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1112. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. Anecdotes. » pp. 123-144

» — « Point du tout, je vous l’ai dit : vous serez alors gouvernés par la seule philosophie, par la seule raison. » Le tour de La Harpe, l’un des convives, arrive cependant ; il s’était tenu un peu à l’écart : « Voilà bien des miracles, dit-il enfin, et vous ne m’y mettez pour rien. » — « Vous y serez (lui réplique Cazotte) pour un miracle tout au moins aussi extraordinaire : vous serez alors chrétien. » Sur ce mot de chrétien, on peut se figurer l’exclamation et le rire ; les figures s’étaient rembrunies, elles se dérident : Ah ! […] Cette lettre ne figure point au nombre de celles qui furent imprimées dans le Rapport de Courtois (rédigé par Laya), parce que ce représentant, dit la note, eut la faiblesse de la rendre à La Harpe.

1113. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Mémoires de Daniel de Cosnac, archevêque d’Aix. (2 vol. in 8º. — 1852.) » pp. 283-304

Cosnac, à son entrée dans cette petite cour de Conti, a d’abord à essuyer plus d’un dégoût ; il n’est pas distingué du prince : Cet abbé (dit de lui Choisy), sous une figure assez basse, avait tout l’esprit, toute la hauteur et toute l’industrie d’un Gascon qui veut faire valoir les qualités qu’il n’a pas aux dépens de celles qu’il a. […] Ce qui frappe et attriste en le lisant, c’est de voir combien tout ce monde, que de loin on se figure si élégant et si spirituel, et qui l’était, a des vues basses et toutes domestiques.

1114. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — I. » pp. 389-410

Je voudrais, à mon tour, repasser sur quelques points et marquer, comme je l’entends, les traits de cette sèche, exacte et assez haute figure. […] Ce n’est ni Joseph, ni ses frères, ni les divers groupes semés çà et là au second plan du tableau : la figure principale entre toutes celles de la caravane, et qui se détache en relief du milieu de ce ciel rougissant et enflammé du désert, c’est le chameau, qui est le centre de l’ensemble et véritablement le pivot.

1115. (1899) Esthétique de la langue française « Le cliché  »

Que l’on se figure donc un atelier typographique où les casses, organismes géants, contiennent non pas des lettres, non pas des mots entiers, comme on l’a expérimenté, mais des phrases ; cela sera l’image de certains cerveaux : « A…, destiné à la noble carrière des armes, recevait une éducation virile, et se préparait à porter dignement le nom de son père […] Sans images abstraites, la littérature, identique à la vie, serait, comme la vie, incompréhensible ; elles représentent les points lumineux d’un poème, d’un paysage ou d’une figure .

1116. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre premier. La solidarité sociale, principe de l’émotion esthétique la plus complexe »

Un simple rayon de soleil ou de lune nous touche s’il évoque dans notre pensée les figures souriantes des deux astres amis. […] D’après le docteur Hammond de New-York, l’odeur de sainteté n’est pas une simple figure de rhétorique ; c’est l’expression d’une sainte névrose, parfumant la peau d’effluves plus ou moins agréables au moment du paroxysme religieux extatique.

1117. (1888) La critique scientifique « La critique et l’histoire »

Qui ne mesure, à l’énoncé seul de ce caractère de vérité, la supériorité des figures humaines montrées ainsi, sur les meilleurs dessins de personnages fictifs, dans les romans et dans les drames ? […] L’histoire ne nous fournit sur les mobiles, sur les paroles des personnages qu’elle raconte, que des indications incertaines, fondées sur des relations de témoins toujours inexacts, incomplets, altérant inconsciemment ou non la vérité, et rendant mystérieuses et brouillées les plus grandes figures du passé.

1118. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

On la reconnaît à ces détails précis et vrais, à ces touches de pourpre qui mettent le sang de créatures vives aux ombres bleuâtres des romantiques de Berlin et de Stuttgard, à la simplicité et à la fermeté de la langue, à un retour constant au décor primitif de toute poésie, l’oiseau, la fleur, le ciel, — à l’apparition des figures traditionnelles de la légende allemande, la Loreley, l’empereur Barbe-rousse, le Tannhaeuser, l’image miraculeuse de la cathédrale de Cologne. […] Depuis Goethe, personne, en Allemagne, n’a su mettre dans ses vers des figures de femme aussi candides et gaies, aussi individuelles et humaines, dessinées avec un art aussi sur, aussi caché et aussi souple.

1119. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

Cette terre qui a été la Gaule, et où ont régné les Vellédas, a, catholiquement et historiquement, pour patronnes deux figures augustes, Marie et Jeanne. […] On y a utilisé tous les bronzes York, Cumberland, Pitt et Peel ; on a, pour la composer, désencombré les places publiques d’un tas de cuivres non justifiés ; on a amalgamé dans cette haute figure toutes sortes de Henris et d’Edouards, on y a fondu les divers Guillaumes et les nombreux Georges, l’Achille de Hyde-Park a fait l’orteil ; c’est beau, voilà Shakespeare presque aussi grand qu’un Pharaon ou qu’un Sésostris.

1120. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre I. La critique » pp. 45-80

Edmond Pilon — a étudié tour à tour les figures curieuses du passe et du présent. […] ) — Que de fois le professeur qui chicanait un jeune poète sur ses audaces démontrait seulement qu’il ignorait l’usage des tropes de rhétorique, et que ce qu’il considérait comme une faute n’était qu’une « figure de mot ».

1121. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — La rentrée dans l’ordre »

N’envisageant ici que l’abbé Pierre parmi les figures multiples de la trilogie, je tiens à constater que pour nous, il disparaît parfois sous les vagues énormes du récit. […] Le lévite, les joues fraîches encore de jeunesse, a l’âme suffisamment dévirilisée et flétrie : Il n’est plus un homme distinct, mais une simple figure dans la pâle multitude des gens d’église.

1122. (1902) La formation du style par l’assimilation des auteurs

Néanmoins la tempête de Virgile fait bonne figure, ne s’oublie pas et demeure personnelle. […] Citons un extrait : Le Prince de V…, s’il faut admettre cette étrange princerie, disparut, environ ce temps, de la scène du monde où, si longtemps et pour néant, il s’était gonflé afin de faire figure de personnage. […] « On prétend, dit-il, que c’est une belle figure de rhétorique ; peut-être aurait-on plus raison, si on l’appelait un défaut. […] Vous trouverez deux ou trois détails pour caractériser chacun d’eux, expressions de figure différente, habillements dissemblables, etc. […] Les cours de littérature se contentent de présenter l’antithèse comme une figure de pensée qu’ils opposent aux figures de mots.

1123. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Il est d’Émile Lévy et figure aujourd’hui au Musée de Versailles. […] La fierté, — voilà le trait essentiel de sa figure morale. […] L’impression d’ensemble d’un livre comme l’Ensorcelée, son chef-d’œuvre peut-être, c’est une figure, celle de l’abbé de La Croix-Jugan, le prêtre chouan et vendéen. […] » dit le Germain ; « ce sont ceux qui tombent quand elle fait sa toilette. » Rien de plus nettement, de plus minutieusement observé que ces figures. […] J’ai voulu indiquer les touches de pathétique qui faisaient le charme de cette ferme figure, qui l’attendrissaient, qui l’humanisaient.

1124. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « AUGUSTE BARBIER, Il Pianto, poëme, 2e édition » pp. 235-242

Le poëme de M. de Lamartine nous rendait la pure lumière du ciel d’Italie ; mais les autres points plus solides de la réalité, tout ce qui était marbre, figures peintes ou hommes vivants, nous ne l’avions pas.

1125. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Mignet : Histoire de la Révolution française, depuis 1789 jusqu’en 1814. 3e édition. »

de ces deux solutions si conformes mais si diversement exposées du même problème historique, l’une figure à mon esprit le spectacle de ces constructions géométriques, à la fois élégantes et hardies, qui sont nées comme de toutes pièces dans la tête de l’inventeur ; l’autre plutôt me rappelle ces mouvements gradués d’une analyse moins ambitieuse, ces transformations qu’on quitte et reprend à son gré, et auxquelles, chemin faisant, l’esprit se complaît si fort, qu’il ne se souvient du but qu’à l’instant où il l’atteint.

1126. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — II »

lorsqu’il s’adresse à des temps plus rapprochés et mieux connus de nous à ceux de Cromwell et de Louis XI, par exemple, n’est-il pas évident qu’il les altère, sans beaucoup de scrupules, au gré de son caprice, et qu’il est, avant tout, inventeur d’intrigues, conteur d’aventures, créateur de figures originales et tour à tour terribles, grotesques ou ravissantes, en un mot romancier et poëte ?

1127. (1874) Premiers lundis. Tome II « Adam Mickiewicz. Le Livre des pèlerins polonais. »

Les formes des livres saints sont celles qu’il affecte ; lui qui autrefois exhalait ses patriotiques douleurs dans les Sonnets de Crimée, ou, comme dans Konrad Wallenrod, semblait emprunter à Byron ses vaporeuses figures, aujourd’hui il écrit en simples versets comme l’apôtre, il parle en paraboles à l’imitation des Évangiles, et distribue aux bannis dans le désert l’humble pain d’une éloquence populaire et forte.

1128. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Contes de Noël »

Telle année, il était, cette nuit-là, avec la tahïtienne Rarahu ; telle autre, avec Fatou-Gaye, la petite négresse ; et, en remontant toujours, avec la Smyrniote Àziyadé, avec la Chinoise Litaï-pa, avec la Lapone Kouroukakalé, avec la Montmartroise Nana, et avec beaucoup d’autres encore… Evocation de petits paysages nocturnes, très intenses et congruents à chacune de ces figures féminines.

1129. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vielé-Griffin, Francis (1864-1937) »

Francis Vielé-Griffin s’est emparé de tout ce qu’il y a de fécond pour l’âme du voyageur dans notre Touraine actuelle ; il la fait revivre dans ses poèmes avec une grâce touchante, il lui donne une figure émue ; mais souvent les rythmes essentiels lui manquent, qui eussent pu ajouter quelques sourires immortels à la vieille nourrice de

1130. (1887) Discours et conférences « Discours lors de la distribution des prix du lycée Louis-le-Grand »

Je me figure voir assis là, parmi vous, le critique qui, vers 1910 ou 1920, fera le procès du XIXe siècle.

1131. (1897) Manifeste naturiste (Le Figaro) pp. 4-5

Par l’entremise de ces figures nous ̃ avons connu que le monde terrestre nourrit des héros éternels, qu’ils songent, ceux-ci, ténébreusement, au flanc des montagnes et qu’il suffirait d’un grand homme afin d’en accoucher la terre.

1132. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préfaces de « Han d’Islande » (1823-1833) — Préface d’avril 1823 »

Il lui suffira de dire qu’il n’est pas d’image grotesque, de sens baroque, de pensée absurde, de figure incohérente, d’hiéroglyphe burlesque, que l’ignorance industrieusement stupide de ce prote logogriphique ne lui ait fait exprimer.

1133. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Aristophane, et Socrate. » pp. 20-32

Si l’on retrouve quelque part ce dernier, son enjoûment, son aimable désordre, ses bouffonneries, ses transperçans & cyniques, c’est sur le théatre de notre comédie Italienne ou sur celui de la Foire ; théâtres de tout temps en possession de relever les ridicules célèbres, de contrefaire la figure, la voix, les gestes, les manières de ceux qu’on juge devoir être l’objet de l’amusement du public.

1134. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre V. Le mouvement régionaliste. Les jeunes en province » pp. 221-231

Seul le soleil, tentant quelque suprême assaut, Ensanglante à présent la Lice et Saint-Nazaire ; Où les cerviers du Nord tous en vain s’écrasèrent, Des femmes lentement rêvent près des berceaux… Douce monte une nuit orientale et chaude… Montfort, ton œuvre est morte et sa cendre est à l’Aude, Les midis à leur tour ont chassé tes effrois… Et, — la lune courbée en profil de tartane, — Tout le ciel étoilé tend un blason d’orfrois Qui figure l’orgueil de la Terre occitane !

1135. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre premier. »

Cela rappelle un peu le peintre qui mettait au bas de ses figures, d’un coq, par exemple, ceci est un coq.

1136. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 1, idée generale de la musique des anciens et des arts musicaux subordonnez à cette science » pp. 6-19

L’art poetique enseignoit la mécanique de la poesie, et il montroit ainsi à composer regulierement des vers de toute sorte de figure.

1137. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 14, de la danse ou de la saltation théatrale. Comment l’acteur qui faisoit les gestes pouvoit s’accorder avec l’acteur qui récitoit, de la danse des choeurs » pp. 234-247

Qu’on se figure le vieillard, l’enfant, la femme, et le jeune homme des choeurs témoignans, ou leur joïe ou leur affliction ou leurs autres passions, par des démonstrations propres et particulieres à leur âge comme à leur sexe.

1138. (1860) Ceci n’est pas un livre « Les arrière-petits-fils. Sotie parisienne — Premier tableau » pp. 180-195

… tu te figures que ça m’arrange, cette vie-là ?

1139. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Gabrille d’Estrées et Henri IV »

Henri, que les gravures du temps représentent sous la figure d’un bouc, Henri, le Faune couronné, n’était pas seulement le libertin affolé qui courait après toutes les femmes, au dire de toutes les chroniques de l’époque, de tous les mémoires, de toutes les chansons.

1140. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Jules Vallès » pp. 259-268

Il n’avait pas que quelques types, que deux ou trois curiosités, deux ou trois variétés de la même figure.

1141. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Louandre »

Nous avons vu dernièrement ce qu’était devenu, dans un de ces moules étroits et chétifs, la grande figure de saint Anselme reproduite par Charles de Rémusat.

1142. (1902) Le critique mort jeune

Avec un goût très sûr, il a évité tous les périls auxquels l’exposait cette peinture et rejeté les vulgaires artifices qui, par l’intervention de quelque figure connue, auraient transformé son conte en faux roman historique. […] Justus de Corpoy, noble homme et modérateur du consistoire de Montauban, on retient surtout le dessein principal de l’auteur, qui était, à ne s’y pas tromper, de peindre des couleurs les plus crues quelques vénérables figures de protestants. […] Il me semble qu’il faut dans toute société comme dans tout tableau une figure centrale sur laquelle se fixe d’abord l’attention, et qui donne aux autres, leur valeur. […] Hugues Rebell n’ait réussi une inimitable figure de femme. […] Je m’étonne que des adversaires déclarés du roman naturaliste n’aient point reconnu dans ce livre toutes les figures de l’ennemi.

1143. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Introduction, où l’on traite principalement des sources de cette histoire. »

Mais le ton mystique de ces discours ne répond en rien au caractère de l’éloquence de Jésus telle qu’on se la figure d’après les synoptiques. […] L’expression de « royaume de Dieu », qui était si familière au maître 56, n’y figure qu’une seule fois 57. […] J’eus devant les yeux un cinquième évangile, lacéré, mais lisible encore, et désormais, à travers les récits de Matthieu et de Marc, au lieu d’un être abstrait, qu’on dirait n’avoir jamais existé, je vis une admirable figure humaine vivre, se mouvoir.

1144. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Théâtre » pp. 83-168

Elle avait une de ces figures minables, comme il semble qu’il y en ait eu au moyen âge, après les grandes famines, avec des yeux dont le dévouement jaillissait comme de ceux d’un chien battu. […] Le rond et jovial acteur, sur les planches, avait chez lui, pour l’audition d’une pièce, une figure d’une impénétrabilité grognonne, et qui peu à peu prenait quelque chose de la face mauvaise de ces gras mandarins qu’on voit, sur des potiches du Céleste Empire, ordonner des supplices. […] C’est une détermination prise… je n’y puis rien. » Un peu touché toutefois par nos tristes figures, il ajoute : « Que Lireux vous lise et fasse son rapport, je vous ferai jouer, si je puis obtenir une lecture de faveur. » Il n’est encore que quatre heures.

1145. (1836) Portraits littéraires. Tome II pp. 1-523

Martine, si je ne m’abuse, est le portrait vivant de cette bonne Laforesta, à qui Molière lisait ses comédies, et dont il consultait la figure pour prévoir le sort de ses ouvrages. […] Le souvenir de Martine nous demeure en mémoire comme une des meilleures figures de la Kermesse, de Rubens. […] Tel qu’il est, c’est une figure intéressante et vraie, mais qui excite parfois les larmes aussi bien que le sourire. […] La comtesse de Sunderland est un caractère très habilement jeté : c’est une figure mélancolique très ingénieusement placée entre le roi, le ministre et le médecin ; elle s’élève jusqu’aux plus hautes régions de la poésie, et colore la pièce tout entière d’un rayon lumineux d’idéalité. […] Elle était gloutonne, elle sera gourmande ; elle demandait un spectacle varié, bruyant, des figures nombreuses et pressées, le déroulement rapide d’un paysage infini, l’entassement inattendu des épisodes, une fois ramenée à sa jeunesse première, elle voudra des lignes harmonieuses, des groupes ordonnés savamment, des contours serrés de près, des figures distinctes, étudiées individuellement, douées d’une physionomie ineffaçable.

1146. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre premier. — Une leçon sur la comédie. Essai d’un élève de William Schlegel » pp. 25-96

Au genre purement poétique appartient le comique arbitraire45, j’entends par là les inventions gaies qui procèdent de l’imagination libre du poète, les situations impossibles, les figures fantastiques et surtout les fous de cour46, avec leur sottise et leur esprit, leurs excentricités et leur sagesse, l’insignifiance de leur action dramatique et l’audace sensée de leurs paroles. […] J’arracherai le voile qui cache aux Français la vraie figure de leur poète favori, non pour faire tomber tout leur enthousiasme, mais pour l’éclairer et l’épurer, et s’ils continuent à appeler Molière le plus grand des poètes comiques, messieurs, sachons être indulgents pour une nation spirituelle qui ne connaît pas la véritable valeur des mots, parce que le ciel lui a envié l’esprit philosophique, je veux dire ce besoin de logique et de définitions qui est le commencement de la sagesse. […] Seulement, ils regardent ces fautes comme si légères, que, loin d’en faire à Molière l’objet d’un reproche sérieux, ils l’excusent, ils le louent presque d’avoir négligé l’intrigue au profit des caractères, à peu près comme si on approuvait un peintre de s’être affranchi, dans ses tableaux, du soin de composer et de grouper toutes les figures avec art, afin de pouvoir concentrer son étude sur la ressemblance de chacune d’elles avec son modèle. […] Le poète nous présente, il est vrai, tout ce qu’il y a de plus extraordinaire ou même de plus incroyable ; il se permet souvent, dès l’entrée, une grande invraisemblance, telle que la parfaite conformité de deux figures ; mais il faut que tous les incidents qui dérivent de cette première donnée, en paraissent la suite nécessaire.

1147. (1879) À propos de « l’Assommoir »

Blonde, rose, figure parisienne, très éveillée, le nez légèrement retroussé, la bouche petite et rieuse, un petit trou au menton, les yeux bleus, très clairs, avec des cils d’or. […] Les critiques sont tous présents ; ils ont l’air graves comme des gens qui s’apprêtent à tailler une plume en lame de poignard ; les directeurs des divers théâtres attendent le succès ou l’échec, pour savoir sur quel ton ils monteront dorénavant leur répertoire ; parmi les figures connues, on remarque MM.  […] Gervaise se cachant la figure. […] On se figure qu’il va chasser des sujets et des types de la littérature : il ne veut qu’ouvrir à tout le monde les portes du théâtre et du roman, afin que tout ce qui est puisse y entrer.

1148. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

La vie inférieure, végétative ou bestiale, sera moins belle que la vie supérieure, morale ou intellectuelle ; mais, encore une fois, ce qui importe, c’est la vie, et mieux vaut faire vivre devant nos yeux un monstre, malgré le caractère instable et provisoire de toute monstruosité dans la nature, que de nous représenter une figure morte de l’idéal, un composé de lignes abstraites comme celles d’un triangle ou d’un hexagone. […] L’esthétique de la nature n’est pas dans telle ou telle figure particulière, dans tel ou tel dessin particulier, mais dans le rapport de tous les dessins et de toutes les figures des choses, et c’est pour cela que telle correction de détail peut être une déformation monstrueuse à l’égard du tout ; il ne faut pas ressembler à un dessinateur qui voudrait rectifier et simplifier les ramifications sans nombre du cerveau d’un Cuvier, afin de produire un meilleur effet pour l’œil. […] Mais un fusil Gras, un sabre, c’est pour nous le pantalon rouge et trop large du soldat qui passe dans la rue, avec sa figure souvent rougeaude et mal éveillée de paysan qui sort de son village.

1149. (1774) Correspondance générale

Alfred Sensier nous a communiqué, outre la lettre à Le Monnier qui figure plus haut, quelques piquants billets à Suard ; c’est ainsi encore que le regretté M.  […] Transformez cet Amour en un génie de la guerre, et vous n’aurez plus qu’une seule figure douce et pathétique contre un grand nombre de natures fortes et de figures terribles. […] Elle est jeune, elle est d’une figure agréable ; elle a quelque talent. […] Voir ces deux figures tome I pages 422 et 423. […] Allusion au Fabricant de Londres, drame en cinq actes et en prose, Paris, 1771, in-8 ; cinq figures de Gravelot.

1150. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Poésies d’André Chénier »

Il s’était, en quelque sorte, intercalé chez lui, entre le poëte aimable et jeune qu’on se figure et le poëte iambique et vengeur de la fin, un citoyen énergique, armé sur ses droits, gardant de la candeur, mais y joignant fierté, âpreté, de l’indignation, un Vauvenargues en colère.

1151. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Appendice. — Un cas de pédanterie. (Se rapporte à l’article Vaugelas, page 394). »

Armand Paulin, l’ami médecin que nous perdions le 7 septembre 4 857, était une figure originale et une nature avant tout sympathique.

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