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1903. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XVIII. »

Quand le culte même était si poétique, quand la prière publique était un hymne et l’auditoire une assemblée de néophytes enthousiastes, aisément devait renaître et se détacher de la foule une poésie plus haute et vraiment inspirée. […] Déjà nous avaient apparu ces sages de la haute antiquité, ces physiciens spiritualistes de la Grèce ancienne, qu’Aristote nomme théologiens, et qui, tels que les fabuleux Orphée, Linus, Musée, et plus réellement Parménide, Empédocle, célébraient en vers leurs dogmes sur la formation du monde, leurs ravissements d’amour au spectacle de la nature, et les recommandations morales qu’ils adressaient à l’homme. […] Partout, de Constantinople au village d’Arianze, chez ces artisans laborieux des villes que saint Basile nous montre si intelligents de la parole sainte et si curieux des merveilles de la nature, dans ces bourgades hautes semées sur des plaines fécondes, dans les pieuses panégyries, les assemblées, les processions fréquentes que le christianisme ramenait pour ces hommes, de tout temps amis des jeux et des solennités, n’entendez-vous pas, sous ce beau ciel des deux continents qui se rapprochent, parmi les chœurs chantants de cette race heureuse alors, retentir dans le passé cette poésie sainte et pure ? […] Mais, et ses chants l’attestent, il embrasse d’une foi vive les plus hauts mystères du christianisme, comme il en pratique les vertus secourables.

1904. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire littéraire de la France. Ouvrage commencé par les Bénédictins et continué par des membres de l’Institut. (Tome XII, 1853.) » pp. 273-290

Le poème de Roland à Roncevaux est un de ceux qui rendent le plus directement l’écho du monde chevaleresque dans notre littérature et notre poésie : les récits en prose de Villehardouin en donnent une haute idée également. […] Là-dessus chaque animal, chaque haut baron donne son avis, et chacun selon son humeur et son caractère.

1905. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De la dernière séance de l’Académie des sciences morales et politiques, et du discours de M. Mignet. » pp. 291-307

Il aurait pu marquer avec plus d’énergie le malheur qu’il y eut pour lui à y entrer, les versatilités un peu promptes qu’on lui reprocha, les influences qu’il ne savait pas écarter ; car cet homme qui, au premier abord, avait l’intelligence si haute et la parole si absolue, avait le caractère faible, ou du moins il l’eut tel dans les dernières années. […] Cousin ses airs de génie et sa haute verve, M. 

1906. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

Quand il parlait comme lorsqu’il écrivait, Fénelon se tenait plus volontiers à mi-côte et sur les collines : « Son style noble et léger, a-t-il dit de Pellisson, ressemblait à la démarche des divinités fabuleuses qui coulaient dans les airs sans poser le pied sur la terre. » On peut le dire de lui-même et en supprimant l’image de fabuleuses ; sa parole avait quelque chose de noble et de léger qui rappelle ces figures angéliques, amies de l’homme, et se tenant toujours à sa portée, qui pourraient s’enlever plus haut, qui ne le veulent pas, et qui aiment mieux, dès qu’il le faut, redescendre. […] Je crains pour vous une dévotion lumineuse, haute, qui, sous prétexte d’aller au solide en lecture et en pratique, nourrisse en secret je ne sais quoi de grand et de contraire à Jésus-Christ enfant, simple et méprisé des sages du siècle.

1907. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — III. (Fin.) » pp. 162-179

On voit par une réponse énergique de lui au maréchal de Bouillon (juin 1615) que, malgré son âge, il ne faiblissait pas devant les grands redevenus factieux, et qu’il leur disait assez haut leurs vérités : « La médisance contre ceux qui sont employés au maniement des affaires publiques, écrivait-il à M. de Bouillon, est un doux et agréable poison qui se coule aisément en nos esprits, et, quand ils en sont une fois infectés, il est malaisé que la vérité pour les défendre y soit reçue. » Il y donne la clef de sa conduite, qui dut consister souvent, en ces temps de trouble et de faiblesse, à tolérer, à souffrir un moindre mal pour en empêcher un pire : Le commandement n’est pas toujours absolu pendant les minorités. […] [NdA] Et puisqu’il est question de ces relations à demi amicales de Jeannin et de Sully, je citerai encore ce passage d’une lettre du président au cardinal Du Perron, écrite avant le voyage de Hollande : Notre Cour est ce qu’elle était à votre départ ; votre ami (Sully) y tient le haut bout, et surmonte tout le reste en autorité et crédit.

1908. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Tallemant et Bussy ou le médisant bourgeois et le médisant de qualité » pp. 172-188

Il est homme de qualité, il a toujours eu beaucoup d’esprit, et je l’ai vu autrefois en état de pouvoir espérer une haute fortune, à laquelle sont parvenus beaucoup de gens qui lui étaient inférieurs. […] Il voulait qu’on fît deux citadelles à Paris, une au haut et une au bas de la rivière, et dit qu’un roi, pourvu qu’il en use bien, ne saurait être trop absolu, comme si ce pourvu était une chose infaillible.

1909. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — II » pp. 268-284

On a ensuite, il est vrai, l’admirable seconde guerre punique, les guerres de Macédoine et la première guerre d’Asie ; mais tout ce qui suit et ce qui eût été d’un si haut intérêt, manque, les luttes de Marius et de Sylla, la rivalité de Pompée et de César, la vraie histoire politique réelle, ces époques récentes que Tite-Live savait dans leur esprit et dans leur détail par les mémoires du temps, par les récits d’une tradition prochaine, par cette transmission animée et vivante qui est comme un souffle fécondant. […] Il vaudrait mieux peut-être ne pas s’en rendre compte et se faire illusion sur son prix ; mais si je suis amené, par ce sentiment même de ma décadence intellectuelle et morale, à chercher plus haut que moi une consolation et un appui, la réflexion et la raison m’auront rendu sans doute, après avoir été cause de souffrances, le plus grand service qu’il soit possible d’en retirer.

1910. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Essais de politique et de littérature. Par M. Prevost-Paradol. »

Un jour, dans le Rapport d’un haut dignitaire, savant du premier mérite plus peut-être qu’homme de goût21, il avait été parlé avec un souverain dédain de la classe des journalistes, et comme n’étant, pour la plupart, que « de frivoles élèves d’Aristophane et de Pétrone. » M.  […] J’avais écrit sur Tocqueville dans le Moniteur et en le faisant j’avais eu en vue deux choses : témoigner d’abord, dans le journal même du Gouvernement, de mon respect et de mon estime pour un adversaire de haut mérite ; et, en second lieu, à la veille d’une grande solennité littéraire, au moment où l’on allait peut-être essayer de nous donner un faux Tocqueville, j’avais tenu a en présenter un vrai et à prendre, autant que je le pouvais, la mesure de l’homme, avant qu’il passât à l’état de demi-dieu ou de pur génie par le fait de l’apothéose académique.

1911. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourgogne, par M. Michelet »

On parle tout haut, il trouve qu’on parle trop, et qu’on est trop gai pendant qu’il est triste. […] Quelques-uns soutiennent qu’elle représente Caligula, qui, étant fils de Germanicus, avait donné dans son enfance de hautes espérances pour le bonheur de l’Empire, mais qui, dans la suite, devint un monstre.

1912. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poème des champs, par M. Calemard de Lafayette (suite et fin) »

Hésiode a le sentiment de la justice et de l’équité à un haut et souverain degré, et il l’exprime magnifiquement. […] Voici le portrait du taureau, du mezenc pur-sang, et qui rappelle les portraits d’animaux au livre III des Géorgiques ( optima torvæ forma bovis… ) : Portant haut, bien campé sur un jarret d’acier, Trapu, tout près de terre, encore un peu grossier ; Groupe longtemps étroite, et déjà suffisante ; Le rein large et suivi, l’encolure puissante, Le garrot s’évasant en un large plateau, L’épaule nette, — et forte à porter un château ; La poitrine, en sa cage, ample et si bien à l’aise Qu’il faudrait l’admirer dans une bête anglaise ; Sobre et fort, patient et dur, bon travailleur, À ce point qu’un salers à peine fût meilleur, Lent à croître, mais apte à la graisse à tout âge, Tel est le pur mezenc, taureau demi-sauvage ; Et tel voici Gaillard, roi de mes basses-cours, Sultan de mon troupeau, connu dans les concours, Lauréat de renom, vainqueur en deux batailles, Et qui n’est pas plus fier ayant eu deux médailles.

1913. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Mais aucun monarque et souverain ne s’était rencontré encore dans la situation extraordinaire de Napoléon, à la fois abdiquant et captif, — prisonnier sans avoir été pris et en quelque sorte de son propre choix, pour s’être allé asseoir au foyer de la nation son implacable ennemie ; détenu non dans une prison, mais sur le rocher le plus perdu de l’Océan ; non par la vengeance d’un seul adversaire, mais par la terreur de l’Europe entière conjurée ; et désormais élevé (seule élévation dernière qui lui manquât) à l’état de victime ; — ayant abdiqué pour la seconde fois et toujours forcément sans doute,, mais enfin de cœur comme de fait, et résigné ; ne nourrissant plus aucun espoir de retour, mais conservant jusqu’à la fin toute la sérénité de son coup d’œil, toute sa plénitude d’intelligence politique ; sevré de presque toute information actuelle, et se reportant avec d’autant plus d’impétuosité et d’ardeur aux grands événements récents ou passés, à l’histoire d’hier ou à l’histoire des siècles ; perçant de plus dans l’avenir et plongeant sur les horizons lointains avec la haute impartialité du conquérant apaisé, avec la vue épurée du civilisateur. […] Et en général, cette école de philosophes systématiques et distingués qui, dans leur classification un peu bizarre des grands hommes de l’histoire, ne voulaient voir en Napoléon dont ils méconnaissaient toute l’œuvre de création civile qu’un grand et puissant rétrogradateur, ne saurait soutenir désormais un pareil sentiment après tant de paroles de sagesse, de haute clairvoyance et presque de prophétie sociale, sorties de Sainte-Hélène, et qui révèlent un fond d’âme égal ou supérieur, s’il se peut, aux actes, et parfois meilleur.

1914. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

Il parvient, après bien des pas et des détours, jusqu’à la chambre haute où repose la jeune fille, et qui nous est décrite dans son demi-jour galant et mystique, avec toutes ses raretés et ses bibelots carthaginois ; c’est d’une chinoiserie exquise. […] Lisez tout haut le paragraphe qui suit, en le scandant comme une prose poétique, et vous serez frappé du ton et du nombre : « Souvent, au milieu du jour, le soleil perdait ses rayons tout à coup.

1915. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Daphnis et Chloé. Traduction d’Amyot et de courier »

Un jour (c’était un an avant sa mort), Eckermann le remit sur la voie en lui disant qu’il lisait Daphnis et Chloé dans la traduction de Courier :    « Voilà encore un chef-d’œuvre que j’ai souvent lu et admiré, dit Gœthe, où l’on trouve l’intelligence, l’art, le goût portés au plus haut degré, et qui fait un peu descendre le bon Virgile. […] il est dessiné en quelques traits, avec tant de précision que nous voyons derrière les personnages, dans les parties hautes, les collines chargées de vignes, les prairies, les potagers, et plus bas les pâturages, la rivière, les petits bois, et dans le lointain la vaste mer.

1916. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, — Antiquité et Moyen Âge — Par M. J. Zeller. »

Son sujet, dans sa simplicité même, est double : il s’agit de présenter et de fixer dans la mémoire deux suites, celle de la Religion et celle des Empires : « Et comme la Religion et le Gouvernement politique sont les deux points sur lesquels roulent les choses humaines, voir ce qui regarde ces choses renfermé dans un abrégé et en découvrir par ce moyen tout l’ordre et toute la suite, c’est comprendre dans sa pensée tout ce qu’il y a de grand parmi les hommes et tenir, pour ainsi dire, le fil de toutes les affaires de l’univers. » Jamais prétention plus haute ne fut plus magnifiquement et plus simplement exprimée : c’est celle, ni plus ni moins, d’un vicaire de Dieu dans l’histoire. […] Il ne se peut de pages plus frappantes dans cet ordre de croyance, de paroles plus étonnantes et plus souveraines dans leur affirmation que celles par lesquelles Bossuet nous exprime et nous figure comme il l’entend le Dieu de Moïse, qui est le Dieu de Polyeucte, le Dieu d’Athalie, le Dieu d’Eslher, tel que l’ont défini dans leur émulation pieuse ces génies de poètes religieux ; mais la définition de Bossuet reste la plus marquante et la plus haute.

1917. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre. »

Une autre catégorie moins obscure, moins confinée, et qui mériterait aussi son esquisse, à côté et tout près du ministre plénipotentiaire, c’est le secrétaire d’ambassade : à celui-ci l’ambition est permise, la porte des hauts emplois est entr’ouverte, il est sur le seuil : mais que de précautions encore ! […] Il ne faut pas que le secrétaire se presse et empiète sur son chef, qu’il devance d’une minute son moment, qu’il commence par en faire à sa tête et par se poser en personnage, sur un pied à lui, comme Chateaubriand prétendit faire à Rome avec le cardinal Fesch ; il ne faut pas qu’il laisse soupçonner ni percer, comme on l’a vu récemment chez un secrétaire revêtu d’un nom illustre (Bellune), une inclination politique différente de celle de son ministre : cela est élémentaire ; il faut qu’il vive en parfaite harmonie et ne fasse qu’un avec lui, qu’il s’efface soigneusement et qu’il s’éclipse, et en même temps toutefois qu’il se tienne tout prêt, le cas échéant, à le remplacer, à le suppléer, à faire même, s’il y a urgence, un pas décisif sans lui ; il peut, sous ce titre secondaire, être chargé par intérim de missions délicates et d’une haute importance.

1918. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. EDGAR QUINET.— Napoléon, poëme. — » pp. 307-326

Quinet, il est vrai, dit à merveille dans sa préface : « L’époque la plus riche assurément que l’histoire romaine ait présentée à l’épopée est celle où le monde antique parvint à sa plus haute unité sous la puissance du premier des Césars. […] Antiquaire par son érudition allemande, poëte et philosophe par ses vues profondes et intimes sur l’histoire de l’humanité, familier avec les idées des Niebühr et des Gœrres, épris de l’imagination pittoresque de l’auteur de l’Itinéraire, il aborde la Grèce et l’interroge par tous les points, sur son antiquité, sur ses races, sur la nature de ses ruines, sur les vicissitudes de ses États, sur ses formes de végétation éternelle ; il saisit, il entend, il compose tous ces objets épars ; il les enchaîne et les anime dans un récit vivant, fidèle, expressif, philosophique ou lyrique par moments, selon qu’il s’élève aux plus hautes considérations de l’histoire des peuples, ou selon qu’il retombe sur lui-même et sur ses propres émotions ; c’est une œuvre d’art que ce récit de voyage : le sens historique et le sens des lieux y respirent et s’y aident d’un l’autre ; l’harmonie y règne ; le souffle du dieu Pan y domine ; l’interprétation du passé, depuis les époques cyclopéennes et homériques jusqu’à la féodalité latine, y est d’un merveilleux sentiment, et elle pénètre de toutes parts dans l’âme du lecteur, sinon toujours par voie claire et directe, du moins à la longue par mille sensations réelles et continues, comme il arriverait à la vue des ruines mêmes et sous l’influence du génie des lieux.

1919. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « APPENDICE. — CASIMIR DELAVIGNE, page 192. » pp. 470-486

Mais, sans chicaner pour un titre, et en allant au fond des choses, je demanderai au poëte laquelle des sept pièces lui a été inspirée par une idée haute et grande ? […] C’est à cette naïveté qu’il devrait s’en tenir, même dans les compositions plus hautes, et il la rencontrera dès qu’il ne forcera plus à des sujets mal assortis la vocation de son talent.

1920. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — II »

Si maintenant l’on m’objecte que cette théorie conjecturale serait admissible peut-être si Racine n’avait pas fait Athalie, mais qu’Athalie seule répond victorieusement à tout et révèle dans le poëte un génie essentiellement dramatique, je répliquerai à mon tour qu’en admirant beaucoup Athalie, je ne lui reconnais point tant de portée ; que la quantité d’élévation, d’énergie et de sublime qui s’y trouve ne me paraît pas du tout dépasser ce qu’il en faut pour réussir dans le haut lyrique, dans la grande poésie religieuse, dans l’hymne, et qu’à mon gré cette magnifique tragédie atteste seulement chez Racine des qualités fortes et puissantes qui couronnaient dignement sa tendresse habituelle. […] Il est permis de supposer, malgré ce qu’on a vu plus haut, que le poëte donna secrètement à la Champmeslé quelques larmes et quelques prières.

1921. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Jean-Baptiste Rousseau »

Tantôt, flottant entre un passé gigantesque et un éblouissant avenir, égarée comme une harpe sous la main de Dieu, l’âme du prophète exhalera les gémissements d’une époque qui finit, d’une loi qui s’éteint, et saluera avec amour la venue triomphale d’une loi meilleure et le char vivant d’Emmanuel ; tantôt, à des époques moins hautes, mais belles encore et plus purement humaines, quand les rois sont héros ou fils de héros, quand les demi-dieux ne sont morts que d’hier, quand la force et la vertu ne sont toujours qu’une même chose, et que le plus adroit à la lutte, le plus rapide à la course, est aussi le plus pieux, le plus sage et le plus vaillant, le chantre lyrique, véritable prêtre comme le statuaire, décernera au milieu d’une solennelle harmonie les louanges des vainqueurs ; il dira les noms des coursiers et s’ils sont de race généreuse ; il parlera des aïeux et des fondateurs de villes, et réclamera les couronnes, les coupes ciselées et les trépieds d’or. […] Il a besoin de travailler beaucoup, car, le génie n’y étant pas, il ne fera passablement qu’à force d’étude. » Et là-dessus, tout haut on l’encouragerait fort, et tout bas on n’en espérerait rien.

1922. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Millevoye »

Il nous y montre la vierge au départ du chevalier, Priant tout haut qu’il revienne vainqueur, Priant tout bas qu’il revienne fidèle161. […] Le premier et le plus grand exemple de ce genre d’arrière-pensée, de cette duplicité de sentiments, non plus seulement gracieuse, mais pathétique et touchante, se rencontre dans Homère au chant XIX de l’Iliade, quand les captives conduites par Briséis se lamentent autour du corps de Patrocle, « tout haut sur Patrocle, mais au fond chacune sur soi-même et sur son propre malheur. » 162.

1923. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre premier. De l’amour de la gloire »

C’est donc au plus haut point de bonheur que l’amour de la gloire puisse donner, qu’il faut s’attacher pour en mieux juger les obstacles et les malheurs. […] Les hommes ne veulent pas qu’on renonce totalement à ses intérêts personnels, et ce qui est, à un certain points contre leur nature, est déjoué par eux ; de tous ses avantages il n’y a que la vie qu’on puisse sacrifier avec éclat ; l’abandon des autres, quoique bien plus rare et plus estimable, est représenté comme une sorte de duperie ; et quoique ce soit le plus haut degré du dévouement, dès qu’il est nommé duperie, il n’excite plus l’enthousiasme de ceux mêmes qui sont l’objet du sacrifice.

1924. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre III. Poésie érudite et artistique (depuis 1550) — Chapitre II. Les tempéraments »

Il ne faut donc nous arrêter à l’école de Ronsard que pour voir s’accuser les vices, les excès de la réforme, et les hautes ambitions s’effondrer par une rapide dégradation. […] Elle retombe après lui, dès son vivant, et ce sont les plus hautes parties, les plus utiles, qui devront être relevées et consolidées par Malherbe.

1925. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre 2. La littérature militante »

A travers ces hautes préoccupations, il n’oubliait pas qu’il était magistrat et chef de la justice : en même temps que ses Ordonnances réformaient les vices de la législation et de la procédure, il visitait les Parlements ; à Paris, à Rouen, à Bordeaux, il admonestait les juges, leur disait d’honnêtes et de fortes paroles, les rappelant à la probité, à l’exactitude, à la vigilance, avec un profond amour du peuple à qui la justice doit être une protection, non une charge. […] Cf. plus haut, p. 306, note 4. et p. 307, note 1.

1926. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les deux Tartuffe. » pp. 338-363

Mais il me paraît de toute évidence que le second Tartuffe, l’homme du monde, l’homme d’esprit, l’aventurier de haut vol, ne croit ni à Dieu ni à diable. […] C’est le premier Tartuffe seul qui vit pour les foules, justement parce qu’il n’est qu’une trogne haute en couleur, aux traits simplifiés et excessifs, une tête de jeu de massacre.

1927. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVI. Les derniers temps de la comédie italienne en France » pp. 311-338

(Haut à Scaramouche et au Docteur. […] Quoi, seigneur, là haut les médecins tuent aussi le monde ?

1928. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IX. Inquiets et mystiques » pp. 111-135

L’œuvre, lui serait presque facile (il n’ignore ni le platonisme de la Grèce, ni le soufisme de la Perse, ni le brahmanisme de l’Inde, ni le bouddhisme du Thibet) ; et elle serait au plus haut degré intéressante et même actuelle. […] Puis on le vit s’éloigner vers les bateaux plus vermoulus mais de plus haut bord, lesquels l’abritent aujourd’hui avec un confortable supérieur.

1929. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre I : Sensations et idées. »

Ils semblent avoir eu une très inexplicable et très antiphilosophique aversion pour admettre cette loi, dans son sens large ; comme si cette simplicité en vertu de laquelle on trouve qu’une loi est renfermée dans une plus haute, et celle-ci dans une plus haute, et ainsi de suite, jusqu’à un petit nombre qui paraissent tout renfermer, ne devait pas se retrouver dans le monde de l’esprit, comme dans celui de la matière39.

1930. (1785) De la vie et des poëmes de Dante pp. 19-42

Navire sans gouvernail et sans voiles, poussé de rivage en rivage par le souffle glacé de la misère, les peuples m’attendaient à mon passage, sur un peu de bruit qui m’avait précédé, et me voyaient autre qu’ils n’auraient osé le croire : je leur montrais les blessures que me fit la fortune, qui déshonorent celui que les reçoit. » À une sensibilité profonde et à la plus haute fierté, Dante joignait encore cette ambition des républiques, si différente de l’ambition des monarchies. […] Énée, faisant des libations à son père, voit sortir du mausolée un beau serpent, emblème de la haute sagesse de ce héros.

1931. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « La Religieuse de Toulouse, par M. Jules Janin. (2 vol. in-8º.) » pp. 103-120

Il y avait trois sortes de filles : les premières, qui devaient être damoiselles de noblesse d’épée ou de robe, pouvaient seules arriver aux hautes charges du gouvernement intérieur. […] Il est assez difficile aujourd’hui, d’après l’état incomplet des documents, de se faire une idée très précise du caractère de Mme de Mondonville ; mais tout ce qu’on sait prouve, encore une fois, que ce dut être une personne d’une haute distinction, d’un caractère ferme, élevé, née pour le commandement, et d’une grande habileté de domination.

1932. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

Marmont apprécie ce prince remarquable avec équité, avec une haute estime exempte de flatterie ; son administration y est jugée, critiquée même, et louée seulement là où il le faut. […] Après le procès des ministres, et sur l’impression favorable qu’avaient laissée les dépositions des témoins, il aurait, certes, pu rentrer en France : mais il n’était pas homme à y rentrer par la petite porte, et, de la nature qu’il était, il n’y pouvait reparaître que la tête haute.

1933. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Ducis. » pp. 456-473

Tout en s’accommodant avec bonheur de cette condition bourgeoise, il y faisait entrer sans trop d’effort de hautes pensées, et sa modestie domestique prenait un caractère de grandeur morale : Mon père, dit-il quelque part, à propos de je ne sais quel détail de conduite, mon père, qui était un homme rare et digne du temps des Patriarches, le pratiquait ainsi ; et c’est lui qui, par son sang et ses exemples, a transmis à mon âme ses principaux traits et ses maîtresses formes. […] Lui-même vieux, à la haute stature, de complexion robuste et rustique, il ressemblait assez à un vieux chêne à demi dépouillé et rugueux, où l’abeille a déposé en un creux son miel.

1934. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — II. (Suite.) » pp. 149-166

Ici la scène s’agrandit, et la question prend une portée plus haute. […] En ce qui le concerne particulièrement, trois faits principaux se détachent et le montrent publiquement en scène avec son caractère de force, de prudence et de haute fermeté.

1935. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

Assis en ce lieu sublime et d’où il embrasse tout l’horizon, il ne se met point à discourir sur la formation du monde ; ce sont de ces sujets à garder pour le sommet de l’Etna ; mais il médite sur les ruines mêmes de la Grèce ; il se demande quelles sont les causes qui ont précipité la chute de Sparte et d’Athènes, et ces considérations d’une haute et sommaire histoire, pleines de vigueur et environnées de lumière, nous montrent à la fois ce qui manque dans les deux sens à l’estimable ouvrage de l’abbé Barthélemy. […] On releva dans le discours de Barthélemy quelques néologismes : il disait en parlant des États généraux et des espérances, déjà troublées, qu’ils faisaient naître : « La France… voit ses représentants rangés autour de ce trône, d’où sont descendues des paroles de consolation qui n’étaient jamais tombées de si haut. » La singularité de cette phrase, selon la remarque de Grimm, fut fort applaudie : Barthélemy inaugurait à l’Académie le style parlementaire et ce qu’on a tant de fois répété des discours du trône.

1936. (1903) Zola pp. 3-31

Il avait dans l’idée de peindre des gens de haute classe, des bourgeois, des ouvriers, des artistes, des paysans, comme tout romancier plus ou moins réaliste, et il trouvait ingénieux et de nature à donner un air scientifique à ses ouvrages, du moins aux yeux des commis-voyageurs, d’établir entre ces différents personnages des liens imaginaires et tout arbitraires de parenté et d’alliances. […] Ainsi s’était déformé et comme avili le romantisme aux mains d’un homme qui n’était pas capable d’en comprendre les parties hautes et qui était trop prédisposé à en saisir comme avec ravissement les aspects vulgaires, ou bien plutôt qui n’en pouvait comprendre que les dehors et était parfaitement inapte à en pénétrer le fond.

1937. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre III. Le Bovarysme des individus »

La part d’inconscience qui entre dans l’exercice de son activité la plus haute explique d’autre part comment l’homme de génie risque de prendre le change sur son destin. […] De son incompétence à l’égard des tâches les plus communes il a su conclure à un raffinement qui ne le destinait qu’aux plus hautes.

1938. (1913) Le bovarysme « Troisième partie : Le Bovarysme, loi de l’évolution — Chapitre I. Le Bovarysme de l’individu et des collectivités »

Il suffit pour s’en rendre compte do jeter un regard sur tout ce que l’homme acquiert par le moyen de l’éducation, depuis le langage jusqu’aux notions scientifiques les plus complexes, jusqu’aux jouissances esthétiques les plus hautes. […] Au contraire, des organismes, dont les formes ancestrales n’ont jamais été fixées à aucun moment de la durée, se montrent toujours capables de métamorphoses malgré leur haut degré de perfection.

1939. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « I »

Ces traits d’esprit révèlent une belle passion pour les lettres, et il faut avoir de soi une bien haute estime pour traiter les autres sur ce ton. […] Je tiens à très haut prix son goût, son talent et ses œuvres.

1940. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IV : M. Cousin écrivain »

Aussi, lorsqu’on veut admirer son style, ce n’est point dans de hautes spéculations métaphysiques qu’il faut l’étudier, mais dans la discussion des vérités moyennes. […] Un peu plus haut, vous n’avez pas remarqué un autre mot de théâtre : derrière les ombres du trépas ; c’est qu’il est sauvé par la simplicité des expressions qui l’entourent : quoi qu’il arrive, tout sera bien.

1941. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre V : M. Cousin historien et biographe »

Cousin est une aristocratie, et la haute naissance, il est vrai, enseigne la fierté, parfois la grandeur d’âme, toujours l’élégance et les belles manières ; avec la richesse elle donne la sécurité, le loisir, le goût pour les occupations de l’esprit ; elle fait des hommes du monde, des hommes de guerre, des hommes de cour, et quelquefois des hommes de cœur. […] Il allait finir, et se rappelle « qu’il doit y avoir au château d’Eu un portrait de Mme de Longueville, haut de vingt-deux pouces et large de dix-huit, provenant de la vieille collection de Mademoiselle. » Et il couronne le tout par le témoignage d’un gentilhomme qui vit Mme de Longueville après sa conversion.

1942. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VII : Théorie de la raison par M. Cousin »

Dans les hautes mathématiques, on l’exprime, on le met en équation, on compare ses diverses formes, on le calcule, on s’en joue. […] Ce sont là tous les procédés employés plus haut pour former les axiomes, employés dans le même ordre, avec le même effet.

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