Les ressources de la création, que ce soit Dieu qui crée dans la nature, ou l’homme qui crée dans l’art, sont si complexes et si mystérieuses, que toujours, en cherchant bien, quelque composé nouveau vient déjouer nos formules et troubler nos méthodiques arrangements. […] Le flot politique vint donc très à propos pour couvrir l’instant de séparation et délier ce qui déjà s’écartait. […] Malgré les diversions inévitables, les sourires donnés à la foule et reçus, le monde devint comme une plage solitaire de Leucate à cette Sapho désespérée ; et sa plainte éternellement déchirante répète à travers tout : Malheur à moil je ne sais plus lui plaire, Je ne suis plus le charme de ses yeux ; Ma voix n’a plus l’accent qui vient des cieux, Pour attendrir sa jalouse colère ; Il ne vient plus, saisi d’un vague effroi, Me demander des serments ou des larmes Il veille en paix, il s’endort sans alarmes, Malheur à moi ! […] s’il ne venait pas !
Examinons ces vers de M. de Régnier : Mon Âme, les vois-tu venir ? […] Mon Âme, les vois-tu venir ? […] Pauvre Âme, les vois-tu venir ? […] Pauvre Âme, les vois-tu venir, Espoirs, Désirs et Souvenirs, Ces doux frères que te ramène Une amertume bue à la même fontaine ? […] Regarde, les voici qui viennent Une à une, les anciennes, Et du plus loin qu’il te souvienne, Pauvre Âme, Ombre de la Tour morne aux murs d’obsidiane.
Il agit noblement en repoussant le bien qui lui venait d’une main étrangère, et, sans yeux, il vit plus juste que les hommes éclairés, en croyant qu’on pouvait tenir tête au conquérant auquel n’avaient pu résister les plus puissantes armées et les plus grands généraux. […] L’infortuné général Dupont, dit-il de lui au moment de la trêve qu’il vient d’obtenir, jusque-là si brillant, si heureux, rentre dans sa tente, accablé de peines morales qui le rendent presque insensible aux peines physiques de deux blessures douloureuses. […] Dupont était venu au secours de Mortier à Diernstein : Védel n’allait venir au secours de Dupont que lorsqu’il ne serait plus temps ! […] Cette heure fatale n’est pas encore venue, mais déjà plus d’un symptôme alarmant l’annonce à qui voudrait bien l’apercevoir.
Toutefois, ce concert flatteur de regrets qui s’adressaient à la mémoire de l’amie de d’Alembert n’aurait laissé d’elle qu’une idée un peu vague et bientôt lointaine, si la publication qu’on fit, en 1809, de deux volumes de Lettres d’elle, n’était venue la révéler sous un aspect tout différent, et montrer non plus la personne aimable et chère à la société, mais la femme de cœur et de passion, la victime brûlante et dévorée. […] Mme Du Deffand crut devoir prendre ses précautions, et lui dicta assez peu délicatement ses conditions là-dessus, avant de la faire venir près d’elle ; pour quelqu’un qui appréciait si bien son esprit, c’était bien mal connaître son cœur. […] Je ne parle pas des déjeuners du dimanche de l’abbé Morellet, qui ne vinrent, je crois, qu’un peu plus tard. […] J’en dis de même sur la mort de M. de Mora. » M. de Mora était venu en France vers 1766 ; c’est alors que Mlle de Lespinasse l’avait connu et l’avait aimé. […] « Il ne prétend à rien moins, disait La Harpe, qu’à remplacer Turenne, Corneille et Bossuet. » Il serait trop aisé après coup et peu juste de venir faire une caricature de M. de Guibert, de cet homme que tout le monde, à commencer par Voltaire, considéra d’emblée comme voué à la grandeur et à la gloire, et qui a tenu si médiocrement la gageure.