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913. (1899) Musiciens et philosophes pp. 3-371

J’admire ce mystérieux pouvoir de soumettre une foule de passions particulières, se développant chacune en des sens différents, à la grande ligne directrice d’une unique passion totale. […] « Admirez particulièrement la profondeur de cette dernière vue ! […] Veut-on admirer Wagner, qu’on le contemple à l’œuvre : comme il sépare, comme il obtient de petites unités, comme il les anime, comme il les fait ressortir, comme il les rend visibles ! […] On admire en lui ce que de jeunes Français admirent en Victor Hugo, la largesse royale ; plus tard, on admire l’un et l’autre pour des raisons opposées : comme maîtres et modèles d’économie, comme des hôtes intelligents. […] Il faut tirer de pair Félix Mendelssohn, ce maître alcyonien qui, à cause de son âme plus légère, plus pure et plus heureuse, fut oublié aussi vite qu’il avait été admiré : comme un bel intermède dans la musique allemande.

914. (1906) La rêverie esthétique. Essai sur la psychologie du poète

La poésie, si réellement elle mérite d’être admirée, doit résister à cette épreuve. […] Il est clair par exemple que nous ne trouverons pas le même charme à un chant triste qu’à un chant d’allégresse, et que si nous admirons autant l’un que l’autre, ce ne sera pas de la même manière. […] Je puis les lire avec intérêt, admirer leur ingéniosité, leurs qualités de facture, la justesse, la profondeur de la pensée. […] Entre ceux qui admirent Victor Hugo, ceux qui s’enchantent de Lamartine ou qui se délectent dans Mallarmé, il ne sera pas facile de s’entendre. […] Tout ce qu’il mettra d’idées dans son œuvre nous la fera davantage admirer ; ses vers en seront d’autant plus beaux : mais ils n’en seront pas plus poétiques.

915. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

Cependant l’imagination étonnée en admire d’autant plus l’auteur, comme s’il avoit crée les choses et que la matiere ne les eût pas présentées. […] Oüi sans doute cela eût été plus raisonnable : mais son inflexibilité a l’air plus grand : on admire qu’il ne plie pas, sans songer qu’il devroit plier. […] On admire moins, mais on est plus touché. […] Vous avez admiré, vous avez pleuré au tragique ; vous avez ri ensuite au burlesque ; n’esperez pas, en revoyant le tragique, en être émû comme vous l’avez été. […] J’admire les critiques de perdre tant de raisons à prouver qu’un ouvrage qui plaît universellement, n’auroit pas dû plaire.

916. (1864) Le roman contemporain

Les fraîches idylles, les bucoliques pleines de couleur qu’on avait admirées dans ses compositions précédentes, se sont multipliées sous sa plume, sans étouffer complètement les échos moins purs qui lui viennent du passé. […] Jules Sandeau, le jour de sa réception à l’Académie : « J’admire les délicieuses scènes dont vous donnez le récit, et j’accepterais même votre donnée première si vous ne la poussiez pas à outrance. […] Il faut qu’on l’admire, qu’on partage l’enthousiasme qu’il éprouve pour lui-même ; il veut qu’on l’estime et qu’on l’aime. […] J’admire déjà moins l’évêque qui ne veut pas que sa maison soit fermée la nuit, sous prétexte qu’il est écrit que si Dieu ne garde pas une maison, elle ne sera jamais bien gardée. […] Victor Hugo veut nous faire admirer, c’était leur ignorance profonde, qui n’avait rien d’égal que leur monstrueuse vanité, comme M. 

917. (1904) Propos littéraires. Deuxième série

C’est ineffable à quel point nous voulons qu’on nous admire ! […] On commence par admirer les grands modèles que l’on s’est mis sons les yeux. […] Ducros analyse très bien et admire trop, et qui n’est qu’une « discipline sociale ». […] Mais, même où ils admirent du plus grand cœur, ils sont sobres ; ils ont de la tenue dans la forme et dans l’expression. […] Prompt à la critique en toute chose, il ne semble pas avoir la faculté d’admirer.

918. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

La Bruyère écrivait en un temps où Bossuet, ignorant l’hébreu, admirait, dans la Bible, de sublimes contresens. […] Le peuple admirait les lions d’or, les coussins dorés et les soies écarlates ‘de l’estrade royale. […] Mais il ne suffit pas d’admirer ; il faut comprendre. […] Ce paysage, que vous admirez, vous asservit. […] Anatole France, qui est, avant tout, artiste et philosophe, eût admiré cette passion effrénée » cette éloquente déraison.

919. (1905) Promenades philosophiques. Première série

Mais j’admire plus encore le critique dont les mains créatrices donnent une vie et une force terrible à tout ennemi qu’elles touchent. […] Bossuet a été admiré constamment depuis trois siècles : mais à chaque siècle les motifs de l’admiration ont changé. […] Ils ont raison de s’inquiéter de cela : le fond et la forme sont inséparables, et l’on ne peut admirer l’un sans admirer l’autre en même temps. […] Mais j’ai pris cette occasion pour donner, à ceux qui ne le posséderaient pas, un nouveau prétexte pour admirer Gœthe, le prétexte scientifique. […] C’est l’homme ici qu’il faut admirer : il a fait, avec la nature, qui est une matière, ce que l’architecte fait avec des pierres : une construction.

920. (1898) Émile Zola devant les jeunes (articles de La Plume) pp. 106-203

Je sais que l’on feint de préférer aux suffrages du peuple la gloire d’être admiré par un petit groupe d’initiés. […] Aussi devons-nous les admirer, eux et leurs continuateurs, les Auguste Comte et les H.  […] Tous ont été admirés par des causes étrangères au meilleur de leur œuvre spirituelle, qui prolongea son rayonnement, mais en haut, dans la partie intellectuelle du Public. […] S’enfermer, volontairement, loin d’elle, me semble aussi vain que lui prêcher directement l’admiration, puisqu’elle ne peut admirer un poète que s’il est doublé d’un homme d’action.

921. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIe entretien. Sur le caractère et les œuvres de Béranger » pp. 253-364

Je vous admire comme homme et je vous plains comme roi. […] L’Europe vous admirait, les royalistes se ralliaient à vous, les constitutionnels vous livraient la Constitution comme à ceux qui avaient su la défendre et la sauver ! […]   Tous les cœurs étaient contents ;   On admirait son cortège. […] » XXXIII Puis c’étaient de jeunes ouvriers en grand nombre qui se trompaient de vocation en prenant leur travail manuel en dégoût et qui s’admiraient eux-mêmes dans des vers incultes qu’ils prenaient pour des promesses de génie, parce qu’ils ignoraient les conditions rares et providentielles du vrai génie.

922. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Indiana (1832) »

On admire le talent dans cette dernière moitié ; mais ce n’est plus la vérité palpitante, l’impression franche, l’émotion du commencement. 

923. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Virgile et Constantin le Grand par M. J.-P. Rossignol. »

Je ne suis pas un si fervent adorateur de Théocrite que l’était Huet, qui nous apprend lui-même que, dans sa jeunesse, chaque année au printemps, il relisait le poëte de Sicile ; j’ai pourtant fait plus d’une fois le charmant pèlerinage, et chaque fois, après avoir admiré la vivacité spirituelle et ingénue des personnages, la grâce piquante et naïve du dialogue, la vérité des peintures, je me suis préoccupé de la construction du vers, de ces ressorts cachés que le poëte met en jeu pour produire plusieurs de ses effets. » Le résultat de ces observations multipliées et patientes, c’est que le dactyle peut s’appeler l’âme de la poésie bucolique , et que, sans parler du cinquième pied où il est de rigueur, les deux autres places qu’il affectionne dans le vers pastoral sont le troisième pied et le quatrième, avec cette circonstance que le dactyle du quatrième pied termine ordinairement un mot, comme pour être plus saillant et pour mieux détacher sa cadence.

924. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Alexandre Dumas. Mademoiselle de Belle-Isle. »

N’admirez-vous pas l’importance du serment à la scène et le merveilleux ressort qu’il fournit à nos auteurs qui ne craignent pas de faire peser toute une pièce là-dessus ?

925. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Réponse à M. Dubout. » pp. 305-316

Sarcey et Faguet ont admiré votre quatrième acte.

926. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Musset, Alfred de (1810-1857) »

On ne l’a point admiré, on l’a aimé ; c’était plus qu’un poète, c’était un homme.

927. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre II. La commedia dell’arte » pp. 10-30

Citons l’Arioste, le cardinal Bibbiena, Machiavel, Ruzzante, Pietro Aretino, Francesco d’Ambra, Ludovico Dolce, Annibal Caro et des milliers d’auteurs qui firent admirer surtout la complication et la singularité des intrigues qu’ils inventaient et les grâces souvent trop libres de leur dialogue.

928. (1890) L’avenir de la science « I »

Il y a un grand foyer central où la poésie, la science et la morale sont identiques, où savoir, admirer, aimer sont une même chose, où tombent toutes les oppositions, où la nature humaine retrouve dans l’identité de l’objet la haute harmonie de toutes ses facultés et ce grand acte d’adoration, qui résume la tendance de tout son être vers l’éternel infini.

929. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre III. L’analyse externe d’une œuvre littéraire » pp. 48-55

« Montrons, dans un prince admiré de tout l’univers, que ce qui fait les héros, ce qui porte la gloire du monde jusqu’au comble : valeur, magnanimité, bonté naturelle, voilà pour le cœur ; vivacité, pénétration, grandeur et sublimité de génie, voilà pour l’esprit ; ne seraient qu’une illusion, si la piété ne s’y était jointe, et enfin que la piété est le tout de l’homme. » 10.

930. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Préface. de. la premiere édition. » pp. 1-22

Le Théatre de la Littérature est envahi par trois sortes d’ennemis qui le dégradent : une Philosophie tyrannique & inconséquente y suffoque ou corrompt le germe du talent ; le faux goût y anéantit les vrais principes ; une aveugle facilité à tout admirer, acheve d’en bannir l’émulation & de décourager le mérite.

931. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 24-41

On y admire, à chaque page, un art séduisant de peindre & d’animer tous les objets, de présenter à l’imagination les détails de la Physique avec toutes les richesses de la Poésie.

932. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre huitième. »

La cause de cette différence vient de ce que le chien n’étant pas obligé d’être moral, en admire son instinct dont il fait ici un très-bon usage.

933. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre XVII. Morale, Livres de Caractéres. » pp. 353-369

On y admire cette connoissance profonde de la Religion, cet amour de la vertu, cette éloquence de style qui le distinguoient parmi le petit nombre des bons écrivains de son tems.

934. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 12, des siecles illustres et de la part que les causes morales ont au progrès des arts » pp. 128-144

Les annales du genre humain font mention de quatre siecles dont les productions ont été admirées par tous les siecles suivans.

935. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Eugène Talbot » pp. 315-326

Comme les écrivains les plus admirés qu’il y ait dans l’Histoire littéraire, et j’oserais dire les plus immortels parmi les immortels, Hérodote écrivait à une époque où la langue avait ce degré d’accomplissement dans la jeunesse qui s’accordait le mieux avec son genre de génie.

936. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution d’Angleterre »

S’il ne le porte pas cependant, il faut prendre occasion de là pour admirer, dans un temps où toutes les sciences ont leur ivresse, la forte sobriété du procédé employé de préférence par l’homme qui doit la source de tous ses genres d’illustrations à l’Histoire, et qui, en écrivant de simples biographies, en dit profondément le dernier mot.

937. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Laïs de Corinthe et Ninon de Lenclos » pp. 123-135

Le tort des écrivains qui, comme Debay, respectent et admirent les courtisanes, et se persuadent bonnement que les ronds de jambe de ces danseuses-là importent à la postérité, c’est de croire qu’elles subjuguent et entraînent les hommes en vertu d’une habileté quelconque, d’un don de l’esprit ou de l’âme uni à cette beauté du corps qui rend le triomphe si facile.

938. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « W.-H. Prescott » pp. 135-148

Mais l’histoire de Prescott disposera les esprits hostiles et rebelles à cette grande et future histoire, qui les fera taire et qui les contraindra à admirer.

939. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Silvio Pellico »

Nous avons voulu dire d’un homme dont toute la supériorité est dans l’âme, et pour lequel nous avons une affection qu’il nous fallait cacher à cause de ceux qui étalaient la leur pour lui avec un intérêt perfide : maintenant que Silvio Pellico n’est plus qu’un chrétien qui baise sa croix et que renient les sociétés secrètes, nous pouvons tout haut l’admirer !

940. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « L’abbé Galiani »

L’une de ces lettres, très grave, très noble et très éloquente, est de la Reine Caroline, qui exhorte avec ferveur l’homme qu’elle admire à mourir en chrétien, et l’autre est la réponse du mourant, qui déclare que, malgré ses erreurs et ses péchés, il n’a pas cessé d’être chrétien et de demander à Dieu sa miséricorde.

941. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXVII. Silvio Pellico »

Nous avons voulu dire d’un homme dont toute la supériorité est dans l’âme, et pour lequel nous avons une affection qu’il nous fallait cacher à cause de ceux qui étalaient la leur pour lui, avec un intérêt perfide : Maintenant que Silvio Pellico n’est plus qu’un chrétien qui baise sa croix et que renient les sociétés secrètes, nous pouvons tout haut l’admirer !

942. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Gérard de Nerval  »

Le fantaisiste Gérard de Nerval, ce poète du temps de la poésie échevelée, ce romantique de la meilleure époque, est, avant tout, dans ce livre : le meilleur de ses livres, un esprit calme, impartial, exact, voyant les faits et les exprimant dans un style élégant, précis, d’un coloris tempéré et certainement plus classique que romantique, mais d’un classique teinté d’une couleur sobrement éclatante que Fontanes aurait admirée !

943. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Vigny. Œuvres complètes. — Les Poèmes. »

………………………………………………… Vos anges sont jaloux et m’admirent entre eux… Et cependant, Seigneur, je ne suis pas heureux !

944. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre V. Des Grecs, et de leurs éloges funèbres en l’honneur des guerriers morts dans les combats. »

Je ferai comme ces peintres qui ne pouvant transporter avec eux un antique pour le faire admirer, en crayonnent rapidement les contours et les principaux traits : presque tout le mérite de la figure échappe, mais on connaît du moins les mouvements et l’attitude.

945. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre V. Autres preuves tirées des caractères propres aux aristocraties héroïques. — Garde des limites, des ordres politiques, des lois » pp. 321-333

Admirons la sagesse et la gravité romaines, en voyant au milieu de ces révolutions politiques les préteurs et les jurisconsultes employer tous leurs efforts pour que les termes de la loi des douze tables, ne perdent que lentement et le moins possible le sens qui leur était propre.

946. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre VI. La poésie. Tennyson. »

On admirait combien ce regard minutieux et ce sentiment délicat savaient en saisir et en interpréter les aspects mobiles. […] On le disait riche, adoré des siens, admiré de ses amis, aimable, exempt d’affectation, naïf même. […] On ne l’a point admiré, on l’a aimé ; c’était plus qu’un poëte, c’était un homme.

947. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIVe entretien. Littérature, philosophie, et politique de la Chine » pp. 221-315

Nous avions préparé depuis longtemps ces entretiens littéraires sur la Chine ; comme tous ceux qui l’ont profondément étudiée, nous l’admirons. […] Il fit un dernier effort pour rappeler ce qu’il avait jamais eu de cet enjouement grave, qui, loin de déparer la sagesse, lui sert comme d’ornement pour la faire admirer. […] Il feuillette jour et nuit les Kings, ces livres historiques et sacrés dont les textes mutilés ou à demi effacés avaient disparu à moitié de la mémoire des peuples, il les recouvre, il les restitue, il les commente, il les complète et il dit à ses contemporains corrompus : « Lisez et admirez, voilà l’âme, les lois, les mœurs de vos ancêtres, conformez votre âme, vos lois, vos mœurs nouvelles à leur exemple et à leurs préceptes. » Voilà toute la révélation de Confucius ; c’était celle qui convenait par excellence à une race humaine aussi exclusivement raisonneuse et aussi dépourvue de vaine imagination que le peuple chinois.

948. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (2e partie) » pp. 5-80

Admirez la profonde réflexion du peintre, qui pouvait être tenté par un beau chêne aux bras tortueux ou par quelques fraîches fleurs de lotus endormies sur le lit des eaux. […] On le regarde, on l’admire ; il suffit. […] Depuis que nous avons admiré les merveilleux portraits saisis à un éclat de soleil par Adam Salomon, le statuaire du sentiment, qui se délasse à peindre, nous ne disons plus c’est un métier ; c’est un art ; c’est mieux qu’un art, c’est un phénomène solaire où l’artiste collabore avec le soleil !

949. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre troisième »

Ennuyeux peut-être pour qui vient d’éditer Boileau, et d’y admirer, dans la perfection même de l’art d’écrire en vers, une image si pure de l’esprit français. […] Il honorait et admirait ceux qui l’en tiraient pour la répandre. […] On admire dans ce poète des expressions vives pittoresques, trouvées ; un style en apparence plus difficile à comprendre, à la première lecture, que celui de Charles d’Orléans, parce qu’il est plus vrai, plus senti plus français.

950. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

Tite-Live en a fait naïvement l’aveu : « S’il doit être permis à un peuple, dit-il, de rendre son origine plus auguste en la rapportant aux dieux, telle est la gloire militaire du peuple romain, que lorsqu’il lui plaît de se donner le dieu Mars pour père, le genre humain le souffre comme il a souffert sa domination22. » J’admire cette fierté patriotique ; mais le genre humain affranchi de Rome ne s’accommode plus de ce que souffrait le genre humain sujet de Rome, et pour chaque nation, comme pour chaque ville, la seule origine glorieuse est la vraie. […] Pendant que le public lettré admirait dans Charles XII l’histoire réformée par le bon esprit philosophique, et, parmi toutes les grâces du récit, un air de liberté, de vérité inconnu jusqu’alors, Buffon composait le premier ouvrage français où la science ait été exposée dans la langue des grands écrivains. […] J’y veux bien reconnaître aussi, avec Marmontel, l’élégance, pourvu que ce ne soit pas celle que Marmontel refuse à Boileau, et qu’il admire au même degré dans Quinault et dans Racine ; et le coloris, pourvu qu’il s’agisse de l’art de mettre les objets dans le meilleur jour.

951. (1894) Textes critiques

Jean Volane, les Fusains, qu’admireront tous ceux pour qui le noir, le pris et le blanc exigent, qui peignent un toit au noir d’ivoire, par insouvenance de la kaléidoscopique perception visuelle des violets mordorés et des roses de lèvres mortelles de ce manteau de cercueil plié, et ne savent faire jaillir du charbon lumineux manié des larmoyances de kahnien pourpre funèbre et de permanganate clair-de-lunaire. […] N’était ce plagiat, j’admirerais franchement la composition symbolique, largement, puissamment traitée, où s’harmonise la brutalité des tons : — Sur un massif étalon noir un homme nu ; le plat de son épée sanglante pèse sur l’épaule droite ; sa tête est ceinte de lauriers, un rictus effrayant contracte sa bouche. […] S’il en est ainsi, nous voulons bien subir la perversité de vers très luxurieux et admirer, encore une fois, des tableaux de femmes nues qu’absolvent heureusement, à la fin du recueil, Koundry et Yseult.

952. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

Cette année-là, on admirait cela en France. […] Son père, déjà vieux, riche et noble seigneur, Quoique avare, l’aimait, et n’avait de bonheur Qu’à la voir admirer, et quand on disait d’elle Qu’étant la plus heureuse, elle était la plus belle. […] Il y a, au salon de peinture de cette année, à Paris, un petit tableau de Gérôme, que j’ai admiré hier et qui me semble représenter parfaitement la disposition d’esprit d’Alfred de Musset à cette époque de sa vie.

953. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre III. Le roman » pp. 135-201

Dans Salammbô nous n’admirions guère que la prodigieuse maîtrise du styliste et l’art achevé de la composition. […] Certes, j’admire autant que vous les autres formes du roman (psychologique, social, historique, etc.), et je n’en méconnais point le très grand intérêt. […] Ils vantent particulièrement Fromentin, dont les livres sur l’Afrique sont des chefs d’œuvres, et Pierre Loti qu’ils admirent bien qu’ils aient une vision opposée à la sienne, et moins fatale.

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