlement, et je crois n’avoir été que trop bon prophète : je suis sûr que cette carrière vous a fait éprouver plus de privations que de jouissances, beaucoup plus de peines que de plaisirs. J’ai cru toujours, depuis que je vous ai connu, que vous étiez destiné à vivre heureux par les plaisirs du cabinet et de la société ; que toute autre marche était un écart de la route du bonheur, et que ce n’étaient que les qualités réunies d’homme de lettres et d’homme aimable de société, qui pouvaient vous procurer gloire, honneur, plaisirs, et une suite continuelle de jouissances.
jamais je n’aurai eu un plaisir plus vif que de m’entendre réciter mot pour mot. […] Ce qui est plus piquant, c’est que M. de Morville, son ami intime et devenu ministre des Affaires étrangères à la place du cardinal Dubois, ayant été choisi par l’Académie française, dont il était membre, pour le recevoir, n’eut pas le temps d’écrire son Discours et demanda au récipiendaire de le lui composer ; ce que fit volontiers Hénault, se donnant le plaisir de se célébrer lui-même par la bouche de son ami. […] Un jour, âgé de quatre-vingts ans, il écrivit à Voltaire une lettre fort belle de sens et d’intention ; il venait de lire une des facéties irréligieuses que ce versatile génie avait publiées sous le nom d’un abbé Bazin, et où il sapait à plaisir toutes sortes de choses respectables. […] [NdA] Les amateurs de la bonne littérature historique apprendront avec plaisir que M.
Attendant vos instructions et le plaisir de jouir de vos lumières, je vous assure que je suis avec bien de l’estime Votre très affectionné, Frédéric. […] Avec quel plaisir je recevrai vos instructions, et je jouirai de vos lumières ! […] Si elles nous donnent quelques plaisirs, elles nous les font payer bien cher. […] Il faut opposer à la douleur l’occupation et le plaisir.
Vous n’avez aucun revenu, vous ne voulez plus écrire : comment pourrez-vous vivre, si vous vous obstinez à refuser à vos meilleurs amis le plaisir et la gloire de vous secourir ? […] Ce serait donc seulement le plaisir de faire le mal et de se déshonorer gratuitement qui lui aurait inspiré les noirceurs dont vous l’accusez. […] C’est la confiance, c’est l’amitié qui diminuent les peines de la vie, qui les entremêlent de plaisir et d’agrément. […] Je ne crois pas avoir à m’excuser auprès de mes lecteurs pour leur avoir donné ici tant de pages qui ne sont pas de moi et qui sont de meilleurs que moi ; comme la plupart étaient inédites ou peu connues, j’imagine qu’on aura pris, à les lire, quelque chose du plaisir que j’ai eu moi-même à les rassembler.
De telles historiettes à la Tallemant qui circulaient dans Paris, et que chacun brodait à plaisir, arrivaient à l’oreille du roi lui-même qui faisait semblant d’en rire, mais qui, tout en continuant à se servir de l’homme, tirait dès lors la barre à la fortune et au crédit de l’ambitieux. […] Ce prélat, en effet, « qui se faisait un plaisir d’être le pacificateur de tous les différends d’État » eut, dans le principe, quelque envie de s’entremettre pour réconcilier Furetière avec l’Académie. […] Le rôle de spectateur désintéressé était évidemment le meilleur ; c’était celui de l’abbé Legendre : « Tant que dura, dit-il, cette comédie dont je connaissais les acteurs, le plaisir que j’avais les après-dîners d’en apprendre les scènes nouvelles aidait à me délasser du travail sérieux du matin. » Quelques années après, lors de la querelle des Anciens et des Modernes, qui s’émut à l’occasion du poème du Siècle de Louis le Grand, lu par Perrault à l’Académie, en 1687, M. de Harlay ne pensa plus à rétablir la paix et l’union parmi ses confrères ; mais il s’amusa à faire traiter devant lui la question ; il fit plaider le pour et le contre par deux avocats d’office qu’il désigna : Martignac, ancien précepteur de son neveu, et l’abbé de La Vau. […] L’un et l’autre s’acquittèrent assez mal de leur tâche : « Le prélat n’en fut point fâché, remarque à ce sujet Legendre, qui a bien son grain de causticité ; il aimait à briller aux dépens d’autrui ; c’était assez sa coutume de faire agiter devant lui des problèmes de toute sorte, afin d’avoir le plaisir de donner à ce qu’on avait dit, et qu’il ne manquait point de résumer exactement, un tour si fin, si délicat, que l’on admirait dans sa bouche ce qui avait paru plat dans celle des autres. » On aime d’ordinaire ce qu’on fait bien : le prélat aimait à jouer aux arbitrages.
Un jour à Bagneux, maison de campagne de Mme Davillier, après une longue discussion sur l’opéra de Fernand Cortez, sur lequel on avait pris plaisir à le chicaner : « Vous avez beau dire, s’écria Jouy en ne plaisantant qu’à demi, il y a dans cette pièce un acte excellent que vous n’êtes pas assez forts pour découvrir. » Béranger, qui avait retenu le mot, se lève au milieu de la nuit, appelle deux des interlocuteurs qui étaient ses voisins, et ils s’en vont frapper à la porte de la chambre de Jouy qui s’éveille en sursaut. […] Coulmann l’alla voir à Sainte-Pélagie, et il rapporte l’entretien suivant ou plutôt le soliloque du prisonnier : « L’affluence à mon procès m’a fait plaisir, disait Béranger, mais je sais ce que cela vaut. […] Coulmann, qui cite avec un certain plaisir tous ces mots à charge sur Benjamin Constant, les rétracte ou les adoucit à d’autres endroits, et il s’en réfère à une lettre de Sismondi écrite au lendemain de la mort du célèbre tribun et adressée à Mlle Eulalie de Sainte-Aulaire. […] J’avoue que je m’en étais donné le plaisir ; je supprime ce que j’avais écrit d’abord.
Pourquoi dans ces plaisirs sans nombre, Oublis du terrestre séjour, Ombre rêveuse, aimai-je une Ombre Infidèle à l’aube du jour166? […] Mais l’hiver, quel plaisir, quand le matin aurait secoué ses bouquets de givre sur mes vitres gelées, d’apercevoir bien loin, à la lisière de la forêt, un voyageur qui va toujours s’amoindrissant, lui et sa monture, dans la neige et dans la brume ! Quel plaisir, le soir, de feuilleter, sous le manteau de la cheminée flambante et parfumée d’une bourrée de genièvre, les preux et les moines des chroniques, si merveilleusement portraits qu’ils semblent, les uns jouter, les autres prier encore ! Et quel plaisir, la nuit, à l’heure douteuse et pâle qui précède le point du jour, d’entendre mon coq s’égosiller dans le gelinier et le coq d’une ferme lui répondre faiblement, sentinelle lointaine juchée aux avant-postes du village endormi !
Il semblait voir une princesse qui jouait la comédie pour son plaisir. […] Que vous en reviendra-t-il, que le plaisir de m’exposer à des tracasseries désagréables, pour ne pas dire pis ? […] Les jours où elle n’était pas trop envahie par les duchesses et par les personnes de bel air, Mlle Le Couvreur se plaisait à recevoir ses amis : Ma vanité, disait-elle, ne trouve point que le grand nombre dédommage du mérite réel des personnes ; je ne me soucie point de briller ; j’ai plus de plaisir cent fois à ne rien dire, mais à entendre de bonnes choses, à me trouver dans une société de gens sages et vertueux, qu’à être étourdie de toutes les louanges fades que l’on me prodigue à tort et à travers. […] Celle-ci a laissé de Fontenelle un portrait charmant qui la peint pour le moins autant elle-même que le philosophe qu’elle savait si bien apprécier : Les personnes ignorées, écrit Mlle Le Couvreur, font trop peu d’honneur à celles dont elles parlent, pour oser mettre au grand jour ce que je pense de M. de Fontenelle ; mais je ne puis me refuser en secret le plaisir de le peindre ici tel qu’il me paraît.