/ 1718
453. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

comme il a percé à jour, comme il nous a révélé le secret des fortunes politiques ! […] Scribe, c’est tout simplement le chiffre et la rapidité de sa fortune. […] Oui, mais ni la gloire, ni la fortune ne lui manquaient. […] Il ne trouvait pas de fortune à sa taille. […] Irai-je mendier la fortune et les applaudissements de cette foule insolente ?

454. (1902) La politique comparée de Montesquieu, Rousseau et Voltaire

Ces inégalités sont bonnes, et les grandes fortunes et le luxe sont des stimulants sociaux et des sources artificielles de richesse qui font vivre le pauvre mieux qu’il ne vivrait s’ils n’existaient pas. […] Ce qu’il y a de curieux, c’est que Frédéric II lui-même ne donne point dans cette théorie de l’utilité des grandes fortunes et du grand luxe. […] Dès qu’un homme a cette provision par devers lui, il ne doit pas s’embarrasser de sa fortune : il trouve dans le cloître une vie tranquille, qui dans le monde lui aurait coûté des sueurs et des peines. […] Il faut une surpopulation, croit Montesquieu, pour qu’il y ait beaucoup de gens qui « aient leur fortune à faire » et pour qu’il y en ait trop pour les besoins de l’agriculture, afin qu’un certain nombre soient rejetés sur le commerce, l’industrie, l’invention. […] De ces dogmes à proscrire, l’intolérance est certainement le plus odieux, mais il faut le prendre à sa source ; car les fanatiques les plus sanguinaires changent de langage selon la fortune et ne prêchent que patience et douceur quand ils ne sont pas les plus forts.

455. (1890) Causeries littéraires (1872-1888)

Ce qui étonnerait plus, c’est qu’il eût porté modestement le poids de sa fortune. […] Pourquoi cette fortune laissée au second des deux frères et pas aux deux ? […] mais : Ma fortune pour un bon vermifuge ! […] Voilà pour la fortune. […] On lui avait dit assez souvent que sa voix était une fortune.

456. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Theuriet, André (1833-1907) »

. — La Fortune d’Angèle (1876). — Raymonde (1877). — Nos enfants (1878). — Sous-Bois (1878). — Les Nids (1879). — Les Fils Maugars (1879). — La Maison des deux Barbeaux (1879). — Toute Seule (1880). — Madame Véronique (1880). — Sauvageonne (1880). — Les Enchantements de la forêt (1881). — Les Mauvais Ménages (1889). — Madame Heurteloup (1889). — Le Journal de Tristan (1883). — Michel Verneuil (1883)

457. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Introduction » pp. 5-10

À ceux qui, dédaigneux des fortunes passagères, ont entrepris de renouveler, par une application plus stricte de la tradition ; la vieille vigueur française, nous réserverons notre approbation.

458. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

Quand la mauvaise fortune le force à consulter les autres, il fait un beau discours sur le bien public, et ne songe qu’au sien. […] Il n’y avait pas d’autre voie pour faire fortune. […] On l’a « présenté » ; il assiste « au coucher. » Il est devenu légiste, avocat, savant, philosophe, le tout au profit de sa fortune. […] Le noble a fait fortune en se donnant la peine de naître. […] Au compte de ces gens, Le marchand de sa peau devait faire fortune.

459. (1867) Cours familier de littérature. XXIV « CXLIIIe entretien. Littérature cosmopolite. Les voyageurs »

Saroutaki était fils d’un boulanger de Tauris, capitale de la Médie, qui, n’ayant pas moyen de le pousser, l’envoya à Ispahan chercher fortune. […] On sera sans doute bien aise d’apprendre la vengeance qui fut faite de la mort de ce vieux ministre, et je la raconterai d’autant plus volontiers, qu’elle n’est pas moins tragique ni moins exemplaire, et qu’on peut bien assurer qu’il n’a été jamais parlé de grande fortune sitôt faite et sitôt détruite. Janikan, applaudi du roi extérieurement, comme je viens de le dire, et de toute la cour, qui l’allait féliciter de son lâche assassinat comme d’un rare exploit de guerre, crut qu’il était monté en haut de la roue ; et il y était effectivement monté, mais c’était pour rendre sa chute plus éclatante et plus terrible que la fortune l’avait comme guindé si haut. […] Janikan, ébloui de sa fortune et emporté de la haine qu’il avait pour la reine mère, à cause du défunt, répondit fièrement à l’eunuque: « Saroutaki était un chien et un voleur qu’il y a longtemps qu’on devait faire mourir. […] Il était, dis-je, le gouverneur de Hamzeh-Mirza, celui que les grands voulaient élever sur le trône ; et, par conséquent, il devait plus qu’aucun autre appuyer leurs suffrages, puisque, apparemment, la grandeur de son illustre nourrisson allait augmenter infiniment son crédit, et lui présentait une fortune la plus éclatante qu’un homme de sa condition pouvait espérer.

460. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « LEOPARDI. » pp. 363-422

Dans la préface en prose de cette canzone, Leopardi rappelait le mot de Pétrarque : Ed io son di quei che’l pianger giova (Et moi aussi je suis de ceux qui se plaisent à la plainte) : « Je ne dirai pas, ajoute-t-il, que la plainte soit ma nature propre, mais une nécessité des temps et de la fortune. » Et en effet on ne peut douter, rien que d’après ces débuts, de la nature avant tout mâle et antique de Leopardi ; elle continuera de se dessiner de plus en plus. […] Les sages, éclairés sur la vérité toute nue, durent chercher un autre recours, non plus contre la fortune, mais contre la vie elle-même. […] Le tout se résume dans cette épitaphe composée par Ottonieri pour lui-même : les os de philippe ottonieri, né pour les œuvres de vertu et pour la gloire : il a vécu oisif et inutile ; il est mort sans renom, non pas sans avoir connu sa nature et sa fortune. […] Sinon que, pour consolation en ces derniers temps, j’ai acquis des amis tels que vous ; et votre compagnie, qui me tient lieu de l’étude, et de tout plaisir et de toute espérance, serait presque une compensation à mes maux, si la maladie me permettait d’en jouir comme je le voudrais, et si je ne prévoyais que bientôt peut-être ma fortune va m’en priver encore, en me forçant à consumer les années qui me restent, sevré des douceurs de la société, en un lieu beaucoup mieux habité par les morts que par les vivants ; votre amitié me suivra toutefois, et peut-être la conserverai-je même après que mon corps, qui déjà ne vit plus, sera devenu poussière. […] Parlant ailleurs de la gloire, à la fin de son Épître au comte Pepoli, Leopardi l’appelle « non pourtant une vaine déesse, mais une déesse plus aveugle que la fortune, que le destin et que l’amour. » 154.

461. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Le Chevalier de Méré ou De l’honnête homme au dix-septième siècle. »

Mais, du temps que j’avois l’honneur de de vous approcher, je m’apercevois que vous saviez toujours distinguer le vrai mérite parmi de certaines choses brillantes qui ne dépendent que de la fortune, et cela me fait espérer que vous ne désapprouverez pas la liberté que je prends de vous écrire. […] Après avoir nommé les personnes les plus considérables qui étaient de l’intimité de M. de Méré, l’abbé Nadal continue en ces termes : « C’étoit là toute sa société, si on ose y ajouter encore une personne illustre dont le nom emporte toutes les idées les plus sublimes de l’esprit, de la vertu, de la grandeur d’âme et de tant d’autres qualités qui mettent encore-au-dessous d’elle tout ce que la fortune a de plus élevé et de plus éblouissant. […] Aussi la vraie honnêteté est indépendante de la fortune ; comme elle s’en passe au besoin, elle ne s’y arrête pas chez les autres ; elle n’est dépaysée nulle part : « Un honnête homme de grande vue est si peu sujet aux préventions que, si un Indien d’un rare mérite venoit à la cour de France et qu’il se pût expliquer, il ne perdroit pas auprès de lui le moindre de ses avantages ; car, sitôt que la vérité se montre, un esprit raisonnable se plaît à la reconnoître, et sans balancer. » Mais ici il devient évident que la vue du chevalier s’agrandit, qu’il est sorti de l’empire de la mode ; son savoir-vivre s’élève jusqu’à n’être qu’une forme du bene beateque vivere des sages ; son honnêteté n’est plus que la philosophie même, revêtue de tous ses charmes, et il a le droit de s’écrier : « Je ne comprends rien sous le ciel au-dessus de l’honnêteté : c’est la quintessence de toutes les vertus. » Vous êtes-vous jamais demandé quelle nuance précise il y a entre l’honnête homme et le galant homme  ? […] Ces maîtres du monde, qui sont comme au-dessus de la fortune, ne regardent qu’indifféremment la plupart des choses que nous admirons, et, parce qu’ils en sont peu touchés, ils n’en parlent que négligemment. […] Je vois, de plus, que ce qui sert d’un côté nuit d’un autre ; que le plaisir fait souvent naître la douleur, comme la douleur cause le plaisir, et que notre félicité dépend assez de la fortune et plus encore de notre conduite. — Je l’écoutois doucement quand on nous vint interrompre, et j’étois presque d’accord de tout ce qu’il disoit.

462. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

La gloire et la vertu consistent dans la puissance ; les scrupules sont faits pour les âmes viles ; le propre d’un cœur haut est de tout désirer et de tout oser. « Ici, la conscience est une souillure, la fortune tient lieu de vertu, la passion de loi, la complaisance de talent, le gain de gloire, et tout le reste est vain. » Ravi de cette grandeur d’âme, Séjan s’écrie : Royale princesse ; À présent que je vois votre sagesse ; votre jugement ; votre énergie, Votre décision et votre promptitude à saisir les moyens De votre bien et de votre grandeur, je proteste Que je me sens tout enflammé et tout brûlé D’amour pour vous125. […] Il est comme le joueur à demi ruiné, qui d’une main convulsive jette sur le tapis le reste de sa fortune. […] Ne savez-vous pas que je vous connais pour un âne, Et que vous auriez été bien volontiers un maquereau, Si la fortune l’avait souffert ? […] Mais Mosca, qui a le testament, agit en maître, et demande à Volpone la moitié de sa fortune. […] Hear you ; do you not know, I know you an ass, And that you would most fain have been a wittol, If fortune would have let you ?

463. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

Je n’ai jamais su de quoi pouvait venir ce caprice d’acrimonie qui donnait le droit de douter de la bonté de cœur de ce vieillard. « Vous êtes un homme de bien que j’ai toujours voulu prendre pour un homme d’État, parce que la fortune, maîtresse des destinées, vous a fait naître illustre, riche et beau. […] C’était une jeune Anglaise, d’une candeur et d’une bonté modestes, qui lui assurait le bonheur ; elle lui promettait aussi un jour une immense fortune. Il jouit assez longtemps de cette fortune en espérance. […] Il se conduisit en homme d’honneur, et resta neutre entre la fortune possible et sa fortune arriérée.

464. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

Féval, qui a pris la succession d’Alexandre Dumas et qui aurait été, s’il l’eût voulu, assez riche de sa fortune personnelle, Féval pourrait se garder des dangers de la production trop facile en portant et en creusant longtemps ses idées, et surtout ! […] Le chevalier de Kéramour, un Breton du temps de Louis XV, ruiné de mère en fille par la plus singulière des combinaisons, s’en va chercher fortune loin de son pays, et, après des complications diverses et des péripéties de toute espèce, il finit par épouser sa petite femme d’enfance, — sa cousine Vivette, — avec laquelle il est heureux et à qui il fait deux enfants, garçon et fille : le souhait du Roi ! […] Un tel livre, tout en détails, ne se raconte point, mais ce sont les détails qui font la fortune des livres, et les détails de celui-ci sont ravissants. […] Rien ne restait de la fortune si cavalièrement conquise à la pointe de sa plume, et sa plume, qui avait été d’or, ne valait pas même à présent l’outil du plus vulgaire ouvrier, puisqu’il avait peur d’elle au point de la condamner à l’immobilité. » — Peur d’elle ! […] Il s’est souvenu que, même dans un siècle très grand, un livre intitulé les Petites Lettres, qui devinrent plus tard : les Provinciales, firent leur fortune, justement contre les Jésuites, et il a écrit pour eux aussi un petit livre.

465. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

À peine lui apprit-on à lire et à écrire, et il demeura tellement ignorant que les choses les plus connues d’histoire, d’événements, de fortune, de conduites, de naissance, de lois, il n’en sut jamais un mot. […] C’est une lourde réalité, matériellement immense (effroyable moralement). » L’ouvrage de Weiss nous permet de suivre pas à pas la fortune de nos proscrits.‌ […] Nous savons également que notre défaite de 1870 nous fut infligée par cette Allemagne dont les proscrits français déterminèrent la fortune. […] La Prusse devrait élever un monument national de reconnaissance à Bossuet, à celui qui fit sa fortune. […] Si vous suivez, hors de France, la fortune de ces proscrits chassés pour leur libre foi, vous constaterez qu’une fraction d’entre eux alla s’établir en Prusse et détermina l’hégémonie de ce royaume.

466. (1853) Propos de ville et propos de théâtre

mon oncle, répondit la marquise avec mélancolie, vous me parlez de ma fortune, est-ce que cela fait le bonheur ? […] cher ami, que je suis content de vous voir, — vous allez me donner un renseignement, — qu’est-ce qu’on me dit là-bas que vous avez fait une grosse fortune ? […] Dans les salons d’un des principaux restaurants, après un souper très-animé qui avait succédé au bal des artistes, la nappe se changea en tapis vert, et servit de champ de bataille aux coups de fortune d’un lansquenet formidable. […] Jadis fondateur d’une société placée sous le patronage d’un astre qui jouit d’une certaine célébrité, il a amassé dans cette entreprise, qui assurait contre l’un des quatre éléments, une fortune qui lui permet de se la passer douce, comme on dit dans un certain monde. […] Mais puisque je retrouve un ami si fidèle, Ma fortune va prendre une face nouvelle.

467. (1855) Louis David, son école et son temps. Souvenirs pp. -447

L’enthousiasme et la confiance qu’inspiraient sa fortune et ses talents étaient tels à ce moment, que tous les partis rattachèrent leurs espérances diverses à lui seul. […] Le temps de l’orage révolutionnaire avait donc été désastreux pour sa fortune et même pour celle de sa femme, qui avait reçu ses revenus en assignats. […] Adoré de sa famille, né avec de la fortune, cher à tous ses camarades à cause de sa bonté et de sa bienfaisance, il fut l’élève chéri, l’ami de son maître. […] Trois choses ont empêché Girodet de goûter le moindre repos pendant toute sa vie : la peinture, le goût des vers et la gestion de sa fortune. […] Girodet était né avec de la fortune, et elle s’accrut singulièrement en 1812, lorsque son père adoptif, M. de Triozon, lui légua encore la sienne en mourant.

468. (1856) Cours familier de littérature. I « Ier entretien » pp. 5-78

On lisait sur sa physionomie ce mot de Machiavel sur la fortune : « Je donne carrière à sa malignité, satisfait qu’elle me foule ainsi aux pieds pour voir si à la fin elle n’en aura pas quelque honte ! […] Il avait les goûts élégants et nobles dans une misérable fortune ; il adorait mon père comme un modèle du gentilhomme loyal et cultivé, qui l’entretenait de cour, de guerre et de chasse ; il aimait M. de Vaudran, qui lui avait ouvert sa bibliothèque ; il commençait à m’aimer, tout enfant que j’étais moi-même, de cette amitié qui devint mutuelle quand les années finirent par niveler les âges alors si divers ; amitié restée après sa perte au fond de mon cœur comme une lie de regrets qu’on ne remue jamais en vain. […] XXII C’était l’habitation d’un vieillard dont j’ai parlé ailleurs, et qu’on appelait M. de Valmont ; les deux sœurs chez lesquelles il habitait depuis de longues années, sans qu’on lui connût de relation de parenté avec elles, étaient du pays ; elles possédaient pour toute fortune cette maison, ce jardin, ce verger, et quelques petits champs de vigne hors de l’enceinte, sur la colline de Bussières. […] venait à arrêter un moment ma plume, l’outil assidu que j’use pour eux, ces braves amis péricliteraient avec moi ; ils seraient obligés de chercher dans mes cendres leur fortune ; ils la retrouveraient tout entière, sans doute, mais ils ne la retrouveraient que sous mes démolitions.

469. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Appendice » pp. 453-463

D’autres enfin n’ont pas eu du tout d’anathème : il ont osé soutenir en moralistes hardis, mais surtout en poètes, qu’il faut dans ce monde nouveau, où la nature domptée par la science devient la première collaboratrice de l’homme, marcher résolûment à la fortune pour en faire un large et magnifique usage, conquérir l’or pour le répandre ensuite d’une main souveraine, pour fertiliser en tous sens et renouveler la face de la terre. […] Le poète au début se représente une maison ou plutôt un village abandonné : de pauvres Alsaciens sont partis, au bruit des merveilles de la Californie, pour aller tenter fortune.

470. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Mémoires du duc de Luynes sur la Cour de Louis XV, publiés par MM. L. Dussieux et E. Soulié. » pp. 369-384

On pardonne à la fortune du connétable, quand on voit le noble usage qu’en ont fait ses descendants. […] La mort subite de Mme de Vintimille à Versailles, à la suite de sa première couche, vient tout confondre et porter un coup bien rude au cœur de Mme de Mailly comme à sa fortune ; et quand une autre sœur (car on ne sort point d’abord de cette famille de Nesle) se présente pour disputer l’héritage de Mme de Vintimille, cette fois c’est une rivale qui s’annonce, une ambitieuse véritable, non plus une femme à rien partager : Mme de La Tournelle, la future duchesse de Châteauroux, veut et impose des conditions éclatantes, qui vont mettre fin au règne traînant de son aînée.

471. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mélanges religieux, historiques, politiques et littéraires. par M. Louis Veuillot. » pp. 44-63

Il eut notamment la fortune de connaître à Périgueux le général Bugeaud, qu’il devait retrouver plus tard, et dont le rude et mâle bon sens, plus probe que délicat, lui imprima un pli. […] Croirait-on, à les voir couverts de cheveux blancs, de croix d’honneur, de lunettes d’or, de toges et d’habits brodés, fiers, bien nourris, maîtres de cette société qu’ils administrent, qu’ils jugent et qu’ils grugent…, croirait-on que leurs calculs sont dérangés, que leur sommeil est troublé par le bruit du fouet dont ils ont eux-mêmes armé un pauvre petit diable sans nom, sans fortune et sans talent… ?

472. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

Dans toutes les conditions et toutes les carrières, en quelque rang que la fortune les ait fait naître, nombre de natures généreuses s’y livrent par le seul entraînement d’une vocation irrésistible. » M.  […] Le point faible, toutefois, est que ce mobile de l’amour de l’humanité et de la civilisation n’est, en général, que fort secondaire et ne vient qu’en second ou en troisième lieu chez les meilleurs d’entre les plus éclairés esprits de nos jours ; il ne vient qu’après les soins de la famille, de la fortune personnelle, de la réputation, de la carrière à courir : c’est déjà quelque chose.

473. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Léonard »

Absent, il y pensa toujours ; elle exerça sur lui, à distance et à travers toutes les vicissitudes de fortune, une attraction puissante et pleine de secrètes alternatives. […] Je graverai sur quelque hêtre : Adieu fortune, adieu projets !

474. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

Mais un autre événement marqua bien autrement la révolution qui s’opérait dans la fortune de madame de Maintenon : ce fut la séparation qui eut lieu entre le roi et madame de Montespan, après les prédications de la semaine sainte, où le P.  […] C’est cette mélancolie qui lui rendait insupportables des empressements adressés à sa faveur apparente ; c’est cette sorte de tristesse que madame de Coulanges, femme spirituelle, mais légère et vaniteuse, prenait pour un refroidissement opéré par une fortune inespérée.

475. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Madame Récamier. » pp. 121-137

Récamier avait essuyé de grands revers de fortune : la première fois au début de l’Empire, la seconde fois dans les premières années de la Restauration. […] Cousin sur Madame de Sablé, 1854, fin du chapitre ier , p. 63 : « Elle avait, dit-il de Mme de Sablé, de la raison, une grande expérience, un tact exquis, une humeur agréable. — Quand je me la représente telle que je la conçois d’après ses écrits, ses lettres, sa vie, ses amitiés, à moitié dans la solitude, à moitié dans le monde, sans fortune et très en crédit, une ancienne jolie femme à demi retirée dans un couvent et devenue une puissance littéraire, je crois voir, de nos jours, Mme Récamier à l’Abbaye-aux-Bois. »

476. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Walckenaer. » pp. 165-181

Le biographe ou plutôt le compagnon, l’introducteur assidu de Mme de Sévigné et de La Fontaine, avait participé à la fortune et au bonheur de de ces deux noms, il s’était fait des amis, et ce n’est pas sans un vrai sentiment de regret qu’on a appris que M.  […] Telle fut la dot imprévue de sa fille, qui fit dans la suite le mariage le plus avantageux. — N’admirez-vous pas comme ce livre d’observation amère et un peu chagrine devient un don souriant du philosophe et fait la fortune de la petite Michallet ?

477. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre douzième. »

On avait ménagé la protection de ce prince à l’auteur des fables, déjà vieux, presque sans fortune et dénué d’appui. […] Quel besoin a-t-il de faire fortune, lui et ces deux animaux ?

478. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Essai, sur, les études en Russie » pp. 419-428

Mais après les heures publiques les préfets sont en usage de donner encore des leçons particulières pour une rétribution qui n’est pas forte ; et cet usage est bon à conserver, parce qu’il ménage au préfet le moyen d’améliorer son sort par son travail, et qu’il est juste que les enfants qui jouissent d’un peu de fortune en usent pour rendre leur instruction plus complète. […] Il faut dire aussi que s’ils négligent les leçons publiques et gratuites, ils sont, d’un autre côté, très-faciles à accorder aux pauvres étudiants sans fortune l’entrée de leurs leçons gratis.

479. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIII. Des éloges ou panégyriques adressés à Louis XIV. Jugement sur ce prince. »

Trajan et Henri IV, quand ils commandaient leurs armées, marchaient et vivaient en soldats ; Louis XIV, dans les camps, parut toujours en roi : il mêla la pompe du trône à la fierté imposante des armées ; et déployant une grandeur tranquille, sans jamais se montrer de près à la fortune, son mérite fut d’inspirer à ses généraux l’orgueil de vaincre, et à ses troupes l’orgueil de combattre et de mourir pour lui. […] On doit savoir gré à Louis XIV d’avoir répandu l’éclat sur les talents et sur les arts, d’avoir su apprécier ces hommes que leur fortune rend obscurs, mais que leur génie rend célèbres ; qui ne sont point destinés par leur naissance à approcher des rois, mais qui sont quelquefois destinés à honorer leur règne.

480. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVIII et dernier. Du genre actuel des éloges parmi nous ; si l’éloquence leur convient, et quel genre d’éloquence. »

Sera-ce alors que l’on descendra dans soi-même, que l’on interrogera sa vie, que l’on se demandera ce que l’on a fait de grand ou d’utile, que l’on prendra la résolution de se consacrer enfin à des travaux pour l’État ou pour soi-même, que le fantôme de la postérité qui n’existait point pour l’âme indifférente, se réalisera enfin à ses yeux, et qu’elle consentira à mépriser la fortune, à irriter l’envie ? […] Non, le génie n’est pas fait pour trafiquer du mensonge avec la fortune ; il a dans son cœur je ne sais quoi qui s’indigne d’une faiblesse, et sa grandeur ne peut s’avilir sans remords.

481. (1803) Littérature et critique pp. 133-288

Je loue avec honneur, devant des guerriers, un guerrier ferme dans les revers, modeste dans la victoire, et toujours humain dans l’une et l’autre fortune. […] Je conclus qu’un bonheur aussi constant n’est point l’effet de cette puissance aveugle et capricieuse qu’on appelle la Fortune. […] Ou, si vous voulez, ajoute encore Plutarque, que la Fortune ait seule accumulé tant de gloire sur la tête d’un homme, alors je dirai, comme le poète Alcman, que la Fortune est fille de la Providence . » On voit par ces paroles combien étaient religieux tous ces graves esprits de l’antiquité. […] La fortune combat pour nos ennemis. […] Elle s’arrête ou se prolonge comme l’action, se varie avec toutes les incertitudes de la fortune, et se précipite avec les derniers mouvements qui la décident.

482. (1864) Études sur Shakespeare

Plus d’une fois, se laissant séduire à cette haute fortune, l’art dramatique a perdu ou compromis son énergie et sa liberté. […] Les âmes plus ardentes allaient au loin chercher les aventures qui, avec l’espoir de la fortune, leur offraient le plaisir plus vif des hasards. […] La poésie est devenue le but de son existence ; but aussi important qu’aucun autre, carrière où il peut rencontrer la fortune aussi bien que la gloire, et qui peut s’ouvrir aux idées sérieuses de son avenir comme aux capricieuses saillies de sa jeunesse. […] Rowe, dans sa vie de Shakespeare, semble croire que les libéralités d’Élizabeth eurent part aussi à la fortune de son poète favori. […] C’est dans le développement de la haute fortune et de ses terribles vicissitudes que paraît l’homme tout entier, avec la richesse et dans l’énergie de sa nature.

483. (1874) Premiers lundis. Tome I « Charles »

Mais nouvel obstacle : Delmida perd son procès, et Charles est sans fortune.

484. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Préface »

Quelle que soit la fortune de ce livre, j’en suis récompensé par avance.

485. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 28, du temps où les poëmes et les tableaux sont apprétiez à leur juste valeur » pp. 389-394

Si nous voulons examiner l’histoire des poëtes qui font l’honneur du parnasse françois, nous n’en trouverons pas qui ne doive au public la fortune de ses ouvrages.

486. (1889) Derniers essais de critique et d’histoire

La fortune leur a été prodigue, et leur cœur était aussi haut que leur fortune. […] Qu’il considère cette politique altière et aveugle, qui, devant de forces accumulées par la nature et la fortune, n’a su tirer que la stérilité et la mort. […] « Ainsi donc, ô la plus belle fille du plus auguste père, Fortune couronnante, — ainsi donc enfin tu descends jusqu’à moi ! […] Le nôtre n’est pas comme eux un électeur né, un mandataire par droit de fortune, irresponsable ; autour de lui se trouvent ceux qui l’ont choisi. […] Selon l’ancien usage, les alliés restaient au logis et, de père en fils, se transmettaient le petit domaine ; les cadets allaient au loin chercher fortune.

487. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Les avantages de la figure ou de la fortune, un succès, un bon mot suffisent. […] Pour ton bonheur (s’il est quelque bonheur ici-bas), il était égal à ta bonté, car la fortune avait bâti ton nid sur des lieux élevés. […] Le marquis de la Roche s’embarqua en 1698, pour tenter de nouveau la fortune ; mais son expédition eut une fin désastreuse. […] Dira-t-on que les nouveaux pasteurs cherchent la gloire et la fortune ? […] Partout où il reste une chance à la fortune, il n’y a point d’héroïsme à la tenter.

488. (1905) Propos de théâtre. Deuxième série

La preuve, c’est qu’il est le seul qui ait fait une grande fortune. […] C’est à elle que Voltaire dit le fameux mot qui a fait fortune. […] La fortune des Flahaut était faite. […] Le Mari à bonnes fortunes est très joli. […] Le mari à bonnes fortunes est un de ces hommes qui sont tellement amoureux de toutes les femmes qu’ils le sont même de la leur.

489. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Bruyère »

Vers les mêmes années, ce qui devait nourrir à sa naissance et composer l’aimable génie de Fénelon était également disposé et comme pétri de toutes parts ; mais la fortune et le caractère de La Bruyère ont quelque chose de plus singulier. […] Il ne se maria jamais : « Un homme libre, avait-il observé, et qui n’a point de femme, s’il a quelque esprit, peut s’élever au-dessus de sa fortune, se mêler dans le monde et aller de pair avec les plus honnêtes gens. […] Il a fait plus que de montrer au doigt le courtisan, qui autrefois portait ses cheveux, en perruque désormais, l’habit serré et le bas uni, parce qu’il est dévot ; il a fait plus que de dénoncer à l’avance les représailles impies de la Régence, par le trait ineffaçable : Un dévot est celui qui sous un roi athée serait athée ; il a adressé à Louis XIV même ce conseil direct, à peine voilé en éloge : « C’est une chose délicate à un prince religieux de réformer la cour et de la rendre pieuse ; instruit jusques où le courtisan veut lui plaire et aux dépens de quoi il feroit sa fortune, il le ménage avec prudence ; il tolère, il dissimule, de peur de le jeter dans l’hypocrisie ou le sacrilége ; il attend plus de Dieu et du temps que de son zèle et de son industrie. » Malgré ses dialogues sur le quiétisme, malgré quelques mots qu’on regrette de lire sur la révocation de l’édit de Nantes, et quelque endroit favorable à la magie, je serais tenté plutôt de soupçonner La Bruyère de liberté d’esprit que du contraire.

490. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXIXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (2e partie) » pp. 5-63

Il n’y a rien dans tout ce début de l’écrivain émigré, courant à la fortune et aspirant aux dignités sous un règne illégitime, qui commandât aux Bourbons un devoir de reconnaissance bien motivé, de la part de la dynastie non trahie, mais bien oubliée. […] Il ne m’aimait pas ; il évitait de prononcer mon nom pendant sa vie, et, comme ministre des affaires étrangères, il nuisait à ma fortune. […] X Pendant son ambassade de Rome, peu de temps avant la révolution de 1830, M. de Chateaubriand, triomphant de l’élection d’un pape faite sous ses auspices, heureux en fortune, heureux en séjour, heureux en sentiment pour des personnes innomées, se prend, comme à l’ordinaire des grandes âmes, d’un fastidieux dégoût pour tant de félicités, et continue à écrire ses Lamentations très déplacées à son ancien secrétaire de Paris.

491. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLVIIIe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Si la fortune en décide autrement, du moins mon malheur sera adouci par l’idée qu’il était nécessaire au bien public : car si nos ennemis ne veulent que ma ruine, je serai entre leurs mains. […] VI Ainsi le génie de Laurent, secondé par la fortune, le rendait cher à son pays ; une conjuration sanglante avait été le sacre de sa maison. […] XVII Les Médicis avaient la fortune de coïncider, en Toscane, avec la renaissance des lettres à laquelle ils avaient immensément concouru.

492. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quinzième. »

Sensibilité vive, mais passagère et sans vapeurs ; raison nourrie sans être profonde, n’enfonçant guère dans les choses, mais parfois, et de la première vue, en découvrant le fond ; gaieté, sans rien d’éventé ; une douce mélancolie qui se forme et se dissipe au moment où elle s’exprime ; pas de vieillesse, sans la prétention de ne pas vieillir ; beaucoup de mobilité, avec le lest d’un grand sens qui écarte de la conduite l’imagination et les caprices ; du goût pour les gens en disgrâce, mais sans rancune contre les puissants ; une pointe d’opposition, comme chez tous les frondeurs pardonnés qui n’osaient ni se plaindre ni regretter, et qui se ménageaient pour un retour de fortune ; le cœur de la meilleure mère qui fut jamais, quoi qu’on en ait dit, capable d’amitiés persévérantes, et qui craignit l’amour plutôt qu’elle ne l’ignora ; tels sont les principaux traits de ce caractère, où le solide se fait sentir sous l’aimable, et où l’aimable n’est jamais banal. […] Elles sont alors à l’image, non de la vieille épouse clandestine de Louis XIV, toute composée, tout en son rôle, tout occupée à accroître et à cacher sa puissance, mais de la veuve de Scarron, alors qu’elle avait besoin de son amabilité pour attirer la fortune, et que Mme de Sévigné parlait de « son esprit aimable et merveilleusement droit186. » Elles ont je ne sais quoi de plus sensé, de plus simple, de plus efficace. […] Les caractères abaissés, les influences des cabinets secrets, la servitude des courtisans, les ministres portés au conseil par leur habileté au jeu de billard, les gens de guerre qui ont peur du feu187; une vieille femme qui se rend puissante auprès du maître le plus jaloux, en affectant de ne vouloir que ce qu’il veut ; les fortunes faites par les petits moyens, depuis que les grands sont devenus suspects ; les anecdotes innombrables, depuis que les grandes actions sont devenues rares ; voilà la matière où se plaît Saint-Simon et où il excelle.

493. (1863) Le réalisme épique dans le roman pp. 840-860

Montesquieu avait dit : « Les anciennes mœurs, un certain usage de la pauvreté rendaient à Rome les fortunes à peu près égales ; mais à Carthage des particuliers avaient les richesses des rois. » Que ces traits simples et forts parlent bien autrement à l’imagination ! […] Il sait que, d’après les croyances puniques, la fortune de la cité est attachée au voile de la déesse Tanit, à ce mystérieux zaïmph que nulle créature humaine ne peut toucher ou voir sans périr. […] La fortune de Carthage est partie avec le talisman sacré.

/ 1718