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667. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (3e partie) » pp. 5-79

Où aurait-il pris cette lumière intérieure parfaite, cette justesse infaillible, cette délicatesse de sainteté qui surgissent tout à coup en lui, comme la fleur surgit du fumier, pour se foudroyer lui-même, s’offrir en holocauste pour un misérable flétri d’avance, et pour s’écrier de sang-froid devant le jury, et devant Dieu, et devant ses concitoyens, dont la considération se change en exécration : C’est moi qui suis le forçat ! […] Avant le bagne, j’étais un pauvre paysan, très peu intelligent, un espèce d’idiot ; le bagne m’a changé. […] XXII Ici vous fermez le troisième tiroir, et l’auteur en ouvre un autre à propos d’une certaine famille Thénardier dont il a besoin pour changer les décorations de son drame. […] Il serait temps d’en finir, ou bien de changer résolument l’histoire, et d’écrire, à l’exemple du père Loriquet ou des libéraux de 1815 : Waterloo, grande victoire gagnée par Napoléon sur les Anglais et sur les Prussiens dans les plaines de Belgique.

668. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIIe Entretien. Montesquieu »

La famille de Robert a raconté le reste. » VI Nous avons eu la curiosité de lire le drame composé sur ce sujet, par Joseph Pilhes, de Tarascon, en 1784 ; ce drame est médiocre, et le nom de Montesquieu, changé en celui de Saint-Estieu, produit un effet assez ridicule ; cependant il a dû faire couler des larmes, surtout pendant la révolution où il se jouait encore, et où les pièces dans lesquelles triomphaient l’humanité et la nature, réussissaient d’autant plus que l’époque était plus terrible et plus agitée. […] Comme être intelligent, il viole sans cesse les lois que Dieu a établies, et change celles qu’il établit lui-même. […] Le débiteur qui parut sur la place, couvert de plaies, fit changer la forme de la république. La vue de Virginie fit changer les décemvirs.

669. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Edmond et Jules de Goncourt »

Ce néologisme s’entend aisément ; mais ce qu’il représente n’est pas très facile à déterminer, car le moderne change insensiblement, et puis ce qui est moderne est toujours superposé ou mêlé à ce qui ne l’est point ou à ce qui ne l’est déjà plus. […] Elle ne peut souffrir que ce jeune homme très fort change le nom de son père contre un titre acheté, afin de faire un riche mariage ; elle découvre en outre qu’il a eu pour maîtresse la mère de la jeune fille qu’il doit épouser. […] La sœur Philomène, toute changée, vient prier, la nuit, auprès du cadavre. […] Pour ne parler que de l’atelier de Coriolis, il est certain que la description n’en était pas absolument nécessaire à l’intelligence de son histoire ; mais, puisqu’il est encore permis de décrire le crépuscule à la campagne, il vaut peut-être la peine, pour changer, de le décrire dans un atelier.

670. (1831) Discours aux artistes. De la poésie de notre époque pp. 60-88

C’est la montagne et la forêt changés en temple par l’homme, et reproduits par lui comme il lui convient de les reproduire. […] Ce sont avant tout des penseurs : ils n’ont pu se décider et se former que par de longues considérations, de profondes études de faits et de raisonnements ; changer, c’est une vie à refaire : aussi leur croyance survivra-t-elle même à la chute définitive du fantôme qui les avait illusionnés. […] Mais les poètes purs sont plus changeants ou plus naïfs : comme ils avaient délaissé et les arguments théologiques et les grands ensembles d’idées, comme ils n’avaient pris de la religion déchue que des inspirations et des images, surtout comme ils sont hommes de sentiment et de vie lyrique, quand leur vie change, quand le doute les reprend, quand leur tristesse d’âme se prolonge malgré tous les remèdes dont ils avaient vanté l’efficacité, ils le disent ou le font entendre à tout le monde ; et ils ne pourraient faire autrement, ou ils seraient obligés de se taire ; car l’art c’est la vie du poète qui s’exprime telle qu’elle est au moment où il chante. […] C’était un rêve, un idéal qu’ils poursuivaient, ne voyant pas, dans leur exaltation de poètes, combien les temps étaient changés et combien ce rêve était absurde.

671. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre troisième. La volonté libre »

Ainsi, entre une idée et une autre, entre un désir et un autre, on imagine un phénomène spécifique : le maintien ou l’abandon de la première idée, du premier désir, comme si, entre une vague et une autre, on imaginait je ne sais quel phénomène intermédiaire consistant dans le « maintien » ou dans la suppression de la première vague, de façon à changer ainsi la direction du navire. […] La volonté, dans cette hypothèse, n’agit pas sans motifs présents, ni contre les motifs présents, mais elle peut sans motif changer tout d’un coup son motif présent en un motif subséquent contraire ; donc il y a toujours un changement qui, comme tel, est sans motif et qui, par conséquent, se confond avec la liberté d’indifférence. […] Si telle sensation prolongée devient insupportable, ce n’est pas simplement parce qu’elle est prolongée dans la durée, mais parce que, les conditions organiques ayant changé et une accumulation d’effets s’étant produite, de nouvelles sensations se produisent aussi et sont déterminées ; le temps n’y est pour rien. […] Ce sera, en d’autres termes, un déterminisme modifié par l’idée de son propre contraire et de ses propres limites, façonné par l’idée d’une puissance d’indétermination, prenant ainsi un aspect nouveau sans changer d’essence rationnelle.

672. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XII : Distribution géographique (suite) »

Mais j’incline à attribuer principalement la dispersion des poissons d’eau douce à de légers changements survenus dans le niveau des terres, depuis une époque plus ou moins récente, et qui auront changé le système des rivières, en faisant communiquer ensemble des cours d’eau jusque-là séparés. […] Il faut aussi mettre en compte que parmi les productions d’eau douce plusieurs, et même un grand nombre, sont peu élevées dans la série des organismes ; et comme nous avons des raisons de croire que les êtres inférieurs changent et se modifient moins vite que d’autres plus élevés, il doit on résulter que les espèces aquatiques jouissent en moyenne d’un temps plus long que les autres pour accomplir leurs migrations. […] À l’égard des espèces distinctes du même genre, qui, d’après ma théorie, doivent procéder d’une source commune, si de même nous tenons compte de notre ignorance, et nous rappelons que quelques formes organiques changent très lentement, un temps considérable leur étant ainsi accordé pour effectuer leurs migrations, je ne pense pas que les difficultés soient insurmontables, bien qu’elles soient souvent très grandes, j’en conviens, en ce cas comme dans celui de la dispersion des individus de la même espèce. […] Dans le temps, comme dans l’espace, les membres inférieurs de chaque classe changent généralement moins que les supérieurs, mais en l’un et l’autre cas il y a des exceptions marquantes à la règle.

673. (1870) La science et la conscience « Chapitre III : L’histoire »

C’est ainsi que ces études, dites positives, changent la face de la vie humaine, et font disparaître avec le libre arbitre la moralité qui la constitue. […] Il suffisait d’un discours, d’une émeute, d’une conspiration pour changer ces destinées, pour lui imposer la tyrannie ou lui rendre la liberté, pour amener le triomphe d’un parti. […] Oui, un dieu les remplit et les agite, un dieu qui se change parfois en démon, et qui leur laisse à peine le sentiment du droit et la libre possession d’eux-mêmes. […] Tout y commence par les plus nobles sentiments, les plus saines idées, les plus justes espérances, les plus sages résolutions ; puis les obstacles se multiplient, les dangers de la patrie deviennent de plus en plus menaçants, les passions s’exaltent, la foi naïve se change en une sombre défiance, l’enthousiasme tourne à la fureur ; bref, la révolution en arrive à une de ces crises suprêmes qui commandent les mesures violentes de salut public à des chefs n’ayant plus la conscience nette ni l’entière liberté d’action.

674. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

— Changeons de carrière : Combien faut-il de Hoche, de Desaix, de Joubert, de ces héros moissonnés avant l’heure pour rehausser et grandir encore le général en chef consommé, qui conçoit, qui combine avec génie, qui dirige et résout, après se les être posés, les plus grands problèmes de son art ? […] Ce général de brigade, qui vient de prendre les chariots et les bagages de l’ennemi, se voit dans la nécessité d’écrire à son père : Un peu de numéraire pour changer mes habits et harnacher mes chevaux me serait nécessaire.

675. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

« L’armée d’Italie, dit à ce propos Jomini, avait changé six fois de chef en moins d’un an, lorsqu’après la réduction du Piémont elle perdit Joubert, qui demanda son remplacement par dépit de ne pouvoir conserver, pour son chef d’état-major, Suchet, avec lequel il était lié d’amitié. » Le refus qu’on lui faisait du général Suchet ne fut qu’une dernière marque de désaccord qui amena la rupture. […] Dans une visite qu’il revint faire dans la soirée au général en chef, Saint-Cyr le retrouva le même, sans plan arrêté, et la nuit ne changea rien à son irrésolution : il ne donna point d’ordres.

676. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Mélanges scientifiques et littéraires, (suite et fin.) »

Ce désappointement se changea en un sentiment plus pénible encore, lorsqu’en 1830 Arago succéda en cette même qualité de secrétaire perpétuel à Fourier, et prit au sein du Corps savant une prépondérance qui dura entière jusqu’à la fin de sa vie (1853). […] C’est, on le devine, même quand M. l’abbé Moigno ne nous l’aurait pas appris (n° du Cosmos du 7 février 1862), c’est que le vieillard avait changé, c’est qu’il avait remis depuis des années sa conscience en des mains pieuses, mais en des mains étrangères ; c’est que le Père de Ravignan ou le Père de Pontlevoy, cités avec éloge à un endroit du travail, avaient passé par là, et qu’il y a un petit souffle imperceptible venu du Vatican ou du voisinage, qu’on ne voit pas, mais qu’on sent, et qui, dans ce compte rendu du procès de Galilée, est bien capable à la fin d’irriter les âmes non patelines et grossièrement généreuses14.

677. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

Comme les goûts changent ! […] Traduire en vers surtout est une entreprise qui suppose entre l’auteur et les lecteurs certaines conditions convenues, qui doivent changer d’un âge à l’autre.

678. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

Arlequin, après avoir fait deux fagots, veut en charger son âne ; il est surpris de trouver, au lieu de sa souquenille, un habit magnifique, une perruque, un masque, un chapeau bordé : il demande à son âne s’il sait comment tout cela a été changé, et le félicite de ses talents s’il est pour quelque chose dans la métamorphose. […] Depuis le seizième siècle, son costume a bien changé, comme son caractère50.

679. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre VII. L’antinomie pédagogique » pp. 135-157

Mais que le jeune homme vienne à changer de milieu ; qu’il soit soumis à d’autres influences, la réflexion s’éveillera ; le vernis de l’éducation s’écaillera, la foi s’effritera. […] Vous ne pouvez rien changer d’essentiel : les détails tout au plus restent à votre disposition.

680. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXIV. Arrestation et procès de Jésus. »

La loi mosaïque, dans sa forme moderne, il est vrai, mais acceptée, prononçait la peine de mort contre toute tentative pour changer le culte établi. […] Mais, à l’époque où écrivai Tacite, la politique romaine envers les chrétiens était changée ; on les tenait pour coupables de ligue secrète contre l’État.

681. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre II. L’analyse interne d’une œuvre littéraire » pp. 32-46

Le simple examen du nouveau tableau qu’on forme ainsi permet de constater si les idées de l’écrivain qu’on étudie étaient rares ou nombreuses, claires ou obscures, indécises ou arrêtées ; si elles ont changé au cours de sa carrière s’il y a des matières auxquelles il songeait peu ; si au contraire il a été obsédé par la préoccupation de tel ou tel problème. […] On oublie trop souvent qu’une œuvre littéraire n’a pas toujours pour but essentiel de plaire ; qu’elle s’efforce en bien des cas de persuader, de convaincre, de changer les âmes, et, par leur intermédiaire, les mœurs et les lois.

682. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre II : L’intelligence »

Wheatstone, ayant modifié son stéréoscope de façon à ce que la distance de l’objet pût être changée, la convergence des yeux restant la même, et vice versa, voici ce qui en résulta. […] Nous tournons la tête à droite et à gauche ; nous remuons notre corps et notre perception varie ; nous arrivons ainsi à distinguer les choses que nos mouvements font changer de place, des idées ou rêves qui varient d’eux-mêmes, quand nous sommes au repos.

683. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

Il est certain que l’ami de Quantova (le roi) dit à sa femme et à son curé par deux fois : Soyez persuadés que je n’ai pas changé les résolutions que j’avais en partant ; fiez-vous à ma parole, et instruisez les curieux de mes sentiments116. » 31 juillet. […] M. de Louvois alla voir en arrivant cette gouvernante ; elle soupa chez madame de Richelieu, les uns lui baisant la main, les autres la robe ; et elle, se moquant d’eux tous, si elle n’est bien changée ; mais on dit qu’elle l’est.

684. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Raphaël, pages de la vingtième année, par M. de Lamartine. » pp. 63-78

Trente ans après, avec cette même Elvire changée en Julie, voilà qu’il peut croire qu’il enlève encore une fois toute la jeunesse. […] Et puisqu’on a tant fait que de lui changer son nom, j’avouerai que je n’aime guère ce nom de Julie.

685. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Essai, sur, les études en Russie » pp. 419-428

Les hommes sont en général des animaux d’habitude, qui ne changent d’allure que lorsqu’ils sont vexés dans celle qu’ils avaient coutume de tenir. […] J’observe qu’il serait bon, dans ces Lese-Schreib und Rechen-Schulen, de pousser l’instruction plus loin qu’elle ne va communément en Allemagne, et d’y faire enseigner, par exemple, à ceux qui se destinent aux professions mécaniques et au commerce, la manière de tenir les livres en parties doubles, la science du change, et tout ce qu’il est bon, dans ces professions, de savoir pour y devenir plus habile en moins de temps.

686. (1759) Observations sur l’art de traduire en général, et sur cet essai de traduction en particulier

Traduire un poète en prose, c’est mettre en récitatif un air mesuré ; le traduire en vers, c’est changer un air mesuré en un autre qui peut ne lui céder en rien, mais qui n’est pas le même. […] chacune a ses lois, qu’il n’est pas permis de changer ; parler latin en français, serait plutôt une entreprise bizarre qu’une hardiesse heureuse.

687. (1899) Psychologie des titres (article de la Revue des Revues) pp. 595-606

Du coup l’orientation de notre littérature en fut changée. […] Ou celle-ci encore, dirigée contre les membres du Directoire : Vos cinq cochons sont assez gras, il faut les changer pour faire le carnaval 5.

688. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIII. Des éloges ou panégyriques adressés à Louis XIV. Jugement sur ce prince. »

Toutes les administrations furent forcées, tous les ressorts tendus ; et l’erreur d’un seul homme changea le système de vingt gouvernements. […] Ce n’est pas que je confonde toutes les époques de ce règne célèbre : la France fut heureuse, ou parut l’être jusqu’à la guerre de 1688 ; mais après cette époque tout change.

689. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Sa figure change à toute heure. […] Si l’on vit, il faut consentir à voir tout changer autour de soi. […] Les formes d’art changent comme les formes de la vie. […] L’expérience montre que la langue change comme la prosodie. […] Mais le doute ne change pas les conditions de la vie.

690. (1885) Le romantisme des classiques (4e éd.)

On n’a pas cru devoir changer ici le cadre de ces leçons, ni les déguiser en chapitres. […] On a tort également de changer sur l’affiche le nom de tragi-comédie que Corneille a donné à sa pièce. […] Enfin Rodrigue est mort, et sa mort m’a changée D’implacable ennemie en amante affligée. […] Les destinées de notre théâtre, de notre poésie tout entière, du génie français lui-même, eussent été changées. […] Dans cette pièce, le lieu change lorsque l’action le veut ; non seulement d’un acte à l’autre, mais d’une scène à l’autre, comme dans Shakespeare.

691. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « VII » pp. 25-29

— Le succès de Lucrèce change l’état des choses dramatiques ou du moins est un symptôme qui prouve hautement, en contradiction avec les théories de Hugo et des autres, que la faute des non-succès et des succès contestés n’est pas au public, mais aux auteurs.

692. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Appendice — Début d’un article sur l’histoire de César »

Par cette longue habitude changée en nature, ils ont réellement acquis quelques-unes des hautes parties de l’emploi, l’amour du grand ou de l’apparence du grand, une confiance qui s’impose, un sang-froid, une tranquillité et une présence d’esprit que rien n’émeut et qui a pu ressembler parfois au génie de l’à-propos, une conscience de leur supériorité sur tout ce qui les entoure et qui se justifie puisqu’elle se fait accepter.

693. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XII. Du principal défaut qu’on reproche, en France, à la littérature du Nord » pp. 270-275

Quand vous rappelez des objets dégoûtants, vous excitez une impression fâcheuse, qu’on fuirait avec soin dans la réalité ; quand vous changez la terreur morale en effroi physique, par la représentation de scènes horribles en elles-mêmes, vous perdez tout le charme de l’imitation, vous ne donnez qu’une commotion nerveuse, et vous pouvez manquer jusqu’à ce pénible effet, si vous avez voulu le pousser trop loin : car au théâtre, comme dans la vie, quand l’exagération est aperçue, on ne tient plus compte même du vrai.

694. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Théâtre français. » pp. 30-34

Incontinent ces étoiles, changées en autant de dames, se montrèrent vêtues de la même couleur que les chevaliers.

695. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre VIII. La Fille. — Iphigénie. »

Racine n’a donné ce courage à son héroïne que par l’impulsion secrète d’une institution religieuse qui a changé le fond des idées et de la morale.

696. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre second. Poésie dans ses rapports avec les hommes. Caractères. — Chapitre XI. Le Guerrier. — Définition du beau idéal. »

Car si vous entreprenez de peindre les premiers âges de la Grèce, autant la simplicité des mœurs vous offrira des choses agréables, autant la barbarie des caractères vous choquera : le polythéisme ne fournit rien pour changer la nature sauvage et l’insuffisance des vertus primitives.

697. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre troisième. Histoire. — Chapitre VIII. Bossuet historien. »

Patriarche sous le palmier de Tophel, ministre à la cour de Babylone, prêtre à Memphis, législateur à Sparte, citoyen à Athènes et à Rome, il change de temps et de place à son gré ; il passe avec la rapidité et la majesté des siècles.

698. (1778) De la littérature et des littérateurs suivi d’un Nouvel examen sur la tragédie françoise pp. -158

Les mœurs ne changent point. […] Il y a des choses que le tems a changées. […] Que le lieu change donc, & que le tems s’écoule, plutôt que la vérité manque. […] Que les débats uniformes des Européens pour ne rien changer à la face de l’Europe, commencent à m’excéder ! […] Je sens qu’une opinion nouvelle, a toujours les couleurs du paradoxe ; je sçais que l’homme ne change point les idées avec lesquelles il s’est familiarisé.

699. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Certes tout se meut et tout change. […] Si les mœurs changent, il y a dans la femme un naturel qui ne change guère. […] Le dix-neuvième siècle changea cet usage. […] Il ne voulait pas convenir que la langue eût changé depuis deux siècles, afin, peut-être, de ne pas s’avouer qu’elle changerait encore, et cette fois à son préjudice. […] Ses idées changent à tout moment.

700. (1894) Études littéraires : seizième siècle

Cela a changé toutes les idées. […] Et cette volonté ne change pas. Qui pourrait la faire changer ? […] Qu’est-ce que c’est que ce Dieu qui change ?  […]  » — Donc Dieu change ?

701. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Voici cet article auquel je ne change pas un seul mot : SAPHO À L’ACADÉMIE — Alors, dis-je à mon vieil ami Alphonse Daudet qui me reconduisait jusqu’à l’escalier, tu persistes dans ta résolution ? […] Cette sensibilité contenue vite aigrie, qui se change en folles colères devant les aspects d’injustice de l’ordre social. […] Hum… MONSIEUR D’ALALY, voulant changer le tour de la conversation. […] Le moment, le cadre et l’imprévu de la rencontre en avaient augmenté le charme sans en changer le caractère : c’était un sourire du hasard et non un lien. […] C’est, ou nous nous trompons grandement, la marque d’un grand progrès dans la vie du jeune poète que ce petit livre ; la Jeunesse blanche pourrait aussi bien changer son titre pour celui de « Souvenirs et regrets ».

702. (1914) L’évolution des genres dans l’histoire de la littérature. Leçons professées à l’École normale supérieure

Comme ses intentions ont changé de nature, elles ont changé aussi de juridiction. […] Tout a donc changé depuis eux dans le monde. […] En effet, la langue latine, par exemple, qu’ont écrite Cicéron et Virgile, était déjà fort changée du temps de Quintilien et encore plus du temps d’Aulu-Gelle. […] Voilà le grand mot prononcé : la critique change d’objet. […] et puisque cette société travaille à changer de structure et de forme, quoi de plus naturel que de retrouver dans l’histoire de sa littérature l’image de ses idées religieuses, politiques, sociales ?

703. (1864) Histoire anecdotique de l’ancien théâtre en France. Tome I pp. 3-343

Combien les temps sont changés et les tarifs modifiés pour les théâtres ! […] Il ne fut pas longtemps à s’apercevoir qu’il faisait fausse route, et il s’empressa d’en changer. […] Aujourd’hui, que les temps sont changés pour le théâtre ! […] Il est vrai de dire qu’il changea totalement la composition de ces ballets et les rendit à peu près supportables. […] Qu’il est changé !

704. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Werther. Correspondance de Goethe et de Kestner, traduite par M. L. Poley » pp. 289-315

Goethe, averti à l’avance, eût donc bien pu ne vouloir rien changer, sans compter qu’un autre dénoûment n’était pas si aisé à offrir. […] Supportez maints désagréments, chagrins, passe-droits, etc., parce que vous ne vous trouverez pas mieux quand vous aurez changé de séjour. […] Celui qui change de position perd toujours moralement et matériellement les frais de voyage et d’établissement, et reste en arrière.

705. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance. »

Ils me contestent le droit de dissoudre des Assemblées qu’ils trouveraient tout simple que je renvoyasse la baïonnette en ayant. » — « Ce qui m’afflige, répliqua Sismondi, c’est qu’ils ne sachent pas voir que le système de Votre Majesté est nécessairement changé. […] Il a tout changé pour elle, patrie, condition, figure, esprit. […] Toutes les circonstances extérieures et sociales empruntées au personnage de Mme Lindsay, et qui étaient faites dans le temps pour donner le change à la curiosité, ne détruisent pas cette vue intime.

706. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

La Révolution française a changé plus d’une fois d’aspect pour ceux qui se disent ses fils et qui sont sortis d’elle. […] Mais les temps sont autres, les devoirs ont changé, les applications directes qu’on prétendrait tirer seraient trompeuses. […] La Révolution, tout imparfaite qu’elle soit, a changé la face de la France, elle y développe un caractère, et nous n’en avions pas ; elle y laisse à la vérité un libre cours dont ses adorateurs peuvent profiter. » Les rapides conquêtes de 89, on le voit, étaient loin de lui suffire ; sa méfiance, son aversion contre les personnages dirigeants de cette première époque, ne tardent pas à éclater.

707. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (3e partie) » pp. 5-56

De là les lois sur la génération pure de l’espèce, sur l’autorité paternelle, sur la piété filiale ; instincts changés en devoirs de tous les côtés ; spiritualisme de cette trinité plus morale que charnelle ; sollicitude pour l’enfant, assistance dans l’âge mûr, tendresse et culte pour la vieillesse, le plus doux des devoirs, la justice en action, la reconnaissance, mille vertus en un seul devoir ! […] Ils ne savent ni fonder ni conserver, ils ne savent que détruire et changer sur la terre ; ils sont le vent qui balaye le passé. […] Des râteliers toujours pleins, dans cette vaste étable de l’humanité, changent-ils la nature de cette bête de somme plus ou moins repue qu’ils appellent la société humaine ?

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