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1996. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid, (suite.) »

Il y a quelques années, on eût été assez embarrassé de répondre ; et, à voir les contradictions à son sujet, les enchevêtrements inextricables de la légende et de l’histoire, il y avait tel savant espagnol qui en était venu à un scepticisme complet sur la vie et sur l’existence même du glorieux personnage. […] C’est alors que Rodrigue, l’exilé de Castille, commença à mener sa vie de condottiere et d’aventurier qui lui valut tant de renom, et où il finit par s’acquérir, à force de bravoure et de ruse, une belle souveraineté dont il était investi quand il mourut, celle de Valence. […] J’ai omis plus d’un détail odieux de la vie du Cid, détails que l’on doit surtout, il est vrai, aux historiens arabes, mais que la chronique espagnole a enregistrés. […] La première partie du poème, et la plus considérable, comprend toute la vie du Cid depuis son départ, comme banni, de la Cour d’Alphonse, jusqu’à la conquête de Valence et à sa rentrée en grâce auprès de son roi qui marie ses deux filles. […] Plaise à Dieu et à sainte Marie que je puisse encore de ma main marier ces miennes filles, et qu’il m’accorde du bonheur et quelques jours de vie, et que vous, femme honorée, vous soyez de moi servie ! 

1997. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Appendice. Discours sur les prix de vertu »

Cette année, Messieurs, l’Académie n’a pas d’action d’éclat à célébrer et à couronner ; elle a mieux, si j’ose dire : elle a des existences, des vies tout entières dévouées au bien à récompenser et à raconter devant vous. […] Mme Navier a été en rapport avec la mère des trois Scheffer, femme profondément respectable, qui a eu dans sa vie des moments douloureux. […] Elle n’a jamais pensé à ce qui brille, et elle ne s’attendait certes pas que le nom de Scheffer ferait jamais épisode dans sa vie. […] Aujourd’hui, quel que soit le régime matrimonial, soit dotal, soit commun, la veuve est admise à la jouissance des droits qui ne comprennent pas moins d’un demi-siècle : autant dire toute sa vie. […] L’état le plus naturel à l’homme qui étudie, comme à celui qui compose avec suite, même dans l’ordre de l’imagination, et qui par conséquent a besoin de longues heures de travail, est encore la vie domestique, régulière, intime.

1998. (1868) Alexandre Pouchkine pp. 1-34

Vivant au milieu de l’aristocratie, il voulut pénétrer dans la vie intime du paysan. […] Tu n’es pas né pour la vie des sauvages ; tu ne veux de la liberté que pour toi. […] Ses images toujours pleines de vérité et de vie sont plutôt indiquées que développées, et c’est avec un goût tout à fait hellénique qu’il dirige l’attention du lecteur. L’exposition du poème, la description du site, la peinture de la vie des bohémiens n’occupent que dix-sept vers, et cependant que manque-t-il au tableau ? […] parce qu’il n’a jamais vécu que d’une vie factice, parce qu’il n’a vu que du strass artistement taillé.

1999. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Discours préliminaire, au lecteur citoyen. » pp. 55-106

 : comme si la Morale évangélique nous ordonnoit de nous haïr, & si le dogme d’une autre vie étoit effrayant pour l’homme de bien ! […] Peu contenus d’avoir travaillé à la rendre plus malheureuse, en tâchant de briser les liens qui la soutiennent, & d’anéantir les charmes qui l’attachent à la vie, ils se sont efforcés de la rendre vile & méprisable à ses propres yeux. […] Qu’il ait osé imprimer, avec la véracité qu’on lui reconnoît, que j’ai composé un Livre d’athéïsme ; que, mis en prison à Strasbourg, je m’occupai, pendant ma captivité, à faire des Vers infames ; je n’ai qu’un mot à répondre : Je n’ai jamais écrit sur l’athéïsme, que pour m’élever contre les Athées ; de ma vie je n’ai été mis dans aucune prison ; de ma vie je n’ai vu Strasbourg que sur la carte. […] Helvetius naquit à Paris, qu’il y fut élevé, qu’il y fit, tout le temps de sa vie, son séjour ordinaire, & l’Auteur de l’Ouvrage posthume déclare n’y avoir séjourné qu’un certain nombre d’années. […] Qu’un Ecrivain empoisonne la vie d’un homme honnête, qui n’a d’autre tort que d’avoir écrit de la Prose plate ou de mauvais Vers, cet Ecrivain est un méchant.

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