Sous la Restauration, on lui en aurait voulu de venir se montrer et nous dire ses railleries sur les dieux que de loin nous vénérions : il eût été un vrai trouble-fête ; on l’eût tancé, on l’eût fait taire, on l’eût appelé voltairien, on l’eût proclamé mesquin et arriéré : bien lui a pris de venir un peu plus tard. […] Heine était singulièrement préoccupé de cette figure maladive et moribonde de Casimir Perier, de cette frénésie d’un homme dévoué (sacer) qui, pour rendre à l’État le règne de la paix et d’Astrée, semblait avoir amassé sur sa tête la colère des dieux infernaux.
Pauvres diables de dieux que les dieux d’aujourd’hui !
Des pièces comme l’Exil des Dieux et le Banquet des Dieux sont peut-être ce qui dans notre poésie rappelle le mieux les grandes et somptueuses compositions de Véronèse. […] Les dieux de l’Olympe sont inquiets. […] Il ne parlera que si Jupiter lui-même vient l’implorer, Jupiter consent enfin à s’humilier devant son ennemi, lui fait enlever ses fers, et Prométhée annonce alors la naissance d’un dieu nouveau qui détrônera tous les anciens dieux. […] Le dieu, c’est cet être mystérieux à qui appartient la mine et qui s’engraisse de la faim des mineurs ; c’est l’idole monstrueuse et invisible, accroupie quelque part, on ne sait où, comme un dieu Mithra dans son sanctuaire. […] Les dieux, dans l’épopée, ont été à l’origine les personnifications des forces naturelles : M.
Les incantations y abondent ; un esprit apparaît dans Montezuma et déclare que les dieux indiens s’en vont. […] — Donnez, grands Dieux ! […] Le grand style épique et la rime solennelle vinrent assener le sarcasme, et le malheureux rimeur, par un triomphe dérisoire, fut traîné sur le char poétique où la Muse assied les héros et les dieux. […] Et Timothée chante : il chante Bacchus, « Bacchus toujours beau, Bacchus toujours jeune ; le joyeux dieu vient en triomphe : sonnez les trompettes ! […] Regarde comme ils secouent leurs torches, comme ils les lèvent, comme ils montrent les palais persans, les temples étincelants des dieux leurs ennemis796 !
De par Apollon dieu de la peinture, nous condamnons le Sr Parrocel auteur de cette maussade composition, à lécher sa toile, jusqu’à ce qu’il n’y reste rien, et lui défendons de choisir à l’avenir des sujets qui demandent du génie.
Un tel homme ne serait pas un homme, ce serait le dieu de l’impartialité ! […] Aux dieux des cours qu’un autre sacrifie ! […] Quelle logique y a-t-il entre l’Empire qu’on pleure en larmes épiques et le dieu des bonnes gens auquel on se confie gaîment ? […] ce rocher repousse l’espérance : L’aigle n’est plus dans le secret des dieux. […] N’est-on pas las de tous nos dieux de plâtre ; Vers l’avenir las de tourner les yeux ?
S’attachant particulièrement à la IVe églogue, et après en avoir déterminé le sens, selon lui, tout mystique, tout relatif aux traditions de l’oracle, après avoir assez bien démontré, ce me semble, que le poëte n’a fait qu’y prendre un thème, un prétexte à la description de l’âge d’or vers l’époque de la paix de Brindes, et que le mystérieux enfant promis n’était pas tel ou tel enfant des hommes, mais un de ces dieux épiphanes ou manifestés (præsentes divos) très-connus de l’antiquité entière, M. […] Il serait curieux de suivre en détail avec le critique cette traduction habilement infidèle et toute calculée, dans laquelle l’églogue païenne de Virgile est devenue un poëme chrétien, et qui transforme définitivement le dieu épiphane de la Sibylle en la personne même du Rédempteur.
Pour Alfred de Musset, la poésie était le contraire ; sa poésie, c’était lui-même, il s’y était rivé tout entier ; il s’y précipitait à corps perdu ; c’était son âme juvénile, c’était sa chair et son sang qui s’écoulait ; et quand il avait jeté aux autres ces lambeaux, ces membres éblouissants du poète qui semblaient parfois des membres de Phaéton et d’un jeune dieu (se rappeler les magnifiques apostrophes et invocations de Rolla), il gardait son lambeau à lui, son cœur saignant, son cœur brûlant et ennuyé. […] Sans barbe alors, et tout resplendissant d’une grâce juvénile, ce nez aquilin trop long et trop busqué, d’un caractère si étrange et hardi, ces yeux ingénus et profonds, cette petite bouche aux lèvres amoureuses, faites pour les baisers, ce puissant menton byronien, et surtout ce large front modelé par le génie, et cette épaisse, énorme, violente, fabuleuse chevelure blonde, tordue et retombant en onde frémissante, lui donnent l’aspect d’un jeune dieu.
On avoit ouvert les yeux sur la fausseté, l’avarice, les débauches infâmes des prêtres : ils faisoient accroire que le dieu vouloit admettre à son lit les plus belles femmes : elles alloient à la divinité, parées des mains de leurs maris, chargées de présens en reconnoissance de ses faveurs. A Babylone, une femme que le dieu Bélus avoit choisie passoit toutes les nuits dans le huitième & dernier étage de la tour du temple.
Ligué tantôt avec le peuple contre le souverain, tantôt avec le souverain contre le peuple, il ne s’en tient guère à prier les dieux que quand il se soucie peu de la chose. […] L’auguste de ses fonctions lui inspire un tel orgueil, qu’ici le vicaire de Saint-Roch est plus grand à ses propres yeux que le souverain : celui-ci ne fait que des nobles, des ducs, des ministres, des généraux ; qu’est-ce que cela pour celui qui fait des dieux ?
En réponse, un jour, Paul de Saint-Victor publia Les Dieux et les Hommes, et, malgré la forme de cet ouvrage, on recria : Ce n’est là que des feuilletons encore ! […] » Et ce qu’il a fait pour Eschyle, il l’a fait pour le monde tout entier de dieux et de héros qui précéda Eschyle et qui le produisit, splendide résultante poétique !
Laurent Évrard, à la fin du court avertissement où il justifie son système rythmique, ajoute : « Ce n’est donc pas de la matière sonore ni du nombre métrique que le lecteur pourra se plaindre, mais du poète qui ne sait pas, dans les entraves d’or, marcher d’un pas agile ou boiter comme un dieu. » À quoi d’aucuns objecteraient que le poète eût mieux fait de ne se mettre aux chevilles nulle entrave, même d’or… Ce poète sait voir et exprimer ; il observe la vie latente des eaux, des pierres et des plantes ; l’obscur frisson des choses inertes ne lui a pas échappé.
La faute en est aux Dieux, Qui la firent si belle, Et non pas à mes yeux.
J’ai mon Dieu que je sers ; vous servirez le vôtre ; Ce sont deux puissants dieux. […] Chaque nation, chaque ville a ses dieux, plus ou moins puissants ; il est tout naturel qu’elle ne serve pas ceux d’une autre ville. […] De là ces défis sur la puissance respective des dieux, chaque nation tenant à ce que les siens soient les plus forts, mais qui n’impliquent nullement qu’ils soient seuls dieux. […] Je ne suis pas un homme, je suis un dieu. […] Son auteur n’était-il pas un prêtre, en relation avec les dieux ?
.) — Ce que Virgile a traduit moins gravement par ces mots : « Trahit sua quemque voluptas. » — Et Homère a dit encore par la bouche du même Ulysse parlant à un jeune et beau Phéacien, qui l’avait offensé par ses paroles : « Ainsi donc les dieux ne donnent pas toutes les grâces à tous les hommes, ni la beauté, ni les qualités de l’esprit, ni l’éloquence. Car tel homme est disgracié de visage, mais un dieu répare sa figure en le couronnant d’éloquence, et le monde trouve un charme à le regarder ; et lui, sûr de lui-même, il parle avec une pudeur toute de miel, et il brille parmi la foule assemblée, et jorsqu’il passe à travers la ville, chacun le contemple comme un dieu.
Mais dans cette lettre, sous prétexte que Lulli descendu aux Enfers est renvoyé par Proserpine pour être définitivement jugé par-devant le Bon Goût, on se met en marche du côté où l’on suppose qu’habite ce dieu ou demi-dieu : et ici Sénecé nous trace tout un itinéraire où il expose sa théorie littéraire et critique sous forme d’emblème. […] Sa mère, de fureurs par vengeance agitée, Sentit Junon jalouse et Lucine irritée ; La terre la refuse en son vaste contour, Le dieu de la lumière a peine à voir le jour… Cette fermeté de ton ne se soutiendra pas ; la pièce est trop longue. […] du moins tes rossignols vivent, sur qui, ravisseur de toutes choses, le dieu d’enfer ne portera pas la main.
Si nous avions besoin de croire que les crocodiles sont des dieux, demain, sur la place du Carrousel, on leur élèverait un temple. […] On finit par faire des avances au clergé, présenter la philosophie comme l’alliée affectueuse et indispensable de la religion, offrir le dieu de l’éclectisme comme une base « qui peut porter la trinité chrétienne », et l’éclectisme tout entier comme une foi préparatoire « qui laisse au christianisme la place de ses dogmes, et toutes ses prises sur l’humanité99. » Il eût été bien difficile de ne pas réussir avec tant d’adresse, avec tant de soin pour séduire, amuser, entraîner et ménager les esprits, avec tant de précautions pour suivre ou devancer leur marche. […] Des pilastres, des étages de portiques, des labyrinthes de galeries, des salles immenses amoncelées en tours, des temples accumulés comme des cellules d’abeilles, des allées sans fin, peuplées de dieux et de monstres, une ville de pierre, exhaussée d’assises en assises comme pour escalader le ciel immobile, et plongée dans les entrailles du sol par ses souterrains béants : déjà effrayés par ce labeur gigantesque, les voyageurs s’approchèrent.
De là, les dieux. Les dieux impliquent les prêtres. […] Espérait-elle de petits dieux ? […] La montagne était le séjour des dieux ou des démons. […] Nous ne pouvons plus, même en souriant, implorer les dieux.
Il y a loin sans doute de cet Achille si naturel à l’Achille furieux qui épouvante l’armée et partage les dieux. […] Dieux cruels ! […] Ô dieux ! […] L’Achille de Racine continue sur le même ton de mépris pour les dieux, lorsque Agamemnon lui déclare qu’il faut renoncer à l’expédition de Troie, puisque les dieux refusent aux Grecs un vent favorable. […] Les hommes, en effet, n’ont pas besoin de se tourmenter des ordres suprêmes des dieux ; il vaut bien mieux qu’ils songent à devenir dieux eux-mêmes ; mais, avant qu’ils en soient venus là, les ordres suprêmes des dieux peuvent les réduire à de cruelles extrémités.
Sa Fête au dieu des jardins est coloriée vigoureusement ; mais elle dégoûte ; de grosses femmes endormies et enivrées ; des culs monstrueux ; des masses de chair mal arrangées.
Juliette Adam Maître, vous avez la taille de ceux dont les vieux Grecs faisaient des dieux. […] Charles Garnier Il faut parler des forts quand on s’adresse aux Maîtres ; Il faut parler des preux quand on s’adresse au Roi ; Il faut parler du ciel quand on s’adresse aux prêtres ; Il faut parler des Dieux quand on s’adresse à toi ! […] Catulle Mendès Auguste et doux, serein comme un dieu sans athée, Droit comme les Césars d’un vieil armorial, Il tient ce siècle, ainsi qu’en sa main d’or gantée Charlemagne portait le Globe impérial. […] Jules Claretie Ils sont aimés des dieux ceux qui, glorieux dès leur jeunesse et naissant avec leur siècle, incarnent en eux tous ses rayonnements et tous ses deuils, chantent ses grandeurs, célèbrent ses victoires, pansent ses blessures, le consolent de ses défaites, le relèvent et le vengent, et, vieillissant avec lui, se reposent au couchant de leur vie, dans leur immortalité. […] Il se devait à sa propre religion ; il était comme un dieu qui serait en même temps son prêtre à lui-même.
Il travailla de concert avec M. l’Abbé d’Olivet, son ami, à traduire en notre langue les Entretiens de Cicéron sur la Nature des Dieux.
Si c’était le vrai dieu ! […] Il a adoré des dieux féroces. […] Comme c’était un excellent dieu, il y remédia dès qu’il le put. […] En vérité, ce dieu était un très brave homme. […] Et pourtant il était poète et dieu.
Édouard Fournier On croit qu’il était de Paris, et du même âge à peu près que Victor Hugo, qui fut son guide et son dieu.
Pour le bureau de loterie et d’autres morceaux de même grandeur et de l’invention de l’artiste, ils ne seront pas décrits, non, de par dieu, ils ne le seront pas, et vous entendez de reste ce que cela veut dire.
À ce moment, la religion, la morale, le culte, l’art, le merveilleux, tout est confondu, et l’on peut prédire que tels auront été conçus les dieux, tels seront plus tard les artistes et les poètes. […] Il faudrait, pour égaler et surpasser les Grecs, qu’à leur exemple nous crussions aux dieux, que nous y crussions davantage : or, c’est là qu’est l’impossible. […] Divin Platon, ces dieux que tu rêves n’existent pas. […] Vous n’avez su peindre que des dieux ; il faut représenter aussi des démons. […] « À la vérité, dit Cicéron en parlant d’Homère, toutes ces choses sont de pures inventions de ce poète, qui s’est plu à rabaisser les dieux jusqu’à la condition des hommes ; il eut été mieux d’élever les hommes jusqu’à celle des dieux. » Que dit-on tous les jours dans les journaux ?
Tantôt, entraîné par cette gageure, il brouille le peu de notions qui nous restent, il confond les âges si divers du monde qu’il prétend reconstruire, il invente ce qu’il ignorera toujours, il décrit ce qui n’a jamais pu vivre, il donne la même valeur aux conjectures plausibles et aux imaginations hasardées, il noie quelques débris de vérités dans un océan d’erreurs, et, tâchant de tromper le lecteur, il finit par se tromper lui-même ; tantôt, dans cette lutte contre un sujet qui sans cesse lui échappe, il s’emporte, il s’enivre de sa parole, de ses images, de ses héros, de ses dieux, de ses monstruosités de toute espèce, il se livre au Dévorateur et devient comme un prêtre de Moloch. […] Flaubert en ses mystiques litanies : « Selon que tu croîs et décroîs, s’allongent ou se rapetissent les yeux des chats » ; mais je sais, grâce aux travaux de Movers, qu’elle était bien la déesse de la lune, la reine des astres, la dominatrice des étoiles ; c’est à ce titre, Hérodien nous l’apprend, qu’elle fut mariée dans Rome même, et en grande pompe, sous les auspices de l’empereur Héliogabale, avec le dieu du soleil apporté de la Syrie. Je trouve peu intéressant de savoir si Moloch était servi par des prêtres en manteau rouge, s’il était célébré en d’horribles concerts où « grinçaient, sifflaient, tonnaient les scheminith à huit cordes, les kinnor, qui en avaient dix, et les nebal, qui en avaient douze » ; mais je sais, toujours d’après les preuves établies par nos maîtres, que le dieu d’airain, à de certains jours, se nourrissait de la chair des enfants, que les plus puissantes familles étaient obligées de lui apporter leur tribut, que le feu de ses entrailles rugissait sur la place publique, et que le monstre, agitant ses longs bras, précipitait lui-même dans le gouffre ses innocentes victimes. […] Il y avait bien d’autres dieux que Tanit et Moloch dans la Babel phénicienne, puisque d’après les critiques sémitisants Eschmoûn signifie le huitième, le huitième des grands dieux de Carthage.
Le vin, pour lui, c’est l’antique Dionysos, le dieu généreux et vainqueur, soutien de nos travaux, consolateur de nos tristesses.
Les murs auraient amplement contenu Toute sa vie…………………………… Au fond du temple on eût vu son image, Avec ses traits, son souris, ses appas, Son art de plaire et de n’y penser pas… J’aurais fait voir à ses pieds, des mortels, Et des héros, des demi-dieux encore, Même des dieux : ce que le monde adore Vient quelquefois parfumer ses autels. Les mortels, les héros, les demi-dieux, les dieux dont parle La Fontaine, comme composant la société de madame de La Sablière, étaient les Chaulieu, les Lauzun, les Rochefort, les Brancas, les La Fare, les de Foix, et, entre plusieurs étrangers illustres, Jean Sobieski, lequel fut depuis roi de Pologne.
Il admire beaucoup le vers sublime (ce détail le peint assez bien) : L’homme est un dieu tombé qui se souvient des cieux ! et il donne même quelque part comme un aphorisme philosophique cette métaphore blasphématoire et souverainement absurde ; car que peut être un dieu tombé ?
On lui dit qu’il était mort dans une bataille en combattant avec courage ; il remit la couronne sur sa tête, et continua d’offrir de l’encens aux dieux. […] Il composa son esprit de celui de Socrate et d’Aristophane ; et, dans des ouvrages courts et dialogués, mit tour à tour en scène les dieux, les hommes, les rhéteurs, les courtisanes et les philosophes.
. — Les Dieux qu’on brise, poème (1881). — Le Père de Martial (1881). — La Marquise, pièce en 4 actes (1882). — Les Amours cruelles (1884). — Solange de Croix-Saint-Luc (1885). — Mademoiselle de Bressier (1886). — Thérésine (1888). — Disparu (1888). — Passionnément, comédie en 4 actes (1891).
Les Dialogues des Dieux, qui forment le premier volume de ses Œuvres, sont pleins de délicatesse & de gaieté, dans le goût de Lucien.
Ceux par lesquels il commence sa Didon, ne sont pas irréprochables ; mais on en a fait de nos jours de plus mauvais : Grands Dieux, qui disposez de l’Empire du Monde ; Toi, qui portes en main le tonnerre qui gronde, Jupiter, ennemi du Peuple Phrygien, Qui fait que notre Troie à present n’est plus rien, &c.
Convenons-en franchement et sans nous laisser fasciner par ce respect envers les Dieux qui n’est souvent que du respect humain. […] Tolstoï, puisqu’il s’attaquait à ce sujet, aurait dû chercher plutôt de ce côté-là que du côté des Allemands et Danois ; car le plus intéressant ici eût été de savoir la morale que des adorateurs de Shakespeare trouvent ou mettent dans leur dieu. […] Un premier, de grande autorité, du reste (c’est Gœthe), a dit que Shakespeare était divin et tous ont répété qu’il était dieu. […] La simplicité voulue est souvent plate et même l’involontaire… Nous comprenons que le poète, par cette facilité d’avatars qui le rapproche des dieux de la mythologie hindoue, aime à s’absenter de son corps et à revêtir pour quelque temps une individualité différente. […] Mais, Dieux bons, comme il y en a de détestables !
Ce Plaisir tant regrettable Me répond : Rends graces aux Dieux ; S’ils m’avoient fait plus durable, Ils m’auroient gardé pour eux.
« Jamais, en effet, calamités plus terribles et augures plus menaçants ne témoignèrent au peuple romain que les Dieux ne veillaient plus à sa sécurité, mais à leur vengeance. » XIII Après avoir frappé ainsi l’esprit de ses lecteurs de l’impression dont il est frappé lui-même, Tacite entre d’un pas rapide, mais sûr, dans son récit par le tableau du lendemain de la mort de Néron. […] Ô Dieux ! […] De même que ce corps, institué sous les auspices des Dieux par le père et le fondateur de Rome, ce corps, continué et immuable depuis nos rois jusqu’à nos Césars, nous a été transmis par nos ancêtres, de même nous devons le transmettre à nos descendants ; car c’est de vous qu’émanent vos sénateurs romains, et c’est de vos sénateurs qu’émanent vos princes. » XXVIII Ce discours assoupit plus qu’il ne calma Rome.
Prenons une comparaison célèbre qui s’y trouve : Ô bienheureux mille fois L’enfant que le Seigneur aime, Qui de bonne heure entend sa voix, Et que ce dieu daigne instruire lui-même ! […] Ils invoquaient leurs dieux : mais le feu qui punit Frappait ces dieux muets, dont les yeux de granit Soudain fondaient en pleurs de lave.
Pour La Fontaine, qui est comme le dieu ou l’Homère du genre, qu’il me soit permis de dire qu’il n’y est si grand et si admirable que parce qu’il le dépasse souvent et qu’il en sort. […] Dans sa fable d’Hercule au ciel, Florian commence par ces lignes prosaïques : Lorsque le fils d’Alcmène, après ses longs travaux, Fut reçu dans le ciel, tous les dieux s’empressèrent De venir au-devant de ce fameux héros… Certes, La Fontaine, ayant à peindre Hercule enlevé de son bûcher dans l’Olympe, et s’asseyant tout en feu entre les dieux, s’y serait pris autrement.
Pour eux, l’apathie, qui est l’absence complète d’émotions, était un état supérieur, une position aussi enviable que le bonheur des dieux. […] Pourtant l’allégorie n’avaient point disparu, mais renaissait avec des formes nouvelles, car les dieux avaient quitté nos parages pour d’autres plus aériens. […] Car nous concevons une œuvre où s’assembleront enfin tous les êtres, apparaissant dans leur stricte morphologie, chantant ces dieux à leur image, qu’ils rêvent assurément. […] Le forgeron au teint cuivré et métallique, martelant d’un grand geste uniforme le fer rouge, ne nous apparaît-il pas comme un dieu farouche de la métallurgie. […] Lieux d’exil et de bon repos où des dieux rudes s’emploient aux pires labeurs !
Avec quelle joie émue, il les a chantés sous la triple incarnation familière, légendaire, satanique, — car, parfois, il en prend un au coin du foyer pour le conduire à la messe noire — s’attendrissant sur les vieux chats abandonnés à qui manque le mou mis en pâtée par les bonnes vieilles, donnant des conseils aux plus jeunes, prenant paradoxalement parti pour eux contre leurs victimes ordinaires, le poisson rouge et le serin, les adorant en toute candeur quand ils sont dieux, composant à leur intention des cantiques, des litanies et songeant aux chats obstinément — car la féminité ne perd jamais ses droits — pour un rire félin de brune ou un bâillement rose de blonde.