C’est un étrange défilé de gens de toute nation, de tout costume, de toute couleur, qui viennent déposer en faveur de la raison. […] En faisant la guerre au profit de la raison et de l’humanité, il fit le pirate pour son compte. […] Il n’a cru qu’à la raison : mais il a trop cru que ses habitudes, ses préjugés, ses partis pris étaient la forme universelle, éternelle de la raison. […] Il voit toutes choses du point de vue de la raison : l’idée du vrai est comme la catégorie de son esprit, hors de laquelle il ne peut rien concevoir. […] Pour la même raison, et par le même procédé, Voltaire est un charmant conteur.
Il lui parut « que la raison qu’on y cultivait n’était point la raison humaine, et celle qu’on appelle le bon sens, mais une raison particulière, fondée sur une multitude de lois qui se contredisent les unes les autres, et où l’on se remplit la mémoire sans se perfectionner l’esprit ». […] Il compte, parce que c’est la raison. […] Dans cette province de la poésie et du goût, où il se retranchait, il ne reconnaissait de souveraineté que celle de la raison universelle, qu’il écoutait parler en lui-même. […] L’esprit d’autrefois était un jeu savant, une escrime réglée : il y fallait de l’invention, mais aussi du jugement, de la raison et de la science. […] Dieu était nécessaire à sa raison ; et c’était le Dieu de sa raison qu’il adorait dans les Trois personnes du Dieu catholique.
Voici leurs raisons. […] Les premiers théologiens comme les premiers philosophes, ont eu raison de s’en servir pour intéresser les hommes par l’agrément, à ce qu’ils vouloient leur apprendre. […] Tâchons de découvrir les raisons, s’il y en a, d’une opposition si marquée. […] Mais cette raison tombe encore ; car le poëte épique ne donne pas non plus son ouvrage comme un travail humain, mais comme la révélation de quelque muse. […] Il resteroit encore assez de raisons de l’être pour ceux qui les passeroient en effet.
A l’instinct, au désir, à la raison ?. […] Entre ces deux pouvoirs aveugles (l’imagination et la volonté) est la raison, qui voit et juge. Tant que la raison domine, la liberté subsiste. » M. […] C’est ici surtout le cas de dire que comparaison n’est pas raison. […] En sorte que le développement de la liberté est en raison directe du développement de la raison, et que l’état de sagesse est le plus haut degré où puisse atteindre notre libre volonté.
Des métaphores ne sont pas des raisons. […] Schopenhauer n’a rien fait de plus que de la fonder en raison. […] La raison n’en est-elle pas bien évidente et bien simple ? […] ont-ils raison ? […] Parmi d’autres raisons qu’on en pourrait donner, je n’en indiquerai qu’une seule.
L’exercice de notre raison se réduit souvent à une règle de trois. […] Les élèves verront les phénomènes, mais ils en ignoreront la raison sans les connaissances préliminaires des deux premières classes. […] Il y a l’autorité des sens et celle de la raison. […] C’est un chef-d’œuvre de logique et de raison. […] — Mais ces raisons ne sont pas toutes les raisons de ce phénomène.
Au lieu que lorsqu’on sait combien elle diffère, on comprend beaucoup mieux les raisons qui prouvent que la nôtre est d’une nature entièrement indépendante du corps, et par conséquent, qu’elle n’est point sujette à mourir avec nous. » Vous le voyez, la grande raison pour laquelle les cartésiens ne voulaient pas que l’on attribuât une âme aux bêtes et voulaient que l’on considérât les bêtes comme des machines, cette raison est une raison religieuse ; une raison de philosophie spiritualiste, si vous voulez, mais, en même temps, une raison religieuse. […] La Fontaine ne vous dit pas : Il faut que la raison du plus fort soit toujours la meilleure ! […] c’est ce qu’il faut croire ; il faut croire que le loup a raison, il est le plus fort, sa raison est la meilleure. […] » Napoléon me paraît avoir raison. […] Par conséquent, voilà une première raison.
Nous formons la notion d’infini par abstraction et par déduction, en nous appuyant sur les principes d’identité et de raison suffisante. […] Cette impossibilité d’une limite, résultant de « l’égalité des raisons », comme disait Leibnitz, est l’infinité. […] Ils ont raison de dire, en d’autres termes, que la pensée ne saurait se ramener entièrement aux choses qu’elle pense ni s’expliquer entièrement par elles. […] L’expression logique de la première loi est le principe d’identité, qui préside à tout raisonnement ; l’expression logique de la seconde loi est le principe de raison suffisante. […] — Identité et raison suffisante.
Enfin, pour tout réduire à la plus simple expression, les uns placent la raison des lois de la société dans la société même, et les autres dans l’homme. […] Si les hommes qui appartiennent à la première classe dont nous avons parlé sont plus attachés aux idées anciennes, la raison en est bien simple. […] Socrate, injustement condamné à mort, n’allégua, pour ne point se soustraire à l’iniquité de son jugement, d’autre raison que son respect pour la loi. […] Ces néophiles, ainsi égarés, ne peuvent prêter à leurs opinions que la lumière de leur esprit, sans y ajouter l’autorité d’une raison supérieure. […] Enfin il en est qui, sentant un obstacle invincible à comprendre les idées nouvelles, mais sentant aussi que ces idées doivent être fondées en raison, veulent s’expliquer ce qui leur est si profondément antipathique.
L’homme ne peut vivre sans manger ; ce qui n’empêche pas que, s’il n’y a pas une raison spéciale qui vienne du sujet, on ne fait pas dîner devant nous les héros du roman, ni les personnages de l’histoire. […] Il va de soi que, si vous avez une raison décisive, incontestable, il ne faudra pas vous amuser à dérouler une série de probabilités ou d’arguments peu concluants. […] Il est bon de contrôler par les faits les conclusions de la théorie ; il est bon aussi d’appuyer les vérités d’expérience sur les principes de la raison. […] Il ne suffit pas alors de donner les raisons pour lesquelles on s’est rangé d’un côté : il faut aussi discuter celles qui pourraient engager à passer de l’autre. […] Mais il n’est guère possible qu’il ne faille pas démolir la thèse adverse avant d’élever la sienne : c’est une règle qui ne souffre guère d’exception, et l’on peut dire que dans toute question sujette à controverse, où l’on peut répondre sans absurdité : oui ou non, il faut examiner d’abord les raisons qui engagent à répondre oui, quand on doit répondre non, et commencer par les raisons qui sont en faveur du non, quand on doit conclure par le oui.
Qui me garantit que j’ai raison de croire avec le sens commun que ce philosophe n’est qu’un fat ? […] Elle ne croit pas avoir raison contre tout le monde. […] Vous en êtes sûr : où est la raison de votre certitude, et la garantie de leur justesse ? Je nie qu’elles soient justes, moi théoricien, moi dialecticien ; démontrez que j’ai tort et qu’elle a raison. […] Lysidas a bien raison, Uranie est une détestable logicienne.
on a bien raison de dire que les faucons n’arrachent pas les yeux aux faucons. […] Seulement, poussant plus avant, en raison des habitudes et de la puissance métaphysique de sa pensée, il a fait trouée, lui, jusque dans l’argumentation philosophique. […] La science, la seule science qu’il reconnaisse, avec raison, et qui importe à l’homme : la science de son être et de l’Être, il ne l’entend que dans le sens révélé du mot. […] Cette loi sublime, il la montre et la suit dans tous les phénomènes qu’ils appellent, eux, le mal de la vie : la faim, — tout commence par la faim, dit-il, — le travail, l’esclavage, les infirmités des organes, les maladies, la vieillesse, — dont il donne la raison divine, la raison suprême et rayonnante, — et enfin la mort, qui commence la grande vie. […] … C’est un mystique malgré la force de sa raison, ou plutôt c’est un mystique dont la force de raison pourrait bien faire équation à la force de son sentiment de mystique, confluent superbe de deux facultés !
Sur ce point, chrétiennement et toujours raisonnablement, repose toute l’éducation telle que la conçoit Mme de Maintenon et telle qu’elle voulut l’établir à Saint-Cyr : « Inspirer la religion et la raison, c’est là le solide de l’éducation de Saint-Cyr. » — « Le christianisme et la raison, qui est tout ce que l’on veut leur inspirer, sont également bons aux princesses et aux misérables. » Mais ceci demande quelque éclaircissement. […] Son sexe en particulier est fait pour obéir, elle le sait : aussi la raison qu’elle recommande tant et sans cesse n’est point du tout un raisonnement ni une enquête curieuse ; gardez-vous de l’entendre ainsi. C’est une raison toute chrétienne et docile : « Vous ne serez véritablement raisonnables qu’autant que vous serez à Dieu. » Elle ne la sépare jamais de la piété ni d’une entière soumission aux décisions supérieures. […] je le croirais volontiers ; mais ne serait-ce point aussi chez elle un peu de nature qui manque, un peu de tendresse qu’on voudrait dans cette raison, et sans prétendre certes diminuer en rien le christianisme qui la règle et l’accompagne ? […] c’est précisément ce don des larmes que, même toute part faite au grave caractère d’institutrice, on regrette de ne jamais sentir, de près ni de loin, dans le cœur ni sous la raison de Mme de Maintenon ; et au milieu de tous les éloges et de tous les respects que mérite son noble, son juste, délicat et courageux bon sens, c’est aussi la seule réserve et la seule restriction que j’aie voulu faire.
Körting avait pourtant aussi raison. […] C’est Escobar qui a raison. […] Bien au contraire, tout ce qu’il enlevait à l’autorité de la raison pure, il se proposait de le restituer à la raison pratique, et ainsi de fonder, sur les ruines de l’ontologie, la certitude et la souveraineté de la loi morale. […] Elle se sert de ses forces pour argumenter contre Dieu ; et elle ne comprend pas que ce Dieu ne serait pas Dieu si sa nature pouvait se circonscrire à la médiocrité de l’humaine raison. — « L’obscurité de notre religion prouve la vérité de notre religion », — et si nous croyions par raison, c’est alors que nous n’aurions vraiment plus de raisons de croire. […] Non content cependant d’avoir ainsi détruit le pouvoir de la raison, c’est encore contre Descartes que Pascal rétablit l’intégrité de la nature humaine, en substituant à la raison le cœur, « avec ses raisons que la raison ne connaît point », et l’autorité du sentiment à celle du calcul ou du raisonnement.
Pour d’autres raisons que M. […] Il a raison. […] Lequel a raison ? […] Pierre Lasserre a bien raison. […] Homais qui a raison.
Quelques années se passent ; l’amour paternel s’affaiblit, la vanité offensée s’apaise ; ils relisent leur ouvrage de sang-froid, et ils trouvent que leurs juges ont eu raison. […] Jusque-là tous les raisonnements de part et d’autre seront en pure perte ; les uns croyant avoir la raison pour eux, et les autres réclamant l’usage et l’habitude, devant lesquels la raison doit se taire. […] L’un est le poète du cœur, l’autre est celui de l’esprit et de la raison. […] Entre plusieurs raisons qu’on en pourrait apporter, et qui se présentent assez facilement, en voici une que je soumets au jugement des maîtres qui m’écoutent. […] Il est vrai qu’indépendamment de la versification, il y a une autre raison du refroidissement nécessaire qu’on éprouve en les lisant, c’est le peu d’intérêt qui règne (au moins pour nous) dans ces longs ouvrages ; et ce qui le prouve, c’est l’impossibilité absolue de les lire dans la meilleure traduction.
Elle n’en avait pas la race, mais elle en avait la raison, qui n’est d’aucune race. […] L’essentiel, c’est qu’elle n’aimât point ; c’est qu’elle ne se permît pas l’indécence d’une adoration hors d’âge, qui dérangerait l’idéal de raison et de sens commun que M. de Mouy a dû se faire de cette femme dont Voltaire aurait dit : Qui n’a pas l’esprit de son âge, De son âge a tout le malheur ! […] Pour ceux qui voient plus haut que lui, l’irréprochable raison de Madame Geoffrin n’en demeura pas moins tout ce qu’elle était et ne s’affaiblit ni ne se faussa parce qu’elle aima ; et même ce fut là une épreuve pour cette raison qui ne fléchit pas une seule fois dans la conduite de sa vie, et la preuve de sa solidité. […] Il aurait glissé sur son âme, et il se trouverait que M. de Mouy aurait eu raison, en la défendant de l’amour ! […] Raison meilleure encore que la grande raison de Madame Geoffrin pour que l’amour de tous les deux soit resté, dans le moins platonique des siècles, un pur platonisme et un platonisme sans platitude, comme le platonisme l’est souvent.
La théorie de la certitude, malgré le style qui fit un instant sa fortune, la théorie de la certitude, qui est le principe un peu brutal du nombre introduit en philosophie, a péri sous le nombre des attaques, — et nous ajouterons sous leur raison, car le nombre ne nous suffit pas. […] Il n’en restera pas moins acquis comme un enseignement qui vient à temps, que cette faiseuse de découvertes, la métaphysique du xixe siècle, représentée par une intelligence très digne d’elle, est arrivée à confesser tout simplement au nom de la science ce que la philosophie moderne regardait de fort haut, c’est-à-dire la vieille induction tirée des facultés de l’homme aux attributs de Dieu, et le grand raisonnement, mêlé de raison et de foi, des causes finales. […] Seulement, cette méthode, qui brille plus ou moins dans toutes les grandes philosophies du passé, et qui n’est, après tout, dit l’abbé Gratry quelque part, « que le haut emploi d’un procédé général de la raison », il l’a faite sienne à force de l’avoir précisée, affinée, et pour ainsi dire affilée, comme un instrument de découverte, une espèce de pince intellectuelle avec laquelle, quand il abordera plus tard les applications spéciales de la philosophie, il pourra mieux saisir la vérité. […] Les idées d’infini, de perfection, sont les premières que la raison nous montre lorsqu’elle s’éveille, ce qui veut dire que la raison nous pousse à Dieu d’abord ! […] C’est appuyé sur sa méthode qu’il gravit les questions presque inaccessibles des attributs de Dieu, des deux degrés de l’intelligible divin, et celle des rapports, depuis longtemps confondus et troublés, de la raison et de la foi, et l’on reste étonné des résultats de clarté, de simplicité, d’évidence, auxquels il arrive sous l’influence de cette méthode, qu’il aurait moins découverte que précisée, si, en métaphysique, préciser n’était pas le plus souvent découvrir.
Ce n’est que le ton d’une raison sage, simple et tranquille. On a dit que Boileau était le premier parmi nous qui eût mis la raison en vers. Il me semble qu’il est le premier qui ait mis en vers les préceptes de la raison, en matière de goût et de littérature ; mais La Fontaine a mis en vers les préceptes de la raison universelle, comme Molière y a mis ceux qui sont relatifs à la société ; et ces deux empires sont plus étendus que ceux du goût et de la littérature. […] On dit avec raison : l’honnête homme ne met aucune affiche. […] Il fût devenu fou : la raison d’ordinaire….
Des raisons ? […] La raison a un critérium qui est l’évidence. […] La raison en frémit. […] C’est eux qui avaient raison. […] » — Tout le monde a raison.
La raison décide en maîtresse. […] Je ne vous donne que deux arguments, deux des raisons particulièrement saillantes alléguées par Boileau. […] Vous pensiez voir arriver le mot de raison parce qu’on a toujours dit : le classicisme c’est la raison ! […] la raison chez les poètes ! Il ne faut pas parler de raison, il faut parler de vérité.
Le ressort de cette prud’homie, « c’est la loi de nature, c’est-à-dire, l’équité et raison universelle qui luit et éclaire en un chacun de nous. […] Dans le spectacle de ce monde et dans le rôle qui y est départi à l’homme, il plaide, par des raisons plausibles, les causes finales, et maintient pour vrai le but apparent des choses, en se tenant au point de vue de l’optique humaine. Il donne raison à plus d’un préjugé contre le paradoxe. […] Il a des pages très ingénieuses, très fines, sur l’instinct et la raison, sur les caractères qui les spécifient, perfection prompte, courte et immobile, d’un côté, perfectibilité de l’autre. […] Il y a de la raison, il y a aussi de la rhétorique chez tous deux, etc. » 44.
L’homme n’est pas un seul moment privé de la raison qui conçoit ces idées. […] La seule autorité morale de cette époque de ténèbres, la foi, malgré les sourdes résistances de la raison, finissait toujours par rester la maîtresse. […] Et si j’eusse voulu, par esprit, de contradiction et de malice, combien n’aurais-je pas trouvé de meilleures raisons encore pour l’affaiblir et la rabaisser ! […] Ils ne connaissent point le passé, ou ils le connaissent encore plus mal que les clercs ; ils pensent dans un lieu et dans un temps, avec une raison qui n’a pas de traditions qui ne sait pas qu’elle est la raison universelle. […] Leur imagination se repaît des choses présentes ; leur raison ne pénètre pas au-delà, et ne voit que les effets dans leur suite et leur ordre matériel.
. — Comment ce grand homme a tort et raison à la fois. — § XIV. […] Le doute est comme le châtiment d’une trop grande confiance dans la raison individuelle. […] La raison disparaît, le sentiment se dessèche, sous l’appareil des formes syllogistiques. […] Bossuet a raison dans tout ce qui est de la théologie. […] Ce qui fait, après la lutte, l’équilibre, c’est que la raison se rend maîtresse.
Ne craignons point d’user de notre raison : elle est l’arbitre naturel de tout ce que les hommes nous proposent. […] Ces conséquences ne sont-elles pas l’ouvrage du préjugé, plutôt que de la raison ? […] Je crois avoir des raisons plus concluantes pour le sentiment que j’avance. […] Que de raisons d’estime ; mais toutes étrangeres au mérite de l’iliade en tant que poëme ! […] Tout cela n’est point la raison ; et cependant, c’est à elle seule qu’il appartient d’apprétier toutes choses.
Jouffroy ; je dis précisément qu’il n’y a plus de religion possible, parce que le temps de l’inspiration est passé, et que désormais la raison seule domine. » Mais M. […] Dans le cas présent d’ailleurs, il est une raison profonde pour que l’inspiration soit dégagée de toutes ces apparitions, de tous ces messages angéliques ou diaboliques qu’elle évoquait à sa suite dans le passé. […] Jouffroy a conclu qu’il n’y avait que la raison individuelle qui pût répondre à chacun de nous et résoudre nos doutes, soit en nous donnant une solution, soit en nous démontrant qu’il n’y en a pas, ce qui est aussi une manière de nous apaiser, selon lui ; il faut convenir que cette manière-là serait singulière ! […] Jouffroy va s’efforcer d’y arriver à l’aide de l’observation psychologique et de l’induction ; car, dit-il, ce sont les idées qui gouvernent les individus, ce sont les idées qui gouvernent également les nations ; c’est par conséquent dans les idées du moi et dans la raison individuelle qu’on peut seulement trouver la solution du problème social. Le sentiment, à ses yeux, est chose tout à fait subalterne et à la suite de la raison.
L’unité de conscience veut un vrai centre, un centre effectif, et la raison humaine sera toujours hors d’état de comprendre que la pluralité puisse se percevoir elle-même comme unité sans l’être effectivement. Telle est la raison permanente et indestructible du spiritualisme, raison que Kant lui-même appelle l’Achille de l’argumentation dialectique. […] Par la même raison, Dieu est la vérité de l’esprit, il est l’esprit en soi, l’esprit absolu. […] Cette doctrine répond à un besoin d’imagination, non de raison. […] Il a raison ; l’une et l’autre sont la vérité : Dieu est à la fois et en nous et hors de nous.
En un mot, c’est à l’examen qu’il en appelle, et il s’engage, au nom du christianisme, à avoir raison. […] Guizot, c’est de ne voir dans l’esprit humain que la raison, d’exclure le cœur, de mutiler l’homme. […] Jouffroy, l’homme croit par instinct et doute par raison. […] Voici les raisons que donne M. […] Les textes théologiques mis à part, voici les raisons de M.
On ne peut cependant nier que le Gouvernement ne soit interessé à multiplier les Ouvrages capables de rappeler les Littérateurs aux principes du goût & de la raison. […] L’esprit d’anarchie s’est répandu sur tous les genres : en matiere de goût, comme en matiere de raison, tout se réduit à l’arbitraire ; le plus grand nombre des Ouvrages d’agrément annoncent l’oubli des regles, l’amour des systêmes, le renversement des principes reçus ; les Ouvrages de morale ne sont le plus souvent que le fruit d’une imagination indépendante, qui assujettit à ses caprices les sentimens, les devoirs, les bienséances ; dans les Ouvrages de raisonnement, le sophisme triomphe, la Philosophie attaque les vérités les plus certaines, mine avec activité les fondemens de la Religion, des Mœurs, des Loix, rompt les nœuds de la Société, & obscurcit jusqu’aux notions les plus claires de la Nature. […] Il faut, à une raison révoltée & entreprenante, opposer une raison réfléchie & capable de ramener aux idées qu’on doit avoir de chaque objet ; il faut, pour réprimer l’esprit d’indépendance introduit dans tous les genres littéraires, armer des plumes attentives à rappeler les regles & à proscrire les abus. […] l’intérêt de quelques Ecrivains, qui, à toute force, veulent se faire estimer, en dépit de la raison & du bon goût, sera-t-il préférable au bien général ?
Enfin la plupart de ses écrits supposent des institutions toujours contraires à la raison, et des institutions assez puissantes pour donner à la plaisanterie qui les attaque le mérite de la hardiesse. […] Toutes les plaisanteries qui portent sur les institutions civiles et politiques contraires à la raison naturelle, perdent leur effet dès qu’elles atteignent leur but, la réformation de l’ordre social. […] Les ridicules de ce dernier genre doivent être en beaucoup moins grand nombre dans les pays où l’égalité politique est établie ; les relations sociales se rapprochant davantage des rapports naturels, les convenances sont plus d’accord avec la raison. […] De nos jours, l’imagination doit être aussi détrompée de l’espérance que la raison : c’est ainsi que cette imagination philosophe peut encore produire de grands effets. […] L’époque du retour à la vertu n’est pas éloignée, et déjà l’esprit est avide des sentiments honnêtes, si la raison ne les a pas encore fait triompher.
Personne n’est le siège et la raison sociale de créations spontanées. […] L’enfant crée de la sorte une foule d’idées ; il a du génie ; chaque mère en est sûre, et elle a raison. […] Le roi et sa cour, voilà le centre et la raison de tout. […] On le reconnaît volontiers : mais il est plaisant d’entendre toutes les mauvaises raisons qu’on avance. […] Sarcey gémit : « Ce n’est pas du théâtre. » Sarcey a raison.
Personne n’est le siège et la raison sociale de créations spontanées. […] L’enfant crée de la sorte une foule d’idées ; il a du génie ; chaque mère en est sûre, et elle a raison. […] Le roi et sa cour, voilà le centre et la raison de tout. […] On le reconnaît volontiers mais il est plaisant d’entendre toutes les mauvaises raisons qu’on avance. […] Sarcey gémit « Ce n’est pas du théâtre. » » Sarcey a raison.
De précieuse, elle devient classique ; et j’ai dit ce qu’était proprement le goût classique, une combinaison de la raison positive et du sens esthétique. […] Il cache son tempérament intime, les mouvements de sa sensibilité, s’il en a : il ne doit offrir à la société que ce qu’il a de commun avec elle, et de communicable, sa raison, ses idées. […] Les théologiens enseignent à la raison laïque, qu’ils prennent pour juge, à prononcer souverainement sur les questions de dogme. […] Il supprima les limitations, les tempéraments que le xviie siècle avait apportés à l’autorité de la raison. […] Et il fallait que l’antiquité fût écartée pour que le triomphe de la raison fût entier.
Il enfonce dans les esprits la foi au progrès, par le spectacle de toutes les découvertes que la raison a faites dans les sciences au siècle précédent. […] Sa méthode est d’alléguer toutes les raisons pour et contre les opinions établies. Ce n’est pas sa faute si les raisons contre paraissent les plus fortes, si, après l’avoir lu, l’on est tenté de conclure pour les hérétiques. […] Il a peine à ne pas marquer de faveur au manichéisme, dans lequel il trouve beaucoup de raison. […] Les Jésuites avaient raison de signalier l’impiété essentielle de l’ouvrage.
L’unité s’impose partout, d’un commun consentement, par une même tendance des esprits, et se légitime par la raison universelle. […] Elle a deux forces agissantes : d’une part la raison elle-même, qui critique, qui détruit, par une espèce de suicide ; la raison réduite à la sécheresse matérialiste ; et d’autre part le sentiment, élément nouveau, positif, qui annonce l’avenir. […] Lanson dit avec raison : « Ces romans, drames, voyages, mettaient V. […] Donc, malgré le désordre de l’heure actuelle, aucune raison de désespérer. […] Il y a des raisons à cela.
Donat en ajoute une quatrième espèce, dans laquelle entrait quelque chose de toutes les autres, et qu’il appelle, par cette raison, prologue mixte. […] La raison de cette règle est claire. […] C’est encore de n’y point admettre les raisonnements, ni à plus forte raison les récits. […] On a cité, avec raison, comme une beauté de dialogue du premier ordre, la cinquième scène du troisième acte de Cinna. […] Le mot est lui-même une raison.
Une preuve entre mille, c’est que chez l’homme le sens esthétique est en raison du développement de l’intelligence. […] Parce qu’il a une volonté libre et une raison. Sa raison lui révèle une fin à poursuivre dans le développement de la vie psychique et physique. […] Parce qu’il possède la raison et l’imagination, la raison qui lui fait concevoir l’invisible et l’intelligible au-delà des choses visibles et sensibles, l’imagination qui confond les deux objets de sa pensée dans une représentation symbolique. […] L’entière et constante soumission de la volonté à la raison est la loi du sage.
La faculté la plus inventive, c’est la raison, parce que la raison seule nous découvre la vérité, la seule source des littératures qui ne s’épuise pas. […] Raison lui conseille de renoncer à sa poursuite. […] Quel amant ne s’est pas emporté contre la Raison ? […] L’assemblée est présidée par la Pénétration et la Raison. […] L’imagination, dans Jean de Meung, se met au service de la raison.
et pour quelles raisons ? […] A plus forte raison, le caprice et la fantaisie. […] Si de certaines raisons ont fait que nous n’avons pas de Cicéron ni de Virgile, d’autres raisons peuvent faire que nous en ayons de plus grands quelque jour. […] D’autres raisons sont plus personnelles à Voltaire. […] Leur mère avait tout ; on ne lui conteste pas la grâce, mais à ceux qui voudraient lui refuser le sérieux et la raison, il n’est pas mal d’avoir à montrer la raison dans Mme de Grignan, la raison toute seule, sur le grand pied et dans toute sa pompé.
Dans un tel système, la raison est avant toute chose ; la raison prouve la révélation, la divinité de l’Écriture et l’autorité de l’Église. […] Et qui reste juge en dernier lieu des titres de la foi, si ce n’est la raison ? […] Pour nous rationalistes, cela n’a pas grande conséquence ; mais l’orthodoxe, obligé de prouver que son livre a toujours raison, se trouve engagé en des subtilités infinies. […] Dans cette grande lutte engagée entre ma raison et mes croyances, j’évitai soigneusement de faire un seul raisonnement de philosophie abstraite. […] Mes raisons furent toutes de l’ordre philologique et critique ; elles ne furent nullement de l’ordre métaphysique, de l’ordre politique, de l’ordre moral.
Il a raison de ne prêcher que pour les croyants, puisqu’il n’a plus, comme j’ai dit, que des croyants autour de sa chaire et qu’il perdrait sa peine à haranguer des absents. […] Mon plan est bien simple : 1°Dieu veut qu’on se confesse ; 2° nous n’avons pour nous en dispenser que de mauvaises raisons. […] L’homme a trouvé plusieurs raisons de repousser la confession. « Quelles raisons ? […] La seconde raison qu’on allègue pour ne pas se confesser, c’est que l’homme s’avilit en s’agenouillant aux pieds d’un autre homme. […] A côté des raisons que l’on dit, il y a les autres.
Moins encore en raison des difficultés qu’on rencontrait dans son genre d’esprit que par l’incommodité que causait sa vertu, d’Aguesseau fut exilé deux fois dans sa terre de Fresnes. […] D’Aguesseau est pour la raison humaine, et il lui fait en tout une juste part. […] Car, suivant lui, « la religion n’est autre chose, dans ses préceptes moraux, que la perfection de la raison » et les coups téméraires qu’on porte à l’une retombent sur l’autre. […] Il combat Hobbes, il combat d’avance Bentham, il réfute son ami janséniste M. de Valincour, qui refusait à la raison de l’homme, sans la Grâce, cette faculté de justice. […] Il est curieux de voir comment d’Aguesseau, par ses efforts modérés de raison, et tout en ne songeant qu’à s’appuyer aux anciens, penche déjà plus qu’il ne croit du côté de l’avenir.
Ils s’amusèrent ou s’indignèrent des attaques dirigées contre tant d’écrivains connus, sans y chercher d’autre raison que la malignité et l’humeur caustique : explication facile, et jusque-là presque toujours justifiée. […] Ainsi Boileau ne fut jamais athée : mais ses vers ne sont point parfumés de dévotion, et Pradon et les autres ont raison d’y flairer une odeur de libre raison. […] Mais, peut-on dire encore, est-ce user comme il faut de la critique que d’assommer les gens sans en dire la raison. […] Cependant, quand on l’a lu, ne sent-on pas bien la raison générale et commune de tous ces jugements particuliers ? […] Et notamment si tout l’effort de la critique depuis Scaliger tendait à fonder en raison le culte, et l’imitation des anciens, le vrai collaborateur et précurseur de Boileau, celui qui est comme l’anneau intermédiaire de la chaîne entre Malherbe et lui, c’est Chapelain.
Qui d’eux ou de nous a raison ? […] Les partisans de l’amour donnèrent plusieurs raisons pour le justifier. […] Sa raison en fut révoltée, quoiqu’il ne l’eût pas toujours jugé de même. […] Tant de raisons persuadent au P. […] Dans cette idée, il donna au public les raisons qu’il avoit de condamner la comédie, & de vouloir en dégoûter les autres : mais ces raisons étoient ridicules.
elle a dû principalement révolter ceux de nos écrivains qui pensent qu’en fait de goût comme dans des matières plus sérieuses, toute opinion nouvelle et paradoxe doit être proscrite par la seule raison qu’elle est nouvelle. […] Dans un ouvrage de poésie, par exemple, on doit parler tantôt à l’imagination, tantôt au sentiment, tantôt à la raison, mais toujours à l’organe ; les vers sont une espèce de chant, sur lequel l’oreille est si inexorable, que la raison même est quelquefois contrainte de lui faire de légers sacrifices. […] Mais trop exclusivement appliqué à ce qui est l’objet de la raison, ou plutôt du raisonnement, son imagination se bornait à enfanter des hypothèses philosophiques, et le degré de sentiment dont il était pourvu, à les embrasser avec ardeur comme des vérités. […] On connaît le célèbre qu’il mourût du vieil Horace, et on a blâmé avec raison le vers suivant : cependant une métaphysique commune ne manquerait pas de sophismes pour le justifier. […] La raison donne donc au génie qui crée une liberté entière ; elle lui permet de s’épuiser jusqu’à ce qu’il ait besoin de repos, comme ces coursiers fougueux dont on ne vient à bout qu’en les fatigant.
Dans un temps où le flot furieux des partis ne permettait plus à personne de rester dans sa liberté et dans sa conscience, André Chénier resta dans la force de sa raison, et, ne vous y trompez pas ! c’est la force de sa raison qui le distingue même comme écrivain et comme polémiste, ce poète ! […] Transformation étonnante dans un homme aussi poète, il fit surtout du journalisme avec la puissance de la raison éclairée, honnête, impersonnelle et éternelle ! […] Il a toutes sortes de raisons pour l’adorer. […] Cette raison, entrevue par M.
Peut-être verrons-nous cette progression s’accentuer ; nous dirons plus loin pour quelles raisons, selon nous, l’espoir en est permis. […] Sur les débris de sa raison, il croyait s’enivrer d’intuition, d’évidence surnaturelle, de certitude mystique. […] Sa raison qu’il croyait ensevelie parle au fond de lui-même. « Est-ce vivre en vérité, se disait-il, que de poursuivre, avec un cadenas au cœur, des œillères à la raison, une perfection chimérique ? […] Quelle que soit sa valeur individuelle, elle a pour bases, la vie du sexe, la vie de la conscience, la vie de la raison. […] On va noyer ta raison naissante au fond d’un marécage d’erreurs, on va t’accabler sous l’énorme flot des tromperies.
Néanmoins la littérature allemande porte le caractère de la littérature d’un peuple libre ; et la raison en est évidente. […] Les peines de la nature peuvent laisser encore quelques ressources : il faut que la société jette ses poisons dans la blessure, pour que la raison soit tout à fait altérée, et que la mort devienne un besoin. […] Il faut s’en tenir aux principes universels de la haute littérature, et n’écrire que sur les sujets où il suffit de la nature et de la raison pour se guider. […] Sans doute, avant de grossir le nombre des sectateurs d’un système, on applique toute son attention à le juger, on se décide pour ou contre, par l’exercice indépendant de sa raison. […] Un siècle développe deux ou trois idées de plus ; et ce siècle, avec raison, est illustre.
Force nous est donc de commencer par chercher si la seule vertu des races ou celle des idées explique pleinement l’expansion de l’égalitarisme, si l’Anthropologie ou l’Idéologie est capable de nous en donner la raison suffisante. […] Théorie séduisante : des raisons d’ordre pratique nous poussent, que nous nous en doutions ou non, à l’accepter. […] Il n’en est pas moins vrai qu’on peut chercher, dans les rapports mêmes de ces consciences, la raison, ou du moins l’une des raisons des idées qu’elles forment. […] Afin que la propagation d’une idée dans un milieu se laisse comprendre, il faut des raisons tirées de l’observation de ce milieu même. […] En disant que telle forme sociale contribue au succès de l’égalitarisme, nous ne prétendons pas qu’elle en soit la cause unique, la raison suffisante : nous ne la posons que comme une de ses conditions.
Pour qu’il n’y eût pas de crimes, il faudrait un nivellement des consciences individuelles qui, pour des raisons qu’on trouvera plus loin, n’est ni possible ni désirable ; mais pour qu’il n’y eût pas de répression, il faudrait une absence d’homogénéité morale qui est inconciliable avec l’existence d’une société. […] Avec son simplisme ordinaire, il ne conçoit pas qu’une chose qui répugne puisse avoir quelque raison d’être utile, et cependant il n’y a à cela aucune contradiction. […] S’ils sont intelligibles tout entiers, ils suffisent à la science comme à la pratique : à la science, car il n’y a pas alors de motif pour chercher en dehors d’eux les raisons qu’ils ont d’être ; à la pratique, car leur valeur utile est une de ces raisons. Il nous semble donc que, surtout par ce temps de mysticisme renaissant, une pareille entreprise peut et doit être accueillie sans inquiétude et même avec sympathie par tous ceux qui, tout en se séparant de nous sur certains points, partagent notre foi dans l’avenir de la raison.
Le premier volume est divisé en trois sections ; la première traite successivement de l’influence de chaque passion sur le bonheur de l’homme ; la seconde analyse le rapport de quelques affections de l’âme avec la passion ou avec la raison ; la troisième offre le tableau des ressources qu’on trouve en soi, de celles qui sont indépendantes du sort, et surtout de la volonté des autres hommes. […] Dans la première section de la seconde partie, je traiterai des raisons qui se sont opposées à la durée et surtout au bonheur des gouvernements, où toutes les passions ont été comprimées. — Dans la seconde section, je traiterai des raisons qui se sont opposées au bonheur et surtout à la durée des gouvernements, où toutes les passions ont été excitées. — Dans la troisième section, je traiterai des raisons qui détournent la plupart des hommes de se borner à l’enceinte des petits États, où la liberté démocratique peut exister, parce que là les passions ne sont point excitées par aucun but, par aucun théâtre propre à les enflammer. […] Mais les uns croient que la garantie de la liberté, le maintien de l’ordre, ne peut subsister qu’à l’aide d’une puissance héréditaire, et conservatrice ; les autres, reconnaissent de même la vérité du principe, que l’ordre seul, c’est-à-dire l’obéissance à la justice, assure la liberté : mais ils pensent que ce résultat peut s’obtenir sans un genre d’institutions que la nécessité seule peut faire admettre, et qui doivent être rejetées par la raison, si la raison prouve, qu’elles ne servent pas mieux que les idées naturelles, au bonheur de la société. […] Il faudrait développer et ces raisons, et beaucoup d’autres encore, exceptant de part et d’autre celles qu’on croit tirer du droit pour ou contre ; car le droit en politique, c’est ce qui conduit le plus sûrement au bonheur général ; mais l’on doit exposer sincèrement tous les moyens de ses adversaires quand on les combat de bonne foi. […] Mais laissez un siècle passer sur nos destinées, vous saurez alors si nous avons acquis la véritable science du bonheur des hommes ; si le vieillard avait raison, ou si le jeune homme a mieux disposé de son domaine, l’avenir.
À une telle époque nul n’a raison, si ce n’est le critique qui ne prononce pas. […] On se barricade dans son parti pour ne pas voir les raisons du parti contraire. […] Il sait que tous les partis ont à la fois tort et raison. […] Ce qu’il y a de sûr, c’est que personne n’aura absolument raison ni absolument tort. […] Si cela était, Fourier et Cabet auraient parfaitement raison.
qui a raison ? […] Ils ont raison. […] La raison n’en est-elle pas bien simple ? […] et quand veut-il avoir raison ? […] qui a raison ?
Il immole Théophraste à La Bruyère : il a raison, sans doute, mais il le dit tout crûment, d’un ton qui sans doute eût choqué Boileau. […] Mais, pour la même raison, il ne peut se donner à lui-même par sa seule énergie ce que l’imitation de l’antiquité avait aidé les grands classiques à créer : une poésie originale, qui fût vraiment une œuvre d’art. […] De là la pauvreté, la banalité, la psychologie maigre ou fausse des tragédies, comédies et romans, qui contraste si singulièrement avec la hardiesse de la raison spéculative. […] Le monde interprète les règles selon l’esprit mondain : il y voit des « convenances » dont il n’y a pas à demander la raison, et qui sont souveraines parce qu’elles sont. […] Mais peut-être n’en sera-t-il pas toujours ainsi et l’on pourrait peut-être avancer que si elle doit durer et réussir, elle ne le fera qu’en transigeant avec Boileau, en se lestant pour ainsi dire de raison classique.
Je dirais donc recouvré avec les gens de lettres pour satisfaire à la règle et à la raison et ne pas passer parmi eux pour un homme qui ignorât ce que les enfants savent ; et recouvert avec toute la Cour pour satisfaire à l’usage qui, en matière de langue, l’emporte toujours par-dessus la raison. » Sur ce point particulier, la raison et la grammaire sont parvenues pourtant à déloger le mauvais usage. […] mais, en attendant cela, ne nous hâtons pas de le dire, et moins encore de l’écrire. » Il a eu raison d’être prudent et d’attendre avant de l’employer. […] Il y a de ces raisons secrètes et délicates, le plus souvent insaisissables, dans ce qu’on est accoutumé d’appeler des hasards heureux. […] Des deux parts on a raison jusqu’à un certain point, et l’on a tort ; on est entre deux écueils : — l’inquiétude, la démangeaison perpétuelle du bien parler, ou la ressource et la théorie du mal écrire. […] Chacun de ces verbes a sa raison à produire ; chacun mérite au moins d’être entendu.
Mais le fait même que, dans les cas de passion, la parole intérieure s’anime sans raison et devient extérieure contre toute raison, ce fait nous indique qu’il y a des circonstances où la parole intérieure doit rester intérieure sans tendre aucunement à l’extériorité et sans simuler l’extériorité. Nous ne devons pas exprimer au dehors toute notre existence intérieure ; il en est une partie qui, n’étant que pour nous, doit rester entièrement nôtre ; la raison nous le dit, et, si la raison ne nous trompe pas, il est inutile que nous croyions externer ce qui doit rester interne et reste tel en effet ; quand on est raisonnable, mieux vaut l’être jusqu’au bout ; être raisonnable et s’imaginer qu’on ne l’est pas, c’est ne pas l’être entièrement, c’est mêler un grain de folie à une sagesse qui, dès lors, est imparfaite. […] Qu’un écolier, pour mieux réfléchir, évoque l’image d’un ami qui l’écoute, cela est d’un âge où la raison s’essaye et se forme ; et, de même, la voix de la conscience ne se fait vraiment entendre que dans la jeunesse de l’humanité ou chez les hommes dont on dit qu’ils restent éternellement jeunes ; la parfaite maturité de la raison se passe de ces illusions. Enfin, la parole intérieure calme n’est pas seulement le langage naturel de la froide raison ; elle est aussi la seule expression convenable de la tristesse d’une âme découragée et abattue. […] Durant le sommeil, ces sortes d’habitudes se réalisent encore, comme l’habitude générale de parler intérieurement ; le sommeil suspend la réalisation des habitudes en raison inverse de leur généralité.
Ce qui plaît toujours quand on rouvre Voltaire et ce qui fait qu’on s’intéresse, c’est (avec cette jolie manière de dire) qu’il met de l’action à tout ; les moindres choses, ou celles même qui chez d’autres feraient l’effet de la raison et de la sagesse, prennent avec lui un air d’entrain et de diablerie. […] Suivent quatre lettres (que l’on connaissait déjà) sur la vertu et le bonheur adressées par Jean-Jacques à Sophie, c’est-à-dire à Mme d’Houdetot ; il fait de la philosophie avec celle qu’il aime, et dont la vertu, dit-il, l’a ramené à la raison ; il s’en console et même il s’en félicite avec elle : « Si nous avions été, moi plus aimable ou vous plus faible, le souvenir de nos plaisirs ne pourrait jamais être, ainsi que celui de votre innocence, si doux à mon cœur… Non, Sophie, il n’y a pas un de mes jours où vos discours ne viennent encore émouvoir mon cœur et m’arracher des larmes délicieuses. […] Nous vivons dans le climat et dans le siècle de la philosophie et de la raison ; les lumières de toutes les sciences semblent se réunir à la fois pour éclairer nos yeux et nous guider dans cet obscur labyrinthe de la vie humaine ; les plus beaux génies de tous les âges réunissent leurs leçons pour nous instruire ; d’immenses bibliothèques sont ouvertes au public ; des multitudes de collèges et d’universités nous offrent dès l’enfance l’expérience et la méditation de quatre mille ans ; l’immortalité, la gloire, la richesse et souvent les honneurs sont le prix des plus dignes dans l’art d’instruire et d’éclairer les hommes : tout concourt à perfectionner notre entendement et à prodiguer à chacun de nous tout ce qui peut former et cultiver la raison : en sommes-nous devenus meilleurs ou plus sages ? […] Capables de raisonner très loin et très haut, par malheur nous manquons de base : « Ce n’est pas tant le raisonnement qui nous manque que la prise du raisonnement. » L’instinct de certains animaux est à faire envie à la raison de l’homme. […] Si la raison l’écrase et l’avilit, le sentiment intérieur le relève et l’honore… Quoiqu’il en soit, nous sentons au moins en nous-même une voix qui nous défend de nous mépriser ; la raison rampe, mais l’âme est élevée. » Sans discuter ici cette distinction si absolue entre la raison et l’âme, distinction qu’il ne maintiendra pas toujours à ce degré, il est clair que Rousseau, au lendemain de ses peines et de ses sacrifices dans la tendre passion qu’il ressentait, ne veut chercher de bonheur ou de consolation que dans la paix du cœur et dans la voix de sa conscience.
Le christianisme poussait toujours hors de la nature, ou contre la nature : l’antiquité ramenait à la nature, et faisait voir la puissance de la raison. […] Appuyée sur l’antiquité, l’Italie prenait confiance en la nature humaine, confiance en la raison ; écartant la contrainte du dogme, la tristesse de l’ascétisme, elle faisait en tous sens l’expérience des forces de l’esprit : forte de la première et saisissante victoire de la raison sur la théologie dans la découverte de Colomb, elle affranchissait les sciences et la philosophie, et s’essayait librement, par toute sorte de pointes hardies, à les constituer dans leur pleine indépendance. […] Même dans la libre philosophie, dans Rabelais, comme plus tard dans Montaigne, rétablissement d’un idéal de la vie pratique devient la fin principale que poursuit la raison. […] Insensiblement le xve siècle se dégage du xvie : la fougue cède à la discipline, la sensibilité à la raison, le lyrisme à l’éloquence. […] En proposant à l’art de manifester la raison, il trouva la formule qui résolut le grand problème littéraire du siècle, et nous rendit possible l’acquisition d’une grande poésie.
répliquent les Aquicoles, s’il ne s’agit que de raison, nous avons aussi des sages parmi nous… Voilà la première fois que nous voyons un prêtre ne pas pousser aux sacrifices… Antistius, resté seul, se désespère, et voilà que Carmenta, sa sibylle, sa fille spirituelle, vient à lui, découragée. […] Car Antistius croit en Dieu, ou plutôt, comme il est impossible que la conception d’un Dieu personnel ne tourne pas à l’anthropomorphisme, il croit au divin. « Les dieux sont une injure à Dieu ; Dieu sera, à son tour, une injure au divin. » Il croit à la raison, à un ordre éternel. […] Il y a la raison, et la raison n’existe pas sans les hommes. L’ami de la raison doit aimer l’humanité, puisque la raison ne se réalise que par l’humanité… Ô univers, ô raison des choses, je sais qu’en cherchant le bien et le vrai je travaille pour toi. » Il croit à l’obligation de se sacrifier pour les fins de l’univers, telles qu’il nous a été donné de les concevoir. […] A côté de celle-là la foi volontaire et acquise, mouvement du cœur qui désire que ce que la raison conçoit comme le bien soit aussi le vrai, n’a plus l’air d’être la foi.
On la cru, peut-être avec raison. […] Cela ne blesse point la raison. […] La raison en est assez simple. […] En voici la raison. […] Ils ont raison par-delà leurs idées ; mais ils ont raison.
Ai-je besoin d’ajouter qu’à plus forte raison les sciences naturelles ne décideront pas la question de savoir où nous allons ? […] 12 » Il a raison ! […] Taisez-vous, en ce cas, raison imbécile ! […] Qui se détacherait aujourd’hui de la communion de l’Église pour des « raisons philologiques » ? […] Mais ce n’est pas moins Scherer qui a raison contre les libres-penseurs de l’espèce de M.
Il en a donné beaucoup de raisons et un exemple. […] Cette raison-là est la plus abominable de toutes. […] Stendhal a choisi pour l’aimer un peuple qui lui semblait s’éloigner le plus possible de la raison froide, de la raison pratique et de la raison des convenances. […] Et il a raison ! […] Mais ils doivent disparaître comme eux, pour mêmes raisons ou pour raisons analogues.
Quelles raisons en a-t-il ? […] Et je ne dis pas qu’il eût absolument raison ! […] Le romantisme, c’est l’espérance, la chimère ou l’hippogriffe qu’on chevauche à travers l’impossible ; c’est la croyance aussi, les raisons du cœur qu’on oppose victorieusement « aux raisons de sa raison ». […] Mais Strauss, au fond, avait raison. […] Et le monde a raison !
La premiere raison qui se présente, est que son Ouvrage dut la plus grande partie de son succès aux anathêmes de la Sorbonne & du Parlement qui le proscrivirent, à cause des obscénités qui y sont répandues ; on peut dire ensuite, que les traits satiriques lancés contre les Moines, ne contribuerent pas peu à le mettre en vogue ; ajoutons que les Hérétiques de son temps s’empresserent de combler de louanges un Ecrivain qui sembloit s’accorder avec leurs sentimens, du côté de la phrénésie à tout blâmer & à se moquer de tout. […] Nous n’ignorons pas que les Admirateurs de Rabelais ont prétendu excuser le défaut de plan, de méthode, de suite, de raison, qui choque dans tout son Livre, en croyant trouver dans ses peintures une censure allégorique des mœurs, des usages & des ridicules de son temps ; qu’ils ont vanté avec complaisance certains traits ingénieux qui y pétillent par intervalle ; qu’il n’est pas même jusqu’à son verbiage qui ne leur paroisse mystérieux, & tendre à des allusions, dont leur sagacité regrette de ne pouvoir expliquer l’objet. Toutes ces raisons ne sont pas capables de justifier leur enthousiasme. […] Etoit-ce dans les transports d’une ivresse plus que cynique, qu’il lui convenoit de faire parler la raison ?
Quelle que soit la tendresse qui respire en ces créations heureuses, la raison y est, l’expérience humaine y souffle par quelque coin et attiédit la passion. […] Sa raison délicate devenait une dernière pudeur. […] Le désir d’éclairer et d’adoucir ce noble esprit fut sans doute un appât de raison et de bienfaisance pour elle aux abords de la liaison étroite. […] … Elle a eu raison pendant sa vie, et elle a eu raison après sa mort, et jamais elle n’a été sans cette divine raison, qui étoit sa qualité principale… Elle n’a eu aucune connoissance pendant les quatre jours qu’elle a été malade… Pour notre consolation, Dieu lui a fait une grâce toute particulière, et qui marque une vraie prédestination : c’est qu’elle se confessa le jour de la petite Fête-Dieu, avec une exactitude et un sentiment qui ne pouvoient venir que de lui, et reçut Notre-Seigneur de la même manière. […] Valincour remarque avec raison qu’il faudrait : de celui dont.
La raison les combat, les religions s’en servent. […] Dans ces têtes ardentes, aisément crédules, aisément fanatiques, germèrent toutes les superstitions et tous les crimes dont la raison a gémi. […] La raison, avec l’aide des siècles, s’empare de quelques effets de ces grands mouvements ; mais il est de certaines idées que les passions font découvrir, et qu’on aurait ignorées sans elles. […] Toute institution bonne relativement à tel danger du moment, et non à la raison éternelle, devient un abus insupportable, après avoir corrigé des abus plus grands. […] Il n’y a qu’un fait pour l’homme éclairé depuis le commencement du monde, ce sont les progrès des lumières et de la raison.
On y fait entrer surtout des conditions de régularité, de sagesse, de modération et de raison, qui dominent et contiennent toutes les autres. […] raison mise en pratique ; Talent ? raison produite avec éclat ; Esprit ? raison qui finement s’exprime ; Le goût n’est rien qu’un bon sens délicat ; Et le génie est la raison sublime. […] Où trouverez-vous la raison dans le IVe livre de l’Énéide et dans les transports de Didon ?
Albalat a raison, mille fois raison. […] Albalat a raison, mille fois raison. […] Elle a sa raison et elle a ses résultats. « Toute la crititique est à refaire, disait Flaubert. […] Bertaut a raison. […] On conçoit qu’ils ne se résignent point à reconnaître une vérité qui déprécierait leurs œuvres et qu’ils ne puissent donner raison à une théorie qui leur donne tort.
C’est la nature qui a raison et c’est la prétendue raison qui a tort. […] Pas le moins du monde et d’abord pour la raison que j’ai dite. […] Il n’y a aucune raison ni pour ceci ni pour cela. […] La raison en est simple. […] Mais qu’un professeur enseigne la foi prouvée par la raison ; ou la nécessité de la foi, la raison étant infirme ; ou, comme veut M.
La raison, mon bon droit, l’équité. […] Sur quelle raison, puisqu’elle est légitime ; sur quelle raison, puisqu’elle est bonne ? […] Rousseau a raison. […] Pour plusieurs raisons, ce me semble. […] Non, pour trois raisons.
Et n’est-ce donc pas là une raison bien légitime de l’admirer ? […] « En attendant, il faut tâcher d’avoir raison. » Oui, c’est là le grand point ; mais, pour avoir raison, il ne faut pas écouter la passion. […] » Ici d’Alembert n’a pas même un quart de raison. […] C’est apparemment pour cette raison que M. […] Et quelle raison, grand Dieu !
. — Par la même raison, la parole intérieure n’est plus alors ni concise ni personnelle : étant comme un discours adressé à autrui, elle se fait prolixe et, autant que possible, impersonnelle, afin d’être clairement entendue et d’entraîner la conviction. […] S’il parle comme notre conscience, fût-il sévère, il ne nous effrayera pas, car nous comprendrons qu’il a raison. […] Toujours il avait dû se féliciter d’avoir obéi à cet avertissement, et jamais sa raison n’avait eu de peine à le trouver sage et bien fondé ; dès lors, que pouvait-il être, sinon une manifestation sensible de la suprême sagesse ? […] Par les mêmes raisons, et grâce à sa parfaite obéissance aux signes divins, Socrate ne paraît pas avoir connu le remords ni mérité jamais les reproches du dieu212. […] L’homme passionné éclate sans raison, et même contre la raison, malgré la pudeur et malgré la logique ; l’imaginaire joue un rôle : peut-il le jouer dans sa vérité sans faire aucun geste et sans parler ?
Les rapports qu’elle pose, s’ils sont objectifs, sont nécessaires ; c’est-à-dire que les termes dont ils sont formés s’impliquent logiquement, et la raison peut trouver le pourquoi de cette implication. […] Sans condamner la raison à abdiquer, sans même assigner de bornes à ses ambitions dans l’avenir, il la met en défiance contre elle-même. […] Car la psychologie expérimentale, dont il a été le principal initiateur en France, repose précisément sur cet axiome que la conscience n’est pas une réalité aussi simple et aussi facile à connaître que le supposait l’école introspectionniste ; qu’elle ne se réduit pas à un petit groupe d’idées claires et d’états distincts dont la formule est facile à trouver ; mais qu’elle a, au contraire, des dessous profonds et obscurs et où, pourtant, il n’est pas impossible de faire progressivement descendre la lumière de la raison. […] Ainsi peut-on lui reprocher, non sans raison, d’avoir plutôt juxtaposé que logiquement uni les deux tendances qu’il entreprend de réconcilier, Mais, en dehors d’une doctrine qui les réconcilie, je ne vois pas pour l’esprit d’autre alternative que d’osciller sans fin du simplisme au mysticisme, et inversement. […] C’est se demander quelles sont les causes qui ont donné naissance aux 12911 différentes maximes dont elle est faite et quelles en sont les raisons d’être, etc. ; puisqu’il s’agit de quelque chose qui est et qui a duré, on peut être certain par avance que ces causes et que ces raisons existent.
C’est que la raison et les sentiments prennent d’eux-mêmes la pente de la nature. […] Mais il faut que ma raison participe de cette unité vers laquelle je m’achemine. […] Je ne veux pas être une pensée mutilée, fragmentaire, dans l’universelle raison, un être isolé dans la communauté des hommes : j’entends servir la société et non point par goût des louanges, ni par désir d’être aimé, ni par sympathie pour mes contemporains, mais parce que le monde est un et que je veux me conformer à ses lois, qui sont d’ailleurs harmonieuses avec ma raison. […] Pour mon cœur, la religion a-t-elle encore des raisons que ma raison ne connaît pas ?
« Il y a plaisir » disait-il, « à entendre cet homme-là, c’est la raison incarnée. […] À plus forte raison ai-je dû voir que je ne surprendrai pas son suffrage en compilant bonnement, à l’allemande, et sans me gêner beaucoup sur le choix, une grande quantité de choses. […] Mais ces convenances varient et s’élargissent vite en raison même des distances. […] Bayle n’est pas dogmatique ; il n’affirme ni ne nie absolument ; il ne serre pas trop le bouton à vos croyances ; il ne vous met pas le couteau de la raison sur la gorge. […] Impuissante et fausse à l’égard de Rabelais, elle a trop raison sur tous les autres.
Voltaire a raison de compter Montesquieu parmi les auteurs du dix-septième siècle ; il y est né en effet, et il en a retenu la langue. […] Cependant, les considérations dans Montesquieu se pressent par moments dans l’ordre rigoureux de raisons qui s’enchaînent. […] C’est là tout à la fois le caractère de la raison dans l’Esprit des lois et l’histoire de la fortune de ce livre. […] Devenu le guide spirituel du peuple de Milan, il resta son guide temporel, et, comme il l’a dit avec raison, l’Italie du nord put se passer d’un empereur : elle avait un chef. […] Il donne les raisons des lois ; il en laisse chercher la morale à l’hésitation du lecteur.
Pour l’homme à qui manquerait tout à coup l’enseignement du passé, le plus pressant serait de retrouver sa raison et son cœur, et c’est là tout d’abord ce qu’il retrouverait dans le livre de génie. […] On ne trouve guère, en les lisant, qu’à faire des restrictions de goût, de raison ou de morale, ou bien à regretter ce qui leur manque. […] Bernardin de Saint-Pierre crut la Providence plus en péril qu’elle ne l’était, et il la défendit comme fait un avocat pour un client douteux, en y employant les mauvaises comme les bonnes raisons. […] Il est de son siècle, tout en le combattant ; il ne sait pas voir les bornes de la raison, et il s’y trompe d’autant plus souvent, qu’il donne à sa raison l’étendue de son imagination, et qu’il croit raisonner encore quand il rêve. […] Il est vrai qu’il y ramenait le public par l’imagination plutôt que par la science ; mais ce moyen n’était pas le plus mauvais, surtout dans notre pays, où la raison même, avant de prendre pied, a besoin de s’introduire comme une mode.
Vous auriez certainement raison. […] Les deux Prophetes dont j’ai parlé, n’auroient-ils donc pas eu raison de dire qu’il se seroit une révolution étonnante dans les esprits ; que la folie seroit réputée raison ; qu’on appelleroit tolérance l’intolérance la plus décidée ; que les ames, pour vouloir cesser d’être chrétiennes, pratiqueroient les préceptes les plus pénibles de l’Evangile ; qu’elles répondroient aux injures par des louanges, au mépris par l’estime, à la dureté par la douceur, à la sottise par l’admiration, à l’ incompréhensibilité par une humble soumission ? […] Je dirai plus : j’ai souvent regretté que le plan de mon Ouvrage ne me permît pas de donner plus d’étendue à mes censures & aux raisons qui les appuyoient ; mais on aura beau faire, tous ces aveux ne tendent nullement à me convaincre de partialité. […] Mais que m’importe qu’on l’attribue à d’autres, pourvu qu’on le lise, pourvu qu’on réfléchisse, pourvu que la raison & le bon goût s’affranchissent des entraves de la nouvelle Philosophie ? […] Pour qu’on ne m’accuse point, comme on l’a déjà fait sans raison, d’outrager la mémoire de M.
Le problème que nous venons de poser va nous permettre de revendiquer les droits de la raison sans retomber dans l’idéologie. […] De plus, il n’y a qu’une raison qui puisse permettre de la traiter de funeste, c’est qu’elle trouble le jeu normal des fonctions. […] Si, en effet, les caractères dont la réunion forme le type normal ont pu se généraliser dans une espèce, ce n’est pas sans raison. […] Mais nous n’avons aucune raison qui nous permette de croire à la réalité de cette régression. […] C’est pour la même raison que le parfait honnête homme juge ses moindres défaillances morales avec une sévérité que la foule réserve aux actes vraiment délictueux.
Par d’excellentes raisons, spirituellement dites, M. […] Il y en a diverses raisons. […] Le romancier à plus forte raison. […] À plus forte raison les hommes. […] Maugras a bien mis en lumière ces petites raisons.
Le désir de plaire excite leur esprit ; la raison leur conseille l’obscurité ; et tout est arbitraire dans leurs succès comme dans leurs revers. […] Néanmoins, depuis la révolution, les hommes ont pensé qu’il était politiquement et moralement utile de réduire les femmes à la plus absurde médiocrité ; ils ne leur ont adressé qu’un misérable langage sans délicatesse comme sans esprit ; elles n’ont plus eu de motifs pour développer leur raison : les mœurs n’en sont pas devenues meilleures. […] Il est arrivé ce qui s’applique à tout dans la disposition actuelle des esprits : on croit toujours que ce sont les lumières qui font le mal, et l’on veut le réparer en faisant rétrograder la raison. […] Il est possible qu’en développant leur raison, on les éclaire sur les malheurs souvent attachés à leur destinée ; mais les mêmes raisonnements s’appliqueraient à l’effet des lumières en général sur le bonheur du genre humain, et cette question me paraît décidée. […] Il est utile aux lumières et au bonheur de la société que les femmes développent avec soin leur esprit et leur raison.
En quoi a-t-il raison ? […] De la raison elle-même. Or la raison ne peut, en sens absolu, être opposée à la raison. […] Après s’être servi de la raison pour décréditer la raison, c’est encore de la raison qu’on est forcé de se servir pour accréditer la religion. […] On a tort de parler de raison égarée, de raison corrompue.
Sans parler des conditions physiques comme le climat, on comprend que les conditions de vie sociale, la profession, le rang, l’état de fortune, les relations, l’isolement ou la vie de société fassent triompher dans la conduite ordinaire d’un individu tel ou tel ordre de considérations, telles, ou telles, raisons d’agir et impriment à sa volonté et à son caractère telle courbure particulière. […] La volonté des voluptueux qu’à des images sensuelles. — Les raisons d’agir et de ne pas agir, les raisons de vivre et de mourir, les raisons d’espérer et de désespérer varient à l’infini suivant les individus. […] Ce qui serait intéressant dans cet ordre d’idées, c’est moins de chercher comme le statisticien le chiffre moyen des suicides par exemple pour tel milieu ou telle condition sociale que de connaître les raisons individuelles des suicides ; car deux hommes de même âge, de même milieu et de même condition sociale peuvent se suicider pour des motifs absolument différents. […] Les volontés ne diffèrent pas seulement par leurs raisons d’agir ; elles diffèrent encore par la nature des mensonges vitaux quelles adoptent ou qu’elles se fabriquent elles-mêmes pour soutenir leur énergie, pour s’encourager à vivre et à agir. […] Supposons maintenant que l’expérience de la vie ait amené cet homme à reconnaître (à tort ou à raison), la duperie de l’altruisme, les hypocrisies de la sociabilité, le mensonge des liens sociaux et des conventions sociales.
Autant, sous le rapport de l’exposition, j’ai modifié, à tort ou à raison, mes habitudes de style, autant, pour les idées fondamentales, j’ai peu varié depuis que je commençai de penser librement. Ma religion, c’est toujours le progrès de la raison, c’est-à-dire de la science. […] En somme, j’avais raison. […] J’eus donc raison, au début de ma carrière intellectuelle, de croire fermement à la science et de la prendre comme but de ma vie. […] N’importe ; il n’y a guère plus d’un siècle que la raison travaille avec suite au problème des choses.
A la suite de ces attaques, il étoit dans l’ordre que l’humeur, l’invective & le sarcasme vinssent renforcer un Concerto de défenseurs, en effet trop foible, & suppléassent au défaut de raison. […] C’est une chose bien étrange, que les Dépositaires du pouvoir n’aient pas été touchés d’un si beau zele, & n’aient pas daigné se rendre à la force de ses raisons ! […] A-t-on eu plus de raison de triompher sur quelques fausses dates ou sur de légeres omissions ? […] mais nous avions nos raisons pour en parler. […] Elle en reviendra enfin à se persuader, comme toutes les Nations sages, que son bonheur & sa gloire ne consistent pas à renfermer dans son sein des Raisonneurs chimériques, des Littérateurs présomptueux, des Impies extravagans ; mais à respecter la Religion, à cultiver utilement les Lettres, à réprimer les abus du caprice & de la folle raison.
Chez lui la raison éclaire le sentiment ; le sentiment échauffe la raison, et de cet heureux accord se forme le goût que Voltaire définit justement « la suite d’un sens droit et le sentiment prompt d’un esprit bien fait ». […] Un article de critique n’est pas une ode ; il y faut de l’impartialité, de la sagacité, de la finesse, de la raison surtout, qualités qu’on n’acquiert qu’avec l’âge. […] Au moins aurait-on plus de raisons de compter sur leur impartialité. […] Fort contre vos raisons, ie céderais peut-être au nombre, et mon isolement m’inspirerait quelque défiance. […] Je les écoute parce qu’ils me flattent ; ils sont gens d’esprit et de raison puisqu’ils pensent comme moi.
C’est depuis moins de temps, au reste, que le nombre des formules de la prose s’est accru, par la raison toute simple que la prose est toujours la dernière à se perfectionner. […] Je ne parle même pas de ces heureux préjugés qui subsistaient encore naguère, sans raison de leur existence, débris vénérables des temps anciens, qui viennent de disparaître du milieu de nous, sans autre raison aussi de leur fin. […] Ne soyons pas aussi exclusifs, et consentons à croire qu’avant nous il y avait de la sagesse et de la raison sur la terre. Mais la sagesse et la raison eurent jadis d’autres formes. […] Apprenez à secouer le joug des transitions, puisqu’il s’agit des mouvements impétueux de l’âme, et non point d’un discours mesuré de la raison.
Mais j'ai une meilleure raison à apporter ; ces deux Contes n'ont jamais été de moi. […] C'est pour cette raison que j'entre volontiers en justification avec vous. […] Je ne me décide point d'après les idées d'autrui : je ne juge, comme vous, que d'après les regles imprescriptibles de la raison & du goût. […] Jamais on ne se distingua dans plus de genres différens ; on a donc raison de le regarder comme un Genie universel. […] Voilà pourtant ces hommes, qu’on a long-temps regardés comme les Oracles de la raison, les ornemens du Siecle, les illustrateurs de la Nation !
Il s’attacha à lui former surtout le caractère, à développer la raison, en ornant l’esprit. […] Il les dirigeait, lui, si discrètement, et de si haut, que, ne se sentant pas asservies, elles ne se croyaient pas dirigées : il se contentait d’offrir, de sa raison à leur raison, des principes généraux de conduite. […] Il n’a pas évidemment la liberté critique d’un savant de nos jours : sa raison est soumise à la foi. Mais, d’abord, cette soumission n’est pas une abdication ; elle est volontaire et sans violence : la raison y trouve son compte. […] Sous le contrôle et dans les limites tracées par la foi, la raison de Bossuet s’exerce librement.
Elle voulait de la raison, de l’ordre, un langage exact. […] Tout, chez lui, vient de cette raison générale qui, dans la conduite, se manifeste par la vertu, et, dans les travaux de l’esprit, par le goût. […] Dans Nicole je ne vois qu’une raison douce qui éclaircit à loisir quelques principes de morale chrétienne. […] De même, c’est dans la raison que la Logique va chercher les lois de l’art de penser, ou plutôt c’est la raison elle-même qu’elle cherche à ses sources les plus profondes. […] Par cette foi notre raison devient la raison de tous ; par elle, dans la naissante Académie, des poètes médiocres pensaient et écrivaient sainement en prose ; par elle toutes les plumes de Port-Royal ont été excellentes.
Charles Nodier, par inimitié contre Voltaire d’abord, par l’effet d’un retour ultra-romantique vers le passé, par plusieurs raisons ou fantaisies rétrospectives, continua de maintenir et de pratiquer l’o. […] Et puis cette raison qu’il faut garder aux mots tout leur appareil afin de maintenir leur étymologie est parfaitement vaine ; car, pour une lettre de plus ou de moins, les ignorants ne sauront pas mieux reconnaître l’origine du mot, et les hommes instruits la reconnaîtront toujours. Ce sont là toutefois des questions de tact et de convenance où il importe d’avoir raison avec sobriété. […] Toutes les fois qu’un usage s’obstine, c’est qu’il a sa raison d’être. […] Sans doute il a raison et mille fois raison ; mais depuis quand a-t-il suffi dans les choses humaines, et même dans les choses littéraires, d’avoir cent mille fois raison ?
C’est dans le monde matériel qu’il faut chercher la raison dernière de la nature de nos pensées, de leur ordre, de leur liaison. […] Il est clairement impliqué par tout ce qui précède, que la ligne de démarcation qu’on trace communément entre l’instinct et la raison n’existe pas. […] L’hypothèse expérimentale suffit aussi à expliquer le progrès des plus basses aux plus hautes formes de la raison. […] Ou, pour changer la comparaison, nous pouvons dire qu’en supprimant d’autres superstitions, la raison devient elle-même un objet final de superstition. […] Là commence, à proprement parler, la vie consciente, qui est, d’une part, mémoire et raison, d’autre part sentiment et volonté.
Le tort des égarés ne me donne pas raison. […] La raison du plus fort sera toujours la grande raison. […] Comment voulez-vous que les préjugés meurent, que les vieilleries conventionnelles cèdent la place au juste et au vrai, et que la raison ait raison, quand de tels hommes écrivent de telles choses ? […] Je suspecte toujours les célébrités modestes d’avoir quelque bonne raison pour l’être. […] On n’aime pas Chateaubriand par logique, parce qu’il y a telle ou telle raison de l’aimer ; mais on trouve des raisons de l’aimer parce qu’on l’aime.
Lorsque ensuite il compila son livre de la sagesse, prenant indifféremment à Montaigne et à Du Vair, il voulait tout simplement faire de la raison l’auxiliaire de la foi, et conduire la sagesse humaine jusqu’au point qu’on ne peut plus dépasser que par la grâce : il crut simplement donner des raisons humaines de mener une vie chrétienne. […] Il n’invente pas une conception nouvelle du devoir : il embrasse une vieille morale, il en emplit sa raison, pour la vivre. […] La maîtresse pièce de l’homme, pour lui. c’était la volonté, et l’amour n’était que l’élan dont la volonté se portait au bien aperçu par la raison. […] Le domaine de la foi est réservé : hors de là, tout se décide par raison. […] La fantaisie et la raison, le lyrisme et l’éloquence s’équilibrent.
disait-on, vous estimez la science et la raison de l’Allemagne ! […] Parce qu’une opinion vient d’Allemagne, ce n’est pas une raison pour que nous ne lui demandions pas son droit à notre respect, ce droit qui n’est d’aucun pays. […] Le calme magnifique de sa destinée fit le calme de sa raison et affermit sa moralité. […] Il était pénétré du sentiment de son droit ; il pensait (et il avait raison) que son intervention dans de telles affaires constituait un des plus puissants ressorts de la Papauté. […] Barbey d’Aurevilly n’aurait eu plus tard rien historiquement à y modifier ; il y juge Innocent III avec une fermeté et une souveraineté de raison qui en font un magistral tableau d’histoire.
Car dans un mouvement on trouvera la raison d’un autre mouvement, mais non pas celle d’un état de conscience : seule, l’expérience pourra établir que ce dernier accompagne l’autre. […] Il est vrai qu’on pourrait se demander si la volonté, même lorsqu’elle veut pour vouloir, n’obéit pas à quelque raison décisive, et si vouloir pour vouloir serait vouloir librement. […] Mais parce que notre raison, armée de l’idée d’espace et de la puissance de créer des symboles, dégage ces éléments multiples du tout, il ne s’ensuit pas qu’ils y fussent contenus. […] Nous voulons savoir en vertu de quelle raison nous nous sommes décidés, et nous trouvons que nous nous sommes décidés sans raison, peut-être même contre toute raison. Mais c’est là précisément, dans certains cas, la meilleure des raisons.
Les poètes, par exemple, ont ouï dire qu’on désirait aujourd’hui de la philosophie partout ; que le public n’entendait point raison sur ce sujet ; qu’il était las de mots, et voulait des choses. […] Nous admirons avec raison l’Énéide, et Virgile voulait la brûler. […] On y veut de l’inspiration, et l’inspiration de commande est bien froide ; on y veut de l’élévation, et l’enflure est à côté du sublime ; on y veut de l’enthousiasme, et en même temps de la raison, c’est-à-dire, non pas tout à fait, mais à peu près les deux contraires. […] La Motte a prétendu que ce qu’on appelle dans l’ode un beau désordre, est au contraire le chef-d’œuvre de la logique et de la raison ; le tout à l’avantage des odes didactiques qu’il a rimées. […] Il nous apprend néanmoins qu’il eut des censeurs de son temps ; et sans doute ces censeurs eurent quelquefois raison ; croit-on que Zoïle même ne l’ait pas eu quelquefois contre Homère ?
et l’Histoire des ducs de Normandie avant la conquête de l’Angleterre 20 par le seul duc qui soit un peu connu, parce qu’il a pris position de roi dans l’histoire, qu’est-ce que cela fait au xixe siècle, à sa politique, à son industrie, à ses passions, à sa haute raison et même à sa curiosité ? […] Car, pour comprendre le Moyen Âge, cette gestation laborieuse et profonde d’une société qui a fini par s’organiser dans la plus merveilleuse harmonie, il faut avoir de deux choses l’une ou la raison du grand historien qui voit l’entre-deux et le dessous des faits, qui en perçoit les causes et les détermine, ou la sensibilité du grand poète qui, par le sentiment et une transposition sublime de son être dans le passé, arrive à l’intuition complète du temps qui n’est plus. Par une punition réservée peut-être à l’orgueil de ce siècle, si infatué de sa raison, il s’est trouvé que jusqu’ici c’est la raison de l’historien qui aie plus manqué au Moyen Âge, et que les poètes, ces enfants, comme disent les philosophes, l’ont infiniment mieux compris que les historiens. […] Le pinceau maigrelet d’un homme qui ne se doute ni de la taille et de la musculature de ses modèles, ni de la profondeur de leurs physionomies, ni du caractère des événements qui les éclairent et qui les colorent, et dont la petitesse de raison philosophique fausse à tout instant le sens même extérieur de l’histoire. […] Telles sont les raisons qui font de cet ouvrage sur les ducs de Normandie un livre sans valeur d’aucune sorte.
L’autorité c’est la raison. […] C’est plusieurs volontés, forcées de donner leurs raisons, d’en appeler à la raison et de s’appuyer sur la raison. […] Non pas, et vous en supposez bien la raison. […] J’ai peur que ce brillant écervelé n’ait raison contre tout le monde. […] Voltaire a donc raison partiellement.
Seul, on peut n’avoir pas tort ; on peut également avoir raison quand on est plusieurs. […] Il ne me persuadera point surtout que j’aie tort par cela seul que tout le monde me donne raison. […] Je pourrais y ajouter d’autres raisons, mais cela n’irait pas sans ennui pour le lecteur, et je ne veux fatiguer ni mes contradicteurs, ni ceux qui ont le droit de compter sur des considérations plus utiles. […] Si Fénelon, par simple désir d’orner son style, ajoute délibérément une expression banale ou une épithète insignifiante, on nous affirme qu’il a eu ses raisons. […] Albalat a raison : Fénelon aspire au banal, à la phrase toute faite.
Il l’a roulée dans ce haillon… Fanatique de démocratie, fanatique d’orgueil de lui-même, sous prétexte de respect et d’admiration pour la grandeur des facultés humaines que tous les philosophes prennent pour la grandeur de leur personne, Laurent Pichat n’a pas craint de mettre la poésie de son âme dans ce qui aurait dû la tuer, et il a osé dire à l’Imagination que le temps est venu de se taire devant la raison triomphante ! […] Tel est le rêve de ce poète chez qui l’imbécile Démocratie a tout dévoré… excepté, pourtant, une petite fleur de Poésie qui a résisté à sa dent par la raison qu’elle est immortelle, et qui a fleuri moqueusement jusque sous les mandibules de cet âne affamé qui veut tout broyer dans ses lourdes mâchoires. […] sur les débris de leur raison. III Et c’est là un bonheur aussi pour cette Raison en ruines et quelquefois déshonorée, que la Poésie ait la vie plus dure qu’elle et subsiste quand la Raison n’est plus. […] quand elle n’est plus, cette noble Raison, dans sa vérité incommutable, qu’une victime égorgée et souillée par les passions et par les sophismes, c’est un bonheur pour elle que la Poésie s’accroche à ce qui en reste et la pare de ce qu’elle a, elle !
C’est une raison de plus pour l’engager à prendre d’autres Muses. […] Que de ruines sa raison a faites dans les pensées qu’il a le plus aimées ! […] De goût, de sens critique, il n’y en a pas plus que de raison ; outre que M. […] Le contraire arrive pour ces livres que la raison, animée par l’imagination, a immortalisés. […] Mais, pour ces deux rôles, il faut une raison très supérieure, quoique très diversement appliquée ; il faut, pour le premier, une raison portée à espérer et à aimer ; pour le second, une raison amère et ironique, ce dissolvant qui fait éclater les vieilles sociétés ; il faut être ou lord Byron ou Béranger.
Comment se posent dans notre raison l’origine et la fin de l’art ? […] La poésie ne dure que par le style et par la raison. […] Il y a au fond identité d’essence entre la raison et le génie : confondre la raison avec l’intelligence mène à confondre le génie avec le talent. […] L’imagination est comme la fleur, la quintessence de la raison ; elle renferme la raison tout entière, et je ne sais quoi que la raison toute seule n’atteindra jamais. […] Et cette raison, qui a découvert son origine ?
La raison en est que la connaissance fut toujours à ses yeux un moyen plutôt qu’une fin. […] Car un tel amour est à la racine même de la sensibilité et de la raison, comme du reste des choses. […] On dira peut-être qu’ils ne se posent aucun problème, vrai ou faux, et l’on aura raison. […] Comment admettre que ceci n’ait d’autre raison d’être que cela ? […] Elle était définitive comme celle du triangle, et pour les mêmes raisons.
J’arracherai de mon cœur toute fibre qui n’est pas raison et art pur. […] Tous ceux qui, jusqu’ici, ont cru avoir raison se sont trompés, nous le voyons clairement. […] Raison et bon sens ne suffisent pas. […] Dieu était pour lui l’ordre de la nature, la raison intime des choses. […] Il aimait l’humanité comme représentant la raison, et haïssait la superstition comme la négation de la raison.
Ces désordres ont souvent leur utilité relative et leur raison d’être. […] La raison en est simple. […] Et moins la raison de la survivance est visible, plus elle paraît sacrée. […] Il faut faire plus que son devoir pour être « vertueux », et s’écarter un peu de la raison. […] Les vérités premières portent avec elles leur raison d’être.
C’est tout simplement la raison humaine développée par le temps, par l’étude, par l’examen, par la lecture, par la science, par l’histoire, par la réflexion, par la liberté de penser ; la raison discutée se substituant en toutes choses à l’idée imposée, et ne demandant sa sanction qu’à l’évidence, au lieu de la demander à l’autorité. […] Diderot, Helvétius et leurs amis infectèrent d’athéisme, déraison suprême, le livre par lequel la raison humaine devait élever par tous les degrés son temple à la souveraine intelligence. […] Sous le moyen âge, la raison générale était ecclésiastique ; elle voulait devenir laïque, elle tendait, pour employer le mot des juristes, à la grande sécularisation de l’esprit humain. […] Le décalogue de la raison moderne et de la liberté fut écrit en français : la langue ainsi devint monumentale en même temps qu’elle devint véhicule d’éloquence, de législation et de philosophie chez tous les peuples. […] Démosthène et Cicéron ne parlaient que pour eux, de leurs affaires ou de leur nation : nous parlions pour l’humanité tout entière ; notre affaire était l’affaire de la raison générale, la cause de l’homme et de l’esprit humain.
Ses Mélanges littéraires, ses Éloges, ses Histoires, tout ce qu’il a jamais écrit, dépose nettement du soin et de l’effort avec lequel il invente et polit sa phrase ; et il a bien raison, du reste ! […] À tort ou à raison, il aura décoré son époque et il sera tombé avec elle. […] Elle ne l’est ni par les raisons que Villemain nous en donne, ni par les échantillons de Pindare qu’il ajoute à ces raisons, comme preuve à l’appui. […] À proprement parler, il n’y a pas d’histoire de la tribune, par l’impérieuse et souveraine raison qu’il n’y a pas d’art de la parole, si ce n’est pour les rhéteurs qui se vantent de l’enseigner. […] Eux, ils ne le gênaient pas par leur grandeur… Que de raisons pour les préférer !
L’union de l’art antique et de la raison moderne dans les hautes intelligences littéraires a produit ce merveilleux épanouissement. […] Elle avait raison, et ce style est exquis de naturel — de naturel laborieusement exprimé, mais enfin de naturel effectivement réalisé. […] Tous les deux sont assez près de regarder le respect des anciens comme une dévotion de cuistre : pour eux, ils les jugent en honnêtes gens, par leur raison, sans leur attribuer de supériorité sur les modernes en vertu de leur antiquité. […] Elle, la raison même, Racine était son poète, tandis que Mme de Montespan goûtait mieux Boileau : ces préférences mettent à nu le fond des âmes. […] Peu goûtée de Louis XIV d’abord, elle le séduit à force de douceur et de raison, elle est sa confidente, son amie, jusqu’à ce que la mort de Marie-Thérèse la fasse femme du grand roi.
La raison en est que dans ce moraliste il y a surtout un artiste, qui aime la vie et les aspects de la vie. […] De là les clefs de La Bruyère : il s’est défendu, comme Molière, et avec raison aussi dans une certaine mesure, contre la malignité publique acharnée à nommer les personnes d’après lesquelles il avait travaillé. […] Hors de là, par l’active et hardie curiosité de son esprit, par l’indépendance essentielle et par les directions spontanées de sa pensée, par tout son tempérament enfin, il est tout près de Voltaire et surtout de Rousseau : chez lui le christianisme masque plutôt qu’il n’entrave la superbe liberté de la raison ; mais, de plus, chez lui la raison se dirige à son insu par les suggestions du tempérament. […] Désireux de plaire à tout le monde, il proposa une dizaine de raisons pour et contre l’une et l’autre opinion, encouragea les modernes en approuvant les anciens, et finit par s’échapper sans conclure. […] Si l’on descend au fond de son âme, la raison de ce besoin de plaire est un amour infini de soi-même.
A chaque pas l’on rencontre des géants, vaincus comme de raison, quand ils sont musulmans, vainqueurs, dès qu’ils combattent pour la sainte cause. […] Or, elle soumet les appétits des sens aux lois de la raison et de l’Église. […] Quant aux autres femmes que le roi a aimées, elles rachètent leur grandeur Ces surprises des sens que la raison surmonte… Et sur mes passions ma raison souveraine… Ma raison, il est vrai, dompte mes sentiments… éphémère et leurs éclatants péchés par une pieuse expiation. […] Fontenelle s’est ennuyé d’entendre toujours vanter la raison aux dépens de la passion et il s’est complu à renverser les rôles. […] Elles ont tour à tour leur raison d’être et leur utilité ; elles répondent à des besoins changeants.
Nous étions donc personnellement d’accord avec ceux qui voulaient épargner les quatre ministres, et d’accord de toutes manières, par les raisons sentimentales comme par les raisons politiques. […] Voyons, qu’ils donnent leurs raisons. […] Toutes les raisons pour la peine de mort, les voilà donc démolies. […] Nous préférons souvent les raisons du sentiment aux raisons de la raison. […] La raison est pour nous, le sentiment est pour nous, l’expérience est aussi pour nous.
Je connais bien des gens qui allient comme vous, monsieur, à un goût sûr une raison libre de tout esprit de parti. […] Ce sont des esprits nés avancés et qui ont toujours eu l’âge de raison, que ces petits abbés de Pons. […] Je reprends les diverses pièces que je viens d’énumérer. — Dans sa Dissertation sur le poème épique, contre la doctrine de Mme Dacier (1717), l’abbé de Pons a raison sur presque tous les points, excepté un seul que nous dirons à la fin. […] André Chénier a eu raison de célébrer Ce langage sonore aux douceurs souveraines, Le plus beau qui soit né sur les lèvres humaines. […] Rigault a eu raison de louer (page 470) en les entendant redites de nos jours et retrouvées avec grâce par un homme de beaucoup d’esprit qu’il compare à M. de Tréville.
Il les prêche par toutes les raisons imaginables ; il les prend, si l’on peut dire, par tous les bouts. […] L’usage ne tranche pas tout : dans les cas douteux, et quand il n’y a pas d’autre moyen, la raison veut qu’on recoure à l’analogie, — l’analogie qui pourtant n’est elle-même que l’usage étendu et transporté du connu au moins connu. […] Ne demandez pas trop de raison à l’usage ; il fait beaucoup de choses par raison, beaucoup sans raison, et beaucoup contre raison. […] Il y en avait de son temps ; Arnauld, dans sa Grammaire générale, et les écrivains de Port-Royal essayeront de porter le plus de raison possible dans la langue : Vaugelas se borne à constater le fait existant, en le puisant à sa meilleure source. […] Mais Vaugelas ne dit pas qu’on ait raison de faire ainsi et de décrier un mérite réel à cause d’un ridicule.
Je sais bien les raisons de tactique dont il essaie d’excuser, d’expliquer et parfois de magnifier son éloignement. Les mêmes raisons ont-elles produit le moindre effet sur Picquart ? […] On eut raison d’applaudir son acte révolutionnaire. […] Il alla jusqu’à dire aux douze imbéciles que le hasard appelait à juger : « Vous êtes le cœur et la raison de Paris. » Sauf sur un point d’histoire, son cœur et sa raison à lui étaient d’accord avec le cœur et la raison des douze. […] Avant que d’écrire ou d’agir, le classique apprend à penser, et geste ou parole lui semblent beaux qui expriment directement et clairement le pouvoir absolu de la raison.
Ces preuves en faveur de la raison naturelle ne sont point accumulées au hasard. […] Ce sont ces métaphores modérées, à peine sensibles, qui n’interviennent que pour éclairer la raison, ou pour élever de temps en temps et d’un degré seulement le ton ordinaire. […] On appelle raison la connaissance des vérités universelles et nécessaires, par exemple : toute qualité suppose une substance ; tout événement suppose une cause. […] On ne peut pas dire non plus que les notions ou connaissances de la raison soient dans la conscience. […] En disant que les axiomes et les notions de la raison sont dans la conscience, et font partie de la conscience, il leur attribue l’autorité et la certitude de la conscience ; comme la conscience a toujours passé pour infaillible, la raison, par contagion, devient infaillible.
Ces deux méthodes contiennent toutes les argumentations littéraires comme toutes les démonstrations scientifiques : la raison humaine n’a pas d’autres voies ; elle ne sait point autrement rendre compte de ce qui est ni établir ce qui doit être. […] Il y a une logique naturelle à laquelle obéissent les esprits les moins cultivés : la raison fait son œuvre sourdement, inconsciemment jusque dans les intelligences les plus brutes. […] On se laisse tromper à l’apparence ; on prend pour réel ce qui ne l’est pas, comme dans l’histoire de la dont d’or, et l’on donne la raison de ce qui n’existe pas. […] Celui qui sollicite une faveur pour lui seul, parce que cela ne tire pas à conséquence, qui s’autorise d’une juste affection pour réclamer une injuste décision, s’il est de bonne foi, ne devra pas s’obstiner dans sa prétention quand il considérera les formes universelles des raisons qu’il donne. […] Il ne faut pas, dans un raisonnement, se fonder, à moins d’une nécessité absolue, sur les décisions paradoxales du sens propre, mais sur les croyances générales du sens commun, quand même on aurait des raisons de douter ou de nier sur ce qu’il affirme.
Il y a à cela plusieurs raisons. […] C’est que la raison est encore ce qui nous fait le mieux jouir des choses, le plus sûrement et le plus longtemps. […] La raison, en présidant aux ébats du cœur et des sens, les garde de tout mal et leur permet de varier leurs aimables expériences. […] Fouquier est un homme qui aime la vie, et c’est justement à la mieux aimer, à tirer d’elle tout ce qu’elle contient, que lui sert sa tranquille raison. […] Il est impossible d’apporter à l’étude de ces questions plus de raison, de délicatesse et d’esprit, ni une expérience plus consommée et un plus grand amour de son sujet.
Pour ceux qui pensent autrement que lui, on le comprend, quoiqu’il valût mieux ne pas se taire, quoique la vérité, dite et déduite, vaille toujours mieux que le dédain ; mais pour ceux qui pensent comme l’auteur de l’Histoire de la Liberté religieuse, pour les hommes de la même confraternité politique et philosophique, qui n’ont pas encore parlé de cette histoire, plus intéressante à tous les points de vue que la plèbe de livres qu’ils ont l’habitude de vanter, il serait vraiment incompréhensible qu’ils se fussent tus ou qu’ils eussent dosé à l’auteur si chichement l’éloge, s’il n’y avait à cela une raison tirée de cette Histoire de la Liberté religieuse et que mon devoir de critique est, avant tout, de dégager. Et cette raison que je dirai, cette raison plus profonde que le talent, plus involontaire que la conviction dans l’auteur de l’Histoire de la Liberté religieuse, c’est son âme même, son instinct de cœur le plus vrai, c’est ce que les hommes et lui-même n’ont pas mis en lui et ce qui, pour cette raison, y est davantage ! […] Dargaud : le sentiment d’un christianisme invincible à la raison qui a tué le christianisme, mais qui subsiste sur ses débris, et il faut y ajouter un second caractère qui particularise encore davantage l’auteur de l’Histoire de la Liberté religieuse : l’égalité des belles choses humaines, qu’elles soient protestantes ou catholiques, devant l’admiration, le respect et la pitié de l’historien ! […] Dargaud, qui ne croit ni à la Chute ni à la Grâce, mais à la Nature, a l’optimisme de ceux qui pensent que, dans un temps donné, rien n’est impossible à la puissance de la raison. […] Il faut bien le dire en finissant, réellement tout ce détail du Concile de Trente est maigre de raison et presque de haine, et ce chapitre de son livre n’est pas digne de la gravité, d’ordinaire si consciencieuse et si pénétrée, de l’historien !
Déjà pour les mouvements accomplis par les autres êtres vivants, ce n’est pas en vertu d’une perception directe, c’est par sympathie, c’est pour des raisons d’analogie qu’il les érigera en réalités indépendantes. […] Il y avait à cela deux raisons. […] La raison pour laquelle la science n’a jamais insisté sur la relativité radicale du mouvement uniforme est qu’elle se sentait incapable d’étendre cette relativité au mouvement accéléré : du moins devait-elle y renoncer provisoirement. […] Ne fût-ce que pour cette raison, la théorie de la Relativité généralisée marque une date importante dans l’histoire des idées. […] Ne fût-ce que pour cette raison encore, la théorie de la Relativité restreinte appelait à sa suite celle de la Relativité généralisée, et ne pouvait même être convaincante aux yeux du philosophe que si elle se prêtait à cette généralisation.
Je voulais prouver aussi que la raison et la philosophie ont toujours acquis de nouvelles forces à travers les malheurs sans nombre de l’espèce humaine. […] On dirait que les préjugés, les bassesses et les mensonges n’ont pas fait de mal à l’espèce humaine, tant on se montre sévère pour la philosophie, la liberté et la raison. […] En effet, ils conviennent que les sciences font des progrès continuels, et ils veulent que la raison n’en fasse pas. […] Enfin, comment peut-on imaginer que l’on mettra les sciences tellement en dehors de la pensée, que la raison humaine ne se ressentira point des immenses progrès que l’on fait chaque jour dans l’art d’observer et de diriger la nature physique ? […] Godwin aussi, dans son ouvrage sur la justice politique, soutient le même système ; mais, quoique ce soit un homme de beaucoup d’esprit, sa raison ne m’a pas paru assez sûre pour le citer jamais comme une autorité.
— Il faut bien que je le sois, répondit l’enfant : j’ai une gouvernante qui est la raison même. […] ce mot suppose qu’elle avait été en bonne intelligence avec lui ; l’indifférence ne se brouille point. « Elle me dit sur tout cela de très mauvaises raisons et nous eûmes une conversation assez vive, mais pourtant fort honnête de part et d’autre. […] « On me renvoya le soir pour me faire entendre raison » (pour me détourner du dessein de me retirer). « Il me parut qu’il entendait les miennes. » Comment un ministre courtisan n’aurait-il pas entendu les raisons d’une femme qu’il savait ne pas déplaire au roi ? […] Il ne faut point dire ce nouveau bienfait, j’ai des raisons pour le taire, madame de Richelieu et l’abbé (Testu) le savent. » Ces raisons étaient de ne pas exciter de nouveau la jalousie de madame de Montespan.
Et voilà les raisons pour lesquelles je parlerai de ce livre, qui, tout en étant un livre de métier et d’instruction pratique pour les officiers de l’armée française, entre pourtant par l’esprit qui l’anime dans la philosophie du temps ; mais, Dieu merci ! […] Le combat, c’est le monde et c’est l’âme du monde, se manifestant dans toutes les sphères de son activité comme dans la sphère de la guerre, et y dominant, à travers toutes les résistances et toutes les luttes, pour les mêmes raisons et par les mêmes moyens ! […] « Une aristocratie — dit-il brusquement — a-t-elle une raison d’être, si elle n’est pas militaire ? […] L’avenir semble appartenir à la démocratie, mais, avant que cet avenir soit atteint par l’Europe, qui dit que la victoire, la domination, n’appartiendra pas un long temps à l’organisation militaire, qui périra ensuite faute d’aliments de vie quand, n’ayant plus d’ennemis extérieurs à vaincre, à surveiller, plus à combattre pour sa domination, elle n’aura plus sa raison d’être. Tout triomphe de la Prusse est un retard pour la démocratie allemande, forcée d’attendre que l’aristocratie périsse, alors seulement que l’orgueil qui est sa force n’aura plus sa raison d’être… » Voilà ces notes, — ces notes qui closent le livre.
Quelques-uns ont cru devoir changer l’ancienne, par la même raison qu’on a réformé nos vieilles modes. […] Toutefois ces observateurs rigides, ayant une sorte de raison dans la défense de leur cause, grossirent chaque jour leur parti. […] Les vengeurs zélés de l’ancienne orthographe, traitoient leurs raisons de démonstration morale ; mais leurs adversaires ne les jugeoient pas même une simple preuve. […] Quant à cette raison qu’on croyoit sans réplique, qu’il faudroit jetter au feu les meilleurs livres, comme devenus inutiles par la nouvelle orthographe, ils répondirent que, pour remédier à cet inconvénient, on n’avoit qu’à les faire imprimer de nouveau. […] Suivre la raison & l’autorité, voilà, selon les écrivains les plus judicieux, la règle la plus sûre par rapport à l’orthographe.
Et il aura raison. […] … Qui donc arrêterait la raison une fois qu’on lui a lâché les rênes ? […] Ce cavalier, vous le savez, c’était la Raison : non pas, je n’ai pas besoin de vous le dire, la Raison dont la Révolution fit une déesse et qui n’était qu’une fille très dégénérée de l’autre ; et pas davantage une raison particulière, « la mienne ni la vôtre, avec les différences qu’elle reçoit du caractère de chacun, du pays, du temps, mais la raison universelle, impersonnelle et absolue12 » ; c’est-à-dire une raison infaillible, toujours sûre d’elle-même, procédant avec certitude au nom de l’humanité la raison, enfin, qu’il faudrait pour faire de la critique objective… Mais ce n’est pas tout. […] qu’il ait vu juste, qu’il ait raison, l’on n’en peut guère douter. […] Les isolés ne sont que des excentriques : c’est avoir tort que d’avoir raison tout seul, eût-on mille fois raison.
Considérée maintenant sous l’aspect historique, cette intime solidarité naturelle entre le génie propre de la vraie philosophie et le simple bon sens universel, montre l’origine spontanée de l’esprit positif, partout résulté, en effet, d’une réaction spéciale de l’a raison pratique sur la raison théorique, dont le caractère initial a toujours été ainsi modifié de plus en plus. […] Leurs transformations historiques consistent surtout, au contraire, en une désuétude croissante, soit mentale, soit sociale, sans que les questions agitées aient jamais pu faire aucun pas réel, à raison même de leur insolubilité radicale. […] Ne pouvant empêcher le libre essor de la raison moderne chez les esprits cultivés, on s’est ainsi proposé d’obtenir d’eux, en vue de l’intérêt public, le respect apparent des antiques croyances, afin d’en maintenir, chez le vulgaire, l’autorité jugée indispensable. […] Cette prééminence est d’une nature tellement sensible que, sans doute, la raison publique la reconnaîtra suffisamment, longtemps avant que les institutions correspondantes aient pu convenablement réaliser ses heureuses propriétés. […] Les divers observateurs qui peuvent s’affranchir, même momentanément, du tourbillon journalier s’accordent maintenant à déplorer, et certes avec beaucoup de raison, l’anarchique influence qu’exercent, de nos jours, les sophistes et les rhéteurs.
Dégoût… Tu es pris d’un mauvais accès ; la raison te violente. […] Vous avez raison ; mais point davantage, et encore moins, et à plus forte raison non, vous n’êtes pas responsables de vous-mêmes dans votre état de veille. […] Ce n’est certainement pas une raison pour la proscrire ; mais encore ce ne lui est pas un titre de gloire et ce n’est pas une raison pour la vénérer. […] Ils ont raison. […] » Certainement, on peut le dire, et avec raison.
Il faut entendre par bienséance la science de ce qui sied, la raison dans les relations de la vie civile. […] C’est assez pour que Boileau ait raison. […] Des raisons plus dignes du roi et du poète expliquent la bienveillance constante du premier pour le second. […] On lui parlait la langue de son âge ; on se servait de son imagination pour mûrir sa raison. […] Moins peintre que Bossuet, moins logicien que Bourdaloue, Massillon parlait plus au cœur, ou plutôt à la raison par la sensibilité.
À travers un nuage de larmes, — il a raison ! […] Où serait la raison qu’un particulier ose en sacrifier tant d’autres à soi seul, et que la société ne pût par sa ruine racheter le repos public ! […] Ce que l’esprit classique avait le plus énergiquement combattu dans le cartésianisme, c’était le dogme alors tout nouveau de la toute-puissance et de la souveraineté de la raison, cette raison qui croit « que deux et deux font quatre », et qui nie, quand elle ne se fait pas un jeu de le bafouer, tout ce qui échappe aux prises de ses déductions. « Taisez-vous, raison imbécile ! […] Mais nous, c’est autre chose, et si, de soi, pour les raisons qu’on a dites, l’esprit encyclopédique tendait à la désorganisation de la littérature, quelles raisons aurions-nous de féliciter ces dames d’avoir été les preneuses de l’Encyclopédie ? […] Il a raison, et Garat aussi.
Or, le caractère propre de la raison, c’est de vouloir se rendre compte de tout. […] L’imagination et la gaieté d’Aristophane sont libres de toute contrainte de la raison. […] Jusqu’où Alceste a-t-il raison ? […] J’en crois voir deux raisons. […] Et par quelle raison les laver, dis ?
Mais j’ai d’autres raisons pour t’épargner encore. […] La vérité, la raison ou l’intelligence est l’unique juge des choses ; … il adopte ces seules maximes éminemment spiritualistes. […] Il écrit le code de la raison humaine ; Platon n’en écrit que le poème. […] Ce n’est pas, comme dans Platon, l’imagination, c’est la raison divinement parlée, qui divinise par sa plume la morale. […] Avez-vous une plus haute philosophie morale, une plus saine raison, une plus solide vertu, un plus beau style ?
Les nécessités inhérentes au déploiement total des ailes de notre raison en réglementent l’essor. […] Il déclare la poésie par ses figures audacieuses et ses vers contraire à la raison. […] Ils eurent raison. […] Ils distinguèrent donc avec soin le Verstand du Vernunft, l’entendement de la raison. […] Par exemple, nul ne contestera que le système de Leibnitz contente mieux la raison que celui de Descartes.
Le théisme des hommes éclairés, des âmes sensibles, est de la véritable philosophie, et c’est en considérant toutes les ressources que l’homme peut tirer de sa raison, qu’il faut compter cette idée, trop grande en elle-même, pour n’être pas d’un poids immense encore, malgré ses incertitudes. […] Une dévotion ardente suffit à l’imagination exaltée des criminels repentants, et dans ces solitudes profondes où les Chartreux et les Trappistes adoptaient une vie si contraire à la raison, ces coupables convertis trouvaient la seule existence qui convint à l’agitation de leur âme ; peut-être même, des hommes dont la nature véhémente les eut appelés dans le monde à commettre de grands crimes, livrés, dès leur enfance, au fanatisme religieux, ont enseveli dans les cloîtres l’imagination qui bouleverse les Empires. […] D’abord, la disposition qu’il faut donner à son esprit pour admettre les dogmes de certaines religions, est souvent, en secret, pénible à celui qui, né avec une raison éclairée, s’est fait un devoir de ne s’en servir qu’à de telles conditions ; ramené, par intervalles, à douter de tout ce qui est contraire à la raison, il éprouve des scrupules de ses incertitudes, ou des regrets d’avoir tellement livré sa vie à ces incertitudes mêmes, qu’il faut ou s’avouer l’inutilité de son existence passée, ou dévouer encore ce qu’il en reste. […] La raison combat, avec désavantage, contre les affections passionnées. […] Les esprits ardents n’ont que trop de penchant à croire que le jugement est inutile, et rien ne leur convient mieux que cette espèce de suicide de la raison abdiquant son pouvoir par son dernier acte, et se déclarant inhabile à penser, comme s’il existait en elle quelque chose de supérieur à elle, qui put décider qu’une autre faculté de l’homme le servira mieux.
A un siecle de génie, de raison, de grandeur & de gloire, ont succédé des temps de frivolité, de foiblesse, de vertige & d’absurdité. […] On y voit, presque à chaque moment, des Productions bizarres, des succès monstrueux, des réputations usurpées, &, sans quelques Ecrivains incapables de céder au torrent, le bon sens & la raison y seroient sans disciples, comme sans appui. […] S’il étoit question d’ajouter de nouvelles raisons, nous dirions encore : Est-il nécessaire d’avoir composé d’excellens tableaux, pour acquérir le droit de juger des fautes ou des habiletés du Peintre, qui soumet les siens à la critique ? […] Despréaux avoit raison, & nous nous en tenons à son autorité. […] Par cette raison, les Médecins qui n’ont travaillé que sur des objets de Médecine, les Géometres qui n’ont écrit que sur la Géométrie, les Jurisconsultes qui n’ont publié que des Livres de Jurisprudence, les Physiciens, &c. ne nous ont pas paru de notre ressort.
sont aussi dérivés grammaticalement de cantator, pour des raisons toutes pareilles. […] En troisieme lieu, que la raison alléguée par R. […] Tout a sa raison dans les langues, jusqu’aux écarts. […] Ces sortes de locutions ont pour fondement la raison irrésistible du besoin. […] D’autres suivroient un plan tout différent, & auroient sans doute de bonnes raisons pour préférer celui qu’ils adopteroient.
D’ordinaire les effervescences révolutionnaires viennent du tempérament ; la raison intervient pour les régler. […] En ces délicates matières, chacun a raison par quelque côté. […] L’humanité doit sûrement être écoutée en ses instincts ; l’humanité, au fond, a raison ; mais dans la forme, dans le détail, oh ! […] vous avez raison ; là on peut évoluer durant toute l’éternité sans se rencontrer jamais. […] Quel homme, Monsieur, et que vous avez eu raison de le comparer à un saint !
Regrettait d’en être venu si tard à l’étude de l’histoire, il considère que « la connaissance de ces grands événements que le monde a produits en divers siècles, étant digérée par un esprit solide et agissant, peut servir à fortifier la raison dans toutes les délibérations importantes ». […] Jusque dans les affaires de guerre et dans les sièges qu’il entreprend, il se rend aux difficultés qu’on lui oppose, « persuadé, dit-il, que quelque envie qu’on ait de se signaler, le plus sûr chemin de la gloire est toujours celui que montre la raison ». […] Il est des princes qui ont raison de craindre de se laisser aborder de trop près et de se communiquer aux autres : il ne croit pas être de ceux-là, et, sûr qu’il est de lui-même, et de ne prêter jamais à aucune surprise, il gagne à cette communication aisée de pénétrer plus à fond ceux à qui il parle, et de connaître par lui-même les plus honnêtes gens de son royaume. […] La pensée religieuse qui s’y joint dans son esprit ajoute plutôt qu’elle n’ôte à ce que cette maxime royale a de politiquement remarquable ; et c’est en ces parties qu’on reconnaît chez lui le véritable homme de talent dans cet art difficile de régner : La sagesse, dit-il, veut qu’en certaines rencontres on donne beaucoup au hasard ; la raison elle-même conseille alors de suivre je ne sais quels mouvements ou instincts aveugles, au-dessus de la raison, et qui semblent venir du ciel, connus à tous les hommes, et plus dignes de considération en ceux qu’il a lui-même placés aux premiers rangs. […] Il s’était exposé à une affaire deux jours auparavant, et, comme on le lui reprochait, il en donne les raisons avec une solennité naïve.
me dit-on aujourd’hui avec une apparence de raison qui trompe les esprits mal informés. […] La raison, la loi, la littérature de ce peuple immense sont encore pour des siècles la personnification prolongée de Confucius. […] Il serait absurde de vouloir rétablir tous ces usages, par la raison qu’anciennement ils ont été pratiqués. […] J’y reviendrai, mais je vais vous le dire en deux mots : c’est que, à l’exception de leur histoire, la littérature de la Chine est pauvre et médiocre ; ils n’ont que de la raison et peu d’imagination. […] La France le compense par mille chefs-d’œuvre d’imagination et de raison ; son génie a plutôt les formes du drame, parce que ce génie est surtout en action.
Ainsi nulle cause n’est cachée ; le mystère de la volonté divine rend raison de tout. […] Mais les lois du mouvement, quelque exactes qu’elles soient, ne rendent pas raison de tout. […] Elle va plus haut ; et la raison se manquerait à elle-même, si elle s’arrêtait à moitié chemin. […] Mais ce sont des conséquences aussi certaines que les faits incontestables d’où la raison les tire. […] La raison voit et comprend le bien ; la liberté fait souvent le mal.
Quelle belle raison de vivre ! […] La raison profonde gît dans l’éducation des naturalistes. […] Les États socialistes seraient patriotes pour la même raison que la Révolution française, — pour se défendre d’abord ! […] Une raison sage, amoureuse de l’ordre et de l’éclat, a réglé l’expansion de ces énergies sauvages. […] Ta parole était une leçon éloquente de raison et de beauté !
En effet, tout homme qui écrit un livre est mû par trois raisons : premièrement, l’amour-propre, autrement dit, le désir de la gloire ; secondement, le besoin de s’occuper, et, en troisième lieu, l’intérêt pécuniaire. […] « Si enfin un artiste obéit au mobile qu’on peut appeler le besoin naturel du travail, peut-être mérite-t-il plus que jamais l’indulgence : il n’obéit alors ni à l’ambition ni à la misère, mais il obéit à son cœur ; on pourrait croire qu’il obéit à Dieu… « Bien que j’aie médit de la critique, je suis loin de lui contester ses droits, qu’elle a raison de maintenir, et qu’elle a même solidement établis. […] A. de Musset a raison entièrement et par ce qui touche à l’imagination, il pourrait voir qu’on n’a jamais plus imité qu’aujourd’hui et que ce temps passionné pour la recherche fiévreuse du nouveau n’a trouvé vraiment que cela, « l’imitation de seconde main ». — On copie ce qui n’était déjà qu’une imitation ! […] Si l’on personnifie, en Voltaire, la Raison critique, indépendante, saine, la logique et l’ironie, l’esprit de réforme contenu dans le culte du goût, de tradition légitime et de nécessité, le respect de la langue, il deviendra facile d’identifier Rousseau à cet esprit de révolte, d’instinct brutal, de mépris pour la forme, de lyrisme hors de propos, d’orgueil maladroit qui semble nous dominer aujourd’hui. […] Pour la France, M. de Tourtoulon, Maffre de Baugé et d’autres que nous avons nommés déjà dans une autre partie de cet ouvrage précisèrent la doctrine fédéraliste qui devait présider à l’avènement de la raison latine, victorieuse de l’instinct Révolutionnaire : M.
En éducation, Rousseau a répandu des principes dont on peut abuser, dont il abuse lui-même, mais qui sont d’une grande portée : laisser agir la nature et parler à la raison. […] Lorsqu’il nous dit que, dans les littératures du Nord, « l’équilibre est à chaque instant rompu entre l’imagination et la raison », cela est-il bien prouvé ? […] La proportion de la raison et de l’imagination dans les œuvres d’art ne peut être fixée d’une manière absolue. […] Qui a raison ? […] Richelieu lui-même, qui trouvait la vénalité détestable, la défendait cependant par cette raison.
Cette préférence pour la morale a fortifié M. de Biran dans son étrange doctrine des forces, et l’a plongé90 dans sa théorie mystique de la révélation intérieure et de la raison illuminée. […] Ainsi métamorphosé, il a réfuté par une équivoque le scepticisme, doctrine immorale ; réduit la psychologie à l’étude de la raison et de la liberté, seules facultés qui aient rapport à la morale ; défini la raison et la liberté de manière à servir la morale ; prescrit à l’art l’expression de la beauté morale ; institué Dieu comme gardien de la morale, et fondé l’immortalité de l’âme comme sanction de la morale. […] Cousin entre-choquait « le moi substantiel, la raison impersonnelle, la spontanéité, la réflexivité », et beaucoup d’autres choses aussi sonores ; et le public, emporté sur un nuage, était ravi de planer avec lui au-dessus de l’univers. […] On devint à peu près cartésien, plus volontiers encore partisan de Leibnitz, par cette raison excellente que Leibnitz est le plus loin possible de Spinoza. […] Toutes ces raisons semblent annoncer qu’on énumérera longtemps encore les trois facultés, la première, la seconde et la troisième, et que, jusqu’à la fin du siècle, pour expliquer l’idée de l’infini, on dira qu’elle vient de la raison, faculté de l’infini.
Si une liste de rimes peut quelquefois faire naître une idée heureuse à un excellent poète, en revanche un poète médiocre ne n’en sert que pour mettre la raison et le bon sens à la torture. […] Les modernes, en adoptant aveuglément la définition des anciens, ont eu bien moins de raison qu’eux. […] Je ne sais par quelle raison un grand nombre d’écrivains modernes nous parlent de l’éloquence des choses, comme s’il y avait une éloquence des mots. […] Ne serait-ce point pour cette raison qu’il est rare de lire, sans être fatigué, bien des vers de suite, et que le plaisir causé par cette lecture diminue à mesure qu’on avarice en âge. […] Les Athéniens, nation délicate et sensible, avaient raison d’écouter Démosthène comme un prodige ; notre admiration, si elle était égale à la leur, ne serait qu’un enthousiasme déplacé.
Rien ne fatigue l’existence, comme ces intérêts divers dont la réunion a été considérée comme un bon système de félicité, en fait de malheur on n’affaiblit pas ce qu’on divise, après la raison qui dégage de toutes les passions : ce qu’il y a de moins malheureux encore, c’est de s’abandonner entièrement à une seule ; sans doute, ainsi l’on s’expose à recevoir la mort de ses propres affections. […] Une sorte de ridicule s’est attaché à ce qu’on appelle des sentiments romanesques, et ces pauvres esprits, qui mettent tant d’importance à tous les détails de leur amour propre, ou de leurs intérêts, se sont établis comme d’une raison supérieure à ceux dont le caractère a transporté dans un autre l’égoïsme, que la société considère assez dans l’homme qui s’occupe exclusivement de lui-même. […] Enfin, il est des caractères aimants, qui profondément convaincus de tout ce qui s’oppose au bonheur de l’amour, des obstacles que rencontre et sa perfection, et surtout sa durée ; effrayés des chagrins de leur propre cœur, des inconséquences de celui d’un autre, repoussent, par une raison courageuse, et par une sensibilité craintive, tout ce qui peut entraîner à cette passion : c’est de toutes ces causes que naissent et les erreurs adoptées, même par les philosophes sur la véritable importance des attachements du cœur, et les douleurs sans bornes, qu’on éprouve en s’y livrant. […] L’amour est la seule passion des femmes ; l’ambition, l’amour de la gloire même leur vont si mal, qu’avec raison, un très petit nombre s’en occupent. […] Sans doute, celle qui a rencontré un homme dont l’énergie n’a point effacé la sensibilité ; un homme qui ne peut supporter la pensée du malheur d’un autre, et met l’honneur aussi dans la bonté ; un homme fidèle aux serments que l’opinion publique ne garantit pas, et qui a besoin de la constance pour jouir du vrai bonheur d’aimer ; celle qui serait l’unique amie d’un tel homme, pourrait triompher au sein de la félicité, de tous les systèmes de la raison.
La nouveauté des doctrines, le courant de l’opinion publique, la naissance d’une littérature poétique, la grandeur mystique des théories sur l’infini et sur la raison éternelle, il n’en fallait pas tant pour pousser M. […] S’il expose de nouveau sa doctrine, il ira chercher un de ses plus anciens cours, celui de 1817, pur de tout panthéisme, par cette excellente raison qu’à ce moment le panthéisme était encore ignoré de l’auteur40. […] « Son caractère est de subordonner les sens à l’esprit, et de tendre, par tous les moyens que la raison avoue, à élever et à agrandir l’homme. » Elle n’est pas seulement une doctrine, elle est « un drapeau. » C’est « une cause sainte », et il y a bientôt quarante ans que « je combats » pour elle. […] Peut-être se rencontrera-t-il un vrai savant, très-peu connu parce qu’il méritera de l’être, très-philosophe parce qu’il ne se donnera point pour philosophe, qui prendra la peine de mesurer le degré de certitude des sciences, d’établir l’axiome sur lequel elles s’appuient et d’expliquer les raisons raisonnables que nous avons de croire en elles. […] Notre psychologie va se réduire à deux théories : nous croyons à la liberté, parce que, si on la supprime, on supprime le mérite et le démérite, ce qui est immoral ; nous croyons à la raison, parce qu’on relève l’homme en lui attribuant une faculté distincte capable d’atteindre Dieu, et parce que, si on nie la raison, on compromet les preuves de l’existence de Dieu, ce qui est immoral ; nous allons donc défendre la raison et la liberté.
Je crois que vous avez raison, mon cher Baptistin, et que l’instinct, cette raison occulte, composée de mille raisons non raisonnées, raisonne mille fois mieux que le préjugé, contre lequel tout le génie de M. […] si j’ai raison, Monsieur ? […] « — Oui, continua-t-il cependant encore, tant il était plein de ses raisons, oui, les brutalités du progrès s’appellent révolutions. […] Le terroriste crée le droit de la colère, la raison mystérieuse, la raison d’État du peuple en révolution dont il faut adorer, respecter, bénir la hache ; et l’évêque, en se taisant et en adorant, en montrant du doigt le terroriste dans le troisième ciel, donne à son tour raison à la vengeance. […] Misères du cœur, de l’esprit, de l’âme et du corps, misères surtout qui frappent ce que vous aimez à cause de vous, et qui font un devoir de vivre pour d’autres encore après avoir perdu toute raison de vivre pour vous-même !
Pour lui, la réflexion est un état contre nature ; il écrit cette phrase énergique : « L’homme qui médite est un animal dépravé. » Il se plaît à railler la raison, à l’humilier, à la fouler aux pieds ; il proclame la royauté, que dis-je ? […] » — La raison, dit-il encore42, produit des hommes d’esprit ; le sentiment fait les hommes de génie. La raison varie d’âge en âge ; le sentiment est toujours le même. — Et il continue longuement ce parallèle où la pauvre raison est immolée sans pitié en l’honneur du sentiment réhabilité. Ceux même des philosophes qui défendent la raison la trahissent : Condillac fait de l’intelligence une dépendance de la sensibilité, puisque les idées ne sont pour lui que des sensations transformées. […] Il fait dire au Vicaire savoyard, interprète fidèle de ses propres opinions : « Quand tous les philosophes du monde prouveraient que j’ai tort, si vous sentez que j’ai raison, je n’en veux pas davantage. » Sa démonstration de l’immortalité de l’âme ne repose pas sur une autre base.
Je crois donc que les anciens qui avoient tant de goût pour la représentation des pieces de théatre, auroient fait quitter le masque à tous les comediens sans une raison. […] Entrons dans l’explication de la raison que je viens d’alléguer. […] Que Bassus eut raison ou non dans son étimologie, cela ne nous fait rien. […] Par la même raison, il reste encore aux antiquaires bien des choses à expliquer sur les masques. […] Nous avons donc raison de faire joüer nos acteurs à visage découvert, et les anciens n’avoient pas tort de faire porter des masques aux leurs.
C’est en appliquant les règles du bon sens à l’examen des travaux de l’esprit que nous acquérons pour nous-mêmes cette haute raison qui est le plus noble apanage de l’humanité. […] Nous pensons donc que le goût peut être défini : le Sentiment d’accord avec la Raison. […] Nous aurons mis d’accord notre sentiment et notre raison ; nous aurons formé notre goût. […] La délicatesse vient du sentiment, la pureté tient à la raison. Il en résulte que, parmi les personnes de goût, les unes penchent pour la délicatesse, les autres pour la pureté, selon que chez elles le sentiment l’emporte sur la raison ou la raison sur le sentiment.
M. de Voltaire avoit donc raison d'être indécis sur le nom qu'on pouvoit donner à la Henriade. […] Sur quelles raisons ses admirateurs s'appuient-ils pour établir sa supériorité ? […] Il a eu sans doute ses raisons pour traiter ainsi l’Histoire. […] Ajoutons à toutes ces raisons, qu’il n’est aucun Auteur plus agréable, plus varié, plus commode. […] Qu'a produit, dans sa raison, cette inquiétude turbulente ?
Dans cet énervement de sa raison historique, il perd jusqu’à la fermeté de la langue de l’histoire. […] Car voilà les trois espèces de raisons invoquées par M. […] pour s’établir sur la conscience le calmant de raisons pareilles ! […] Malheureusement, toutes ces raisons, nous en avons vu la faiblesse. […] Ils ont leurs raisons et ils en ont la logique, mais que des écrivains de religion et de monarchie comme M.
Qu’ont les pédans de gâter la raison…. […] C’est elle qui a donné à l’homme la raison qui lui conseille de tuer les loups. […] Toute morale doit reposer sur la base inébranlable de la raison. C’est la raison qui en est le principe et la source. […] J’y ferai, par cette raison, très-peu de remarques.
De ces deux Études, la meilleure pour moi est celle qui porte le nom de Carlyle, et non seulement pour la raison que j’ai déjà signalée, c’est-à-dire les doubles facultés qui semblent s’exclure d’ordinaire et qui se réunissent dans Carlyle, cet esprit puissant et bizarre, et aussi parce que les préférences philosophiques qui me gâtent M. […] Taine l’entend si bien ainsi qu’il ajoute : « Chacun regarde avec des lunettes de portée et de couleurs diverses… Et l’on s’est disputé et battu, l’un disant que les choses sont vertes, d’autres qu’elles sont jaunes, d’autres enfin qu’elles sont rouges… Mais voici que nous apprenons l’optique morale… que nous découvrons que la couleur n’est pas dans les objets, mais en nous-mêmes. » Et que, par conséquent, tout le monde a raison ou tort ! […] Il a cherché et trouvé presque toujours les raisons déterminantes, intérieures ou extérieures de sa force et de sa faiblesse, et il nous l’a expliqué surtout par le puritanisme anglais dont Carlyle — nous apprend M. […] C’est ainsi qu’il a fait sortir des analyses les plus ingénieuses et les plus subtiles un Carlyle très complet et très contrasté, lequel, malgré tout ce qui aurait dû, dans ce vieux puritain halluciné, répugner à la raison philosophique de M. […] La raison, revenant après la sympathie flexible, a durci M.
La raison, M. […] Lanson, il a raison. […] Pauline est la raison même. […] la raison même ! […] La raison est singulière.
Une équivoque de mots a seule donné quelque apparence de raison à ce paradoxe. […] Le génie grossit le trésor du bon sens ; il conquiert pour la raison. […] L’esprit donc ainsi assimilé, sous tous les rapports, à la raison supérieure, ne peut pas plus nuire qu’elle. […] La poésie est de tous les arts celui qui appartient de plus près à la raison. […] Non, rien ne peut détacher la raison des idées fécondes en résultats heureux.
Ni la souple et ployable raison n’a su trouver une vérité constante, ni l’ondoyant et divers instincts n’a pu établir une forme universelle de vie. […] Il croit à la conscience, et à la raison, tellement qu’il s’en sert pour condamner la nature, ou la rectifier. […] La conscience et la raison sont les pièces principales de cette délicate machine, dont l’éducation monte les ressorts pour la vie. […] En philosophie, en littérature, partout, il pose la souveraineté de la raison, égale en tous les hommes, et qui a charge et pouvoir de reconnaître la vérité. Par sa raison individuelle, à l’aide de son expérience personnelle, confrontant l’Amérique et la Grèce, il trouve le principe fondamental de la littérature classique : il s’assure que les anciens ont parlé selon la vérité, selon la nature, et voilà leur autorité fondée en raison.
C’est une barre de fer ; il n’entend pas raison. […] Accepter était immoral, donner la vraie raison du refus était impossible, en donner une fausse me répugnait. […] que j’en voulais à ma raison de m’avoir ravi mes rêves ! […] Le bonheur n’est pas quelque chose d’assez saint pour qu’il ne faille l’accepter que d’une parfaite raison. […] Je la suis, faute de mieux, cette raison, et je me dépite souvent contre elle.
., pensent et parlent de même, et par les mêmes raisons. […] Plaisante raison ! […] Que penser à plus forte raison de ses vers latins, et surtout de ses vers grecs ? […] Néanmoins cette supériorité n’est pas une raison qui doive nous engager à cultiver cette langue de préférence à la française. […] D’abord on y apprendrait à parler sa propre langue, qu’on sait pour l’ordinaire très mal au sortir du collège ; ensuite on serait obligé dans ces thèses de parler raison ou de se taire.
Mais enfin Joubert a raison. […] En droit ils ont parfaitement raison. […] Et il a raison. […] Convenons qu’il avait quelque raison de l’être. […] Ne la remplaçons pas par la ridicule manie de l’incertitude, mais craignons cette attitude qui rend si vite le critique insupportable et sot : la manie d’avoir raison, la figure stéréotypée et suffisante de l’homme qui a raison, toujours raison, raison quand il se lève, raison quand il se couche, raison à déjeuner, raison aux thés de cinq heures, raison en chemin de fer, raison au journal, raison dans sa chaire… Le critique parle de ce qu’ont écrit les autres.
sont donc dans nous-mêmes ; & en chercher les raisons, c’est chercher les causes des plaisirs de notre ame. […] Par-là on peut expliquer la raison pourquoi nous avons du plaisir lorsque nous voyons un jardin bien régulier, & que nous en avons encore lorsque nous voyons un lieu brut & champêtre : c’est la même cause qui produit ces effets. […] Un pié rangé comme un autre, un membre qui va comme un autre, sont insupportables ; la raison en est que cette symmétrie fait que les attitudes sont presque toûjours les mêmes, comme on le voit dans les figures gothiques qui se ressemblent toutes par là. […] Souvent notre ame se compose elle-même des raisons de plaisir, & elle y réussit sur-tout par les liaisons qu’elle met aux choses ; ainsi une chose qui nous a plu nous plaît encore, par la seule raison qu’elle nous a plu, parce que nous joignons l’ancienne idée à la nouvelle : ainsi une actrice qui nous a plu sur le théatre, nous plaît encore dans la chambre ; sa voix, sa déclamation, le souvenir de l’avoir vûe admirer, que dis-je, l’idée de la princesse jointe à la sienne, tout cela fait une espece de mélange qui forme & produit un plaisir. […] Lorsque nous voyons qu’ils sont sans raison, qu’ils relevent ou éclairent un autre défaut, ils sont les grands instrumens de la laideur, laquelle, lorsqu’elle nous frappe subitement, peut exciter une certaine joie dans notre ame, & nous faire rire.
La foi laisse peu de chose à faire à la raison, ou, pour parler plus juste, la raison n’est qu’un doux acquiescement à la foi. […] Pour ne pas nous fatiguer, il varie sa manière, et il peint plus qu’il ne raisonne, sachant bien qu’il sera plus longtemps maître de l’imagination de son lecteur que de sa raison. […] On résiste aux Maximes et aux Pensées comme à l’autorité d’une raison individuelle, aigrie par des circonstances personnelles à l’auteur ; mais on reçoit volontiers les leçons de la Bruyère, parce que sa raison est libre de ressentiments et de souffrances, et que, comme il le dit si délicatement, il ne fait que rendre au public ce que le public lui a prêté. […] La Bruyère nous fait la leçon d’une main si légère qu’il serait de trop mauvais goût de s’en offenser, outre qu’il excelle à intéresser l’esprit et l’imagination à cet enseignement de la raison. […] Il n’avait pas senti, comme Pascal, le supplice de toutes les imperfections humaines ; elles ont exercé doucement plutôt qu’aigri sa raison.
Mais ceux qui font ce reproche à l’artiste en ignorent certainement la raison. […] Les expressions, les passions, les actions et par conséquent les mouvements sont en raison inverse de l’expérience, et en raison directe de la foiblesse. […] Et ils auront raison tous les deux. […] " le littérateur aura donc raison de dire la pauvre chose ; et l’artiste la belle chose que ce tableau ! Et ils auront donc raison tous les deux.
… Consultez, si vous le voulez, la littérature européenne : tous les historiens, sans exception, de la Révolution française, en ont parlé avec leurs émotions, auxquelles leur raison ajoutait des sophismes et leurs passions des lâchetés. […] Les pédants de l’Histoire les avaient traités d’esprits superficiels, parce qu’ils ne disaient que la sobre vérité, et ces esprits superficiels avaient raison ! […] raison contre la Révolution, mais a-t-il raison pour Louis XVI ? […] Et de même qu’en remplissant ces vases d’airain on diminuait la voix, Cassagnac a pensé qu’en mettant des raisons et des faits dans le creux de la tête des hommes, la gloire qu’ils font diminuerait. […] La vérité n’en doit pas moins être dite, pour des raisons supérieures, soit qu’elle blesse les partis toujours vivants, soit qu’elle contrarie les opinions faites ou même qu’elle paraisse trop piquante pour être admise.
La poésie est contraire à la raison. […] Cependant je suis tenté de lui donner raison, dans le temps et dans les circonstances où il écrit. […] La raison domine dans toute cette production versifiée, et la raison d’un siècle analyseur, abstracteur, argumenteur et critique ; on ne rencontre pas un éclat de passion, pas une impression, pas une image : aucune trace fraîche enfin de la nature ou de la vie. […] Au fond, toute cette poésie est mort-née ; elle ne peut vivre dans l’atmosphère que lui fait la raison philosophique.
On ne prouvera point certainement par la conduite que les grands et les petits tiennent depuis soixante et dix ans dans tous les états de l’Europe, où l’étude de ces sciences qui perfectionnent tant la raison humaine fleurit davantage, que les esprits y aïent plus de droiture qu’ils n’en avoient dans les siecles précedens, et que les hommes y soient plus raisonnables que leurs ancêtres. […] Ils nous auront surpassé, si l’on peut se servir de cette expression, en raison pratique, mais nous les surpassons en raison spéculative. Qu’on juge de la supériorité d’esprit et de raison que nous avons sur les hommes des temps passez, par l’état où sont aujourd’hui les sciences naturelles, et par l’état où elles étoient de leur temps. […] Plusieurs philosophes anciens ont connu cette vérité, mais comme ces philosophes n’avoient pas en main pour la prouver les moïens que nous avons aujourd’hui, il étoit demeuré indécis si Philolaus, Aristarque et d’autres astronomes avoient raison de faire tourner la terre autour du soleil, ou si Ptolomée et ceux qu’il a suivis avoient raison de faire tourner le soleil autour de la terre. […] Pour ne point sortir de notre sujet, les anciens n’ont-ils pas connus aussi-bien que nous que cette superiorité de raison, que nous appellons esprit philosophique, devoit présider à toutes les sciences et à tous les arts ?
« Je ne voulus pas me rendre en ce qui regardait l’envoi de ma personne, et je répondis à ses raisons sur ce point, mais sans aucun succès. Néanmoins je lui promis de transmettre ses raisons au Pape, et de demander l’audience réclamée afin qu’il pût lui-même entretenir le Saint-Père. […] Ils le promirent, et de plus m’affirmèrent qu’ils ne laisseraient pas d’appuyer mes raisons jusqu’au bout, quoiqu’ils ne voulussent pas y persister au moment d’une rupture. […] Mais plusieurs raisons altérèrent ensuite son affection pour moi. […] « Les raisons que j’alléguai furent heureusement goûtées.
La note musicale n’est que le prolongement des vibrations de la voix émue et ne trouve sa raison que dans l’émotion même. […] Place ta confiance en ma seule raison ! […] La raison ne cesse pas d’avoir raison parce qu’elle a attendu l’homme pour prendre conscience d’elle-même. […] La raison Se heurte et se meurtrit aux murs de sa prison. […] Donc, à nous deux, Raison !
Il ne dira rien qu’il ne pense sur les personnes, mais il ne dira pas tout ce qu’il pense ; il exposera les faits, il les expliquera dans leurs raisons principales et générales, il ne les éclairera par aucun jour inattendu. […] Guizot croit avec raison à l’importance des hommes en histoire ; il n’accorde pas tout à la force des choses et à la pente des situations ; un puissant individu de plus ou de moins suffit pour donner aux mêmes éléments une ordonnance et un aspect tout contraires, pour les retourner, pour imprimer aux événements, surtout s’ils ne font que de naître, un tout autre cours. […] » Il avait raison, et il aurait dû insister davantage. […] On ne le lui permet pas, pour toutes sortes de raisons, relativement bonnes peut-être ; il se retire. […] Loin de moi la pensée systématique de dénigrer un état de choses qui avait tant de raisons d’être !
D’inoffensifs savants, Larcher, Foncemagne, Guénée, purent avoir raison sur des points particuliers, sans avoir d’influence sur le mouvement général des esprits. […] Enfin la grande machine qui devait faire triompher la raison, l’Encyclopédie, se construisait. […] Elle fournit d’opinions, de solutions, de plans, d’espérances sur tous les objets de la pensée, sur toutes les parties de la société, les hommes qui adhéraient seulement à ce principe général, que la raison est toute-puissante et doit être souveraine. […] Il prenait cette position, originale en son temps, de respecter le christianisme en n’obéissant qu’à la raison. […] Nous pouvons donc négliger toutes les divergences de doctrine et les incompatibilités d’humeur : ce qui lie le parti, et caractérise le mouvement philosophique, c’est la foi dans la raison.
Jamais elle ne doutera de la raison, ni ne la répudiera, comme Rousseau : et toute sa vie sera un exercice assidu de la raison qui est en elle, virile, ferme, vaste, curieuse, capable de toutes les vérités. […] En littérature, son goût et sa faculté de comprendre se satisfont en raison inverse de la beauté formelle et de l’objectivité, en raison directe de la richesse sentimentale et de la subjectivité. […] Si elle a raison, le suffrage universel aurait détruit le régime parlementaire, et mis en danger la propriété : mais alors cette opinion justifierait les attaques des socialistes contre le « parlementarisme bourgeois ». […] Et la foi, chez elle, donne satisfaction à la raison : Dieu est pour elle la lumière qui éclaire l’univers et la rend intelligible. […] Elle professe encore que « la poésie est de tous les arts celui qui appartient de plus près à la raison ».
Cousin a décrit le dix-septième siècle, à peu près de la même manière, et pour la même raison. […] Qu’est-ce que tout ce changement, sinon la naissance de la raison oratoire ? […] Cousin, si ce n’est dans la possession de cette raison, dans l’art de bien développer, dans la bonne composition, dans la faculté d’expliquer en style élevé et clair les vérités moyennes ? […] La raison oratoire, admirable dans son domaine, cesse de l’être lorsqu’elle en sort. […] Aucune classe aujourd’hui ne regarde l’État comme son domaine propre ; c’est une gloire pour la raison et c’est un progrès de la justice de l’avoir restitué à son légitime propriétaire, à la nation.
Chapitre VII : Théorie de la raison par M. […] Cousin appelle raison la faculté ou pouvoir qu’a l’esprit de produire les axiomes et les idées des objets infinis. […] En résumé, on ne tire pas l’universel du particulier, l’infini du fini, le nécessaire du contingent, par cette raison très-simple qu’on ne tire pas d’une chose ce qu’elle ne contient pas. […] L’angle 1 égale l’angle 5 comme alternes internes ; l’angle 2 égale l’angle 4 pour la même raison ; ajoutons des deux parts une même quantité, l’angle 3 ; la somme des angles 1, 2, 3, égalera la somme des angles 3, 4, 5. […] Cousin explique par la raison.
On pourrait dire que ce qu’il veut c’est la raison naturelle, c’est-à-dire la raison qui raisonne peu, la raison qui ne raffine point, c’est-à-dire le bon sens un peu cultivé. […] Il n’a que trop raison pour son temps. […] La raison en est là. […] De très bonnes raisons le font croire. […] La raison en est peut-être très simple.
J’ai tenté de montrer avec quelle force la raison philosophique, malgré tous les obstacles, après tous les malheurs, a toujours su se frayer une route, et s’est développée successivement dans tous les pays, dès qu’une tolérance quelconque, quelque modifiée qu’elle pût être, a permis à l’homme de penser. […] On peut, dira-t-on, réprimer les excès sans entraver la raison. […] Si la route de la pensée vers le perfectionnement des facultés n’était pas impérieusement tracée, il faudrait donc observer sans cesse l’opinion qui domine chaque jour, se consumer dans le calcul qui peut démontrer l’avantage actuel d’une résolution, se consumer aussi dans le regret, si cette résolution n’a point d’effets immédiatement utiles ; quel travail pourrait-on faire alors sur soi-même qui n’avilit et ne dégradât la raison ? […] Quand le cercle des relations s’agrandit, la moralité devient du talent, puis du génie, puis le sublime du caractère et de la raison. […] Les esprits froids voudraient qu’on ne leur représentât que les aperçus de la raison, sans y joindre ces mouvements, ces regrets, ces égarements de la rêverie qui n’exciteront jamais leur intérêt ; je me résigne à leur critique.
Or, dans la pratique, il faut bien reconnaître que les apologistes chrétiens ont raison de dire que le déisme abstrait n’est pas sensiblement différent de l’athéisme. […] Reviendrons-nous au culte de la raison, à la théophilanthropie, au culte saint-simonien ou positiviste ? […] La religion est un fait humain, un acte primitif de la raison et du cœur, qui naît spontanément et qui s’organise spontanément, tout comme la société, la famille, l’art, le langage. […] Les chrétiens libéraux trouvent beaucoup plus simple, et ils ont raison, de prendre pour point de départ le christianisme lui-même en le dépouillant de tout ce qui lui aliène les esprits indépendants. […] Sur ce terrain élargi, les chrétiens pouvaient donner la main aux philosophes, et ceux-ci de leur côté n’ont pas de raison pour s’y refuser.
Je l’avoue, et ce n’est pas sans raison. […] Je ne prendrai pas la liberté d’entrer en lice avec eux ; je les laisserai paisiblement profaner la rime dans leurs vers, et outrager la raison dans leur prose. J’avoue pourtant qu’ils ont quelque raison d’avoir de l’humeur : ils entendent dire de tous côtés, les vers m’ennuient ; et dès qu’il en paraît de bons, ils voient que tout le monde les lit avidement. […] Vous avez raison ; c’est encore une chose singulière, mais cependant très vraie, que chez toutes les nations il y a eu de bons poètes avant de bons prosateurs, et que ce sont toujours les poètes qui ont formé les langues. J’en trouverais peut-être la raison dans les efforts que les poètes sont obligés de faire.
» Et il avait raison. […] Les philosophes seuls auront le courage de s’enfoncer dans les tautologies et les logomachies de ce Bouddhiste de la logique, qui a créé la science absolue, c’est-à-dire la science qui se connaît par l’idée et dans l’idée, « cette idée qui enveloppe tout l’esprit, qui absorbe l’être et la pensée, l’expérience et la raison, l’histoire et la science, et qui est la raison des choses, leur fin et leur principe ; cette idée qui unit l’âme et le corps, dont l’évolution a trois moments (ce qui est exquis) : être en soi, être contre soi et être pour soi (sans doute le moment le plus agréable !) […] Mais elle méprise Reid et la philosophie du sens commun, avec juste raison, je le crois, et même j’en suis sûr, mais, c’est pour poser la nécessité d’une science supérieure à tout, et voilà qui tente singulièrement l’orgueil des petits Nabuchodonosors de la cuistrerie. […] Tout de même qu’on est parfois métaphysicien malgré soi, en raison d’une conformation spéciale de la tête, et tout en sachant très bien que la métaphysique est l’agitation instinctive et réfléchie de problèmes qui n’ont pas toutes leurs solutions dans ce monde, tout de même il y a des esprits qui, de conformation naturelle, réfléchissent les métaphysiques qu’ils n’ont pas créées, et, pour nous servir d’une expression hégélienne, qui repensent la pensée des autres. […] On souffre de voir un pareil homme suivre Hegel, les pieds dans la trace de ses pieds, et presque servilement, si on pouvait être servile quand on suit ce qu’à tort ou à raison on a pris pour la vérité.
Je n’ai aucune raison pour croire que M. […] Il n’était pas poète, d’abord parce qu’il n’avait pas l’organisme sensible, impérieux et violent des poètes » mais il ne l’était pas non plus pour deux raisons souveraines que je m’en vais vous dire : c’était un protestant et c’était un rationaliste, nonobstant sa très réelle mysticité. […] Quand il assiste, comme il l’affirme, au spectacle du ciel ou de l’enfer, ce sont les raisons théologiques ou philosophiques des choses qu’il perçoit. […] Mais, indépendamment de ses tableaux mesquins de l’autre monde, qui rappellent l’art et la décoration comme les conçoivent les Jésuites, les raisons qui font mouvoir son mysticisme sont, le plus souvent, d’une telle puérilité, qu’on se demande si Dieu accorde de tels dons pour atteindre à de si misérables résultats ! […] Visions chétives, pour des raisons chétives !
Mais, pour cette raison précisément, ce livre a eu tout de suite sa renommée. […] Charrière a prétendu que le Pluchkine de Gogol faisait plus d’effet sur l’imagination que les avares de Balzac, cette légion digne de Rembrandt et de Shakespeare, Gigonnet, Grandet et le terrible Gobseck lui-même ; et la raison qu’il en a donnée est une petite raison de philanthrope politique. La raison, dit-il, c’est qu’un tel homme a des esclaves ; comme si Gobseck, avec les passions qu’il déchaîne en leur montrant son or, n’en avait pas ! […] Ils l’ont appelée « le génie cosmopolite de la Russie », et ils ont raison ! […] C’est un écrivain d’imitation plus ou moins souple, plus ou moins délié, plus ou moins habile, imprégné plus ou moins des influences européennes, mais manquant, pour toutes ces raisons, du caractère de tout ce qui est supérieur en littérature : — la sincérité !
Nature et raison. […] Ainsi les jeunes gens qui suivent la loi naturelle de l’amour ont raison contre les pères et tous ceux qui les entravent : c’est par raison philosophique, et non seulement par tradition comique, que Molière prend vigoureusement leur parti. […] Il est vrai ; mais comme Rabelais et comme Montaigne, Molière ajoute la raison à la nature. La raison, par qui l’homme est homme, fixe à la nature, à l’instinct, leur mesure et leurs bornes. […] Où l’amour existe, la raison existe, et rien n’a droit de résister.
Gratry, à plus forte raison de M. […] Tantôt j’avais trop raison, tantôt je laissais voir ce que je trouvais de faible dans les raisons données comme valables. […] Il me parla avec éloquence de ce qu’a d’antichrétien la confiance en la raison, de l’injure que le rationalisme fait à la foi. […] Il avait raison, pleinement raison, je le reconnais maintenant. […] Il en est de même des raisons des libertins que réfute le marquis, père du comte de Valmont.
Sainte-Beuve trouve cette raison mauvaise. […] Sainte-Beuve aurait mille fois raison de dire que le style des Laplace est le seul qui convienne à ce genre de sujets. […] La raison et le cœur sont divisés. […] Est-ce le sonnet qui a raison, est-ce la triple strophe, mise en balance régulière avec le sonnet ? […] Comment ce brusque changement s’est-il fait, qui réconcilie tout le monde, le Chercheur et la Voix, la raison et le cœur, l’amour et la science ?
« C’eut été un homme très sage, s’il n’eût eu la folie de la raison. » J. […] « Il y a plus : c’est que, faute d’un certain sens spirituel nécessaire pour discerner par nous-mêmes la vérité, nous étions réduits à nous citer les uns les autres, et à citer même des anciens de deux mille ans, nous qui, aidés de leurs lumières et des lumières de soixantes générations, devions avoir incomparablement plus de lumières et de connaissances que ces anciens qui vivaient dans l’enfance de la raison humaine… » Nous touchons ici à une idée essentielle de l’abbé de Saint-Pierre, c’est que le monde intellectuel ne date que d’hier, que les hommes sont dans l’enfance de l’esprit et de la raison, que l’humanité n’a guère que sept ans et demi, l’âge à peine de la raison commençante45. […] Cette similitude du Français et de l’enfant, qui ne se bornait pas à un simple aperçu comme en ont les gens d’esprit, mais qui était l’idée favorite de l’abbé, revient continuellement dans ces notes de Rousseau : « Il était mal reçu des ministres et, sans vouloir s’apercevoir de leur mauvais accueil, il allait toujours à ses fins ; c’est alors surtout qu’il avait besoin de se souvenir qu’il parlait à des enfants très fiers de jouer avec de grandes poupées. » — « En s’adressant aux princes, il ne devait pas ignorer qu’il parlait à des enfants beaucoup plus enfants que les autres, et il ne laissait pas de leur parler raison, comme à des sages. » Rousseau, à qui tant de gens feront la leçon pour sa politique trop logique et ses théories toutes rationnelles, sent très bien le défaut de l’abbé de Saint-Pierre et insiste sur la plus frappante de ses inconséquences : « Les hommes, disait l’abbé, sont comme des enfants ; il faut leur répéter cent fois la même chose pour qu’ils la retiennent. » — « Mais, remarquait Rousseau, un enfant à qui on dit la même chose deux fois, bâille la seconde et n’écoute plus si on ne l’y force. […] L’abbé de Saint-Pierre l’oubliait ; il ne s’était jamais brouillé avec l’agrément et le charme, par la bonne raison qu’il ne les avait jamais connus ; il faut bien lâcher le mot, il était dans une impossibilité malheureuse, — malheureuse pour lui et surtout pour les autres —, de comprendre tout ce qu’enferme de triste et de fâcheux ce mot qui est mortel au public français l’ennui. L’abbé de Saint-Pierre avait bien quelque vague soupçon qu’il pouvait ennuyer parfois, — qu’il avait pu autrefois ennuyer ; mais il ne s’en rendait point parfaitement compte, et il se flattait de s’en être assez bien corrigé « Quand j’arrivai à Paris, disait-il, je disputais avec tout le monde ; enfin, m’étant aperçu que la raison ne ramenait personne, j’ai cessé de disputer ».
Ce qui caractérise les peines de la vanité, c’est qu’on apprend par les autres, bien plus que par son sentiment intime, le degré de chagrin qu’on doit en ressentir : plus on vous croit affligé, plus on se trouve de raisons de l’être. […] Il est d’une naissance obscure ; il le sait, il est certain que personne ne l’ignore ; mais au lieu de dédaigner cet avantage par intérêt et par raison, il n’a qu’un but dans l’existence, c’est de vous parler des grands seigneurs avec lesquels il a passé sa vie ; il les protège, de peur d’en être protégé ; il les appelle par leur nom, tandis que leurs égaux y joignent leurs titres, et se fait reconnaître subalterne par l’inquiétude même de le paraître. […] La figure d’une femme, quelle que soit la force ou l’étendue de son esprit, quelle que soit l’importance des objets dont elle s’occupe, est toujours un obstacle ou une raison dans l’histoire de sa vie ; les hommes l’ont voulu ainsi. […] La raison de ce jugement inique ou juste, c’est que les hommes ne voient aucun genre d’utilité générale à encourager les succès des femmes dans cette carrière, et que tout éloge qui n’est pas fondé sur la base de l’utilité, n’est ni profond, ni durable, ni universel. […] Je n’appellerai point vanité le mouvement qui a porté vingt-quatre millions d’hommes à ne pas vouloir des privilèges de deux cent mille, c’est la raison qui s’est soulevée, c’est la nature qui a repris son niveau.
Je l’entends, cette voix forte & puissante, qui, comme un tonnerre qui roule dans la nue réveille les esprits les plus engourdis ; non ce n’est plus un homme, c’est un Dieu tutelaire qui s’est chargé des intérêts de la patrie, & qui défend la cause honorable de l’humanité ; d’une main il foudroye le vice, de l’autre il dresse des Autels à la vertu, déploye toute l’indignation d’une ame sensible contre d’injustes Tyrans, il rejette le cri insensé de l’opinion pour faire parler la voix immortelle de la raison. […] Les plaisirs vous invitent, la volupté devient plus séduisante lorsque vous vous refusez à ses attraits, il faut, nouveaux Ulisses fermer l’oreille au chant des trompeuses Sirennes, vous couvrir de votre solitude comme d’un Egide impénétrable, fuir le monde pour lui devenir utile, embrasser la retraite autant par goût que par raison ; c’est là que votre ame ne se renferme pas dans le cercle étroit du présent qui s’échappe, mais s’élance dans ces espaces immenses qui la rapprochent des Ecrivains de tous les tems. […] La plupart des hommes ne pensent que d’après l’habit qu’il portent ; leur profession crée leurs idées ; celui qui a rompu les liens nuisibles au progrès de la raison paroît seul posséder un jugement libre que rien ne tyrannise : Accoutumé à renfermer ses desirs dans le cercle de ses besoins réels il n’en aura point d’illimités. Il sent que les dons de la Nature les seuls biens véritables sont la santé, la joie, la tendresse, la tranquillité de l’ame, & il soutiendra sans douleur toute autre privation, parce que sa raison aura reglé cette intempérance d’imagination qui fait l’inquiétude des autres hommes. […] Pourquoi ne pas donner une égale éducation à des esprits également doués de raison ?
Si le cerveau est l’organe de la pensée et des fonctions intellectuelles, il semble naturel que l’on puisse mesurer l’intelligence des différentes espèces animales en comparant leur cerveau, et les faits donnent jusqu’à un certain point raison à cette conjecture. […] Un naturaliste distingué, Desmoulins, a essayé d’établir cette loi : que l’étendue et la force de l’intelligence sont en raison du nombre des circonvolutions ; quelques uns ajoutent : et de la profondeur des anfractuosités. […] Flourens paraît donner raison à cette opinion. […] C’est ce qu’il a fait lui-même dans un savant mémoire17 où il établit, contre l’opinion reçue, que le degré du développement de l’intelligence, loin d’être en raison directe de l’étendue relative de la surface du cerveau, semble bien plutôt en raison inverse18. […] L’autre condition, à laquelle on attache avec raison une grande importance, c’est le développement du cerveau d’avant en arrière.
La raison en est claire. […] Le gamin a-t-il raison ? […] Et je ne songe pas ici à des raisons littéraires, mais à des raisons morales. […] La raison en est simple. […] Massis a eu raison de s’y essayer.
Cette espece d’exagération demande une grande justesse de raison & de goût. […] Est-ce à la froide raison à guider l’imagination dans son ivresse ? […] Quel est de ces deux sentimens le mieux fondé en raisons & en exemples ? […] La même raison doit en exclure les excès des passions. […] La raison en est bien sensible.
Le poète continue à développer ces grandes vues de la nature humaine, cette sublime raison du christianisme. […] Cette belle créature, qui se croit invincible, en raison même de sa faiblesse, ne sait pas qu’un seul mot peut la subjuguer. […] Tertullien, cherchant pourquoi l’univers n’est point dérangé par les crimes des hommes, en apporte une raison sublime : cette raison, c’est la patience de Dieu. […] On admire avec raison dans l’Iliade les Prières boiteuses, qui suivent l’Injure pour réparer les maux qu’elle a faits.
La critique kantienne devint alors nécessaire pour rendre raison de cet ordre mathématique et pour restituer à notre physique un fondement solide, — à quoi elle ne réussit d’ailleurs qu’en limitant la portée de nos sens et de notre entendement. […] Quand la philosophie prétend appuyer cette thèse paralléliste sur les données de la science, elle commet un véritable cercle vicieux : car, si la science interprète la solidarité, qui est un fait, dans le sens du parallélisme, qui est une hypothèse (et une hypothèse assez peu intelligible 1, c’est, consciemment ou inconsciemment, pour des raisons d’ordre philosophique. […] Mais peu importe la raison : personne ne contestera, je crois, que dans l’ensemble de faits capables de jeter quelque lumière sur la relation psychophysiologique, ceux qui concernent la mémoire, soit à l’état normal, soit à l’état pathologique, occupent une place privilégiée. […] La conception de l’aphasie qui était alors classique, universellement admise et tenue pour intangible, est fort battue en brèche depuis quelques années, surtout pour des raisons d’ordre anatomique, mais en partie aussi pour des raisons psychologiques du même genre que celles que nous exposions dès cette époque 2.
Que la raison, fuyant aux accords de ma lyre, De mes sens emportés respecte le délire. […] De ces arrêts en vain notre raison murmure ; Nous sommes les ultras de la littérature ; Et, comme en tous pays les ultras sont des fous, Dans Paris, sans façon, l’on se moque de nous. […] C’est le goût de mon siècle, et qui paie a raison. […] Le vieux goût les infecte ; ils ont trop de raison, Je ne veux imiter que le sombre Milton, Milton seul est poëte ; un Journal le déclare : C’est en vain que Dryden l’a traité de barbare. […] Avec trop de raison leur histoire est écrite ; Ils suivent de trop près Tite-Live et Tacite.
Voilà, si je ne me trompe, la raison pour laquelle l’estime et l’accueil des grands sont si recherchés de la plupart des gens de lettres. […] On a beaucoup écrit et avec raison contre les ingrats, mais on a laissé les bienfaiteurs en repos, et c’est un chapitre qui manque à l’histoire des tyrans5. […] Mais si un homme de lettres ambitionne la fortune, dit avec raison un de nos plus illustres écrivains, il doit la faire soi-même. […] Tu as raison, leur eût répondu Diogène, mais je voudrais te voir seulement un jour à ma place. […] La Prusse par une raison contraire sera redevable à Frédéric des progrès qu’elle va faire dans les sciences et dans les arts.
Ajouterai-je une autre et fort bonne raison ? […] Et la raison n’en est-elle pas bien simple ? […] Et il aura raison d’en faire la remarque. […] » Piron, Messieurs, avait raison. […] Mais ce ne sont là que de petites raisons !
Tel n’est pas, évidemment, le cas des questions métaphysiques, ou du moins on ne connaît encore ni de calcul qui démontre « l’objectivité du monde extérieur », ni de balance où se contrepèsent « les antinomies de la raison pure ». […] À cet égard, et pour cette seule raison, dès que la science est conçue comme un système de rapports, la science, d’âge en âge, est donc perpétuellement, et en un certain sens, tout entière à refaire. Mais elle l’est encore, et surtout, pour cette autre raison, qu’aucune découverte ne saurait s’accomplir en un point du système qui n’ait sa répercussion sur le système tout entier. […] Mais, de ces trois solutions, quelle que soit celle que l’on adopte, et pour quelques raisons que ce soit, le monde extérieur n’en continue pas moins d’être tout ce qu’il est pour nous. […] Ne craignons pas d’en dire l’une au moins des raisons.
On préférera toujours une raison sage & circonspecte, à cette folle raison qui s’égare en courant après la nouveauté, laquelle ne sauroit être qu’un travers, depuis que les notions du goût & de la langue sont fixées. […] La sagesse de la conduite dépend presque entiérement de la connoissance de soi-même : il indique les moyens de parvenir à cette connoissance, d’en tirer des fruits, & de soustraire son ame à la tyrannie des passions ; il met sous les yeux de la raison, les principes qui les éveillent, les alimens qui les fortifient, & les contre-poids qui peuvent les arrêter.
Il était la revanche de la raison. […] — Pourtant, vous le savez, vous qui regrettez de n’être pas avec eux, les jeunes gens ont toujours raison ; même dans leurs erreurs, la vérité germe. […] Cette époque fut, chez nous, celle de la floraison de la raison pure et il est assez facile de la reconnaître sous sa livrée chrétienne, cette raison qui ne s’était pas abdiquée, bien qu’elle prît gloire à servir la messe. Ce fut l’apothèse longuement préparée par les dialecticiens scolastiques du moyen âge : les temps do la naïveté avaient été, ceux de la connaissance venaient, et les temps do la connaissance exaltaient les rigides lois d’une logique qui s’empruntait d’Aristote, à travers saint Thomas, pensant établir par les forces mêmes de la raison seulement humaine la vérité de la Révélation. […] S’ils cherchent par-delà tout Évangile précis à cette heure où tous lès Évangiles tombent en ruines une religion qui satisfasse à la fois leur cœur et leur raison dans le fonds commun de toutes les religions et de toutes les métaphysiques, dans le frisson de mystère dont certaines questions ont toujours fait frémir toute l’humanité, dans les hiéroglyphes de l’ancienne Egypte, dans les grimoires de Paracelse et dans les méditations de Spinoza ne les condamnez pas si vite : êtes-vous bien sûr qu’ils aient tort ?
Ils regardent la sensibilité comme une forme inférieure de l’intelligence : comme une raison confuse et enveloppée (Leibnitz, Herbert). […] Ainsi s’affirmerait la primauté de la raison sur le sentiment. […] Draghicesco, la Raison n’est autre chose qu’un système de catégories imposées a priori à l’individu par la conscience sociale. Dès lors, affirmer la primauté de la raison sur la sensibilité, c’est affirmer du même coup la primauté et la prépondérance de l’esprit social sur l’âme individuelle. […] Mais cette désharmonie ne tient pas uniquement à des raisons sociales.
Qu’on écrive l’histoire sans être un homme de génie, qu’on étudie les faits, et qu’on prouve qu’on les a étudiés en les discutant et en les racontant texte en main, cela est courageux et modeste, et cela donne le droit, quand on en a la puissance, de s’élever de ces faits jusqu’à ces généralités qui sont comme la raison des choses et l’essence même de l’histoire. […] Quand la Démocratie parut, on se rappelle avec quelle insistance on se demanda de toutes parts si l’auteur était pour ou contre la démocratie, pour ou contre le système américain, car il y avait dans son livre assez pour l’une ou pour l’autre de ces deux thèses, et ce fut, sans doute, la raison de l’immense succès d’un ouvrage qu’on ne craignit pas de comparer à l’Esprit des Lois ! […] Chacun, dans le livre en question, trouva des raisons et des faits en faveur de ses préférences, et personne n’y fut choqué d’une condamnation qui n’y était pas. […] Pas une seule fois dans ce volume, maigre de raisons et enflé, ou plutôt soufflé de phrases, l’auteur de l’ancien Régime et la Révolution n’a su porter un ferme regard plus haut que le plain-pied des questions dernières. […] Mais, continue-t-il : « Après qu’ils eurent tout renversé, nous eûmes des révolutionnaires qui portèrent l’audace jusqu’à la folie, qu’aucun scrupule ne put retenir, etc., etc. » Et il n’applaudit plus, avec les mêmes raisons d’admirer pourtant !
Mais, pour cette raison précisément, ce livre a eu tout de suite sa renommée. […] Charrière a prétendu que le Pluchkine de Gogol faisait plus d’effet sur l’imagination que les avares de Balzac, cette légion digne de Rembrandt et de Shakespeare : Gigonnet, Grandet, et le terrible Gobseck lui-même ; et la raison qu’il en a donnée est une petite raison de philanthrope politique : « La raison, — dit-il, — c’est qu’un tel homme a des esclaves » ; comme si Gobseck, avec les passions qu’il déchaîne en leur montrant son or, n’en avait pas ! […] Ils l’ont appelée : « le génie cosmopolite de la Russie », et ils ont raison… Rien n’est plus cosmopolite que l’imitation ! […] C’est un écrivain d’imitation plus ou moins souple, plus ou moins délié, plus ou moins habile, imprégné plus ou moins des influences européennes, mais manquant, pour toutes ces raisons, du caractère de tout ce qui est supérieur en littérature : — la sincérité.
Et on a raison. […] Voilà une étrange raison. […] Il faut alors chercher d’autres raisons de cette hostilité persistante, et des raisons qui soient dignes également de Corneille et de Racine. […] L’une et l’autre raison, sans doute, peuvent avoir leur valeur, mais ce sont de bien petites raisons. […] J’avais donné mes raisons, M.
C’est sa raison d’être. […] Et comme elle a bien raison ! […] Et il a raison. […] Sans aller plus loin, sa raison d’être est raison de sa ruine. […] Ce n’est pas sans raison.
Mais d’en douter, j’ai une raison encore, une raison décisive, ce me semble, parce que c’est une raison de fait. […] Voltaire a donc raison au point de vue de la construction de la pièce ; comme aussi bien il a presque toujours raison à cet égard. […] Il est la raison même, et je n’aurai rien à y ajouter. […] Lion avait raison tout de même. […] en veux-tu savoir la raison. — Oui, pourquoi ?
La Raison, c’est-à-dire, cette saine Raison, si rare dans les Ouvrages de ce Siecle, y marche d’un pas ferme, le flambeau à la main, & découvre, sur sa route, des vérités profondes, enchaînées les unes aux autres, formant un Tout aussi instructif, que pensé avec justesse, & sagement digéré. Un célebre Critique a eu raison de dire de cet Ouvrage, « qu’il étoit la Production d’un excellent Citoyen, qui n’écrit que pour se rendre utile, qui voit tous nos travers & tous nos vices, non pour en plaisanter avec légéreté, mais pour nous en corriger ; qui gémit sur cet abîme-de corruption où nous sommes plongés, & qui voudroit nous en faire sortir ; qui nous offre la perspective la plus effrayante des maux que nous preparent des révolutions qu’amenera cette mollesse hébetée, qui tient nos sens engourdis : car le voile est aisé à lever ; ce tableau de la Grece est un miroir où la France doit se voir elle-même.
La raison, la froide raison ; voilà tout ce qu’elle fait estimer, & tout ce qu’elle exige. Mais cette raison, qu’a-t-elle produit ?
Le Moraliste, armé du flambeau d’une raison saine & religieuse, ne s’y écarte jamais de la vérité, & la fait toujours sentir. […] Les Esprits géométriques, comme le sien, sont naturellement portés au raisonnement ; mais le raisonnement n’est qu’une partie de cette raison persuasive qui doit établir, insinuer, & faire goûter les leçons qu’on veut inculquer. […] Ces Productions polémiques, fruit de l’esprit de parti qui égare le jugement & aigrit le style, tendent naturellement à l’oubli ; à plus forte raison, quand elles ne consistent que dans des discussions dépourvues de justice, d’exactitude & d’éloquence.
Lamartine eut raison. […] La belle raison ! […] Et il a raison encore. […] Quinet a bien raison. […] Ils ont bien raison.
Si l’on est occupé à contester la ressemblance historique, on ne regardera pas la vérité humaine du rôle. — Pour la même raison, le poète tiendra compte des différences que les climats, les époques, la civilisation mettent entre les peuples. […] Que de raisons, tirées souvent de bien loin, et bien injurieuses aussi au caractère de Despréaux, n’a-t-on pas invoquées pour rendre compte du silence qu’il a gardé sur son ami ! […] Au contraire, qu’est-ce que le vers dans une Fable, ou dans un poème didactique, genre dont Boileau n’a pas parlé non plus, malgré les raisons personnelles qu’il eût pu avoir de le faire ? […] Et de même Perrault a tort de ne pas comprendre que Pindare « sort de la raison afin de mieux entrer dans la raison même ». Si la raison, c’est la conformité à la nature, Pindare, par l’excès de ses figures, par le décousu de son style, semble sortir de la nature, mais c’est pour se conformer à la nature de l’ode.
Voilà la première raison pour laquelle La Fontaine, je crois, s’est emparé de ce genre. […] Voilà les raisons qui, je crois, répondent à cette petite impertinence amusante de M. […] Pour les raisons, sans doute, car je ne réponds de rien, que je viens de vous donner. […] Ici la vieille critique avait parfaitement raison ; ici La Fontaine n’est qu’un satirique des hommes présentés sous le masque des animaux. […] Il l’a prise ainsi parce qu’il est poète, mais aussi pour une autre raison.
Quelque chose qui paraît, à tort ou à raison, déborder de toutes parts le corps qui y est joint, le dépasser dans l’espace aussi bien que dans le temps. […] Il hésite à entrer en contact avec les faits, quels qu’ils soient, à plus forte raison avec des faits tels que les maladies mentales : il craindrait de se salir les mains. […] Je vous dirai donc qu’un examen attentif de la vie de l’esprit et de son accompagnement physiologique m’amène à croire que le sens commun a raison, et qu’il y a infiniment plus, dans une conscience humaine, que dans le cerveau correspondant. […] Il m’est impossible d’énumérer ici les faits et les raisons sur lesquels cette conception se fonde. […] Voilà qui paraîtra, au premier abord, donner raison à l’hypothèse d’une accumulation des souvenirs dans la substance cérébrale.
La critique est nécessaire ; et, tout compte fait, elle a plus souvent raison que tort. […] C’est une raison pour le regarder de plus près. […] Rousseau a raison de dispenser de la politesse un enfant qu’il a dispensé de l’obéissance. […] Il vit aussi par toutes les choses où il a eu raison contre ses contemporains. […] Jamais plus magnifique hommage ne fut rendu par la raison humaine à son divin créateur.
Là où le vulgaire voit fantaisie et miracle, le physicien et le philosophe voient des lois et de la raison. […] Tout est l’œuvre de la raison spontanée et de cette activité intime et cachée qui, nous dérobant le moteur, ne nous laisse voir que les effets. […] Il semble que les facultés créatrices des religions aient été chez les peuples en raison inverse des facultés philosophiques. […] Si on se plaçait au vrai jour, on en verrait la raison. […] Boileau a raison : donner l’air de la fable à de saintes vérités, c’est un péché.
Au fond, en effet, Rabelais ne philosophe que pour légitimer la souveraine exigence de son tempérament : cet optimisme rationaliste, naturaliste, ou de quelque nom qu’on veuille appeler cette assez superficielle doctrine, lui sert surtout à fonder en raison son amour immense et irrésistible de la vie. […] Il n’y a vraiment pour lui que deux modes d’existence : par la chair, et par l’esprit : d’un côté, la nutrition, et les séries multiples de phénomènes antécédents ou consécutifs ; de l’autre, la pensée, et la poursuite du vrai par la raison, du bien par la volonté. […] On voit que l’ordure de Rabelais est tout juste l’opposé de la gravelure du xviiie siècle, qui a sa raison au contraire dans la notion d’une indécence positive des choses désignées. […] Eminemment raisonnable, il compte que l’homme naturellement se conduira selon la raison, que la raison lui apprendra à être bon, à préférer les plaisirs nobles aux basses jouissances, à faire servir la science à l’action, et l’action au bien général. […] Pour toutes ces raisons, il ne sera pas descriptif, il ne cueillera point dans la nature des impressions, il ne se fera point avec les choses des états d’âme.
Comment veut-on que Voltaire, toutes raisons à part d’animosité et d’amour-propre, trouve bonne la Nouvelle Héloïse et bon l’Émile ? […] Son patron le surprit lisant : « Vous lisez, jeune homme ; vous ne serez jamais libraire. » Il avait raison : l’homme qui lit n’a pas de passions ; c’en est la marque ; et il n’aura pas même la passion de son métier, son métier fût-il de vendre des livres. […] Le type, pour Nietzsche, en est Euripide, non sans raison, ou Lessing, et il dit sur eux avec une singulière pénétration : « Euripide se sentait, certes, en tant que poète supérieur à la foule mais non pas à deux de ses spectateurs… . […] On n’a pas raison de lui si facilement. […] Or Martin a-t-il bien raison quand il dit : « le plaisir de s’empêcher d’avoir du plaisir » ?
Mais des convictions renversées par la raison ne peuvent se relever que par elle, et ces lueurs s’éteignaient bientôt. […] Il lui semble, non sans raison, que la vie est un mal, et s’il ne tombe pas dans la misanthropie méchante de Swift, il n’a de refuge que la gaieté douloureuse de Candide, ou la quiétude mathématique de Spinoza : refuge inutile, qui laisse la blessure aussi cuisante. […] On prend courage, et on estime la raison humaine, quand on la voit si assidûment victorieuse, si assurée dans sa démarche, capable de surmonter tant de si grands obstacles, pourvue de tant de finesse, de rectitude, de solidité et d’attention. […] Quant aux excursions allemandes, aux importations de Schelling, à la fabrication de l’absolu, de l’ontologie et de la raison impersonnelle, il ne s’y fiait guère. […] Il avait beau retenir son cœur, il y était mené de force ; s’il empruntait à sa méthode et à ses preuves des raisons de croire, sa croyance venait de ses souvenirs et de ses aspirations.
Il a raison. […] Ce n’est pas bête ; il a raison. […] Un peu, sans doute ; mais voyez qu’il donne ses raisons qui sont bonnes. […] Il avait parfaitement raison. […] Tout cela est de fort bon sens et de très haute raison.
… Mais, à propos, vous avez raison, cela est absurde ! […] C’est la foule, ici, qui a raison. […] Nous nous donnons des raisons pour excuser son père. […] » ; le père dit : « Elle m’aime aussi. » Ils ont raison tous les deux ; mais c’est celui qui est aimé d’amour qui a raison davantage. […] Je ne discute pas s’il a raison ou s’il a tort.
La raison de ce fait est dans l’importance même de la France et dans la noblesse de son passé. […] Pendant près de vingt ans, les fauteurs du 10 décembre purent croire qu’ils avaient eu raison. […] La raison en est simple. […] À plus forte raison ces objections s’appliquent-elles si le suffrage est universel. […] De la masse ne peut émerger assez de raison pour gouverner et reformer un peuple.
La plûpart jugent mal des ouvrages pris en general, par trois raisons. […] Voici mes raisons. […] Cependant Monsieur Despreaux avoüoit que très-souvent il étoit arrivé que les jugemens qu’ils portoient après une discussion methodique son ami et lui, sur les divers succès que devoient avoir differentes scénes des tragédies de cet ami, avoient été démentis par l’évenement, et qu’ils avoient même reconnu toujours après l’expérience, que le public avoit eu raison de juger autrement qu’eux. […] L’on a souvent eu raison de reprocher aux illustres dont je parle, le trait d’amour propre dont Auguste fut accusé ; c’est de s’être choisi dans la personne de Tibere le successeur qu’il croïoit le plus propre à le faire regretter.
Est-ce d’ailleurs une raison de le négliger ? […] Guerrier a raison de le dire. […] Il refuse, et produit des raisons, des raisons de peu de valeur, et auxquelles pourtant on se rend. […] partout votre raison demeure arrêtée ? […] Voilà, monsieur, mes raisons.
METTRIE, [Julien-Offroi la] Médecin, de l’Académie de Berlin, né à Saint-Malo en 1709, mort à Berlin en 1751 ; Auteur éclairé de plusieurs bons Ouvrages sur la Médecine & contre les Médecins, & Auteur frénétique de plusieurs Livres de Philosophie, qui font également tort aux Lettres & à la Raison. […] Si la Mettrie a donné, dans quelques-uns de ses Ouvrages, l’exemple monstrueux des derniers excès d’une absurde Philosophie, la Raison est venue du moins éclairer ses derniers momens. Le premier hommage de cette Raison désabusée, a été un retour sincere vers la Religion, & le désaveu public de toutes ses erreurs.
Ils aiment mieux plaire quelques instans, se faire applaudir aux dépens du goût & de la raison, que de s'assujettir aux regles qu'exige la véritable Comédie. […] La principale raison de ce désordre, qui augmente chaque jour, est qu'il sera toujours plus facile de composer cinq ou six Comédies dans le genre de la Matinée à la mode, que d'en faire une dans celui du Joueur ou du Glorieux, ou de la Métromanie, qui exigeroit plus de temps elle seule, qu'il n'en faut pour en composer douze de l'autre espece. […] Ce n'est pas au caprice du Public à diriger la maniere des Auteurs : c'est aux bons Auteurs à fixer le caprice du Public, en lui présentant des Ouvrages d'accord avec le goût & la raison.
C’est la littérature de la raison, du sentiment, de l’émotion par l’art, de la vérité, de la vertu, la littérature de l’âme. […] Il ne voyait, avec raison, dans les partis opposés que des queues de factions, d’intrigues et d’ambitions sans tête, propres à perpétuer les désastres de la France, mais nullement à y constituer la liberté pratique et morale. […] Du reste, il ne fallait lui demander aucune raison d’aimer ou de haïr ce qu’il exaltait ou ce qu’il brisait avec la même verve d’esprit. Heine n’avait pour raison que son caprice. […] Lisons les vers et respectons les secrets de l’âme. » Nous ne déchirerons pas le voile, et cela avec d’autant plus de raison, que nous n’avons recueilli, comme M.
Dessein philosophique : élimination de la Providence ; guerre à la religion : progrès de la raison, et enthousiasme de la civilisation. […] Les sciences ne l’avaient guère préoccupé jusqu’ici : il y reconnut l’œuvre essentielle de la raison et son arme efficace. […] Aussi le premier dessein philosophique de Voltaire sera-t-il de prendre Pascal corps à corps, et de ruiner le raisonnement janséniste par la raison laïque. […] Faire du christianisme l’obstacle au progrès de la raison, au bonheur de l’humanité, c’était une idée qui devait plaire à Frédéric autant qu’à Mme du Châtelet. […] Culte de la raison, haine de la religion, voilà le sens essentiel du Siècle de Louis XIV.
Qui n’a senti, à certains moments de calme, que les doutes qu’on élève sur la moralité humaine ne sont que façons de s’agacer soi-même, de chercher au-delà de la raison ce qui est en deçà et de se placer dans une fausse hypo-thèse, pour le plaisir de se torturer ? […] Le critique est celui qui prend toutes les affirmations et aperçoit la raison de toute chose. […] Or, pour agir avec vigueur, il faut être un peu brutal, croire qu’on a absolument raison et que ceux qu’on a en tête sont des aveugles ou des méchants. […] Mais ce qu’il y a de certain, c’est que si le genre humain était sérieux comme il devrait l’être, la raison éclairée et compétente en chaque ordre de choses gouvernerait le monde. Or, la raison éclairée et spécialement compétente, qu’est-ce autre chose que la science ?
Mais avaient-ils raison ? […] Et prenez garde que ce n’est plus l’abbé Prévost, un peu suspect de laisser-aller et de facilité sur le chapitre des mœurs et manières, qui parle en ce moment ; il ne fait qu’emprunter les raisons du sage et poli Addison. […] Ce qui manquait à La Motte pour s’élever jusque-là, manquait à plus forte raison à l’abbé de Pons lui-même ; mais l’abbé avait aussi en lui beaucoup des qualités et des distinctions de La Motte. […] Comme ceux qui sentent en eux un aiguillon secret de douleur et qui ont la vie rapide, l’abbé de Pons se prenait plus activement qu’un autre aux choses du jour, à la circonstance qui passe, et s’y jetait avec une vivacité et un feu qui faisaient de lui un excellent journaliste : ce n’est pas une raison pour nous de le mépriser. […] Mais comme de belles paroles d’un ancien viennent éclairer à propos les bonnes raisons d’un moderne !
Les raisons ingénieuses qu’il donne à l’appui de sa doctrine rigide, appartiennent à la morale autant qu’à l’économie. […] Jefferson, d’ailleurs, qui voyait toujours en perspective, pour un avenir plus ou moins éloigné, la séparation presque inévitable de certains États de l’Union, avait certes raison de ne pas vouloir compliquer leur charge commune, solidaire, croissante, ce qui arrive en matière de finances particulièrement. […] « Vous aviez raison alors, mon vieil ami ; vous avez raison encore. » Ces volumes de Jefferson abondent en remarques et conseils de détails qui sont faits pour régler les habitudes politiques. […] Les conseils que Jefferson adressa en toute occasion aux jeunes gens qui le consultaient sur leurs études et sur leur vie, respirent l’indulgence, le respect d’autrui, la saine pratique, « Il préférait, comme Condorcet l’a dit encore de Franklin, il préférait le bien qu’on obtient de la raison à celui qu’on attend de l’enthousiasme, parce qu’il se fait mieux, arrive plus sûrement et dure plus longtemps. » Jefferson ne proscrivait pas néanmoins les élans de l’âme ; il voulait que l’homme embrassât les délices des affections, même au risque des douleurs.
C’est même par cette raison qu’Aristote dit dans le chapitre quatriéme de sa poëtique, que les metres sont les portions du rithme ; c’est-à-dire, que la mesure resultante de la figure des vers, doit dans la recitation regler le mouvement. […] Aristote a donc raison de dire que la beauté du rithme ne venoit pas de la même cause qui produisoit les beautez d’harmonie et les beautez de melopée. […] Ainsi notre auteur a raison de dire que l’harmonie une des beautez de son langage preparé pour plaire, ne couloit point des mêmes sources que la beauté resultante de la diction. […] Ainsi c’est avec raison qu’Aristote dit que ces beautez naissoient séparément, et s’il est permis de s’expliquer ainsi, que leurs berceaux étoient differents. […] Nous avons même observé que c’étoit par cette raison là que Porphyre ne faisoit qu’un art de la composition des vers et de la composition de la melodie, lequel il appelloit l’art poëtique pris dans toute son étenduë, parce qu’il avoit eu égard à l’usage des grecs, au lieu qu’Aristides Quintilianus qui avoit eu égard à l’usage des romains comptoit dans son énumeration des arts musicaux, l’art de composer les vers et l’art de composer la melodie pour deux arts distincts.
Nous le disons même à sa louange, il y a, dans l’introduction qui précède le volume de sa traduction, les gênes d’un esprit honnête qui comprend au fond ce qu’il fait et qui s’inquiète avec raison de la transparence d’un procédé sur lequel il est impossible de s’aveugler : « Si le Journal d’un chasseur — dit M. […] Charrière accorde avec raison à notre écrivain russe pouvait jamais s’effacer, comme si les humouristes n’étaient pas tous, de constitution physiologique ou cérébrale, essentiellement personnels, et si enfin, dans ce livre, Tourgueneff ne se mouvait pas toujours sur le premier plan, dans sa piquante et fringante personnalité ! […] Mais telle est la raison, sans doute, qui a décidé M. […] Si, pour une raison ou pour une autre, involontairement ou à dessein, il se trompe sur la portée du livre qu’il offre au public, il n’en a pas moins, dès qu’il le traduit, le sentiment profond et juste. […] Lui qui devrait plus que personne apprécier les qualités de l’artiste russe qu’il a si habilement reproduites, il ne voit pas que le livre de Tourgueneff ne saurait avoir, quoi qu’on fasse, le genre de succès de l’Oncle Tom, et justement en raison même de son incontestable supériorité.
J’y vois, pour mon compte, les titres du monde moderne, les privilèges particuliers de l’esprit français, et les droits mêmes de la raison. […] Il en donne pour raison les sacrifices de pensée qu’on fait à la richesse de la rime, quoique le contraire éclate à toutes les pages de tous les grands poètes contemporains. […] Il veut bien remarquer que « de la difficulté vaincue naît un plaisir très sensible pour le lecteur. » La raison est bonne ; mais il y en a une meilleure. […] Après avoir donné toutes les bonnes raisons, il en vient aux raisons menues ou douteuses, aux subtilités du sujet. […] Il ne sait pas composer, faire un plan, tracer un chemin, mener l’auditeur au but par des raisons qui se fortifient en s’enchaînant.
De plus, ajoute Spencer, la force de la passion affecte les muscles en raison inverse de leur grosseur et du poids des parties auxquelles ils sont attachés. […] Chez l’homme, les muscles de la face sont relativement petits et très mobiles : c’est pour cette raison que la figure est le meilleur indice du degré d’intensité dans le sentiment. […] On dit avec raison qu’il y a des couleurs criardes ; on dit aussi qu’il y a des couleurs froides et des couleurs chaudes. […] Auguste Comte a eu raison de dire qu’on se fatigue de penser ou d’agir, jamais d’aimer. […] Et c’est l’art qui a raison.
Chacun donna des raisons, ou plutôt des vraisemblances. […] s’écria un homme plein de raison, eh ! […] Alors on est à portée de s’expliquer, & de faire valoir ses raisons. […] Et parce qu’on devient journaliste, en a-t-on plus de goût & plus de raison ? […] Le monde est ainsi monté, voici la meilleure raison.
Et à cette rectitude d’esprit et de raison il joignait ce que les judicieux n’ont pas toujours (car trop souvent ils sont timorés), un courage, une décision, une hardiesse d’initiative qui en fit plus tard un véritable homme d’État, un conseiller dans la tempête. […] On devine en un mot dans ce portrait du jeune avocat un homme qui est né pour persuader par la parole, pour insinuer les raisons, les déduire, les étendre, les faire prévaloir avec un mélange de force, d’adresse et de politesse, encore plus que pour pérorer et plaider. Dès son entrée au barreau, il fut reconnu de tous, dit Saumaise, « facile aux affaires, subtil aux conseils, fertile aux raisons, haut à parler et profond à écrire ». […] Jeannin, comme député de la Bourgogne qui avait titre de premier duché-pairie de France, dut opiner le premier33 ; il appuya le parti de la modération et de la paix, de toutes les raisons qui lui semblaient considérables, et il décida la pluralité des voix (sept contre cinq) dans le même sens. […] Il raconte qu’un jour où le duc de Mayenne lui prêta l’oreille, il lui déduisit durant quatre heures entières ses raisons, lui répondant sur tous les points et multipliant les considérations de tout genre, si bien qu’il le fit changer d’avis.
Pour dire que les pantomimes joüoient une piece, on disoit fabulam saltabant, mais nous en avons déja exposé les raisons. […] Je fonde cette conjecture sur deux raisons. […] La seconde raison, c’est que vraisemblablement la chose a dû arriver ainsi. […] Un romain qui veut parler en secret à son ami d’une affaire importante, ne se contente pas de ne se point mettre à portée d’être entendu ; il a encore la précaution de ne se point mettre à portée d’être vû, craignant avec raison que ses gestes et que les mouvemens de son visage ne fissent deviner ce qu’il va dire. […] La seconde raison c’est que Tacite en parlant du retour des histrions dont il avoit raconté l’expulsion, les appelle pantomimes.
A raison de. […] On n’en met point sur la, article ; la raison. […] ce qui est également contraire à l’expérience & à la raison. […] Raison décisive. Raison péremptoire.
Trois espèces du jurisprudence, d’autorité, de raison. […] Raison divine, connue par les auspices ; raison d’état ; raison populaire, d’accord avec l’équité naturelle.
Une telle langue convient aux religions pour la raison que nous avons déjà dite, c’est qu’elles ont plus besoin d’être révérées que raisonnées. […] C’est une des raisons qui montrent que la démocratie précède nécessairement la monarchie98. […] Lorsque l’esprit humain s’habitua à abstraire les formes et les propriétés des sujets, ces universaux poétiques, ces genres créés par l’imagination (generi fantastici), firent place à ceux que la raison créa (generi intelligibili), c’est alors que vinrent les philosophes ; et plus tard encore, les auteurs de la nouvelle comédie, dont l’époque est pour la Grèce celle de la plus haute civilisation, prirent des philosophes l’idée de ces derniers genres et les personnifièrent dans leurs comédies.
Humanisme, hellénisme : libres études et raison indépendante. […] Il était naturel que ces gens qui’s’étaient faits eux-mêmes, eussent foi en leur esprit, dans la raison humaine qui, en eux, soutenue par la volonté, réglée par la méthode, avait été à la science à travers tous les obstacles. […] Toutes ces langues, l’hébreu, le syriaque, le grec plus encore, leur étaient suspectes : dans les recherches philologiques, dans la simple grammaire, ils flairaient — non sans raison — une odeur d’hérésie, de raison indépendante, donc rebelle. […] Heureusement, la royauté n’avait pas hésité à se ranger du parti de la raison et de la civilisation. […] Sa croyance est dans sa tête, dans sa raison : de là la faiblesse de son inspiration religieuse.
Ils donnent leur avis et finissent par en avoir un, par croire qu’il est fondé en raison. […] Le monde nouveau, la famille dans laquelle il entrait, le trouva singulièrement disposé à élever son libéralisme d’un cran si je puis dire, à lui trouver des raisons plus fines, plus neuves, plus distinguées, plus d’accord avec l’idée morale qu’on s’y faisait de la nature humaine. […] J’ai dit que M. de Broglie est un des esprits les plus originaux de ce temps-ci ; il l’est surtout dans la forme, dans la méthode et dans les moyens de démonstration qu’il emploie ; même quand il pense la même chose que tout le monde, quand il arrive aux mêmes conclusions, il y arrive ou s’y confirme par ses raisons à lui ; il a en tout ses raisons, vraies peut-être, subtiles quelquefois, ingénieuses toujours, et qui ne sont jamais du vulgaire : son aristocratie, s’il fallait en rechercher quelque trace en lui, se retrouverait par ce coin-là. […] Il éclaire, il instruit, il élève plus qu’il n’émeut : là même où ses sentiments sont en jeu et où il s’agit de questions qui lui tiennent à cœur, il s’adresse surtout à la raison. […] C’est un jour amer dans la vie que celui où l’on est contraint de donner raison au fait sur le droit, à Hobbes sur Platon.
Claude Bernard a parfaitement raison d’affirmer à plusieurs reprises que « l’indéterminé n’est pas scientifique ». […] Par la même raison, il n’admet pas d’expériences contradictoires, car une même cause dans les mêmes circonstances ne peut pas produire deux phénomènes contraires. […] Par la même raison, dit M. […] Claude Bernard se représente la vie, et cette idée générale, nous n’avons aucune raison de nous refuser à l’admettre, d’abord parce qu’il nous manquerait l’autorité nécessaire pour la contester, en second lieu parce qu’elle nous paraît conforme aux vrais principes, et en particulier au célèbre principe de la raison suffisante ou déterminante. Un phénomène dont on ne pourrait donner la raison serait produit par le pur hasard.
La parole est donc l’homme tout entier ; et dans la langue d’un peuple on doit trouver la raison des mœurs et des institutions de ce peuple. […] Telles sont les raisons générales des lois qui régissent toute littérature tant ancienne que moderne. […] Elle porte donc en soi la raison de son existence, et elle va commencer une nouvelle mission. […] De même que son père n’est pas là pour la défendre lorsqu’elle est attaquée ou insultée sans raison, de même aussi, lorsque l’on a de justes reproches à lui adresser, son père n’est pas là pour rougir. […] S’il eût dû lire à la France assemblée, dans de nouveaux jeux olympiques, tout ce qu’il a écrit sur l’histoire, il n’aurait pas si souvent désolé la raison.
Elle reparaît à plus forte raison si notre attention se laisse détourner, si nous cessons d’écouter, nous reprenant à suivre le cours de nos pensées ou nous laissant séduire à contempler les objets qui nous entourent. […] Cardaillac l’a négligé, et avec raison ; car, en fait, quelquefois nous cherchons nos mots, et souvent nous ne cherchons pas nos idées. […] C’est peut-être la raison pour laquelle ces ouvrages me sont toujours nouveaux. […] Contre le logos exô, on peut toujours trouver des objections, mais on ne peut pas toujours contre le logos esô. » Le contexte permet de commenter ainsi ce passage : Si vous proposez à votre interlocuteur une hypothèse ou un postulat, celui-ci peut vous accorder cette thèse comme base d’une discussion commune, sans pour cela la croire vraie alors sa bouche consent, sa raison ne consent pas ; mais il peut aussi répondre à vos paroles par des paroles également vraisemblables ; si au contraire vous faites une véritable démonstration, fondée sur des axiomes, comme l’interlocuteur croit nécessairement aux axiomes, soi : assentiment est forcé ; sa raison doit proclamer son accord avec le vôtre ; poser une hypothèse, c’est demander verbalement une adhésion purement verbale, qui peut être refusée verbalement ; poser ou appliquer un axiome, c’est suivre la raison qui est en nous et provoquer irrésistiblement l’adhésion de la raison d’autrui. — M. […] Nouvelles leçons sur la science du langage, 2e leçon : Le langage et la raison, p. 84 à 105, trad. française.
Quant au fond des jugements, il satisfait en général, même ceux d’entre les témoins et acteurs survivants qui seraient tentés d’épiloguer le plus : il y a quelques points seulement où la critique porte avec raison. […] Pitt n’est pas bien compris, et sur ce point on a complétement raison. […] Il a donc lutté, il est mort à la peine, mais l’avenir lui a donné raison, et sa politique a triomphé en définitive à Waterloo. […] Vinet a dépensé, dans le Semeur, tant de bon esprit et de victorieuses raisons sans parvenir à entamer la conviction de l’auteur.
Chacun d’eux confond avec la France sa religion ou sa philosophie… Ô miracle, ils ont tous raison ! Les catholiques ont raison de croire que la victoire allemande eût marqué un amoindrissement grave du catholicisme. […] Quant aux socialistes, ils ont mille fois raison de croire que si la France était écrasée, c’en serait fait de la République sociale. […] Il écrit, dans la dédicace de l’Étang de Berre (1915) : « Ce petit livre — dit — la ville et la province — épanouies — dans le royaume — pour les progrès — du genre humain » ; dans la préface de Quand les Français ne s’aimaient pas (1916), mettant en lumière « les services rendus à la beauté et à la vérité par les hommes de sang français », il spécifie que cela doit être considéré « sans perdre un seul instant de vue que la raison et l’art ont pour objet l’universel ».
Il a raison, il le mènerait à l’absurdité. […] Vendôme a raison de lui reprocher de l’artifice, mais le poète avait bien aussi ses raisons pour ne pas lui donner plus de franchise. […] Rousseau a raison de dire que la pièce est plus propre à former des Mahomets que des Zopires. […] L’homme instruit et raisonnable n’ignore pas qu’on décore du nom de raison l’entêtement, l’orgueil, la prévention, le préjugé, qu’on attribue souvent à la raison les plus pitoyables folies. […] La raison défend en vain la place ; en vain les préjugés, les bienséances, qui, dans la société, tiennent lieu de raison, luttent contre les progrès d’un sentiment impérieux : tout ce qui le contrarie ne sert qu’à le fortifier.
C’est à la raison froide, à la raison seule et universelle que se dédient leurs efforts. […] elle en sait plus que la raison ! la raison tâtonne indéfiniment dans sa recherche : l’imagination voit, elle est intuitive. […] Aucune preuve par 9 n’entraîne notre raison à la doctrine d’Aristote plutôt qu’à celle de Platon. […] Voilà ce que répondent les poètes et je crois qu’ils ont bien raison.
Le cœur trouve ici à se satisfaire autant que la raison. […] Mithouard a raison de tenir à ce dernier recueil. […] Nous sommes loin de cette raison desséchante et abstraite où voudraient nous enfermer de faux classiques ; car qu’est-ce qu’une raison qu’on ne sent pas ? […] Il a raison. […] » La strophe analytique a sa raison d’être.
J’en crois voir la raison. […] Comme la raison est bon juge des choses qui la contrarient ou qui la dépassent ! […] Le pouvoir a eu tort ; ils n’ont pas eu raison. […] Il avait raison. […] Dumersan avait supposé avec raison que je serais consulté sur le choix à faire.
-vous avez raison. — Et tous ces gens-là, qui prennent le frais, à la chute du jour, ce sont nos joueurs, nos joueuses, nos politiques et nos galans. […] La bizarrerie de certains hommes sérieusement irrités de la prédilection aveugle du sort, joueurs infidèles ou fâcheux par cette unique raison ! […] Il est bien plus aisé de démêler le vice d’un raisonnement que la raison d’une beauté ; d’ailleurs, l’une est bien plus vieille que l’autre. La raison s’occupe des choses, le goût de leur manière d’être. […] C’est qu’ils ont moins de raison et d’expérience ; attendez l’âge, et vous les verrez sourire de mépris à leur bonne.
Comme il a eu raison de l’aimer ! […] Mes raisons sont multiples et les objections viennent en foule à mon esprit. […] En se plaçant à son point de vue, il a complètement raison. […] Il est difficile d’y pénétrer avec les seules ressources de la raison raisonnante. […] Ce n’est plus éclectisme, jeu d’esprit, empirisme, c’est raison pure.
Renoncera-t-il à Dieu en cet instant suprême, par la raison que Dieu l’abandonne et l’annihile ? […] Un professeur de belles-lettres a vu dans ce double emploi une raison pour « expulser poliment Rotrou de la littérature française ». […] Tu rêveras non seulement la gloire de ton nom, mais la vie de ton œuvre, et tu auras raison, puisqu’il faut vouloir le plus pour avoir le moins. […] Il y a de cela deux excellentes raisons, dont la première, la seule que l’on ait coutume de donner, n’est peut-être pas la meilleure. […] L’homme supérieur, a dit avec raison M.
De là ces mesquines théories de la séparation des deux pouvoirs, des droits respectifs de la raison et de la foi. […] Les mystiques regardent en pitié cette faiblesse, et ils ont raison. […] L’infini est dans toutes nos facultés et constitue, à vrai dire, le trait distinctif de l’humanité, la catégorie unique de la raison pure qui distingue l’homme de l’animal. […] Ceux que des circonstances particulières ont amenés à soutenir sur ce terrain un duel à la vie à la mort ont des raisons pour n’être pas si commodes. […] Mole sua stat : telle est de nos jours la raison d’être du christianisme.
On en conçoit aisément la raison ; car c’est l’expérience seule qui a pu nous fournir la mesure de nos forces ; et, si l’homme n’avait d’abord commencé par en avoir une opinion exagérée, elles n’eussent jamais pu acquérir tout le développement dont elles sont susceptibles. […] La raison humaine est maintenant assez mûre pour que nous entreprenions de laborieuses recherches scientifiques, sans avoir en vue aucun but étranger capable d’agir fortement sur l’imagination, comme celui que se proposaient les astrologues ou les alchimistes. […] À cela les physiologistes ont objecté avec raison que, si c’était comme images qu’agissaient les impressions lumineuses, il faudrait un autre œil pour les regarder. […] On conçoit, relativement aux phénomènes moraux, que l’homme puisse s’observer lui-même sous le rapport des passions qui l’animent, par cette raison anatomique, que les organes qui en sont le siège sont distincts de ceux destinés aux fonctions observatrices. […] Que ce soit à tort ou à raison, peu importe ; le fait général est incontestable, et il suffit.
Mais ceci n’est que la grande dame en représentation : je l’aime mieux les jours de tranquillité et d’active raison. […] J’entends d’ici la petite-fille qui dit : La grand-maman a raison, il semble qu’elle ait mon expérience ! […] Mes chers frères, les exemples vous persuaderont mieux que les raisons. […] C’est la raison qui a inventé le calcul, et, par conséquent, les soupçons, les craintes, les fausses interprétations. […] Vous n’aimez pas que je vous parle de moi ; je vous ennuie, quand je vous communique mes pensées, mes réflexions ; vous avez raison ; elles sont toujours fort tristes.
On a bien des fois signalé le rapport étroit qui unit le classicisme de Boileau au rationalisme cartésien : et l’on a eu raison, si l’on retranche du cartésianisme les conceptions aventureuses de sa métaphysique et si on le réduit à un rationalisme scientifique, menaçant de sa rigoureuse méthode tout le surnaturel et tout l’indémontrable. La réduction de la beauté et de l’idéal littéraire à la vérité et à la nature, et du plaisir à la raison, c’est-à-dire au général, le sentiment de l’inaltérable identité de l’esprit humain correspondant à la confiance du savant en sa raison, la condition d’universalité objective et formelle imposée à la poésie, correspondant au principe de la permanence des lois de la nature, l’indépendance de la raison universelle maintenue sous l’autorité du consentement universel, la notion enfin de la vraisemblance, équivalent littéraire de l’évidence mathématique : tout cela est bien conforme à l’esprit de Descartes, et l’Art poétique fait l’effet de n’être qu’une transposition des idées cartésiennes. […] Perrault, en fervent cartésien, prétendait maintenir les droits de la raison, indépendante en chacun, précisément parce qu’elle est commune à tous. […] C’était pour donner raison à Perrault, qui disait n’avoir affaire qu’à des cuistres. […] Puis, en dépit de tout, il ne pouvait faire qu’il ne fût Français, et Français du grand siècle, épris de politesse et de décence, homme de réflexion et de raison.
Vers la fin, et tout en lui souhaitant des sentiment plus doux, il le saluait encore « comme le plus bel organe de la raison et de la vérité ». […] » s’écriait Frédéric à vingt-cinq ans, — l’esprit, c’est-à-dire la raison brillante, la raison enjouée et vive. […] Parlant de cet avenir de raison perfectionnée, dont il aperçoit à peine l’aurore, et dont, tout sceptique qu’il est, il ne désespère pas tout à fait pour l’avenir de l’humanité : « Tout dépend pour l’homme, dit-il, du temps où il vient au monde. […] Revenu en France, d’Alembert continua de correspondre avec Frédéric ; et (si l’on oublie l’épigramme qui ne fut jamais connue) cette correspondance atteste des deux parts bien de la raison, de la philosophie véritable, et même de l’amitié, autant qu’il en pouvait exister alors entre un particulier et un monarque. […] Notre raison est trop faible pour vaincre la douleur d’une blessure mortelle ; il faut donner quelque chose à la nature, et se dire surtout qu’à votre âge comme au mien on doit plutôt se consoler, parce que nous ne tarderons guère de nous rejoindre aux objets de nos regrets.
Je voudrais en démêler les raisons et les faire entendre. […] Elle y consentit et en donnait assez naïvement la raison : « J’ai mieux aimé l’épouser qu’un couvent. » Elle n’a jamais parlé de ce « pauvre estropié » qu’avec convenance, estime, comme d’un homme qui avait de la probité et une bonté d’esprit peu connue de ceux qui ne le prenaient que par son enjouement. […] Plus grande, je fus mise dans des couvents : vous savez combien j’y étais chérie de mes maîtresses et de mes compagnes, toujours par la même raison, parce que je ne songeais, du matin au soir, qu’à les servir et à les obliger. […] Elle a raison, en un sens, de se comparer à un Louvois, à de grands ministres, aux grands ambitieux : je ne crois pas qu’on ait jamais poussé plus loin qu’elle l’esprit de suite, le culte de la considération et la puissance de se contraindre. […] Pour se compléter l’idée de Mme de Maintenon, il convient, en les lisant, d’y ajouter un certain enjouement de raison, une certaine grâce vivante qu’elle eut jusqu’à la fin, même dans son austérité ; qui tenait à sa personne, à son désir de plaire en présence des gens, mais qui n’allait pas jusqu’à se fixer par écrit.
Plein de facilité, faisant des vers plus volontiers que de la prose, il aimait de plus à discuter, à demander la raison des choses, à trouver des arguments neufs pour soutenir son opinion. […] Ils prièrent leur frère le docteur de leur rendre raison de cette question si obscure ; et, quand ils virent qu’elle se réduisait à si peu de chose, ils firent conseiller à Messieurs de Port-Royal par Vitart, cousin de Racine, de montrer clairement au public combien tout ce grand bruit qu’on faisait était pour rien. […] Il y exprimait pourtant une idée très philosophique, c’est qu’il n’y a pas de raison pour que la nature ne crée pas aujourd’hui d’aussi grands hommes qu’autrefois, et qu’il y a place, dans sa fertilité inépuisable, à un éternel renouvellement des talents. […] Contre les savants de profession et ceux qui posent l’autorité avant tout en matière de belles-lettres et de beaux-arts, il est clair, à la façon dont le combat s’engage et dès les premières lignes, que Perrault aura en bonne partie raison. […] Dans ces assertions hardies de Perrault et dans les réponses que lui fit Boileau, ce qui me frappe, c’est à quel point ils ont raison l’un et l’autre, mais incomplètement et sans se répondre, sans presque se rencontrer.
Avoir raison de Beaumarchais, qui avait eu raison de tant d’adversaires, était une ambition et une gloire qui devaient tenter de plus jeunes, et il l’éprouva. […] Beaumarchais entra dans la lice, défendant la société et les administrateurs ; je crois qu’au fond il avait complètement raison. […] Il avait surtout raison quand il parlait de sa facilité à obliger et de sa bienveillance, lui avait fait tant d’ingrats. […] « Je suis un triste oiseau, dit avec raison Beaumarchais, car je n’ai qu’un ramage, qui est de dire, depuis cinq mois, à tous les ministres qui se succèdent : Monsieur, finissez donc l’affaire des armes qui sont en Hollande ! […] ” » — C’est dans cet état de choses que Beaumarchais a la bonhomie de revenir de Londres et de se remettre aux mains de la Convention pour plaider cette affaire, et avoir raison de la dénonciation de Lecointre, dont il démontre surabondamment l’erreur et l’injustice.
Et puis les raisons, dès qu’on se prêtait à les entendre, ne manquaient pas. […] L’abbé de Saint-Pierre fit peu parler de lui pendant vingt ans, jusqu’à la mort de Louis XIV ; il était occupé en silence, et avec une bonne fois parfaite, du perfectionnement de ses idées et de l’accroissement graduel de sa raison. […] Après avoir marqué le caractère singulier de la bienfaisance constamment prêchée et pratiquée par l’abbé, qui n’était point celle d’un cœur sensible et tendre, mais qui procédait avec méthode au nom d’une raison sincère et convaincue : « Il avait aimé pourtant, ajoute-t-il : c’est un tribut que l’on doit payer une fois à la folie ou à la nature ; mais quoique cette folie n’eût point porté d’atteinte à sa raison universelle, sa raison particulière en avait tellement souffert, qu’il fut obligé d’aller dans sa province réparer, durant quelques années, les brèches que ses erreurs avaient faites à sa fortune. » On n’en sait pas plus long sur les fredaines de l’abbé de Saint-Pierre, et sans Rousseau on n’en aurait rien soupçonné. […] nous croissons du côté de la raison. » Ses idées, convenons-en (et notre ton médiocrement respectueux l’a déjà assez indiqué), ne sont jamais grandes ; un bon nombre, quoique très inégalement sont utiles et justes.
Sans doute elles ne sauraient se réaliser sans que le principe de raison suffisante semble violé. […] Si je crois avoir des raisons pour regarder les quatre faits A, B, C, D, comme liés l’un à l’autre par un lien de causalité, pourquoi les ranger dans l’ordre causal A B C D et en même temps dans l’ordre chronologique A B C D plutôt que dans tout autre ordre ? […] Ces deux phénomènes, quand on est témoin, se passent dans un certain ordre ; quand des phénomènes analogues se produisent sans témoin, il n’y a pas de raison pour que cet ordre soit interverti. […] Il ne peut y avoir à cela que des raisons de commodités et de simplicité, fort puissantes, il est vrai. […] Le postulat, en tout cas, conforme au principe de la raison suffisante, a été accepté par tout le monde ; ce que je veux retenir, c’est qu’il nous fournit une règle nouvelle pour la recherche de la simultanéité, entièrement différente de celle que nous avions énoncée plus haut.
Afin de le payer toutefois de raison. […] Le discours de la vache est plein de raison et d’intérêt. […] On peut aller jusqu’à dire qu’il fait très-bien, car il obéit à un instinct déterminé par des lois supérieures : mais l’homme, à qui ces mêmes lois ont donné la raison, paraît la combattre au moment où elle est préjudiciable à ses semblables. […] J’ai déjà observé qu’il n’était point le poète de l’héroïsme, mais celui de la nature et de la raison ; et la raison peut-elle être plus blessée qu’elle ne l’est, par l’entreprise de cet aventurier ? […] Il a eu bien raison de dire : Peut-être d’autres héros, M’auraient moins acquis de gloire.
Lesquels ont raison ? […] Il ne faut point nous obstiner dans notre sentiment, parce qu’il est notre sentiment ; et, parce que nous avons trouvé contre un raisonnement un peu faible de l’auteur un raisonnement assez fort, croire toujours avoir raison contre lui. […] Tel auteur est préféré par un lecteur, non pas parce que ce lecteur lui trouve l’esprit juste, mais parce qu’il lui trouve l’esprit faux, ce qui donne à ce lecteur le plaisir d’avoir toujours raison ou de croire toujours avoir raison contre lui, par suite de quoi c’est à cet auteur que ce lecteur revient constamment. En entrant dans sa bibliothèque, ce lecteur-là va tout droit à cet auteur-là et s’assied en se disant, de façon plus ou moins consciente : « Comme je vais avoir raison ! […] Se sentir en face d’un penseur, toujours en lutte courtoise et bienveillante, sentir qu’il a raison et n’en convenir qu’à la dernière extrémité, mais en convenir franchement, sentir qu’il a tort et se savoir gré de le sentir, mais à la dernière extrémité encore et en se disant toujours que, s’il était là, il ne nous laisserait pas peut-être en pleine sécurité de victoire et aurait sans doute quelque redoutable retour offensif ; lui prêter, même en les tirant de lui ou de vous, quelque argument de réserve à vous réduire ou à vous embarrasser : voilà l’exercice qui constituera pour vous une bonne hygiène intellectuelle.
Assurément, c’est là une opinion qu’on peut appuyer et défendre, mais un homme d’une certaine vigueur de jugement nous aurait donné la raison de la préférence de son esprit dans une question qui contient, en ce moment, l’avenir du monde. […] Et ce n’est pas seulement une raison politique (quoiqu’elle y soit pourtant) qui les empêche de se livrer à cette imitation dernière devant laquelle leur nature simiesque, pour la première fois, s’arrête court. […] Il est de cela une raison plus intime, et qui vient de leur nature même. […] Les Russes écrivent peu ; nous en avons dit les raisons. […] Deux surtout parmi eux semblent avoir fixé la renommée, qui s’en va parfois comme elle est venue, et sans avoir plus de raisons pour s’en retourner que pour venir.
., indifférents aux questions théologiques, s’efforcèrent de rattacher les esprits aux principes de la liberté, et leurs efforts ne furent pas entièrement perdus pour la raison. […] La philosophie française tient davantage au sentiment et à l’imagination, sans avoir pour cela moins de profondeur ; car ces deux facultés de l’homme, lorsqu’elles sont dirigées par la raison, éclairent sa marche, et l’aident à pénétrer plus avant dans la connaissance du cœur-humain. […] Le penchant de leurs philosophes pour les abstractions semblait devoir les entraîner dans des systèmes qui pouvaient être contraires à la raison ; mais l’esprit de calcul, qui régularise, dans leur application, les combinaisons abstraites, la moralité, qui est la plus expérimentale de toutes les idées humaines, l’intérêt du commerce, l’amour de la liberté, ont toujours ramené les philosophes anglais à des résultats pratiques. […] On poussait jusqu’au paradoxe un système vrai sous quelques rapports ; la raison ne pouvant avoir un effet utile, on voulait au moins que le paradoxe fût brillant. […] On applique en Angleterre l’esprit des affaires aux principes de la littérature ; et l’on interdit dans les ouvrages raison nés tout appel à l’émotion, tout ce qui pourrait influencer le moins du monde le libre exercice du jugement.
Les gens du monde ont quelque raison de ne voir en ce rôle qu’un tour de force de mémoire, bon pour ceux qui n’ont reçu en partage que des qualités secondaires. […] Une philo-sophie qui croit pouvoir tout tirer de son propre sein, c’est-à-dire de l’étude de l’âme et de considérations purement abstraites, doit nécessairement mépriser l’érudition et la regarder comme préjudiciable aux progrès de la raison. […] La logique entendue comme l’analyse de la raison n’est qu’une partie de la psychologie ; envisagée comme un recueil de procédés pour conduire l’esprit à la découverte de la vérité, elle est tout simplement inutile, puisqu’il n’est pas possible de donner des recettes pour trouver le vrai. […] La philosophie ne conserva ainsi que les notions les moins déterminées, celles qui n’avaient pu se grouper en unités distinctes et qui n’avaient guère d’autre raison de se trouver réunies sous un nom commun que l’impossibilité où l’on était de ranger chacune d’elles sous un autre nom. […] Pénétration la plus intime des secrets de la psychologie spontanée, haute habitude de la psychologie et des sciences philosophiques, étude expérimentale de l’enfant et du premier exercice de sa raison, étude expérimentale du sauvage, par conséquent connaissance étendue des voyages, et autant que possible avoir voyagé soi-même chez les peuples primitifs, qui menacent chaque jour de disparaître, au moins avec leur spontanéité native ; connaissance de toutes les littératures primitives, génie comparé des peuples, littérature comparée, goût délicat et scientifique, finesse et spontanéité ; nature enfantine et sérieuse, capable de s’enthousiasmer du spontané et de le reproduire en soi au sein même du réfléchi.
La raison qu’ils en apportent, est que l’étude de cette langue fait contracter à l’esprit une certaine roideur & une sécheresse dont on se défait difficilement, & qu’on remarque jusques dans les moindres bagatelles qu’on écrit. […] La seule raison qu’il apporte de la rencontre des meilleures plumes en un siècle plutôt que dans un autre, ce sont les efforts & les succès réitérés des personnes de génie. […] Sa raison est que l’exécution d’une telle idée deviendroit le tombeau de l’imagination & du génie. […] Combien Amyot & Montaigne ont-ils perdu par cette raison, ainsi que Corneille lui-même ? […] Il réfuta M. de Montcrif qui lui répondit ; mais ses raisons ne furent pas satisfaisantes.
Il en avoit pourtant, & l’on ne peut sans injustice lui refuser une raison supérieure, un grand sens. […] L’Abbé Terrasson, connu par son Sethos, laissa un ouvrage utile sous le titre de Philosophie applicable à tous les objets de l’esprit & de la raison. […] Un esprit supérieur, une raison éclairée, un jugement exquis, étoient les qualités dominantes de cet illustre militaire ; elles brillent dans son livre. […] Marchand a fait part au public de son Radotage : brochure ingénieuse où le sel de la raillerie assaisonne les préceptes de la raison. […] Tout dans ce livre est raison ou plaisanterie.
Elle écrivit ces feuilletons charmants du vicomte de Launay, chef-d’œuvre de la légèreté féminine, qui est pour le dix-neuvième siècle ce que les lettres de Mme de Sévigné sont pour le dix-septième, mais Mme Sophie Gay n’eut pas un pareil bonheur… Mme Sophie Gay, qui a fait une montagne de romans que je ne conseillerai à, personne de gravir, et dans lesquels je retrouve, ensemble ou tour à tour, les influences, déteintes ou mélangées, de Picard, de Droz, de Sénancourt, et surtout de Mme de Genlis, non pour la raison, que Mme de Genlis avait, mais pour l’agrément, que Mme de Genlis n’avait pas, Mme Sophie Gay a, comme sa fille, voulu une fois faire son livre de femme, — un livre dans lequel la prétention virile et l’imitation des littérateurs de son temps qui avaient eu du succès, — ces deux choses qui constituent le bas-bleuisme, — pouvaient n’être absolument pour rien, et ce livre, dont le titre frappe au milieu des autres titres de ses œuvres (la Physiologie du Ridicule), prouve au contraire combien chez Mme Gay, le bas-bleu avait rongé la femme, et combien elle était peu propre à traiter un sujet qui demandait plus qu’aucun autre les qualités naturelles à la femme, c’est-à-dire de la grâce sincère et, à force de finesse de la profondeur. […] Moraliste, c’est-à-dire sensualiste, comme le sont la plupart des femmes qui ne voient le but de la vie que dans cette misère du bonheur terrestre, Mme Gay n’a regardé le ridicule que par son côté extérieur, et peut-être ai-je appelé trop vite une mystification ce qui est pour elle le sérieux de la vie : mais si cela est, Mme Sophie Gay est encore plus médiocre que tout à l’heure je ne le supposais, et c’est le doute dans lequel elle jette l’intelligence de son lecteur, qui est la meilleure raison à donner contre son livre. […] Elle ignore s’il a sa raison d’être, s’il existe créé par l’opinion seule ou indépendant de cette opinion que Pascal appelait la reine du monde ; s’il est enfin la transgression d’une loi d’ordre et d’harmonie ou simplement une grimace, un faux pli de l’organisation humaine, une faute ou une infirmité. […] Observatrice myope, elle n’a vu, à ce qu’il paraît, que des ridicules gais, que les ridicules qui font rire et qui, pour cette raison, font rechercher par le monde ceux qui les possèdent pour qu’on puisse agréablement se moquer d’eux. […] Il pouvait s’en dispenser par la très bonne raison qu’il faisait encore de très grandes choses en dessinant vigoureusement ces ensembles, ces organisations entières que l’on appelle des Caractères.
pour que Guizot, l’historien de la civilisation en Europe, au lieu de se préoccuper des larges perspectives et d’élargir ses horizons, se mette à écrire la vie de quelques hommes, à les prendre à part et à les tirer du cadre de la Révolution d’Angleterre, où ils sont à peu près perdus, il faut quelque raison, sans doute. […] Du reste, ce n’est point dans les surprises d’un talent que l’Europe connaît et qui ne peut plus étonner personne, qu’il faut chercher la raison de l’intérêt de cet écrit de Guizot. […] Les uns chercheront donc dans le nouvel écrit de Guizot, comme ils cherchèrent dans tous ceux du même auteur qui le précédèrent, des raisons suffisantes pour accepter et légitimer, pour innocenter et comprendre le principe des révolutions ; les autres pour le repousser, le maudire et le combattre davantage. […] Comme Guizot, sinon tout à fait pour les mêmes raisons, je ne juge pas si cruellement la Révolution d’Angleterre. […] Les raisons à donner de cela sont trop évidentes.
Mais il n’en est pas moins vrai que l’auteur des Ruines a l’honneur d’avoir avec eux la fraternité des idées et une parenté d’intelligence… Ce Revelière inconnu, et qui, dans l’égarement universel de la raison, a grande chance de rester inconnu, est un esprit d’une force rare, toujours, dans la pensée, et souvent dans l’expression, mais il est moins près de ces hommes profonds et sans égaux que d’un autre homme de leur temps, un autre observateur politique trop oublié et qu’il rappelle, ce Mallet-Dupan qui, lui aussi, préjugea la Révolution française dès son origine, et dont le préjugé eut parfois toute la justesse d’un jugement… L’auteur des Ruines est une espèce de Mallet-Dupan après la lettre, la terrible lettre de la Révolution ! […] Dans son énorme livre, dont l’énormité est une raison de plus ajoutée à tant d’autres pour ne pas être lu par les superficiels de cet âge d’ignorance frivole ; dans ce livre qui est tout à la fois une histoire et une théorie, il a mis en présence la Monarchie et la Révolution comme elles n’y avaient, je crois, été mises jamais, du moins avec cette largeur de vue historique, cette prodigieuse abondance de détails, cette implacable impartialité… Beau, mais désespérant spectacle ! […] C’est moins une histoire — comme le dit, du reste, son sous-titre, — qu’un Cours tout entier philosophique et critique de l’histoire moderne ; c’est une démonstration en sens contraire de tous les problèmes agités, à cette heure, par l’esprit révolutionnaire, et dont la solution dernière serait, sous le nom imposteur de progrès, de faire rétrograder la civilisation du monde… Après avoir, dans ses premières pages, comme donné le dictionnaire de la langue qu’il va parler en fixant l’origine et en déterminant la grandeur de la Monarchie française, en traitant de « la providence des dynasties inamovibles », de la propriété, du droit divin, dont il dit : « La primogéniture, le droit successif, la légitimité, le droit divin, ne sont qu’une même expression, une même vérité, une loi de raison », le métaphysicien politique aborde vaillamment l’Histoire. […] Et l’histoire des Ruines est écrite… L’historien s’arrête à cette place, et il a raison. […] Les idées qu’il exprime, ces verba novissima du dernier peut-être des royalistes purs, — si vraies qu’elles soient et en raison même de leur vérité, — ne sont pas capables d’arrêter le torrent des idées contraires qui emportent le monde vers d’autres ruines, lesquelles, certainement, nous vengeront de celles-ci !
Et cependant voici un écrivain impersonnel comme la Raison et comme la Science, que je lis comme si j’avais affaire à une forte ou à une ardente personnalité ! […] Barthélemy Saint-Hilaire, qui a épuisé toutes les questions intéressantes se rattachant à une telle personnalité, ne croit pas une minute que Mahomet soit un saltimbanque à grandes facultés ; mais il ne donne pas la raison profonde de sa bonne foi. Il ne donne pas la raison psychique et physiologique qui explique la mysticité et tous ses effets dans les fortes organisations religieuses. […] ce n’est pas, pour les esprits difficiles, une suffisante raison, et c’est là, il me semble, un des points faibles de cette robuste dissertation, qui en a si peu. […] Dans son admiration, que je comprends très bien, pour Mahomet et pour son œuvre, Barthélemy Saint-Hilaire finit vraiment par faire de Mahomet un trop grand homme, quand il affirme et prétend, à l’encontre de Muir, que le fondateur de l’Islam pouvait seul convertir les Arabes monstrueux du viie siècle et les arracher à leur idolâtrie barbare, par la raison que le Christianisme, avant Mahomet, avait essayé de convertir l’Arabie, et qu’il avait tristement échoué.
C’est un Normand, — et peut-être est-ce là aussi une des raisons déterminantes de son livre ? […] L’auteur du Corneille inconnu a écrit son livre avec cette critique patiente, exacte, microscopique, contractée peut-être chez Sainte-Beuve, à laquelle il a mêlé pourtant une raison plus large et un ton plus grave et plus froid. […] il a eu peut-être ses raisons pour affecter cette froideur singulière, pour étouffer l’expression ardente, pour pâlir une couleur qui eût pu briller davantage, pour enfin avoir fait, qu’on me passe le mot ! […] — (Comme La Fontaine, qui s’appelle aussi le bonhomme, mais pour d’autres raisons que Corneille ; La Fontaine, lui, toujours heureux, le croira-t-on ? […] ; mais surtout il nous a parlé avec juste raison de cette perle, dissoute dans l’oubli : la Suite du Menteur, d’une conception si naturellement ingénieuse et de situations si profondes.
On jugera aussi si l’un a eu raison de croire jusqu’ici que Tarquin l’Ancien prétendit donner aux nations dans la formule dont nous venons de parler, un modèle pour les cas semblables. — Ainsi le droit des gens héroïques du Latium resta gravé dans ce titre de la loi des douze tables : si quis nexum faciet mancipiumque uti lingua nuncupassit ita jus esto . […] Il aurait dû pourtant les frapper dans ces deux règles qu’ils établissent 1º cessante fine legis, cessat lex ; ils ne disent point cessante ratione ; en effet le but, la fin de la loi, c’est l’intérêt des causes traité avec égalité ; cette fin peut changer, mais la raison de la loi étant une conformité de la loi au fait entouré de telles circonstances, toutes les fois que les mêmes circonstances se représentent, la raison de la loi les domine, vivante, impérissable ; 2º tempus non est modus constituendi, vel dissolvendi juris ; en effet le temps ne peut commencer ni finir ce qui est éternel. […] Enfin la raison humaine ayant pris tout son développement, le certain alla se confondre avec le vrai des idées relatives à la justice, lesquelles furent déterminées par la raison d’après les circonstances les plus particulières des faits ; formule éternelle qui n’est sujette à aucune forme particulière, mais qui éclaire toutes les formes diverses des faits, comme la lumière qui n’a point de figure, nous montre celle des corps opaques dans les moindres parties de leur superficie.
Certes, ce n’est pas sans raison. […] On ne lui en fit jamais un reproche, et l’on eut raison. […] Cette rigueur s’explique par des raisons d’un autre ordre, et dont la première est une raison d’argent. […] Il a raison, mon poète. […] Il a raison, M.
Aucune pensée, aucun sentiment ne perd pour cela de son énergie ; l’élévation du langage conserve seulement cette dignité de l’homme en présence des hommes, à laquelle ne doit jamais renoncer celui qui s’expose à leurs jugements ; car cette foule d’inconnus qu’on admet, en écrivant, à la connaissance de soi-même, ne s’attend point à la familiarité ; et la majesté du public s’étonnerait avec raison de la confiance de l’écrivain. […] Une sorte d’esprit madrigalique attestait le sang-froid lors même qu’on voulait peindre l’entraînement ; et l’on se servait souvent d’un langage qui n’appartenait ni à la raison ni à l’amour. […] L’homme, environné de tant d’institutions respectées, de tant de préjugés éclatants, de tant de convenances reçues, ne pouvait pas en appeler à l’indépendance de ses réflexions ; sa raison ne devait pas tout examiner, son âme n’était jamais affranchie du joug de l’opinion ; la solitude même ne ramenait pas sa réflexion aux idées naturelles ; l’ascendant du monarque et du culte monarchique avait pénétré dans la conviction intime de tous. […] De nos jours, si le pouvoir absolu d’un seul s’établissait en France, il nous manquerait ce recours à des idées majestueuses, à des idées qui, planant sur l’espèce humaine entière, consolaient des hasards du sort ; et la raison philosophique opposerait moins de digues à la tyrannie, que l’indomptable croyance, l’intrépide dévouement de l’enthousiasme religieux.
. — Tu as raison, je dois pouvoir te rendre compte de ce que je sens. […] Uranie se défie sagement des premiers mouvements d’antipathie de son goût dans les choses nouvelles pour elle de l’art et de la poésie ; elle ne croit pas avoir raison contre tout le monde ; elle ne croit pas avoir raison contre une portion éclairée du genre humain ; elle ne croit pas avoir raison même contre un seul bon juge qui loue ce qu’elle condamne, et néanmoins elle conserve, elle prétend conserverie sentiment du laid. […] Cette raison semble bonne. […] La nationalité n’est pas une raison valable pour justifier l’impertinence ; car alors, pourquoi Goethe fait-il exception ? […] Qu’on a bien raison de dire qu’un homme vaut toujours mieux que ses théories !
L’esprit & la raison se disputent la préférence dans tout ce qui est sorti de sa plume ; par-tout on y reconnoît l’Ecrivain judicieux, plein de finesse & de pénétration. […] Moreau a combattu tout à la fois les ennemis de la Nation & ceux de la raison. […] La raison suffit pour nous convaincre que les Souverains furent donnés aux Peuples, & non les Peuples aux Souverains.
Section 23, quelques remarques sur le poëme épique, observation touchant le lieu et le tems où il faut prendre l’action Un poëme épique étant l’ouvrage le plus difficile que la poësie françoise puisse entreprendre, à cause des raisons que nous exposerons en parlant du genie de notre langue et de la mesure de nos vers, il importeroit beaucoup au poëte qui oseroit en composer un, de choisir un sujet où l’interêt general se trouvât réuni avec l’interêt general se trouvât réuni avec l’interêt particulier. […] Il est vrai que les raisons que nous avons alleguées pour montrer qu’on ne devoit point prendre une action trop recente pour le sujet d’une tragedie, prouvent aussi qu’une action trop recente ne doit pas être le sujet d’un poëme épique. […] On les blame de n’avoir pas senti qu’il étoit contre la raison, pour ne rien dire de plus fort, de se permettre en parlant de notre religion, la même liberté que Virgile pouvoit prendre en parlant de la sienne.
La corruption commence le jour où sur la sensation s’applique la réflexion, où la raison se superpose à l’instinct. […] Exerçons l’instinct ; aidons la réflexion à se dégager des sensations ; attendons, sans la prévenir, que la raison apparaisse. […] Ne faisons lire notre élève qu’à l’âge où sa raison saura rejeter le vice et saisir la beauté. […] Et l’on a, si l’on veut, raison de le dire. […] Rousseau s’est défié de la raison, il a donné cours à son sentiment.
— J’ai énuméré dans le sixième chapitre les objections principales qu’on peut, avec quelque raison, élever contre la théorie que j’expose dans cet ouvrage. […] Quoique chaque formation ait assurément requis un nombre considérable d’années pour s’accumuler, il y a cependant quelques fortes raisons pour qu’on n’y trouve pas les traces d’une série graduée de formes transitoires entre les espèces qui vivaient alors ; mais je ne puis en aucune façon prétendre à assigner à chacune de ces raisons leur juste valeur dans le commun résultat. […] Cependant la plupart des raisons qui m’ont convaincu que toutes les espèces d’un même groupe descendent d’un progéniteur commun s’appliquent avec une égale force aux espèces les plus anciennes. […] J’ai cependant des raisons de croire qu’un homme qui fait autorité parmi eux, sir Ch. […] La distribution des eaux à la surface du globe dépendant essentiellement du relief de cette surface, la profondeur des mers a toujours été en raison inverse de leur étendue, de même qu’en raison directe de l’élévation des montagnes.
Michaut me paraît la raison même. […] la vieille a raison. […] Elle a raison. […] Je regrette seulement que Sainte-Beuve ait, lui, trop insisté sur la « raison » de Pauline, sur son amour par « raison », sur son dévouement par « raison », sur son héroïsme par « raison ». […] J’en ai dit les raisons.
Si elle prétend faire passer au premier rang le désir de plaire ou d’amuser qui est sa principale raison d’être, [si elle devient de la sorte une servante-maîtresse, une alliée qui commande, adieu le profit de son intervention ! […] Il y a eu des philosophes-poètes qui, envolés sur les ailes du rêve, ont pénétré jusqu’à des vérités que la raison a plus tard atteintes par une marche plus prudente et plus sûre. […] Je crains que ces ouvrages, où le vrai et le faux, le réel et le chimérique s’enchevêtrent d’une façon inextricable, ne satisfassent guère, passé un certain âge, ni la raison ni l’imagination. […] On me pardonnera d’être bref sur ce point : j’ai, voici déjà bien longtemps119, développé les raisons que le naturalisme a eues de se définir lui-même « la science appliquée à la littérature. » Il me suffira de les résumer. […] Chênedollé, au commencement du xixe siècle, désespérant de marier comme il l’aurait voulu la science et la poésie, disait : « La science n’est pas encore nubile. » Et il avait raison.
Il était noble par nature, et il l’était aussi par raison. […] C’est qu’il offrait aux Anglais la peinture de la raison anglaise ; le talent et la doctrine se trouvaient conformes aux besoins du siècle et du pays. Essayons de décrire cette raison qui peu à peu s’est dégagée du puritanisme et de sa rigidité, de la Restauration et de son carnaval. […] Il observe pour former sa raison et celle des autres ; il s’approvisionne de morale ; il veut tirer le meilleur parti de lui-même et de la vie. […] Pour la première fois, Addison réconcilia le vertu avec l’élégance, enseigna le devoir en style accompli, et mit l’agrément au service de la raison.
L’Elégie, dont le sujet principal est le combat de la Raison contre l’Amour, offre sur-tout de très-beaux Vers, beaucoup de morale, & des sentimens bien rendus. Tel en est le début : Echappé des périls d’une ardente jeunesse, Et parvenu dans l’âge où regne la sagesse, Je m’étois résolu d’écouter la Raison, Et d’être sage au moins dans l’arriere saison. […] Nous y ajouterons ce morceau, où le Poëte fait parler la Raison, qui vient de l’exhorter à ne pas la confondre avec l’Opinion.
Parce que Titus et Bérénice ne perdent ni la vie ni la raison ? […] Le fils de Thétis et de Pélée est-il fait pour avoir raison comme un mortel vulgaire ? Doit-il même entendre la raison ? […] À quel point les petites passions ne peuvent-elles pas dégrader la raison humaine ! […] Les monarques de l’Orient n’ont-ils pas souvent immolé leurs amis et leurs femmes pour de moindres raisons ?
Il essaye, pour y répondre, d’hypothèses diverses : l’arrangement fortuit, la nécessité du mouvement de la matière, l’infinité de combinaisons possibles dont une a réussi… Il hésitait, il commençait à se troubler : placé entre des explications incomplètes et des objections sans réplique, il allait, s’il n’y prenait garde, trop accorder à la raison, au raisonnement ; il sentait poindre l’orgueil en même temps que s’accroître les obscurités, quand tout à coup… mais laissons-le parler lui-même sa plus belle langue : Quand tout à coup un rayon de lumière vint frapper son esprit et lui dévoiler ces sublimes vérités qu’il n’appartient pas à l’homme de connaître par lui-même et que la raison humaine sert à confirmer sans servir à les découvrir. […] Il y a tel passage du songe, celui-ci, par exemple : « L’autel qui s’élevait au milieu du temple se distinguait à peine au travers des vapeurs d’un encens épais qui portait à la tête et troublait la raison… L’appareil d’un continuel carnage environnait cet autel terrible… Tantôt on précipitait de tendres enfants dans des flammes de bois de cèdre, tantôt, etc., etc. », il y a, dis-je, tel de ces passages qui me fait m’écrier : Ô Rousseau, ô Lamennais, lequel des deux a imité l’autre ? […] Sayous, Rousseau trace de sa plume éloquente un tableau de la venue du Christ où la figure du Christ est peinte avec amour : pour ce portrait du juste persécuté, c’est Rousseau lui-même qui a posé devant le peintre ; on ne peut s’y tromper. » Mille pardons : Rousseau a pu être troublé dans sa raison et se montrer maniaque assez d’autres fois, mais il ne l’a pas été ce jour-là, et j’ai beau prendre tous mes verres de lunettes, il m’est impossible de voir dans la belle page de Rousseau autre chose que le plus sincère hommage rendu à ce qu’il a appelé ailleurs « la sainteté de l’Évangile ». […] À peine, dans sa vie errante, commençait-il à être installé quelque part, qu’il se croyait en butte à des poursuites, à des curiosités intéressées et malignes, à un espionnage continuel : la misérable compagne qu’il s’était donné avait l’art, selon qu’elle se déplaisait plus ou moins vite dans un lieu, d’entretenir et d’exciter ces inquiétudes qui avaient parfois des redoublements où toute la raison menaçait de périr. […] Il cherche par moments à mesurer le progrès de ce mal bizarre, qui entamait si avant sa raison sans altérer sensiblement son talent.
Les hommes ont commencé par améliorer leur situation sur la terre, soit par un instinct plus ou moins semblable à celui des animaux, soit par une sorte de tâtonnement empirique, se développant au jour le jour, en raison des circonstances et des besoins : c’est ainsi que se formèrent les premières industries et les premières sociétés ; puis un premier degré de réflexion survint. […] La révolution française a été une expérience tentée pour construire un état conformément aux lois de la raison. […] Ils ont eu tort, et ce n’est plus le temps aujourd’hui de régenter personne ; mais ce n’est pas une raison pour méconnaître ou trop affaiblir la part qu’ils ont pu avoir dans l’avancement des sciences. […] Claude Bernard se sépare de Bacon, et je crois qu’il a raison : c’est sur l’emploi des hypothèses dans la science. […] Claude Bernard, c’est le doute, et il loue ici avec raison le doute méthodique de Descartes ; n’oublions pas cependant, pour être justes, que Descartes doutait volontiers des opinions des autres, mais assez peu des siennes propres.
Telle est la question que nous devons maintenant aborder, et dont la solution nous apprendra quelle est au juste la nature et la raison d’être de l’association des signes et des idées. […] Les deux raisons que nous venons de développer nous expliquent comment l’absence de spécificité distincte n’est pas un obstacle au fonctionnement normal de la pensée. […] Les sages, les penseurs, sont rares, et le meilleur d’entre eux pèche sept fois le jour ; qui peut se vanter de n’avoir jamais incliné sa raison devant un préjugé ? […] Brachet range avec raison parmi les mots dérivés du latin les onomatopées latines qui se sont transformées en mots français. […] A plus forte raison s’il est considéré par son auteur lui-même comme impropre à la représentation ; un drame sans action, destiné à la lecture publique ou privée, n’est qu’une épopée dialoguée.
Ils ont raison tous deux. […] Et pour la même raison, il faut l’aimer. […] Léon Pierre-Quint voit là, non sans raison, une petite difficulté. […] Le domaine public a vraiment sa raison d’être. […] Il entreprend de réparer ses torts, et il a raison.
La faim et la soif, la satisfaction charnelle des besoins physiques, la part plus ou moins grosse de grain ou de chair dans cette crèche humaine où ce bétail humain broute sa gerbe ou dévore sa ration de sang des animaux, la lutte incessante de force brutale contre force brutale, force mesurée, non à la justice divine, mais à l’équilibre arithmétique entre les convoitises et les résistances de l’individu à l’individu, de nation à nation, toutes ces clauses notariées par de prétendus législateurs constituants, toutes ces garanties nominales des hommes contractants contre des hommes sans cesse intéressés à violer ou à déchirer le contrat social, tout cela n’a ni sacrement, ni sanction, ni raison d’être, ni raison de durer, ni raison d’autorité, ni raison d’obéissance, ni raison de respect, ni raison de commandement ; tout le monde peut dire tous les jours : Je n’accepte pas ce contrat chimérique imposé au faible par le fort, ou je ne l’accepte que de force, c’est-à-dire par la plus vile des sujétions. […] XVI Notre contrat social, à nous, le contrat social spiritualiste, au contraire, celui qui cherche son titre en Dieu, qui s’incline devant la souveraineté de la nature, celui qui ne se reconnaît d’autre droit que dans ce titre magnifique, et plus noble que toutes les noblesses, de fils de Dieu, égal par sa filiation et par son héritage à tous ses frères de la création, celui qui ne croit pas que tout son héritage soit sur ce petit globe de boue, celui qui ne pense pas que l’empire de quelques millions d’insectes sur leur fourmilière, renversant ou bâtissant d’autres fourmilières, soit le but d’une âme plus vaste que l’espace, et que Dieu seul peut contenir ou rassasier ; celui qui croit, au contraire, à l’efficacité de la moindre vertu exercée envers la moindre des créatures en vue de plaire à son Créateur, celui qui place tous les droits de l’homme en société dans ses devoirs accomplis envers ses frères ; celui qui sait que la société humaine, civile et politique, ne peut vivre, durer, se perfectionner en justice, en égalité, en durée, que par le dévouement volontaire de chacun à tous, dévouement du père au fils, de la femme à l’époux, du fils au père, des enfants à la famille, de la famille à l’État, du sujet au prince, du citoyen à la république, du magistrat à la patrie, du riche au pauvre, du pauvre au riche, du soldat au pays, de tout ce qui obéit à tout ce qui commande, de tout ce qui commande à tout ce qui obéit, et, plus haut encore que cet ordre visible, celui qui conforme, autant qu’il le doit et qu’il le peut, sa volonté religieuse à cet ordre invisible, à ce principe surhumain que la Divinité (quel que soit son nom dans la langue humaine) a gravé dans le code, dans la conscience, table de la loi suprême ; celui qui sait que, sous cette législation des devoirs volontaires qu’on nomme avec raison force ou vertu, il n’y a ni Platon, ni J. […] Rousseau, ni chimères, ni violences, ni tyrannies, ni multitudes, ni satellites, ni armées, ni bourreaux qui puissent faire prévaloir la société purement matérialiste sur la société spiritualiste, où le commandement est divin, où l’abstention est vertu ; ce contrat social est, disons-nous, indépendamment de ce qu’il est plus vrai, mille fois plus digne du légitime orgueil, du saint orgueil de la race humaine : car il croit fermement (et il a raison de croire) que le contrat social qui commence sur la terre par des individus isolés, sans défense contre les éléments, par des hordes, par des tribus, par des républiques, par des empires, par des révolutions qui brisent ou qui restaurent des nations, n’est ni toute la fin, ni toute la destinée probable de la civilisation divine, ni toute la pensée du Créateur, ni tout le plan infini de Dieu dans sa création de l’homme en société. […] C’est la raison évangélisée. […] Il découvre une femme, une jeune fille, une belle sibylle des Alpes, une théologienne de vingt ans, une prophétesse de raison et d’instruction qui prophétise à demi-voix et qui prophétise quoi ?
Mais si nous ne l’admettons pas nous n’avons plus de raison théorique de nous sacrifier nous-même, même à un être qui nous dépasse. Bien des raisons, d’autre part, compliquent le problème. […] Avec raison sans doute, puisque l’humanité n’aura jamais trop de bonté intelligente. […] Un agité peut troubler la vie de bien des sages, c’est peut-être une raison, non point de recommander l’agitation aux sages, mais de les engager à prendre des mesures contre les agités. […] Il combattra quand il le jugera bon, mais ce qu’il combattra, ce qui lui semblera inférieur, il en comprendra la raison d’être et la réalisation possible.
La première de ces difficultés eût dû suffire pour exciter les recherches des Scaliger, des Patrizio, des Castelvetro, et pour engager tous les maîtres de l’art poétique à chercher la raison de cette différence… Cette raison ne peut se trouver que dans l’origine de la poésie (v. le livre précédent), et conséquemment dans la découverte des caractères poétiques, qui font toute l’essence de la poésie. […] Or, ces tableaux passionnés ne furent jamais faits avec plus d’avantage que par les Grecs des temps héroïques, à la fin desquels vint Homère…… Aristote dit avec raison dans sa Poétique, qu’Homère est un poète unique pour les fictions.
que je suis content de trouver une fois raison à l’Académie ! […] C’est non seulement une affaire de conscience, mais une affaire de raison. […] La raison peut tout, l’imagination ne peut rien sans la raison. […] Par la raison, et alors tout, dans la nature, est beau parce que tout y a sa place et une raison d’être à cette place. […] que je suis content de trouver une fois raison à l’Académie !
Dans la même période, on revoit la société et l’esprit de cette madame de Sablé qui était de la société de Rambouillet dans son premier éclat, à qui Voiture écrivait des lettres si flatteuses en 1638, qui le traitait, malgré ses louanges, avec une grande supériorité de raison, et lui reprochait d’avoir un amour-propre de femme . […] Cette dame, alors âgée au moins de 60 à ans, d’une santé très délicate, ne voyait du monde que chez elle, et c’est sans doute pour cette raison qu’il en est peu parlé dans les écrits concernant les grandes sociétés de cette époque. […] Quelques écrivains du temps l’ont qualifiée de marquise ; c’est sans raison. […] Madame de La Sablière regarda d’abord cette distraction, cette désertion ; elle examina les mauvaises excuses, les raisons peu sincères, les prétextes, les justifications embarrassées, les conversations peu naturelles, les impatiences de sortir de chez elle, les voyages à Saint-Germain où il jouait, les ennuis, les ne savoir plus que dire ; enfin, quand elle eut bien observé cette éclipse qui se faisait, et le corps étranger qui cachait peu à peu tout cet amour si brillant, elle prit sa résolution, le ne sais ce qu’elle lui a coûté. […] D’après une lettre de Voiture, dont la date est incertaine, mais qui est placée entre d’autres qui sont de et qui peut par cette raison être présumée de la même date, elle serait née en 1585 au plus tard.
Sa prose, quoique fort supérieure à ses vers & pleine de raison, est précieuse, épigrammatique & forcée. […] Jusques à quand usurperez-vous sur elles l’empire de la raison ? […] Ils firent, l’un & l’autre, pendant long-temps, assaut d’esprit, de raison, d’honnetetés, & même de fadeurs. […] Toutes ces raisons, si spécieuses & si foibles d’ailleurs, prenoient du poids & de la force dans la bouche & dans les écrits de Fénélon, de La Mothe & de M. l’abbé Prévôt ; car ils en vouloient tous à la rime. […] Le tourment qu’elle donne, le tort qu’elle fait quelquefois au stile, ne sont pas une raison pour la rejetter.
La Nana a retenti pour des raisons honteusement, ignominieusement inexprimables, et la Question du Divorce pour des raisons qu’on peut avouer, elles, mais qui ne sont pas plus le talent de M. Dumas que la raison du scandaleux tapage de Nana n’est le talent de M. […] Venu en même temps que le Père Didon et ayant sauté comme lui sur le dos de la circonstance, mais plus vieux de théâtre et ayant plus que lui l’habitude des parterres, il a effacé dans l’esprit du public l’impression qu’y avait laissée le Père Didon, en opposant à la médiocre argumentation philosophique du moine toutes les misérables petites raisons et toutes les grandes insolences de la Libre Pensée. […] À toutes les raisons données par le xviiie siècle en faveur du divorce, M.
C’est là une grande raison, il semble, pour que la vérité, qui ne change point, la vérité immortelle, ne se croie pas obligée, devant les insolentes exigences de l’esprit humain, de revêtir des formes nouvelles qui la feraient mieux accepter de ce Balthazar ennuyé à la dernière heure de son orgie. […] Ainsi, après avoir faussé la raison, faculté par faculté, et obscurci la conscience ; après avoir nié en théologie, en métaphysique, en morale, en toutes choses, la philosophie nie aujourd’hui en histoire. […] D’autres raisons moins spéciales, mais non moins décisives, font de cette imposante publication presque un livre de circonstance, et ces raisons consistent principalement dans l’influence possible, dans l’effet moral et pratique qu’une semblable publication doit avoir sur les masses à qui elle s’adresse, — car, avec sa traduction française et ses gravures, elle s’adresse encore plus aux masses qu’aux penseurs et aux esprits lettrés. […] Il fallait que le sens public fût aussi profondément perdu qu’il l’est pour qu’on laissât passer de si honteuses extravagances sans les couvrir d’une flétrissure universelle ; il fallait qu’on pût désespérer de la raison même pour les voir accueillies et soutenues, à tous les étages de la société, dans des livres, dans des journaux, dans des discours.
La connaissance et la reconnaissance d’un Dieu, source et principe de toutes les lois et portant en soi-même la raison et la sanction de toutes les lois. […] « Il y a donc une raison primitive ; et les lois sont les rapports qui se trouvent entre elle et les différents êtres, et les rapports de ces divers êtres entre eux. […] « La loi, en général, est la raison humaine, en tant qu’elle gouverne tous les peuples de la terre ; et les lois politiques et civiles de chaque nation ne doivent être que les cas particuliers où s’applique cette raison humaine. […] Il y a dans ces trois définitions la manie systématique de définir à tout prix, mais il n’y a, en réalité, ni vérité ni raison. […] Mettez un homme dans un lieu chaud et enfermé : il souffrira, par les raisons que je viens de dire, une défaillance de cœur très-grande.
Si Wagner n’a pas fait un nouveau poème à la place de l’ancien, c’est qu’il avait une raison pour ne pas le faire, une raison esthétique. […] Nul détail à ces faits, nulle raison les expliquant : c’est qu’elles concevaient la vie sans détails ni raisons. […] Cependant les premiers effets de la démocratie grandissante sont la révélation du monde sensible, et le détrônement de la raison. […] Il chercha la forme idéale d’une poésie purement émotionnelle, mais indiquant la raison des émotions en même temps qu’elle les traduisait. […] Wyzewa retrace l’histoire de la littérature et imagine une littérature qui mêlerait sentiments et raison et qui valoriserait la qualité musicale et sonore des mots.
Cette rigueur, surtout celle de Boileau, peut souvent s’appeler du nom d’équité ; pourtant, même quand ils ont raison, Malherbe et Boileau ne l’ont jamais qu’à la manière un peu vulgaire du bon sens, c’est-à-dire sans portée, sans principes, avec des vues incomplètes, insuffisantes. […] Domat qui restaura la raison dans la jurisprudence. […] Il appellera Alexandre ce fougueux l’Angeli, comme si l’Angeli, fou de roi, était réellement un fou privé de raison ; il fera monter la trop courte beauté sur des patins, comme si une beauté pouvait être longue ou courte. […] « La raison, dit Vauvenargues, n’était pas en Boileau distincte du sentiment. » Mademoiselle de Meulan (depuis madame Guizot) ajoute : « C’était, en effet, jusqu’au fond du cœur que Boileau se sentait saisi de la raison et de la vérité. La raison fut son génie ; c’était en lui un organe délicat, prompt, irritable, blessé d’un mauvais sens comme une oreille sensible l’est d’un mauvais son, et se soulevant comme une partie offensée sitôt que quelque chose venait à la choquer. » Cette même raison si sensible, qui lui inspirait, nous dit-il, dès quinze ans, la haine d’un sot livre, lui faisait bénir son siècle après Phèdre.
La Philosophie étudie les conditions de l’être ; elle scrute sans répit le rapport du sujet à l’objet et tâche à trouver la raison de ce rapport, le générateur et la commune mesure de ses deux termes. […] C’est la raison d’être de l’Œuvre d’art. […] Dans l’allégorie, les formes sont artificiellement juxtaposées à l’idée qu’elles analysent ; dans le symbole la pensée, le sentiment, doivent naître naturellement des formes dont ils énoncent ainsi la raison d’être. […] On l’entend bien, le concept philosophique n’est pas nécessairement antérieur au concept plastique ; l’un et l’autre restent indissolublement unis si, encore une fois, les formes secondaires ont leur raison d’être dans le conflit qu’elles achèvent d’exprimer. […] Le leit-motiv devient un emblème, et rien de plus, s’il ne trouve dans l’orchestique sa raison d’être.
Fontenelle n’avait pas institué Mme Geoffrin son exécutrice testamentaire sans raison. […] Tout ce qui est ardent autour d’elle l’inquiète, et elle croit que la raison elle-même a tort quand elle est passionnée. […] » — « C’est que je lui ai donné deux vaches. » — « La belle raison ! […] En toute rencontre, il parle d’elle comme de la raison même. […] Sa raison était affaiblie, mais sa forme d’esprit subsistait toujours, et elle se réveillait pour dire de ces mots qui la montraient encore semblable à elle-même.
Comme journaliste et comme publiciste, dans cette rude fonction de saisir, d’embrasser au passage des événements orageux et compliqués qui se déroulent et se précipitent, nul n’a eu plus souvent raison, plume en main, que lui. […] On sent, dans tout ce qu’il écrit, « la raison mâle et cette énergie d’intelligence que donnent la réflexion, la liberté et la conviction ». C’est un républicain de naissance et d’affection, ne l’oublions pas, un vrai citoyen de Genève, que cet homme qui, par bon sens et par la force de la vérité, est obligé de déclarer à la France de 89 et de 92 qu’elle n’est pas faite pour la république, et qu’il faut trente ans encore d’éducation préliminaire pour que les Français s’accoutument à quelque pratique de la liberté ; c’est un républicain qui n’est royaliste que parce que l’évidence de la raison l’y oblige et qu’il ne peut écrire contre sa conscience. […] Je persiste à ne point hurler, et voici mes raisons. » Et il les déduisait avec justesse, bon sens, modération, et sans pour cela moins énergiquement déplorer ni flétrir ce qui était à condamner dans Voltaire. […] Mais moi dont, à travers tout, le métier est d’être critique et écrivain, je ne puis m’empêcher de dire : Ne remarquez-vous pas, chemin faisant, comme ce style de Mallet dans ses brusqueries est énergique et ferme, comme il grave la pensée ; et l’abbé de Pradt, qui appelait Mallet son maître, en le comptant parmi les trois ou quatre écrivains éclos de la Révolution française, n’avait-il pas raison ?
Toute la philosophie de l’histoire de Montesquieu est dans cette parole, et il faut convenir qu’en ce qui concerne les Romains, à voir les choses après coup, il semble avoir raison. […] Le public voit les choses plus dans leur ensemble, et quand il y a un souffle supérieur et une haute empreinte dans une œuvre, il suppose à l’auteur de la raison sur tous les points, et il se prête à l’impulsion qu’il en reçoit. […] Bien loin en cela de Jean-Jacques, il voulait que chacun, après l’avoir lu, eût « de nouvelles raisons pour aimer ses devoirs, son prince, sa patrie, ses lois » ; et pourtant il ne s’est nulle part inquiété du résultat de la comparaison qu’il présentait aux imaginations de ses compatriotes. […] C’est bien en ce sens qu’il a eu raison de parler de la majesté de son sujet et d’ajouter : « Je ne crois pas avoir totalement manqué de génie. […] Le cercle des choses humaines, qui a tant de tours et de retours, et duquel on ne peut jamais dire qu’il est clos et terminé, a semblé déjà bien des fois donner tort ou raison à Montesquieu.
Sans bien se rendre compte de cette raison de leur répugnance, ils trouvent étrange qu’on ait à traiter historiquement ou judiciairement des faits qui, s’ils sont réels, obéissent sûrement à des lois, et qui devraient alors, semble-t-il, se prêter aux méthodes d’observation et d’expérimentation usitées dans les sciences de la nature. […] C’est la petite jeune fille qui avait raison, et c’est le grand savant qui avait tort. […] Ni pour le jugement, ni pour le raisonnement, ni pour aucun autre acte de pensée nous n’avons la moindre raison de les supposer attachés à des mouvements intra-cérébraux dont ils dessineraient la trace. […] Aussi une modification cérébrale légère, une intoxication passagère par l’alcool ou l’opium par exemple — à plus forte raison une de ces intoxications durables par lesquelles s’explique sans doute le plus souvent l’aliénation — peuvent-elles entraîner une perturbation complète de la vie mentale. […] Mais si les faits, étudiés indépendamment de tout système, nous amènent au contraire à considérer la vie mentale comme beaucoup plus vaste que la vie cérébrale, la survivance devient si probable que l’obligation de la prouve incombera à celui qui la nie, bien plutôt qu’à celui qui l’affirme ; car, ainsi que je le disais ailleurs, « l’unique raison de croire à l’anéantissement de la conscience après la mort est qu’on voit le corps se désorganiser, et cette raison n’a plus de valeur si l’indépendance de la presque totalité de la conscience à l’égard du corps est, elle aussi, un fait que l’on constate ».
Il reviendra dans le bon chemin, mais sans que la raison y contribue davantage. […] Sa raison fut qu’il n’avait pas de raison. […] Ce n’est pas une raison suffisante pour attribuer à M. […] A tant faire que de nier la raison, autant aller jusqu’au bout. […] André Gide l’a lâché pour deux raisons principales.
Cuvillier-Fleury avait raison. […] La raison de cela est facile à concevoir. […] Il y a plusieurs raisons à cela. […] Il oublie tout, même ses raisons et sa raison, quand il s’agit de son art. […] La raison dominait alors les esprits.
[Addenda] Et maintenant, il me faut rendre compte brièvement des raisons et des réflexions qui m’ont conduit un peu tard, à la suite de M. de Sybel, de M. […] Il ne s’agit pas de querelle d’Allemand, quoi que vous en disiez : dans les trois quarts des questions de textes ou de critique proprement dite, les Allemands ont raison contre nous. […] En général, les documents authentiques modifient et le plus souvent démentent sur certains points, les informations précédentes ; on n’y trouve jamais exactement ce qu’on croit y trouver, et ceux qui répondent trop bien à notre attente ont presque toujours de bonnes raisons pour cela. » Cette remarque peut s’appliquer directement à la plupart des lettres produites par M. d’Hunolstein et reproduites par M. […] Supprimer mes articles et me taire sur les raisons qui m’y auraient déterminé n’eut pas suffi.
Il est même bien rare qu’à l’exercice le plus élevé de la raison ne se mêle un peu de ce plaisir, qui, pour n’avoir aucune valeur idéale, n’en est pas moins utile. […] De la même raison qui fait que la Revue d’Édimbourg ou la Quarterly Review sont des recueils sérieux et que le Magasin pittoresque est un livre frivole. […] L’ascétisme chrétien aurait alors parfaitement raison contre elle. […] Le livre chrétien par excellence, l’Imitation, après avoir débuté comme le Maître de ceux qui savent par ces mots : « Tout homme désire naturellement savoir », avait toute raison d’ajouter : « Mais qu’importe la science sans l’amour ?
Elle a raison. […] Chacun croit avoir trop raison ; heureux celui qui se résignerait à n’avoir raison que modérément. […] Nous allons plus loin ; nous admettons, pour ceux qui croient bien à tort qu’eux seuls ont raison, le droit à l’intolérance, pourvu que cette intolérance ne se traduise pas en actes contraires à la liberté des autres.
Les raisons qu’il apporte pour faire admettre la pluralité des stiles, sont invincibles. […] Jules Scaliger, en se glorifiant de montrer comment il sçavoit tirer raison de ses ennemis, crut que la mort d’un homme, tel qu’Erasme, lui donneroit une nouvelle considération. […] Cet orateur célèbre avoit pris, par raison, le genre d’éloquence qui le distingue. […] Une autre raison qu’il donnoit pour excuse des gallicismes dont ses harangues sont pleines, c’est la nécessité d’être clair & de plaire à bien des auditeurs François, pour qui, sans ce secours, des paroles Latines n’auroient été que des sons importuns.
C’est par d’autres raisons qui ne sont pas du sujet que je traite ici. […] Ils auroient eu raison s’ils se fussent contentez de lui donner la seconde place. […] J’ai encore une raison à dire contre l’objection que je refute. […] Cependant le public si-tôt qu’il eut lû la pucelle revint de son préjugé, et il la méprisa même avant qu’aucun critique lui eut enseigné par quelle raison elle étoit méprisable.
En principe, il a raison, et il est parfaitement entendu qu’à tout écrivain de moyen ordre, c’est-à-dire à quatre-vingt-dix-neuf sur cent, c’est-à-dire à quasi nous tous, je donnerai très exactement le même conseil. » Je pourrais m’arrêter là. […] Faguet pense avec raison « qu’il serait excessif de conseiller à tout le monde de refaire sa page autant de fois que Flaubert refaisait les siennes », parce que tout le monde, en effet, ne se trouve pas entravé par les difficultés initiales, le bégaiement écrit, la puérilité des premiers jets de Flaubert. […] Il a raison ; et aussi bien n’est-ce pas le seul motif. […] En principe, il a raison et il est parfaitement entendu qu’à tout écrivain de moyen ordre, c’est-à-dire à quatre-vingt-dix-neuf sur cent, c’est-à-dire à quasi nous tous, je donnerai très exactement le même conseil. » Nous voilà donc d’accord, et ceci est bien la conclusion, non seulement de M.
Alaux croit, avec juste raison, que le besoin d’une religion est au plus profond de l’esprit humain. […] Un protestantisme rationnel qui aurait la bonté grande, malgré sa raison, de ne pas ôter la prière et le culte aux âmes sensibles. […] Comme vous voyez, quand on la désentortille de toutes les raisons dans lesquelles il l’a enveloppée, elle reste un peu mince. […] Il croit, comme eux, au droit de la raison humaine.
C’est le premier symptôme de cette mélancolie qui n’est pas, qui ne fut jamais en lui la démence, mais qui n’est plus la raison. […] Ils furent carrés égaux sur leurs quatre faces, offrant la même étendue d’imagination, de raison, de force et de résistance à la vie. […] Cela est vrai des mauvais poètes, qui n’ont pas cultivé leur raison à l’égal de leur imagination ; cela est souverainement faux des bons poètes, qui sont la raison transcendante et créatrice, vivifiée et colorée par l’imagination, l’harmonie suprême de l’intelligence, et qui sont par cela même les plus raisonnables des hommes. Dans le Tasse, la sensibilité et l’imagination seules étaient supérieures ; la raison, qui ne manquait pas à sa poésie, manquait à sa vie ; l’intelligence était saine, le caractère était égaré ; sa mélancolie, faiblesse de sa trame, comme dans Rousseau, obscurcissait sa raison. […] Cette assurance ne le calma que pour un jour ; ses anxiétés persistèrent et troublèrent jusqu’à la fureur sa raison.
Voltaire oppose à la théorie de Corneille une raison qui, pour être très générale et très sommaire, n’en est pas moins invincible : « Il ne faut pas, dit-il, transporter les bornes des arts. » Tous les raffinements de l’esthétique échouent contre cette raison ; c’est un article de foi littéraire dans notre pays. […] Parmi les raisons dont se sert Chimène pour se convaincre de son devoir, combien, pour quelques-unes très solides, n’en donne-t-elle pas qui sont seulement ingénieuses ! […] Des situations inattendues, qui piquent plus la curiosité qu’elles ne contentent la raison, et une prodigieuse abondance de complications pour les produire. […] Aussi, dans le théâtre antique, où tant de choses touchent le cœur et contentent la raison, où il y a tant à admirer, rien n’étonne. […] Racine eut à connaître lui aussi cette dépendance : mais alors le goût s’était épuré, et le naturel, réglé par la raison, était à son tour à la mode.
Mais l’atticisme, mais l’urbanité, mais le principe de sens et de raison qui s’y mêle à la grâce, ne nous en séparons pas. […] Jamais a-t-on mieux parlé de cette ville heureuse, ou rien de chagrin, de jaloux, de rigide et d’austère s’affligeait le regard et ne mortifiait la joie du voisin ; où l’on jouissait rien qu’à y vivre, à y respirer, à s’y promener, et où la seule beauté des bâtiments et des constructions, la beauté du jour et certain air de fête secouaient loin de l’esprit la tristesse72 ; où l’on aimait le beau avec simplicité et la philosophie sans mollesse, où la richesse était à propos et sans faste, où le courage n’était pas aveugle (comme celui du Mars fougueux), mais éclairé et sachant ses raisons (comme il sied à la cité de Minerve) ; véritable Athènes selon l’idéal de Périclès, sa création et son œuvre à lui, l’école de la Grèce (Ελλάδος Ελλάς Αθήναι), telle qu’il l’avait faite durant les longues années de sa domination personnelle et puissamment persuasive : car on a dans Périclès le type le plus noble et le plus brillant du chef populaire, d’un dictateur de démocratie par raison éloquente, par talent et persuasion continue. […] Poète admirable et le plus naturel sans doute depuis Homère (quoique si diversement), de qui l’on a pu écrire avec raison qu’il a une imagination si créatrice et qu’il peint si bien, avec une si saillante énergie, tous les caractères, héros, rois, et jusqu’aux cabaretiers et aux paysans, « que si la nature humaine venait à être détruite et qu’il n’en restât plus aucun autre monument que ses seuls ouvrages, d’autres êtres pourraient savoir par ses écrits ce qu’était l’homme ! […] Non, la tradition nous le dit, et la conscience de notre propre nature civilisée nous le dit encore plus haut, la raison toujours doit présider et préside en définitive, même entre ces favoris et ces élus de l’imagination ; ou si elle ne préside pas constamment et si elle laisse par accès courir la verve, elle n’est jamais loin, elle est à côté qui sourit, attendant l’heure prochaine et l’instant de revenir. […] Maintenons, messieurs, les degrés de l’art, les étages de l’esprit ; encourageons toute recherche laborieuse, mais laissons en tout la maîtrise au talent, à la méditation, au jugement, à la raison, au goût.
Elle est internationale comme autrefois le latin, et il semble qu’elle soit désormais l’organe préféré de la raison. Elle n’est que l’organe d’une certaine raison, la raison raisonnante, celle qui veut penser avec le moins de préparation et le plus de commodité qu’il se pourra, qui se contente de son acquis, qui ne songe pas à l’accroître ou à le renouveler, qui ne sait pas ou ne veut pas embrasser la plénitude et la complexité des choses réelles. […] On ne voit dans l’homme qu’une raison raisonnante, la même en tout temps, la même en tout lieu ; Bernardin de Saint-Pierre la prête à son Paria, Diderot à ses Otaïtiens. […] Jamais de faits ; rien que des abstractions, des enfilades de sentences sur la nature, la raison, le peuple, les tyrans, la liberté, sortes de ballons gonflés et entrechoqués inutilement dans les espaces. […] Racine, Discours académique pour la réception de Thomas Corneille : « Dans ce chaos du poème dramatique, votre illustre frère fit voir sur la scène la raison, mais la raison accompagnée de toute la pompe et de tous les ornements dont notre langue est capable. » 369.
Toutes les institutions, tous les usages qui, réglant les rapports sociaux de l’homme et de la femme vont contre la nature, sont condamnés par la raison. […] Le critérium universel et infaillible, c’est la nature : la raison n’en connaît pas d’autre. […] La raison ne distingue les individus que selon l’inégalité naturelle : la force physique, que notre penseur est loin de mépriser, mais surtout l’intelligence et la science, voilà ce qui élève les hommes et leur confère une dignité supérieure. […] Suivre la nature, c’est la raison, et c’est la vertu. […] Enfin la nature même, comme de toute raison, de tout droit, de tout bien, est l’unique principe de toute beauté : Jean de Meung n’est pas grand esthéticien, n’entre pas en long propos sur le beau.
. ; il l’applaudit, il la gourmande, il essaie de la contenir dans les voies de la morale et de la raison ; il se donne du moins à lui-même et à tous les honnêtes gens la satisfaction d’exprimer tout haut ses sentiments sincères, et, à certains moments plus vifs, il est entraîné, il s’avance et se compromet auprès des principaux personnages, jusqu’à mériter pour un temps prochain leur désignation et leur vengeance. […] Par tous les moyens, par toutes les raisons, il provoque une ligne active et vigilante de tous les citoyens probes et sages, une « concorde courageuse » et presque un « vertueux complot » de leur part pour conjurer les efforts contraires de la sottise et de la perversité. […] Si, comme je l’espère encore, ils succombent sous le poids de la raison, il sera honorable d’avoir, ne fût-ce qu’un peu, contribué à leur chute. […] C’est l’écrivain homme de goût qui s’irrite d’abord et qui s’indigne de cette violation inouïe de la raison et de la pudeur dans la langue. […] Ce qui me frappe, c’est la raison et l’énergie : l’idée du talent ne vient qu’après.
La France donna alors le magnifique spectacle d’une nation tout entière qui cherche de bonne foi le vrai et le juste, et ne reconnaît en toute chose d’autorité que la raison. […] Les erreurs sont infinies, tandis que la raison est une. […] Les erreurs donc étant individuelles, et le bon sens étant le sens commun, les travers particuliers se combattent, se neutralisent, et la raison, comme on l’a dit, finit par avoir raison. […] La raison publique fait en somme bonne route, avons-nous dit ; mais elle ne cingle pas en ligne droite ; elle louvoie. […] Si les membres de l’Académie, en raison des circonstances, ne peuvent honorer de leur présence cette solennité, ils sont priés de s’y faire représenter au moins par l’envoi de quelques ouvrages et de quelques mémoires.
Et c’est une des raisons qui empêchent celle-ci de porter nécessairement les conséquences anti-égalitaires qu’on lui attribue. […] Plusieurs organisations s’y rencontrent et s’y enchevêtrent : c’est peut-être une des raisons pour lesquelles l’émancipation des hommes devait être la mission propre des sociétés occidentales. […] Mais le cours normal des affaires a vite raison de ces exceptions accidentelles. […] Pour les mêmes raisons, peu d’institutions devaient plus contribuer au relèvement de l’esclave que les collèges de l’Empire. […] On a eu raison de dire en ce sens que, la souveraineté, féodale dépend de la propriété : la condition de la terre emporte celle de l’homme.
Je m’arrête ; car cette imitation deviendrait aussi fatigante que la réalité même : mais on pourrait extraire des adresses, des journaux et des discours, des pages nombreuses, dans lesquelles on verrait la parole marcher sans la pensée, sans le sentiment, sans la vérité, comme une espèce de litanie, comme si l’on exorcisait avec des phrases convenues l’éloquence et la raison. […] Comment convaincre la raison fatiguée par l’erreur, et devenue soupçonneuse par les sophismes ? […] Le crime pouvait troubler le jugement, dérouter la raison à force de véhémence ; mais la vertu n’osait se développer tout entière : elle voulait convaincre, et craignait d’offenser. […] L’imperfection humaine laisse toujours un côté sans défense ; et la raison n’a d’autre usage que de nous décider pour la majorité des avantages contre telle ou telle objection partielle. […] Si vous interdisiez l’éloquence, vous détruiriez la gloire ; il faut que l’on puisse s’abandonner à l’expression de l’enthousiasme pour faire naître ce sentiment dans les autres ; il faut que tout soit libre pour que la louange le soit, pour qu’elle ait ce caractère qui commande à la raison et à la postérité.
Le docteur Castle n’hésite pas à lui donner raison sur les points les plus importants ; il reconnaît qu’une bonne organologie suppose préalablement une psychologie bien faite, et que la psychologie elle-même ne peut se faire sans l’observation de la conscience. […] Ce qui est plus décisif encore et se rapporte de plus près au fait en question, c’est que, d’après les phrénologues (et en cela les physiologistes leur donnent raison), les affections, les émotions, les passions, ont leur siège dans le cerveau : or il ne nous arrive jamais de les localiser là ; nous n’avons pas conscience d’aimer par la tête, mais par le cœur. […] Leuret avec raison, si les organes peuvent ainsi se déplacer et aller d’arrière en avant, ils peuvent tout aussi bien aller d’avant en arrière, et alors pourquoi les organes frontaux n’iraient-ils pas se ranger sous le pariétal ? […] Telles sont les raisons générales qui ont été invoquées contre la doctrine phrénologique, et il est impossible d’en méconnaître la valeur ; mais, indépendamment de ces objections, qui atteignent la théorie générale, on peut dire que de toutes les localisations proposées par les phrénologues aucune n’a été confirmée par l’expérience. […] De plus, sans méconnaître l’abus que l’on peut faire des raisons à priori, il est difficile cependant de ne pas être frappé des paroles suivantes de M.
C’est une ignorante et une paysanne, qui savait à peine écrire correctement son nom. » Et elles auront raison, les virtuoses de lettres ! […] C’est une loi, — et une loi absolue, — que le sexe de la femme soit autant dans sa tête qu’ailleurs, et que le génie, quand elle en a, soit en elle, comme tout le resté, et pour cette raison, ne puisse, en force première et naturelle, lutter contre le génie de l’homme, qui est et qui doit, en définitive, rester le maître de la Création. […] alors, la raison est double pour qu’il n’ait plus de prise du tout sur l’imagination humaine, cette grossière. […] Parce que nous n’avons pas mission de dire avec ascendant le grand mot religieux qui convient sur les mérites extraordinaires de la sœur Emmerich, est-ce une raison pour ne pas risquer notre humble mot de critique littéraire sur ce quelque chose qui, en fin de compte, s’est résolu en elle par ce qu’on est bien obligé d’appeler du talent, et du talent jusqu’au génie… ? […] regardez les acteurs de ce drame qui se joua une fois sur la terre et dont le ciel fut spectateur, et jugez si la vision de notre Mystique ne nous les a pas reproduits, dans l’esprit éternel de leur personnage, quoique éclairés par mille côtés et mille détails que, pour des raisons de providence, l’Évangéliste avait laissés dans l’ombre.
Ce n’est pas sans raison qu’on a vu dans le cartésianisme une « philosophie de la liberté ». […] On trouverait, en rétablissant les anneaux intermédiaires de la chaîne, qu’à Pascal se rattachent les doctrines modernes qui font passer en première ligne la connaissance immédiate, l’intuition, la vie intérieure, comme à Descartes (malgré les velléités d’intuition qu’on rencontre dans le cartésianisme lui-même) se rattachent, plus particulièrement les philosophies de la raison pure. […] Pour des raisons que nous indiquerons tout à l’heure, la philosophie française n’a jamais eu beaucoup de goût pour les grandes constructions métaphysiques ; mais quand il lui a plu d’entreprendre des spéculations de ce genre, elle a montré ce qu’elle était capable de faire, et avec quelle facilité elle le faisait. […] Et pourtant ce n’est pas tout à fait sans raison qu’on le classe parfois, ainsi que Renan lui-même, parmi les positivistes. […] La même raison fait que nous laissons de côté des penseurs contemporains éminents qui se sont orientés vers la sociologie : Espinas, Tarde, Durkheim, Lévy-Brühl, Le Bon, Worms, Bouglé, Simiand, Izoulet, Lacombe, Richard et beaucoup d’autres.
Ramus se défendit avec une force de raison, & une présence d’esprit admirables. […] Cette dernière raison fit changer de résolution le pape. […] Quelle raison avez-vous d’être habillé comme vous l’êtes ? […] Lémos crut que Valentia s’étoit évanoui, terrassé par la force des raisons. […] On vante avec raison une de ses maximes.
La réflexion est le premier résultat de l’existence individuelle et l’origine de la raison. […] Les hommes du Réveil abdiquaient les prétentions humaines par raisons morales. […] Au cours de ce travail qu’avait institué la raison et qu’elle dominait seule, sa raison peu à peu : s’était émancipée. […] Or, te besoin fondamental de la raison, c’est l’unité dialectique. […] Critique de la raison pratique.
Pitoyable raison ! […] Et il a bien raison. […] Louis Roche, ici, qui a raison. […] Il exècre la raison et les méthodes logiques. […] Et comme l’a noté avec raison M.
Il y avait à cela plusieurs raisons, et non pas toutes frivoles. […] Et pourtant il a foi, il se confie volontiers en l’instinct public, en la raison croissante des masses. […] Il arriva donc en définitive ce qui arrive si souvent dans les choses humaines : la raison n’eut pas tout à fait tort, elle ne fut qu’en partie déjouée. […] Et c’est ainsi que le règne de la raison s’ajourne toujours. […] C’est sur ce fatal et sincère aveu que finit ce drame, où s’agite la raison humaine.
Avant MM. de Goncourt, des historiens modernes : Michelet, Audin, Dargaud, saisis, tous les trois, en raison des plus rares facultés artistiques, de cet amour des arts plastiques devenu presque la seule passion d’une société qui gâte ses passions les meilleures par les affectations de sa vanité, et qui les déshonore bientôt en les transformant en manie, avaient deviné le parti qu’on peut tirer, pour l’histoire d’un temps, de l’art de ce temps, et ils l’avaient souvent évoqué dans leurs œuvres. […] Mais, grande ou petite, voilà leur originalité et l’explication de leur succès parmi nous, les affaiblis de la raison, qui n’avons d’intérêt que pour les arts de l’imagination et de la main ! MM. de Goncourt ont compris les goûts de leur temps, ou plutôt ils les ont partagés, si même ils ne les ont subis ; et j’avais raison tout à l’heure de dire qu’avant eux, et avant que les choses de l’art eussent parmi nous leur toute-puissance, personne n’avait pensé, comme eux, à faire tenir toute l’histoire d’un temps dans un catalogue de peinture, et à l’écrire comme Diderot écrivait son Salon. […] Au-delà, il n’y a plus d’humanité ; il n’y a plus que des miasmes où l’on ne respire plus rien, où la lumière s’éteindrait d’elle-même aux mains qui voudraient la tenir. » Et ils ont raison. Ou plutôt, ils avaient raison !
on a raison. […] — et du Faust lui vient cette obsession du grand fantôme, cette transe du diable dont la queue, disait-il, se fourre partout, et qu’il a, pour cette raison, fourrée partout dans ses œuvres. […] On se dit que l’homme des superstitions de l’Écosse doit toucher de bien près aux superstitions du visionnaire allemand, et toutes ces raisons combinées donnent un poids immense au jugement porté par Walter Scott sur les Contes fantastiques et sur leur auteur. […] Une des raisons probantes du génie d’Hoffmann que nous donne Champfleury dans cette introduction, est l’effet produit par les Contes fantastiques sur la mémoire des enfants : « Celui de mes lecteurs qui est assez jeune — dit-il — pour avoir lu Hoffmann étant enfant, doit avoir dans une des cases de son cerveau quelques personnages bizarres, quelque souvenir de maisons étranges », et, pour élever son idée à la majesté d’un axiome et glacer l’objection, qu’il ne glacera pas, il ajoute carrément : « Tout ce qui s’oublie n’est pas né viable », ce qui peut très bien être une fausseté, si ce n’est pas une simplicité, ce que les Anglais appellent un truism. […] On le voit, ce ne sont pas là des raisons bien concluantes en faveur de la solidité des œuvres d’Hoffmann.
On a toujours raison d’arriver le premier. […] Mais, à, présent, c’est plus difficile, et c’est précisé ment par la raison que, venu après M. […] Dans un autre endroit de son livre, l’auteur de Jésus et les Évangiles, qui nie la divinité du Christ en raison abjecte de sa folie, reconnaît qu’il est thaumaturge, et s’il est thaumaturge, il fait des miracles, et s’il fait des miracles, nous voilà en plein monde surnaturel et bien près de la Divinité. […] Que de raisons, à ce qu’il semble, pour adorer le peuple qui a préféré Barrabas à Jésus-Christ ! […] Soury pouvait, à la vérité, faire avec autant de raison de Jésus un assassin et un adultère… Mais l’idée fixe du médecin aliéniste, affolé lui-même de la folie qu’il traite et qui est contagieuse, l’a emporté… Je ne sais pas si M.
Le progrès n’est selon lui que l’apparition successive, sur le théâtre de l’histoire, des trois idées qui sont le fond même de la raison : l’idée de l’infini, celle du fini, celle du rapport entre le fini et l’infini. […] L’homme n’est-il que raison, et encore raison abstraite, éteinte pour ainsi dire, sans rayonnemens, sans activité ni chaleur ? […] Ni la fatalité, ni la nature, ne peuvent nous dispenser de cette tâche, car le progrès, c’est précisément le triomphe de la raison et de la liberté morale sur la nature et la fatalité. […] Bien plutôt, elle les produit en un sens, car elle les suscite, elle les fait sortir de l’indétermination d’une matière qui n’est pas encore organisée, elle en est la raison, partant la vraie cause. […] Pierre Siciliani signale avec toute raison ce nouveau titre, un peu méconnu jusqu’ici, du philosophe grec.
La raison est tranquille ou furieuse. […] Si j’ai raison, il est inutile que je me défende ; si j’ai tort, ma défense ne me donnera pas raison. […] Vous avez affaire à des estomacs qui n’entendent ni l’équité, ni la raison. […] Qui sait si l’auteur n’avait pas de bonnes raisons pour n’être pas trop clair ? […] il a raison.
Le goût n’est que le ministre d’une raison parfaite. […] c’est la raison forte et invincible : leur élocution noble n’en est que le juste vêtement. […] Les Grecs s’étaient rendu raison de tout ce qui concerne l’imitation. […] mot vague, s’il ne veut dire la raison échauffée par le sentiment. […] La préférence de quelques lettrés pour le grand Corneille s’appuie sur la même raison.
M. de Gourmont ayant tort, j’aurai raison. M. de Gourmont ayant raison, j’aurai raison avec lui, et ma rêverie tiendra sa place au même titre que celle d’autrui. […] La notion dans la poésie classique à une valeur propre et le vers apporte des idées, des lumières, des raisons et une raison, en général sur le cœur humain. […] Aimez donc la raison, dit Boileau, […] le théâtre de Corneille et de Racine est, même dans les plus violentes explosions, un enchaînement de raisons. […] Il est, et sans autre raison se légitime par cette existence.
La Motte est sceptique ; c’est un esprit froid, fin, sagace, qui pratique la maxime de Fontenelle et se défendrait de l’enthousiasme s’il pouvait en être susceptible ; il n’a rien à faire de son loisir et de son esprit qu’à l’appliquer indifféremment à toutes sortes de sujets auxquels il s’amuse : « Hors quelques vérités, pense-t-il, dont l’évidence frappe également tous les hommes, tout le reste a diverses faces qu’un homme d’esprit sait exposer comme il lui plaît ; et il peut toujours montrer les choses d’un côté favorable au jugement qu’il veut qu’on en porte. » Il se flatte que la dispute présente est du nombre de celles qui se prêtent à plus d’une solution ; il affecte de la considérer comme plus frivole qu’elle n’est, qu’elle ne peut le paraître à ceux en qui la raison se rejoint au sentiment et qui mettent de leur âme dans ces choses de goût. […] Son défaut principal dans cette réponse où il entre tant de bonnes raisons de détail, c’est de pencher tout entière d’un côté, de ne voir que l’Antiquité et rien de plus, de crier sur cette fin de Louis XIV à la décadence des lettres et à l’invasion de l’ignorance parce que la forme du savoir est près de changer, de croire « que c’est l’imitation seule qui a introduit le bon goût parmi nous », et de ne tenir aucun compte du génie naturel qui a mille façons de se produire dans la suite des âges et qui recommence toujours. […] Selon lui, Descartes a renouvelé pour ainsi dire l’esprit humain, en substituant la raison à la prévention. […] Dès l’abord, il avait défini cet esprit de philosophie comme il l’entendait, « une supériorité de raison qui nous fait rapporter chaque chose à ses principes propres et naturels, indépendamment de l’opinion qu’en ont eue les autres hommes ». […] Il eut la faveur et la grâce ; l’autre avait eu la raison et le poids.
Mais quand il fallut choisir plus tard entre Diderot et Jean-Jacques, Deleyre n’hésita pas, et pour lui Rousseau eut raison, les Encyclopédistes eurent tort. […] Le cœur s’élance vers l’immortalité, la raison me repousse vers la poussière. […] Au sentiment des maux publics se joint dans mon âme une raison puissante de désirer la fin de mes peines secrètes. […] Nous la méconnaissons parce qu’elle est celle de la nature et que le chef-d’œuvre de la raison, comme du génie, n’est que de voir ce qui est sous nos yeux. » On croirait entendre un Montaigne chrétien. […] — Mais n’ai-je pas eu raison de dire que Ducis a trop de sensibilité d’homme et de père pour un artiste ?
Quoiqu’on puisse, avec raison, lui reprocher tout ce qui, dans la nomination des sénateurs, tenait purement à l’hérédité, néanmoins le gouvernement de Rome, dans l’enceinte de ses murs, était un gouvernement libre et paternel. […] Il fallait le persuader par le développement de la raison, et le contenir par l’estime. […] Leur éloquence elle-même n’est point animée par des passions irrésistibles ; c’est la chaleur de la raison qui n’exclut point le calme de l’âme. […] On ne cite même dans leur histoire aucune femme, aucun homme connu, dont la raison ait été dérangée par le malheur. […] Une autorité de raison, une majesté de caractère singulièrement imposante, garantit à chaque phrase, à chaque mot son acception toute entière.
S’il y a quelque chose de fatal au monde, c’est la raison et la science. […] Il est impossible d’empêcher la raison de s’exercer sur tous les objets de croyance ; et tous ces objets prêtant à la critique, c’est fatalement que la raison arrive à déclarer qu’ils ne constituent pas la vérité absolue. […] D’ailleurs, il est certain que le vrai système moral des choses est infiniment supérieur aux misérables hypothèses que renverse la sévère raison, qu’un jour la science retrouvera une réalité mille fois plus belle et qu’ainsi la critique aura été un premier pas vers des croyances plus consolantes que celles qu’elle semble détruire. […] La science large et libre, sans autre chaîne que celle de la raison, sans symbole clos, sans temples, sans prêtres, vivant bien à son aise dans ce qu’on appelle le monde profane, voilà la forme des croyances qui seules désormais entraîneront l’humanité. […] C’est notre gloire à nous d’en appeler toujours à la lumière ; c’est notre gloire qu’on ne puisse nous comprendre sans une haute culture, et que notre force soit en raison directe de la civilisation.
Mais quelle distance doit être regardée comme suffisante, s’est-on demandé avec juste raison ? […] On aurait pu le préjuger, par cette raison qu’elles sont exposées à des conditions physiques diverses et qu’elles entrent en concurrence avec différentes séries d’êtres organisés, ce qui est de la plus haute importance, ainsi que nous le verrons plus loin. […] D’autre part, si l’on considère chaque espèce comme le produit d’un acte spécial de création, il n’y a aucune apparence de raison pour qu’il se trouve un plus grand nombre de variétés en un groupe renfermant beaucoup d’espèces, qu’en un groupe qui en renferme peu. […] Ainsi que Fries l’a remarqué avec raison, de petits groupes d’espèces sont généralement pressés comme des satellites autour de quelques espèces centrales. […] Mais il y a aussi quelque raison de croire que les espèces qui sont très voisines de quelque autre, et qui sous ce rapport ressemblent à des variétés, ont aussi fort souvent une extension très restreinte.
… J’en parlais un jour à Mme de B… qui est de vos amies, et qui en vérité a regret à votre raison. […] Telle est aussi la grande raison du grand succès de son livre. […] Bossuet le trouvait « indigne » d’un prêtre, et je crains bien qu’il n’eût raison. […] C’est la raison dont se paiera Voltaire ; et nous ne nierons pas qu’elle enferme une part de vérité. […] — pour quelles raisons ?
La raison, quelle qu’elle soit, est sans doute la même qui fait qu’on préfère, au moins on le dit, Plaute à Térence. […] Il a la grâce, la raison harmonieuse, le bon sens, la sobriété, la vérité psychologique. […] Et si Racine était peut-être le dernier à qui il fût permis d’avoir raison contre Port-Royal, n’est-ce pas, malgré tout, quelque chose d’avoir raison ? […] Et puis, quelle raison avons-nous de croire, ou que Racine les ait peu pleurées, où même qu’il y eût lieu de les pleurer, et que nous devions nous attendrir sur elles comme sur des victimes ? […] Il y a peut-être d’autres raisons.
Ceux mêmes qui y ont mis le moins de raison en ont encore trop mis. […] Et cette poésie se jouerait sur les confins de la raison et de la démence. […] La mienne, il est vrai, me rend peut-être plus sensible que de raison à ces insuffisances et à ces ridicules. […] Et cela, surtout dans la religion catholique, où la raison ne garde point, comme dans d’autres religions des sortes de demi-droits honteux, mais se soumet toute à l’amour. […] Il n’exprime presque jamais des moments de conscience pleine ni de raison entière.
Les effets varient en raison des conditions qui les manifestent, mais les lois ne varient pas. […] La raison ou la philosophie, devenant ensuite la maîtresse, enfanta la scolastique. […] Mais si le sentiment doit être éclairé par les lumières de la raison, la raison à son tour doit être guidée par l’expérience. […] Je pense que la croyance aveugle dans le fait qui prétend faire taire la raison est aussi dangereuse pour les sciences expérimentales que les croyances de sentiment ou de foi qui, elles aussi, imposent silence à la raison. En un mot, dans la méthode expérimentale comme partout, le seul critérium réel est la raison.
La raison de cet insuccès me paraît assez simple. […] Quelle peut être la raison mystérieuse de cet extraordinaire échec ? […] Je crois qu’en dépit de leur généreux sentiment, ils n’ont raison qu’en apparence. […] Ce sera sans doute là, de plus en plus, la raison d’être des pays latins dans l’avenir. […] Il existe pourtant à cette mainmise de certains peuples sur d’autres peuples une raison supérieure aux individus : une raison, pour ainsi dire, cosmique.
Les raisons de M. de Gourmont sont purement intellectuelles. […] Elles ont aussi même raison d’être. […] Faut-il se demander longtemps les raisons d’une haine si puissante ? […] Bordeaux estime avec raison la plus haute de toutes. […] Est-ce une raison pour le briser ?
Souvent un maître n’aime pas la vérité, craint les raisons, & aime mieux un compliment délicat que de grands traits. […] Bourdaloüe ; il fut un des premiers qui firent parler la raison. […] Les poetes ont eu peut-être plus de raison qu’ils ne pensoient. […] Cet esprit de raison pénetre même dans les provinces. […] Mais dans les faits les plus reçus que de raisons de douter ?
Ceux qui en jugeront malicieusement et superficiellement, n’étant touchés que des événements heureux, diront ce qu’ils voudront de quantité de choses mal arrangées et qui pourraient se détruire par maintes bonnes raisons et sans réplique. […] Voilà bien t’entretenir. » L’apologie est un peu longue ; je n’ai pas promis qu’elle serait élégante ; il manque un coup de rabot à cette façon d’écrire de Catinat ; mais on a l’homme, on a la forme d’esprit, on a les raisons. […] Il y en a une infinité à me donner la vanité que tu m’inspires dans tes lettres ; mais, de bonne foi, cela ne me change point sur le jugement que je fais de moi-même, et je réfléchis combien aisément la fortune pouvait changer les événements qui m’ont procuré tant d’honneur, et toutes les raisons pour une affaire deviennent bien faibles contre me seule qui les fait manquer. […] Je n’ai pu éviter ce coup ; les raisons seraient longues à t’en déduire ; tu peux compter que ma conduite n’est exposée qu’aux mauvais discours des gens qui ne connaissent point la nature de cette guerre ; c’est une ample matière à en tenir. […] Aussi, puis-je t’assurer que je ne suis point travaillé de tout ce qui se dit, mais bien de la dureté et de la difficulté des affaires dont je suis chargé. » La patience lui donna finalement raison.
Ne lui disputons pas d’ailleurs le mérite d’une certaine imagination de style, et par moment d’un heureux choix de mots ; mais dans ses plus beaux vers on ne sent ni une raison émue ni un cœur touché. […] Leur tort est d’avoir trop raison et de ne pas savoir user modérément de leurs avantages. […] Nous qui sommes juges dans un procès fait à un homme de génie, nous ne prenons de ces preuves que ce qu’il en suffit pour donner raison à la vérité contre Voltaire, sans toucher à sa gloire. […] On lisait la Henriade, il y a un siècle, les amis de Voltaire pour le plaisir qu’ils y prenaient, ses ennemis pour y trouver des raisons de ne pas l’aimer. […] A tous les grands sentiments se joignait dans André Chénier une raison supérieure.
Il semble que, Dieu ayant donné la raison aux hommes, cette raison doive les avertir de ne pas s’avilir à imiter les animaux, surtout quand la nature ne leur a donné ni armes pour tuer leurs semblables ni instinct qui les porte à sucer leur sang. » Ces mêmes obstinés, trouvant étrange qu’on offrît pour modèles à l’humanité les loups et les ours, ont dit encore : Quand même l’histoire prouverait que de grands empires d’autrefois se sont formés par ce vol à main armée qu’on appelle la conquête, quand même de grands empires d’aujourd’hui ne seraient qu’une agglomération de provinces ou de colonies soudées de force ensemble, s’ensuit-il que le passé puisse servir de règle à l’avenir et qu’il soit permis de confondre ce qui a été ou ce qui est avec ce qui doit être ? […] Renan, se défiant, comme Taine, de la raison et des hardies revendications formulées au nom d’une justice extérieure et supérieure aux faits, déclarait qu’il était sage d’entretenir l’inégalité des races, des classes, des conditions individuelles. […] On ne pourra plus nous reprocher de rendre l’adultère intéressant, par la raison bien simple que, le divorce existant, l’adultère de la femme ne sera plus que le désir de bénéficier du mari et de l’amant et qu’il s’appellera le libertinage. […] Affaire de mode, je le veux bien ; opinion de salon ou de sacristie qu’il fut de bon ton d’afficher ; mais aussi revirement qui est imputable à des raisons plus sérieuses et plus nobles. […] C’est une des raisons pour lesquelles le théâtre demeure encore soumis à la censure.
Quelle part faisaient-ils à la raison et à l’imagination, à l’idéal et à la réalité ? […] Ainsi ce douteur, qui se défie de ses sens, a une foi inébranlable dans sa raison, dans sa logique, dans les déductions de son intelligence. […] La littérature de l’époque est psychologique, abstraite, jalouse de satisfaire la raison. […] La prédominance de la raison ne se montre pas moins dans les œuvres purement littéraires. […] Cette prédominance de la raison, ce goût de l’abstraction ne sont pas alors près de disparaître.
Les juifs, même ceux du moyen âge, ont, du reste, raison de dire que pas un d’eux n’est Shylock ; les hommes de plaisir ont raison de dire que pas un d’eux n’est don Juan. […] D’autres Adams, créés par les poètes, incarnent, celui-ci la passion, celui-là le devoir, celui-là la raison, celui-là la conscience, celui-là la chute, celui-là l’ascension. […] Tout ce chaos de crimes, de vices, de démences et de misères, a pour raison d’être l’apparition splendide de la vertu. […] Et alors, c’est fini, la lueur s’éteint, la raison se décourage et s’en va, Lear est en enfance. […] se sentir oublié dans le départ, avoir perdu sa raison d’être ici-bas, être désormais un homme qui va et vient devant un sépulcre, pas reçu, pas admis ; c’est une sombre destinée.
— Oui, la vertu, parce qu’il faut plus de raison, plus de lumières et de force qu’on ne le suppose communément pour être vraiment homme de bien. […] Raison de ce phénomène. […] A ces raisons j’en ajouterai beaucoup d’autres non moins péremptoires pour renvoyer la connaissance du grec et du latin presque à la fin du cours des études d’une université. […] Ou il rapportera toute la connaissance humaine aux principales facultés de notre entendement, comme nous l’avons pratiqué dans l’Encyclopédie, rangeant tous les faits sous la mémoire ; toutes les sciences sous la raison ; tous les arts d’imitation sous l’imagination ; tous les arts mécaniques sous nos besoins ou sous nos plaisirs ; mais cette vue qui est vaste et grande, excellente dans une exposition générale de nos travaux, serait insensée si on l’appliquait aux leçons d’une école, où tout se réduirait à quatre professeurs et à quatre classes : un maître d’histoire, un maître de raison, une classe d’imitation, une autre de besoin. […] C’est le seul cas où nous nous soyons permis de nous écarter de notre principe général, la raison d’utilité.
Parce que la terre tremble, est-ce une raison pour qu’il ne marche pas ? […] Ce n’est donc pas une raison, parce que aujourd’hui d’autres vieilleries croulent à leur tour autour de nous, et remarquons en passant que Luther est dans les vieilleries et que Michel-Ange n’y est pas, ce n’est pas une raison parce qu’à leur tour aussi d’autres nouveautés surgissent dans ces décombres, pour que l’art, cette chose éternelle, ne continue pas de verdoyer et de florir entre la ruine d’une société qui n’est plus et l’ébauche d’une société qui n’est pas encore. Parce que la tribune aux harangues regorge de Démosthènes, parce que les rostres sont encombrés de Cicérons, parce que nous avons trop de Mirabeaux, ce n’est pas une raison pour que nous n’ayons pas, dans quelque coin obscur, un poëte.
Nous en avons déjà dit la raison, mais il ne faut pas craindre de la redire ; c’est parce que le christianisme est la perfection même des institutions religieuses, et que le genre humain ne peut avoir que le sentiment de ses besoins réels. […] J’aperçois de ce point de vue si élevé la seule vraie raison pour séparer les institutions politiques des institutions religieuses. […] Quelle raison pour refuser au premier des évêques, au successeur du prince des apôtres, quelle raison pour lui refuser l’empire entier de la religion, qui lui appartint toujours, pour le lui refuser maintenant que cet empire est devenu si distinct de tous les autres ?
Par quelle raison rejeter ceci et prendre cela ? […] Cette raison ignorante est le génie, qui reste vivant en devenant ordonnateur. […] Si la raison a jamais raison contre la force, ce doit être aujourd’hui. — C’est peu cependant. […] La couleuvre a raison ; pourquoi dissimuler ? […] et comme il sait profiter des moindres choses pour renverser la vérité avec une apparence de raison !
On ne veut pas ressembler à ce portrait, et l’on a raison. […] Esprits très cultivés, formés par le monde, c’est de la raison la plus fine qu’ils emploient pour attaquer ou pour se défendre. […] Je ne suis pas dupe de ces raisons et je ris de voir qu’on emploie tant d’esprit à faire des sottises. […] Pour Philinte, c’est encore Molière donnant à quelque ami les conseils d’une raison aimable et indulgente. […] Aucun poète, dans notre pays, n’a eu plus d’imagination, de sensibilité et de raison, ni dans une harmonie plus parfaite.
Voilà les raisons de mon silence. […] » Vous avez raison, ne nous plaignons pas encore du public. […] Elle a été frappée de vos raisons parce qu’elles sont bonnes. […] La raison. Et où est la raison ?
Personne n’a plus que lui réuni l’abondance des idées & des raisonnemens, la plénitude du savoir & de la raison, aux richesses de l’expression à la variété des tours, & sur-tout à ce sentiment intime qui sait mettre la justice & la vérité dans tout leur jour, les faire aimer même de ceux qu’il combat. […] Un ton noble & mesuré dans l’exorde, des gradations bien amenées dans le cours du discours, une chaleur qui naît de la force des raisons, des réflexions vives & pénétrantes, un pathétique qui acheve, dans la péroraison, de subjuguer le cœur, après avoir captivé l’esprit, sont des ressorts qu’il manie toujours avec un succès, fruit du génie, de l’art de le modérer & de lui donner l’essor à propos. […] Ce n’est, en effet, que par le secours de ces Auteurs consacrés par l’admiration constante de tous les siecles, qu’un Ecrivain, quelque génie naturel qu’il ait d’ailleurs, peut se former le goût & développer sa raison.
Et elle a raison. […] Et ils ont raison. […] Et il a raison. […] il a raison ! il a mille fois raison !
Elle supprimait la croyance sans engendrer la raison, c’est-à-dire qu’elle faisait plus grande la place de la déraison. […] La plus vive excitation de l’instinct sexuel, où la sagesse des peuples avait toujours vu la plus puissante source d’illusion, équivaut ici à la plus haute intuition philosophique « Divins égarements de la raison, plus brillants, plus sublimes, plus forts, meilleurs cent fois que la raison même ! […] La raison et la passion, la sagesse et l’amour sont deux. […] Cette division, que justifierait suffisamment une raison de méthode, est assez conforme à l’ordre historique. […] La raison s’en attriste et ils en deviennent eux-mêmes perpétuels et accablants.
Sa lumière a eu raison des maquillages symbolards, de leur opacité. […] La raison a trahi l’esprit, et, l’a trahi jusqu’au jour où l’esprit, pour ne point sacrifier son tout à une de ses parties, se déclara, lui-même, contre la raison. […] Gide ne voulait point plaquer sur les faits des raisons a posteriori. […] Ses raisons d’être, à ce gigolo ? […] Ils sont deux entités inconciliables, deux raisons ennemies, dont la plus dure, cette grande pétrifiée de Raison d’Etat aura le dernier mot.
A-t-il raison ? […] Il n’avait pas d’autre raison. […] La raison en est simple. […] Comme ils ont raison ! […] Il préfère être lui, et il a bien raison.
Sainte-Beuve a trop raison, je le crains. […] Sténio a raison. […] Et c’est pour cela que la raison lui a été donnée ! […] Et n’entendez-vous pas d’ici les applaudissements de la foule qui lui donnent raison ? […] N’est-ce pas là insulter à la conscience, et donner raison à l’égoïsme ?
L’esprit est l’agilité de la raison victorieuse : ici, parce que tout est puissant, tout est lourd. […] Il laisse à la chaîne la haute raison, mère des principes ; il n’a délivré que la raison subordonnée, interprète des textes. […] Cette superbe raison aspirait à se déployer sans entraves ; elle demanda que la raison pût se déployer sans entraves. […] Nul n’a plus aimé, pratiqué et loué l’usage libre et hardi de la raison. […] Dans l’une et dans l’autre, il cherche le sublime et inspire l’admiration, parce que le sublime est l’œuvre de la raison enthousiaste, et que l’admiration est l’enthousiasme de la raison.
Croce a parfaitement raison. […] Et la raison n’en est-elle pas bien simple ? […] Aujourd’hui encore je la crois non pas nécessaire, mais du moins fort utile à la concentration dramatique ; pour les raisons pratiques énoncées plus haut, et pour une raison psychologique bien plus profonde. […] Reinhardt) ont contribué plus encore que les auteurs, et précisément pour des raisons pratiques. […] Y aurait-il à cela une raison profonde, en quelque sorte mathématique ?
Par exemple, lorsqu’il dit que la raison de l’homme seule ne peut arriver à une démonstration parfaite de l’existence de Dieu, on triomphe, on s’écrie qu’il est beau de voir Voltaire prendre le parti de Dieu contre Pascal. […] Des raisons d’économie ou quelque autre motif arrêtèrent apparemment les entreprises. […] » N’avais-je pas raison, dit saint Chrysostome en s’adressant à Eutrope, de vous représenter l’inconstance et la fragilité de vos richesses ? […] Aussi eut-il la consolation, comme je l’ai dit, de faire fondre en larmes tout son auditoire, quelque aversion qu’on eût pour Eutrope, qu’on regardait avec raison comme l’auteur de tous les maux publics et particuliers. […] L’évêque Burnet avoue que ce goût, acquis en France par les courtisans de Charles II, réforma chez vous jusqu’à la chaire, malgré la différence de nos religions : tant la saine raison a partout d’empire !
Bientôt j’ai prévu qu’envahis par une horde de barbares (passez-moi le mot) ils ne laisseraient plus approcher de leur théâtre le bon goût, l’esprit et la raison. […] Il faut se défendre également de cet orgueil despotique, qui veut en dépit de la raison et des lois nous faire briser les obstacles que nous nous sommes créés nous-mêmes. […] S’il est tombé dans une effroyable décadence, c’est grâce à trois ou quatre cents billets donnés et à la doctrine romantique qui a voulu se faire un public en dépit du goût et de la raison. […] Ils deviendraient dans un tout autre genre ce que les pages de Louis XIV sont devenus, de véritables modèles ; non comme ceux-ci, d’élégance et de frivolité, mais de goût et de raison. […] Cette lueur de raison décida de son sort pour l’avenir.
Plus moderne au commencement de la querelle des anciens et des modernes, il est plus ancien à la fin, l’âge et la raison aidant, et parce que la cour a passé du côté des anciens. […] Pour les anciens, il en parle sans vrai savoir, raisonnable tant qu’il les loue en gros et par égard pour leurs partisans ; mais en vient-il aux exemples, il fait comme Desmarets de Saint-Sorlin, il donne tête baissée dans les mauvais, ou, s’il admire les bons c’est par de méchantes raisons. […] Au dix-septième siècle, sauf dans le petit cercle de Bouhours, on demandait aux auteurs le vrai, la raison par laquelle nous le discernons du faux. […] Le plus grand critique du dix-septième siècle, Fénelon, a vu dans Cicéron le vrai orné ; voilà sa raison de préférer Démosthène à Cicéron. […] S’il y à quelque différence, c’est qu’au dix-septième on raffine plus sur le sentiment, au dix-huitième sur la raison.
Pour un critique de profession, un des moyens de prouver sa raison d’être, de s’affirmer en face d’un auteur, c’est précisément de critiquer, de voir surtout des défauts. […] S’il ne suffit pas toujours, en critiquant un philosophe, de vouloir avoir raison contre lui pour se paraître à soi-même raisonnable, il suffit trop souvent, dans l’art, de vouloir ne pas être touché ne pour pas l’être ; on est toujours plus ou moins libre de se refuser, de se renfermer dans son moi hostile, et même de s’y perdre. […] Les critiques modernes ont l’horreur de la banalité, ils ont raison ; mais il n’est banal d’admirer que pour ceux qui ont l’admiration banale. […] C’est un but beaucoup plus élevé ; on peut sans doute tomber plus lourdement encore en cherchant à y atteindre, mais on ne peut pas donner cette raison de ne pas poursuivre un but, qu’il est trop haut. […] Celui qui se fâche a tort, même s’il a raison, dit le proverbe ; après tout, ce n’est pas en démolissant l’œuvre d’autrui qu’on supprimera l’admiration, c’est en faisant mieux.
Trousseau, en citant ce fait extraordinaire, ajoute avec raison : « Aucun psychologue n’aurait osé porter l’analyse jusqu’au point d’isoler la faculté d’écrire de celle de lire. […] Une localisation unilatérale serait donc un fait extrêmement remarquable ; et il y a déjà là une raison naturelle de défiance. […] On peut même en donner une raison anatomique. […] Telles sont les raisons données par M. […] Les raisons à priori ne sont donc pas suffisantes pour faire rejeter l’hypothèse de M.
Les délibérations des Chambres, considérées, ainsi que nous venons de le faire, comme organes immédiats de l’opinion, la jurisprudence des tribunaux de la justice, forment un ensemble de traditions, qui devient la loi, et que le prince promulgue avec des formes établies : c’est là seulement qu’il faut puiser la raison de l’initiative royale. […] Le berceau de cette société nouvelle n’a point été, en apparence, entouré de mystères et de merveilles ; mais c’est aussi un mystère, et un mystère terrible, que cette foule d’hécatombes humaines ; mais c’est aussi une merveille, et la plus grande de toutes, que cette suite innombrable de démentis donnés chaque jour, pendant trente années, à la raison humaine, qui, chaque jour, croyait être sûre de son fait. Enfin, l’intervention de la Providence divine a été plus visible que jamais, parce que la raison humaine a marché dans des voies plus visibles que jamais ; et c’est, en dernier résultat, le seul prodige réel qui préside toujours à la naissance des sociétés. […] Au reste, pour ne pas heurter l’ombrageuse susceptibilité de certains esprits, je vais expliquer la raison de mon regret. […] Des esprits superficiels, qui se sont arrêtés à la surface des choses, ou trop ardents et trop passionnés pour ne pas vouloir devancer le temps, ont cru que la révolution française n’avait acquis de la violence qu’en raison même de la résistance qui lui avait été opposée.
Rien de plus médité, d’une raison plus haute, plus politique et en même temps plus chrétienne dans la pensée. […] Dans ce pays, qui en avait fini avec cet abus des ancêtres, — qui se vantait de n’avoir plus d’ancêtres, — dans ce pays qui voulait tuer l’histoire du passé avec l’histoire du présent, on se battait comme les ancêtres, et pour les mêmes raisons que ces ancêtres méprisés ! […] on se battra comme eux longtemps encore, malgré les progrès, philosophique, philanthropique et patriotique, et, ce qui est une meilleure raison pour ne plus se battre que le dévouement de tout son être à la République, malgré l’affaiblissement de l’esprit militaire, depuis si longtemps insulté, et la décadence même physique de la race, visible maintenant à tous les yeux. […] et les républicains de cet âge de raison ne sont ni assez conséquents ni assez virils pour se passer de ce bijou-là ! IV Et, s’il en est ainsi, l’auteur du Nouveau Code du Duel a eu raison de ne voir dans le duel qu’un fait historique qui défie toute législation et qui a vaincu les plus puissantes.
Et cependant, si on y songeait, cette gloire d’Horace qui arrêtait ou refoulait le mépris était faite par les âmes vulgaires, et c’est même la raison pour laquelle elle avait toujours été si peu discutée… Les âmes vulgaires étaient enchantées de se reconnaître, dans Horace, sous cette expression artistement choisie qui ornait leur vulgarité… Mais que voulez-vous ? […] C’est encore le parent pauvre, mais honnête, de La Bruyère, de Boileau, de Molière, mais tempéré de raison, de malice, de gaieté, tempéré trois fois, de sorte qu’en l’aimant les gens de peu de tempérament semblent aimer la tempérance et font ainsi de leur pauvreté une vertu. […] Il avait certes raison d’être modeste. […] Du moins, l’Horace de Passy, dont la gloire est déjà baissée, sentait la patrie et pleura Sainte-Hélène… Et quant à l’autre Horace français dont Louis XIV fut l’Auguste, ce Boileau qui n’admettait pas Dieu pour être tranquille, cette âme droite, sérieuse, austère, qui tira toute sa poésie de la raison, cette maîtresse faculté de l’homme, l’Horace latin ne sert qu’à montrer combien il est grand, malgré l’imagination qui lui manque. Comparez leurs Satires, leurs Épîtres, leur Art poétique, dont l’un est un poème et l’autre une Épître aux Pisons, et vous verrez si l’esprit, la verdeur, le mordant, la raison assaisonnée ne sont pas en de bien autres proportions dans le poète français que dans le poète latin, aux grâces si sobres qu’elles en sont maigres.
… Seulement, pour ceux qui ne croient pas que la solution du problème économique soit à fleur de terre, mais à fond d’âme, dire simplement et superficiellement que les maux qui affligent l’homme, et par l’homme l’enfant et la femme, viennent uniquement de ce que la richesse n’est pas encore montée au degré qu’elle atteindra plus tard et qu’elle doit nécessairement atteindre, c’est répondre à une question morale par une raison économique, et c’est là bouleverser, en les mêlant, toutes les notions. […] Ainsi, par exemple, un esprit qui aurait voulu voir, dès le début de son travail, jusqu’à quel point il devait aller et s’arrêter, se serait demandé si la Douleur, contre laquelle la sensibilité se révolte avec tant d’énergie, n’a pas sa raison d’être, sa nécessité profonde, et si tout le progrès humain, toute la civilisation du monde, consiste à de plus en plus la diminuer et l’effacer. […] Cela est vrai en général de toutes les nations, même des nations commerçantes, à plus forte raison de la France en particulier. […] Sachant comme nous les raisons politiques, d’instinct ou de préjugé, qui s’opposent, hélas ! […] Il en appelle à l’expérience, et il a raison.
» Ce nom, d’une sonorité d’or, et que la Gloire avait encore cette raison d’harmonie pour aimer, portait peut-être dans plus d’esprits à la fois que ceux de Cuvier, de Geoffroy Saint-Hilaire et d’Ampère, et si on y réfléchit, on le conçoit. […] Telle est la raison, qui n’est pas la seule, du reste, mais qui est certainement la plus honorable pour Alexandre de Humboldt, de la popularité actuelle de son nom et de l’apparente injustice de la gloire pour des noms aussi méritants que le sien, s’ils ne le sont pas davantage. […] Ce fut un sceptique et même un sceptique contradictoire, ce qui, par parenthèse, au lieu d’une faiblesse, en fait deux ; car dans son Kosmos il doute, à une certaine place, « qu’on puisse jamais, à l’aide des opérations de la pensée, réduire tout ce que nous voyons à l’unité d’un principe rationnel », et ailleurs il assure qu’il croit au mot de Socrate : « qu’an jour l’univers sera interprété à l’aide de la seule raison », vacillement d’un esprit qui ploie également sous l’affirmation et sous le doute ! […] En somme, descripteur plus que tout autre chose, il l’est parce qu’il est voyageur et pour les mêmes raisons qu’il est voyageur, — rien de plus ! […] Tout le monde l’a exagéré, et j’ai signalé quelques-unes des raisons qui ont poussé à cette exagération universelle.
» Ce nom, d’une sonorité d’or, et que la Gloire avait encore cette raison d’harmonie pour aimer, portait peut-être dans plus d’esprits à la fois que ceux de Cuvier, de Geoffroy Saint-Hilaire et d’Ampère, et si on y réfléchit, on le conçoit. […] Telle est la raison, qui n’est pas la seule, du reste, mais qui est certainement la plus honorable pour Alexandre de Humboldt, de la popularité actuelle de son nom et de l’apparente injustice de la gloire pour des noms aussi méritants que le sien, s’ils ne le sont pas davantage. […] Ce fut un sceptique et même un sceptique contradictoire, ce qui, par parenthèse, au lieu d’une faiblesse, en fait deux, car dans son Kosmos il doute, à une certaine place, « qu’on puisse jamais, à l’aide des opérations de la pensée, réduire tout ce que nous voyons à l’unité d’un principe rationnel », et ailleurs il assure qu’il croit au mot de Socrate, « qu’un jour l’univers sera interprété à l’aide de la seule raison », vacillement d’un esprit qui ploie également sous l’affirmation et sous le doute ! […] En somme, descripteur plus que tout autre chose, il l’est parce qu’il est voyageur et pour les mêmes raisons qu’il est voyageur — rien de plus ! […] Tout le monde l’a exagéré, et j’ai signalé quelques-unes des raisons qui ont poussé à cette exagération universelle.
Quel critique enfin a signalé au public, d’une façon quelconque, l’existence d’une traduction qui met à sa portée une œuvre littéraire, comptée au premier rang dans la littérature espagnole, et qui de plus lui fait connaître une de ces prodigieuses individualités, comme on dit maintenant, d’autant plus curieuse qu’elle est inexplicable à la sagacité purement humaine de l’Histoire, mais dont, pour cette raison peut-être, l’Histoire aime peu à s’occuper. […] Je sais bien que les littérateurs, qui ne sont que littérateurs, n’en conviendront pas, ni non plus le vulgaire des hommes, mais c’est là la raison qui le prouve au contraire, si l’on veut, avec force, y penser. […] À certaines places de ce récit merveilleux où le surnaturel a complètement remplacé la nature, on voit surgir du fond de cette Contemplative, éperdue et perdue dans son Dieu, une raison plus forte que toutes ces flammes, qui met la main sur le cœur qui palpite et dit à ce cœur : « N’es-tu pas ta proie à toi-même ? […] Non, elle était encore, la femme puissamment rassise dans la raison, telle que les hommes conçoivent la raison, quand l’Extase, qui enlève l’esprit au ciel et ce corps de boue volatilisé, dans les airs, la lâchait et la mettait par terre.
Prosper Mérimée, l’auteur de Clara Gazul, de Colomba et de Carmen (ses meilleurs titres, dit-on, à la renommée), avait eu la grande vocation, cette vocation dominatrice et enflammée qu’on pourrait appeler l’idée fixe sans folie, on ne l’eût pas vu, au milieu de sa vie, je ne dis pas de romancier devenir historien, par la raison très-simple que, qui sait raconter le cœur de l’homme peut bien raconter le cœur des peuples, mais de romancier devenir archéologue, philologue, antiquaire, et finir en Raoul-Rochette après avoir commencé en Stendhal… M. […] Prosper Mérimée mériterait d’en être le président, et même le fondateur… Est-ce pour cette raison que le plus sec des critiques, Gustave Planche, de la Revue des Deux-Mondes, Gustave Planche, au nom providentiel, qui, en fait d’esprit, en était une, écrivit sur M. […] Mérimée a été une raison de plus dans ce vieux succès sur lequel il vit toujours et qui ne lui a jamais été marchandé. Une autre raison encore de ce succès chez le peuple de vaudevillistes, que nous avons le bonheur d’être, c’est la simplicité de la donnée de ces petits romans, tout en action extérieure, d’un sentiment brutal ou sinistre, et racontés avec cette impassibilité de roué qui aura toujours, en France, pays de vanité, un immense empire. […] Quoique la littérature française tienne pour nous, Français, la plus large place dans la littérature de notre temps, et que cet ouvrage soit plus particulièrement consacré à la littérature française, cependant, quand, dans les autres littératures contemporaines, marquera, à tort ou à raison, une œuvre ou un homme, nous les regarderons par dessus leur frontière… A quoi bon, d’ailleurs, parler de frontière ?
L’imagination de Shakspeare ne peut être guidée par la raison de Racine, et la raison de Racine ne peut être exaltée par l’imagination de Shakspeare ; chacune est bien en soi et exclut sa rivale : c’est faire un bâtard, un malade et un monstre, que de les mêler. […] La vertu chez nos tragiques est fondée sur la raison, sur la religion, sur l’éducation, sur la philosophie. […] On devine quel air les dissertations classiques ont dans ce pêle-mêle ; la solide raison rabat coup sur coup l’imagination sur le pavé. […] Qu’est-ce qu’une suivante qui parle avec des mots d’auteur, et qui dit à sa maîtresse demi-folle : « Appelez la raison à votre secours725 ? […] Et comme là-haut, — ces feux roulants ne découvrent que la voûte céleste — sans nous éclairer ici-bas ; tel le rayon vacillant de la raison — nous fut prêté, non pour assurer notre route incertaine, — mais pour nous guider là-haut vers un jour meilleur. — Et comme ces cierges de la nuit disparaissent — quand l’éclatant seigneur du jour gravit notre hémisphère, — ainsi pâlit la raison quand la religion se montre ; — ainsi la raison meurt et s’évanouit dans la lumière surnaturelle789.
Ne semble-t-il pas alors qu’on ait raison de réduire les plaisirs de ce genre à un simple jeu ? […] En somme, une forme est d’autant plus belle, dit avec raison M. […] Des faits journaliers nous montrent encore cette influence destructive de la raison sur l’instinct. […] Ce n’est donc pas le progrès de la raison et de l’intelligence qui peut le faire disparaître. […] On a rejeté d’excellentes rimes pour l’unique raison qu’elles sont trop nombreuses.
Rien ne peut paraître plus difficile à croire au premier abord que les organes et les instincts les plus complexes aient été perfectionnés, non par des moyens supérieurs bien qu’analogues à la raison humaine, mais par l’accumulation de variations innombrables, quoique légères, et dont chacune a été utile à son possesseur individuel. […] Aussi longtemps que les conditions de vie restent les mêmes, nous avons des raisons de croire qu’une modification, qui s’est déjà transmise pendant plusieurs générations, peut continuer à se transmettre pendant une suite presque infinie de degrés généalogiques. […] Il n’est aucune bonne raison pour que les mêmes principes qui ont agi si efficacement à l’état domestique n’agissent pas à l’état de nature. […] La concurrence vitale est une conséquence nécessaire de la multiplication en raison géométrique plus ou moins élevée de tous les êtres organisés. […] Darwin, puisqu’il ne serait plus nécessaire de supposer une série incalculable d’époques anté-siluriennes, et que le peu de variabilité que l’on constate aujourd’hui se trouverait expliqué par l’accroissement de la force d’atavisme en raison des temps écoulés.
Vous aurez beau donner des raisons péremptoires, il vous répondra ; il faudra donc encore écrire et signer, et peu à peu vous vous trouverez dans la boue. […] On eût attaqué ces raisons par des raisons contraires, une controverse se serait établie ; l’infaillibilité de l’Académie eût été mise en doute, et la considération dont elle jouit eût pu recevoir quelque atteinte parmi les gens qui ne s’occupent, que de Rentes et d’argent, et qui forment l’immense majorité dans les salons. […] Cet ami vous donne en quatre petites pages les raisons que M. […] Lequel avait raison ? […] Ils y ont porté de la raison, et voilà le grand chagrin des hommes de lettres.
Mais, apprenant que Blucher en personne s’avance pour avoir raison de l’affront de ses lieutenants, il revient sur Montmirail ; le 14 au matin, rejoignant Marmont qui tient tête à Blucher, il prend à l’instant l’offensive et fait perdre au généralissime prussien de 9 à 10000 hommes ; c’est la journée dite de Vauchamps. […] Quelle pauvre raison me donnez-vous là, Augereau ! […] Peut-on s’étonner que les nations s’identifient avec les figures de héros qui ont ainsi vécu et lutté jusqu’à l’extrémité pour leur grandeur, et qu’elles disent dans leur enthousiasme d’instinct et par une de ces raisons du cœur, supérieures à la raison même : Eux, c’est moi ! […] la partie est déjà perdue quand on en est là. » Et il y avait de belles, de spécieuses raisons de civilisation, d’humanité, à l’appui de leur thèse. […] Je ne suis pas de ces esprits qui ne comprennent qu’une chose ; je n’ai pas le goût de diviser en deux camps mes compatriotes ; il y a, je le sais, le point de vue très plausible, très légitime à bien des égards, du bon sens et de la prudence, comme il y a le parti de l’exaltation intrépide et généreuse ; mais, si large qu’on fasse la part de la civilisation générale, de la raison humaine et de la philosophie, il est des moments où l’honneur l’emporte sur tout ; où, si adouci qu’on soit, si éclairé qu’on se flatte d’être, il convient d’être peuple, de sentir comme le peuple, si l’on veut rester nation.
À plus forte raison s’il s’agit d’un journaliste. […] Il eut alors ce rare bonheur, et qu’il n’a guère retrouvé depuis, de faire une œuvre bonne et juste tout en obéissant à son démon intérieur, d’avoir raison en ayant de l’esprit, et le genre d’esprit dont il est capable. […] Mais je ne m’y arrêterai pas, pour deux raisons. […] Il se dit apparemment qu’étant toujours, sans examen, sans nul souci de l’équité, l’ennemi des puissances établies, il a des chances d’avoir raison une fois sur deux. C’est une belle proportion : qui donc est sûr d’avoir raison plus souvent que cela ?
On voit la raison de cette différence : le roi, fatigué de madame de Montespan comme eut pu l’être un vieux mari, commençait à cédera l’attrait de madame de Maintenon. […] C’était dans cette honnêteté, toute morale, que résidait la grande puissance qui devait ramener un roi dissolu à des mœurs décentes ; car la religion n’agit sur Louis XIV qu’après l’ascendant de la morale, aidée par les charmes de l’esprit et de la raison. Comment ne pas admirer la profondeur de raison et d’honnêteté qui caractérise le jugement de madame de Sévigné sur la situation de madame de Montespan, et sur les avantages qu’elle en peut retirer ! […] « Le reste (l’intimité de sa maîtresse), par quelque raison que ce puisse être, ne lui tenait plus au cœur. […] Elle se persuadait, avec raison, que la bienveillance, l’amitié même dont la marquise pénitente lui avait donné des témoignages au moment de leur séparation, laisseraient bientôt renaître les jalousies et les défiances de la marquise rentrée en faveur.
Chrétien sincère et passionné, il conçut une apologie, une défense de la religion par une méthode et par des raisons que nul n’avait encore trouvées, et qui devait porter la défaite au cœur même de l’incrédule. […] Un peu plus loin, s’adressant à la raison et l’apostrophant, il lui demande : « Jusques à quand serai-je dans ce doute, qui est une espèce de tourment, et qui est pourtant le seul usage que je puisse faire de la raison ? […] Quant aux autres, aux indifférents, à ceux qui sont destitués de foi vive et de grâce, « dire à ceux-là qu’ils n’ont qu’à voir la moindre des choses qui les environnent, et qu’ils verront Dieu à découvert, et leur donner, pour toute preuve de ce grand et important sujet, le cours de la lune ou des planètes, et prétendre avoir achevé sa preuve avec un tel discours, c’est leur donner sujet de croire que les preuves de notre religion sont bien faibles ; et je vois, par raison et par expérience, que rien n’est plus propre à leur en faire naître le mépris ». […] Il va se heurter par moments, s’aheurter (c’est son mot) aux écueils qu’il est plus sage à la raison, et même à la foi, de tourner que de découvrir et de dénoncer à nu ; il dira, par exemple, des prophéties citées dans l’Évangile : « Vous croyez qu’elles sont rapportées pour vous faire croire. […] « Il est bon, s’écrie-t-il, d’être lassé et fatigué par l’inutile recherche du vrai bien, afin de tendre les bras au Libérateur. » On n’a jamais mieux fait sentir que lui ce que c’est que la foi ; la foi parfaite, c’est « Dieu sensible au cœur, non à la raison. — Qu’il y a loin, dit-il, de la connaissance de Dieu à l’aimer !
Saint Paul lui-même, foudroyant la raison humaine au milieu de l’aréopage, met en mouvement les ressorts les plus puissans de l’éloquence. […] Si l’abbé Goujet n’avoit eu pour lui que ses argumens & quelques foibles défenseurs qu’il se fit de sa cause, il eût bientôt succombé sous le poids des raisons de ses adversaires. […] Tous ont divisé leurs sermons ; tous les ont compassé sur une citation d’une ligne ou deux, & tous divisent encore : tous citent un texte primordial, pour en faire éclore leur dessein & leurs plus belles idées : tant l’habitude a d’empire, & prévaut quelquefois contre la raison. […] Bien d’autres raisons très-satisfaisantes que le P. […] Je l’exhorte, je le presse, & je ne le quitte point qu’il ne soit rendu à mes raisons.
Après tout, c’est un grand mal sans doute si dans un temps donné il n’y a pas de grand philosophe ; mais ce n’est pas une raison pour qu’il n’y ait point d’historien de la philosophie, de même que, s’il n’y a pas de grand peintre, ce n’est pas une raison pour ne pas faire l’histoire de la peinture. […] Maintenant, en laissant même de côté le haut intérêt qui s’attache à l’homme, d’abord parce que nous sommes des hommes, et ensuite à cause de l’excellence et de la dignité de la nature humaine, en laissant de côté les questions morales et religieuses qui font de l’homme l’objet le plus élevé de la spéculation humaine, je le demande, quelle raison y aurait-il pour que les phénomènes par lesquels se manifeste l’humanité fussent moins dignes d’étude que ceux de la nature ? […] En un mot, l’accidentel, qu’Aristote rejetait de la science, est bien près d’en devenir au contraire ici le principal objet ; mais pour quelle raison ? […] Quelquefois ils naissent d’une protestation de la conscience contre les mœurs et les institutions d’un temps, et par là ils ont encore leurs raisons d’être dans le temps lui-même : par exemple, la révolution de Socrate ou celle de Rousseau ; mais il ne faut pas exagérer le point de vue des origines extérieures des systèmes philosophiques. […] Ainsi les deux histoires sont intimement liées, et il n’y a pas de raison pour que l’intérêt qui se porte vers l’une se détache de l’autre.
Ces sortes de dieux, et la raison qui tient le haut bout est d’un style très-négligé. […] On voit que chacune de leurs réponses est une satire très-forte de l’homme en société ; et l’auteur italien développe, d’une manière encore plus satirique, les raisons de leur refus. […] Il en a une bonne raison : c’est qu’il fallait inculquer au lecteur cette propriété des chèvres qui fait le fondement de sa fable. […] J’en ai dit la raison plus haut. […] La raison que donne l’aigle du besoin qu’elle a d’être désennuyée, est très-plaisante ; et l’exemple de Jupiter est choisi merveilleusement.
On peut même ajouter que les pays catholiques ont profité du reflet des lumières que les pays protestants leur ont renvoyé ; qu’un tel préjugé, enseveli par la raison dans des contrées où un clergé ambitieux n’avait plus l’intérêt ni le crédit de le soutenir, a entraîné la honte et enfin la ruine du même préjugé dans la contrée voisine, au grand déplaisir des prêtres. Il est clair, pour tous ceux qui ont des yeux, que sans les Anglais, la raison et la philosophie seraient encore dans l’enfance la plus méprisable en France, et que leurs vrais fondateurs parmi nous, Montesquieu et Voltaire, ont été les écoliers et les sectateurs des philosophes et des grands hommes d’Angleterre. […] On a raison de dire qu’il faut trois sortes d’écoles dans un pays bien policé. […] Soit raison, soit préjugé, je croirai difficilement qu’on puisse se passer de la connaissance des Anciens. […] D’ailleurs il y a dans les arts mécaniques les plus communs un raisonnement si juste, si compliqué, et cependant si lumineux, qu’on ne peut assez admirer la profondeur de la raison et du génie de l’homme, lorsque tant de sciences plus élevées ne servent qu’à nous démontrer l’absurdité de l’esprit humain.
Je suis persuadé que cette sorte d’éloquence aura plus d’éclat, plus de mouvement, plus de puissance, que n’en a jamais eu l’éloquence analogue, chez les Grecs, chez les Romains, chez les Anglais : il y a, dans la contexture et le génie de la langue française, une raison invincible, une logique nécessaire, une clarté constitutive, un sentiment de goût et de convenance, qui apportent peut-être quelques obstacles à la passion désordonnée, mais qui contiennent l’enthousiasme sur les limites où il deviendrait vertige, et qui doivent être très favorables à la discussion calme, solennelle, animée. […] Les temps où régna la parole furent les temps de l’imagination ; ceux où régna la pensée indépendante doivent être ceux de la raison. […] Il faut combattre cette erreur : la poésie est éminemment pourvue de raison, mais c’est une raison sensible, animée, dominante. […] Nous avons, de plus, exigé des vers pour reconnaître la poésie, comme si cette langue triée, à laquelle nous ajoutions la rime, constituait essentiellement la poésie ; comme si, depuis que la muse épique ne confie plus ses annales mélodieuses à la tradition orale, depuis que ses poèmes ne se chantent plus, il pouvait y avoir une raison pour écrire en vers ; comme si enfin il n’y avait pas toujours eu une partie au moins de la poésie française, celle qui affectait l’imitation de la langue grecque, qui trouvait mieux à s’exprimer en prose. […] La langue française qui, seule, entre toutes les autres n’est pas fondée sur les propres origines du peuple qui la parle, attendait peut-être l’âge actuel, l’âge où, inondée de tant de lumières, elle pourrait donner à l’homme, en même temps qu’une métaphysique élevée et pénétrante, la poésie de la raison et du sentiment.
Chaque lecteur peut les interpréter d’une façon opposée, et chaque lecteur a raison. […] Et d’une certaine manière, il avait raison. […] Jusques à quand usurperez-vous sur elles l’empire de la Raison ? […] Si la raison dominait sur la terre, il ne s’y passerait rien. […] Non pas de la raison, mais de cette même passion.
On peut bien nous présenter un Acteur ayant un pied dans le Cothurne, & l’autre dans le Brodequin ; mais tandis qu’on s’applaudira de cet accord bizarre, ce personnage n’en sera que plus ridicule aux yeux du goût & de la raison. […] C’est pour cette raison que César, aussi bon juge en fait de talens, qu’il étoit bon connoisseur en hommes, reprochoit à Térence de manquer de ce qui s’appeloit vis comica, c’est-à-dire, de cette vivacité de plaisanterie, de cette vigueur de ridicule, de ce ton pittoresque qui fait l’essence de la Comédie. […] « L’Académicien de la Rochelle condamne avec raison, dit-il, tout ce qui auroit l’air d’une Tragédie Bourgeoise.
Au reste, il nous semble que Zaïre, comme tragédie, est encore plus intéressante qu’Iphigénie, pour une raison que nous essayerons de développer : ceci nous oblige de remonter au principe de l’art. […] Mais la raison presse dans Zaïre, et chacun peut éprouver le combat d’une passion contre un devoir. […] Quant à la peinture du vice, elle peut avoir dans le christianisme la même vigueur que celle de la vertu, puisqu’il est vrai que le crime augmente, en raison du plus grand nombre de liens que le coupable a rompus.
A-t-il raison ? […] Il a tort pour le pédant, il a raison pour l’homme de goût. Tort ou raison, c’est la figure qu’il a peinte qui restera dans la mémoire des hommes à venir.
Abreuvés de christianisme dès le berceau comme du lait de nos mères, nous retrouvons en nous l’influence chrétienne, même quand nous ne la méritons plus, et cette bienfaisante influence garde les instincts de nos cœurs contre les frénésies de l’orgueil et les froides audaces de la raison. […] La première, intitulée Argument de l’autorité, renferme l’enseignement des Pères depuis Tertullien jusqu’à Saint-Thomas, et la seconde, qui porte le nom de Raison théologique, est l’examen rapide, mais concluant, des opinions qu’on atirées des livres saints contre le pouvoir temporel des rois. Cadoret réfute ces opinions avec une clarté de bon sens et une simplicité d’interprétation qui frapperont toutes les intelligences à tous les niveaux, et détermineront le succès d’un livre qui apprendra à ceux qui l’ignorent, ou rappellera à ceux qui l’oublient, combien l’Église catholique fut toujours gouvernementale, et comme, à toutes les époques de sa glorieuse durée, elle condamna la révolte et appuya ou respecta les pouvoirs constitués, pour les raisons les plus profondes, les plus politiques et les plus saintes.
Ce grand orateur, le premier qui ait réduit parmi nous l’éloquence à n’être que ce qu’elle doit être, je veux dire à être l’organe de la raison et l’école de la vertu, n’avait pas seulement banni de la chaire les concetti, productions d’un esprit faux, mais encore les matières vagues et de pure spéculation, amusements d’un esprit oisif. […] Mais Bourdaloue et Despréaux étaient tous deux sincères ; pleins de feu, ils pouvaient quelquefois se contredire, froncer le sourcil et croiser le fer en causant : ils s’estimaient, ils étaient liés au fond par cet amour du vrai, par cette ardeur de bon jugement et cette raison passionnée qui vit dans leurs écrits à l’un et à l’autre. […] Admettez que tous les Jésuites aient ressemblé à Bourdaloue pour la doctrine, ce qu’on a appelé jansénisme devenait inutile et n’avait plus de raison d’être. […] Les personnes qui rient de tout, et auprès desquelles un bon mot a toujours raison, se sont autorisées quelquefois d’une parole de Mme Cornuel sur Bourdaloue ; elle disait : « Le père Bourdaloue surfait dans la chaire, mais dans le confessionnal il donne à bon marché. » Ce n’est là qu’un joli mot de société. […] [NdA] On m’indique dans la Revue d’Édimbourg (décembre 1826) un article sur « L’éloquence de la chaire », qui paraît être de lord Brougham : Bourdaloue y est mis fort au-dessus de Bossuet par une suite de raisons qui, toutes bien déduites qu’elles sont, prouvent seulement le genre de goût et de préférence de la nation et du juge : en France, c’est le sentiment immédiat qui nous décide, et dans le cas présent il n’hésite pas.
Quelles furent les causes qui amenèrent un politique si profond, si ambitieux, si habile, émancipé et souverain depuis l’âge de quinze ans, initié dès lors aux plus grandes affaires, qui avait reçu coup sur coup en héritage des royaumes et des mondes, avait brigué et obtenu l’Empire, qui défendait, la Catholicité et aux frontières contre les mécréants, et au cœur contre les hérétiques, qui avec toutes ses couronnes recommençait presque la grandeur et l’universalité de la puissance de Charlemagne (moins, il est vrai, ce quartier du milieu qu’on appelle la France), — quelles raisons, dis-je, quels motifs véritables ramenèrent un jour à renoncer à tout cela en plein démêlé, en plein écheveau d’affaires, à se démettre à l’âge de cinquante-cinq ans, à se confiner dans un cloître, à vouloir y mourir ? […] Les vraies raisons de sa détermination finale, Charles-Quint les a dites sans arrière-pensée dans cette mémorable séance du 25 octobre 1555, tenue à Bruxelles en présence des États assemblés, lorsqu’après avoir fait faire un exposé de motifs par un de ses conseillers, il prit lui-même la parole et rendit compte de sa conduite présente en même temps qu’il résuma tout son règne, dans un discours improvisé pour lequel il s’aida de quelques notes et dont on connaît amplement la substance. […] il viendra, quelques années après, un sage appelé Montaigne qui remettra tout à sa place et à son rang dans l’estime, et qui ayant à développer cette idée, qu’un père sur l’âge, « atterré d’années et de maux, privé par sa faiblesse et faute de santé de la commune société des hommes, se fait tort et aux siens de couver inutilement un grand tas de richesses, et que c’est raison qu’il leur en laisse l’usage puisque la nature l’en prive », ajoutera pour illustrer sa pensée : « La plus belle des actions de l’empereur Charles cinquième fut celle-là, à l’imitation d’aucuns Anciens de son calibre, d’avoir su reconnoître que la raison nous commande assez de nous dépouiller, quand nos robes nous chargent et empêchent, et de nous coucher quand les jambes nous faillent : il résigna ses moyens, grandeur et puissance à son fils, lorsqu’il sentit défaillir en soi la fermeté et la force pour conduire les affaires avec la gloire qu’il y avoit acquise : Solve senescentem… » Mais entrons un peu plus avant dans les raisons qui persuadèrent à une de ces âmes d’ambitieux, si aisément immodérées, d’en agir si sensément et prudemment. […] Étant tel de sa nature, homme de prudence et de conseil avant tout, la principale ou même la seule raison de l’abdication de Charles-Quint, ce fut sa santé usée, ruinée par les fatigues, et aussi, il faut le dire, par les intempérances. […] L’inusité de semblables obsèques, une inexactitude de date qu’il suffit de corriger en avançant la scène d’un ou de deux jours pour rendre tout possible, le silence gardé par les secrétaires et les amis politiques de Charles-Quint, qui rougissaient peut-être en secret d’une semblable bizarrerie de leur maître, sont-ce des raisons suffisantes pour faire rejeter un récit qui est confirmé par celui de deux autres moines hiéronymites ?
Dans la plupart des cas, à mon sens, il y a mieux à faire : c’est de profiter de l’accroissement de connaissances et des nouvelles lumières en chaque chose, sans mettre à néant ce qui nous a été transmis de longue main et qui a ses raisons de subsister, ses racines cachées et qu’on ne sait plus bien toujours. […] Il suffit pour cela de rafraîchir la défense, de la mieux revêtir, en raison des récents et plus puissants moyens d’attaque, et de l’étayer en partie sur de nouveaux fondements, en partie sur les anciens, là où ils ont droit de subsister. […] Il y a à cela des raisons sans nombre et de tous les instants, que sentent les contemporains, qu’on respire dans l’air, dont l’impression se communique dans la tradition immédiate, et que rien ne peut suppléer. […] Il fallait obtenir du duc cette nouvelle concession, cette aggravation non mentionnée au traité, et l’on comptait bien, en dépêchant un officier entendu à la petite Cour de Mantoue, avoir bon marché d’elle et la faire consentir à la raison du plus fort. […] Ces raisons si subtiles et si pressantes sans leur donner de relâche, n’ont pu leur paraître qu’un prétexte pour les opprimer. » Pour adoucir et remettre un peu ces gens-là, dit-il, qu’on a fort effarouchés, Catinat fait proposer au roi de les désavouer officiellement, M. de Boufflers et lui, et de faire dire par l’abbé Morel qu’ils ont trop pris sur eux et dépassé leurs instructions par trop de zèle.
Plus d’une fois il y a collusion entre ces sociétés contre l’individu disqualifié pour une raison ou l’autre auprès de l’une d’entre elles ou mal vu de l’une d’elles. Si pour une raison ou l’autre, un individu est mis à l’index dans une de ces sociétés, il est du même coup mis à l’index dans les autres. […] Durkheim déclare le mensonge de groupe impossible et inexistant, par la raison que les croyances collectives, étant un produit spontané d’un certain milieu social, sont par là même naturelles et véridiques. […] Le fait d’être déterminé par un ensemble de conditions naturelles et nécessaires n’empêche pas ce mensonge d’être un mensonge et celui à qui on ment a raison de se défier du menteur. — Il en est de même pour le mensonge de groupe. […] Et l’individu a raison de se défier du groupe menteur.