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11. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » pp. 506-508

Que d’entonner sur sa flûte jolie Triste Chanson qui finit par, hélas ! […] Ce derniers mots, sans cesser, il répete, Tantôt assis sur le bord d’un ruisseau, Tantôt couché dessus la tendre herbette, Tantôt le dos appuyé d’un ormeau, Onc ne mena, Berger, si triste vie : Du doux sommeil il ne fait plus de cas ! […] Il n’est Berger qui son mal ne regrette, Et près de lui Bergeres du hameau Viennent chanter, filant leur quenouillette, Pour consoler ce triste Pastoureau.

12. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Mme Desbordes-Valmore » pp. 01-46

… Les rêves tristes du passé n’existent plus pour moi. […] En 1836 (vingt ans après sa triste aventure), Marceline écrit à son amie, la chanteuse Pauline Duchambge, qui venait d’être lâchée, si j’ai bien compris, par le père Auber : « Tu es triste ? Ne sois pas triste, mon bon ange, ou du moins lève-toi sous ce fardeau de douleurs que je comprends, que je partage. […] Dans cet état, on perd la triste faculté qu’ont les « heureux » de sentir le malheur en dehors du moment où il les frappe, et de l’allonger par l’appréhension et par le souvenir. […] Qui aura jamais poussé l’amour triste plus loin que moi pour eux ?

13. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

Dieu préserve mes amis de cette triste habitude ! […] Byron fut triste, mais bien moins qu’il ne l’a dit. […] Là encore, il suit le cours de ses tristes pensées. […] « Que les jours et les nuits sont tristes ! […] Chose plus triste, et qui pourrait l’oublier ?

14. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Th. Dostoïewski »

Les lecteurs reconnurent en ces livres frustes le don suprême de susciter des émotions nouvelles ; l’on y sentit une âme farouche et sombre, interprétant le spectacle de la vie et l’agitation des âmes en sensations primitives ou barbarement subtiles ; et le sérieux profond, l’âpre signification humaine d’écrits aussi tristes qu’Humiliés et offensés, Crime et châtiment n’échappa à aucun de ceux que sollicite le penchant à comprendre ce qu’ils lisent. […] Ces spectacles et ces récits, brouillés encore de l’incohérence, et de l’oppression des rêves qui les interrompent, forment la matière d’étranges livres ; dénués de toute poésie expresse, sombres, tristes, sales et bas, ils évoquent sourdement comme une haute fantasmagorie où les rues, les maisons et les êtres, d’abord stables ou marchants, vacillent tout à coup et planent, ombres ou noirs profils de songes. […] L’indulgence amoureuse de Natacha, le laid cynisme du prince Valkofski, la rage de Raskolnikotf, ou sa soif de pitié, la triste imprudence de Svidrigaïloff, sont les thèmes d’infinies et enchevêtrées variations. […] Comme, au bout du compte, la raison hésite à condamner celui qui, étant mauvais et complaisant sans inquiétude pour tout ce que ses instincts l’incitent à assouvir, sourd, aveugle, insensible, fut triste cependant, puis étonné à de plus hauts appels, sut payer de sa vie sa tentative vaine d’être noblement heureux. […] Car le dédain de toute hiérarchie sociale, ce reniement des apparences humaines qui ne consent pas à distinguer même entre les meilleurs et les pires par un manque singulier d’approximation et d’examen, ne va pas chez Dostoïewski sans une profonde pitié et un triste amour des hommes.

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